Le Louvre : un palais royal face à la ville
p. 89-110
Texte intégral
1La situation du Louvre au cœur de Paris aujourd’hui relève d’un compromis relativement récent où le palais semble clairement défini par rapport au tissu urbain qui l’entoure, à la fois juridiquement et formellement. Le palais est entouré par des circulations piétonnes et des jardins, qui constituent le « domaine du Louvre et des Tuileries » et qui isolent le Louvre de son environnement urbain, soulignant ainsi son caractère de monument. Ces dispositions relèvent d’une convention arrêtée en 1911 et qui définit une répartition entre les services de « palais nationaux » et ceux de la ville1.
2Sous l’Ancien Régime, la situation était profondément différente : la métamorphose du petit château de garnison féodal en demeure moderne pour un souverain dans sa capitale n’avait pu se faire qu’au prix d’une lutte constante contre la ville environnante qu’il fallait annexer pour s’agrandir. Lors de la construction sous Philippe Auguste, vers 1190, le caractère rural du site avait permis de bâtir comme on l’entendait mais deux siècles plus tard, lorsque Charles V entreprit de faire du Louvre une résidence royale, le château était déjà cerné par la ville. De plus, après le retour de François Ier de captivité et sa décision de s’établir principalement à Paris, le rapport entre le château et la ville ne s’exprima plus seulement en termes de maîtrise de foncière ou de facilité d’accès, mais devint aussi un enjeu symbolique. Le château, transformé en « palais » par la reconstruction totale menée par Pierre Lescot entre 1546 et 1556, devint aussi l’un des signes de la présence monarchique à Paris. La situation perdura même après le départ du roi pour Saint-Germain-en-Laye en 1671 puis Versailles en 1682. Seule la Révolution vint profondément changer la donne, avec le retour du roi, retour qui est paradoxalement le signe d’un affaiblissement sans précédent du pouvoir dans la capitale.
3Pour analyser les liens entre le Louvre et la ville à la fin de l’Ancien Régime, les sources, très différentes d’une période à l’autre en quantité comme en qualité, n’offrent pas entièrement les mêmes possibilités. Durant la Renaissance, les sources royales sont quasiment inexistantes et il faut chercher dans les délibérations d’autres institutions (religieuses ou municipales). La situation change à partir du xviie siècle quand l’administration des Bâtiments du roi laisse de nombreuses archives sur son action : c’est le cas en particulier sous Colbert, surintendant de 1664 à 1683, puis sous le marquis de Marigny et le comte d’Angiviller, directeurs des Bâtiments de 1749 à 1772 et de 1774 à 1790. L’interaction entre le palais et la ville est dans tous les cas le fruit d’une démarche complexe : si le pouvoir royal est naturellement toujours présent, il faut aussi faire la part des puissantes institutions parisiennes. Enfin, sur la fin de la période étudiée, l’importance des initiatives privées semble ouvrir un nouveau chapitre de l’histoire urbaine du Louvre.
Une approche autoritaire du rapport entre le Louvre et son environnement
Acquérir les terrains
4La méthode la plus simple pour assurer le développement du palais passait par l’acquisition des parcelles nécessaires. Au cours du xviie siècle, le pouvoir d’expropriation du roi s’affirma, suivant un mouvement que l’on peut constater dans tout le royaume2, et, au Louvre, il n’y a pas de cas connu de refus par un propriétaire de céder son bien lorsque le pouvoir royal le lui demandait. La comparaison entre deux grandes périodes d’acquisition permet cependant de mesurer les difficultés rencontrées et les évolutions sur un siècle : entre 1561 et 1569, un important domaine foncier fut constitué pour permettre le projet du jardin et du palais des Tuileries voulu par la reine Catherine de Médicis ; entre 1659 et 1667, les travaux de poursuite de la Cour carrée du Louvre obligèrent à plusieurs acquisitions de terrains.
5L’achat des biens nécessaires pouvait s’avérer délicat pour une monarchie souvent à cours de liquidités, d’où l’idée de recourir, aussi souvent que possible, à une procédure « par permutation ou eschange, bonne recompense […] commode et utile, en assiette de terre ou revenu sur [le] domaine » royal, selon la formule employée par François Ier lorsqu’il souhaita faire l’acquisition d’une maison dans le quartier des Tuileries pour sa mère Louise de Savoie en 1519. L’expertise de la valeur des biens à échanger fut confiée à la chambre des Comptes et aux trésoriers de Paris qui devaient tenir compte des « améliorations faites de neuf » par le propriétaire de la maison des Tuileries, François de Neufville, ce qui laisse supposer que l’estimation ne concernait pas seulement la valeur d’achat, mais aussi un dédommagement sur les investissements récents. La conclusion de l’échange octroya à Neufville la propriété et les droits seigneuriaux sur les terres de Chanteloup près de Montlhéry et se fit probablement par un acte notarié (qui n’a pas été conservé), objet de publicité par lettres patentes, scellées de cire verte et donc à effet perpétuel3. La même procédure fut employée du temps de Louis XIV pour l’acquisition de l’hôtel de Frontenac, situé au centre de la Cour carrée (fig. 2), conclue par un dédommagement sur les taxes perçues à Montrichard, Bléré et Montlouis4. Dans les mêmes années, l’achat de l’hôtel de Souvré obligea le roi à débourser l’importante somme de 90000 livres, ce qui explique que la procédure de l’échange et compensation ait été privilégiée5.
6Mais l’acquisition des terrains n’était qu’une étape de la maîtrise foncière qui obligeait aussi le roi à négocier les droits seigneuriaux sur les biens qu’il avait achetés6. Rappelons que le principal de ces droits, le cens, n’avait connu aucune réévaluation depuis le Moyen Âge, était de très faible rapport, mais que d’autres droits (au moment des successions ou des ventes) pouvaient s’avérer plus intéressants. L’imbrication de ces droits autour du palais compliquait alors la situation. Trois censives jouaient un rôle important autour du Louvre : la première, la plus considérable était celle de l’évêché puis archevêché de Paris. Elle comprenait la plupart des terrains entourant la Cour carrée et ceux situés entre le Louvre et les Tuileries7. Dans ce dernier quartier, venait cependant s’intercaler le fief de Saint-Honoré dit aussi « fief des Treize Arpents », qui s’étend de part et d’autre de la rue Froidmanteau (fig. 1)8. La troisième censive était celle de la puissante église voisine de Saint-Germain-l’Auxerrois. Jusqu’au milieu du xviiie siècle, le roi paya par ailleurs au petit prieuré de Saint-Denis-de-la-Châtre, situé dans l’île de la Cité, un cens pour la surface de terrain correspondant au château médiéval, ce qui prouve qu’il devait être difficile de récupérer ces droits féodaux9. La monarchie fut pourtant parfois en position de force pour dédommager les seigneurs censitaires, par une procédure de substitution. Catherine de Médicis convertit ainsi les cens perçus par l’hôpital du Quinze-Vingts sur les maisons qu’elle acquit pour bâtir son palais par des rentes sur l’hôtel de Ville. À partir du xviie siècle, c’est cependant une seconde voie qui est privilégiée, que l’on pourrait qualifier de remembrement de censive. La plus importante de ces opérations concerne la censive de l’archevêché qui fit l’objet d’un échange avec le roi, après une longue procédure de dix ans10. Annoncée par un arrêt du conseil du 31 décembre 1678, elle obligea à expertiser environ huit cent maisons et fut conclue par un acte notarié le 28 août 1687 ; un arrêt du Conseil avait approuvé les opérations d’évaluation et ordonné l’exécution de ce contrat le 6 mai précédent. Le but principal de cette opération, du point de vue du pouvoir royal, était bien « l’enceinte du dessein du Louvre et du palais des Thuilleries11 », alors que l’archevêché semble surtout à avoir cherché à régulariser et agrandir sa censive par des cessions royales ponctuelles réparties sur plus de 49 rues.
7Il serait intéressant de connaître le détail de la négociation entre le pouvoir royal et les propriétaires ou les seigneurs censitaires ; celle-ci n’a malheureusement laissé aucune trace écrite et seules quelques allusions dans les accords définitifs permettent de formuler des hypothèses. Le paiement des droits des Quinze-Vingts en rentes de l’hôtel de Ville n’était certainement pas une très bonne affaire pour l’hôpital qui ne l’accepta que sous la pression de la Reine12. L’irrégularité de ce type de placement explique assez naturellement la réaction des Quinze-Vingts, mais ils n’étaient guère en position pour négocier, d’autant que les maisons concernées étaient déjà détruites au moment où la transaction fut conclue13.
Fig. 1. – Dumoutier, Plan du fief des Treize arpents, plume et lavis, vers 1730, Bibliothèque de l’Institut, ms. 1039, fol. 79,

Légende : le fief des Treize Arpents correspond aux îlots où les parcelles sont dessinées en détail.
© Guillaume Fonkenell.
© RMN/ Bibliothèque de l’Institut.
L’élaboration de la procédure par arrêt du Conseil
8Le roi devait aussi lutter contre les pratiques spéculatives : sachant que son bien devait à terme entrer dans l’emprise du domaine royal, un particulier pouvait être tenté d’en augmenter la valeur en y effectuant des travaux et agrandissements, susceptibles d’en faire monter l’évaluation. En effet, comme le montre l’exemple de la maison des Tuileries sous François Ier, la pratique semble avoir été d’intégrer dans l’évaluation un dédommagement pour les investissements récents qui n’auraient pas encore été amortis par l’usage. Pour lutter contre cette pratique, le pouvoir décida à partir de 1624 de définir l’emprise du projet du Louvre, de limiter tous les travaux dans les bâtiments situés à l’intérieur et d’interdire les constructions neuves. La procédure passa par un arrêt du Conseil qui s’appuyait sur une délibération antérieure qui remonterait au milieu du xvie siècle :
« Ayant convié de nous faire représenter les plans et desseins pour la construction de notre dit château, et autres logements nécessaires pour notre commodité et notre suite, qui furent faits et arrêtés après bonne et meure délibération du règne du Roy Henry Second que Dieu absolve, en la forme et figure qui est ci-attachée sous le contrescel de notre chancellerie, avec ferme résolution de ne laisser ou souffrir faire a aucune personne pour quelque cause et sous quelque prétexte que ce fut aucun bâtiment dans et au dedans les alignements dud[it] dessein, mais comme les succès des affaires sont ordinairement bien différents de ce projeté en première délibération14. »
9Le recours à des plans remontant au règne d’Henri II prête à débat, sachant que ces documents n’ont pas été annexés à l’arrêt. En effet, les deux plus anciens plans de parchemin conservés, aujourd’hui connus sous le nom de plans Destailleur (du nom du collectionneur qui les possédait au xixe siècle, avant leur entrée au cabinet des Estampes de la Bibliothèque nationale), datent seulement du règne d’Henri IV15. Dans tous les cas, le texte de 1624 ne s’appuie sur aucun arrêt ou aucun texte contraignant antérieur, mais seulement sur des documents graphiques et il est donc tentant de penser que c’est la première fois qu’une telle procédure était menée au Louvre16. L’arrêt définit un « enclos et pourpris » dont les limites ne font malheureusement l’objet d’aucune description précise et au sein duquel les constructions neuves et les réparations de maisons en ruines étaient subordonnées à un « commandement » exprès du roi. Par ailleurs, les Trésoriers de France devaient faire une évaluation de l’ensemble des maisons, destinée à servir de base en vue d’une acquisition à venir. Les lettres patentes de cet arrêt sont scellées de cire jaune et l’acte est donc transitoire : il devait en théorie s’éteindre avec l’acquisition de la dernière maison nécessaire.
10Cependant, l’histoire du Louvre jusqu’à la fin de l’Ancien Régime fut scandée par des arrêts analogues à celui de 1624 qui fut ainsi renouvelé par une ordonnance du 31 octobre 1660 portant interdiction de bâtir sans autorisation dans « le pourpris du Louvre », elle-même confirmée le 20 novembre suivant par une ordonnance plus générale portant sur les abords de tous les bâtiments royaux. Le 13 février 1664, un arrêt du conseil expropria les terrains nécessaires à l’extension du palais des Tuileries. Cet arrêt est un peu particulier au sein de la série, car il s’agit de récupérer des terrains appartenant au roi, mais concédés sous le règne de Louis XIII, à une date où la poursuite des travaux n’était plus envisagée. Les bénéficiaires eurent un mois pour partir et purent récupérer les matériaux de démolition17. Enfin, le 20 août 1667, un nouvel arrêt du Conseil vint remplacer celui de 162418. Le pourpris était cette fois défini de manière très large puisqu’il allait de Saint-Germain-l’Auxerrois jusqu’au couvent des Feuillants. Cet élargissement allait de pair avec l’extension sans cesse croissante du projet du Louvre que montrent deux plans du quartier, levés par l’architecte Louis Le Vau, où les maisons nécessaires aux travaux furent dessinées minutieusement. Le premier, datable de 1660 (fig. 2), montre une tentative pour limiter le développement du palais à l’ouest. Une rue habilement percée dans la parcelle de l’hôtel d’Épernon relie les deux palais. Le deuxième, en 1663 (fig. 3), obligeait déjà à faire l’acquisition de toutes les maisons entre le Louvre et les Tuileries et les grands projets de 1669 et 1674 montrent une emprise analogue19.
11Au xviiie siècle, les arrêts se renouvelèrent. Le 13 décembre 1717, l’arrêt de 1667 est remis en cause. Un nouvel arrêt fut passé en 1758 au moment où l’on dégageait le pied de la Colonnade du Louvre des constructions qui l’encombraient20 (cahier couleur, ill. IX) et révisé à son tour en 176721. Ce dernier arrêt est motivé par la reconstruction urgente de trois maisons le long de la rue du Coq, dans le quartier bordant la façade nord de la Cour carrée, les deux premières appartenant aux Célestins et la troisième à l’architecte Barreau de Chefdeville.
Fig. 2. – Louis Le Vau, Plan parcellaire du quartier du Louvre, 1660, plume et lavis, Arch. nat., F21 3567, pièce 8,

© musée du Louvre/ Angèle Dequier.
Fig. 3. – Louis Le Vau, Plan général d’achèvement du quartier du Louvre (détail), 1663, plume et lavis, Arch. nat., F21 3568, pièce 9,

© musée du Louvre/Angèle Dequier.
12À côté de ces arrêts généraux, des arrêts particuliers pouvaient être passés pour négocier tel ou tel terrain. C’est le cas pour une maison sise rue de Poulies le 17 février 165522, pour l’hôtel de Rostaing et la maison dite du Caillou le 19 janvier 166123, ou pour l’hôtel de Longueville, le 29 mars 166224.
13Ces textes étaient revêtus de tous les signes de l’autorité. Comme la plupart des arrêts relatifs à l’urbanisme ou à l’aménagement de la voirie, ils furent passés en présence du souverain, comme le confirme la mention « le Roi étant en son conseil » (sauf pour les arrêts particuliers). Par ailleurs, la procédure d’évaluation des biens concernés ne faisait pas l’objet d’une expertise contradictoire, mais reposait entièrement dans les mains de l’administration des Bâtiments du roi (à partir de 1667). Les arrêts précisaient bien qu’aucune autre juridiction ne pouvait intervenir dans ces affaires, ce qui était sans doute une manière de mettre en garde le Parlement de Paris, généralement compétent sur les contentieux relatifs à la voirie25.
14Pourquoi une telle multiplication des arrêts ? Le peu d’efficacité de ces textes peut être une explication et les ordonnances et arrêts pris au cours des années 1660, alors que le chantier du Louvre battait son plein, avaient sans doute pour but de réaffirmer régulièrement la portée de l’arrêt inaugural de 1624. Mais il y a aussi une autre raison : ce type d’arrêt engageait implicitement le pouvoir royal d’une manière qui n’avait pas été prévue à l’origine et qui obligea à des modifications. En effet, lorsque l’autorisation de réparer n’était pas accordée, l’administration entreprenait alors une procédure d’acquisition. Le roi se retrouva ainsi en possession d’un patrimoine foncier de peu de valeur et dispersé au sein du quartier (fig. 4). Il tenta de le rentabiliser en y logeant les services nécessaires à la cour (« logements de fonction », en quelque sorte, écuries, service des postes, garde-meuble) ou en les louant à des particuliers. Dans tous les cas, l’arrêt entraînait une lourde gestion administrative avec expertise des Bâtiments du roi pour les mutations, les baux et les travaux26. De ce point de vue, la définition d’un « pourpris » de grandes dimensions, comme celui arrêté en 1667, dut se révéler une charge et la définition la plus précise possible du périmètre touché par la procédure fut l’une des causes du renouvellement des arrêts. Ainsi, celui de 1758 « ne s’expliqu[ait] pas assez généralement au sujet de toutes les maisons qui doivent entrer dans le plan général du Louvre et de son équarrissement27 ». Par ailleurs, en 1762, le contrôleur général des Finances s’inquiéta de la portée de ce texte et de ce qu’il engageait comme dépense et les architectes des Bâtiments du roi durent aller lui expliquer de quoi il retournait28. Enfin, ces arrêts produisirent un effet pervers : ils bloquèrent le développement du quartier autour du palais, entraînant indirectement sa dégradation, puisque les réparations et les modifications exigeaient systématiquement des autorisations. Le quartier autour du Louvre devint « hors commerce29 », ralentissant l’activité économique. L’insécurité de la rue Champfleury, transformée en « une espèce de cul-de-sac très obscur pendant la nuit et très peu sûr [où] il a été commis pendant l’hiver plusieurs vols » fut encore dénoncée après 178930. Il est significatif que l’arrêt de 1667 ait été aboli au moment où le jeune Louis XV fut à nouveau installé aux Tuileries. Cet arrêt avait abouti à dégrader l’environnement du palais du souverain.
Fig. 4. – Plan des propriétés appartenant au roi autour du Louvre, vers 1750-1770, Arch. nat., O1 1667C, pièce 470,

Légende : les maisons appartenant au roi sont en grisé.
© Guillaume Fonkenell.
15Au total, quel bilan peut-on tirer de ces arrêts ? Les acquisitions les plus importantes ont eu lieu du temps de Louis XIV pour permettre la construction de la Cour carrée et elles sont antérieures à l’arrêt de 1667. Les arrêts de 1758 et 1767 ont surtout permis le dégagement de la façade nord du Louvre et l’alignement de la rue du Coq dont la dernière maison est acquise par le roi en 178331. En revanche, leur objet principal, la création d’une place régulière devant la colonnade du Louvre, est resté lettre morte32. Entre décembre 1772 et 1773, on se résigna à terrasser cet espace, délimité du côté du quai par un petit mur de soutènement et à en faire le pavage33.
Une tentative de co-gestion entre la monarchie et la ville
16Face à l’échec d’une politique de développement autoritaire du Louvre, la monarchie fut tentée de faire appel à des collaborations avec d’autres institutions et en particulier avec la Ville de Paris34. Le contrôle étroit que le roi exerçait sur l’administration municipale, notamment au niveau des élections, peut faire douter de la possibilité d’une forme de collaboration. Cependant, la Ville, en dépit de sa dépendance, n’était pas entièrement privée d’autonomie. L’investissement de plus en plus grand de Paris dans les finances royales au cours du xvie siècle en fit à partir du siècle suivant le principal pourvoyeur de la monarchie lorsqu’elle devait emprunter de l’argent. Chaque nouvel emprunt exigé par le roi était l’occasion pour la municipalité de négocier sur les demandes du souverain. Surtout, la Ville pouvait user de l’arme redoutable de la procrastination.
17C’est ainsi que lorsque François Ier décida de moderniser le Louvre après son retour à Paris en 1527, il entreprit un important programme de transformation des logis à l’intérieur du château et la construction de nouvelles dépendances. La municipalité devait contribuer à ce programme en modifiant les quais de la Seine qui longeaient le Louvre : jusqu’alors, l’activité de halage qui se faisait en rive droite devait en effet s’interrompre au niveau du Louvre et il fallait dételer les bêtes pour les faire rentrer dans l’avant-cour méridionale du château médiéval. Par ailleurs, le roi souhaitait faire rectifier la rue d’Autriche, ce qui obligeait à acquérir et à détruire une maison en saillie sur cette rue. Il annonça ses intentions par des lettres missives (complétées par des lettres patentes) en mars 1528, mais l’administration municipale commença par ajourner toute décision, arguant que le sujet n’était pas à l’ordre du jour de sa réunion35. Le roi dut donc réitérer sa demande le 7 septembre 1529 et la Ville ne passa le marché pour les travaux que le 1er août 1530. Ceux-ci comprenaient des travaux de terrassement le long du rempart, mais aussi un ouvrage plus compliqué destiné à racheter le pendage du terrain : la rue d’Autriche descendait jusqu’à la Seine où elle se terminait par un abreuvoir, bien au-dessous du niveau du quai et il fallait donc un pont pour l’enjamber. En décembre 1536, le roi envoya deux lettres coup sur coup pour rappeler à la ville de mener au plus vite les travaux du pont par lequel le quai devait franchir le fossé de Charles V, nécessaire pour son « ébat » au bois de Boulogne et en vue du mariage du roi d’Écosse36. En septembre 1538, le roi ordonna encore l’achèvement du quai cette fois plutôt du côté des Tuileries. Comme le sujet disparaît entièrement des délibérations du Bureau de la Ville après cette date, on peut supposer que les travaux s’achevèrent peu après 1538 et que le roi a donc mis plus de dix ans à obtenir entièrement gain de cause37.
18Comme le montre le cas du quai du Louvre, c’est à l’aménagement des abords du palais que le roi souhaitait le plus souvent associer d’autres institutions. À partir du début du xviie, le souverain avait pris en charge l’entretien du pavage de l’ensemble des rues de Paris et constitué une administration chargée de ces travaux de voirie (intégrée au xviiie siècle au service des Ponts et Chaussées). Cette administration n’était compétente que pour l’entretien, la pose des pavés restant à la charge du propriétaire mitoyen. Le pouvoir royal n’eut de cesse de vouloir se débarrasser de ces charges de mitoyenneté, comme en 1769 dans les dépendances du palais38. Lorsque le pied de la Colonnade du Louvre fut débarrassé des maisons qui l’encombraient, les Bâtiments du roi se contentèrent de paver une bande au pied de la façade et estimèrent que ce n’était pas à eux d’aménager l’ensemble du reste de la place. Trudaine, intendant des Finances chargé des Ponts et Chaussées, dut à cette occasion rappeler encore que son administration assurait seulement l’entretien, mais que la pose revenait aux propriétaires des bâtiments limitrophes39 et c’est finalement sur la Ville que reposa la charge du premier pavage40.
19La cogestion entre le pouvoir royal et la municipalité s’explique enfin par l’existence d’équipements partagés entre les deux institutions. Ainsi, l’assainissement de la rue Saint-Honoré dont les eaux se déversaient en torrent dans la rue Froidmanteau, occasionnait bien des nuisances. Pour y remédier, on envisagea en 1769 de créer un égout enterré qui traverserait la Cour carrée41. Officiellement, c’est le roi qui fut à l’origine de cette opération42, mais la correspondance des Bâtiments du roi montre que c’est en fait le duc d’Orléans qui poussa à cet assainissement auquel il était doublement intéressé en tant que propriétaire du Palais Royal, mais aussi de l’Opéra voisin43. Trois administrations durent collaborer à cette opération : les Bâtiments du roi pour la section de l’égout au travers de la Cour carrée et du jardin de l’Infante, la Ville de Paris, pour la section de la rue Saint-Honoré au Louvre le long de la rue du Coq, et les Ponts et Chaussées, à titre exceptionnel, pour le pavage. La construction de cet égout obligea à faire le redressement au plus vite de la rue du Coq44. Par ailleurs, ce modeste projet semble avoir suscité bien des difficultés à l’administration des Bâtiments du roi en raison de la grande pénurie d’argent. En 1770, le commis des Bâtiments Montucla affirme que « les fonds même destinés pour la construction de l’aqueduc du Louvre ont été suspendus pendant plusieurs mois et à différentes reprises, et cet ouvrage vient encore par cette raison d’être abandonné pour la 4e fois45 ». L’aveu des difficultés est encore plus frappant sous la plume de Soufflot, architecte en charge des travaux du Louvre : « j’ai craint quelques tracasseries […] et j’ai dit ce matin au Sr. Pécoul [l’entrepreneur de maçonnerie des Bâtiments du roi] de se mettre aujourd’hui en état de commencer demain quelque fouille, afin que l’on voie acte de votre bonne volonté ; il m’a dit qu’en ralentissant un peu sur ce que nous avons commencé à côté du pavillon d’entrée, il pouvait aller sur les deux objets jusqu’au commencement du mois prochain46 ». Dans cette affaire, l’administration royale semble contrainte de suivre et de s’adapter aux initiatives de ces partenaires, bien plus qu’elle ne les provoque.
Le pouvoir monarchique face à la montée des initiatives privées à Paris à la fin de l’Ancien Régime
20Le modeste égout de la rue du Coq invite à s’interroger de manière plus large sur les cas où le pouvoir royal n’aurait pas eu la main dans le développement des abords du palais. Pour le Louvre, la question ne semble s’être posée qu’à partir du milieu du xviiie siècle.
21Autour du projet d’une nouvelle place royale dans Paris à la gloire de Louis XV, les initiatives et les projets privés se multiplièrent, obligeant le secrétaire d’État de la Guerre, le comte d’Argenson, à en faire une synthèse manuscrite qui fait apparaître que le Louvre est l’un des sites les plus fréquemment évoqués pour l’établissement de la nouvelle place. Par ailleurs, le courant philosophique, avec Voltaire ou La Font de Saint-Yenne, s’est emparé du débat sur l’urbanisme et a émis critiques et propositions, y compris sur l’inachèvement du Louvre depuis le règne de Louis XIV. Face à cette mise en cause, régulièrement reliée par des adresses à l’administration et par des mémoires largement diffusés par l’imprimerie, le pouvoir royal a tenté de reprendre la main en relançant timidement les travaux du Louvre et en poursuivant le dégagement des abords, d’où les arrêts du conseil de 1758 et 1767. Ces différents sujets ont déjà fait l’objet d’études approfondies et il n’est pas utile d’y revenir ici dans le détail47.
Le cas de l’élargissement au pied de la façade nord
22Il faut en revanche s’attarder sur les conséquences de l’arrêt du Conseil de 1758 sur le dégagement de la façade nord du Louvre et le percement de la rue du Coq (cahier couleur, ill. X). L’état d’abandon de ce quartier du Louvre stimula des initiatives privées. En 1753, les pères de l’Oratoire, dont le couvent était bâti à proximité de l’aile nord de la Cour carrée, demandèrent des parties de l’ancien hôtel de Grammont, propriété du Roi limitrophe de leurs terrains, pour pouvoir construire de nouveaux bâtiments ; ils justifièrent cette demande par la perte de jouissance qu’ils subiraient le jour où la rue du Coq serait mise à l’alignement, argument de peu de valeur puisque l’alignement devait leur permettre au contraire d’agrandir et de régulariser leur terrain. Le contrôleur des Bâtiments de Paris, Jean Charles Garnier d’Isle conclut philosophiquement son rapport : « leur demande m’a paru fort singulière, le roi loin de donner serait plutôt dans le cas d’acquérir dans cet emplacement. Mais, je ne crois pas que ce ne sera pas de sitôt [sic]48 ». En réalité, l’Oratoire obtint gain de cause en 177249. En effet, désireux de limiter au maximum l’acquisition de terrains pour réaliser le dégagement de la façade nord du palais, le roi se trouvait au final avec plusieurs morceaux de terrains de petites dimensions, très difficilement exploitables, qu’il préféra donc céder à des voisins pour qu’ils puissent s’agrandir. Par ailleurs, un événement vint donner du poids à la proposition des pères de l’Oratoire. Une maison comprise en partie dans les alignements de l’arrêt du conseil menaçait de ruine, mais le pouvoir royal n’avait pas le moyen de la reconstruire, ni d’indemniser son occupante. Il fut donc décidé d’accepter la transaction proposée par les Pères en leur cédant ladite maison, à charge pour eux de payer l’indemnisation et de faire les travaux50. Les Pères de l’Oratoire bénéficièrent par ailleurs gratuitement d’un petit triangle de terrain issu de la rectification de la rue du Coq, en dédommagement de « l’excès de dépense où les engageait une façade un peu décorée à laquelle on les astreignait du côté du Louvre51 ».
23Ce type d’opération ne fut cependant pas toujours couronné de succès : ainsi, après l’alignement, le roi gardait à l’ouest de la rue du Coq une étroite place de 13 pieds de profondeur sur 66 pieds de longs (4,2 m sur 21,5 m), très difficile à exploiter. Le propriétaire mitoyen ayant refusé l’achat, le roi céda finalement, dans le cadre d’une complexe procédure d’échange, le terrain à son entrepreneur de maçonnerie, le très important Pécoul, qui y fit construire une maison. Le don de la place à Pécoul s’inscrit dans une opération plus vaste : cet entrepreneur des Bâtiments du roi fut en effet à l’origine de la rectification de trois des maisons de la rue du Coq dont il se rendit peu à peu acquéreur au moment où elles menaçaient à ce point ruine que leur démolition devint une nécessité de sécurité publique52. Là encore, une initiative privée venait donc se substituer au pouvoir royal dans l’impossibilité de mener les acquisitions nécessaires à sa politique.
24Par ailleurs, l’appel à l’initiative privée n’allait pas sans renoncement. La maison bâtie par Pécoul était « pour le peuple de la classe très inférieure, la maison ne contenant pas un seul appartement proprement dit, mais de simples locations de chambres et cabinets53 ». En 1784, l’un des propriétaires d’une des maisons limitrophes de la place se rendit acquéreur d’un terrain appartenant au roi, à charge pour lui d’y faire construire une maison. Celui-ci demanda cependant et obtint des variations par rapport au bâtiment voisin de l’Oratoire, notamment dans le rythme des percements, afin de pouvoir optimiser son opération. Il eut gain de cause, et la symétrie de la place fut donc sacrifiée54. L’opération de mise en valeur de la façade nord du Louvre s’était donc peu à peu transformée en une opération de lotissement bas de gamme qui n’était guère en rapport avec le prestige du palais qu’elle devait accompagner.
Le cas de la place devant la Colonnade
25La création d’une place devant la colonnade semble répéter le schéma de la place devant la façade nord. Trois maisons appartenant au chapitre de Notre-Dame se trouvaient dans le clos de l’église Saint-Germain-l’Auxerrois et étaient concernées par les alignements de 1767. Elles furent donc frappées d’une interdiction de réparations, et leur mauvais état obligea à les étayer. La situation dura pendant quinze ans et en 1781, les chanoines demandèrent enfin la possibilité de les rebâtir, « le projet [de place devant le Louvre] semblant abandonné55 ». Les intendants des Bâtiments du roi56 furent alors convoqués par d’Angiviller pour résoudre le problème et proposèrent, faute de pouvoir acquérir les maisons, de modifier l’alignement de 1767 pour diminuer la largeur de la place, ce qui permettrait aux chanoines de reconstruire leurs maisons, quitte à ne plus assurer de dégagement entre le Louvre et l’église Saint-Germain-l’Auxerrois. Cinq études pour le nouvel alignement furent présentées au directeur général en août 178257. Ce sont des considérations essentiellement financières qui amenèrent le choix final du tracé (cahier couleur, ill. XI) : il ne fallait pas masquer les maisons existantes par de nouvelles constructions qui auraient mécontenté les propriétaires. Il fallait par ailleurs préserver une maison construite de neuf par le chapitre de Notre Dame proche de la rue à implanter dans l’axe de la Colonnade. Le roi concéderait une petite bande de terrain devant les façades existantes : « la profondeur du terrain qu’on donne n’est pas suffisante pour espérer de le vendre au profit du roi. Il servira seulement d’appât pour accélérer la construction des façades ». Ce projet n’était possible qu’en établissant l’alignement de la façade de la place de biais par rapport à la Colonnade, mais cet inconvénient fut jugé imperceptible et négligeable58. Là encore, il s’agit d’une opération peu favorable, au fond, à l’administration royale : elle devait ainsi céder au chapitre 33 toises de terrain59. Par ailleurs, le chapitre négocia pied à pied le projet de façade ordonnancée pour réduire les parties ornementales et pour obtenir une entrée dans l’enclos canonial la moins contraignante possible, quitte à nuire à la symétrie générale de l’élévation60. Une fois de plus, l’administration royale semble désormais réagir à un contexte extérieur et avoir perdu tout rôle moteur.
26Un ultime revirement se produisit dans cette affaire : le pouvoir voulut reprendre la main en ayant recours, une fois encore, à la procédure de l’arrêt du Conseil et en revenant au projet d’origine qui supprimait toute construction entre le Louvre et la façade de l’église Saint-Germain61 : le 13 novembre 1784, il était décidé que le chapitre de Notre-Dame serait indemnisé pour la perte des loyers des maisons incriminées par l’opération et dont le chapitre avait congédié les locataires depuis le premier juillet 1783. L’indemnisation durerait jusqu’à ce que le roi arrête l’acquisition des maisons. L’arrêt de 1758 restait donc parfaitement en vigueur. La finalité de l’opération reste assez incertaine : « soit pour exécuter sous le bénéfice du temps, conformément à la décision du 28 août 1784, le projet entier de 1758, soit pour être toujours maître de modifier ce projet et de n’y sacrifier peut-être qu’une moindre étendue de terrain, pour ménager par là des reventes qui rembourseront le roi d’une partie de ses dépenses62 ». La raison de ce retournement de situation reste incertaine. On peut y voir le rôle de Calonne, alors contrôleur général des Finances et partisan, après la fin de la guerre des Amériques, d’une relance de l’activité économique par une politique de grandes commandes de la cour. L’administration chercha peut-être aussi à tenir compte des objections formulées par des particuliers : en mars 1784, l’architecte Charles Doucet fit ainsi campagne pour une grande place en hémicycle et une nouvelle façade : il saisit l’administration des Bâtiments du roi par un mémoire manuscrit et prit à partie l’opinion par une estampe63. Enfin, il ne faut pas exclure une décision de Louis XVI lui-même.
27Une fois de plus, rien ne fut entrepris et le chapitre revint une dernière fois à la charge en proposant de prendre entièrement en main le projet, moyennant la cession des terrains nécessaires, diverses exonérations et un alignement qui préservait le cloître Saint-Germain-l’Auxerrois64. Cette situation aboutit une fois de plus à la dégradation du quartier, « les maisons dont il s’agit sont dans le plus mauvais état, […] les anciens locataires les ont dégradées et ont même enlevé une grande partie des portes-fenêtres et autres boiseries, les fers, plombs, chambranles etc., elles servent de retraite à des gens suspects, et il serait du plus grand danger pour la sûreté publique » de laisser perdurer cette situation d’après un rapport de mars 178565. Les trois maisons durent être abattues sur-le-champ compte tenu de leur état et les autres durent faire l’objet de réparations pour pouvoir être louées. La situation en était toujours au même point à la fin de l’année 178966 et il fallut un nouvel arrêt du Conseil pour entériner leur démolition67. Il semble bien que le chapitre ait accepté à cette occasion leur cession sans frais au domaine royal ; le contexte révolutionnaire et les réflexions sur le statut des biens du clergé durent y aider.
Le cas du lotissement de l’hôtel de Conti
28Le règne de Louis XVI fut enfin marqué par un autre phénomène important : le développement de la spéculation privée. Un mémoire anonyme proposa d’ailleurs au comte d’Angiviller, directeur des Bâtiments du roi de Louis XVI, de faire appel à l’initiative privée pour mener à bien des opérations d’urbanisme voulues par le public, comme le percement d’une rue entre le Louvre et les Tuileries : « il paraît étonnant que personne ne fasse de spéculation pour les percés projetés et nécessaires en face du Louvre. On prend la liberté de faire cette observation à Monsieur le Comte d’Angivillier parce qu’on est persuadé que s’il marquait là-dessus quelques désirs, beaucoup de gens du métier s’empresseraient de concourir à ses vues. On sait bien qu’il y a des plans ou au moins des projets arrêtés ; mais ils n’ont pas été calculés dans le même esprit des calculs d’aujourd’hui. D’ailleurs les circonstances sont devenues différentes quant aux bâtiments. Il paraît certain que l’ouverture d’une rue qui communiquerait du Vieux Louvre à la place du Carrousel serait d’une très faible dépense, et que la ville n’aurait pas de raison pour s’y refuser68 ». Des personnalités en rapport avec les grandes opérations de lotissement de la capitale avaient bien perçu le potentiel que présentaient les abords dégradés du Louvre : dès 1770, la monarchie avait été saisie d’un projet de l’architecte Nicolas Lenoir, dit le Romain, associé à un avocat, Pierre Bellard, pour achever la place devant la Colonnade en y édifiant un dépôt pour les registres paroissiaux de la capitale, mais elle n’avait pas donné suite69. Le financement et la gestion du chantier devaient être assurés par un montage complexe qui devait épargner entièrement les deniers du clergé et de la monarchie.
29Deux grandes opérations furent menées avec plus de succès au cours des années 1780 dans les abords du Louvre, mettant en péril les tentatives royales pour acquérir les parcelles nécessaires au dégagement du palais. La première est l’opération de lotissement de l’ancien hôtel de Conti à partir de 1778 et la seconde celle du lotissement du clos des Quinze-Vingts en 1779. Les deux opérations sont le fait de « compagnies » ou de « spéculateurs » selon la terminologie du temps, réunis derrière un prête-nom (ce fut Étienne Navault pour le lotissement de l’hôtel de Conti)70. Ces structures sont les ancêtres de nos anciennes sociétés anonymes dont le statut juridique ne fut fermement défini qu’à partir de 1807. Les deux compagnies des Quinze-Vingts et de Conti étaient en fait liées, car la plupart de leurs membres étaient communs et qu’elles avaient le même architecte, toujours Lenoir le Romain. Par ailleurs, l’opération de lotissement des Quinze-Vingts profita en grande partie à l’État qui la regarda d’un œil très favorable et lui accorda un considérable soutien71. En effet, un sixième seulement du prix versé par la compagnie pour l’acquisition des terrains et la possibilité de lotir revint au cardinal de Rohan, grand aumônier du roi et chef du conseil d’administration des Quinze-Vingts, le reste étant destiné directement aux finances royales72. Ce montage financier complexe fut peut-être le fait de Necker, désireux de renflouer au plus vite les caisses et qui exigea de la compagnie qu’elle payât les cinq millions de livres dus à l’État en une seule fois et sans aucun échelonnement. Tout cela mettait les deux compagnies en position de force pour négocier avec le pouvoir royal et éventuellement pour contraindre la direction des Bâtiments du roi, qui n’avait que peu de poids par rapport au Contrôle général des Finances.
30Les spéculations furent donc en position de force lors de l’autre opération de lotissement : le percement de la rue d’Angivillier en oblique sur les terrains de l’hôtel de Conti (fig. 5)73. L’administration des Bâtiments du roi fut confrontée à l’affaire de la maison Boyer, située à l’angle nord-est de la place devant la Colonnade. Une portion du terrain de cette maison faisait partie de l’emprise concernée par l’arrêt du Conseil de 1758, mais l’administration des Bâtiments du roi accepta le principe de l’achat en bloc plutôt que de la seule partie soumise à l’arrêt dans l’intérêt de la propriétaire ; faute d’argent, l’affaire traîna jusqu’en 1778, date à laquelle un accord fut conclu avec la propriétaire. Cependant, celle-ci préféra finalement vendre à la compagnie de lotisseurs qui venait d’acheter le terrain voisin de l’hôtel de Conti et qui s’apprêtait à le lotir. Pour cette compagnie, l’achat est important, car il permettait de tracer une rue oblique au travers du terrain de l’hôtel de Conti et donc de viabiliser au mieux l’ensemble de la surface ; cet achat figure d’ailleurs explicitement dans les objectifs de constitution de la compagnie. Madame Boyer adressa le 22 juillet 1778 un ultimatum de vingt-quatre heures à l’administration avant de vendre sa maison à la compagnie, ce qui, compte tenu du délai très court, ne laissait guère d’opportunité au pouvoir royal. Faute de réponse dans les temps, la vente fut conclue le lendemain matin74. L’administration fut donc obligée de négocier avec la compagnie et proposa une fois encore de recourir à des échanges plutôt que de payer comptant pour récupérer le morceau de terrain nécessaire à l’édification d’une place régulière devant la Colonnade75. Par ailleurs, l’implantation des premiers immeubles prévus par la compagnie gênait l’établissement de la façade nord de la place de la Colonnade. En 1782, le pouvoir royal fut donc finalement obligé de faire l’acquisition de presque un quart du terrain du lotissement et cette fois en payant comptant, les procédures d’échange ayant échoué76. Le traité était beaucoup moins favorable au roi que s’il avait traité directement avec la dame Boyer : « Sa Majesté est forcée de se réduire à moins de moitié de l’acquisition qui lui était assurée en payant cette moitié plus qu’elle n’eut payé le tout77 » et l’administration des Bâtiments du roi payait la moitié du pavage de la rue et le premier réverbère78. La nouvelle rue percée par les lotisseurs prit le nom de rue d’Angiviller, mais cette dénomination ne doit pas tromper : il ne s’agit en rien d’un projet de l’administration, bien au contraire ; c’est d’ailleurs le prête-nom de la compagnie, Navault, qui demanda à pouvoir dénommer la nouvelle rue ouverte en vue du lotissement du nom de comte d’Angiviller, sans doute en partie pour atténuer les rancœurs du directeur général dont la correspondance traduit l’hostilité au projet79.
Fig. 5. – Plan du lotissement de l’hôtel de Conti, 1782 plume et lavis, Arch. nat., O1 1677C, pièce 670,

Légende : La maison Boyer occupait l’angle inférieur droit à l’endroit où la « rue diagonale » projetée rejoint la rue des Poulies existante.
© Guillaume Fonkenell.
Conclusion
31De la Renaissance à la Révolution, l’interaction entre le pouvoir royal, les grandes institutions de la capitale et l’initiative privée connaît donc de profondes modifications : certes l’autorité du pouvoir royal se renforce et le règne de Louis XIII voit l’apparition de procédures contraignantes par arrêt du conseil, systématiquement appliquées par les souverains jusqu’à la Révolution, de manière plus ou moins radicale et répétée suivant l’intérêt porté au Louvre. Mais cette démarche, que l’on pourrait qualifier d’absolutiste, s’accompagne en permanence de procédures d’incitation ou de négociations avec les partenaires que sont la municipalité, l’archevêché ou les grands propriétaires fonciers religieux. Dans ce dialogue, la monarchie n’a pas toujours la main et plus le projet d’achèvement du Louvre s’enlise plus elle se retrouve contrainte de réagir aux sollicitations ou aux injonctions extérieures. Sous Louis XVI, la situation semble même aboutir à un cas limite : les différentes composantes du pouvoir royal adoptent des stratégies contradictoires qui paralysent l’action du souverain et ouvrent une brèche aux initiatives privées. Les outils de l’urbanisation de Paris au xixe siècle se mettent en place et le Louvre et l’un de leurs terrains d’expression.
Notes de bas de page
1 « Convention entre l’État et la Ville de Paris portant règlement des attributions et charges respectives de l’État et de la Ville, en ce qui concerne les jardins des Tuileries et du Carrousel, la rue des Tuileries, la place du Carrousel et le Louvre ». Plusieurs exemplaires imprimés ; l’un d’entre eux peut être consulté en Arch. nat., 64AJ 237. L’esprit de cette convention subsiste encore aujourd’hui, en dépit des remaniements entraînés par les travaux de transformation du « Grand Louvre » au cours des années 1980 et par la suppression du statut de « bâtiment civil et palais national » par arrêté du 4 mars 1993.
2 Harouel J.-L., L’embellissement des villes, l’urbanisme français au xviiie siècle, Paris, Picard, 1993, p. 262-263.
3 Commission à la chambre des Comptes, 12 février 1519, transcrites dans Félibien M., Histoire de la ville de Paris, Paris, Desprez et Desessartz, 1725, t. III, p. 576-577 ; lettres patentes confirmant l’échange, mars 1519, transcrites dans Ordonnances des rois de France, règne de François Ier, Paris, Impr. nationale puis CNRS, 1902-1992, t. II, p. 432-435, n° 192.
4 Arch. nat., E 1711, fol. 465, arrêt du Conseil, 7 décembre 1660, Arrêts du Conseil, règne de Louis XIV, éd. M. Le Pesant, Paris, Archives nationales, 1976, t. I, p. 301, n° 3196.
5 Arrêt du Conseil 23 mars 1658, Arrêts du Conseil, règne de Louis XIV, ibid. I, p. 252, n° 2683.
6 Weiss V., Cens et rentes à Paris au Moyen Âge, documents et méthodes de gestion domaniale, Paris, Champion, 2009.
7 La Monneraye J. de, « Introduction », in Terrier de la censive de l’archevêché de Paris, Paris, Impr. nationale, 1981, t. II-1.
8 Le Maresquier-Kesteloot Y.-H., « Le terrier du roi pour la ville et faubourgs de Paris au début du xviiie siècle », in Brunel G., Guyotjeannin O. et Moriceau J.-M. (dir.), Terriers et plans-terriers du xiiie au xviiie siècle, Paris-Rennes, École nationale des Chartes-Association d’Histoire des sociétés rurales, 2002, p. 133-150. Plusieurs plans rendent compte de cette censive en 1695 (Arch. nat., N III Seine 528), vers 1730 (musée Carnavalet, D 10634) et en 1783 (Arch. nat., N II Seine 59).
9 Arch. nat., N IV Seine 11 bis, terrier de Saint-Denis de la Châtre.
10 Dérens I., « introduction », in Terrier de la censive de l’archevêché, Paris, Musées de la Ville de Paris, 2005, III, p. xiv-xvii.
11 Arrêt du Conseil du 6 mai 1687, op. cit., p. xv.
12 « La Royne a prins la plus grande partie des maisons sur lesquelles les rentes se preignent et a ordonné rentes sur l’hostel de ville » (Archives de l’hôpital des Quinze-Vingts, Comptes de l’hospice, 1567-1568) ; « a esté ordonné et admis qu’il faut supplier la Royne qu’elle ait pitié de la maison de céans et que son bon plaisir soit de la favoriser plus que ung aultre lieu, et cependant ont les assistans audict chappitre consenti et accordé que les rentes soyent mises à l’hostel de la ville » (délibération du 15 août 1567), documents cités par Caron E., « Quelques documents inédits sur les Tuileries », Mémoires de la Société nationale des Antiquaires de France, n° 8, 1897, p. 273.
13 Sur le mécanisme général de la rente, voir Moulin M., « Les rentes sur l’Hôtel de Ville de Paris sous Louis XIV », Histoire, économie et société, n° 17, 1998, p. 623-648. Sur la perte de confiance en la rente de l’hôtel de ville, voir Babelon J.-P., Paris au xvie siècle, Paris, Hachette, 1986, p. 327-328.
14 Cet acte est connu par de nombreuses copies. Copies consultées : Arch. nat., O1 1669, pièces 6 et 7.
15 BnF, Estampes, réserve Ve 53i. Destailleur n° 1285 e 1286.
16 La Mare N. de, Traité de police, Paris, Cot et Hérissant, 1707-1738, t. IV, p. 28-31 consacre un développement sur la législation autour des maisons royales et essentiellement au cas du Louvre. Pour lui, le premier texte est bien celui de 1624.
17 Arch. nat., O1 1676, pièce 44.
18 Copie consultée : Arch. nat., O11669, pièce 14.
19 Ces plans ne comprennent cependant plus le relevé des maisons à acquérir, voir Fonkenell G., « La naissance d’un palais imaginaire », in Bresc-Bautier G. et Fonkenell G. (dir.), L’Histoire du Louvre, Paris, Fayard, 2016, t. I, p. 419-433.
20 Roland-Michel M., « Soufflot urbaniste et le dégagement de la Colonnade du Louvre », in Soufflot et l’architecture des Lumières, Paris, École nationale supérieure des beaux-arts, 1986, p. 54-67.
21 Transcription de l’arrêt de 1767 dans Perrot J.-H., Dictionnaire de voierie, Paris, Onfry, 1782, p. 31-32.
22 Arch. nat., O1 1676, pièce 155.
23 Ibid., pièce 161.
24 Ibid., pièce 162.
25 Harouel J.-L., op. cit., p. 152.
26 Un ensemble important de documents relevant de ces procédures sont conservés en Arch. nat., O1 1676. Voir par exemple, O1 1676, pièce 309 et 311 : reconnaissance de travaux dans une maison.
27 Arch. nat., O1 1669, pièce 160.
28 Ibid., pièce 166, lettre de Marigny à Bertin, septembre 1762.
29 La Mare N. de, op. cit., t. IV, p. 31.
30 Arch. nat., O1 1677B, pièce 877, missive sans date des habitants de la rue Champfleury aux gens du district de l’Oratoire.
31 Arch. nat., O1 1677B, pièce 852, 3 juin 1783.
32 Ces projets ont fait l’objet d’un répertoire complet dans Chastel A. et Pérouse de Montclos J.-M., « L’aménagement de l’accès oriental du Louvre », Les Monuments historiques de la France, 1966-3, p. 176-249.
33 Arch. nat., O1 1677B, pièces 431, 447 et 448, réception des ouvrages, 29 mars 1773, devis de terrassement des terres, présenté au directeur général le 12 octobre 1773 et réduit au simple pavage du pied de la façade.
34 Cette collaboration est présentée comme essentielle par un personnage nommé Dugué qui fait partie des « donneurs d’avis » spontanés à l’administration des Bâtiments sous d’Angiviller (voir lettre à d’Angiviller, 26 mai 1776, Arch. nat., O1 1669, pièce 289).
35 Registres des délibérations du Bureau de la Ville de Paris, Paris, Impr. nationale, puis Service des travaux historiques de la Ville de Paris, 1883-2012, t. II, p. 17, n° XVII.
36 Ibid., t. II, p. 312, n° CCCLXXVI et CCCLXXVII.
37 Ibid., t. II, p. 385, n° CCCCLXVI.
38 Arch. nat., O1 1677A, pièce 333, note de l’administration des Bâtiments.
39 Arch. nat., O1 1677B, pièce 490, lettre de Trudaine à d’Angiviller, 16 mai 1775.
40 Harouel J.-L., op. cit., p. 157.
41 Arch. nat., O1 1669, pièce 201, mémoire.
42 Arch. nat., H2 1873 ; Délibérations du Bureau de la Ville, table, entrée « constructions nouvelles ».
43 Arch. nat., O1 1669, pièce 178, lettre de Fontaines à Marigny, 7 janvier 1767 et Arch. nat., O1 1676, pièce 314, lettre de Marigny à Gabriel, 22 juillet 1769.
44 Arch. nat., O1 1669, pièce 209, lettre de Gabriel et Soufflot à Marigny, 16 février 1769.
45 Arch. nat., O1 1677B, pièce 409, lettre à madame de Saint-Prest, 20 septembre 1770.
46 Arch. nat., O1 1669, pièce 217, lettre de Soufflot à Marigny, 16 septembre 1769.
47 Principale étude sur le phénomène des places royales : Cleary R. L., The place royale and urban design in the ancien régime, Cambridge/New York, Cambridge University Press, 1999 ; pour un point sur les travaux au Louvre : Fonkenell G. et Picot-Bocquillon S., « Le Louvre : un monument parisien au temps des Lumières », in Bresc-Bautier G. et Fonkenell G. (dir.), L’Histoire du Louvre, Paris, Fayard, 2016, t. I, p. 501-514.
48 Arch. nat., O1 1677A, pièces 122 et 127-130.
49 Ibid., pièces 389-390, plans d’alignement.
50 Arch. nat., O11677B, pièce 450, mémoire, juillet 1772.
51 Ibid., pièce 606, lettre de d’Angiviller à Lenoir, 9 avril 1779.
52 Ibid., pièce 541, ordonnance de d’Angiviller, 20 novembre 1777.
53 Arch. nat., O1 1678A, pièce 225, rapport de 1788, l’opération remontant à 1781.
54 Arch. nat., O1 1677B, pièce 757, lettre de Brébion à d’Angiviller, 5 février 1784.
55 Ibid., pièce 526, 25 juin 1782, rapport de Hazon et Guillaumot.
56 À l’issue de la réforme des Bâtiments du roi de 1776, le premier architecte fut remplacé par trois intendants généraux.
57 Arch. nat., O1 1677B, pièce 532, mémoire de Cuvillier.
58 Ibid., pièce 687.
59 Ibid., pièce 692, mémoire.
60 Voir en particulier, mémoire de Guillaumot, 12 juillet 1783 : ibid., pièce 719.
61 Ibid., pièce 795, copie de l’arrêt du conseil.
62 Ibid., pièce 774, mémoire.
63 Ibid., pièce 761-762 et Carnavalet, GC 7A.
64 Ibid., pièce 692, mémoire sans date.
65 Ibid., pièce 800, rapport des domaines.
66 Ibid., pièce 864, de Bonnaire de Forges à d’Angiviller, 25 novembre 1789.
67 Arrêt du 10 janvier 1790, mentionné ibid., pièce 871.
68 Ibid., pièce 646, 15 novembre 1780, mémoire anonyme.
69 Ibid., pièces 629-635.
70 Sur le développement de ces sociétés à Paris, voir Poisson J.-P., « Constitutions et dissolutions des sociétés commerciales à Paris au xviiie siècle d’après les registres du greffe de la juridiction consulaire », Bull. Soc. Hist. de Paris, n° 101, 1974, p. 103-107. L’acte de constitution de la société pour le lotissement de l’hôtel de Conti est conservé aux Arch. dép. des Yvelines, E 2144 (cet acte n’a pas été consulté pour cette étude).
71 L’opération de lotissement des Quinze-Vingts a fait l’objet de deux études anciennes mais approfondies : Legrand L., « Les Quinze-Vingts depuis leur fondation jusqu’à leur translation au faubourg Saint-Antoine », Mém. Société Hist. de Paris et de l’Île-de-France, n° 13, 1886, p. 107-260 ; et Carré H., « Une spéculation financière du cardinal de Rohan », Le Monde moderne, n° 1, 1895, p. 235-244.
72 Arch. nat., O1 1677B, pièce 656, mémoire.
73 Pour une analyse formelle de ce lotissement, Cabestan J.-F., La conquête du plain-pied, Paris, Picard, 2004, p. 222 et 225.
74 Arch. nat., O1 1677B, pièce 582, lettre de Boyer à d’Angiviller.
75 Arch. nat., O1 1669, pièce 121, rapport sans date.
76 Ibid., pièce 349, mémoire, 8 septembre 1782 ; O1 1677B, pièce 530, mémoire de Cuvillier, 15 septembre 1782 ; les principales pièces relatives à cet échange ont été recopiées dans un recueil de correspondance (Arch. nat., O1 1677B, pièce 537). Le terrain acquis par la monarchie fut consacré à un bâtiment connu sous le nom d’hôtel d’Angiviller, mais qui comprenait en réalité de nombreux logements et des bureaux pour l’administration.
77 Arch. nat., O1 1677B, pièce 537, lettre de d’Angiviller à Navault, 9 mai 1781
78 Ibid., 22 mai 1781.
79 Ibid., pièce 653, Navault à d’Angiviller, 2 octobre 1779.
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