À l’aube de la campagne : l’impact du quartier d’hiver dans la campagne de Flandre de 1712
p. 205-226
Texte intégral
1La campagne, longue saison d’actions et d’opérations menée au cours d’une guerre sur un front donné, semble s’avérer un échelon d’étude intéressant pour la compréhension des conflits et de la guerre dans la mesure où elle est bien définie par la règle des trois unités de temps, de lieu et d’action chère au théâtre classique. Elle fait de surcroît sens pour les militaires, officiers et généraux, qui se plaisent à évoquer leurs campagnes pour parler de leurs actions et de leur temps de service, surtout à l’époque moderne. Elle a donc suscité l’intérêt de nombreux historiens et mémorialistes, et connaît aujourd’hui un renouveau dans le cadre de la nouvelle « histoire campagne1 ». Cette « histoire campagne » nous semblerait néanmoins quelque peu lacunaire ou incomplète si elle omettait de s’intéresser également à la phase cachée des campagnes, à savoir les temps de pause qui interviennent entre deux d’entre elles, et qui sont justement bien souvent consacrés à la préparation des campagnes : les quartiers d’hiver.
2Le quartier d’hiver constitue à l’époque moderne une réalité bien connue de la guerre, qui vient en fait d’une contrainte structurelle, née des immenses difficultés logistiques qui se présentaient alors pour pouvoir entretenir une armée en campagne durant toute l’année, ce qui nécessitait d’une part d’accumuler à l’avance d’immenses réserves de denrées capables de subvenir aux besoins des troupes durant toute la durée des opérations, d’autre part de pouvoir en assurer la distribution sur place à chaque unité combattante. Les problèmes posés par ces nécessités logistiques obligeaient alors souvent les armées à vivre en partie sur le pays qu’elles occupaient, en y prélevant une part de leur subsistance. Ces prélèvements permettaient non seulement de pallier les défaillances sporadiques du système d’approvisionnement qui pouvaient apparaître durant une opération, mais aussi éventuellement d’économiser les réserves conservées dans les magasins en vue des échéances futures, tout en empêchant l’adversaire d’utiliser les ressources prélevées. Si ces prélèvements de fourrages ou de denrées agricoles sont possibles durant l’été ou les saisons tempérées, ils deviennent impossibles en hiver quand la végétation se met au repos, et quand le climat rend en outre les conditions de cantonnement des troupes de plus en plus difficiles. Les contraintes climatiques et agricoles de l’hiver finissent donc par obliger les armées à suspendre leurs opérations et à se retirer dans leurs places fortes ou vers l’intérieur de leurs États pour passer l’hiver.
3Cette contrainte logistique et structurelle de la guerre institue de facto un temps de pause, qui rythme la guerre en suspendant momentanément les offensives2. Le répit offert, ou parfois subi, est cependant mis à profit par les belligérants, tant pour refaire leurs forces en recrutant des nouveaux soldats, pour remplir leurs magasins en achetant et en acheminant de nouveaux stocks de fourrages, munitions ou vivres, ou pour planifier les stratégies et élaborer le plan d’action de la prochaine campagne. Le quartier d’hiver nous semble donc mériter à ce titre l’intérêt de l’historien dans le cadre d’une « histoire campagne », d’autant que les préparatifs ou les réparations hivernales jouent un rôle de plus en plus important à mesure que les guerres modernes s’enlisent jusqu’à se présenter comme de véritables guerres d’usure, terme qui semble approprié pour qualifier les deux derniers conflits du règne de Louis XIV. Dans ce cadre, le quartier d’hiver revêt une importance accrue dans la mesure où il vient justement briser le rythme des opérations et permet de refaire ses réserves d’approvisionnements dans une nouvelle configuration militaire propre à la saison3.
4Si cet aspect du quartier d’hiver est connu, à tel point qu’il relève du truisme de dire que le quartier d’hiver permet de préparer la prochaine campagne, on serait plus gêné pour argumenter cette affirmation et détailler précisément quels sont les préparatifs qui y sont faits, comment ils le sont et quel est leur réel impact et leur véritable influence, si impact et influence il y a, sur le déroulement de la future campagne. Le véritable rôle de la petite guerre qui se joue durant l’hiver, et même des actions militaires de préparation que nous nous sommes déjà attaché à mettre en lumière pour nuancer l’idée de pause et de suspension d’arme induite par la notion de quartier d’hiver, convient également d’être interrogé quant à ses éventuelles répercutions sur la marche des futures opérations. C’est donc à cette vaste question de la mesure de la réelle incidence des préparatifs et de la pause hivernale sur la campagne à venir que nous allons fournir quelques éléments de réponse, à la lueur de l’exemple de la campagne de Flandre de 17124, restée fameuse dans les mémoires françaises pour la victoire de Denain et la contre-offensive qui s’en est suivie, permettant à Louis XIV de « sauver sa mise » à la paix d’Utrecht, selon l’expression de Gérard Lesage5. Nous pourrons ainsi voir comment la campagne a été préparée, comment elle aurait pu se dérouler et comment certains de ces acteurs auraient aimé qu’elle se déroule, mais surtout comment les évènements et les réalités plus prosaïques du quartier d’hiver ont pu modifier ces ambitions et in fine constituer un facteur déterminant sur son déroulement.
5Avant la campagne de 1712, l’armée française connaît sur le front de Flandre une période de recul continu, accéléré durant les campagnes de 1706 et 1708, après ses cuisantes défaites de Ramillies et d’Audenarde6. Les campagnes successives de 1706 à 1711 permettent alors aux armées coalisées contre la France de s’emparer successivement des places et des territoires occupés par l’armée française dans les Pays-Bas espagnols depuis le début de la guerre, jusqu’à menacer le royaume d’une invasion par le Nord en s’attaquant aux dernières lignes de fortifications de la « ceinture de fer » de Vauban. Ainsi, après Lille (1708), Tournai et Mons (1709), puis Douai et les places de la Lys (1710), Bouchain est à son tour prise lors de la campagne de 1711, offrant aux coalisés une tête de pont sur l’Escaut et un point de passage à travers les lignes françaises7. Pendant ce temps, le royaume de Louis XIV se remet difficilement de ses déconvenues militaires, et surtout de la crise économique et frumentaire qui l’a frappé en 1709 et 1710, durant laquelle le sursaut de Malplaquet a selon la formule d’André Corvisier8 évité « l’effondrement de la France ». C’est dans ce contexte que se déroula le quartier d’hiver de 1711-1712, destiné à préparer une nouvelle campagne sur ce front, qui doit permettre à l’armée française de conserver ses possessions dans l’attente de la conclusion de la paix que l’on désire imminente. Quels furent donc ces préparatifs et en quoi ont-ils influencé la campagne de 1712 ? Nous donnerons quelques éléments de réponse à cette question en abordant tour à tour trois points à nos yeux marquants du quartier d’hiver qui sont les négociations qui s’y déroulent, la question de la réparation des magasins, et enfin la guerre de position à laquelle il donne lieu. Pour ces trois points, nous donnerons à chaque fois les exemples précis aperçus durant l’hiver 1711-1712, ainsi que leur influence concrète sur la campagne de 1712.
Les négociations de l’hiver
6À l’époque moderne, les guerres voient leur pratique avoir tendance à se codifier, et elles sont donc le théâtre de continuelles négociations entre belligérants pour régler des points litigieux ou convenir des pratiques de la « bonne guerre ». Cet aspect continuel des négociations durant les hostilités constitue d’ailleurs un trait caractéristique des guerres modernes d’après John Lynn9. Le quartier d’hiver est dès lors un moment propice aux négociations, justement à cause de la suspension d’armes relative qu’il instaure de facto entre les parties, et ce phénomène est observé dès la fin de la guerre de Trente Ans, alors que le prieur allemand Adam de Muhrrhardt écrit dans ses chroniques : « en hiver nous négocions, en été nous combattons10 ». Le répit hivernal est mis à profit pour entamer des discussions entre belligérants, en vue d’obtenir divers avantages, de fixer les règles ou de préparer les futures opérations. Ces négociations concernent des interlocuteurs très variés et peuvent aborder des sujets très divers ; on en distingue donc plusieurs types.
7On remarquera tout d’abord des négociations de type économique concernant principalement la question des contributions, que ce soit celles à régler au titre des impositions extraordinaires par les différentes provinces du royaume, ou même des provinces ennemies, soumises à régler ces dernières dans le cadre de la petite guerre menée par les partisans. On peut voir aussi dans les négociations économiques les pourparlers qui ont lieu entre les campagnes de 1711 et de 1712 entre les coalisés pour revoir la répartition de l’effort de guerre et le financement des uns et des autres pour la cause commune.
8Les échanges des prisonniers capturés durant la campagne font aussi l’objet de négociations entre les deux camps en présence pour obtenir la libération de soldats, ou l’échange sous conditions de certains officiers. Ces échanges de prisonniers sont un des moyens qui s’offrent aux armés pour compléter leurs effectifs en vue de la prochaine campagne.
9On peut enfin obtenir en négociant des avantages divers, comme des sûretés ou des libertés de circulation dans certaines provinces ou sur certaines voies fluviales. En 1712, la région de « l’Entre Sambre et Meuse » (délimitée par ces deux cours d’eau) voit sa sûreté garantie par une convention, de même que la libre navigation sur la Sambre, mise à profit par l’armée du roi11. En échange de ces avantages, les Français se sont eux-mêmes engagés à laisser leurs adversaires faire naviguer en toute tranquillité leurs convois fluviaux sur plusieurs cours d’eau et canaux des Pays-Bas.
10Si déjà ces négociations peuvent avoir une influence sur le cours des évènements futurs et de la campagne qui va suivre, nous parlerons ici principalement des grandes négociations diplomatiques qui ont lieu durant l’hiver 1711-1712, ainsi que des décisions stratégiques prises en vue de la campagne, qui en découlent assez naturellement. Cet hiver est en effet marqué par un renouveau de certains espoirs iréniques avec l’ouverture d’un nouveau congrès diplomatique pour la paix à Utrecht le 29 janvier 1712, offrant une nouvelle chance après l’échec des négociations de Gertruydenberg en 171012. Les contemporains voient donc poindre à court terme la perspective d’une fin de la guerre qui dure depuis plus d’une décennie, dans un contexte de lassitude et d’épuisement qui gagne les populations et les belligérants, et alors que la France, malgré une situation militaire assez morose, surtout en Flandre, semble démontrer qu’elle peut tenir encore quelques années.
11Ces perspectives d’un retour de la paix sont principalement nées d’un revirement géopolitique intervenu durant l’année écoulée, qui a vu le 17 avril 1711 s’éteindre l’empereur Joseph Ier, et l’élection le 12 octobre suivant de l’archiduc Charles de Habsbourg pour lui succéder à la tête de l’Empire, sous le nom de Charles VI. Or, le nouvel empereur n’est autre que le candidat au trône d’Espagne soutenu par les coalisés, et qui pourrait dès lors en cas de victoire de ces derniers cumuler la couronne impériale et celle d’Espagne, reconstituant l’empire de son aïeul Charles Quint, et imposant dans l’équilibre européen une nouvelle puissance dont il sera difficile de contester l’hégémonie.
12Ce changement de perspective géopolitique ne tarde pas à provoquer quelques dissensions au sein de la Grande Alliance réunie contre le Roi-Soleil, qui perd sa principale raison d’être, notamment de la part de l’Angleterre13 qui n’a désormais plus aucun intérêt à soutenir le prétendant Habsbourg au trône d’Espagne et voit l’instauration (sous certaines conditions) de Philippe V, le petit-fils de Louis XIV, comme une alternative de plus en plus raisonnable pour ses intérêts, essentiellement commerciaux. Ce revirement permet de plus outre-Manche un notable regain du parti favorable à la paix, conjugué à un déclin de l’influence politique des whigs, favorables à la guerre, auxquels est lié le duc de Marlborough, commandant l’armée anglaise au sein de la coalition. Les hésitations anglaises à poursuivre le conflit sont vite mises à profit par la diplomatie française, et des négociations secrètes ont lieu dès la fin de la campagne de 1711, pour aboutir à la signature des préliminaires de Londres le 8 octobre 1711, tenus en partis secrets jusqu’à la reprise de la campagne de 171214. Ces documents prévoient non seulement un armistice séparé entre la France et l’Angleterre, mais établissent également des points d’accord entre ces deux puissances sur la prochaine paix qu’elles s’efforceront de faire accepter aux autres belligérants lors du congrès d’Utrecht.
13Malgré les secrets entourant les points les plus sensibles de ces préliminaires, les alliés de l’Angleterre ne tardent pas à nourrir de vives suspicions envers la reine Anne, craignant la conclusion d’une paix séparée entre elle et Louis XIV, d’autant que son pays finance une part importante de l’effort de guerre de la coalition, assurant la solde de près des deux tiers des troupes anglaises et hollandaises présentes en Flandre, et finançant également en grande majorité l’armée de la coalition présente en Catalogne15. D’autres négociations ont lieu parallèlement entre les différents membres de la Grande Alliance, notamment pour tenter de convaincre l’Angleterre de maintenir sa part dans l’effort de guerre commun, et c’est le prince Eugène en personne qui effectue durant l’hiver un grand voyage pour mener les négociations. À son retour de la campagne de 1711, il se rend d’abord à Innsbruck pour rencontrer l’empereur Charles VI, qui souhaite une reprise de l’offensive sur le front de Flandre, jugé prioritaire, car il permet le plus sûrement de vaincre la France de Louis XIV et de la contraindre à signer la paix aux conditions dictées par les coalisés. L’empereur peut de plus renforcer ses troupes sur ce front en redéployant celles qui rentrent de Hongrie, où elles viennent de mater la rébellion du prince Rákóczi16. Le prince se rend ensuite à La Haye, pour discuter avec les députés des États Généraux des Provinces-Unies, puis à Londres, pour rencontrer la reine Anne et ses ministres.
14Les enjeux de ces négociations sont d’abord financiers, car l’Angleterre a déjà fait connaître à ses alliés son intention de revoir à la baisse sa contribution à l’effort de guerre commun, notamment pour l’entretien de l’armée de Catalogne, front sur lequel elle n’a plus rien à espérer après avoir obtenu, par les préliminaires de Londres, les garanties commerciales qu’elle recherchait, et alors que la victoire du duc de Vendôme à Villaviciosa en 1710 semble avoir assis les prétentions des Bourbons sur le trône d’Espagne. Le prince Eugène tente donc d’infléchir la volonté de la reine et de ses ministres, sans toutefois parvenir à ses fins.
15Un autre enjeu important est d’ordre stratégique et diplomatique, dans la mesure où le prince Eugène, l’empereur et les États Généraux des Provinces-Unies partagent la ferme conviction que la victoire sur leur vieil ennemi Louis XIV peut être très proche, et qu’il ne leur suffit encore que d’une victoire significative ou de la prise d’une place d’importance sur le front de Flandre pour s’ouvrir la route de Paris et faire définitivement plier la France17. Ce succès intervenant en plein congrès diplomatique pourrait donner un avantage capital pour obtenir les conditions de paix voulues. Ces perspectives alimentent dans les Provinces-Unies un courant belliciste, qui voit dans cette conjoncture une occasion idéale et unique de prendre une revanche sur le Roi-Soleil, et raffermit la volonté des États Généraux et des négociants à prendre leur part dans l’effort de guerre. L’empereur se montre également prêt non seulement à envoyer plus de troupes en Flandre, mais également à assumer une part de l’effort financier que les Anglais ne veulent plus prendre en charge.
16Si le prince Eugène est envoyé en personne à Londres durant une bonne partie du quartier d’hiver pour négocier auprès de la reine Anne et tenter de la gagner à ses vues, il éprouve en fait des difficultés à se faire recevoir par la reine ou ses ministres pour évoquer de vive voix ces sujets sensibles, et se retrouve contraint de passer le plus clair de son temps auprès de son ami Marlborough, ou à diverses occupations mondaines, peu utiles au service de l’empereur18. Il ignore en fait l’essentiel des préliminaires signés entre l’Angleterre et la France, dont les articles les plus importants sont restés secrets, et le fait que la reine a déjà pris sa décision. Celle-ci parvient ainsi à obtenir l’ouverture d’un nouveau congrès de paix à Utrecht, le 29 janvier, durant lequel ses diplomates tenteront de faire accepter à ses alliés et à l’Europe les points d’accord sur lesquels elle est parvenue avec la diplomatie française. De plus, elle relève de son commandement le duc de Marlborough, qui dirigeait les troupes anglaises en Flandre, et le remplace par le duc d’Ormonde, plus docile à ses ordres, et moins proche des whigs, le parti belliciste auquel est lié le duc de Marlborough.
17Ces différentes négociations diplomatiques nouées en haut lieu prennent vite une influence importante sur la définition de la stratégie pour la campagne à venir, avec deux situations opposées.
18Pour les Impériaux et les Provinces-Unies, la situation militaire apparaît comme très favorable avec une avancée significative des troupes vers les dernières lignes de fortifications de la fameuse « ceinture de fer » de Vauban, alors que se présente la perspective d’une victoire totale avec la possibilité de s’emparer des dernières places fortes ouvrant la route de Paris. Néanmoins, un basculement de la situation semble possible, avec le revirement géopolitique qui suit l’élection de l’empereur Charles VI, l’ouverture du congrès de paix, et la perspective d’un retrait de l’Angleterre de la Grande Alliance, trois facteurs qui compromettent les chances de victoire totale et de revanche tant désirée sur la France de Louis XIV. En conséquence, on recherche en Flandre un succès rapide, avec soit une victoire lors d’une bataille rangée, soit la prise d’une place importante, afin de se placer en position de force au congrès diplomatique, mais également de faire plier le Roi-Soleil, ou même d’encourager l’Angleterre et les autres alliés à poursuivre leur effort de guerre pour imposer les conditions de la Grande Alliance à Utrecht. On prévoit donc une poursuite de l’offensive dans les Pays-Bas, et l’armée du prince Eugène se voit allouer de grands moyens en termes de troupes, tout en faisant l’objet de soins particuliers en matière financière.
19Pour la France, la situation est totalement inversée avec les fissures qui apparaissent au sein de la coalition réunie contre elle et les efforts diplomatiques importants qui ont abouti à un prochain retrait de l’Angleterre, semblant lui-même augurer d’une paix générale à venir, dans un contexte d’épuisement des pays belligérants. L’enjeu est donc de gagner le maximum de temps sur le front de Flandres, en empêchant les coalisés de remporter le moindre avantage significatif et en maintenant l’armée du roi en état de combattre19, sachant que la perte d’une nouvelle place forte ou de l’armée lors d’une bataille risquerait de réduire à néant les efforts diplomatiques entrepris, de compliquer la tâche des diplomates français réunis à Utrecht et de revigorer les ardeurs bellicistes des coalisés, y compris de l’Angleterre. On adopte donc, comme lors des années précédentes, une stratégie résolument défensive sur ce front, et le maréchal de Villars, qui commande l’armée de Flandre, reçoit de la part du roi une stricte interdiction de livrer bataille contre l’ennemi, car le royaume aurait alors plus à perdre en cas de défaite qu’à gagner en cas de victoire20.
20La conjoncture géopolitique et diplomatique globale a donc en cette fin de guerre une influence directe sur la conduite de la guerre, et les négociations tenues dans les plus hautes sphères européennes peuvent affecter en partie la vie du soldat durant la campagne qu’il va mener. De plus, ces négociations tenues durant le quartier d’hiver, période de repos des troupes, déterminent en grande partie la future campagne, en définissant le nouveau cadre stratégique, diplomatique et géopolitique dans lequel cette dernière devra se dérouler. Après avoir abordé la conjoncture diplomatique globale, il s’agit maintenant de revenir sur ce front de Flandre pour étudier comment la campagne se prépare localement, avec la question du remplissage des magasins, autre fait saillant des quartiers d’hiver.
La gestion des magasins en vue de la campagne
21Comme on le sait, le quartier d’hiver est souvent mis à profit pour procéder au remplissage et à la réfection des magasins militaires, qui sont des grands entrepôts et des grandes réserves situés à proximité de la ligne de front, mais dans des places protégées et fortifiées. Ils renferment toute sorte de denrées alimentaires, comme de la farine ou des grains pour cuire le pain des soldats, des tonneaux de viande salée, parfois du vin ou de l’eau-de-vie à destination des troupes, mais principalement les denrées nécessaires à la subsistance des chevaux qui accompagnent tout armée, à savoir le fourrage, et dans une moindre mesure l’avoine. Ces magasins ont été en partie ponctionnés au cours de la précédente campagne pour alimenter l’armée, et doivent donc impérativement être réapprovisionnés pour pouvoir assurer tout ou partie de la subsistance de l’armée lors de la campagne à venir.
22On distingue en effet à l’époque moderne une dualité dans les systèmes d’approvisionnement des armées, constituée par les deux sources pouvant procurer leur subsistance aux unités qui sont les magasins d’une part et les prélèvements sur le pays d’autre part. Ces deux sources se complètent pour nourrir les armées en campagne, et si les troupes ont l’habitude de faire paître leurs chevaux dans les prairies et de prélever leur nourriture sous forme d’imposition ou de maraude dans les endroits à proximité desquels elles cantonnent, les magasins doivent soit leur fournir le complément quand les ressources du pays ne suffisent pas à satisfaire les besoins de l’ensemble de l’armée, voire même se substituer à ces prélèvements en prenant totalement en charge la subsistance de l’armée quand un pays ne fournit plus de ressources.
23Ce cas peut arriver quand, par exemple, une armée doit occuper une même position durant un certain temps : les ressources limitées que l’on peut prélever sur le pays sont vite épuisées, et l’on doit donc puiser ses vivres dans les magasins pour continuer d’occuper la position. Les magasins sont donc très importants dans le cadre d’une guerre de position et d’une stratégie défensive comme celle choisie par l’armée française sur le front de Flandre pour la campagne de 1712.
24Le cas d’un pays n’offrant pas assez de ressources pour faire vivre une armée se présente également au tout début des campagnes, vers les mois de mars, avril ou mai, alors que la végétation et les herbes n’ont pas encore suffisamment poussé pour pouvoir être fourragées afin de nourrir les chevaux d’une armée. Disposer de magasins bien remplis à ce moment permet de s’affranchir de cette contrainte et de rallonger les opérations en entrant plus tôt en campagne, ce qui peut permettre de surprendre son adversaire en reprenant les opérations avant même qu’il n’ait pu assembler son armée, et donc avant qu’il ne soit en état de riposter ou de résister. Durant la guerre de Hollande, l’armée française a ainsi pu bénéficier d’immenses stocks dans ses magasins, préparés à l’avance par Louvois : elle aurait en effet bénéficié en 1672 de réserves suffisantes pour fournir 200000 rations par jour à une armée pendant 6 mois ; tandis qu’en 1675, il lui serait resté 75 jours d’autonomie à raison d’une consommation de 80000 rations par jour21. Cet avantage logistique ne tarda pas à se convertir en avantage tactique, dans la mesure où ces réserves permirent à l’armée française d’entrer systématiquement en campagne avant ses adversaires, et donc d’aller assiéger leurs places avant qu’ils n’aient pu assembler leur armée, avantage non négligeable qui facilite grandement la direction d’une campagne. De la même manière, une réserve conséquente de fourrages et de denrées dans ses magasins peut permettre d’opérer des mouvements ou petites campagnes en plein hiver, à l’image de celles menées par le maréchal de Turenne en 1673 et 167422.
25Cet avantage dont a disposé l’armée française durant les premières guerres de Louis XIV s’est cependant petit à petit effacé durant les deux dernières guerres de son règne, ce qui peut s’expliquer par différents facteurs tels que la forte hausse des effectifs des armées engagées, qui engendre des besoins bien plus importants en fourrage, mais aussi les progrès effectués par les adversaires de la France, qui ont fini par rattraper leur retard en terme d’organisation logistique pour se doter eux aussi de magasins performants, ou encore par les crises frumentaires qui ont sporadiquement frappé le royaume de France à partir des années 1690.
26On constate par ailleurs durant ces années de crises frumentaires une restriction des opérations, à l’inverse des entrées en campagne précoces que nous venons d’évoquer. Les grains et les fourrages deviennent alors bien plus difficiles à trouver, à acheter et à accumuler, ce qui empêche l’administration militaire de remplir correctement ses magasins. En 1694, durant la plus grande crise du règne de Louis XIV, les armées engagées sur les différents fronts sont contraintes d’attendre la pousse des herbes pour pouvoir entrer en campagne, n’ayant aucune réserve en magasin pour s’approvisionner. Les armées doivent ensuite se séparer et prendre leurs quartiers d’hiver dès le mois de septembre, alors que les armées coalisées arrivent à maintenir leur armée opérationnelle plus longtemps. Des contraintes similaires peuvent être observées lors des campagnes de 1709 et 1710, qui font suite aux mauvaises récoltes et au terrible hiver23.
27Ces quelques exemples permettent de mieux voir l’importance des magasins, et donc l’enjeu de leur remplissage durant le quartier d’hiver, afin de disposer d’une réserve permettant de ne pas se laisser surprendre par l’ennemi. Mais revenons à notre sujet pour voir la situation à l’aube de la campagne de Flandre de 1712. L’armée du roi suit une stratégie exclusivement défensive, et ne cherche donc pas à passer à l’offensive pour attaquer l’ennemi, mais laisse à ce dernier le soin de déterminer la date d’entrée en campagne, en se contentant d’être prête en même temps que lui pour ne pas se laisser surprendre. La situation n’est cependant pas des plus favorables pour les Français, car le royaume se remet doucement de la crise économique et frumentaire de 1709 et 1710, et l’armée doit sur le front de Flandre composer avec un appauvrissement et un épuisement général des provinces du Nord du royaume, qui subissent depuis maintenant une décennie les effets de la présence des troupes du roi sur leur sol, avec toutes les ponctions et prélèvements que cela implique. Le maréchal de Montesquiou prévient ainsi le 11 avril que la campagne se fera dans « un désert24 ». Les deux armées sont restées sur des positions assez proches durant la majeure partie de la campagne de 1711, et ont donc beaucoup puisé dans leurs magasins, celui de Douai pour les coalisés et celui de Cambrai, et dans une moindre mesure celui d’Arras, pour les Français. Comme la conjoncture laisse présager que ces mêmes positions seront à nouveau utilisées durant la campagne à venir, le remplissage du magasin de Cambrai devient une priorité pour l’armée du roi, qui déploie de grands moyens durant tout l’hiver pour y arriver, même si dès le début du rassemblement des troupes au mois d’avril des mesures sont prises pour limiter les ponctions opérées dans les magasins de la première ligne française.
28Le 13 avril, le secrétaire d’État de la Guerre Voysin envoie un mémoire au maréchal de Montesquiou25, qui commande l’armée de Flandre durant l’hiver, pour l’informer que les réserves renfermées dans les magasins ne permettront d’approvisionner l’armée du roi que durant un mois. On procède donc à de savants calculs et à différentes observations agraires et météorologiques pour spéculer sur la vitesse de la pousse des herbes dans les zones de front et tenter de déterminer la date à laquelle elles auront suffisamment poussé pour être consommables par les chevaux, afin de ne commencer à puiser dans les magasins qu’un mois avant au maximum. Le mémoire du secrétaire d’État prévoit alors au 25 mai la date à laquelle les herbes seront consommables, et préconise donc à son commandant d’armée de ne pas commencer à puiser dans les magasins avant le 25 avril, ce qui implique de laisser sa cavalerie en arrière jusqu’à cette date. Le maréchal laisse alors échapper : « je croy que le fourrage est notre grand ennemy26 ». Le climat semble cependant avoir été meilleur que prévu, car l’herbe s’annonce in fine consommable dès les environs des 10 et 12 mai, si l’on en croît une lettre ultérieure du maréchal de Montesquiou27. Cet exemple laisse entrevoir la contrainte que fait peser pour les armées modernes une absence de réserve suffisante lors de l’entrée en campagne, mais montre également que des données agricoles ou météorologiques simples telles que la pousse des herbes et la reprise de la végétation peuvent entrer en compte pour déterminer la date de déclenchement des campagnes. Ces considérations peuvent néanmoins aussi orienter les stratégies et objectifs des actions militaires accomplies durant l’hiver.
29Si les questions d’approvisionnement occupent une grande part des questions logistiques et stratégiques du quartier d’hiver, elles peuvent également dicter des buts de guerre lors de cette saison, où l’on va chercher à perturber les approvisionnements ennemis. Durant le quartier d’hiver 1711-1712, les généraux et intendants français partagent une crainte assez vive de voir les coalisés entrer précocement en campagne pour surprendre l’armée du roi qui n’aura pas eu le temps de s’assembler. Le maréchal de Montesquiou fait part dès le 12 septembre de son inquiétude en voyant de grands marchés d’approvisionnements lancés chez les coalisés, et rien de semblable du côté de l’armée du roi28. L’intendant de Flandre et intendant d’armée Bernières rapporte également le 17 octobre que les ennemis du roi se vantent de pouvoir venir mettre le siège devant Arras ou Cambrai dès la fin du mois de mars29. Les coalisés disposent en effet de l’avantage du terrain, avec de nombreux cours d’eaux et voies fluviales qui parcourent du nord au sud la zone de front, et leur permettent de ravitailler ainsi leurs places de la première ligne. Ils disposent aussi du soutien de la puissance commerciale anglaise et néerlandaise, ainsi que des flottes de navires de ces deux pays. Les Français, de leur côté, ne peuvent faire remonter les approvisionnements par voies fluviales que jusqu’à la Somme, la Sambre ou l’Oise, et doivent ensuite organiser des convois terrestres jusqu’à Cambrai. Pour tenter de pallier ce désavantage, on assiste durant l’hiver à de nombreuses tentatives opérées afin de perturber les convois ennemis, notamment dans le cadre de la petite guerre menée par les partisans qui s’attaquent aux convois et aux postes ennemis. Nous allons ici plus spécialement nous attarder sur une opération de plus grande envergure menée par l’armée du roi pour couper la navigation sur la Scarpe et la Deûle30.
30L’idée en vient du comte de Broglie, lieutenant général de l’armée du roi, qui s’appuie sur sa bonne connaissance du terrain d’opération31. Douai, place destinée à accueillir les plus grands magasins ennemis et à entretenir leur armée durant la prochaine campagne, est arrosée par deux cours d’eau, la Scarpe et le canal de la Deûle. Or, écrit-il, la Deûle est cernée entre le Pont-à-Saut et Courrières par deux levées de terre que l’on pourrait aisément reverser dans le canal pour l’obstruer ; tandis que la Scarpe est entre Marchiennes et l’abbaye d’Anchin canalisée par deux digues de terre que l’on peut faire sauter pour saboter le lit du fleuve et provoquer des inondations chez l’ennemi.
31Une fois le projet exposé aux autres généraux et au secrétaire d’État, et une fois l’assentiment royal obtenu32, le plan est mis à exécution en plein mois de décembre. Un premier corps quitte Arras, commandé par Broglie et le maréchal de Montesquiou et composé de 44 bataillons et 29 escadrons, et s’en va opérer sur la Deûle ; un autre de 45 bataillons et 31 escadrons s’en va sur la Scarpe depuis Valenciennes, commandé par le marquis de Vivans ; et le dernier part de Saint-Omer, comprenant 27 bataillons et 16 escadrons placés sous les ordres du comte de Goesbriant, afin de faire une diversion et de tenir en respect les garnisons ennemies de la Lys. Ces corps sont constitués à partir de détachements des garnisons de 29 places de la frontière au total, et assemblés dans le plus grand secret dans leurs villes de départ quelques jours avant le début de l’opération. En tout, ce sont 116 bataillons et 76 escadrons qui sont concernés par cette opération de grande ampleur, ce qui représente un peu plus de 33000 fantassins et environ 7500 cavaliers33.
32Les trois corps se mettent en mouvement le 11 décembre 1711 au matin. Celui de Montesquiou fait sauter deux ponts afin d’en jeter les pierres dans le canal de la Deûle, établit une digue en travers de ce dernier et envoie en son fond la terre prélevée sur les deux levées qui le bordent, de manière à ne laisser que deux pieds d’eau de profondeur, afin d’en gêner le futur nettoyage34. Sur la Scarpe, on construit cinq digues en travers du lit du fleuve, avec des pierres récupérées sur des ponts ou des maisons détruites, des péniches coulées ou des arbres abattus, tout en provoquant des inondations du côté de l’ennemi, et en jetant de la terre dans le lit naturel du fleuve ; ce dernier en devient selon Vivans « méconnaissable sur trois quarts de lieue35 ». Si les coalisés sont avertis assez tôt des mouvements français, ils doivent tout de même attendre trois jours pour assembler des détachements de différentes places et constituer un corps suffisamment important pour chasser les Français de ces rivières, et ces derniers ont donc tout le temps de mener à bien leurs travaux avant de s’en retourner dans leurs places. On n’assiste qu’à quelques escarmouches entre les éclaireurs ennemis et les arrière-gardes françaises entre Vimy et Fampoux, lors de la retraite française36.

33Peu onéreuse pour l’armée française, cette opération a néanmoins des conséquences très importantes pour la suite du quartier d’hiver, car elle retarde considérablement les coalisés dans le remplissage de leur principal magasin, et les oblige même à approvisionner Douai par voie terrestre ne serait-ce que pour permettre à sa garnison de subsister et pour pouvoir y maintenir des unités de cavalerie37. Ils se retrouvent également contraints à mener d’importants travaux de réparation sur les deux rivières, et donc à y faire cantonner en plein hiver un corps de troupes qui atteignit jusqu’à 20000 hommes pour protéger les réparations d’autres sabotages de la part de partis français. Une navigation partielle ne put être rétablie que fin février sur la Scarpe, et fin avril sur la Deûle. L’opération remplit donc parfaitement son objectif car elle empêche les coalisés d’être prêts à temps et de pouvoir assembler leur armée trop tôt. Au mois de mars, les coalisés tentent tout de même quelques mouvements dans leur arrière-pays afin de tromper leur adversaire et de lui faire croire à une prochaine entrée en campagne, mais le maréchal de Montesquiou, connaissant la faiblesse du magasin de Douai et son incapacité à pouvoir entretenir une armée, ne se laisse pas duper et peut prédire avec justesse que rien ne sera tenté chez l’ennemi avant le 11 avril38. Il peut donc se contenter de prendre ses dispositions pour être prêt uniquement à ce moment-là.
34Les préparatifs hivernaux et le remplissage des magasins se révèlent donc déterminants en vue de la reprise des opérations, car ils permettent de fixer la date à laquelle les armées pourront être assemblées, et de s’affranchir de contraintes météorologiques ou agricoles. Ils permettent de ne pas être surpris ou de surprendre, et donc de conférer ou annuler un avantage stratégique non négligeable. Une part assez importante de la petite guerre menée durant l’hiver finit également par obéir à cette stratégie et vise le court terme de la reprise de la campagne, cherchant à retarder l’ennemi par tous les moyens, ou à l’empêcher de prendre trop d’avance. Une fois la campagne commencée, l’état des réserves accumulées peut aussi influer sur la stratégie à tenir, par exemple pour camper longtemps sur une même position, ou pour avancer sa cavalerie en première ligne. Au début de la campagne de 1712, l’armée française est ainsi contrainte par mesure d’économie à laisser sa cavalerie en arrière de la première ligne, comme nous l’avons mentionné ci-dessus. Outre les préparatifs logistiques, l’entrée en campagne se prépare également par d’habiles manœuvres et certaines courses qui permettent de s’assurer de positions favorables en vue des opérations, et le quartier d’hiver est aussi marqué par ces courses ou guerres de positions.
Les positions à l’entrée en campagne
35La pause hivernale peut être mise à profit pour s’emparer de positions et établir des postes en certains lieux stratégiques, alors que la plus faible concentration de troupes en cette saison réduit de facto les capacités de riposte de l’adversaire. Des postes sont ainsi installés dès le début de l’hiver sur des axes de communication importants afin de protéger les convois qui y transitent, avant d’être évacués au commencement du rassemblement des armées, alors qu’ils deviennent des cibles faciles à prendre ; à l’image de ceux du Cateau-Cambrésis et du Catelet, installés pour protéger les routes terrestres vers Cambrai39.
36À la fin de l’hiver et au moment du rassemblement des troupes, la prise de certaines positions devient cruciale afin de s’assurer de bonnes dispositions en vue de la campagne, et on peut assister à des petites opérations, des coups de main voire même de véritables courses pour s’assurer la possession de lieux et de passages stratégiques afin d’y établir ses cantonnements ou ses lignes. Le meilleur exemple que nous pouvons étudier ici est celui de l’affaire de la Sensée, aux mois de mars et avril 1712.
37La Sensée est une rivière qui se jette dans l’Escaut au nord de Cambrai, et que l’on peut remonter jusqu’à l’Écluse, où le ruisseau le Trinquise permet de rejoindre la Scarpe à hauteur de Biache-Saint-Vaast, en aval d’Arras. Cet axe fluvial offre donc un appui pour établir une ligne défensive qui permet de relier deux places de la dernière ligne du « pré carré », qui sont alors les plus importantes du dispositif français, et dont la perte de l’une d’entre elle pourrait avoir de très fâcheuses conséquences pour l’armée du roi, ouvrant une porte à l’invasion du royaume et étant fortement susceptible de précipiter la capitulation du roi Très Chrétien. Elle est donc un axe stratégique d’importance décisive pour l’armée française, et avait par ailleurs déjà lors de la campagne précédente servie de ligne défensive, que le duc de Marlborough avait par ailleurs vainement essayé de forcer à Arleux40.
38Durant l’hiver, le prince Eugène, commandant l’armée coalisée dans les Pays-Bas, et pressé d’obtenir un succès significatif pour précipiter la défaite de Louis XIV, conçoit le plan de venir assiéger dès le début de la campagne de 1712 Arras ou Cambrai, ce qui non seulement lui offrirait une place de la dernière ligne de fortification française et lui ouvrirait la route de Paris, mais pourrait de plus contraindre l’armée française à s’abandonner au hasard d’une bataille si elle veut lui faire lever le siège de la place. Pour permettre l’exécution de ce plan, il lorgne lui aussi sur la Sensée, qui lui offrirait une ligne défensive pour son armée permettant de couper la communication entre les deux places et d’où il pourrait venir facilement assiéger l’une d’entre elles tout en protégeant l’armée assiégeante avec le gros de ses troupes41.
39Devinant l’intérêt français pour ces mêmes positions, il prévoit donc de venir prendre position sur place avant la fin du quartier d’hiver et avant même le rassemblement complet de son armée, afin de surprendre et devancer l’armée du roi. Le fort cantonnement d’infanterie hollandaise installé à ce moment sur la Scarpe pour protéger les travaux de rétablissement de la navigation ainsi que les convois lui sert alors de couverture pour dissimuler son projet, et il peut subrepticement faire augmenter la force de son cantonnement pour masquer les préparatifs, avant de charger le duc d’Albemarle de l’exécution de son plan.
40Une première tentative est faite le 28 mars, avec l’envoi de 600 à 800 hommes vers Arleux et l’Écluse pour établir des positions sans trop attirer l’attention42. Les généraux français comprennent néanmoins le subterfuge et contre-attaquent aussitôt : le comte de Broglie est envoyé à la tête d’un corps de 10000 fantassins et 10 escadrons détachés d’Arras, renforcés par des troupes de Cambrai et Bapaume. Il opère alors une attaque surprise de nuit, et déloge l’ennemi avec pertes et fracas, en faisant détruire les ponts et ouvrages défensifs que son adversaire avait commencé à installer43. Voysin, qui jugea alors l’affaire « de bon augure44 » pour la suite de la campagne, ne croyait sans doute pas si bien dire…
41Irrités par cet échec cuisant, les coalisés font une seconde tentative, avec cette fois-ci des moyens bien plus conséquents, et Albemarle redit au prince Eugène au début du mois d’avril sa détermination et sa hâte de prendre la position45. La nouvelle tentative a lieu le 12 avril. Le maréchal de Montesquiou avait néanmoins pu prendre au préalable ses dispositions, car, comme nous l’avons évoqué précédemment, il avait prédit que les ennemis ne pourraient rien tenter avant le 11 avril, faute de réserves suffisantes de fourrage dans les magasins de Douai. Il a donc déjà commencé à rapprocher son infanterie et tient 59 bataillons prêts à marcher vers la Sensée, ayant leurs lieux de cantonnement déjà assignés, ainsi que des corps de cavalerie en état d’alerte, ayant d’ores et déjà préparé du foin cordelé pour 4 jours46. Le 11 avril, ayant vent des mouvements ennemis, il déclenche son plan sans perdre de temps et envoie en pleine nuit des grenadiers occuper les différents villages de la rive sud de la Sensée et y couper les ponts47. Le lendemain, 19 bataillons d’Arras et 12 de Cambrai viennent les renforcer, avec des pièces d’artillerie de campagne. La Scarpe est détournée à Biache-Saint-Vaast vers le Trinquise pour se jeter ensuite dans la Sensée, afin d’obtenir une ligne fluviale continue entre Arras et Cambrai. Le comte de Broglie prend ses quartiers à Monchy-le-Preux, le marquis de Vieuxponts à Oisy-le-Verger.
42Ainsi, le 12 avril au matin, alors que l’avant-garde des coalisés s’avance vers la rivière, elle découvre avec stupéfaction que les Français l’occupent déjà et y installent une ligne, soutenue par de l’artillerie48. Ils ne peuvent donc que rebrousser chemin, non sans avoir vainement cherché à tester en plusieurs endroits la solidité de la ligne française. L’armée du roi ne cesse de renforcer ses positions durant la semaine qui suit, en infanterie et artillerie, tandis que la cavalerie est maintenue à l’arrière, mais à portée, pour des raisons logistiques. Le maréchal de Montesquiou peut alors annoncer le 18 avril que si les ennemis veulent aller sur la Sensée, « ils trouveront à qui parler49 ».
43Cette course vers la Sensée constitue à l’aube de l’entrée en campagne un succès stratégique français indéniable, et a pour effet de plonger les coalisés dans l’expectative et dans le doute. Après cette brusque course qui a un court instant accéléré le rythme des lentes opérations de rassemblement des armées, on observe un long temps de flottement, durant lequel les coalisés s’interrogent sur la conduite à tenir après la prise des postes de la Sensée par les Français, et ils doivent se résoudre à attendre l’arrivée du prince Eugène pour décider de la marche à suivre et diriger de nouvelles opérations. Ils poursuivent donc le rassemblement de leur armée, avec l’arrivée de contingents impériaux, allemands, anglais, ainsi que des dernières troupes hollandaises, qui rejoignent leurs premières lignes dans le courant du mois de mai. Ce n’est donc véritablement qu’à la fin de ce mois que les nouvelles opérations reprennent, et que la campagne démarre réellement. Pendant ce temps, les Français ont eu tout le temps de renforcer leurs positions sur la Sensée, tandis que le maréchal de Villars est venu reprendre le commandement de l’armée.
44L’occupation des postes de la Sensée par l’armée du roi et sa prise de position en prenant de vitesse son adversaire a des conséquences importantes sur la suite des opérations, car elle change la donne stratégique et oblige le prince Eugène à abandonner son plan initial. Ayant lui-même reconnu et testé la solidité des positions françaises sur la Sensée, il conçoit alors un plan de manœuvre destiné à contourner par l’est les positions françaises, en franchissant l’Escaut pour aller assiéger Le Quesnoy puis Landrecies50. Il évite ainsi d’attaquer frontalement les positions retranchées de la Sensée, où il ne peut que se trouver en situation défavorable, et espère obliger l’armée du roi à quitter ses lignes pour aller à la rencontre de son armée en terrain neutre, où il pourra plus facilement l’affronter lors d’une bataille rangée. Si l’armée du roi campe malgré tout sur ses positions, il aura alors tout le loisir d’investir et de prendre Le Quesnoy puis Landrecies, deux places d’importance mineure en comparaison d’Arras et de Cambrai, mais qui peuvent elles aussi lui ouvrir la route du royaume pour une invasion. Ces deux places sont de plus moins bien fortifiées qu’Arras et Cambrai, et ont souffert de problèmes d’entretien de leurs fortifications. Si l’armée du roi tente dès le début de l’hiver 1711-1712 de renforcer et réparer les murailles de ces deux villes, les travaux n’ont en fait guère pu avancer, ralentis par le climat ou par la réquisition de chariots destinés à leur amener des pièces de bois nécessaires pour des tâches jugées plus cruciales, comme les convois destinés à remplir les magasins de Cambrai. Les places voisines d’Arras, Cambrai et Valenciennes ont également fait l’objet d’attentions plus poussées, d’une part car on les jugeait plus exposées, d’autre part car elles disposaient d’un gouverneur ou d’un commandant plus influent. Les rapports d’inspections dressés pour ces deux places en avril et mai les ont donc décrites comme hors d’état de se défendre normalement51, mais on ne peut toutefois savoir si le prince Eugène connaissait leur situation exacte.
45Pour mettre son plan à exécution, le prince s’assure de plusieurs points de passages sur l’Escaut, et fait réoccuper le camp retranché de Denain, abandonné durant l’hiver, avant de faire construire de nouveaux ponts sur le fleuve à Neuville, entre ceux de Bouchain et de Denain qu’il contrôle déjà. Il établit également une ligne défensive entre Denain et la Scarpe, destinée à protéger les convois qui lui permettront d’entretenir son armée dès lors qu’elle aura franchi l’Escaut ; cette ligne est couverte par les places de Bouchain et Douai52. C’est alors Marchiennes qui sert de point de départ à ces convois, et qui accueille le gros des magasins destinés à nourrir l’armée de la Grande Alliance. Cette ville, bien que moins bien fortifiée que ses voisines Douai et Bouchain, peut néanmoins être couverte par ces dernières, et est située sur la Scarpe, où transitent les convois fluviaux des coalisés. Elle avait en effet servi de dépôt intermédiaire pour les navires remontant la Scarpe au moment où la navigation jusqu’à Douai s’était trouvée interrompue à la suite du sabotage de l’armée du roi, et il est toujours aisé d’y faire remonter en toute sûreté les convois du sas de Gand, principal nœud fluvial de la flotte de ravitaillement hollandaise, alors que les coalisés n’ont toujours pas retrouvé un trafic normal sur le dernier tronçon de la rivière qui la relie à Douai.
46Le lecteur qui connaît la manœuvre de Denain53 pourra dès lors assez facilement voir l’importance cruciale et très lourde de conséquence qu’ont eu, lors du déroulement de la campagne, le choix de cette configuration par les coalisés et surtout la prise par l’armée du roi des postes de la Sensée juste avant l’ennemi, qui a contraint ce dernier à adopter un plan plus audacieux et plus risqué. Ce plan quelque peu téméraire permit au maréchal de Villars de contrer le prince Eugène par la fameuse « manœuvre de Denain », qui le vit prendre d’assaut et enlever le camp retranché de Denain, et ainsi couper les approvisionnements de l’armée de la Grande Alliance qui assiégeait Landrecies, avant de poursuivre sur Marchiennes, prise à peu de frais, et offrant à l’armée du roi les immenses magasins de son adversaire, qui lui permirent de poursuivre la campagne avec le succès que l’on connaît.

*
47L’exploration plus poussée du quartier d’hiver de 1711-1712, outre l’intérêt qu’elle présente pour une meilleure compréhension de la campagne de 1712, la « campagne de Denain », nous semble également pertinente par l’exemple qu’elle offre de l’analyse d’un quartier d’hiver précédant une des dernières campagnes menée sous le règne de Louis XIV, mettant en lumière la face cachée de la campagne, à savoir sa préparation durant l’hiver, qui peut jouer, comme nous avons tâché de le démontrer, un rôle déterminant dans le futur déroulement des opérations. Si les quartiers d’hiver ont souvent pâti du désintérêt de l’historien, du chroniqueur ou du mémorialiste, qui leur ont souvent attribué un intérêt moindre, les nouveaux éclairages qu’ils donnent sur la préparation des campagnes nous semblent néanmoins très profitables, non seulement dans le cadre d’une « histoire campagne », mais aussi dans le cadre de l’histoire militaire en général.
48Les évènements hivernaux se révèlent ainsi assez lourds de conséquences sur le déroulement de la campagne de 1712, que ce soit au niveau des négociations diplomatiques, qui dictent des impératifs stratégiques globaux, définissent une nouvelle donne géopolitique en préparant une paix séparée de l’Angleterre, et laissent poindre des espoirs de paix avec l’ouverture des négociations d’Utrecht ; au niveau des approvisionnements des armées, qui déterminent les dates d’entrées en campagne et permettent à l’armée du roi de tenir sa stratégie défensive en s’évitant la mauvaise surprise de voir son adversaire entrer en campagne avant elle ; ou au niveau de la stratégie locale, par la prise de positions importantes destinées à bloquer l’ennemi et à l’empêcher de mettre ses plans en œuvre.
49De là, deux nouvelles pistes naturelles peuvent se présenter pour conclure en prolongeant la réflexion et en l’ouvrant sur de nouveaux champs d’étude. D’une part, la contingence, la précipitation parfois, et l’impact crucial de certains évènements, qui laissent voir à quel point les opérations ont parfois tenu à peu de choses et auraient pu se dérouler bien différemment, amènent assez naturellement à la tentation de l’uchronie, exercice toujours plaisant. On peut ainsi se demander comment aurait pu se dérouler la campagne de 1712 si les coalisés avaient pu réellement prendre position sur la Sensée, et si le maréchal de Montesquiou ne les y avait pas pris de vitesse. De même, que serait-il advenu si leurs approvisionnements de Douai n’avaient pas été coupés en plein hiver ? Et dès lors, quelle aurait pu être la fin de la guerre ? Qu’aurait décidé le congrès d’Utrecht ? Si l’exercice présente ses limites, il a néanmoins l’intérêt de souligner l’impact essentiel de certains évènements qui pourraient passer pour plus anecdotiques, et de montrer l’importance de l’enchaînement des évènements à cette période charnière de la dernière guerre du Roi-Soleil.
50Il est également tentant de se demander si la campagne de 1712 et sa réussite n’ont pas en fait commencé dès le quartier d’hiver, durant lequel les Français connaissent déjà quelques succès qui leur permettent de briser la coalition unie contre eux et de déjouer les plans de leurs adversaires. Les succès français de l’hiver, diplomatiques, logistiques et stratégiques, qui pourraient par ailleurs tout à fait se voir nuancés, préfigureraient donc les futures victoires de la campagne qu’ils ont contribué à entraîner. Si cette approche peut paraître intéressante et séduisante, elle dénote néanmoins une connaissance a posteriori du déroulement de la campagne, et semble oublier que les acteurs du quartier d’hiver ignorent encore son résultat futur ; et s’ils s’efforcent de servir le mieux possible leur souverain, espérant une fin heureuse, ils n’ignorent pas que celle-ci est encore soumise à la contingence, aux réactions de leurs adversaires, et pour une part au sort des armes.
51Nous préférerons ici souligner pour conclure la complémentarité et les liens forts qui se manifestent entre les évènements des quartiers d’hiver et ceux des campagnes, semblant unir ces deux saisons militaires qui constituent en fait les deux formes d’une seule et même réalité qu’est la guerre moderne, et permettent de l’appréhender de manière globale. L’idée de pause induite assez implicitement par le quartier d’hiver mérite donc d’être nuancée, dans la mesure où, si les armées se séparent bien le temps d’une saison à l’issue des campagnes, des opérations militaires se maintiennent néanmoins, et les belligérants s’adaptent à la nouvelle configuration militaire contrainte par la saison pour tâcher de continuer de harceler et d’importuner leurs adversaires autant que faire se peut, afin de contrarier leurs plans. Une nouvelle manière de conduire et mener la guerre apparaît alors, qui vise souvent un objectif à court terme qui est celui du démarrage de la campagne suivante. Nous nous permettrons donc d’emprunter la fameuse formule de Clausewitz54 pour dire que le quartier d’hiver constitue la continuation de la guerre par d’autres moyens, et la continuation de la campagne par d’autres moyens.
Notes de bas de page
1 Voir la journée d’étude « Une nouvelle histoire bataille : l’histoire campagne ? », tenue à l’IRSEM (École militaire, Paris) le 8 décembre 2011.
2 Georges Satterfield parle des quartiers d’hiver comme « un temps de réparation et de repos » (« a time of refit and repose »), dans Prince, post and partisans : the army of Louis XIV and partisans warfare in the Netherlands (1673-1678), Leyde, Brill, 2003. John A. Lynn les caractérise pour sa part comme « un hiatus de six mois [qui] entrecoupait les opérations, une pause qui arrêtait le progrès des armées victorieuses et permettait aux forces battues de se rétablir », dans Les guerres de Louis XIV (1667- 1714), Paris, Perrin, 2010.
3 Voir François Royal, « Les quartiers d’hiver des armées : pause et continuité dans la guerre. L’exemple de l’armée de Flandre entre les campagnes de 1711 et 1712 », dans Bertrand Fonck et Nathalie Genet-Rouffiac (dir.), Combattre et gouverner. Dynamiques de l’histoire militaire de l’époque moderne (xviie-xviiie siècles), Rennes, PUR/SHD, 2015, p. 75-89.
4 Gérard Lesage, Denain (1712) : Louis XIV sauve sa mise, Paris, Economica, 1992.
5 Pour de plus amples développements, voir François Royal, La guerre des glaces : étude des quartiers d’hiver de l’armée de Flandre (octobre 1711-avril 1712), thèse pour le diplôme d’archiviste paléographe, Paris, École nationale des Chartes, 2014.
6 Clément Oury, Les défaites françaises de la guerre de Succession d’Espagne (1704-1708), thèse de doctorat de l’université Paris-Sorbonne, 2011.
7 John A Lynn, Les guerres de Louis XIV, op. cit., chapitre 7.
8 André Corvisier, La bataille de Malplaquet (1709) : l’effondrement de la France évité, Paris, Economica, 1997.
9 John A. Lynn, Giants of the Grand Siècle : the French Army (1610-1715), Cambridge, Cambridge University Press, 1997.
10 Cité dans Geoffrey Parker (dir.), La guerre de Trente Ans, Paris, Aubier, 1987 (trad. fr. André Charpentier).
11 SHD, GR A1 2373, fol. 92.
12 Lucien Bély, Espions et ambassadeurs au temps de Louis XIV, Paris, Fayard, 1990.
13 John B. Hattenford, England in the War of the Spanish Succession : a study of the english view and conduct of grand strategy, 1702-1712, New York, 1987.
14 Olivier Chaline, « Le sursaut français (1710-1712) », Revue historique des armées, octobre 2015, n° 281, p. 16-26.
15 Heinrich Siegler von Eberswald, Feldzüge des Prinz Eugen von Savoyen von der Abteilung für Kreigsgeschichte des k.k Kriegsarchiv, Band XIV, Vienne, 1889.
16 Yves-Marie Rocher, « Louis XIV et la guerre d’indépendance hongroise (1701-1711), un véritable allié ? », Revue historique des armées, avril 2011, n° 263, p. 63-74.
17 Heinrich Siegler von Eberswald, Feldzüge des Prinz Eugen…, op. cit.
18 Österreichische Stattsarchiv, Abteilung des Kriegsarchiv, Alte Feldatken, Carton n° 306, « Jänner 1712 », fol. 3, 11 et 12.
19 Olivier Chaline, « Le sursaut français (1710-1712) », op. cit.
20 François Royal, La guerre des glaces…, op. cit., chap. ix.
21 John A. Lynn, Les guerres de Louis XIV, op. cit., chap. 4.
22 André Cousine, « La campagne de 1674-1675 du Maréchal de Turenne », dans Revue historique des armées, 1976, n° 1, p. 8-21.
23 John A. Lynn, Les guerres de Louis XIV, op. cit., chapitres 6 et 7.
24 SHD, GR A1 2374, fol. 83.
25 SHD, GR A1 2374, fol. 113.
26 SHD, GR A1 2374, fol. 198.
27 SHD, GR A1 2374, fol. 233.
28 SHD, GR A1 2305, fol. 162.
29 SHD, GR A1 2309, fol. 138.
30 François Royal, La guerre des glaces, op. cit., chap. vi.
31 SHD, GR A1 2306, fol. 130 et 131.
32 SHD, GR A12306, fol. 156, 157, 164 et 165.
33 SHD, GR 1 M 68, annexe n° 54, p. 325. L’état fait mention de détachements de 300 hommes par bataillon, ou seulement 200 pour les bataillons des garnisons les plus éloignées. Un escadron compte environ une centaine de cavaliers, parfois moins durant l’hiver.
34 SHD, GR A12306, fol. 182 et 183.
35 SHD, GR A1 2306, fol. 190 et 191.
36 SHD, GR A12306, fol. 189.
37 Österreichische Stattsarchiv, Abteilung des Kriegsarchiv, Alte Feldatken, carton n° 298, « Dezember 1711 », fol. 4.
38 SHD, GR A12373, fol. 216.
39 François Royal, La guerre des glaces, op. cit., chap. iv.
40 John Hussey, « Marlborough and the loss of Arleux, 1711 : accident or design ? », Journal of the society for Army Historical Research, p. 4-14.
41 Heinrich Siegler von Eberswald, Feldzüge des Prinz Eugen, op. cit.
42 SHD, GR A12373, fol. 287 et 289.
43 SHD, GR A12373, fol. 299 et 308.
44 SHD, GR A12374, fol. 2.
45 Österreichische Stattsarchiv, Abteilung des Kriegsarchiv, Alte Feldatken, carton n° 306, « April 1712 », fol. 1, ad 1 et 5.
46 SHD, GR A12374, fol. 67 à 69.
47 SHD, GR A12374, fol. 84.
48 SHD, GR A1 2374, fol. 94.
49 SHD, GR 1 K 299, carton 1, lettre de Montesquiou à Tingry, 18 avril 1712.
50 Heinrich Siegler von Eberswald, Feldzüge des Prinz Eugen, op. cit.
51 SHD, GR A12375, fol. 6, et GR A1 2374, fol. 210 à 212.
52 Heinrich Siegler von Eberswald, Feldzüge des Prinz Eugen, op. cit.
53 Gérard Lesage, Denain (1712), op. cit., chapitres 6 et 7.
54 Karl von Clausewitz, Vom Kriege, Berlin, 1832.
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