« Tout est permis dans la Guerre, mais tout ce qui est permis ne se doit pas faire ». La « désolation du Palatinat » (1688-1689) à l’épreuve du droit de la guerre
p. 229-252
Texte intégral
« Il vint à l’armée un ordre de Louis signé Louvois, de tout réduire en cendres. Les généraux français, qui ne pouvaient qu’obéir, firent donc signifier, dans le cœur de l’hiver, aux citoyens de toutes ces villes si florissantes et si bien réparées, aux habitants des villages, aux maîtres de plus de cinquante châteaux, qu’il fallait quitter leurs demeures, et qu’on allait les détruire par le fer et par les flammes. […] On commença par Manheim et Heidelberg, séjour des électeurs : leurs palais furent détruits, comme les maisons des citoyens ; leurs tombeaux furent ouverts par la rapacité du soldat qui croyait y trouver des trésors ; leurs cendres furent dispersées. […] L’Europe en eut horreur. […] Si le roi avait été témoin de ce spectacle, il aurait lui-même éteint les flammes. Il signa, du fond de son palais de Versailles et au milieu des plaisirs, la destruction de tout un pays, parce qu’il ne voyait dans cet ordre que son pouvoir et le malheureux droit de la guerre ; mais de plus près, il n’en eût vu que l’horreur1. »
1Dans ces quelques lignes extraites du récit qu’il propose de « l’embrasement du Palatinat » en 1688-1689, Voltaire reprend à son compte le prisme central de la dénonciation dont ces opérations militaires françaises ont fait l’objet dès le moment où elles sont advenues, à savoir « le malheureux droit de la guerre ». Par cette formule, il ne dépeint cependant pas Louis XIV en fossoyeur du droit de la guerre, mais rappelle que lui-même prétendait s’y référer. S’étant appuyé à la fois sur les histoires de Louis XIV précédemment publiées et sur la presse contemporaine des faits pour établir cette grille narrative de l’événement qui fait par la suite autorité au moins jusqu’au début du xixe siècle, Voltaire se fait ici implicitement l’écho du débat polémique, ouvert fin 1688, sur la licéité de la mise en œuvre de telles opérations de destructions systématiques, celles-ci étant alors mises à l’épreuve du droit de la guerre par ceux qui les dénoncent, mais aussi par ceux qui ponctuellement les justifient.
2Arguant de la politique d’agression menée selon lui par la Ligue d’Augsbourg2, revendiquant au nom de Madame Palatine, sa belle-sœur, des territoires de l’électorat du Palatinat, et enfin exigeant la nomination de son candidat, le cardinal de Fürstenberg, comme archevêque-électeur de Cologne3, le 24 septembre 1688 Louis XIV adresse à l’Empereur un manifeste donnant trois mois à celui-ci pour se conformer à ses exigences4. Dans l’intervalle, il annonce l’investissement de la forteresse palatine de Philippsbourg sur la rive droite du Rhin, marquant ainsi le début de la guerre de Neuf Ans5 (1688-1697)6. Après quelques semaines de campagne, les territoires des États du Saint-Empire situés de part et d’autre du Rhin moyen et supérieur furent occupés. Anticipant une retraite inévitable de ses troupes sur la ligne des forteresses françaises de la rive gauche, le Roi-Soleil décida, face à la mobilisation rapide de nombreux États d’Empire et à la multiplication des fronts par la formation d’une large alliance anti-française, de mettre en œuvre une stratégie de destruction systématique7. Elle reposait sur des pratiques militaires de maîtrise, d’appropriation et d’exploitation de territoires occupés en temps de guerre, qui étaient bien connues des armées européennes de la fin du xviie siècle. C’est guidé par une prédilection pour les mesures préventives et une obsession défensive que Louis XIV forgea graduellement avec ses conseillers, sur la base de ces pratiques, une stratégie de dévastation radicale qui l’amena en particulier, dans une logique maximaliste, à concevoir et mettre en œuvre (imparfaitement) la destruction de villes entières8. « Application extrême de pratiques militaires classiques9 », cette stratégie draconienne était le fruit de la politique de « défense agressive10 » que le Roi-Soleil mettait en pratique depuis la guerre de Hollande (1672-1679). Dans un contexte international où l’espace rhénan constituait la scène principale sur laquelle se jouait désormais l’antagonisme entre les Bourbons et les Habsbourg, le flou de la marqueterie territoriale qu’était la frontière Est faisait dès lors l’objet de toute son attention. Poursuivant des desseins défensifs par des moyens offensifs, Louis XIV visait ainsi à sanctuariser l’espace étatique intérieur en sécurisant ses marges. À une époque où les conflits militaires prenaient la forme de guerres d’usure aux considérations logistiques fondamentales, l’objectif de cette stratégie était donc double. À court terme, il s’agissait de dénier à l’adversaire tous moyens de ravitaillement, tout en entretenant ses propres armées. À long terme, ces opérations avaient pour finalité d’empêcher toute intrusion dans le royaume au niveau de l’Alsace et de la Sarre, par la mise en place d’une zone tampon démantelée en avant d’une frontière régularisée. Ainsi, pendant plus d’un an, de l’automne 1688 au début de l’hiver 1689, ces opérations françaises de grande ampleur se déployèrent le long du Rhin, de Cologne à Fribourg, des électorats de Trêves, Mayence et Cologne au nord, aux margraviats de Bade au sud, et plus particulièrement dans l’électorat du Palatinat et ses dépendances, ainsi que dans les archevêchés de Worms et Spire. C’est donc un ensemble complexe d’opérations faites de pratiques diverses et composites, fruit d’une stratégie évolutive à la chronologie longue et à la géographie changeante, qu’il faut mettre en évidence derrière la dite « désolation du Palatinat ».
3Ces opérations de destruction ont été érigées en événement, c’est-à-dire en une unité historique qui s’arrache à la continuité banale de l’ordinaire de la guerre et de ses violences pour en devenir une discontinuité remarquable11. Or, c’est dans l’insertion de ces opérations militaires françaises au sein du système d’information de l’Europe moderne que se joue le passage de cette complexité initiale à cette simplicité nominale. Dès qu’elles adviennent, elles ont en effet été portées à l’attention des publics européens par des supports imprimés très divers – des périodiques d’information politique aux chroniques et histoires en passant par les relations, les libelles, feuilles volantes et les placards illustrés ou non – qui les décrivent, les narrent, les condamnent, parfois les justifient. Dans le contexte politique européen d’une opposition grandissante au Roi-Soleil depuis la guerre de Hollande (1672-1678) et la révocation de l’Édit de Nantes (1685)12, elles ont alors fait scandale. Mises publiquement en accusation comme une atteinte à la justice, les opérations françaises sont notamment désignées par leurs dénonciateurs comme une transgression des lois de la guerre, en rupture avec un idéal de guerre juste (justum bellum) alors mobilisé comme grille interprétative des conflits. L’insertion médiatique des opérations françaises, comme leur dénonciation, ne fut pas uniforme, les échelles de l’information comme de la condamnation étant multiples et répondant notamment aux enjeux propres à chaque espace politique. Trouvant en particulier dans un droit de la guerre balbutiant un ressort interprétatif commun, cette dénonciation semble s’être cependant caractérisée par une dimension transnationale – ici « européenne » –, qui a résulté des multiples dynamiques d’échanges, notamment médiatiques, entre les échelles locales, nationales et internationales13. C’est donc dans le cadre d’une histoire croisée des espaces politiques, centrée sur le « tétraèdre médiatique de l’espace européen14 » à l’époque moderne – à savoir l’Angleterre, la France, les Provinces-Unies et le Saint-Empire –, que notre propos s’inscrit. Dans cette perspective, nous chercherons donc à montrer que : d’une part, malgré l’inaboutissement de sa formalisation, le droit de la guerre constituait bien, dans l’Europe de la fin du xviie siècle, une norme pratique d’évaluation des conflits ; d’autre part, la dénonciation de ces opérations (sur la base notamment de ce référent juridique), a participé du processus de singularisation aboutissant à la constitution d’un événement appelé « désolation du Palatinat », et faisant désormais sens.
De la cause à la forme : dénoncer la manière de faire la guerre
« Monsieur,
Je continuerai dans cette lettre mes réflexions sur les trois écrits dont je vous ay déja entretenu. Mais je ne puis m’empêcher auparavant de m’arrêter un peu sur un fait des plus remarquables qui vient d’arriver, et qui réfute que trop solemnellement tout ce qu’on peut alléguer en faveur des desseins et des intentions de la France : je parle de la dernière désolation qui vient d’être exercée dans les villes du Palatinat, et particulièrement à Heidelberg, lors que les troupes françoises en sortirent le 3 de ce mois en y laissant des monumens de fureur et de barbarie que les précédentes guerres n’avoient point connu. Vous aurez vu dans les relations publiques que les habitans de cette villes capitale et célèbre, après s’être rendus sur la foi d’une capitulation dont ils croyoient que leur conquérant se feroit honneur, n’ont pas laissé d’être traitez de la même manière que s’ils s’étoient rendus à discrétion, ayant été accablez par des contributions extraordinaires et réitérées, et enfin s’étant vus réduits à cette dure extrémité de souhaiter encore plutôt la continuation du séjour de leurs ennemis que leur retraite, puis qu’elle a été accompagnée du pillage, de l’incendie et de la destruction de tous les édifices publics, et qu’ils ont vu sauter en l’air et consumer par le feu le palais de leur électeur, l’un des plus beaux de l’Europe, que les fureurs de la guerre avoient respecté jusqu’alors et qui n’est plus qu’un affreux monceau de pierre et de cendre. En sorte qu’il semble que les François ayent pris à tâche de marquer par cette action qu’ils n’ont pas plus d’égard pour les loix de la guerre que pour les traitez de paix.
Il est vrai que la guerre ne se décide que par le sort des armes, et qu’à cet égard elle ne connoît que la force, et le bonheur du succez. On ne voit même que trop souvent que ce bonheur se déclare pour des entreprises injustes ; ce qui fait que tous les vainqueurs mesurent également la justice de leur cause par les heureux événemens. […] Mais cependant malgré tous ces abus et cette confusion apparente, cela n’a pas empêché qu’on n’ait toujours fait un grand cas parmi les hommes du droit que la justice donne, soit à l’égard de la guerre, soit à l’égard de la paix ; et c’est ce qui a fait dire de tout temps que l’assurance d’une juste cause donne un grand pouvoir, parce qu’elle a pour compagne ordinaire l’espérance d’un bon succez. […] C’est aussi sur ce fondement que la guerre à ces loix aussi bien que la paix, non seulement pour l’entreprendre avec justice et necessité ; mais aussi pour l’exécuter avec religion et circonspection à l’égard des bornes prescrites par l’usage commun ; parce que les armes étant journalières, la loi qu’on impose aux vaincus peu[t] devenir nécessaire aux vainqueurs. Comme il suffit donc que l’équité de la cause ait un grand pouvoir pour obliger d’agir par ce principe, quoi que son effet soit souvent éludé ; aussi ne peut-on renverser les loix établies dans les exécutions militaires, sans faire de la guerre un théâtre perpétuel de confusion et d’horreur15. »
4C’est ainsi que débutait la septième livraison des Lettres sur les matières du temps, qui paraissaient à Amsterdam depuis février 168816. Ce périodique d’information politique francophone publié en Hollande, qui se présentait sous la forme d’une fiction épistolaire mettant en scène un réfugié français d’Amsterdam écrivant à un ami réfugié à Londres, était un des plus importants paraissant au début du conflit. Il s’agissait plus précisément d’un mercure historique et politique, soit une forme périodique et éditoriale originale17, qui était le fruit du dynamisme de la librairie hollandaise, en particulier dans le domaine de la production francophone18. Avec les gazettes d’information politique de langue française19, ces mercures faisaient des Provinces-Unies le centre de l’information européenne à la fin du xviie siècle20. Destinés à être reliés en volumes conservables, ces mensuels d’information politique s’étaient donnés pour objectif de proposer, au-delà de l’éphémère des nouvelles – dû en particulier à leur périodicité –, une véritable « histoire du temps présent européen », sous la forme d’un commentaire suivi de l’actualité. Les premiers mercures francophones étaient rédigés par des huguenots français qui avaient pris la plume dans l’exil21, comme c’était le cas ici de Jean Tronchin du Breuil22. Malgré son anonymat nominal, ce statut de réfugié français en Hollande était une caractéristique essentielle de l’identité auctoriale adoptée par leurs rédacteurs dans ces mercures. Apparaissant en lien avec la crise anglaise débutant en 1687, ces périodiques étaient a priori favorables à Guillaume d’Orange, dont ils servaient les intérêts. Néanmoins, il ne s’agissait pas d’une presse de propagande, et ils se distinguaient de l’écriture libelliste par une pédagogie argumentative, dont l’objectif était avant tout didactique et non polémique23. Avant les pamphlets et parallèlement aux gazettes, ce fut dans ces mercures que les opérations militaires françaises acquirent certaines des caractéristiques fondamentales de leur forme événementielle24. En effet, par rapport aux gazettes dont les dépêches étaient les premières à rapporter les faits, les mercures bénéficiaient de ce minimum de recul nécessaire à la constitution d’une unité événementielle, car « [i]l faut un minimum d’avant et d’après pour construire l’unité de sens qui fait de quelque chose qui se passe un événement25 ». C’est bien le cas dans cet extrait, où le correspondant fictif affirmait le caractère remarquable de ce qu’il nommait « désolation exercée dans les villes du Palatinat ». Dans ce récit qui contribuait à forger l’événement en le nommant et le narrant, il faisait explicitement le lien entre une exceptionnalité qu’il affirmait, et le caractère de transgression du droit de la guerre qu’il lui conférait. Reflétant l’usage pratique qui est fait des théories du droit de la guerre à la fin du xviie siècle, cette analyse était parfaitement représentative de l’argumentaire de dénonciation des opérations militaires françaises alors déployé dans les supports imprimés.
5Fruit d’une réflexion théologico-juridique ancienne et complexe, le droit de la guerre26 avait fait l’objet d’une première théorisation au Moyen Âge. Prenant la forme d’une doctrine scolastique de la juste cause, d’abord élaborée par Augustin, et acquérant ensuite son unité et sa cohérence au travers des travaux de nombreux théologiens, canonistes et jurisconsultes, il avait finalement trouvé un premier aboutissement doctrinal chez Thomas d’Aquin27. C’est la licéité matérielle28 de la guerre qui prévalait dans cette théorie de la juste cause, dominante jusqu’au xviiie siècle29 : elle définissait donc avant tout un jus ad bellum, ou droit de faire la guerre, pour tout détenteur d’une autorité légitime (auctoritas principis) qui disposait d’une juste cause (justa causa) ; celle-ci l’autorisait alors à user de tous les moyens de la guerre contre son ennemi, c’est-à-dire qu’elle lui accordait un jus in bello, ou droit dans la guerre, illimitée (infinitum)30. Cependant, dès l’Antiquité, les pratiques militaires avaient témoigné de l’existence en filigrane d’un principe d’humanité et de modération qui pondérait cette impunité théorique. À l’époque médiévale, des coutumes en usage furent consacrées par la doctrine scolastique. Celle-ci proposa ainsi une première tentative de théorisation au travers de la notion thomiste d’intention droite (recta intentio), recommandant de combattre sans cruauté et de manière chrétienne. Néanmoins, cette réflexion doctrinale relevait plus de la casuistique que d’une véritable formalisation, proposant moins un jus in bello qu’un usus in bello.
6À la suite notamment des travaux d’une part de l’École de Salamanque – principalement de Francisco de Vitoria et de Francisco Suarez – dominant la seconde scolastique espagnole, et d’autre part d’Alberico Gentili, cette théorie de la juste cause définissant un idéal de guerre juste (justum bellum) avait trouvé sa formulation définitive dans la synthèse doctrinale qu’en avait proposé en 1625 Hugo Grotius. Connaissant une très large diffusion, son De Jure Belli ac Pacis fit ainsi autorité jusqu’au xviiie siècle31. Or, sous l’impulsion de Vitoria, Suarez et Gentili, le débat doctrinaire s’était recentré au xvie siècle sur le jus in bello, et notamment sur la question de la régularité formelle de la guerre32. Ainsi, sous l’influence du formalisme juridique romain, il s’agissait dès lors d’interroger la justesse non plus de la cause, mais de la manière de faire la guerre. Bien que jusqu’au xviiie siècle, la licéité de la cause ait conditionné la conduite de la guerre – c’est-à-dire que le jus in bello était fonction du jus ad belllum –, la rencontre de la doctrine scolastique médiévale et de la modernité, couronnée par la synthèse grotienne33, pose alors les premiers jalons d’un jus in bello qui ne fut cependant véritablement théorisé qu’à l’époque des Lumières34. Ainsi, à la fin du xviie siècle, la théorie énonçait qu’en accordant un jus in bello illimité, une cause juste permettait tout a priori, mais que ce jus in bello infinitum connaissait néanmoins des limitations. Celles-ci étaient à la fois d’ordre théorique et d’ordre pratique. D’un point de vue théorique, ces limitations s’appuyaient sur l’affirmation d’un droit naturel obligeant moralement. D’un point de vue pratique, elles reposaient sur un formalisme objectif fondant un droit positif dit « droit des gens », qui reposait sur l’usage et la coutume, c’est-à-dire sur un ensemble de normes issues de la répétitivité et de la généralité de leur application ainsi que de la fraternité d’armes35. En bref, ce n’était donc pas parce que tout était permis – c’est-à-dire non sanctionné –, qu’il était juste – c’est-à-dire souhaitable – de tout pratiquer.
7C’était très exactement le propos de notre correspondant fictif dans les Lettres sur les matières du temps. Certes l’équité de la cause était permissive, mais la morale et la coutume s’imposaient comme facteurs limitatifs, prohibant la cruauté et l’inhumanité qui naissent de l’excès36. C’était donc à cet excès que la France avait selon lui cédé, car « [e]lle a[vait] plus voulu garder de regle ni de mesure37 ». S’indignant des opérations militaires françaises dans les territoires rhénans, l’auteur de La France toujours ambitieuse et toujours perfide – libelle allemand rédigé en latin puis traduit « librement en français » car « ce livre a êté trouvé fort bon38 » – résumait ainsi, dans un registre cette fois polémique, cet argumentaire de dénonciation :
« Tout est permis dans la guerre, mais tout ce qui est permis ne se doit pas faire. On doit observer inviolablement dans la guerre aussi bien qu’ailleurs les règles de l’honnêteté, les coutumes reçues par toutes les nations bien morigénées, et sur tout les loix du christianisme. Or la conduite des François dans cette action est directement opposée, et à la coutume et à l’honnêteté et au christianisme39. »
8Ainsi, à l’image de la démonstration proposée par ces auteurs, la dénonciation des opérations militaires françaises sur la base de l’idéal de guerre juste témoignait d’une parfaite assimilation de l’état doctrinal du droit de la guerre alors en vigueur. Cette dénonciation montrait en effet à la fois la prégnance de la doctrine scolastique médiévale mettant en avant la causa, et une assimilation de ses évolutions doctrinales modernes accordant désormais une place essentielle à la guerre régulière, qui reposait sur le respect des pratiques coutumières régissant la conduite des hostilités40. Plus encore que le libelle précédemment cité, les Lettres sur les matières du temps semblent avoir connu une large diffusion en Europe, où ce mercure circule à la fois dans sa version originale et sous forme de traductions41. Dans cette perspective, l’emploi d’un tel discours argumentatif dans un périodique politique qui pensait son lectorat à l’échelle de l’Europe, et donc envisageait pleinement le caractère composite des publics auxquels il prétendait s’adresser, tendait à montrer que l’idéal de guerre juste constituait alors, non pas uniquement un lieu commun42, mais un ressort argumentatif commun, voire une norme commune d’évaluation des conflits. Cette convergence était rendue possible, notamment par le caractère aconfessionnel de cette grille d’interprétation – le droit de la guerre n’étant moralement ni protestant, ni catholique, mais chrétien –, ce qui constituait un avantage non négligeable pour une alliance militaire anti-louis-quatorzienne multiconfessionnelle.
« Ces feux ont été justes, nécessaires et utiles » : la récusation française
9Ce n’est donc sans aucun doute pas un hasard si c’est un support comparable qui fut choisi pour répondre à la dénonciation des opérations militaires françaises. En effet, la publication avec privilège par Jean Donneau de Vizé43, à partir d’octobre 1688, des Affaires du temps44 témoignait de l’importance accordée à ces mercures, et sans aucun doute de leur succès à l’étranger comme en France, où ils entraient clandestinement dans les ballots de livres en provenance des Provinces-Unies45. Si ce nouveau périodique présentait des caractéristiques éditoriales et rhétoriques proches des mercures historiques et politiques hollandais, il était véritablement pensé et affiché comme un « anti-mercure46 ». Présenté comme un supplément du Mercure galant avec pour objet la guerre en cours, et le rôle qu’y tenait la France, les Affaires du temps offraient ainsi une écriture au service du roi, connue comme telle du lectorat, produite par un auteur pensionné, qui proposait une réfutation des « divers écrits qui paroiss[aient] en Hollande tous les mois », et en particulier des Lettres sur les matières du temps qui étaient régulièrement visées de manière explicite47. C’est dans cette perspective que les Affaires du temps traitèrent à plusieurs reprises des opérations militaires françaises dans les territoires rhénans, comme ici dans la sixième livraison datée de mars 1689 :
« Ainsi, comme les mesures qu’on avoient prises contre [la France] estoient grandes, et concertées depuis longtemps, il falloit si elle vouloit résister au torrent d’ennemis qui s’estoient liguez pour inonder ses États, qu’elle se servit de tout ce que permet la politique de la guerre. Il falloit qu’elle ruinast quelques places pour éviter la désolation de toutes les siennes, et que les peuples d’un petit État souffrissent, pour empescher des traitemens plus cruels dont on menaçoit de plus grands États. Voilà ce qui a esté cause que le roy a ruiné quelques places du Palatinat, et ce qui a donné lieu à tous les écrivains de Hollande de se récrier contre le procédé de la France, qu’ils ont nommé injuste et cruel, et d’en faire des peintures plus vives que ressemblantes, sans vouloir examiner qu’elle n’a rien fait qui ne soit permis par l’usage de la guerre. Elle ne pouvoit empescher les ennemis d’entrer chez elle de ce costé-là, qu’en faisant une espèce de désert entre elle et eux, afin de leur oster les moyens de subsister et de se fortifier dans les lieux voisins de ses provinces. […] C’est ainsi que le propriétaire d’une maison à laquelle le feu a pris consent qu’on abatte la maison prochaine qui luy appartient aussy, pour empescher que le feu n’attaque celle qui suit, soit qu’elle soit à luy, ou non, parce que la raison et le bien public exigeant ce remède quoyque la violence en soit fâcheuse, il seroit contraint de le souffrir, quand mesme il refuseroit son consentement. On ne peut nier que ses choses estant dans l’estat que je vous ay fait connoistre, la France n’ait agy comme elle a dû, sans qu’on soit en droit de luy rien reprocher avec justice. […] Cependant, quoy que le roy ait agi selon les loix de la guerre, et que l’électeur palatin se soit attiré le peu de ménagement qu’on a eu pour ses États, les choses se sont passées que de la manière qu’elles sont autorisées par l’usage. Quelques habitans ont esté obligez de changer de demeure et de transporter leurs effets en d’autres lieux, après avoir eu tout le temps nécessaire pour s’y établir, et d’autres ne sont sortis de ces places que pendant le temps qu’on a fait sauter quelques fortifications, et ils y sont retournez ensuite de sorte que la prétendue cruauté dont on a fait tant de bruit n’a esté exercée que sur des pierres, et cela pour oster aux ennemis le moyen d’entrer en France de ce côté-là, et de se saisir de postes fortifiez, dont ils auroient pu se servir contre elle48. »
10L’argumentaire était clair : la cause était juste et se nommait nécessité ; par conséquent, la méthode l’était tout autant, car tout était permis ; et elle était de surcroît conforme à l’usage. Alors que Louis XIV était présenté par ses détracteurs comme le fossoyeur de la guerre juste49, la démonstration proposée ici par un de ses porte-paroles témoignait de la prégnance de la doctrine scolastique de la juste cause, au fondement du manifeste du 24 septembre. En effet, à l’image du Roi-Soleil déclarant faire la guerre pour « arrester le cours des injustices et violentes usurpations de l’électeur palatin50 », Donneau de Vizé faisait ici appel à une conception médiévale de la guerre comme acte de justice à la fois vindicative et punitive, devant rétablir un droit lésé et accordant tous les moyens nécessaires à la sanction et la réparation de l’injuria. En usurpant les droits de Madame Palatine, l’électeur du Palatinat s’était attiré les justes foudres du souverain, alors autorisé à entrer en guerre contre lui, et à employer tous les moyens pour entrer dans son droit. Ce droit de guerre notamment dans cette dimension médiévale constituait un élément essentiel de la souveraineté du roi de France, telle qu’elle était définie au xviie siècle51. Ainsi, Louis XIV écrivait dans ses Mémoires : « La guerre, quand elle est nécessaire, est une justice, non seulement permise, mais commandée aux rois52. »
11Néanmoins, au-delà du rétablissement de droits lésés et de la sanction du coupable, c’est la nécessité qui était véritablement le cœur de l’argumentaire. Là encore, le rédacteur se référait à une conception médiévale de la guerre comme ultima ratio ou dernier recours, telle qu’elle était initialement définie dès les écrits augustiniens. Elle impliquait alors une situation où, pressé par l’urgence et l’extrémité de la position dans laquelle il se trouvait, le belligérant était forcé d’opter pour le conflit armé. Alors, comme le manifeste qui rejetait avant lui sur les ennemis de la France « le blasme de la necessité où ils l’ont mise53 », le porte-parole du souverain postulait ici une nécessité, qui s’imposait à lui comme un facteur externe l’obligeant et le plaçant dans l’extrémité. De la nécessité initiale d’« oster à la cour de Vienne les moyens de lui nuire54 » en mettant à l’abri les frontières du royaume, renforcée par une nécessité conjoncturelle résultant de l’avancée des troupes alliées, découlait la justice des moyens employés, soit la dévastation de territoires ennemis. Un mois plus tard, Donneau de Vizé revint sur le sujet dans la septième livraison datée d’avril 1689. Son argumentation s’appuyait cette fois sur un exemple tiré d’une vie d’Alexandre, et faisait endosser au Roi-Soleil non pas le costume de cette figure privilégiée de la propagande des premières années du règne55, mais celui du Grand Roi de l’Empire perse :
« Sa Majesté n’a fait en cela que ce qu’Elle a dû faire, comme je vous l’ay fait voir plus au long, en justifiant par de fortes raisons, la destruction de plusieurs places du Palatinat, à quoy je dois encore ajouter celle-ci que l’on trouvera dans Quinte Curse. Memnon le Rhodien conseilla à Darius de faire brûler plusieurs places de l’Asie Mineure pour empescher qu’Alexandre n’entrast dans ses États. D’abord Darius ne voulut point suivre des avis si salutaires, mais le péril commençant à le presser, il fit mettre le feu à quelques-unes. Il estoit trop tard et Alexandre estoit trop proche, de sorte que ce conquérant arriva assez à temps pour le faire éteindre. Par là Darius fut contraint de succomber, et pour avoir voulu épargner quelques places, il ne put sauver sa personne. La politique du roy a esté meilleur, et sa prudence plus grande. Il a osté à ses ennemis tout ce qui leur pouvoit faciliter les moyens de venir à luy, et ce qui doit empêcher de crier comme on fait injustement contre un procédé qui estoit absolument nécessaire, c’est qu’en ruinant seulement des maisons et des murailles, il a épargné le sang de plusieurs milliers d’homme de l’un et de l’autre party, qu’on auroit indubitablement vu couler, si ce monarque n’eust pris une résolution si ferme56. »
12Cet argumentaire de la nécessité tel qu’il était développé par le rédacteur des Affaires du temps au fil des livraisons présentait une grande proximité avec ce qu’Alberico Gentili définissait comme « nécessité de guerre ». C’était ainsi en effet que le juriste italien définissait la justification de l’emploi de moyens extrêmes car utiles, dans les circonstances, au belligérant. Lecteur assidu de Gentili, Grotius parlait lui d’une « raison d’utilité » légitimant la dévastation, c’est-à-dire subordonnant les moyens visant à placer l’ennemi dans l’incapacité matérielle de continuer la guerre, au but qu’est la paix. Cependant, il bornait cette raison d’utilité par le principe de juste mesure, issu de la pensée de Vitoria, et qui postulait que les maux engendrés ne devaient pas être supérieurs à ceux ayant causé le conflit. Mais c’est une autre arithmétique que proposait ici Donneau de Vizé, en plaidant le moindre mal de maux causés afin d’en éviter de plus grands. La nécessité était donc préventive, et reposait ici sur « la raison et le bien public ». S’imposant au souverain du fait de l’essence protectrice de sa fonction, elle correspondait à ce que Johann Wolfgang Textor nomma le premier dans les années 1660, pour la condamner, la « raison de guerre » ou ratio belli. Il la définissait en effet comme le prolongement de la raison d’État, fondant un réalisme dans la guerre, qui autoriserait de manière discrétionnaire la suspension des principes limitant le jus in bello57. Concurremment, dans la livraison de mars de son Mercure historique et politique58 – le plus important mercure francophone du temps publié alors à La Haye –, c’est précisément cette même raison de guerre que Gatien Courtilz de Sandras59 déniait à la France, quand il affirmait qu’« il ne faut point que les politiques prétendent couvrir cette cruauté par une nécessité indispensable qu’ils appellent maxime d’État60 ».
13Officiel ou officieux, cet argumentaire était bien rodé, comme le montrait le cas original des publications périodiques du polémiste Eustache Le Noble, qui débuta sa carrière de plume avec l’ouverture du conflit en 168861. Il publiait en effet à partir d’octobre 1688 ces Dialogues sur les affaires du temps62, auxquels il avait donné une tournure satirique au début de l’année 1690. Dans cette série désormais intitulée La Pierre de Touche politique63, Le Noble se plaçait généralement en opposition explicite et ouverte avec le Mercure historique et politique. Il y proposait un commentaire virulent de l’actualité du conflit sous la forme de dialogues entre Marforio et Pasquin, deux célèbres personnages de la satire romaine. Publié clandestinement à Paris, son périodique rencontrait un franc succès en France comme à l’étranger, ce dont témoignaient les nombreuses contrefaçons64. Dans la livraison d’avril 1690, un an après Donneau de Vizé et à un moment où les dénonciations étrangères contre la stratégie française étaient particulièrement aiguës, le dialogue mettait en scène Pasquin racontant à Marforio comment il avait diverti les puissances de l’Europe grâce à une loterie. Pasquin expliquait alors que le prince électeur du Palatinat avait reçu « un grand pot rempli d’onguent pour la brûlure », et Marforio se réjouissait de sa bonne fortune, le Palatinat étant « consommé par les flâmes ». Surtout, Pasquin énonçait alors avec la plus grande simplicité et brièveté : « Ces feux ont été justes, nécessaires et utiles. » Justes par leur cause, car ils sanctionnaient un droit lésé, et l’auteur renvoie aux arguments du manifeste concernant les droits injustement bafoués de Madame Palatine. Nécessaires, car il fallait « ôter la subsistance à cette armée dévorante [des Allemans], qui ne peut rester qu’où elle peut se nourrir65 ». Utiles, enfin, car les alliés n’avaient effectivement pas pu installer leurs quartiers d’hiver dans la zone dévastée, et qu’ainsi le royaume avait été mis à couvert. Encore une fois ici, l’auteur affirmait, outre la justesse de la cause, la double nécessité d’une part de l’ultima ratio et d’autre part de la raison de guerre. C’est d’ailleurs dans cet argument réaliste que résidait notamment la modernité de la défense des opérations militaires françaises proposée par ces auteurs, modernité d’ordre politique qui était présente dans le débat doctrinal sur le droit de la guerre66. Au-delà de ce débat théorique portant sur la nécessité, et bien que cette réfutation pro-louis-quatorzienne révélât une prédilection pour la doctrine scolastique médiévale de la guerre juste, l’insistance de Donneau de Vizé à affirmer la conformité à l’usage de la mise en œuvre de la stratégie adoptée témoignait, comme chez les détracteurs de celle-ci, d’un attachement moderne au formalisme de la pratique. Plus généralement, comme ses détracteurs, la réfutation pro-louis-quatorzienne traduisait une assimilation certaine de l’état doctrinal du droit de la guerre à la fin du xviie siècle. Plus encore, si la polémique révélait d’une part des divergences théoriques, habituellement lissées dans ces textes non doctrinaux, et d’autre part des divergences pratiques concernant l’usage, les porte-paroles du Roi-Soleil reconnaissaient cependant, en répondant sur le même terrain argumentaire, la validité, comme référent commun, d’un droit de la guerre fondé à la fois sur l’idéal de guerre juste et la coutume67.
14Les Affaires du temps, dont l’audience semble avoir été non négligeable notamment en France68, était un des rares supports proposant une forme de démenti officiel à la dénonciation des opérations militaires françaises. Ainsi, la polémique se jouait ici principalement par mercures interposés, la question étant, en dehors des rares écrits d’Eustache Le Noble69, parfaitement ignorée par l’écriture pamphlétaire pro-louis-quatorzienne70. L’argumentaire de défense de la stratégie louis-quatorzienne apparaissait paradoxalement plus souvent au miroir plus ou moins déformant de ses détracteurs, qui le présentaient sous la forme d’un réalisme machiavélien mêlant le droit du plus fort prôné par « un ennemi […] qui ne mesure que par sa force les loix de la guerre71 » et la raison de guerre cynique. Cette absence imprimée était d’autant plus étonnante que la production anti-louis-quatorzienne était alors foisonnante. En effet, une sorte d’offensive imprimée non concertée, mais convergente chez les trois principaux alliés, se manifesta dès le début de l’année 1689, suivant de quelques semaines d’une part la mise en œuvre des premières destructions de villes dans les territoires rhénans, et d’autre part les déclarations de guerre successives des Provinces-Unies, de l’Empire, de l’Espagne et de l’Angleterre. Cette conjoncture doublée de ce vide imprimé du côté français explique sans doute la radicalisation du ton des Affaires du temps durant l’été 1689, le périodique adoptant désormais le ton satirique des lardons.
15Ainsi, les libellistes s’emparèrent des opérations militaires françaises, pour les insérer, comme archétype démonstratif permettant de mettre en évidence sa décadence, dans leur dénonciation de la France louis-quatorzienne. Par cet usage rhétorique, ils leur conféraient un caractère exemplaire. C’était par exemple le cas des Soupirs de la France esclave, manifeste contre la politique de Louis XIV par excellence et succès éditorial72, qui renforçait et exploitait tout à la fois cette exemplarité acquise par les opérations militaires françaises, en les mobilisant comme exemple paroxystique de l’essence tyrannique du pouvoir absolutiste louis-quatorzien :
« Enfin est-il rien de plus criant que l’ouverture de cette dernière guerre, et que la manière dont on la continue au préjudice de la foy des traittés tout nouvellement faits. On commence la guerre en pleine paix. On prend Philisbourg, on s’empare de Heydelberg, de Manheim, de tout le Palatinat, de Worms, de Spire, de Mayence et de tout le pays du Rhein ; on traite avec ces villes, on les reçoit à capitulation, et ensuite on les brûle, on les rase, on les réduit tout en cendre et en solitude, sans avoir égard ni aux loix de Dieu, ni à celles de la guerre, ni aux promesses, ni aux serments solennels. […] La puissance absolue de notre monarque, qu’on croit être la source de la réputation de notre monarchie, est donc une source de honte qui ne s’épuisera jamais73. »
16La démonstration dénonciatrice se faisait ici en deux temps. Elle portait d’abord sur le jus ad bellum, soit sur les conditions d’entrée en guerre, puis se portait sur le jus in bello, soit sur la manière dont la guerre était menée. Comme dans les mercures, l’argumentaire témoignait de la place centrale accordée aux formes, lors de l’ouverture des hostilités, mais plus particulièrement dans la conduite de la guerre. C’est très exactement à ce formalisme que l’auteur de La France toujours ambitieuse et toujours perfide faisait référence quand il affirmait que « nous [les Allemans] savons de bonne part qu’on a résolu en France de ne point faire la guerre dans les formes, de ne point nous livrer de combat, mais de nous brûler, de nous désoler et de nous piller74 ». Or, si la dénonciation des opérations militaires françaises s’inscrivait d’une part dans la tradition narrative des malheurs de la guerre reposant sur un répertoire de références et stéréotypes iconographiques et textuels anciens, et d’autre part dans la tradition de mise en accusation des pratiques de guerre louis-quatorziennes développée à partir de la guerre de Hollande, la centralité alors accordée à la destruction de villes dans le cadre d’une dévastation systématique était une nouveauté.
Les destructions urbaines comme point nodal de la dénonciation
17Élément décisif de la stratégie française, les destructions plus ou moins abouties d’un certain nombre de villes à la situation et aux fonctions stratégiques clés firent en effet très rapidement l’objet de relations en allemand, d’abord imprimées dans l’Empire. Certaines étaient alors largement diffusées en Europe, par le biais notamment de traductions en français, servant de supports à l’écriture des dépêches des gazettes, mais aussi des mercures et des libelles. Outre la narration et le recensement des violences classiques, ces relations, comme les périodiques et les libelles après elles, portaient une attention particulière au non-respect des capitulations signées lors de la reddition de ces villes. Avec les cartels de prisonniers, les capitulations, régissant la reddition, la possession et l’évacuation de la ville, les relations entre les troupes et les populations au travers notamment du logement des gens de guerre ainsi que la sauvegarde de la cité, représentent à la fin du xviie siècle les pratiques les plus codifiées en temps de guerre75. La question du respect des capitulations comme des traités en général était à mettre en rapport avec l’attachement à la parole donnée, la transgression relevant alors de la perfidie – notion qui fait l’objet de réflexions théoriques chez les jurisconsultes traitant du droit de la guerre : en théorie, une partie n’était pas tenue de respecter une convention qui n’avait pas été respectée par l’autre partie, ce qui supposait des possibilités d’évaluation objective de ce non-respect. Dans la pratique, les infractions étaient multiples et habituelles, et toute situation d’occupation suscitait alors de très nombreuses plaintes76. Les capitulations avaient-elles été préalablement invalidées comme l’affirme de nombreuses fois Louvois dans la correspondance qu’il entretient avec les officiers de l’armée d’Allemagne ? Peut-être. Il est néanmoins certain que dans la mise en œuvre de la stratégie de destruction systématique pour laquelle Louis XIV opta, elles ne furent pas respectées. Ce fut notamment le cas à Heidelberg où les articles de capitulation 7 et 19 garantissaient l’intégrité de la ville et du château77. Ainsi, dès les premières nouvelles transmises par les occasionnels et les périodiques, ce fut en particulier cette pierre d’achoppement du non-respect des capitulations qui focalisa l’attention indignée des auteurs, comme le montrent en particulier les extraits précédemment cités des Lettres sur les matières du temps et des Soupirs de la France esclave. Résumant parfaitement l’accusation, le correspondant fictif du fameux libelle Les Veritables interests des princes dénonçait la France qui, « au mépris de ce qu’il y a de loix divines et humaines et par une infidelité et une barbarie qui n’a point d’exemple depuis qu’il y a un Christianisme, contre la foi des traités et des capitulations renverse les villes, les chasteaux, les bourgs et les villages ; les brûle, les réduit en monceaux de cendre, et fait de l’Allemagne un vaste désert78 ».
18Au travers des capitulations, cette dénonciation posait la question de la régularité formelle des pratiques militaires régies alors par la coutume, c’est-à-dire par des normes issues de la répétition d’un usage partagé qui acquérait alors une valeur de droit. L’argumentaire traduisait donc ici, outre une assimilation théorique, l’affirmation pratique d’un attachement aux lois coutumières de la guerre, dont le corpus doctrinal était alors encore en gestation et les capitulations constituaient une des formes les plus abouties.
19Cependant, au-delà même de la question de la régularité formelle à caractère coutumier, la destruction des villes apparaissait comme le véritable point nodal de l’indignation. Reflet de ce droit de la guerre encore en cours de formalisation, la mise en accusation de ces destructions traduisait une vraie divergence pratique concernant la définition et l’usage du jus in bello. Ainsi, la destruction des villes apparaissait-elle dans plusieurs imprimés comme moralement et pratiquement inacceptable. Les Sentiments véritables des Flamands, libelle francophone traduit en néerlandais et en anglais, et commentant la déclaration de guerre du gouverneur général des Pays-Bas à la France, en donnait l’expression la plus claire :
« On sçait bien que les loix de la guerre authorisent bien des actions qui placées hors de là paroissent énormes : quand on abandonne une ville qu’on ne peut garder, on en tire tout ce qui la pourroit rendre redoutable à ceux qui la quittent : on la rançonne, on prend les principaux habitans pour ostage. Les François ont bien sçû se servir de ces droits et au-delà, durant la guerre de Hollande : quand on abandonne des places fortes on peut aller jusqu’à ruiner les principales fortifications. Enfin quand on est extrêmement pressé par l’ennemy, la necessité oblige quelquefois à ruiner dans un païs tout ce qui pourroit servir à entretenir les armées ennemies : on brûle les foins, on emporte les grains, on brûle ce que l’on n’en peut emporter, on ruïne les moulins. Mais s’en prendre à des villes, à des maisons et des toits, les brûler et les réduire en cendres, c’est une conduite inouie, contre tous les droits de la guerre ; et encore quand ? Au commencement d’une guerre avant d’avoir reçu aucun échec. Les hommes et les chevaux des Allemands auroient-ils mangé les murailles de ce magnifique château d’Heydelberg et les maisons de tant de villes, quand on les auroit laissé debout ? Ce sont les vivres et les munitions dont les armées se souttendent. Quand donc les François auroient laissés les villes d’Heydelberg, de Manheim, de Frankendal, de Spire, de Worms et d’Oppenheim avec des maisons entières, mais vuides, sans bleds, sans vins et sans bétail, l’ennemi n’en auroit pas été mieux, et au moins ils auroient en quelque apparence de raison dans leurs fureurs79. »
20Après avoir rappelé le caractère certes très permissif du jus in bello tel qu’il était alors théoriquement et pratiquement défini, l’auteur condamnait la destruction des villes comme un excès inutile – fondement de la cruauté –, et inacceptable au regard des principes moraux et coutumiers qui faisaient le droit de la guerre. D’un point de vue doctrinal, le rasement des murailles et des fortifications était classiquement admis. Grotius, qui constituait le référent doctrinal jusqu’au xviiie siècle, légitimait la dévastation en théorisant un droit de nécessité fondé sur une raison d’utilité. Il établissait cependant dans la continuité de la tradition doctrinale un certain nombre d’exceptions portant notamment sur les arbres fruitiers – héritage deutéronomique (Dt 20, 19-20) –, mais surtout sur les habitations. Il n’y avait néanmoins pas d’harmonisation doctrinale à la fin du xviie siècle en ce qui concerne cette question : le jus in bello alors balbutiant et permissif définissait avant tout un droit de ravager avec des limitations fluctuantes, et non pas encore un interdit admettant certaines dérogations – ce qu’il ne devient qu’au xviiie siècle80. Ainsi, le libelliste – et plus généralement les écrits de dénonciation qui traitaient des destructions françaises –, apparaissait finalement ici plus catégorique que leurs contemporains théoriciens. Déniant de toute façon toute nécessité et toute utilité raisonnée à de telles destructions, l’auteur affirmait que, même dans le cas d’une extrémité absolue, elles seraient problématiques. Traduisant sans doute à la fois une assimilation de la synthèse grotienne, et surtout une évolution possible du consentement à la violence, cette dénonciation de la destruction des villes prônait un interdit à caractère quasi catégorique. Le contraste était grand avec la défense pro-louis-quatorzienne d’une nécessité supérieure, reposant sur une interprétation médiévale du caractère permissif du droit de la guerre alors en vigueur. La dénonciation des opérations militaires françaises accordant une attention toute particulière à la destruction du château de Heidelberg alors érigé en archétype de la cruauté française bafouant le droit de la guerre, le contraste était d’autant plus grand face au thuriféraire du Roi-Soleil déclarant que « la prétendue cruauté dont on a fait tant de bruit, n’a esté exercée que sur des pierres ». Notons ici qu’au-delà du traitement réservé à son château, l’exemplarité d’Heidelberg tenait à la fois à son statut de capitale électorale et de foyer de l’humanisme accueillant la plus ancienne université allemande, et à la visibilité éditoriale ainsi qu’au traitement narratif et iconographique dont sa destruction avait par conséquent fait l’objet81. Ainsi, pour ses dénonciateurs, la cruauté du monarque français était telle qu’il s’en prenait aux beaux bâtiments que ses plus barbares prédécesseurs avaient pourtant épargnés. S’astreignant alors à faire la démonstration de la cruauté de Louis XIV dans une livraison d’août 1689 du Mercurius reformatus, hebdomadaire orangiste qu’il publiait alors anonymement à Londres, le Dr James Welwood82 observait :
« We find’in History, that Monuments of Antiquity were sacred to the most barbarous Nations, who thought it Sacrilege to deface them; but the most venerable and superb Structures that had defyed time, for many Ages, were necessitated to submit to the Rage and devouring Cruelty of the French; Witness the Castle of Heidelberg, and a great many other Magnificent Fabricks in the Parliament, laid in heaps by these common Ennemies of Mankind83. »
21À la fin du xviie siècle les écrits théoriques recommandaient certes d’épargner les biens sacrés ainsi que ceux sans utilité militaire, leur définition restant cependant extrêmement ambiguë. Ce ne fut encore une fois qu’au milieu du xviiie siècle, sous l’impulsion des travaux de Johan Jacob Moser et d’Emer de Vattel, que dans le jus in bello alors formalisé, fut édictée une protection des biens artistiques, et en particulier des « édifices qui font honneur à l’Humanité et qui ne contribuent pas à rendre l’ennemi plus puissant » ainsi que « tous les ouvrages respectables par leur beauté84 ».
22Moment décisif de la stratégie française, point focal de son traitement informationnel et de sa mise en accusation, c’étaient ces destructions de villes qui constituaient alors les séquences élémentaires composant la trame narrative de l’événement que devinrent progressivement les opérations militaires françaises. Très tôt explicitement posé par les imprimés qui les dénoncent, c’était aussi autour de la destruction des villes que se cristallisait l’enjeu mémoriel de ces opérations militaires françaises. Par la fixation que représentait l’action d’écriture, ces imprimés tendaient en effet déjà vers cette mémoire qu’ils proclamaient, en s’appuyant sur la performativité qu’ils attribuaient au langage. Ainsi, au terme du procès de Louis XIV par les potentats européens réunis au Mont Parnasse sous l’égide d’Apollon, mis en scène dans le libelle allemand Concursus creditorum, le dieu jugeait que la gloire de la France devait tomber dans l’oubli, et que le récit perpétuel des actes effroyables et cruels commis devait désormais assombrir son histoire et celle de celui qu’on n’appellerait alors plus Ludovicus Magnus mais Ludovicus Devastator85. De même, dans un autre pamphlet, La Vérité missionnée auprès de Louis XIV par la Justice pour plaider sa cause au nom de l’Europe, déclarait :
« Quand les anciens Romains vouloient signifier le grand Scipion l’Afriquain, ils usoient des mots du destructeur de Carthage et de Numance. Ce n’estoient que deux villes : et vous, sire, combien de villes, d’églises, de monastères, de châteaux, de bourgades avez-vous fait surprendre, amuser du commencement par des promesses de seureté et de conservation, mais piller, dépouiller, brûler, renverser, chasser les ecclésiastiques et Séculiers, sans distinction d’estat, d’âge et de profession, et les faire passer en exil et à la servitude dans le pays de vostre domination, ou subjuguez par vos usurpations, ou remis par l’injustice de vos tribunaux86 ? »
23Soulignant le paradoxe qu’il y avait pour un roi si attaché à sa gloire à la ternir volontairement, la Vérité prédisait au Roi-Soleil la même postérité que celle des figures que l’on disait habituellement « tristement célèbres ». Or, pour aborder cette question mémorielle, la Vérité adoptait cette focale de la dénonciation des opérations militaires françaises qu’était la destruction des villes. C’est ce que montrait le parallèle fait ici avec deux des plus célèbres destructions romaines, comptant encore parmi les référents de la culture classique de ce Grand Siècle finissant. La place que les destructions de villes tenaient dans cette dénonciation expliquait ainsi l’importance qui leur était accordée dans la mémoire des opérations françaises. En 1732 dans son Histoire métallique des xvii provinces des Pays-Bas, Gerard Van Loon rapportait la frappe, par la ville de Nuremberg, d’une médaille représentant Phaéton perdant la maîtrise du char du soleil et enflammant alors le Rhin et ses villes87. Il faisait alors observer la redondance commémorative d’une telle médaille, accompagnée en effet d’une inscription exhortant l’Allemagne à ne pas oublier la cruauté incendiaire française, alors que « les ruines de ces Villes désertes [devaient] conserver pendant bien des années la mémoires de ces horribles ravages88 ». Déjà, en 1689, l’auteur des Sentiments véritables des Flamands soulignait en achevant sa dénonciation que « ces pierres et ces maisons contre lesquelles [les Français] se sont armés, seront des témoins éternels que l’esprit du cabinet de la France est pire mille fois que celui des Turcs, puis que jamais les infidèles n’ont fait chose semblable89 ». Le rôle mémoriel que ces imprimés entendaient faire assumer aux pierres a eu des traductions concrètes dès le xviiie siècle dans l’espace germanique, où de très nombreuses ruines furent plus ou moins intentionnellement conservées dans cette perspective90. En témoignent les ruines du château de Heidelberg constituant depuis le symbole de ces opérations de destruction devenues événement, et contribuant ainsi à en faire, dans le cadre de la construction de l’identité nationale, un lieu de mémoire allemand91.
24À l’aube de la véritable formalisation moderne du droit de la guerre, ce fut à Isaac de Larrey, historiographe des États de Hollande puis conseiller de Frédéric-Guillaume de Prusse, qu’il revint d’avoir proposé un des résumés les plus succincts de ces enjeux de la dénonciation des opérations militaires françaises de 1688-1689. Concluant en effet le passage consacré à l’événement dans son Histoire de France sous le règne de Louis XIV, parue en 1718, il observa laconiquement : « Traitement cruel que la Politique peut autoriser, mais que l’Histoire a peine à pardonner92. » Le débat polémique ouvert dans la presse d’information politique avait en effet progressivement laissé place à une dénonciation pamphlétaire des opérations militaires française. En l’absence d’une véritable réponse libelliste émanant des porte-paroles de la France, il avait accentué le réalisme de l’argumentaire de défense pro-louis-quatorzien, en laissant de côté les questionnements doctrinaux. Ainsi, contrairement à l’écriture libelliste laissée aux adversaires du Roi-Soleil, ce débat pris en charge par la presse d’information politique témoignait d’une assimilation de l’état doctrinal mêlant, à la fin du xviie siècle, la doctrine scolastique médiévale de la juste cause à un formalisme moderne. En mettant en lumière certaines de ces principales divergences théoriques, il en révélait cependant aussi l’inaboutissement, malgré lequel le droit de la guerre constituait néanmoins à la fin du xviie siècle une norme pratique d’évaluation des conflits. De même, bien que la dénonciation des opérations militaires françaises et la construction événementielle à laquelle elle participait ne soit certainement pas uniforme, les échelles de condamnation étant multiples et répondant notamment aux enjeux intérieurs de chaque espace politique93, elle se caractérisait indubitablement par une dimension transnationale, qui trouvait dans l’idéal de guerre juste un ressort commun. Or, si ces écrits de dénonciation en faisaient un usage non réflexif94 – leurs auteurs n’exprimant pas de volonté de théorisation et tendant à lisser les débats théoriques –, le caractère répétitif de l’argumentaire déployé révélait néanmoins une « exigence de normativité95 » portant sur un jus in bello, qui ne fut véritablement théorisé qu’au xviiie siècle, formant alors un véritable jus gentium ou droit des gens. De plus, cet argumentaire témoignait de sa modernité par l’affirmation notamment de l’existence d’interdits stricts quasiment affranchis de la cause initiale. L’écriture libelliste reflétait ici les prémisses de la crise de la juste cause, qui parcouraient alors déjà la réflexion doctrinale, crise qui se concrétisa pleinement au xviiie siècle par la formalisation d’un jus in bello désormais indépendant du jus ad bellum. Alors qu’à la fin du xviie siècle le droit de la guerre autorisait, sous réserve de certaines limitations souvent ambiguës, les moyens de guerre relevant de la destruction systématique – ravage, bombardement, incendie, etc. –, le jus in bello alors théorisé au xviiie siècle fut désormais prohibitif, et ne les autorisait que par dérogation. Cependant, cette formalisation qui rejetait désormais le jus in bello infinitum de la doctrine classique admettait de manière dérogatoire, en théorisant le droit de nécessité – soit la raison de guerre –, un emploi paradoxalement plus large, et cette fois mieux défini, de ces moyens de guerre : c’était en particulier le cas du ravage, qui incluait désormais notamment la destruction des villes, villages et autres habitations96. Il n’en reste pas moins que quand, en 1758, dans son ouvrage fondateur Le Droit des Gens ou Principes de la Loi naturelle, Emer de Vattel, qui joua un rôle fondamental dans la théorisation de ce droit des gens coutumier, définit l’usage du ravage et de l’incendie ainsi que leur emploi dérogatoire, il dénie à Louis XIV cette nécessité que ses porte-paroles plaidaient. Il énonce alors en effet que celui qui a recours à ces moyens « quand rien ne l’y oblige, ou sur de faibles raisons, se rend le fléau de l’humanité97 ». L’usage démonstratif que Vattel faisait alors des opérations militaires françaises de 1688-1689 témoignait, tout en la renforçant, de l’exemplarité qu’elles avaient désormais acquise par leur dénonciation en particulier au regard du droit de la guerre, dénonciation indignée qui participait fondamentalement de leur érection en événement.
Notes de bas de page
1 Voltaire, Le Siècle de Louis XIV, t. 3, chapitres 1-12, sous la direction de Diego Venturino, Oxford, Voltaire Foundation (Les œuvres complètes de Voltaire, 13A), 2015, p. 49-50.
2 La Ligue d’Augsbourg est une alliance défensive formée en 1686 et réunissant l’Empereur, le roi d’Espagne, le roi de Suède, les princes-électeurs de Bavière, du Brandebourg et du Palatinat, ainsi que les Cercles de Franconie et du Haut-Rhin.
3 Charles Boutant, L’Europe au grand tournant des années 1680. La succession palatine, Paris, Société d’édition d’enseignement supérieur, 1985 ; Klaus Malettke, Les relations entre la France et le Saint Empire, Paris, Champion, 2001, p. 432-509.
4 Mémoire des raisons, qui ont obligé le Roi à reprendre les Armes, & qui doivent persuader toute la Chrêtienté des sinceres intentions de sa Majesté, pour l’affermissement de la tranquillité publique. À Paris, chez Jean Baptiste Coignard imprimeur du Roy, ruë S. Jacques, à la Bible d’or. MDCLXXXVIII. De l’ordre exprés de Sa Majesté, Paris, Jean-Baptiste Coignard, 1688, in-4°.
5 Du fait de la complexité de ses enjeux et de la fragmentation nationale de son historiographie, ce conflit ne bénéficie pas, contrairement aux autres guerres du règne de Louis XIV, d’une dénomination historiographique commune. Il est ainsi alternativement appelé « guerre de la Ligue d’Augsbourg » par l’historiographie française, « guerre de Succession palatine » (Pfälzische Erbfolgekrieg) par l’historiographie allemande, ou « guerre de la Grande Alliance » (War of the Great Alliance) par l’historiographie britannique. Bien qu’encore peu courante dans l’historiographie française, nous avons néanmoins opté pour l’appellation neutre de « guerre de Neuf Ans » (Negenjarige Oorlog) introduite par l’historiographie néerlandaise, et désormais adoptée par les historiens germanophones et anglophones.
6 Geoffrey Symcox, « Louis XIV and the Outbreak of the Nine Years War », dans Ragnhild Hatton (dir.), Louis XIV and Europe, Londres, The Macmillan Press Ltd, 1976, p. 179-212 ; Karl Otmar von Aretin, Das alte Reich, t. 2 : Kaisertradition und österreichische Großmachtpolitik, Stuttgart, Klett-Cotta, 1993-2000, p. 15-51 ; John A. Lynn, The Wars of Louis XIV, 1667-1714, op. cit., p. 191-265.
7 Camille Rousset, Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, t. 4 : Depuis la paix de Nimègue, Paris, Didier et Cie, 1863, p. 58-260 ; Hans B. Prutz, « Louvois und die Verwüstung der Pfalz 1688-1689 », Deutsche Zeitschrift für Geschichtswissenschaft, 4 (1890), p. 239-274 ; Kurt von Raumer, Die Zerstörung der Pfalz von 1689 im Zusammenhang der französischen Rheinpolitik, Bad Neustadt, Pfaehler, 1982 [1930] ; Michèle Fogel, « La désolation du Palatinat ou les aléas de la violence réglée (septembre 1688-juin 1689) », dans Jean-Clément Martin (dir.), Guerre et répression. La Vendée et le monde, Nantes, Ouest (Documents et Enquêtes, Centre de Recherche sur l’Histoire du monde Atlantique, 20), 1993, p. 111-117 ; Hermann Weber, « La stratégie de la terre brûlée. Le cas du Palatinat en 1689 », dans Alain Gérard et Thierry Heckmann (dir.), La Vendée dans l’histoire, Paris, Perrin, 1994, p. 193-208 ; Roland Vetter, « Kein Stein soll auf dem andern bleiben ». Untergang während des Pfälzischen Erbfolgekrieges im Spiegel französischer Kriegsberichte, Heidelberg, Verlag Regionalkultur, 2002 ; John A. Lynn, « A Brutal Necessity ?… », art. cit. ; Jean-Philippe Cénat, « Le ravage du Palatinat. Politique de destruction, stratégie de cabinet et propagande au début de la guerre de la Ligue d’Augsbourg », Revue historique, 631 (2005), p. 97-132.
8 Émilie Dosquet, « Between Positional Warfare and “Guerre de Partis” : Soldiers and Civilians during the “Desolation of the Palatinate” (1688-89) », dans John Horne et Alex Dowdall (dir.), From Sarajevo to Troy : Civilians under Siege, Basingstoke, Palgrave Macmillan [à paraître].
9 John A. Lynn, « A Brutal Necessity ?… », art. cit., p. 100.
10 John A. Lynn, « A Quest for Glory : the Formation of Strategy under Louis XIV, 1661-1715 », dans Williamson Murray, MacGregor Knox et Alvin H. Bernstein (éd.), The Making of Strategy. Rulers States and War, Cambridge, Cambridge University Press, 1994, p. 178-204 ; André Corvisier, « Louis XIV et la guerre. De la politique de grandeur à la défense nationale », dans Henry Méchoulan et Joël Cornette (dir.), L’État classique, 1652-1715, Paris, Vrin, 1996, p. 261-280.
11 Pierre Rétat, « Les gazettes : de l’événement à l’histoire », Études sur la presse au xviiie siècle, vol. 3, 1978, p. 23-38 ; Thomas Weissbrich et Horst Carl, « Präsenz und Information : Frühneuzeitliche Konzeptionen von Medienereignisse », dans Horst Carl et Joachim Eibach (dir.), Europäische Wahrnehmungen 1650-1850. Interkulturelle Kommunikation und Medienereignisse, Hanovre, Wehrhahn (The formation of Europe, 3), 2008, p. 75-98.
12 Peter Burke, Louis XIV, les stratégies de la gloire, Paris, Le Seuil, p. 157-175 ; Steven C. A. Pincus, « From Butterboxes to Wooden Shoes : The Shift in English Popular Sentiment from Anti-Dutch to anti-French in the 1670s », The Historical Journal, 38 (1995), p. 333-361 ; Hans Bots, « L’image de la France dans les Provinces-Unies », dans Henri Méchoulan et Joël Cornette (dir.), L’État classique, op. cit., p. 341-353 ; Wolfgang Cillessen (dir.), Krieg der Bilder. Druckgraphik als Medium politischer Auseinandersetzung im Europa des Absolutismus, Berlin DHM, 1997, p. 95-206 et p. 317-341 ; Jean Schillinger, Les pamphlétaires allemands et la France de Louis XIV, Bern, Peter Lang, 1999 ; Martin Wrede, Das Reich und seine Feinde. Politische Feindbilder in der reichspatriotischen Publizistik zwischen Westfälischem Frieden und Siebenjährigem Krieg, Mayence, Von Zabern, 2004, p. 324-483 ; Tony Claydon, Europe and the Making of England 1660-1760, Cambridge, Cambridge University Press, 2007, p. 152-219 ; Donald Haks, Vaderland en Vrede, 1672-1713. Publiciteit over de Nederlandse republiek in oorlog, Hilversum, Verloren, 2013 ; Charles-Édouard Levillain, Vaincre Louis XIV. Angleterre-Hollande-France, Seyssel, Champ Vallon, 2010 ; Hendrik Ziegler, Der Sonnenkönig und seine Feinde. Die Bildpropaganda Ludwigs XIV. in der Kritik, Petersberg, M. Imhof, 2010 ; Donald Haks, « Foe and Fatherland : the Image of Louis XIV in Dutch Songs », dans Tony Claydon et Charles-Édouard Levillain (dir.), Louis XIV Outside In. Images of the Sun King Beyond France, 1661-1715, Farnham, Ashgate, 2015, p. 165-186 ; Isaure Boitel, L’image noire de Louis XIV. Provinces-Unies, Angleterre (1668-1715), Seyssel, Champ Vallon, 2016.
13 Michael Werner et Bénédicte Zimmermann, « Penser l’histoire croisée : entre empirie et réflexivité », Annales HSS, 58/1, 2003, p. 7-36, notamment p. 22-23.
14 Johannes Arndt, « Die europäische Medienlandschaft im Barockzeitalter », dans Irene Dingel et Matthias Schnettger (dir.), Auf dem Weg nach Europa. Deutungen, Visionen, Wirklichkeiten, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprencht (Veröffentlichungen des Instituts für Europäische Geschichte Mainz, 82), 2010, p. 25-40.
15 Lettres sur les matières du temps, t. 2, septième lettre (31 mars 1689).
16 Madeleine Fabre, « Lettres sur les matières du temps », dans Jean Sgard (dir.), Dictionnaire des journaux, Oxford, Voltaire Foundation, 1991 [En ligne] ; Marion Brétéché, Les compagnons de Mercure. Journalisme et politique dans l’Europe de Louis XIV, Seyssel, Champ Vallon, 2015, p. 32-36, 188 sq., 243-256, 272 sq., et 308 sq.
17 Toutes les analyses concernant les mercures historiques et politiques s’appuient sur la thèse de Marion Brétéché récemment parue : Marion Brétéché, Les compagnons de Mercure…, op. cit.
18 Marion Brétéché, Les compagnons de Mercure…, op. cit., p. 42-52.
19 Henri Duranton, Claude Labrosse et Pierre Rétat (dir.), Les gazettes européennes de langue française (xviie-xviiie siècles), Saint-Étienne, Presses universitaires de Saint-Étienne, 1992 ; Henri Duranton et Pierre Rétat (dir.), Gazettes et information politique sous l’Ancien Régime, Saint-Étienne, Presse universitaires de Saint-Étienne, 1999 ; Daniel Reynaud et Chantal Thomas (dir.), La suite à l’ordinaire prochain. La représentation du monde dans les gazettes, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 1999.
20 Graham C. Gibbs, « The Role of the Dutch Republic as the intellectual Entrepot of Europe in the Seventeenth and Eighteenth Centuries », Bijdragen en Mededelingen betreffende de Geschiedenis der Nederlanden, 86, 1971, p. 323-349 ; Hans Bots, « Provinces-Unies, centre de l’information européenne au xviie siècle », Quaderni del Seicento Francese, 5, 1983, p. 283-306.
21 Marion Brétéché, Les Compagnons de Mercure…, op. cit., p. 61-101.
22 Jean Sgard, « Jean Tronchin du Breuil », dans Jean Sgard (dir.), Dictionnaire des journalistes, Oxford, Voltaire Foundation, 1999 [en ligne] ; Marion Brétéché, Les Compagnons de Mercure…, op. cit., p. 64 sq., 75 sq. et p. 88-94.
23 Marion Brétéché, Les Compagnons de Mercure…, op. cit., p. 269-295.
24 Émilie Dosquet, « Die Verwüstung der Pfalz als (Medien-) Ereignis : von der rheinländischen Kriegshandlung zum europäischen Skandal », dans Andreas Rutz (dir.), Krieg und Kriegserfahrung im Westen des Reiches 1568-1714, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht (Herrschaft und soziale Systeme in der Frühen Neuzeit, 20), 2016, p. 333-369 ; id., « “We have been informed that the French are carrying Desolation everywhere” : The “Desolation of the Palatinate” as European News Event in Print », dans Joad Raymond et Noah Moxham (dir.), News Networks in Early Modern Europe, Leyde, Brill, 2016, p. 641-674.
25 Reinhard Koselleck, Le Futur Passé, Paris, Éditions de l’EHESS, 2000, p. 134.
26 Sur le droit de la guerre à l’époque moderne : Jean Rouvier, « Naissance du droit international au xviie siècle », Dix-septième siècle, 58-59 (1963), p. 40-56 ; Peter Haggenmacher, Grotius et la doctrine de la guerre juste, Paris, PUF, 1983 ; id., « Mutations du concept de guerre juste de Grotius à Kant », Cahiers de philosophie politique et juridique, 10 (1986), p. 105-125 ; Heinz Duchhardt, « La guerre et le droit des gens dans l’Europe du xvie au xviiie siècle », dans Philippe Contamine (dir.), Guerre et concurrence entre États européens du xive au xviiie siècle, Paris, PUF, 1998, p. 339-364 ; Guillaume Bacot, La doctrine de la guerre juste, Paris, Economica, 1989, p. 43-63 ; Geoffrey Parker, Success is Never Final. Empire, War and Faith in Early Modern Europe, New York, Basic Books, 2002, p. 143-168 ; Stephen C. Neff, War and the Law of Nations. A General History, Cambridge, Cambridge University Press, 2005, p. 83-158 ; Ralf Pröve, « Vom jus ad bellum zum jus in bello. Legitimation militärisches Gewalt in der Frühen Neuzeit », dans Claudia Ulbrich, Claudia Jarzebowski et Michaela Hohkamp (dir.), Gewalt in der Frühen Neuzeit, Berlin, & Humblot (Historische Forschungen, 81), 2005, p. 261-270 ; Jean-Matthieu Mattei, Histoire du droit de la guerre. Introduction à l’histoire du droit de la guerre (1700-1819), Aix-en-Provence, 2006, 2 volumes ; Heinhard Steiger, « Ius bändigt Mars. Das klassische Völkerrecht und seine Wissenschaft als frühneuzeitliche Kulturerscheinung », dans Ronald G. Asch et Martin Wrede (éd.), Krieg und Frieden in der Frühen Neuzeit, Munich, Wilhelm Fink, 2001, p. 59-85.
27 André Vanderpol, La doctrine scolastique du droit de guerre, Paris, A. Redoux, 1919 ; Maurice H. Keen, The Laws of War in the Late Middle Ages, Londres, Routledge, 1965 ; Frederik Russell, The Just War in the Middle Ages, Cambridge, Cambridge University Press, 1975 ; Philippe Contamine, « L’idée de guerre à la fin du Moyen Âge : aspects juridiques et éthiques », Comptes rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 123 (1979), p. 70-86 ; Peter Haggenmacher, Grotius et la doctrine de la guerre juste, op. cit., p. 11-49 ; Guillaume Bacot, La doctrine de la guerre juste, op. cit., p. 21-41 ; Robert C. Stacey, « The Age of Chivalry », dans Michael Howard, George J. Andreopoulos et Mark R. Shulman (dir.), The Laws of War, Constraints on Warfare in the Western World, New Haven, Yale University Press, 1994, p. 27-39 ; Stephen C. Neff, War and the Law of Nations, op. cit., p. 39-82 ; Jean-Matthieu Mattei, Histoire du droit de la guerre…, op. cit., en particulier vol. 1, p. 29-48 et 299-320.
28 Peter Haggenmacher, « Mutations du concept de guerre juste », art. cit.
29 Jean-Matthieu Mattei, Histoire du droit de la guerre…, op. cit., vol. 1, p. 320-404.
30 Pour la clarté du propos, nous mobilisons ici la distinction juridique désormais classique entre jus ad bellum et jus in bello. Cependant, cette distinction n’est formalisée qu’au tournant des xixe et xxe siècles. Voir notamment : Albane Geslin, « Du justum bellum au jus ad bellum : glissements conceptuels ou simples variations sémantiques ? », Revue de métaphysique et de morale, 64 (2009), p. 459-468.
31 Peter Haggenmacher, Grotius et la doctrine de la guerre juste…, op. cit., p. 597-615.
32 Peter Haggenmacher, « Mutations du concept de guerre juste », art. cit.
33 Peter Haggenmacher, Grotius et la doctrine de la guerre juste…, op. cit., p. 615 ; Jean-Matthieu Mattei, Histoire du droit de la guerre…, op. cit., vol. 1, p. 207-231.
34 Jean-Matthieu Mattei, Histoire du droit de la guerre…, op. cit., vol. 1, p. 407-537.
35 Géraldine Lepan, « L’idée de guerre juste chez Grotius », Cahiers philosophiques, 110 (2007), p. 9-30, ici p. 10-14 ; Jean-Matthieu Mattei, Histoire du droit de la guerre…, op. cit., vol. 1, p. 407-439.
36 Héritier de l’idée de proportionnalité développée dès le xvie siècle par les théoriciens du droit de la guerre, ce principe de modération, qui était alors prôné par les contemporains, était fondé sur la vertu et le contrôle de soi – ce n’est donc pas un hasard si Grotius qualifia ses prescriptions limitatives de temperamenta. Il faut le distinguer du devoir d’humanité comme fruit d’une consubstantialité d’essence entre êtres humains tel que les juristes des Lumières le définissent au xviiie siècle, pour en faire un véritable principe du droit des gens dans la guerre. Voir Jean-Matthieu Mattei, Histoire du droit de la guerre…, op. cit., vol. 1, p. 474-489.
37 Lettres sur les matières du temps, t. 2, neuvième lettre (15 mai 1689).
38 « Avis du Traducteur », La France toujours Ambitieuse et toujours Perfide. A Ratisbonne. M.DC LXXXIX. Avec permission, [Bruxelles, Jean Léonard], 1689, in-12. Il semble que cette traduction française ait connu au moins trois éditions.
39 Ibid., p. 219.
40 Solange Rameix, Justifier la guerre. Censure et propagande dans l’Europe du xviie siècle, Rennes, PUR, 2014, p. 184-210.
41 Nous avons par exemple pu identifier une traduction anglaise de sept des premières livraisons de l’année 1689 dont celle citée précédemment, traduction publiée à Londres sous le titre The Dilucidator. Voir Émilie Dosquet, « We have been informed that the French are carrying Desolation everywhere… », op. cit., p. 654.
42 Solange Rameix, Justifier la guerre…, op. cit., p. 197.
43 Jean Sgard, « Jean Donneau de Visé », dans id. (dir.), Dictionnaire des journalistes…, op. cit.
44 Monique Vincent, « Les Affaires du temps », dans Jean Sgard (dir.), Dictionnaire des journaux…, op. cit. ; Marion Brétéché, Les Compagnons de Mercure…, op. cit., p. 269-276.
45 Les Lettres sur les matières du temps ainsi que le Mercure historique et politique, autre mercure historique et politique d’importance, sont par exemple parmi les périodiques trouvés dans un ballot saisi à Paris chez le sieur Grisel, concierge du Bureau de Douane, en février 1699. Voir Anne Sauvy, Livres saisis à Paris entre 1678 et 1701, La Haye, M. Nijhoff, 1972, p. 57.
46 Marion Brétéché, Les Compagnons de Mercure…, op. cit., p. 272.
47 Affaires du temps, t. 1 (octobre 1688), « Avis au lecteur », s. n., cité par ibidem.
48 Affaires du temps, t. 6 (mars 1689), p. 62-68.
49 Solange Rameix, Justifier la guerre…, op. cit., p. 191-206.
50 Memoire des raisons, qui ont obligé le Roi à reprendre les Armes, op. cit., p. 1.
51 Joël Cornette, Le roi de guerre. Essai sur la souveraineté dans la France du Grand Siècle, Paris, Payot & Rivage, 2000 [2e éd.], p. 119-149.
52 Mémoires pour l’année 1661, cité par ibid., p. 123.
53 Mémoire des raisons, qui ont obligé le Roi à reprendre les Armes…, op. cit., p. 10.
54 Ibid., p. 1.
55 Joël Cornette, Le roi de guerre…, op. cit., p. 233-236 ; Chantal Grell et Christian Michel, L’École des Princes ou Alexandre disgracié. Essai sur la mythologie monarchique de la France absolutiste, Paris, Belles Lettres, 1988.
56 Affaires du temps, t. 7 (avril 1689), p. 40-43.
57 Jean-Matthieu Mattei, Histoire du droit de la guerre…, op. cit., vol. 1, p. 499-529.
58 Jean Sgard, « Mercure historique et politique 1 », dans id. (éd.), Dictionnaire des journaux…, op. cit. ; Marion Brétéché, Les Compagnons de Mercure…, op. cit., p. 28-32 et p. 297-300.
59 Jean Lombard, Courtilz de Sandras et la crise du roman à la fin du Grand Siècle, Paris, PUF, 1980 ; Jean Lombard, « Courtilz de Sandras », dans Jean Sgard (dir.), Dictionnaire des journalistes…, op. cit. ; Marion Brétéché, Les Compagnons de Mercure…, op. cit., p. 73-75.
60 Mercure historique et politique, t. 6 (mois de mars 1689) p. 258.
61 Philippe Hourcade, « Eustache Le Noble », dans Jean Sgard (dir.), Dictionnaire des journalistes…, op. cit.
62 Philippe Hourcade, « Dialogue sur les affaires du temps », dans Jean Sgard (dir.), Dictionnaire des journaux…, op. cit.
63 Philippe Hourcade, « Pierre de touche politique », dans Jean Sgard (dir.), Dictionnaire des journaux…, op. cit.
64 Ibid.
65 La Pierre de touche politique, t. 9 (avril 1690. La Lotterie de Pasquin. ix Dialogue), p. 1213.
66 Michael Behnen, « Der gerechte und der notwendige Krieg.„ Necessitas“und„ Utilitas Reipublicae“ in der Kriegstheorie des 16. und 17. Jahrhunderts », dans Johannes Kunisch (dir.), Staatsverfassung und Heeresverfassung in der europaïschen Geschichte der frühen Neuzeit, Berlin, Duncker und Humblot, 1986, p. 43-106 ; Jean-Matthieu Mattei, Histoire du droit de la guerre…, op. cit., vol. 1, p. 499-529.
67 Un dialogue comparable entre la théorie et la pratique au fondement d’un droit de la guerre comme référent commun a été récemment mis en évidence pour la période antérieure du xvie siècle. Voir Benjamin Deruelle, De papier, de fer et de sang. Chevaliers et chevalerie à l’épreuve du xvie siècle (ca.1460-ca. 1620), Paris, Publication de la Sorbonne, en particulier le chap. 10.
68 Il existe plusieurs rééditions, notamment une impression lyonnaise, mais aussi semble-t-il des contrefaçons.
69 Voir par exemple La Fausse Clef de tous les Cabinets des Princes de l’Europe : ou tous les Secrets les plus enfoncez sont revelez ; et Rome trahïe. Matieres tres-curieuses, & du Temps. A Osnabruk, Chez abraham groest. M.D.C.LXXXIX., s. l., s. n., 1689, in-12.
70 Solange Rameix, Justifier la guerre…, op. cit., p. 52-58.
71 LMT, t. 2, Deuxième Lettre (15 Janvier 1689).
72 Outre plusieurs éditions francophones, il existe en effet des éditions – néanmoins souvent partielles – en allemand, en anglais et en néerlandais.
73 Les Soupirs de la France Esclave, qui aspire Après la Liberté. A Amsterdam M.DC. LXXXIX., Amsterdam, s. n., 1689, in-4, p. 204. Il s’agit d’un des plus célèbres pamphlets anti-louis-quatorziens : il a été réédité et traduit entièrement ou partiellement de multiple fois.
74 La France toujours Ambitieuse et toujours Perfide…, op. cit., p. 214
75 Lesaffer Randall, « Siege Warfare in the Early Modern Age : A Study on the Customary Laws of War », dans Amanda Perreau-Saussine et James B. Murphy (dir.), The Nature of Customary Law Legal, Historical and Philosophical Perspectives, Cambridge, Cambridge University Press, 2009, p. 176-202 ; John Childs, « Surrender and the Laws of War in Western Europe, c. 1650-1783 », dans Holger Afflerbach et Hew Strachan (dir.), How Fighting Ends : A History of Surrender, Oxford, Oxford University Press, 2012, p. 153-168 ; John A. Lynn, « The Other Side of Victory : Honorable Surrender during the Wars of Louis XIV », dans Frederick C. Schneid (dir.), The Projection and Limitations of imperial Powers, 1618-1850, Leyde/Boston, Brill, 2012, p. 51-67 ; Paul Vo-Ha, Rendre les armes : le sort des vaincus, xvie-xviie siècles, Ceyzérieu, Champ Vallon, 2017.
76 Michel Rorive, Les Misères de la guerre sous le Roi-Soleil, Liège, université de Liège, 2000 ; Markus Meumann et Jörg Rogge (dir.), Die besetzte res publica. Zum Verhältnis von ziviler Obrigkeit und militarischer Herrschaft in besetzten Gebieten von Spätmittelalter bis zum 18. Jahrhundert, Berlin, LIT, 2006.
77 Generallandesarchiv Karlsruhe, Pfalz Generalia 77/3700.
78 Les Veritables Interets des Princes de l’Europe, Dans les affaires presentes, ou reflexions Sur un Escrit venu de France, Sous le titre de Lettre de Monsieur à Monsieur sur les Affaires du Temps. À Cologne, Chez Pierre Marteau, 1689., [Amsterdam ?], s. n., 1689, in-4°, p. 32. Ce libelle a connu un vrai succès éditorial : nous avons pu identifier au moins deux éditions en français, une édition en anglais, une édition en hollandais, une édition en allemand et une édition bilingue en français et en allemand. Voir Émilie Dosquet, « Die Verwüstung der Pfalz als (Medien-) Ereignis… », art. cit., p. 356.
79 Sentimens Veritables des Flamands, Pour faire voir l’injustice de la Declaration de Guerre du Roi de France contre Sa Majeste, Et la justice de la Contre-Declaration du Marquis de Gastanaga, Son Gouverneur General des Païs Bas. M.D.C.LXXXIX., [Bruxelles ?], s. n., 1689, in-4, p. 42-43.
80 Jean-Matthieu Mattei, Histoire du droit de la guerre…, op. cit., vol. 2, p. 802-818.
81 Voir Émilie Dosquet, « Die Verwüstung der Pfalz als (Medien-) Ereignis… », art. cit., p. 347-352.
82 Carolyn Nelson et Matthew Seccombe, British Newspapers and Periodicals (1641-1700). A short-title Catalogue of Serials printed in England, Scotland, Ireland, and British America, New York, MLA, 1987, n° 379.
83 Mercurius Reformatus, 16 (Wednesday, August 21. 1689).
84 Emer de Vattel, Le Droit des Gens ou Principes de la Loi naturelle Appliqués à la Conduite & aux Affaires des Nations & des Souverains, Leyde, Au depens de la Compagnie, 1758, t. 2, livre III, chap. ix, § 168. Voir aussi Jean-Matthieu Mattei, Histoire du droit de la guerre…, op. cit., vol. 2, p. 777-789.
85 Concursus Creditorum, Wider den König von Franckreich Ludovicum XIV. als einen morosum debitorem Von Denen Vornehmsten Hohen Potentaten in Europa vor dem Thron des Appolinis im Parnasso erreget/ Anno 1689., s. l., s. n., 1689, in-4. Ce libelle ne semble avoir connu qu’une édition en allemand et une en hollandais.
86 La Verite Chrestienne A L’Audiance du Roy Tres-Chretien, Donnée à Versailles, le 15. de Juillet 1689. Sur la Copie imprimée à Paris. Chez J. Coignard, Imprimeur du Roy. M. DC. LXXXIX., [Amsterdam ?], s. n., 1689, in-12, p. 60. Ce libelle semble avoir lui aussi connu un certain succès éditorial avec trois éditions en français, une édition en anglais, une édition en hollandais, et une édition en allemand. Voir Émilie Dosquet, « We have been informed that the French are carrying Desolation everywhere… », op. cit., p. 658.
87 Médaille de Martin Brunner, Nuremberg, [1689], Kurpfälzisches Museum Heidelberg, Münzkabinett, M 9192.
88 Gerard van Loon, Histoire métallique des xvii Provinces des Pays-Bas, La Haye, P. Gosse, J. Neaulme et P. de Hondt, 1732, t. 3, p. 405.
89 Sentimens Veritables des Flamands…, op. cit., p. 43.
90 Thomas Flumm et Carmen Flumm, « Der Wiederaufbau Heidelbergs nach der Zerstörung im Pfälzischen Erbfolgekrieg », dans Frieder Hepp, Hans-Martin Mumm et Jürgen Fabian (dir.), Heidelberg im Barock. Der Wiederaufbau der Stadt nach den Zerstörungen von 1689 und 1693, Wunderhorn, 2009, p. 85-160.
91 Volker Sellin, « Heidelberg im Spannungsfeld deutsch-französischer Konflikte. Die Schloßruine und ihre Stilisierung zum nationalen Symbol im Zeitalter der Französischen Revolution und Napoleons », dans Friedrich Strack (dir.), Heidelberg im säkularen Umbruch. Traditionsbewußtsein und Kulturpolitik im 1800, Stuttgart, Klett-Cotta (Deutscher Idealismus, 12), 1987, p. 19-34.
92 Isaac de Larrey, Histoire de France sous le règne de Louis Xiv, Rotterdam, Michel Bohm et Compagnie, t. 5, 1718, p. 279.
93 Voir par exemple Solange Rameix, « La figure de l’ennemi injuste en Angleterre à la fin du xviie siècle », dans Véronique Gazeau et Jean-Philippe Genet (dir.), La France et les Îles Britanniques : un couple impossible ?, Paris, Presses universitaires de la Sorbonne, 2012, p. 169-182.
94 Solange Rameix, Justifier la guerre…, op. cit., p. 197.
95 Pierre Bonnet, « Préface. Figures et configurations de la littérature politique de contestation du règne de Louis XIV au premier xviiie siècle », dans Pierre Bonnet (dir.), Figures de la littérature de contestation du siècle de Louis XIV au siècle des Lumières, Paris, Le Manuscrit, 2011, p. 13-71, ici p. 37.
96 Jean-Matthieu Mattei, Histoire du droit de la guerre…, op. cit., vol. 2, p. 802-818.
97 Emer de Vattel, Le Droit des Gens…, op. cit., t. 2, livre iii, chap. ix, § 167.
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