La naissance de l’« espace international ». La mise en place du comité exécutif du HCR (ExCom) : un exemple du paradigme d’« histoire universelle » de Raymond Aron
p. 225-241
Note de l’auteur
Note portant sur l’auteur1
Texte intégral
Introduction
1En juin 2014, le HCR annonçait officiellement que le nombre de déplacements forcés dans le monde avait franchi le seuil de cinquante millions de personnes pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale2. Le fait que la situation dramatique des réfugiés, au lieu d’être perçue en termes purement européens, américains, australiens ou même transrégionaux, le soit plutôt comme un problème universel, témoigne de notre appréhension du monde. Que le débat mondial sur les réfugiés ait lieu au sein de ce qu’on appelle la « communauté internationale », dans des forums tels que le comité exécutif du HCR (ExCom), l’Assemblée générale des Nations unies (AGNU), ou le Conseil de sécurité des Nations unies (CSNU) est chose banale. Il y a un siècle, le long des mêmes ravins et sur les mêmes routes venant d’Alep, le cheminement du peuple arménien sur la voie de l’exil forcé a coûté la vie à plus d’1,5 million d’Arméniens. Aujourd’hui, la crise des réfugiés syriens – aussi déchirante soit-elle – s’est soldée par un bilan humain nettement moins lourd. Ce qui contribue surtout à sauver des vies syriennes aujourd’hui, est le fait qu’à la différence des Arméniens d’il y a un siècle, les Syriens bénéficient de l’existence d’une puissante coalition d’organisations d’aide internationale avec à leur tête le HCR, qui prennent en charge et protègent les réfugiés3. Cette « communauté internationale » d’organisations s’appuie aujourd’hui sur un régime mondial de protection des réfugiés véritablement universel en termes de portée et de définitions juridiques.
2Et pourtant, où cette « communauté internationale » se situe-t-elle exactement ? Quel espace occupe-t-elle ?
3Les historiens des organisations internationales ont de fréquentes discussions sur la notion de « communauté internationale » et sur la question de l’existence même d’un « espace international » avec les spécialistes en sciences sociales, qui considèrent pour leur part cette idée avec dérision. Ces derniers sont généralement d’avis qu’il ne peut y avoir d’« espace non étatique » puisque, selon leur approche inspirée de Max Weber, toute entité dans le cadre des relations internationales doit être ancrée territorialement pour être admissible en tant qu’objet existant doté de caractéristiques spatiales. Ce qui, aux yeux des historiens, peut être considéré comme espace « non étatique » imprégné de multilatéralisme et peuplé d’acteurs internationaux (institutions des Nations unies, ONG, OIG, etc.) n’est, aux yeux des spécialistes en sciences sociales, guère plus qu’une série complexe d’engagements bilatéraux entre leurs entités favorites, les États nations.
4Mon propos dans cet essai est de démontrer qu’il existe bel et bien quelque chose que l’on peut appeler « espace international ». Je le conçois comme un domaine d’activité humaine se déployant à l’intérieur d’une zone juridique délimitée qui n’est contrôlée par aucun État nation et ne fait partie d’aucun État nation spécifique, mais qui est le produit du fonctionnement et des interactions d’organisations internationales et d’États nations engagés à armes égales dans un jeu diplomatique.
5À travers une étude de cas, j’ai choisi de me pencher sur un chapitre des plus lointaines origines de l’histoire internationale (c’est-à-dire non nationale) de la plus non-nationale de toutes les entités internationales : Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Mon objectif dans cette étude est de mettre en évidence les grandes incertitudes qui ont assailli les diplomates qui sont à l’origine du HCR et de la convention de 1951 relative au statut des réfugiés et de montrer comment, contre vents et marées, grâce à leur détermination et leur persévérance, ils ont non seulement inventé notre système international actuel de protection des réfugiés, mais également créé l’« espace international » aujourd’hui occupé par le HCR.
6Les sources sur lesquelles s’appuie cette étude consistent en des documents issus de quatre services d’archives nationales. En premier lieu, il s’agit des rapports et de la correspondance diplomatique, conservés à Jérusalem, de Jacob Robinson, éminent juriste international et délégué israélien à la conférence de rédaction de la convention de 1951 relatives au statut des réfugiés et de création du HCR. Deuxièmement, des rapports de Sir Samuel Hoare, délégué britannique à la conférence pour la convention de 1951 relative au statut des réfugiés, proche collaborateur de Robinson lors de l’élaboration de celle-ci. Ces rapports sont conservés aux Archives royales à Londres (Kew Gardens). En troisième lieu, des rapports d’Albert Herment, délégué belge et Vice-président de la conférence pour la convention de 1951 relative au statut des réfugiés, conservés aux archives du ministère belge des Affaires étrangères à Bruxelles (rue des Petits Carmes). Enfin, la présente étude s’appuie sur les archives de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), à Paris. Toutes ces sources ont été confrontées à la littérature contemporaine et contextualisées en utilisant le paradigme d’histoire universelle de Raymond Aron, dans un souci de rationalisation.
L’émergence de la diplomatie globale. Le paradigme d’histoire universelle de Raymond Aron
7En 1960, l’année même où la convention de 1954 relative au statut des apatrides est entrée en vigueur, le célèbre intellectuel français Raymond Aron a donné une conférence à Londres pour un petit groupe de philanthropes amis de l’université hébraïque de Jérusalem. Dans cette conférence, intitulée « l’Aube de l’histoire universelle », Aron se proposait d’expliquer les raisons pour lesquelles, selon lui, le monde était entré dans une nouvelle ère historique :
« Qu’est-ce que j’entends par histoire universelle ? Tout d’abord l’unification du champ diplomatique. La Chine et le Japon, l’Union soviétique et les États-Unis, la France et la Grande Bretagne, l’Allemagne et l’Italie, l’Inde et le Ghana – tous ces États appartiennent désormais à un système unique. Ce qui se passe sur les côtes chinoises n’est pas sans influence sur les relations entre l’Europe et les États-Unis ou entre les États-Unis et l’Union soviétique. Jamais auparavant autant d’États n’ont reconnu le droit d’existence d’autres États, jamais auparavant l’Europe et l’Asie, l’Afrique et l’Amérique ne se sont sentis si proches. Ce que les premiers pays ont autrefois fait en Europe et en Asie, les premiers pays d’aujourd’hui, les États-Unis et l’Union soviétique, le font sur les cinq continents4. »
8Pour le lecteur d’aujourd’hui, la description qu’Aron fait de la scène internationale n’a rien d’extraordinaire ; elle est même parfaitement banale dans un monde défini par le bras de fer entre Américains et Soviétiques au Conseil de sécurité des Nations unies au temps de la guerre froide. En revanche, pour ceux qui écoutaient Aron, et ses autres contemporains, et surtout pour lui-même, cette réalité était entièrement nouvelle et n’avait rien d’évident. Dix ans plus tôt, en 1950, cinq des dix pays mentionnés par Aron n’étaient même pas membres des Nations unies. Deux d’entre eux, à savoir le Ghana et la République populaire de Chine n’existaient même pas sous leur forme actuelle. En outre, à l’époque, l’Allemagne n’avait pas encore adhéré aux Nations unies (Hitler avait déjà retiré l’Allemagne de la Société des Nations). En 1962, le nombre de pays membres des Nations unies, 51 à l’origine à San Francisco, avait doublé pour atteindre 102, et en 1968, les Nations unies comptaient déjà 119 membres5. L’importance accordée par Aron aux rôles des États-Unis et de l’Union soviétique ne doit pas être rapportée uniquement au contexte de la guerre froide, mais comprise surtout comme une référence positive au nouvel ordre mondial. Ni les États-Unis, ni l’Union soviétique (cette dernière admise très tardivement, en 1934, et uniquement en raison du départ de l’Allemagne nazie) n’avaient été membres de la Société des Nations. Pourtant, ces deux pays étaient désormais membres de l’ONU, titulaires de sièges permanents au Conseil de sécurité. Cela modifia l’équilibre des puissances qui régnait au sein de la SDN, mais qui avait contribué à son échec6. Aron a vécu quelques-unes de ses années les plus formatrices quand il était étudiant à Weimar au milieu des années 1930, dans l’Allemagne d’Hitler, alors que s’effondrait la Société des Nations. Pour lui, donc, l’ordre mondial était revenu à son point d’origine.
9Le paradigme d’histoire universelle de Raymond Aron, en tant que processus de mondialisation de la diplomatie rassemblant pour la première fois toutes les nations et tous les continents sous la bannière d’une organisation mondiale unique (les Nations unies) s’applique également au régime international de protection des réfugiés. À la fin de 1960, quand Aron donna sa conférence à Londres, ce régime était déjà bien en place, après huit longues et éprouvantes années d’efforts pour surmonter les obstacles diplomatiques internationaux. Il a fallu trois longues années pour que la convention de 1951 relative au statut des réfugiés entre en vigueur, le 22 avril 1954, et c’est seulement alors que les États membres des Nations unies sont allés de l’avant sur la convention relative au statut des apatrides (signée le 28 septembre 1954), qui était initialement censée faire partie intégrante de la convention relative au statut des réfugiés. Il a fallu encore six ans pour que suffisamment d’États membres ratifient cet instrument pour lui permettre d’entrer en vigueur (le 6 juin 1960). Ainsi, lorsqu’Aron a donné sa conférence sur l’aube de l’histoire universelle, le processus législatif pour la protection des réfugiés au niveau mondial était presque terminé. Peu de temps après, en 1967, le protocole additionnel supprima les définitions temporelles de l’expression « en Europe et ailleurs ». Les États-Unis, qui n’ont jamais signé la convention de 1951 relative au statut des réfugiés, ont signé ledit protocole, adhérant ainsi au régime international de protection des réfugiés7. Ce n’est que vingt-cinq ans plus tard que les pays de l’ancien bloc soviétique y ont finalement adhéré, au début des années 1990.
L’hostilité diplomatique initiale à l’égard du HCR et de la convention de 1951 relative au statut des réfugiés
10En revenant sur la naissance et les débuts modestes du HCR, on ne peut s’empêcher d’avoir le sentiment que les délégués qui en étaient partisans livraient une dure bataille contre des forces diplomatiques considérables. Pour les délégués du « Réseau Robinson8 », qui a apporté son soutien au HCR et à la cause universelle inscrite dans la convention de 1951 relative au statut des réfugiés, les perspectives de faire signer et ratifier cette convention semblaient lointaines voire, à l’été 1952, inexistantes. Jacob Robinson a ouvertement écarté toute tentative de promouvoir des protections supplémentaires pour les apatrides lors de la VIIe session de l’Assemblée générale des Nations unies d’octobre 1952, en demandant de manière rhétorique : « À quoi bon perdre un temps infini à vouloir étendre les aides à d’autres catégories de personnes quand même les aides à accorder aux réfugiés étaient remises en question9 ? »
11Ce qui importait avant tout était de faire signer et ratifier la convention de 1951 relative au statut des réfugiés, afin qu’elle puisse entrer en vigueur. Pourquoi cependant Robinson était-il si inquiet ? Quelles forces diplomatiques redoutables s’élevaient contre la convention ? Les réponses à ces questions étaient claires. En 1952, tous les membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies, à la seule exception du Royaume-Uni, étaient, de manière tacite ou officiellement, hostiles à la fois au HCR des Nations unies et à la convention de 1951 relative au statut des réfugiés. Tout d’abord, l’URSS était totalement hostile à l’ensemble du processus d’élaboration de la convention relative au statut des réfugiés depuis son origine (1950), qu’elle considérait comme une manifestation du capitalisme occidental en quête de solutions permettant de continuer à exploiter une main-d’œuvre bon marché en provenance du tiers-monde et des colonies10. L’URSS n’a jamais signé la convention de 1951 relative au statut des réfugiés, et a empêché l’ensemble du bloc soviétique de le faire. La Chine, quant à elle, sans condamner ouvertement le HCR, y était également hostile, du fait de la séparation entre la République populaire de Chine et la République de Chine à Taïwan sous Tchang Kai-chek et de la crise des réfugiés de Hong Kong de 1951-1952 qui s’ensuivit11.
12L’hostilité des deux autres membres du Conseil de sécurité des Nations unies, la France et les États-Unis, à l’égard du HCR était également manifeste. Durant les préparatifs de la VIIe assemblée générale, et dans le cadre de sa collaboration diplomatique avec Jacob Robinson, le délégué britannique aux Nations unies à New York H. T. Overton signalait à ses supérieurs du Foreign Office de Londres que : « Les Français en particulier étaient réticents en ce qui concerne la Convention relative au statut des Réfugiés, irrités par le Haut-Commissaire aux Réfugiés, et venaient de mettre un terme à l’ensemble des activités de l’Office Nansen en France12. »
13Dans son rapport final au ministre israélien des affaires étrangères Moshe Sharett, Jacob Robinson explique que l’hostilité de la France est liée au conflit général entre blocs de pays « universalistes » et « européistes13 » :
« Les hypothèses suivantes ont été avancées pour expliquer le conflit entre “universalistes” et “européens” :
Le caractère personnel du représentant français, M. Rochefort, l’“enfant terrible” de la Conférence. Profondément anti-britannique, brillant mais inflexible, sarcastique et incapable de compromis. Le délégué belge [Albert Herment, proche collaborateur du “réseau Robinson” (note de l’auteur)] a même laissé entendre que M. Rochefort agissait pour son propre compte, ce qui avait soulevé une tempête…
On sait que le Haut-commissaire [Gerrit Jan Van Heuven Goedhart (note de l’auteur)] a refusé d’avoir pour suppléant M. Rochefort, alors que Robert Schuman ne lui avait proposé d’autre choix que Rochefort ou personne. Parce que les liens sont étroits entre la Convention et le Haut-Commissariat, et que la France combat ce dernier, le représentant français a tenté de réduire son importance. C’est d’ailleurs sur l’insistance de la France que des réserves ont été admises en ce qui concerne l’art. 35 (coopération avec le Haut-Commissariat). En revanche, le Haut-Commissariat est aujourd’hui très étroitement lié au Royaume-Uni, au Benelux et aux pays scandinaves, et c’était ce bloc qui luttait contre la France14. »
14Quant à l’hostilité des États-Unis à l’égard du HCR, elle s’explique avant tout par le fait que le directeur de l’Organisation internationale pour les réfugiés, l’Américain Donald Kingsley, n’ait pas été élu Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés, ce qui provoqua l’ire du département d’État américain contre la décision du Secrétaire général des Nations unies de faire élire le HCR par l’Assemblée générale des Nations unies, plutôt que de confier sa désignation au Secrétaire général. Loescher y a consacré d’abondantes recherches, de même qu’au choix de Rochefort de faire cause commune avec les États Unis et avec Kingsley en prévision de sa désignation au poste de Haut-Commissaire adjoint15.
15Pendant ses trois premières années d’existence, le HCR luttait pratiquement pour sa survie : son financement était délibérément bloqué par les États-Unis et ses alliés (en particulier la France, grâce aux efforts de Rochefort), et la majeure partie des fonds était affectée à d’autres organismes ad hoc d’aide aux réfugiés16. Une autre étape importante fut franchie avec la création, par les États-Unis, du Comité intergouvernemental pour la circulation des migrants d’Europe, par la suite rebaptisé Comité intergouvernemental pour les migrations européennes (CIME), ancêtres tous les deux de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), basée aujourd’hui à Genève17. Cette organisation, créée en novembre 1951 à Bruxelles, était abondamment financée par les États-Unis, en contraste délibéré avec le blocage de tout financement public américain pour le HCR. Du côté français, et comme la mission du HCR était limitée à l’assistance juridique, l’Ofpra nouvellement créé en France s’en remettait tout naturellement au CIME pour les questions pratiques concernant les demandes individuelles de protection de réfugiés. Dans une réponse de décembre 1952 à une demande de renseignements du directeur de l’Ofpra concernant l’éligibilité de réfugiés résidant en France à des solutions d’émigration et de réinstallation par l’intermédiaire du CIME, le conseiller diplomatique de ce dernier a répondu que le CIME ne fournissait de soutien qu’aux organisations, et ne traitait pas de demandes individuelles. La personne qui a répondu en décembre 1952 au directeur de l’Ofpra au nom du CIME était son conseiller diplomatique, Robert Rochefort18.
16L’entrée de Rochefort au CIME doit être vue comme s’inscrivant dans un contexte plus général de choix de politique étrangère de la France concernant les réfugiés et les apatrides. Sur le plan juridique, la France n’avait nul besoin de l’aide du HCR. En fait, la loi portant création de l’Ofpra aurait dû servir de ligne directrice au HCR et à nombre d’autres pays. Depuis l’examen de son premier projet par le Conseil d’État français le 14 novembre 1950 jusqu’à son adoption définitive, cette loi avait vocation à placer sous sa protection à la fois les réfugiés et les apatrides19. C’est ainsi que, deux ans avant l’adoption de la convention relative au statut des apatrides, et huit ans avant son entrée en vigueur, la France avait déjà légiféré en matière de protection des réfugiés tandis que le reste du monde en était encore au stade de la discussion.
17Du point de vue français en 1951, la principale mission de tout organisme de protection des réfugiés était l’exécution opérationnelle, ce qui se résumait à une question de ressources financières, et non de belles paroles diplomatiques. Aux yeux des Français, le HCR manquait de poids car il ne disposait pas des fonds pour résoudre la question brûlante des réfugiés vivant dans des camps en France. Rochefort a, en quelque sorte, « choisi l’argent » en rejoignant Kingsley là où se trouvaient la plupart des ressources, et où il estimait qu’il devait être, à la fois compte tenu des tâches à accomplir, et surtout pour des raisons de profit et de promotion personnels. Ancien chef de cabinet de Schuman, et représentant français auprès de tous les différents organismes internationaux traitant des questions relatives aux réfugiés (le HCR, l’Organisation internationale pour les réfugiés (IRO), l’Assemblée générale des Nations unies (AGNU), le Conseil économique et social (ECOSOC), etc.), il avait une certaine latitude pour prendre des décisions politiques au nom de la France comme il l’entendait. Il est fort probable que Schuman, qui était de toute façon hostile à la prise en charge des réfugiés européens par les Nations unies, et qui préférait voir cette tâche confiée à son Conseil de l’Europe, ait tacitement approuvé les choix politiques de son protégé20. Ce qui eut ipso facto pour effet de donner une image négative et dégradée du HCR.
Origines du Comité consultatif du HCR, ancêtre de l’ExCom
18Nul n’était plus conscient de la faiblesse du HCR que le Haut-Commissaire Van Heuven Goedhart. En tant qu’ancien réfugié et victime de guerre, il savait parfaitement que la faiblesse de son institution était fort préjudiciable aux réfugiés et à leur protection21. Ayant eu à faire face aux difficultés posées par les États-Unis et la France tout au long de l’élaboration de la convention de 1951 relative au statut des réfugiés, Van Heuven Goedhart a, une fois cet instrument signé, entrepris de mobiliser le soutien des États membres au profit du HCR.
19Étant donné que Van Heuven Goedhart tenait son mandat de l’Assemblée générale des Nations unies, et que c’est à cette dernière qu’il faisait rapport, le nombre de pays non-membres des Nations unies signataires de la convention relative au statut des réfugiés (Italie, Finlande, Suisse, Saint-Siège etc.) suffisait à lui seul à exclure la possibilité d’avoir une sorte de « Conseil de direction » constitué exclusivement de membres de l’ONU. Ce qui pouvait cependant être à la fois réalisable et utile à la cause du HCR était de créer un Conseil consultatif, composé de représentants pouvant fournir assistance, aide et conseils avisés au HCR sur la manière d’exécuter son mandat. Les atouts stratégiques dont disposaient les adversaires du HCR – la France et les États-Unis –, étaient les importants moyens financiers qui faisaient défaut au HCR. Ce qui manquait à Van Heuven Goedhart en ressources financières, il pouvait toutefois le compenser en pouvoir diplomatique et en influence internationale. Les États-Unis et la France étaient en position minoritaire à l’Assemblée générale des Nations unies, et l’écrasante majorité des membres de cet organe étaient en faveur de l’universalisme du HCR, et contre les positions française et américaine. Il appartenait au HCR, puisqu’il tenait son mandat, sinon son existence même, directement de l’Assemblée générale, de mobiliser cet atout diplomatique pour le transformer en pouvoir politique mondial susceptible d’être canalisé pour jouer en sa faveur. C’est précisément ce que Van Heuven Goedhart a entrepris de faire, en créant un organe international politique fort de lobbying pour le compte du HCR : le Conseil consultatif.
20Afin de constituer ce Conseil consultatif de soutien, Van Heuven Goedhart devait passer par le Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC). Il avait absolument besoin pour cela d’un État membre, qui soit un allié fiable pouvant coordonner ces efforts au sein de l’ECOSOC – un axis mundi (« pilier, ou centre de connexions ») en quelque sorte. Ce rôle ne devait pas revenir simplement à un pays, mais aussi et plus précisément à une personne capable d’actionner politiquement l’Assemblée générale des Nations unies dont elle connaîtrait le fonctionnement dans ses moindres rouages. Van Heuven Goedhart avait besoin de cet homme âgé et avisé, vice-président de la conférence d’élaboration de la convention relative au statut des réfugiés, qui avait convaincu l’Assemblée générale des Nations unies de voter pour des définitions universelles du statut de réfugié et contre les définitions européistes françaises et américaines22. Il avait besoin du délégué belge, Albert Herment.
21Van Heuven Goedhart avait certes presque toujours gardé contact avec Herment, sollicitant son avis et ses conseils pratiquement depuis que Herment, alors retraité, avait été réintégré dans ses fonctions de chef de la délégation belge pour les questions relatives aux réfugiés en avril 195123. Neuf jours environ après sa réintégration, Herment informa M. Delahaye, directeur des organisations internationales du ministère belge des Affaires étrangères, que le HCR pensait ne pas ouvrir son bureau à Bruxelles cette année-là, faute de fonds24. Le 9 juillet 1951, au beau milieu de la conférence des plénipotentiaires participant à la rédaction de la convention de 1951 relative au statut des réfugiés (2-25 juillet 1951), Herment renvoya à Bruxelles son tout premier document d’orientation contenant des recommandations relatives au futur « Comité consultatif pour les réfugiés » au point 29 de l’ordre du jour de la 13e session de l’ECOSOC prévue pour le mois de septembre25. Dans ce document, Herment envisageait de confier un rôle important au futur Comité consultatif, dont les décisions consultatives seraient, en tant que consultum ultimum, contraignantes pour le HCR. Dans le télégramme suivant qu’il envoya de la Conférence des plénipotentiaires, Herment rappela que les attributions (« termes de référence ») du « Comité consultatif du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés » devaient être aussi restreintes que possible26. C’est ainsi que, lors de la session suivante de l’ECOSOC, la Belgique plaidera en faveur d’une résolution de l’Assemblée générale demandant un avis consultatif de la Cour internationale de justice (CIJ), selon les dispositions de l’article 96 de la charte des Nations unies, en ce qui concerne le statut et les responsabilités de ce futur Comité consultatif27.
22Une semaine plus tard, Herment changea totalement d’avis. Dans son rapport du 1er août 1951 marqué « très urgent », à la suite de la signature de la convention de 1951 relative au statut des réfugiés (28 juillet 1951), Herment présentait une vision stratégique du Comité consultatif du HCR diamétralement opposée. Revenant sur ses précédents communiqués où il préconisait une mission de surveillance rigoureuse, Herment incitait désormais Bruxelles à doter le Comité de pouvoirs faibles et non contraignants. Il expliquait son revirement stratégique de la façon suivante :
« À la suite de différentes conversations échangées à Genève entre le délégué belge à la Conférence diplomatique sur le statut des réfugiés et le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, il s’est révélé que les instructions préparées par la direction générale C. à l’usage de la délégation belge et concernant la création d’un Comité Consultatif du Haut-Commissaire (point 29) peuvent être trop rigides et risquent d’arriver à un échec. En effet, le statut du Haut-Commissaire adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies ne permet pas actuellement de confier à un tel Comité des pouvoirs de direction quelconques comme le Département l’avait envisagé. En l’état actuel des choses, il ne peut être appelé qu’à donner des avis au Haut-Commissaire au sujet des difficultés se présentant dans l’exercice de ses fonctions […] Ci-joint à titre confidentiel, un projet de résolution qui a été rédigé par le Haut-Commissaire lui-même et qu’il serait très reconnaissant de voir présenter par la délégation belge, dans la forme que celle-ci jugera opportun d’y donner28. »
23Au sujet de l’idée d’un avis consultatif de la CIJ concernant les fonctions et attributions du Comité consultatif, Herment ajouta :
« D’autre part, l’Union interparlementaire a proposé pat la voix de M. Rolin, membre du Sénat belge, à la conférence diplomatique sur le statut des réfugiés d’émettre le vœu que l’Assemblée générale des Nations Unies autorise le Haut-Commissaire aux Nations Unies pour les réfugiés, conformément à l’article 96 de la charte des Nations Unies, à demander à la Cour internationale de Justice des avis consultatifs sur des questions juridiques se posant sur le cadre de son activité. Il serait peut-être désirable que la délégation au Conseil économique et social présente un projet de résolution en ce sens. La délégation belge à la conférence précitée s’était proposée de faire insérer un vœu à ce sujet dans l’Acte final ; ci-joint également le texte qu’elle avait à cet effet ; elle a y a toutefois renoncé à la demande de M. van Heuven Goedhart lui-même qui craignait qu’une proposition dans ce sens soit de nature à provoquer surtout du côté français, un débat désagréable et entraver la ratification de la Convention sur le Statut des Réfugiés par certains gouvernements peu désireux d’adopter l’interprétation qui y serait donnée par la Cour Internationale de Justice29. »
24Deux points méritent d’être soulignés ici. Le premier concerne l’étroitesse de la coopération diplomatique entre la Belgique et le HCR. Non seulement la Belgique était-elle disposée à inverser complètement sa position sur le Comité consultatif du HCR pour réduire ses attributions à un simple rôle consultatif à la demande de Van Heuven Goedhart, mais elle allait maintenant défendre cette position inversée, au nom du HCR, devant d’autres États. Et elle allait faire cela précisément devant l’instance internationale où l’on débattait de ces politiques mondiales, où, pour paraphraser le paradigme d’histoire universelle de Raymond Aron, la diplomatie mondiale se pratiquait sur une plateforme ontologique unique : l’Assemblée générale des Nations unies.
25Le second point porte sur la question du contrôle gouvernemental sur les activités du HCR. La position initiale de la Belgique était fondée sur le principe de contrôle du HCR et de ses activités par les États membres, en vertu duquel Van Heuven Goedhart était censé agir sur instructions des États membres comme le ferait tout bon fonctionnaire. Le HCR entendait faire fi du contrôle des États membres ? Rien à redire à cela, tant qu’il ne sollicitait pas l’aide financière volontaire des États membres. Il faudra encore trois ans et quelques difficultés financières importantes pour que le HCR revoie en partie cette conception d’« agent indépendant » dans un monde où les contributions financières des États membres sont vitales pour l’activité d’une organisation. Comme nous le verrons plus tard, la remarque de forme de Van Heuven Goedhart à propos d’une contradiction présumée entre le mandat du HCR et le rôle consultatif du Comité consultatif, n’était rien de plus qu’un point de détail à régler. En 1954, lorsque le HCR a eu besoin de fonds importants et que les États membres ont accepté de renforcer leur financement, un contrôle rigoureux a soudain été juridiquement possible, dans le cadre d’un mandat promptement remanié du Comité exécutif du HCR (l’actuel ExCom). Cet organisme était pratiquement identique, en tout point sauf le nom, au Comité consultatif d’origine. En politique « nécessité fait loi », et la nécessité avait pris la forme de difficultés financières.
26Un coup d’œil aux dates du revirement politique belge révèle un calendrier plutôt chargé, avec l’ouverture de la 13e session de l’ECOSOC le lundi 3 septembre, juste après les vacances d’été en Europe. Pour les délégués du ministère belge des Affaires étrangères chargés de préparer les positions politiques belges, le revirement de dernière minute d’Herment, a entraîné une abondante correspondance, tant avec la délégation belge à Genève qu’avec la délégation belge au Nations unies à New York. Alors que les nouvelles orientations politiques assouplies ont finalement été envoyées par télex le 14 août30, une directive distincte a été télégraphiée le 16 août au représentant belge Delhaye lui donnant l’instruction de ne pas évoquer l’idée d’avis consultatif de la CIJ et de s’abstenir si un vote sur ce sujet était demandé par d’autres délégations31.
Le soutien de la Belgique au HCR dans le cadre des préparatifs du débat à l’ECOSOC sur la création du Comité consultatif
27S’il est une preuve tangible de l’existence d’une « communauté internationale » à l’œuvre dans le cadre d’un espace « non étatique », ce sont à coup sûr les travaux de la 13e session de l’ECOSOC sur le point 29 de son ordre du jour (création du Comité consultatif du HCR) qui nous la fournissent.
28La correspondance conservée aux archives du ministère belge des Affaires étrangères sur ce point 29 de l’ordre du jour est captivante à plusieurs égards. Elle se compose d’une série de communiqués sur papier à l’en-tête du HCR, adressés directement par l’Américain James Read, adjoint de Van Heuven Goedhart, à l’ambassadeur Delhaye, délégué belge à l’ECOSOC. De tous ces échanges qui se sont déroulés dans la plus stricte confidentialité, il ressort clairement que le HCR a largement utilisé la Belgique pour promouvoir son propre message auprès des autres États membres de l’ECOSOC. D’après cette correspondance, c’est le HCR lui-même qui a rédigé le premier projet de résolution de l’ECOSOC relatif à son propre Comité consultatif composé de représentants d’États nations.
29Ainsi, le 22 août, James Read adressa à Delhaye le premier projet de résolution rédigé par le HCR, quasiment identique à celui que la Belgique devait présenter à l’ECOSOC une semaine plus tard. La note jointe à ce projet disait ceci : « Voici le projet tel que, je pense, vous et moi en sommes convenus […] veuillez laisser un message à ma secrétaire (poste 3104) si vous êtes d’accord32. » La semaine suivante, Read donnait déjà des consignes à Delhaye quant aux positions et aux actions que la Belgique devrait défendre en faveur du texte établi à l’origine par le HCR. À propos du Chili, il lui écrivait « Vous pourriez parler à M. Bernstein [délégué chilien à l’ECOSOC, Note de l’auteur] pour lui dire pourquoi vous pensez qu’un Conseil consultatif est nécessaire ». Sur la France, il notait laconiquement : « C’est vous qui menez les négociations sur ce point. » Considérant la réticence du Canada à défendre l’idée d’un Comité consultatif, il écrivait ceci : « Je suggère que vous-même et John Beith [le délégué britannique à l’ECOSOC, Note de l’auteur] vous entreteniez avec lui ou avec un autre membre de la délégation canadienne au plus tôt. » Le document se poursuit dans le même esprit au sujet de tous les autres États membres de l’ECOSOC33. Le 29 août, Read informa Delhaye en ces termes : « Je vérifie actuellement auprès de M. Yates la date de la présentation définitive de la résolution à son service [le secrétariat de l’ECOSOC, Note de l’auteur] en vue de le faire ronéotyper et diffuser34. » Dans un mémorandum distinct daté du même jour, il lui fit savoir qu’il avait coordonné son action avec celle du secrétariat de l’ECOSOC et ajouta :
« Le Conseil a pris du retard sur le calendrier et, de ce fait, je ne m’attends pas à ce que le point 29 soit débattu avant la fin de la semaine prochaine, du 6 au 8 septembre. Ce serait donc parfait si vous ne lui remettiez pas le texte final de la résolution avant vendredi 31 août, voire lundi 3 septembre. Je lui ai dit que vous aviez l’intention de présenter la résolution sans préciser de noms d’États et que vous remettriez probablement cette liste au moment du débat à ce sujet35. »
30Le schéma suivi en l’espèce est pratiquement le même. En substance, la Belgique patronnait secrètement la cause du HCR en suivant les instructions explicites qu’elle recevait quotidiennement de son directeur adjoint, Read, tout en présentant cette action comme une initiative d’un État membre des Nations unies.
La rivalité franco-belge lors du débat à l’ECOSOC et la mise en place finale du Comité consultatif
31Du 6 au 8 septembre, les États membres de l’ECOSOC débattirent du bienfondé de la création d’un Comité consultatif du HCR et de ses modalités. La seule « ébauche » véritable élaborée en vue de cette session état la résolution belge, également connue sous la désignation de document E/L.245 de l’ECOSOC. Ce projet de résolution prévoyait la création d’un Comité consultatif réunissant de manière lâche quinze États membres et réduit à un rôle purement consultatif auprès du HCR, lequel pourrait accepter son avis, le rejeter ou le modifier comme il l’entendrait. Il s’agissait en fait, comme nous l’avons démontré plus haut, du projet de résolution élaboré par le HCR lui-même mais présenté comme étant une proposition purement belge.
32Face à cette proposition belge, la France, menée par Rochefort, proposa une autre façon de procéder dont le détail est exposé dans le document E/L.244 qu’elle présenta à l’ECOSOC. Cette proposition française se ramenait à quelques éléments simples : adopter une résolution d’ordre général en faveur de la création d’un Comité consultatif auprès du HCR mais reporter le débat sur le détail de ses fonctions à la 14e session de l’ECOSOC, en 1952. En agissant de la sorte, Rochefort maintenait sans relâche son opposition au HCR, s’efforçant d’affaiblir le plus possible ce dernier dans l’espoir qu’il finirait par disparaître et que d’autres organisations, plus puissantes financièrement parlant, pourraient alors prendre sa place. L’un des meilleurs comptes rendus de ce qui se passa effectivement à l’ECOSOC au cours de ces trois journées intenses de septembre se trouve dans un rapport confidentiel adressé par l’ambassadeur Gaston Eyskens à Joseph Meurice, ministre belge du Commerce. Meurice avait travaillé conjointement avec le ministre des Affaires étrangères Paul van Zeeland sur la question des réfugiés ainsi que sur la création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier, dont le traité fondateur avait été signé en avril 1951 au nom de la Belgique par Meurice et Van Zeeland. Sur le point 29 de l’ordre du jour, Eyskens écrivait ceci :
« Ce point fut beaucoup plus laborieux que le précédent, et tout d’abord dans les contacts officieux qui furent multiples. La Délégation belge (M. Delhaye) se conforma aux instructions précises de votre département, contenues en particulier dans la note du 1.8.1951 de C. à P./II, et dans la lettre adressée par M. Desy à M. Delhaye sous la date du 14 août 1951… au contact de diverses Délégations, il apparut que l’affaire ne serait pas aisément réglée. Plusieurs n’étaient aucunement convaincues de l’utilité d’un Comité consultatif, soit parce que selon eux l’Ecosoc pourrait donner les avis requis, soit plus simplement parce qu’il n’y a pas lieu d’ajouter encore un organe consultatif ou autre à l’arsenal des groupes similaires déjà existants aux Nations Unies… La Délégation française, hostile au Haut-Commissaire pour des motifs connus, aurait volontiers rejoint ceux qui niaient l’utilité d’un pareil Comité… Enfin, plusieurs de ceux qui se laissèrent convaincre de l’utilité d’un Comité, exprimaient une forte opposition à un nombre de membres relativement élevés… La Belgique ouvrit le débat officiel par une déclaration… qui rencontrait la plupart des points soulevés par les opposants, mais en laissant toutefois au Haut-Commissaire (en accord avec celui-ci) le soin de certains arguments ou précisions… Les États-Unis d’abord partisans de 9 membres seulement ne se montraient absolument pas disposés à aller au-delà de 12… M. Van Heuven Goedhart est convaincu, tout comme la Délégation belge, que le résultat acquis représente le maximum qu’il était possible de réaliser au cours de la 13e session de l’Ecosoc… L’essentiel, semble-t-il, a été obtenu :
1. Un Comité consultatif a été créé ;
2. Ce comité comptera 15 membres dès l’origine ;
3. Ce nombre sera révisé au cours de la prochaine session du Conseil, durant laquelle pourront être discutées des questions sociales (ceci étant dépendant de la décision encore à prendre sur la réforme du Conseil)36. »
33Ainsi naquit le tout premier conseil du HCR composé d’États membres. Ce qui avait commencé sous la forme de consultations informelles en marge de la conférence des plénipotentiaires de la convention de 1951 sur les réfugiés, dès juillet 1951, avait désormais débouché sur la participation officielle de gouvernements aux travaux du HCR.
Les suites de la 13e session de l’ECOSOC et la métamorphose du Comité consultatif en Comité exécutif du HCR
34La suite de cette histoire a fait l’objet de recherches approfondies de la part de Loescher37. En 1952, le HCR parvint enfin à rompre l’isolement financier qui lui avait été imposé par le gouvernement américain grâce à deux importantes contributions privées, l’une de la Fondation Ford (2,9 millions de dollars) destinée à des opérations d’assistance, l’autre de la Fondation Rockefeller qui finança une grande étude mondiale sur les problèmes des réfugiés et les solutions envisagées. Le fait que la contribution de la Fondation Ford n’ait été assortie d’aucune affectation précise en disait long sur le prestige et la confiance dont le Haut-Commissaire avait fini par jouir à l’extérieur. Loescher précise :
« Le plus important est sans doute que le don de la Fondation Ford inspira et encouragea d’autres contributions, en particulier de la part de gouvernements. Un an après sa mise en place, aux quelque 2,6 millions de dollars reçus de cette fondation s’étaient ajoutés près de 8 millions en provenance d’autres sources. Le don Ford fut l’élément déclencheur dont le HCR avait besoin et eut des conséquences d’une portée considérable pour la poursuite de l’action internationale en faveur des réfugiés en permettant d’étendre désormais le champ d’action et les fonctions du HCR38. »
35En 1954, les États-Unis aussi bien que la France avaient commencé à changer d’attitude à l’égard du HCR. Rochefort avait déjà quitté le service du gouvernement français pour prendre son poste au CIME en novembre 1951, assistant, avec la création du Comité consultatif deux mois plus tôt, à l’échec spectaculaire des efforts qu’il avait déployés pour en finir avec le HCR. Aux États-Unis, l’élection d’Eisenhower en 1953 et l’habile initiative politique prise par Van Heuven Goedhart pour intervenir dans la crise des réfugiés de Berlin qui éclata la même année, étant toutefois entendu que les réfugiés allemands, en leur qualité de ressortissants de l’Allemagne de l’Ouest, ne relevaient pas techniquement parlant de son mandat, lui valurent le soutien vigoureux de Washington39.
36Lors de la 5e session du Comité consultatif du HCR, du 6 au 10 décembre 1954, les États membres de cet organe élurent à sa présidence l’État d’Israël en la personne de Menachem Kahany, diplomate chevronné et respecté. Dans le télégramme qu’il adressa à Jérusalem à l’attention de son supérieur, le ministre israélien des Affaires étrangères Moshe Sharett, Kahany rapporta ce qui suit :
« Vous n’ignorez pas, et je vous suis reconnaissant des félicitations (télégramme n° 26074 du 7.12.1954) que je viens de recevoir, que j’ai été élu à la présidence de cette session. Ma candidature avait été proposée par le représentant français […] et a été soutenue tant par la Belgique que par les États-Unis. Le délégué allemand a été élu vice-président et le délégué australien rapporteur. Tous les membres du Conseil consultatif prennent part à cette session, à savoir l’Allemagne, l’Australie, l’Autriche, la Belgique, le Brésil, le Danemark, les États-Unis, la France, Israël, l’Italie, le Royaume-Uni, le Saint-Siège, la Suisse, la Turquie et le Venezuela. »
« Cette session est de loin la plus importante pour ce qui est de l’avenir du HCR car c’est au cours de celle-ci qu’il doit être décidé d’affecter 17 millions de dollars pour les quatre années à venir au fonds d’urgence du Haut-Commissariat pour l’aide aux réfugiés et à son fonds pour des solutions permanentes. Une décision devra également être prise au cours de cette session en vue de transformer le Comité consultatif en comité exécutif chargé de gérer cette organisation, ainsi que de définir les nouvelles attributions de cet organe40. »
37Loescher a fait valoir clairement que le Fonds des Nations unies pour les réfugiés établissait officiellement pour la première fois un lien direct entre les gouvernements et le HCR, exposant ainsi celui-ci à des pressions gouvernementales qui ne passeraient plus par l’intermédiaire de l’Assemblée générale des Nations unies mais s’exerceraient directement entre un gouvernement donné et la direction du HCR. Celui-ci n’était plus un « électron libre » rendant compte directement à des donateurs privés comme les fondations Ford et Rockefeller41. C’est au sein de son Comité exécutif que les grandes orientations de l’action du HCR en faveur des réfugiés allaient être débattues et définies. Le Comité exécutif est ainsi devenu l’espace dans lequel interagissent gouvernements, institutions spécialisées des Nations unies, ONG humanitaires et, de nos jours, des organisations régionales comme l’UE, l’Union africaine ou l’Organisation des États américains.
Conclusion
38Voici plus d’un demi-siècle que le HCR et son Comité exécutif exercent un rôle totalement hégémonique pour ce qui est de la prise en charge des réfugiés dans le monde entier et de l’aide humanitaire à leur dispenser. Les spécialistes des sciences sociales qui nient l’existence même d’une « communauté internationale » et d’un « espace international » se doivent de répondre à une question toute simple : où se situent exactement le HCR et son Comité exécutif ?
39Si ces spécialistes se soucient d’honnêteté intellectuelle, ils doivent expliquer comment ils parviennent à faire entrer de force une entité telle que le HCR et son Comité exécutif dans leur carcan théorique composé d’États nations. Il ne suffit pas de balayer d’un revers de main le HCR en arguant qu’il s’agirait d’un exemple phénoménologique de plus de leur théorie d’une série sans fin d’engagements bilatéraux ou multilatéraux pris exclusivement entre États nations.
40Il leur faudrait concilier cela avec le fait que les fondations Ford et Rockefeller avaient agi en contradiction flagrante avec leur propre gouvernement en finançant le HCR, lui donnant ainsi les moyens d’exister alors que les États-Unis cherchaient à lui porter un coup fatal en le privant de subsides. Il leur faudrait également expliquer comment, dans leur meilleur des mondes marqué par l’exclusivité des États nations, une organisation comme le HCR, manifestement dénuée de territoire, a pu utiliser un État-nation, la Belgique, afin d’obtenir la création, dont elle a elle-même pris l’initiative, d’un Comité exécutif, forum où toutes sortes d’entités, gouvernementales, non gouvernementales, régionales, transrégionales et privées, se réunissent pour débattre de questions relatives aux réfugiés dans un seul et même espace ontologique.
41Un lecteur averti pourrait considérer que tout ce débat autour de l’existence ou de la non-existence d’un « espace international » n’est guère qu’une controverse entre historiens et spécialistes des sciences sociales. Il n’en est pas moins vrai, cependant, qu’il a une incidence directe et immédiate sur la nature même de l’action humanitaire, donc sur des vies humaines. L’âge d’or des États nations a été l’entre-deux-guerres, lequel commença par le massacre des Arméniens pour connaître son point culminant dans les atrocités inégalées de la Seconde Guerre mondiale. S’il est une différence entre le monde de la Société des Nations et celui des Nations unies (particulièrement après 1956), elle réside précisément dans l’émergence et la croissance d’une communauté internationale qui occupe un « espace international » et dont l’action s’inscrit dans cet espace, par opposition au simple conglomérat d’États nations qu’était la Société des Nations.
42Si le bilan des victimes arméniennes de 1915 a été au moins sept fois plus élevé que celui de l’actuelle crise des réfugiés syriens, cela est en rapport direct avec l’absence de tout espace international en 1915, par opposition à son existence de nos jours. Lorsque, en 1915, les Jeunes-Turcs nationalistes forcèrent les Arméniens à l’exil et à l’extermination, ils le firent dans le cadre de leur propre espace national. Étant donné l’absence de tout lieu de substitution à l’État-nation, les Turcs purent poursuivre le massacre sans relâche. Ludwig Ehrlich, professeur de Rafael Lemkin à la faculté de droit de Lemberg (Lviv), pouvait expliquer à son élève que tant qu’ils pratiquaient leurs atrocités sur leur territoire national, ils pouvaient tuer les Arméniens comme un éleveur supprime ses poulets.
43Cette même rhétorique fut reprise par les nazis, adeptes eux aussi de cette conception spatiale incarnée dans l’État-nation. L’exil puis l’extermination des Juifs d’Allemagne et d’Autriche étaient juridiquement justifiés en faisant valoir explicitement qu’ils avaient lieu dans les limites spatiales de l’État-nation allemand et ne pouvaient donc pas être contestés sur le plan international. Telle était, en résumé, l’argumentation officiellement avancée par les Allemands lors de la conférence d’Évian consacrée en 1938 aux réfugiés juifs. Dans un monde dénué de tout autre concept spatial, des nations pouvaient continuer sans incidence particulière à exterminer leurs peuples comme des poulets atteints de vermine, tant que cela se produisait dans les limites spatiales de leur État-nation.
44C’est en ce sens, entre autres, que l’on doit comprendre l’articulation étroite entre la création du droit international moderne sous l’égide des Nations unies et la naissance d’un « espace international ». La création de la convention sur le génocide par Lemkin et celle de la Déclaration universelle des droits de l’homme par René Cassin, toutes deux en 1948, celle de la quatrième convention de Genève sur la protection des personnes civiles par Georges Cahen-Salvador en 1949, la convention de 1951 sur les réfugiés et celle de 1954 sur les cas d’apatridie, dues l’une et l’autre à Jacob Robinson, ont aussi contribué à l’apparition d’un nouveau topos international que Robert Kolb a récemment qualifié en termes spatiaux de « nouvel univers juridique42 ».
45À cette liste d’accords et de traités qui ont contribué à établir un « espace international », on doit également ajouter la création du Comité consultatif du HCR, devenu par la suite Comité exécutif. Les « sages-femmes » à qui nous devons la naissance et les débuts de ce nouvel organe international étaient un ensemble composite d’acteurs étatiques et non étatiques. Si l’accouchement a été le fait de la Belgique (donc un État-nation), ce sont les fondations Ford et Rockefeller (donc des acteurs non étatiques) qui l’ont maintenu en vie. Le fait que ces deux fondations aient agi en contradiction flagrante avec la ligne politique officielle de leur propre État-nation, les États-Unis, et qu’elles aient eu gain de cause, en dit long quant à la nature non étatique de ce nouvel « espace international » qu’elles ont contribué respectivement à créer. À sa naissance, le Comité consultatif du HCR pouvait tout au plus émettre des avis à l’intention de Van Heuven Goedhart, Haut-Commissaire non étatique ; il ne pouvait pas ordonner à ce Haut-Commissaire de faire quoi que ce soit car celui-ci n’évoluait pas dans un espace national donné.
46Lorsque l’on considère le fait qu’à ce jour toutes les décisions du Comité exécutif du HCR ont été obtenues sur la base du consensus de l’ensemble de ses membres, en étroite concertation avec la direction du HCR, on commence à comprendre quelle a été l’ampleur de l’évolution de l’« espace international ». Outre ses États membres, le Comité exécutif associe régulièrement de nos jours à ses débats des délégués du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), d’autres institutions spécialisées des Nations unies (particulièrement l’UNICEF et l’OMS) et d’ONG humanitaires qui sont ses partenaires stratégiques comme Médecins sans frontières, CARE International, Save the Children ou Worldvision. À l’heure actuelle, la majeure partie de la coordination de la crise des réfugiés de Syrie et une grande part du financement des secours humanitaires font l’objet de discussions lors des réunions du Comité exécutif et de décisions prises à ce niveau.
47Si, en 1960, Raymond Aron n’envisageait pas tout l’éventail d’acteurs étatiques et non étatiques qui prennent part aujourd’hui au Comité exécutif du HCR, il a en revanche parfaitement perçu que la diplomatie était en train de changer sous ses yeux pour converger vers une seule et même plate-forme diplomatique internationale. La situation différait nettement des configurations spatiales antérieures qu’il avait connues dans l’entre-deux-guerres, régies exclusivement par des engagements bilatéraux, voire multilatéraux, entre États nations. L’épithète « universelle » qui accompagne chez Aron le terme « histoire » vise également une nouvelle qualité spatiale qui, a-t-il soudain reconnu, n’avait « jamais [existé] auparavant43 ».
48L’une des explications du fait que certains spécialistes de sciences sociales rechignent à accepter l’existence d’un « espace international » pourrait tenir à une certaine confusion entre « espace » et « territoire ». Le fait que le HCR est non-territorial ne rend pas moins réel l’espace qu’il occupe. Affirmer, comme le font certains spécialistes des sciences sociales, que l’espace dans lequel évolue le HCR serait virtuel contredit ipso facto les résultats spectaculaires, qui n’ont rien de virtuel mais sont bien réels, de son action dans le monde réel. La différence entre le nombre de victimes de l’exil des Arméniens en 1915 et celui de l’actuelle crise des réfugiés de Syrie parle d’elle-même. Elle résulte avant toute chose de l’action humanitaire du HCR et de tous ses partenaires. Si ces résultats sont ontologiquement réels, ceux qui sont à leur origine doivent se situer dans un type de configuration spatiale qui n’est certainement pas national.
49Pour les réfugiés, les apatrides et ceux qui ont besoin d’une aide humanitaire, les massacres ne se sont que trop souvent inscrits dans un cadre territorial national. Le salut pourrait bien résider pour eux dans un espace qui n’est ni national ni territorial. Tel est l’« espace international ».
Notes de bas de page
2 « Le nombre de déplacements forcés dans le monde dépasse 50 millions pour la première fois depuis la Seconde guerre mondiale selon un Rapport du HCR », Guterres A., Haut Commissaire des Nations unies pour les réfugiés, communiqué de presse du 20 juin 2014, disponible à l’adresse suivante [http://www.unhcr.org/53999cf46.html].
3 Ben-Nun G., « From Ad Hoc to Universal : The International Refugee Regime from Fragmentation to Unity » (« Le régime international relatif aux réfugiés : de la fragmentation à l’universalité », Refugee Survey Quarterly, vol. 2, n° 34, Oxford University Press, 2015, p. 23-24.
4 Aron R., « L’Aube de l’histoire universelle », Conférence donnée à Londres sous l’égide de la Société des amis de l’université hébraïque de Jérusalem, publiée dans Dimensions de la conscience historique, Paris, Plon, Recherches en sciences humaines, vol. 16, 1961, p. 260-295. Traduit par : Bray B. (2002), The Dawn of Universal History : Selected Essays from a Witness of the Twentieth Century, New York : Basic Books, 1961, p. 463-486 at 48. Traduction : Angoustures A.
5 Hanhimäki J. M., « The United Nations : A Very Short History », Oxford UK, Oxford University Press, 2008, p. 19-23.
6 Carr E. H., « The Twenty Years Crisis, 1919-1939 : An Introduction to the Study of International Relations », 2nd reprint New York : Harper and Row, 1939, p. 217-218, réédité par Palgrave Macmillan, 2001, introduction de Cox M.
7 Ben-Nun G., « From Ad Hoc to Universal… », art. cit., p. 28-38. Voir également Glynn Irial, « The Genesis and Development of Article 1 of the 1951 Refugee Convention », Journal of Refugee Studies, n° 25, vol. 1, Oxford University Press, 2012, p. 134-148.
8 Sur le groupe de diplomates qui constituait le « Réseau Robinson » voir Ben-Nun G., « The Israeli Roots of Article 3 and Article 6 of the 1951 Refugee Convention », in Journal of Refugee Studies, n° 27, vol. 1, Oxford University Press, 2014, p. 103-109.
9 Ben-Nun G., « From Ad Hoc to Universal… », art. cit., p. 40.
10 C’est ce que l’on appelle couramment la « vengeance de Soldatov ». Voir Einarsen T., « The Drafting History of the 1951 Convention and the 1967 Protocol », in Zimmerman A., Dörschner J. & Machts F., « The 1951 Convention Relating to the Status of Refugees and its 1967 Protocol : A Commentary », Oxford, Oxford University Press, 2011, p. 58, p. 68.
11 Loescher G., The UNHCR and World Politics : A Perilous Path, Oxford, Oxford University Press, 2001, p. 93-95.
12 Archives Nationales britanniques, London Kew Gardens, File # HO 274/9, General Assembly VII Item 29 (Provisional Agenda) : Projet de Protocole relatif au statut d’apatride, H. T. A. Overton, 6 Oct. 1952, p. 2, point 6.
13 Sur les alignements politiques pendant et après la rédaction de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et la division entre « européistes » et « universalistes » (pour reprendre les termes de Robinson J.) voir Ben-Nun G., « Les racines israéliennes de l’article 3… », ibidem, p. 109-112. Voir également Ben-Nun G., « The British-Jewish Roots of Non-Refoulement and its True Meaning for the Drafters of the 1951 Refugee Convention », Journal of Refugee Studies, n° 28, vol. 1, Oxford University Press, 2015, p. 95-100.
14 Dossiers des archives nationales israéliennes (ISA)/du ministère des Affaires étrangères 19/10/RG 93.38/1-31, Jacob Robinson à Moshe Sharett et Walter Eytan., « Genève. Quatrième et dernier rapport de la Conférence des Plénipotentiaires sur le statut des Réfugiés et des apatrides », 1er août 1951, p. 3-4.
15 Loescher G., UNHCR and World Politics…, op. cit., p. 50-61.
16 Ibid. p. 62-67. Voir également Ben-Nun G., « From Ad Hoc to Universal… », art. cit., p. 27-28.
17 Loescher G, UNHCR and World Politics…, op. cit., p. 57-59.
18 Archives de l’OFPRA, dossier n° DIR3/0bis, Comité intergouvernemental provisoire pour les mouvements migratoires d’Europe, Lettre de Robert Rochefort à Jean Lescuyer, en date du 2 décembre 1952, signée par Rochefort, conseiller diplomatique.
19 Voir la contribution de Frédéric Tiberghien, dans le même volume.
20 Ben-Nun G. « From Ad Hoc to Universal… », art. cit., p. 30-33.
21 Van Heuven Goedhart G. J., The Problem of Refugees, Leiden, A. W. Sijthoff Publishers, 1953, p. 12-20.
22 Ben-Nun G., « From Ad Hoc to Universal… », art. cit., p. 33-38.
23 Ibid, p. 35.
24 Les Archives diplomatiques – Royaume de Belgique, Dossier n° 13717/I – Apatrides et définition de réfugiés, 9 avril 1951, Ref. 50/5. Note pour monsieur Delhaye, directeur de P. II (ci-après « Herment Apatrides et définition »). Toutes les traductions du français ont été effectuées par l’auteur.
25 Idem, 9 juillet 1951, point 29 : Réfugiés et apatrides.
26 Idem, n° P. II/0.4.13/51/8452, A. Chaval à la direction de l’Organisation Internationale et du Règlement de la Paix, point 29 de l’ordre du jour de la 13e session de l’ECOSOC, 25 juillet 1951, point 1.
27 Ibidem. point 2.
28 Les Archives diplomatiques – Royaume de Belgique, n° 20/12910, Très urgent – note pour la direction générale P. 2e direction, 1er août 1951, p. 1-2.
29 Ibid., p. 2.
30 Les archives diplomatiques – Royaume de Belgique, télex en date du 14 août 1951 (date manuscrite) et intitulé (écrit aussi à la main), point 29, adressée à Delhaye à l’hôtel Richmond à Genève.
31 Idem, n° P. II/0.4.13/51/9174, Objet : Pouvoir de Haut-Commissaire aux réfugiés, Paul Bihin à L. G. Delhaye, 16 août 1951.
32 Archives diplomatiques, Royaume de Belgique, Bureau européen des Nations Unies, James Read à Delhaye, avec projet de résolution joint, document des Nations Unies E/L.245, 22 août 1951.
33 Idem, James Read à Delhaye, 27 août 1951, avec copie au délégué britannique John Beith. Souligné dans l’original.
34 Idem, James Read à Delhaye, mémorandum intérieur, objet : Résolution sur le Comité consultatif, 29 août 1951.
35 Idem, James Read à Delhaye, mémorandum intérieur, objet : Délai de présentation de la résolution, 29 août 1951.
36 Archives diplomatiques, Royaume de Belgique, rapport n° 31, objet : Point 29, rapport du Haut-Commissaire pour les réfugiés : Création d’un Comité consultatif pour les réfugiés, Gaston Eyskens à Joseph Meurice, le 12 septembre 1951, reçu par le ministère des Affaires étrangères à Bruxelles le 17 septembre 1951 (ci-après « Rapport Eyskens »).
37 Loescher, UNHCR and World Politics…, op. cit., p. 66-72.
38 Ibid., p. 67.
39 Ibid, p. 69-70.
40 Archives de l’État d’Israël, fonds du ministère des Affaires étrangères, référence ISA/RG 93.38/1-31/MFA 10/19 ; objet : 5e session du Comité consultatif auprès du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ; télégramme de Menachem Kahany à Moshe Sharett, ministre des Affaires étrangères, sous couvert du directeur des affaires des Nations Unies au ministère israélien des Affaires étrangères, Jérusalem, 8 décembre 1954 (cachet d’arrivée : 12 décembre 1954), référence \די\כמ2289 [original en hébreu].
41 Loescher G., UNHCR and World Politics…, op. cit., p. 71.
42 Kolb R., « The Protection of the Individual in Times of War and Peace », in Fassbender B. & Peters A. (ed.), The Oxford Handbook of the History of International Law, Oxford, Oxford University Press, 2012, p. 328.
43 Supra, p. 2.
1 L’auteur tient à mentionner le financement reçu de l’Institut historique allemand (DHI), à Paris, au cours du deuxième semestre de 2015, ce qui a facilité la collecte des documents cités dans la présente étude. Les commentaires sont les bienvenus à l’adresse suivante [gilad.bennun@univr.it].
Auteur
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008