Un aristocrate-architecte à la défense des frontières de l’État vénitien : Giulio Savorgnan (1510-1595)
p. 29-55
Résumé
Dans la seconde moitié du xvie siècle, peu d’officiers ont atteint le renom de Giulio Savorgnan, qui fut honoré du titre prestigieux de surintendant général de l’artillerie et des forteresses vénitiennes, en 1587. Par son histoire familiale, Giulio fut d’abord appelé à servir dans le Frioul, frontière menacée par des bandes d’irréguliers venant de la Bosnie ottomane. Il poursuivit sa carrière en exerçant divers commandements en Dalmatie, qui le familiarisèrent avec l’art des forteresses. Dès 1549, il est associé à des chantiers de fortifications en Terre Ferme, ce qui lui permet de travailler à Peschiera del Garda, Padoue et Bergame. Il doit cependant attendre plusieurs missions en Crète et à Chypre, entre 1562 et 1569, pour conduire des projets de renforcement d’enceintes ; il synthétise ses observations lors de la gigantesque refortification de Nicosie, qui aboutit à la mise en défense de la capitale chypriote en un délai réduit (neuf mois), pour un coût limité à 90000 ducats. Le succès de cette entreprise établit Savorgnan comme une des principales autorités militaires de Venise, ce qui le conduisit à participer à l’élaboration du projet de Palmanova, projet qu’il avait espéré durant toute son existence. Aussi linéaire soit-elle, cette trajectoire s’appuya davantage sur une démarche empirique tirée d’observations de terrain que sur la connaissance de travaux scientifiques érudits, même si Savorgnan manifesta un goût avéré pour la balistique et la mécanique.
Texte intégral
1Si plusieurs chefs militaires ont marqué l’histoire de Venise au xvie siècle, peu d’entre eux ont laissé une empreinte aussi marquante que Giulio Savorgnan, honoré du titre de surintendant général de l’artillerie et des forteresses vénitiennes, en 1587. Le parcours de cet aristocrate frioulan justifiait la gloire acquise pour maintes raisons, tenant tant à la longévité de son engagement au service de Venise qu’à son action déterminante dans l’organisation de la défense des territoires de la Sérénissime, à une époque où l’Empire ottoman accentuait sa pression de tous côtés, sur mer comme sur terre. Après les interventions déterminantes de Francesco Maria Della Rovere dans les années 1524-1538, aucun autre capo di guerra ne laisse de souvenir aussi prégnant en matière d’histoire des fortifications dans le contexte vénitien.
Les Savorgnan del Monte, une famille frioulane alliée de Venise
2L’environnement familial façonne de manière indélébile le creuset dans lequel Giulio Savorgnan élabore son expérience et construit sa réflexion ; de ce fait, Giulio constitue un modèle assez classique d’aristocrate conscient de la nécessité de suivre les évolutions techniques, politiques et historiques de son époque afin de maintenir le prestige de sa maison. Giulio Savorgnan del Monte appartient, en effet, à un lignage dont les origines remontent au xe siècle, et qui doit sa longévité à un savant jeu d’équilibre entre les puissances se disputant la suzeraineté sur le Frioul. Les liens entre les Savorgnan et Venise se formalisent avec la génération de Federico Savorgnan, quand ce dernier obtient le rare privilège d’agrégation au patriciat vénitien, le 3 avril 1385, privilège qui n’ouvre cependant pas à l’exercice de charges de gouvernement dans l’État vénitien ; cet acte marque néanmoins la conjonction de deux logiques politiques appelées à structurer les intérêts mutuels des parties. À travers les Savorgnan, Venise renforce son influence parmi les groupes dirigeants d’une région frontalière avec les empires allemand et ottoman, qu’il convient de surveiller tant pour contrôler les routes commerciales transalpines que pour défendre la Terre Ferme et l’accès à la lagune ; pour les Savorgnan, le soutien de Venise s’avère déterminant afin de conserver leurs domaines, leurs rentes et leurs titres dans le contexte régional, face à la concurrence d’autres familles hégémoniques. Le monde de l’aristocratie féodale, par son organisation hiérarchique et ses violentes rivalités, portait en lui de tels facteurs d’instabilité institutionnelle qu’il rendait indispensables les alliances ; dans ce cadre, les relations entre Venise et les Savorgnan se singularisent par leur incroyable longévité, fruits d’ajustements permanents durant quatre siècles1.
3À partir du milieu du xive siècle, la fortune des Savorgnan est assise sur l’exploitation de domaines fournissant des revenus substantiels, composés de rentes tirées des activités rurales et de taxes sur le commerce ; les propriétés sont principalement dispersées dans le Nord du Frioul, autour des châteaux de Pinzano, flagogna, Osoppo, Ariis. Ce patrimoine, à forte valeur stratégique et militaire, subit deux divisions majeures, en 1442 puis en 1450, provoquant la séparation de la famille en deux lignes – Savorgnan del Torre, Savorgnan del Monte –, entraînant la contraction des ressources dévolues à chaque héritier. Très vite, les Savorgnan assument des fonctions militaires pour Venise, qui les investit de responsabilités de commandement, le plus souvent pour surveiller les voies de communication franchissant les cols alpins ; logiquement, les Savorgnan participent à l’organisation générale des armées en Terre Ferme en obtenant des condotte jusqu’à la fin de la république de Venise2.
4Le privilège d’agrégation au patriciat vénitien accordé à Federico Savorgnan n’entraîne pas pour autant une intégration à l’aristocratie vénitienne. L’analyse des alliances matrimoniales des Savorgnan montre la lenteur d’un processus qui porte des fruits tard, après 1550. Auparavant, les stratégies d’alliances des Savorgnan conduisent surtout à des mariages avec des familles frioulanes ; de fait, le renversement de tendance reflète les choix de Girolamo Savorgnan del Monte, le père de Giulio3. Né en 1466, recevant probablement une éducation lettrée, Girolamo se singularise par de nombreux faits d’armes ; dès 1487, il dirige avec succès des contingents de milices paysannes (cernide) contre les armées impériales, ce dont Venise le récompense en lui confiant une condotta de 300 soldats. En 1508, il participe aux combats qui bloquent l’avancée de l’empereur Maximilien dans la vallée de Cadore, facilitant la voie à de nouvelles conquêtes vénitiennes dans le Frioul oriental, ce qui lui vaut une pension annuelle versée par la Signoria, l’octroi du grade de collatéral général, et la cession du château de Belgrado, pris à l’ennemi, assorti du titre comtal associé au château. L’année suivante, le Sénat de Venise lui confie une ambassade en Suisse afin d’y recruter des mercenaires, puis lui concède une dignité rare, dépourvue de pouvoir réel, celle de sénateur surnuméraire, privilège qui suscite la défiance d’une partie du patriciat vénitien4.
5Les années de guerre sur la frontière orientale du Frioul confirment le rôle important tenu par Girolamo Savorgnan dans l’organisation militaire vénitienne ; au début de l’année 1514, lorsque les armées impériales lancent une expédition jusqu’à la lagune de Marano, qui facilite la voie d’une occupation aisée du Frioul, elles se heurtent à la résistance de Girolamo retranché sur son domaine, la rocca d’Osoppo ; pendant six semaines, du 17 février au 30 mars, il retient une partie des troupes ennemies, les privant des forces nécessaires pour contenir les armées vénitiennes, qui en profitent pour reprendre Udine et réoccuper presque tout le territoire frioulan5. La résistance victorieuse d’Osoppo consacre Girolamo comme tacticien militaire en lui conférant la stature de fidèle défenseur des intérêts de Venise, auxquels il demeure étroitement lié. L’extension de son patrimoine personnel dépend, en effet, de la bienveillance du pouvoir vénitien : peu avant le siège d’Osoppo, le Conseil des Dix lui accorde les biens confisqués à son cousin félon Antonio, et lorsqu’il se heurte aux usages des communautés rurales, Venise sait le dédommager en lui versant une pension annuelle de 400 ducats, en février 15196.
6La quête de puissance de Girolamo Savorgnan le mène à déployer une stratégie matrimoniale ambitieuse ; si le premier mariage s’inscrit dans une tentative de réconciliation avec une puissante famille frioulane, les trois unions suivantes montrent l’orientation vénitienne de sa vie publique, puisqu’il prend pour épouses des femmes issues de familles patriciennes7. La lignée assurant la transmission du patronyme descend du quatrième mariage de Girolamo, contracté en 1509, avec Orsina di Girolamo Canal, qui donne douze enfants à Girolamo ; tous survivent à leur père, qui disparaît le 30 mars 1529 à Venise, et qui est inhumé l’année suivante dans l’église San Pietro, construite sur la rocca d’Osoppo. Fort logiquement, il incombe à l’aîné des enfants, Giulio, d’entretenir un prestige familial fondé sur une identité associant la défense du patrimoine lignager et le service de l’État vénitien. Ainsi, par la vigueur de ses engagements, la figure de Girolamo trace une voie déterminante pour sa progéniture, lui transmettant la conscience du rôle historique incombant aux Savorgnan dans le cadre privilégié offert par l’État vénitien, sachant aussi dessiner une perspective politique élargie à l’Italie du Nord, puisque Girolamo entretient des relations avec les cours de Ferrare, de Mantoue et d’Urbino. Girolamo transmet également à ses fils sa conscience du danger ottoman, car les akıncı-s stationnés dans le paşalık de Bosnie ravagent le Frioul plusieurs fois entre 1470 et 1478, puis en septembre 1499 ; ils incendient alors 132 villages, et emmènent quelque 10000 captifs lors d’une expédition qui frappe longtemps les esprits, comme le rappelle Giulio Savorgnan dans une lettre écrite de Zara, le 15 novembre 15708. En avril 1520, Venise avait confié à Girolamo la défense de la frontière orientale du Frioul, afin de prévenir les incursions turques, anticipant ainsi les missions confiées plus tard à Giulio, lui aussi chargé de contenir la pression ottomane en Dalmatie, à Corfou, en Crète et à Chypre.
7À sa mort, Girolamo Savorgnan laisse un héritage composé de nombreux domaines, et si l’essence de ses dispositions testamentaires reste inconnue, leurs effets sont aisés à reconnaître, puisque ses sept fils s’accordent pour ne pas diviser le patrimoine afin de consolider la puissance des Savorgnan del Monte9. La culture familiale s’incarne alors à travers une institution spécifique, celle de la frérèche (fraterna), qui perdure jusqu’en 1578, lorsque le plus jeune frère, Ascanio, demande la division du patrimoine. Dans la société aristocratique vénitienne des xve-xviie siècles, la fraterna ne représente pas un mode de gestion patrimoniale spécifique aux Savorgnan ; ceux-ci s’inscrivent dans leur époque en s’appropriant une forme d’association qui garantit la communauté des biens et la survie de la famille ; cependant, les Savorgnan del Monte savent donner à leur fraterna une dimension philosophique et politique originale ; ils décident notamment de confier à Marc’Antonio, le cinquième frère dans l’ordre de naissance, la charge d’assurer la continuité de la lignée ; avec l’assentiment collectif, lui seul se marie, fonde une famille forte de dix-sept enfants, dont l’éducation appartient à l’ensemble des frères Savorgnan10.
8Ce qui paraît le plus déterminant dans cette fraterna tient au fait qu’en dépit de leurs caractères particuliers, de leurs compétences originales et de leurs réussites inégales en termes de carrière publique, les sept fils de Girolamo Savorgnan partagent un destin structuré sur les principes politiques et philosophiques de leur père, et que Giulio, aîné de la fratrie, entretient cet esprit jusqu’à son dernier souffle. Girolamo offre à ses fils une initiation aux lettres classiques assurée d’abord par Marcantonio Amalteo, un humaniste frioulan, en 1519-1520, puis par un Grec émigré de renom, Janus Lascaris, qui fréquente sans doute Osoppo entre 1521 et 152511. Ce que Giulio conserve de l’apprentissage du grec semble mince, tant ses écrits ne dévoilent aucun niveau de compréhension de la langue grecque lors de ses séjours à Corfou, en Crète ou à Chypre, ne serait-ce que pour restituer correctement la toponymie locale. En revanche, les connaissances de Mario, frère cadet, sont suffisantes pour qu’il achève une traduction de Polybe, à l’âge de 25 ans. En dépit de parcours distincts, on observe que les sept frères recourent aisément à l’écrit, que ce soit pour produire les actes nécessaires devant les juridictions qu’ils fréquentent, afin de défendre leurs intérêts patrimoniaux ou pour répondre aux multiples sollicitations en avis, rapports et expertises des instances vénitiennes. Cet apprentissage de l’expression bureaucratique commence très tôt, puisque Giulio et Mario se trouvent associés à la copie d’un mémoire de Valerio Orsino, dès 1538. Ainsi, les fils de Girolamo partagent une communauté de valeurs fondée sur une culture classique et administrative qui les rapproche, leur permet de se comprendre afin de défendre leurs intérêts, constituant leur capital intellectuel commun12.
9Si Girolamo Savorgnan veille à la formation intellectuelle de ses fils, il les destine également au métier des armes, conformément à la tradition seigneuriale fondée sur le prestige du commandement militaire, amplifiée par la situation frontalière des biens patrimoniaux ; l’éducation des garçons implique une authentique maîtrise des techniques de combat, une solide connaissance des tactiques militaires et une réflexion approfondie sur les stratégies offensives ou défensives. Girolamo initie directement ses fils à la conception d’ouvrages fortifiés, étant lui-même l’auteur de rapports, de plans et de maquettes destinés à renforcer ses châteaux, ayant proposé au Sénat les mesures qu’il estimait nécessaires pour la protection du Frioul13. Girolamo transmet à ses fils l’ensemble de ses préoccupations tout en étant conscient que l’acquisition des compétences militaires sort désormais du cadre féodal traditionnel pour servir la puissance publique ; à cet effet, afin d’acquérir l’expérience des campagnes militaires et dans le but d’apprendre les méthodes de commandement de troupes, Girolamo confie ses garçons à des chefs capables de les intégrer à des compagnies, où ils peuvent fréquenter le quotidien des soldats, et découvrir la réalité des champs de bataille14.
Giulo Savorgnan, un chef militaire
10Des six frères, seul Giulio a révélé les étapes de sa formation militaire, déterminée et financée par son père15; très tôt, à l’âge de 15 ou 16 ans, il participe aux guerres de Lombardie, où les troupes vénitiennes, alliées aux françaises, sont commandées par le duc d’Urbino, Francesco Maria Della Rovere ; dans ce cadre, Giulio participe à la prise de Lodi et de Crémone (septembre 1526), observe l’action d’autres condottieri, comme Giovanni De’Medici ou Janus Maria Fregoso. Au printemps 1527, Giulio est envoyé à la cour de Mantoue, où son père insiste pour que son fils quitte le service de page auquel Federico Gonzaga l’a affecté, afin qu’il soit versé dans une compagnie de cavalerie légère16. On trouve ensuite Giulio incorporé aux troupes vénitiennes commandées par le duc d’Urbino et par un autre célèbre condottiere, Paolo Luzzasco, engagé dans plusieurs sièges et batailles qui se déroulent de la Lombardie à Rome, en passant par la Toscane. Après les traités de paix de l’été 1529, les occasions pour que les jeunes Savorgnan perfectionnent leur formation sur les champs de bataille se raréfient, mais à l’aube de ses 20 ans, Giulio possède déjà une solide connaissance des pratiques militaires et de l’usage des pièces d’artillerie, ayant pu les observer pendant trois ans sur le sol italien, où se sont confrontées des armées expérimentées venues de toute l’Europe17.
11La maturité acquise sur les champs de bataille a incontestablement développé les aptitudes personnelles de Giulio, que son père destine à devenir un chef militaire, bien qu’âgé de 18 ans18. Ses frères ne paraissent pas bénéficier d’une formation aussi intense et aussi longue mais tous, excepté un, accomplissent une carrière dans le commandement militaire, conformément à la tradition familiale, à leur statut social et aux usages de l’aristocratie de Terre Ferme ; s’ils se placent au service de Venise, ils n’hésitent pas à proposer leurs compétences de condottieri aux ducs de Ferrare ou au roi de France, exploitant les opportunités ouvertes par les guerres d’Italie permettant aux élites aristocratiques de conquérir de nouveaux titres de gloire en dehors du contexte vénitien19. Ainsi, quelles que soient les destinées individuelles, la complémentarité des expériences accumulées renforce la cohésion intellectuelle de la fraterna ; les observations sur les forteresses et les descriptions de batailles recueillies à l’étranger par trois plus jeunes frères de Giulio – Mario, Germanico et Ascanio – sont partagées dans le cadre familial à travers leurs correspondances, et Giulio s’en fait longuement l’écho, bien qu’il n’ait pas parcouru l’Europe, comme ses frères cadets20. Certes, les informations sur les progrès de l’art militaire circulent largement avec l’essor de l’imprimerie vénitienne, mais on ne saurait enlever aux frères Savorgnan l’affirmation d’une authentique culture familiale, puisque la plupart d’entre eux composent des rapports sur des questions militaires et, plus spécialement, sur des opérations de fortification21.
12Là encore, la voie tracée par le père est exploitée par ses fils, qui produisent nombre de rapports, souvent en réponse à la sollicitation des autorités vénitiennes ; comme Girolamo, ils avancent des propositions pour défendre le Frioul, et Giulio est le plus prolixe en rédigeant divers textes qui le mènent à considérer aussi bien l’ensemble du système défensif frioulan, que celui de Terre Ferme et celui du dominio da mar (cf. infra). Malgré tout, il appartient à Mario d’associer l’expérience accumulée sur le terrain – la sienne et celle de ses frères – à l’apport des récits des auteurs grecs et latins (Thucydide, Polybe, Jules César entre autres), afin d’analyser les stratégies et tactiques adoptées lors de batailles et de sièges édifiants puisés dans toutes les époques ; dans son Arte militare terrestre e maritima, Mario Savorgnan conçoit un manuel du condottiere illustré de nombreuses planches assorties de commentaires, fournissant un ensemble qui frappe par son souci de synthétiser l’information historique et le fruit de l’observation contemporaine22.
13La maîtrise des frères Savorgnan en matière de commandement de troupes, associée à leurs capacités d’expertise en matière d’architecture fortifiée, représente la part visible de leurs activités militaires, bien qu’on puisse douter de la viabilité économique des entreprises menées pour le compte de Venise. Dans la correspondance envoyée depuis Chypre, Giulio ne cesse de souligner combien les salaires fixés dans les contrats de condotte se révèlent insuffisants pour assumer les frais inhérents aux charges attachées aux fonctions officielles. Est-ce en réponse à ces faibles revenus que la fraterna recourt à d’autres occupations plus lucratives, telles l’élevage de chevaux ? L’entretien de montures se révèle indispensable aux Savorgnan pour honorer des engagements qui prévoient la prestation de lanze spezzate, c’est-à-dire de cavaliers peu armés et aptes au mouvement pour accomplir des opérations de reconnaissance ou de harcèlement ; outre les contraintes négociées lors de l’établissement des condotte, les frères Savorgnan savent proposer des chevaux au duc de Ferrare en mai 1552, puis à la fin de l’année 1556. Toujours liée à l’environnement militaire, la fraterna se lance dans l’exploitation d’une mine de fer, obtenant une concession de la Signoria pour extraire le minerai dans la montagne de Val Bombarina, une vallée reculée des Alpes frioulanes, le 28 novembre 1553. Si on ignore les conditions relatives à la concession, les Savorgnan élargissent leur champ d’action initial en investissant dans un four, où sont fondus des lingots et des boulets de fer ; en deux ans, quelque 200 miara (94 tonnes) sont produits, et les boulets servent de monnaie d’échange pour rembourser des dettes23.
14Insister sur le poids de l’héritage paternel dans la constitution du savoir de Giulio montre que le parcours de ce dernier se conforme au modèle classique de la formation des élites aristocratiques de l’Italie du Nord, en y ajoutant toutefois une dimension dynamique particulière, celle propre à la fraterna Savorgnan. Giulio se distingue encore des autres chefs de guerre agissant pour le compte de Venise en s’appuyant sur une expérience de terrain originale, ancrée dans une connaissance approfondie des contingences matérielles des différents sites où il intervient. À cet égard, Giulio Savorgnan reste profondément imprégné par l’expérience acquise autour du château patrimonial d’Osoppo, où il naît le 11 novembre 1510, et où il retient peu des leçons de ses maîtres. Marcantonio Amalteo considère ainsi Giulio comme le moins doué des garçons dans les exercices faisant appel à la mémoire et à la rapidité d’intelligence. Son successeur, Janus Laskaris, rejoint implicitement cet avis en insistant sur son manque d’aptitude envers les études classiques, louant en revanche ses talents pour l’art équestre et le maniement des armes24. De cette orientation tournée vers l’éducation militaire, Giulio conserve une relative maladresse dans l’expression écrite ; en août 1560, dans une affaire qui le met en porte à faux vis-à-vis d’Alvise Mocenigo, syndic de Terre Ferme, Giulio peine à expliquer son comportement, et demande à son jeune frère Ascanio de le seconder dans la correspondance, avouant « Io confesso non esser dotto ne haver mai studiato25 ». Dans ses écrits, Giulio n’affiche aucun intérêt pour la culture lettrée de son époque, s’appropriant parfois quelques références mythologiques largement diffusées. Nulle part, par exemple dans les lettres expédiées depuis Chypre, il n’évoque des échanges avec des humanistes rencontrés sur place, qu’ils soient vénitiens (Francesco da Ponte, Francesco Patrizi) ou chypriotes (florio Bustron, les Podocataro)26. Giulio évolue à l’écart des milieux antiquaires et savants, et on ignore sa réponse à Daniele Barbaro, quand le patriarche d’Aquilée le sollicite dans l’espoir d’obtenir le fruit de découvertes surgissant de la terre remuée à Nicosie. Logiquement, Giulio ignore les références à l’architecture classique, malgré la présence d’un manuscrit latin de Vitruve dans la bibliothèque de son frère Mario, malgré l’édition italienne du traité de Vitruve accomplie, quelques années plus tôt, par le même Daniele Barbaro27.
15La figure du soldat s’impose lorsqu’on considère la carrière de Giulio, qui intègre les rangs des armées de Venise à l’âge de 16 ans, et qui participe à de nombreux engagements sur les champs de bataille durant les guerres d’Italie jusqu’en 1528-1529 (cf. supra). Giulio respecte la tradition familiale et ses années de formation sont d’emblée placées sous le signe du commandement, car il obtient, dès 1526, la conduite de 12 cavalli leggieri, dont son père assure l’équipement et l’entretien. La fréquentation des grands chefs militaires de son époque – Francesco Maria Della Rovere, Paolo Luzzasco, Giovanni De’Medici, Janus Maria Fregoso – lui confère une expérience et une maturité rares, qui le préparent à des responsabilités croissantes à partir de la guerre vénéto-ottomane de 1537-1540 car, durant la période précédente (1528-1537), Giulio semble se consacrer à l’administration du patrimoine familial, tout en exerçant le commandement de soldats en pays frioulan28. En octobre 1539, on le voit renouer avec les opérations sur le terrain, quand il est envoyé à la tête de 350 hommes au secours de Cattaro ; cette expédition marque à la fois le véritable commencement de sa carrière militaire et son premier engagement en Dalmatie29.
16Dans les années qui suivent, Giulio enchaîne plusieurs charges importantes dans le dominio da mar et en Terre Ferme : de 1540 à l’automne 1545, il est gouverneur de l’armée en Dalmatie, avec résidence à Zara, puis, à son retour, il obtient sa première condotta, sur intervention de Guidobaldo Della Rovere, en décembre 1546 ; à 36 ans, il reçoit le commandement d’une compagnie de 120 cavalli leggieri, avec un salaire annuel porté à 500 ducats, ce qui en fait un des principaux chefs militaires de Terre Ferme30. Dès lors, Giulio est régulièrement consulté pour remettre des rapports sur la nature de travaux de fortification à opérer : il considère les cas de Zara (10 janvier 1547), du château de Padoue (20 juillet 1548), de Peschiera del Garda (1549) enfin, où, pour son premier chantier, il est associé aux travaux de l’enceinte bastionnée31. Après sa charge de gouverneur à Corfou en 1551-1552, sa condotta est renouvelée, le 10 février 1552, par un contrat portant son salaire à 700 ducats, et à 160 le nombre de chevaux placés sous son commandement, ce qui le consacre comme un des principaux chefs militaires de Venise32.
17Peut-être retenu en Frioul par des problèmes de santé, l’activité publique de Giulio se traduit par la défense des confins frontaliers orientaux contre les impériaux en 1554, et par la production de rapports pour la Signoria ; en 1553, il délivre une expertise sur Udine, qui est suivie de deux propositions de réformes des troupes vénitiennes (1554, 1557), et d’une série d’avis sur la chiusa de Vérone, Peschiera et Marano (1557)33. L’année 1557 marque incontestablement une étape dans l’association de Giulio aux groupes concevant la défense de Venise, sans doute sur l’initiative de Sforza Pallavicino, qui avait obtenu l’année précédente le commandement principal des garnisons et des milices vénitiennes, et qui avait acquis une autorité indiscutée en matière de fortifications ; Pallavicino dirige le chantier des murs de Bergame, pour lequel il réunit, en juillet 1561, une commission composée du gouverneur de Vérone, Girolamo Martinengo, du capitaine de l’artillerie, le colonel Agostino Clusone, et de Giulio Savorgnan, auxquels se joignent les ingénieurs Francesco Orologi et Francesco Malacreda34. Durant les années 1553-1561, tout en assurant l’administration des biens patrimoniaux et en protégeant la frontière frioulane contre les Allemands, Giulio devient un chef militaire apprécié pour ses connaissances en matière de stratégie ; en 1557, il produit ses premiers rapports sur Famagouste, Candie et Corfou, qui l’introduisent à une problématique plus globale de la défense du dominio da mar35.
18Giulio renoue avec le service de Venise dans l’outremer, après que sa condotta a été reconduite, en mars 1562, en des termes assurant que son crédit s’accroît auprès des milieux dirigeants de Venise, puisque lui est accordé un commandement de 200 cavalli leggieri et de 100 soldats, assorti d’un salaire porté à 1200 ducats36. Cette élévation au rang des officiers supérieurs lui confère le pouvoir nécessaire pour exécuter les missions que le Conseil des Dix et le Sénat lui confient, en le nommant – non sans discussion sur l’étendue de ses compétences – sopraintendente maggiore delli Regni di Cipro e di Candia37 ; à ce titre, il est chargé d’inspecter les défenses de Chypre et, au terme d’un séjour de trois mois, d’émettre des propositions pour renforcer les murs de Famagouste et le château de Cérines ; durant cette mission, il est accompagné de son frère Ascanio38. En Crète, où Giulio demeure d’octobre 1562 à mars 1566, il dirige le chantier des murs de Candie, et supervise les travaux de renforcement de l’enceinte de La Canée, ayant compétence de gouverneur général de l’armée du Regno di Candia39. Obtenant avec difficulté son rapatriement vers l’Italie, il est chargé de visiter à son retour les forteresses de Cythère, Corfou, Cattaro, Budua et Zara, ce qui provoque une nouvelle série de rapports sur l’état de ces places fortes, et sur les travaux à y mener40.
19À peine est-il de retour à Venise, le 16 mai 1566, que Giulio repart aussitôt pour l’Adriatique ; deux mois plus tard, il est nommé gouverneur général de Dalmatie, afin de préparer les 1500 hommes qui composent les forces locales à l’affrontement contre les Ottomans ; cette nomination s’accompagne d’un relèvement de la solde de Giulio, portée à 1600 ducats, le 10 août41. Lorsque la menace s’éloigne, Giulio regagne la Terre Ferme et le Frioul, en septembre 156642. Les quatre années et demie passées outremer n’ont pas réduit l’intérêt de Giulio pour les affaires de sa patrie, car il consigne cinq rapports sur le Frioul et Udine entre le 18 octobre 1566 et le 13 janvier 1567 ; il nourrit probablement l’espoir de tenir un rôle déterminant dans l’organisation du chantier de fortification que Venise projette en terre frioulane, mais, en décembre 1566, Giulio est écarté de la réalisation de l’enceinte d’Udine, pour des raisons à mettre en relation avec la place contestée des Savorgnan dans la vie de la cité43. Le passage par Chypre, durant l’été 1562, la résidence à Candie, pendant près de quatre ans, et l’examen des forteresses de l’Adriatique aident heureusement Giulio à penser la stratégie défensive du dominio da mar.
20Le retour en Terre Ferme, tant attendu par Giulio, se révèle de courte durée – moins de six mois – car il est sollicité par le Collegio pour une mission secrète, afin de prévenir un coup de main d’un aventurier français de Raguse soupçonné de vouloir enlever Corfou. Pour couvrir les buts réels de sa mission, Giulio est nommé baile et provéditeur général de Corfou, le 31 janvier 1567. Il rejoint la forteresse le 3 mars, y demeure jusqu’au 16 avril, alors que les craintes de perdre Corfou s’évanouissent ; cet épisode fantasque assure que Giulio est désormais investi de la pleine confiance de la Signoria. C’est dans ce contexte qu’il est désigné gouverneur général des armées à Chypre (governator de tutta la militia di quel Regno), le 7 mars 1567, et qu’il rejoint Cérines deux mois plus tard, le 8 mai44.
21Lorsqu’il arrive à Chypre, âgé de 56 ans, Giulio incarne la figure du chef militaire ayant lentement construit son cursus honorum, quand d’autres condottieri accèdent plus vite à des responsabilités majeures du fait de leur appartenance à des cercles proches du pouvoir. La confiance que lui accordent Sforza Pallavicino et le Collegio à deux reprises, en janvier puis en mars 1567, consacre un soldat expérimenté sur les fronts des guerres d’Italie, ayant assuré des charges de commandement militaire pour le compte exclusif de Venise, depuis sa jeunesse et sans discontinuité ; jamais Giulio n’a envisagé de servir les Este ou une autre bannière après 1530, à la différence de ses frères : sa qualité d’aîné de la fratrie le conduit à reproduire aveuglément l’exemple paternel ; on peut assurer qu’il doit à son indéfectible fidélité politique ses nominations outremer, à Zara, à Corfou ou à Candie, puis son association à la réflexion générale sur la stratégie relative à la défense de l’État. Pour prouver son dévouement, le jour-même de ses 57 ans, Giulio offre ses services gracieux à la Signoria pour défendre Chypre contre le péril ottoman, sans considération de salaire ou de commandement militaire45.
Une conception personnelle de l’architecture
22Les premiers écrits où Giulio aborde des considérations techniques relatives aux fortifications datent du 10 janvier 1547, à l’occasion d’une halte à Zara, lorsqu’il répond aux questions des provéditeurs aux forteresses, Marcho Michiel et Alvise Gritti ; dans ce rapport, il propose des mesures d’économie pour la restauration des murs, et suggère des aménagements pour installer des batteries de canons46. Nulle part, il ne fait allusion à des travaux qu’il aurait dirigés durant son premier séjour dans la capitale de la Dalmatie vénitienne (1540-1545), si bien qu’on ne peut apprécier les circonstances précises dans lesquelles Giulio apprend le langage et la pratique de l’architecture militaire. S’il ne fait guère de doute qu’il reçut une initiation directe de son père, on ignore s’il échangea sur des aspects conceptuels avec Francesco Maria Della Rovere, principal artisan de la défense de Venise, de 1524 à 1538, auteur d’un traité d’architecture militaire ; il a été avancé que Giulio le rencontra, bien que les preuves manquent47 ; peut-être est-ce par son intermédiaire que Giulio noue des relations avec Giangiacomo Leonardi, autre expert en fortifications venu d’Urbino, qui réside à Venise jusqu’au milieu des années 1540, et dont Giulio rappelle le souvenir durant son séjour nicosiate48. Giulio semble s’investir dans des travaux à distance, puisqu’il obtient de la Signoria, le 27 novembre 1542, la permission de faire travailler aux murs d’Osoppo les hommes placés sous sa juridiction en Frioul ; avec le concours de ses frères, les arêtes des parois rocheuses de la rocca d’Osoppo sont émoussées et l’enceinte naturelle complétée de murs bastionnés49.
23En 1548-1549, les provéditeurs aux forteresses sollicitent Giulio pour obtenir des avis sur l’état du château de Padoue et sur la transformation de celui de Peschiera, lui soumettant une série de questions précises ; c’est précisément à Peschiera que Giulio intervient pour la première fois sur un chantier public, en 1549, sans qu’il soit possible d’apprécier la nature de ses responsabilités dans l’organisation des travaux ; tout au plus, apprend-on qu’il suit les opérations jusqu’en 1557, transmettant directement ses observations à Sforza Pallavicino ; il en retient la nécessité de recourir à l’emploi des ferlini (jetons) pour stimuler la main-d’œuvre, raisonne sur la logistique des masses de terre déplacées à l’occasion du creusement des fossés50.
24Ne sachant rien d’éventuelles interventions de Giulio à la forteresse de Corfou en 1551-1552, on retire l’impression qu’il reprend une activité en matière d’architecture défensive après une interruption d’une dizaine d’années, quand Sforza Pallavicino l’appelle à Bergame en 1561 ; sur ce chantier, supervisé par Sforza et dirigé par Girolamo Martinengo, la nature exacte des travaux accomplis par Giulio ne se laisse guère percevoir, mais ceux-ci l’occupent durant six mois. Il faut finalement attendre l’arrivée à Candie, en novembre 1562, pour que Giulio assume sa première direction de chantier, qui le retient pendant deux ans (1563-1564) ; reprenant d’anciens projets, il renforce une partie de la vieille enceinte, et édifie le boulevard qui prendra son nom avec un mur de courtine, commandant 2000 sapeurs payés à la journée ; la capacité de Giulio à surmonter des obstacles techniques, à faire déplacer de grandes quantités de terre sur de courtes distances, permet au trésor de Saint-Marc d’épargner 10000 ducats, si bien que le coût de ce boulevard se limite à 11000 ducats, somme modeste en regard de celles habituellement déboursées. Giulio montre toute sa capacité d’invention en s’adaptant au terrain et aux anciennes structures défensives qu’il modernise en généralisant l’usage des bastions ; il acquiert alors la réputation d’un architecte efficace et soucieux du trésor public. Durant cette opération, les initiatives de Giulio sont liées au respect des dispositions auparavant arrêtées par les provéditeurs aux forteresses, transmises à la fois sous forme écrite et sous forme de maquettes ; ses interventions concernent donc la réalisation des travaux et non la conception des murs, quelles que soient les innovations qu’il apporte dans la composition des couches de terre structurant les courtines, de manière à accentuer la résistance aux tirs51.
25Maintenu en Crète jusqu’en mars 1566, Giulio poursuit les travaux et accomplit un patient travail de rationalisation des structures militaires de la Crète, considérant tour à tour les questions d’approvisionnement des forteresses, l’organisation des troupes régulières et des milices paysannes (cernide), laissant des ordres précis pour la poursuite des travaux aux murs de Candie après son départ52. Sur le chemin du retour, il s’arrête à Corfou, où il dresse une liste de dix-neuf recommandations nécessaires au renforcement de la forteresse, en avril 156653. Fort de la maîtrise acquise, Giulio intervient enfin à Zara, en juillet 1566, sur le chantier dirigé par Sforza Pallavicino, afin de restaurer une partie des murs, ayant sous ses ordres 2000 hommes rétribués selon le système des ferlini, particulièrement adapté aux situations d’urgence54. L’expérience acquise durant les années 1563-1566 confère à Giulio la stature d’un technicien novateur, qui accentue l’élasticité des murs en accumulant des couches de terre battue sous un léger parement de pierres taillées ; combinant chaux et paille, il aménage des canonnières capables de résister longtemps aux tirs ; ainsi, il montre qu’il partage les préoccupations des architectes de son temps quant à la résistance supérieure des murs de terre face aux développements de l’artillerie lourde55.
26Les résultats atteints par Giulio en Crète lui valent l’estime et la reconnaissance de la Signoria ; Giulio, dont les compétences en termes de commandement militaire sont consacrées, voit reconnus ses talents de bâtisseur, étant capable d’enrichir la réflexion sur l’architecture défensive de ses observations de soldat, se montrant surtout capable d’économiser l’argent public et d’obtenir des résultats rapides. Le Collegio lui confie alors la mission secrète à Corfou, en mars-avril 1567, où il doit également intervenir sur deux bastions, sans avoir les moyens réels d’atteindre ses ambitions ; contraint de partir au bout de six semaines de séjour, Giulio tire une authentique frustration de cette occasion perdue56. On comprend alors combien les pleins pouvoirs accordés par le Sénat, en mars 1567, pour organiser la défense de Chypre représentent une opportunité majeure pour Giulio ; il se trouve investi d’une capacité de décision et d’une liberté d’action qui lui étaient inconnues jusque-là, puisque la conception de fortifier lui appartient en propre, sans avoir à suivre la longue procédure collective habituelle, où les capi di guerra devaient être consultés à plusieurs reprises avant qu’une solution soit adoptée et mise en œuvre par la magistrature des provéditeurs aux forteresses. Les instructions que donne Sforza Pallavicino dans son ordre de mission à Savorgnan, le 4 mars 1567, se révèlent peu contraignantes, et le respect que Giulio proclame à leur égard relève d’une rhétorique fondée sur la profonde complicité intellectuelle et politique qui lie les deux soldats, car Sforza accorde une confiance aveugle au projet de fortification de Nicosie dès qu’il en est informé57. Quatre ans plus tard (octobre 1571), Sforza et Giulio signent un rapport commun sur l’ensemble des fortifications frontalières du domaine maritime et terrestre vénitien, rapport qui couronne une collaboration décennale, et qui se traduit notamment par une profonde connivence en matière d’innovations, lorsqu’il s’agit de privilégier l’artillerie légère dans l’armement des forteresses58.
27On constate ainsi, qu’entre 1549 et 1567, Giulio acquiert une expérience originale de l’architecture militaire qui ne repose pas sur une observation des règles de la poliorcétique, c’est-à-dire sur une expérience de terrain comparable à celle de Francesco Maria Della Rovere ou à celle de Sforza Pallavicino, protagonistes de nombreux sièges de places fortes ; certes, Giulio put observer plusieurs assauts durant les guerres d’Italie, mais sa connaissance directe des ouvrages fortifiés reste limitée à une observation des murs de villes en territoire vénitien, en période de paix, comme il le démontre en comparant les qualités morphologiques des sols des sites de Cérines, de Peschiera et de Bergame59. Sans doute complète-t-il sa réflexion sur l’art des fortifications à travers les éditions de traités spécialisés imprimés à Venise, bien qu’il n’en fasse jamais mention. Giulio sait, en revanche, compléter son information sur les progrès accomplis en architecture bastionnée, tant en Italie qu’en France, à partir des observations que lui rapportent ses frères Mario, Germanico et Ascanio, comme il le sous-entend dans son rapport sur la forteresse de Corfou (1557)60 ; il put encore enrichir ses connaissances à partir de nouvelles colportées par des soldats envoyés sur d’autres champs de bataille, par exemple lorsqu’il se réfère aux particularités du débarquement accompli par Charles Quint à La Goulette, en juin 153561. Néanmoins, on ne peut que constater la méthode empirique de sa réflexion en matière de fortification ; il apprend quelques principes de son père et du duc d’Urbino, qu’il désigne comme « vecchio mio maestro » à la fin de sa vie62 ; il enrichit ces premières connaissances par une observation de la poliorcétique durant sa jeunesse ; il complète sa science par une longue et patiente pratique des rapports sur les forteresses vénitiennes, qui nécessitent de réelles capacités d’interprétation des rapports, des cartes, des dessins et des maquettes produits dans l’office des provéditeurs aux forteresses. Associé aux chantiers de Peschiera, Bergame et Zara, il dirige son premier véritable chantier à Candie, qui reste limité à une partie de l’enceinte de la ville.
28Recontextualisée dans ce parcours, la forteresse de Nicosie représente, dans la carrière de Giulio, son premier – et unique – programme, où il conçoit une enceinte dans sa totalité, et où il dirige les travaux dès le premier jour, pendant deux ans (mai 1567-juin 1569). En 1558, Giulio avait exprimé son hostilité à l’idée de fortifier Nicosie, une place dépourvue d’accès maritime, donc inaccessible d’un point de vue stratégique ; c’est l’urgence de la situation qui l’oblige à revenir sur son opinion, neuf ans plus tard, quand la Signoria le charge de construire une nouvelle forteresse à Chypre, cible assurée d’une expédition du sultan récemment intronisé, Sélim II ; le choix du site est arrêté par l’aristocratie chypriote, qui accepte de financer les trois quarts des travaux afin de mettre en sécurité les palais et richesses accumulés dans la capitale. La conception de l’enceinte circulaire, forte de onze bastions, est improvisée par Savorgnan entre le 10 et le 19 mai 1567, alors que les outils pour engager le chantier manquent ! Le tracé de la nouvelle enceinte établit un tracé géométrique parfait, plaqué sur un tissu urbain ancien, puisqu’il rationalise la vieille enceinte circulaire des Lusignan, longue de 7 km, en réduisant d’un tiers sa circonférence ; optant pour un tracé régulier de 5,5 km, qu’il articule autour de onze bastions distants de 400 m les uns des autres (fig. 1), Giulio respecte la trame urbaine préexistante. En revanche, la réalisation de ce tracé provoque un des plus drastiques réaménagements de l’urbanisme moderne en Méditerranée, puisque 1800 maisons, 11 palazzi, 3 monastères et 80 églises sont voués à la démolition ; en d’autres termes, 10000 personnes sont expropriées (près de la moitié de la population citadine)63.
Figure 1. – Germanico Savorgnan, dessin de l’enceinte de Nicosie, 8 août 1567 (Archivio di Stato di Torino, Architettura militare, vol. V, f° 154 r°).

29Le processus conduisant à l’adoption du plan des murs de Nicosie résulte d’un enchaînement de facteurs qui contredit la thèse d’un projet longuement mûri à distance, bien que les premières discussions relatives à cette entreprise datent de 1558 ; Savorgnan assume la pleine paternité du programme, sans intervention directe des autorités métropolitaines, de l’office des provéditeurs aux forteresses en particulier ; ainsi, se retrouve-t-il dans la situation traditionnelle de l’ingénieur qui doit trouver des réponses immédiates aux problèmes particuliers soulevés par un ensemble de contraintes techniques en procédant par analogie64. À Nicosie, Giulio synthétise l’ensemble des opérations dont il avait été le témoin en Terre Ferme ou en Crète, il les assimile pour donner naissance à un projet neuf, global, qui propulse la nouvelle forteresse à l’avant-garde des réalisations architecturales défensives. Favorisé par la nature du sol, très meuble, Savorgnan emploie une abondante main-d’œuvre payée selon le système des ferlini, répartie sur onze chantiers simultanés ; il applique les méthodes ailleurs expérimentées, en réutilisant la terre creusée dans les fossés pour dresser de puissants murs, en flanquant chaque bastion de deux orillons, où il aménage les plates-formes destinées à recevoir les canons. Giulio recourt aux techniques traditionnelles de construction qui privilégient les briques d’adobe, particulièrement adaptées au climat et résistantes aux chocs ; pour chaque orillon, 40000 briques d’adobe sont confectionnées, ce qui nécessite un long travail d’anticipation pour que le matériau soit disponible en temps voulu ; en s’appuyant sur des artisans locaux, Savorgnan réalise aussi de substantielles économies, portant le coût de fabrication d’un bastion à 5000 ducats, démontrant ainsi qu’il est possible de construire une forteresse entière pour la somme de 55000 ducats65.
30Giulio relève le défi lancé, à savoir que la forteresse soit achevée en des délais très courts, en l’occurrence en moins d’un an puisque Nicosie devait être mise en capacité de résister à une agression ottomane attendue au printemps 1568. Dans la pratique, Savorgnan démontre que six mois suffisent pour placer une ville de grandes dimensions en état de défense, ce qui représente évidemment un exploit, lui aussi inédit dans les annales de l’histoire des fortifications de la Renaissance. Souvent, Savorgnan se plaît à opposer les résultats de son action – onze bastions construits en neuf mois pour 90000 ducats – à celle d’Ercole Martinengo, dont un seul bastion à Famagouste avait coûté 80000 ducats en neuf ans de travaux66. Néanmoins, Giulio ne propose pas d’innovations techniques en matière d’architecture défensive, que ce soit à Nicosie ou dans ses rapports ; il se limite à rationaliser l’application de principes déjà établis, comme il le fait dans le cas des murs de Famagouste, où, en 1557, il suggère de généraliser le recours aux orillons pour renforcer les vieilles tours franques67.
31À Nicosie, Savorgnan s’investit encore dans la conception de bâtiments complémentaires, fonctionnels, destinés à améliorer la cohérence de sa forteresse modèle. Il dessine et dirige la construction d’une fonderie, pour fabriquer les pièces d’artillerie et les boulets ; cette mesure, décidée après la création d’une école de bombardiers, accentue l’autonomie de la place forte, capable de produire ses propres canons et projectiles, sans avoir à dépendre de la volonté de la Signoria ou de la lenteur des communications maritimes68. Giulio conçoit également des magasins distribués autour d’une grande cour, afin d’entreposer les armes et les munitions de la forteresse en un lieu central, facile à contrôler, proposant une solution dont s’inspirera plus tard Buonaiuto Lorini.
32Conscient de sa réussite, Savorgnan est prompt à diffuser le succès de la fortification de Nicosie, avant même son retour à Venise à l’été 1569 ; envoyant au moins une vingtaine de plans de l’enceinte en Italie, il organise sa propre promotion aux yeux des autorités métropolitaines afin d’écarter ses rivaux potentiels69. Très vite, ses idées trouvent un public et des défenseurs parmi les sénateurs et les officiers experts en fortification, en particulier dans les cercles de patriciens férus de progrès techniques, comme celui gravitant autour de Giacomo Contarini70. Plusieurs lettres adressées à Savorgnan, pendant son séjour nicosiate, montrent que son projet pionnier trouve immédiatement le soutien de patriciens renommés, tels Giulio Contarini, Daniele et Marc’Antonio Barbaro, Giacomo Soranzo, Marco Michiel et, bien sûr, Sforza Pallavicino ; avant d’être achevée, l’enceinte de Nicosie avait été proclamée la première fortification parfaite71.
33Aux yeux de Savorgnan, Nicosie constituait un prototype à reproduire en terre frioulane, afin de protéger Venise sur sa frontière orientale de Terre Ferme. Dès 1566, Giulio avait formulé quelques principes généraux, considérant les facilités de plusieurs sites propices à l’installation d’une forteresse72. Toute sa vie, Giulio entretient le projet d’une nouvelle réalisation qu’il conduirait, ou qui serait confiée à ses neveux ; il faut cependant attendre longtemps, le 17 septembre 1593, pour que Venise, menacée par une incursion allemande, prenne la décision de lancer le chantier de Palmanova, en un lieu totalement vierge de constructions. Savorgnan, âgé et affaibli, est plusieurs fois consulté sur le projet, et s’il reste impossible de déterminer la part prise par Giulio dans la conception du plan de Palmanova, il ne fait aucun doute que l’enceinte de Nicosie sert de modèle ; parmi les quatre ingénieurs opérant à Palmanova figurent Orazio Governa, aide de camp de Giulio à Chypre, et le florentin Buonaiuto Lorini, que Giulio avait attiré à Osoppo, après l’avoir rencontré dans le cercle de Giacomo Contarini, à Venise73. Lorini reconnut ouvertement sa dette envers le prototype nicosiate, ayant visité la forteresse chypriote durant le printemps 157074. Trois autres membres de la famille Savorgnan sont aussi associés à la réalisation de Palmanova, à savoir ses neveux Mario et Marc’Antonio Savorgnan, Giovanni Garzoni75. En d’autres termes, le décès de Giulio, le 13 juillet 1595, n’entrava pas la diffusion de ses idées et conceptions à Palmanova, dont le chantier est complété vingt ans plus tard, pour un coût total de 3,5 millions de ducats, d’autres renforcements défensifs étant ajoutés au cours du xviie siècle76.
34Rétrospectivement, Giulio aborde l’architecture militaire avec l’esprit empirique d’un soldat, et son association à une réflexion mûrie en des milieux savants, à Venise ou en Terre Ferme, reste une hypothèse à démontrer, quelle que soit la relation qu’il put entretenir avec le mathématicien Nicolò Tartaglia, dont nous parlerons plus bas77. Ainsi, sa correspondance ne suggère aucune relation directe avec Giacomo Contarini avant son retour de Chypre, Contarini étant informé des progrès du chantier de Nicosie par l’intermédiaire de Francesco Michiel78. C’est seulement après la guerre de Chypre, que Giulio, revenu de Dalmatie, tire profit du prestige que lui vaut son audace technique ; nommé à la tête du chantier des forts de Sant’Andrea du Lido, durant l’été 1571, Giulio devient un personnage recherché pour son expérience, et il fréquente, alors, les cercles savants, comme celui de Giacomo Contarini ; à cette époque, il entre en relations avec d’autres spécialistes en mécanique, comme le marquis Guidobaldo del Monte79. À son retour de Chypre, la résidence à Venise lui permet d’entretenir une vie sociale et intellectuelle incomparablement plus élaborée que celle pouvant être tenue à Osoppo, mais, malgré cet environnement favorable, Giulio n’a jamais composé ou patronné un seul traité sur l’architecture, sur la mécanique ou sur la balistique, bien qu’il ait attiré des lettrés et des savants à Osoppo80.
35L’isolement dans lequel Giulio élabore ses réflexions mérite cependant d’être relativisé ; l’entourage de ses frères, qui voyagent beaucoup, lui permet d’actualiser ses connaissances en matière de progrès techniques, tel Mario qui s’intéressait à la mécanique. Par ailleurs, Giulio se révèle un esprit fécond en inventions de machines, particulièrement attentif aux développements de l’artillerie, comme W. Panciera l’a précisément observé81. Du plus grand intérêt pour la compréhension de la formation intellectuelle de Giulio se révèlent les vingt-neuf questions de mathématique, de physique et de balistique que Giulio soumet à Nicolò Fontana surnommé Tartaglia (1499-1557), mathématicien originaire de Brescia, alors que Giulio est à Zara, en 1542, et que commence une nouvelle phase de travaux de fortification à Osoppo ; on ne connaît qu’une seule réponse de Tartaglia à ses questions, lorsque le savant publie, en 1546, un de leurs échanges dialogués à propos d’un problème de balistique, relatif au rapport entre le diamètre et le poids des boulets de canon82. Par la suite, Giulio conserve un vif intérêt pour la mécanique et pour la balistique jusqu’à la fin de sa vie ; en témoignent sa correspondance tardive avec filippo Pigafetta, voire avec Francesco Michiel, et, plus encore, son testament, où il lègue à Orazio Governa ses instruments de fer et de laiton, avec des compas et des équerres, des boussoles, des astrolabes, des sphères armillaires, des fours à lingot de fer, des machines pour lever des poids, des niveaux et d’autres instruments pour creuser83. La vie retirée que mène Giulio à Osoppo dans les années 1530, puis dans les années 1550, lui permet d’étudier des ouvrages savants de mathématiques qui l’aident à formuler des problèmes de mécanique ; comme il le confirme lui-même à propos de ses réalisations à Candie et à Nicosie, « non mi son meso a questi gran fatti alla ventura di Dio, ma con il fondamento dell’aritmeticha, della geometria et della praticha particolar di quello che pono far gl’huomini84 » ; cette remarque démontre clairement que Savorgnan s’inscrit dans les débats de son époque quant à sa maîtrise des sciences nécessaires à l’élaboration de l’art des fortifications, même s’il se construit une image d’aigle solitaire d’Osoppo85.
36Pour l’essentiel, la littérature sur les fortifications produite par Giulio, aussi abondante soit-elle, se présente sous la forme de réponses aux questions que lui soumettent diverses magistratures vénitiennes, celle des provéditeurs aux forteresses en premier lieu ; sinon, lorsqu’il prend la plume sans être sollicité, et afin d’examiner des problèmes ou d’avancer des solutions techniques, Giulio recourt à des formes dialoguées, sans doute inspirées des Quesiti de Tartaglia ; il établit aussi des listes de propositions qu’il numérote, comme en témoigne le texte le plus synthétique qu’il ait produit à la fin de sa vie, les Regule della fortificatione moderna. Les vingt-cinq règles énoncées ne sauraient cependant constituer un traité général sur l’art des fortifications, ce qui démontre combien Giulio ne se considère pas comme un théoricien de l’architecture militaire ; jamais, dans sa correspondance, il ne fait référence aux traités de fortification composés par Giovanni Zanchi ou par Giacomo Lanteri, qui sont alors publiés à Venise et qu’il ne put ignorer, laissant croire qu’il élabore sa réflexion en pleine autarcie intellectuelle86. On remarque encore que Savorgnan adopte une démarche à la fois opposée et complémentaire à celle de son frère Mario, qui avait fondé son propre traité d’art militaire sur un examen minutieux des grands textes de la culture humaniste87. Giulio reste un soldat riche d’une expérience de terrain inégalée, qui construit une réflexion à partir de ses observations, et qui voudrait transmettre son savoir à son neveu Germanico afin de maintenir dans la famille une tradition d’architecte militaire au service de Venise ; après le bannissement de Germanico, en 1581, Giulio doit admettre que ses héritiers spirituels seront finalement deux étrangers : le fidèle Orazio Governa, qui l’a accompagné pendant quarante ans tout au long de ses missions, et un jeune ingénieur étranger, entré au service de Venise, et qui a été subjugué par les murs de Nicosie, le florentin Buonaiuto Lorini88.
37La science de Giulio en matière de fortification s’appuie donc sur un système empirique fondé sur une connaissance relative des mathématiques et de la mécanique, sciences qui renforcent la rigueur de raisonnement et le sens de la discipline de l’officier. Néanmoins, on ne peut douter que Giulio élabore sa méthode à partir d’un examen serré des conditions propres à chaque site ; l’expérience d’Osoppo imprègne sa conscience à plus d’un titre, et il convient d’insister sur le cadre physique du château familial qui exacerbe son sens de l’observation, sous l’égide de la figure paternelle. Sur la rocca où il est né, Giulio se confronte aux difficultés techniques de l’articulation de murs bastionnés à un massif rocheux, dans la perspective d’une offensive menée par des pièces d’artillerie lourde : c’est le creuset de la réflexion ultérieure de Giulio sur l’art des fortifications89. Au-delà des aspects défensifs, Osoppo soulève des problèmes récurrents d’approvisionnement en eau, qu’il faut résoudre par l’aménagement de citernes ; là encore, Giulio apprend à intégrer aux contraintes stratégiques la dimension tactique du ravitaillement des places fortes qui conditionne la durée de la résistance à un siège, comme son père l’avait constaté à Osoppo, en février 1514 ; durant toute la durée du chantier de Nicosie, Giulio ne cesse de rappeler l’urgence à entreposer des provisions dans les magasins de la ville, pour organiser une défense sur plusieurs mois. Enfin, c’est par l’observation de la vallée du Tagliamento, au pied de la rocca, que Giulio s’ouvre aux questions de régulation des cours d’eau, que ce soit pour éviter les inondations autour d’Osoppo, ou pour alimenter des canaux de dérivation destinés à irriguer et à fertiliser les plaines frioulanes ; l’attention portée par Giulio aux questions d’hydrologie et d’irrigation à Chypre s’inscrit ainsi dans la continuité de ses préoccupations antérieures90. Naturellement, Osoppo appelle une attention particulière car elle incarne la résidence ancestrale des Savorgnan, le lieu de mémoire autour duquel s’articulent le passé et le présent des Savorgnan del Monte, comme Laura Casella l’a déjà démontré. Le palais construit sur la rocca est le réceptacle de l’histoire du lignage – onze générations se plaît à remémorer Giulio dans une lettre à Francesco Michiel, le 31 août 1579 ; Giulio y conserve ses collections d’outils et de machines, une galerie d’armures et une série de portraits des membres de la fratrie91.
38La référence constante à Osoppo ne sert pas qu’à légitimer une rhétorique défendant la mémoire familiale et le prestige du lignage car, dans son approche des questions financières, Giulio n’oppose pas les règles de l’économie domestique à celles de l’économie publique, suivant des principes de gestion rigoureuse à propos des dépenses occasionnées par les chantiers. Avec constance, il exprime sa volonté de limiter les charges qui grèvent le trésor de Saint Marc, et son souci de rigueur se traduit par plusieurs mesures : il impose, où il peut, le paiement de la main-d’œuvre au rendement selon le système des ferlini, qu’il a observé à Peschiera en 1549, et qu’il emploie à Nicosie, système qui garantit l’efficacité et la rapidité des opérations de manutention ; il rejette l’idée de creuser des fossés dans des roches trop résistantes, qui réclament temps, énergie et argent ; en privilégiant des tracés sur des terrains faciles à excaver, il peut dégager les masses de terre immédiatement réutilisées sur place pour dresser les courtines, ce qui réduit à néant les coûts de transport. Jamais, il ne cesse de prouver sa maîtrise des dépenses, au ducat près92. Enfin, le principal mérite de Giulio tient en ses incontestables compétences à assurer la direction d’un chantier, sachant apprécier les qualités personnelles des capitaines, saluant la loyauté des soldats respectueux des consignes de leurs supérieurs ; il montre de réelles aptitudes à haranguer, à improviser des règlements pour prévenir les violences que pourraient commettre les soldats d’infanterie, quitte à appliquer une justice expéditive pour l’exemple ; il se révèle un habile tacticien politique, capable de jouer des contradictions internes à l’aristocratie chypriote pour l’amener à financer l’enceinte de Nicosie, en mai 156793. Sa recherche de l’efficacité le conduit à proposer, à dates régulières, des améliorations dans le recrutement des soldats, qu’il s’agisse des troupes stationnées en Terre Ferme, en Crète ou à Chypre, cherchant à assurer de meilleures conditions de vie aux hommes pour qu’ils servent la Signoria avec entrain94. Giulio déploie enfin d’impressionnants talents de maître de chantier, sachant anticiper les besoins avant même de connaître la nature exacte de la mission qui le mène à Chypre en avril 1567, dévoilant des capacités exceptionnelles dans la répartition des tâches aux bastions de l’enceinte de Nicosie, exerçant un contrôle étroit sur l’avancement des travaux en visitant chacun des onze chantiers deux fois par jour, y compris au moment des plus intenses chaleurs de l’été 156795.
39Pour autant qu’il nous soit accessible, le caractère de Giulio paraît, en fin de compte, correspondre à celui d’un conservateur, pétri des valeurs traditionnelles d’une noblesse provinciale soucieuse de conserver ses privilèges et son rang en servant fidèlement Venise, réussissant à articuler la défense des intérêts privés et publics en fondant ses actes sur des principes d’intégrité et de cohérence morales. Soldat et, surtout, commandant supérieur des armées, Giulio impose ordre et discipline aux hommes qu’il dirige ; sa volonté de rationaliser l’organisation des forces vénitiennes le conduit à proposer de nouvelles méthodes de fortification. Dans ses écrits, il se montre persuadé de la supériorité de son savoir technique, qui s’appuie sur l’expérience acquise, l’observation directe, les connaissances transmises par son entourage, auxquelles s’ajoutent d’indéniables capacités à assimiler les expérimentations technologiques, surtout en matière d’artillerie96. Cette aptitude à l’innovation tranche dans un parcours conventionnel, et explique la surprise que représente la conception de l’enceinte de Nicosie dans une carrière exceptionnelle par ses achèvements, mais conformiste dans son essence.
Notes de bas de page
1 Sur la famille Savorgnan et son association à Venise, on renvoie à l’étude fondamentale : Casella Laura, I Savorgnan. La famiglia e le opportunità del potere, Rome, Bulzoni, 2003, p. 19-20, 31-33, et passim ; sur les stratégies de l’aristocratie frioulane, voir aussi : Muir Edward, Mad Blood Stirring. Vendetta and Factions in Friuli during Renaissance, Baltimore-Londres, Johns Hopkins University Press, 1993, p. 77-107 ; Trebbi Giuseppe, Il Friuli dal 1420 al 1797. La storia sociale e politica, Udine, Casamassima, 1998, chap. 2-3 ; Pezzolo Luciano, « Nobiltà militare e potere nello stato veneziano fra Cinque e Seicento », in Antonella Bilotto, Piero del Nigro, Cesare Mozzarelli (éd.), I Farnese. Corti, guerra e nobiltà in antico regime (Atti del convegno di studi, Piacenza 24- 26 novembre 1994), Rome, Bulzoni, 1997, p. 399-400 ; Conzato Antonio, « Per un profilo della nobiltà friulana nel Cinquecento : tra permanenza e partenza », Studi veneziani, n.s., vol. XLI, 2001, p. 99-177 ; id., Dai castelli alle corti. Castellani friulani tra gli Asburgo e Venezia 1545-1620, Sommacampagna (Verona), Cierre, 2005.
2 Muir E., Mad Blood Stirring, op. cit., p. 123, 125, 152-188 ; Trebbi G., Il Friuli dal 1420 al 1797, op. cit., p. 81-107 ; Conzato A., « Per un profilo della nobiltà friulana nel Cinquecento », art. cit., p. 113-116, 120-121 ; Casella L., I Savorgnan, op. cit., p. 48-50, 52-67 ; ead., « “Nobilissima famiglia Savorgnana, seminario antico e fecondo di lettere bellicose e di armi letterate.” Una famiglia di militari friulani nella Repubblica Veneta », Cheiron, n° xxiii, 1995, p. 131-155.
3 Sur les alliances de Girolamo Savorgnan del Monte, voir Casella L., I Savorgnan, op. cit., p. 55, 228, tav. 5. De l’abondante littérature consacrée à Girolamo Savorgnan, on retient : Francesco Sansovino, Origine e fatti delle famiglie illustri d’Italia, Venise, presso Combi, 1670, p. 509-513 ; Gian Giuseppe Liruti, Notizie delle vite ed opere scritte da letterati del Friuli, Venise, 1760-1830, vol. 3, p. 1-24 [repr. Bologne, Forni, 1971] ; Joppi Vincenzo, « Notizie sulla vita e sulle opere di Girolamo Savorgnan », in Vincenzo Joppi (éd.), Lettere storiche di Girolamo Savorgnan dall’anno 1508 al 1528, Udine, tip. G. B. Loretti, 1896, p. i-xv ; Emilio Salaris, Una famiglia di militari italiani dei secoli 16 e 17. I Savorgnano, Rome, tip. Editrice Roma, 1913, p. 33-39 ; Leicht Pier Silverio, « La figura di Girolamo Savorgnano », Memorie storiche forogiuliesi, vol. 24, 1928, p. 73-83 ; Bonati Savorgnan d’Osoppo Fulvio, « Aspetti della personnalità di Gerolamo Savorgnan », Memorie storiche forogiuliesi, vol. 47, 1966, p. 81-89 ; Casella Laura, « Al servizio di Venezia. Ruolo militare e potere nobiliare nelle lettere di Girolamo Savorgnan (1508-1528) », in Carlo Marco Belfanti, Francesca Fantini d’Onofrio, Daniela Ferrari (dir.), Guerre, stati e città. Mantova e l’Italia padana dal secolo XIII al XIX, Mantoue, G. Arcari, 1988, p. 13-32 ; ead., I Savorgnan, op. cit., p. 77-123, 131-133, et passim ; ead., « Girolamo Savorgnan », in Cesare Scalon, Claudio Griggio, Ugo Rozzo (éd.), Nuovo Liruti. Dizionario biografico dei Friulani. 2. L’età veneta, Udine, Forum, 2009, vol. 2, p. 2258-2265.
4 Hale John R., L’organizazzione militare di Venezia nel ‘500, Rome, Jouvence, 1990, p. 180 [1re éd. The Military Organization of a Renaissance State. Venice c. 1400-1617, Part II : 1509-1617, Cambridge, Cambridge University Press, 1984] ; Casella L., « Girolamo Savorgnan », art. cit., p. 2260.
5 Joppi V. (dir.), Lettere storiche di Girolamo Savorgnan, op. cit., p. 28-51.
6 Conzato A., « Per un profilo della nobiltà friulana nel Cinquecento », art. cit., p. 167 ; les oppositions au pouvoir de Girolamo sont tout aussi virulentes à Udine : Trebbi G., Il Friuli dal 1420 al 1797, op. cit., p. 111-116.
7 La descendance de Girolamo Savorgnan est résumée dans Casella L., I Savorgnan, op. cit., p. 143-144, et Appendice 1, tav. 4.
8 Archivio di Stato di Venezia [par la suite ASV], Capi di guerra, b. 8 ; V. J. [Joppi Vincenzo] (éd.), Discorso circa la difesa del Friuli, Udine, tip. G. Seitz, 1869, p. 7 (lettre datée de Zara, 15 décembre 1570) ; plus généralement : Pedani Fabris Maria Pia, « I Turchi e il Friuli alla fine del Quattrocento », Memorie storiche forogiuliesi, vol. 74, 1994, p. 203-224 ; Muir E., Mad Blood Stirring, op. cit., p. 92-93, 128-129 ; Trebbi G., Il Friuli dal 1420 al 1797, op. cit., p. 47-61.
9 Casella L., I Savorgnan, op. cit., p. 131-135, 220, tav. 4.
10 Sur la fraterna Savorgnan : Grivaud Gilles, Venice and the Defence of the Regno di Cipro. Giulio Savorgnan’s Unpublished Cyprus Correspondence (1557-1570), Nicosie, The Bank of Cyprus Cultural Foundation, 2016, p. 32-53.
11 Laskaris Giano, Epigrammi greci, Anna Meschini éd., Padoue, Liviana, 1976, p. 58-59 ; Liruti G. G., Notizie delle vite ed opere scritte da letterati del Friuli, op. cit., vol. 3, p. 14, 22-24.
12 Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., p. 42-43.
13 Ainsi, le 16 juin 1514, dans Collegio « Fo mostrato, per uno nontio di domino Hironimo Savorgnan, il modello di Oxopo e altri desegni di la Patria di Friul », Marino Sanudo, I Diarii, R. Fulin, F. Stefani, N. Barozzi, G. Berchet, M. Allegri (éd.), Venise, a spese degli editori, 1879-1903, vol. XVIII, col. 275.
14 Pezzolo L., « Nobiltà militare e potere nello stato veneziano fra Cinque e Seicento », art. cit., p. 397-398 ; Casella L., « “Nobilissima famiglia Savorgnana, seminario antico e fecondo di lettere bellicose e di armi letterate.” Una famiglia di militari friulani nella Repubblica Veneta », art. cit., p. 132.
15 Giulio rappelle fréquemment les étapes de sa carrière dans les rapports qu’il produit ; le récit établit par Orazio Governa, en 1576, brosse à grands traits la biographie officielle : ASV, Materie Miste Notabili 11, introduction f° 14 r°-v° ; Panciera Walter, Il governo delle artiglierie. Tecnologia bellica e istituzioni veneziane nel secondo Cinquecento, Milan, F. Angeli, 2005, p. 200-201, suit assez fidèlement ce récit, en le complétant ; Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., p. 53-74.
16 ASV, Materie Miste Notabili 11, introduction f° 14 v° ; Di Colmalisio Fulvio, « Giulio Savorgnan : aspetti inediti e poco noti della sua vita », Bollettino della società filologica friulana, 1937, p. 17, cite une lettre au duc de Mantoue écrite d’Udine le 24 avril 1527, reprise et commentée par Casella Laura, « I Savorgnan o delle piccole corti », in Cesare Mozzarelli (dir.), « Familia » del principe e famiglia aristocratica, Rome, Bulzoni, 1988, vol. 2, p. 397-398 ; ead., « Giulio Savorgnan », in Cesare Scalon, Claudio Griggio, Ugo Rozzo (dir.), Nuovo Liruti. Dizionario biografico dei Friulani. 2. L’età veneta, Udine, Forum, 2009, vol. 2, p. 2266.
17 Panciera W., Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 200-201.
18 Joppi V. (dir.), Lettere storiche dall’anno 1508 al 1528 di Girolamo Savorgnano, op. cit., p. 137.
19 Cf. les propos d’Ascanio Savorgnan dans la lettre qu’il rédige à Gand, le 7 novembre 1556 : Archivio di Stato di Modena [par la suite ASM], Archivio Segreto Estense, Cancelleria ducale, Carteggi e documenti di particolari, b. 1293 ; voir aussi, de manière plus générale, les remarques dans Pezzolo L., « Nobiltà militare e potere nello stato veneziano fra Cinque e Seicento », art. cit., p. 401-402, 408-409 ; id., « Professione militare e famiglia in Italia tra tardo Medioevo e prima età moderna », in Anna Bellavitis, Isabelle Chabot (dir.), La justice des familles. Autour de la transmission des biens, des savoirs et des pouvoirs (Europe, Nouveau Monde, xiie-XIXe siècles), Rome, École française de Rome, 2011, p. 344-345.
20 Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 4 et 5.
21 Hale John R., « Industria del libro e cultura militare a Venezia nel Rinascimento », in Girolamo Arnaldi, Manlio Pastore Stocchi (éd.), Storia della cultura veneta. Dal primo Quatrocento al Concilio di Trento, Vicence, Neri Pozza, 1980, vol. 3/2, p. 245-288.
22 Savorgnan Mario, Arte militare terrestre e maritima… hora ridotta alla sua integrità e politezza da Cesare Campana… Con un essatissimo trattato a parte dell’artiglierie, Venise, De Franceschi, 1599.
23 ASM, Archivio Segreto Estense, Cancelleria ducale, Carteggi e documenti di particolari, b. 1293, lettres de Marc’Antonio Savorgnan du 25 septembre et du 20 décembre 1555, de Mario Savorgnan du 10 décembre 1556 ; Savorgnan M., Arte militare terrestre e maritima, op. cit., p. 26 ; id., Del governo della sua famiglia. Lettera di Mario Savorgnan a Luigi Cornaro, nozze Trento-Cavalli, Udine, 1863, p. 14 ; Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., p. 46-48.
24 Tre lettere inedite a Girolamo Savorgnano (1519-1527), nozze Giuseppe Brogli, Udine, 1871, p. 7-9 (lettre du 24 août 1519) ; Laskaris G., Epigrammi greci, op. cit., p. 58-59 ; Casella L., « I Savorgnan o delle piccole corti », art. cit., p. 397 ; Panciera W., Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 200.
25 Biblioteca Ambrosiana Milano [par la suite BAM], cod. G 273 inf., f° 174 r°-v°, n° 91 (lettre de Giulio Savorgnan écrite de Belgrado, le 14 août 1560).
26 Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., p. 54.
27 Liruti G. G., Notizie delle vite ed opere scritte da letterati del Friuli, op. cit., vol. 3, p. 44 ; la lettre de Daniele Barbaro figure dans Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 91 ; l’édition de Vitruve sous le titre I dieci libri dell’architettura di M. Vitruvio tradutti et commentati da monsignor Barbaro eletto patriarca d’Aquileggia, Venise, per Francesco Marcolini, 1556 ; Manno Antonio, « Politica e architettura militare. Le difese di Venezia (1557-1573) », Studi veneziani, n. s., vol. XI, 1986, p. 120. Le faible intérêt de Giulio pour les humanités a été souligné par Panciera W., Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 200.
28 ASV, Materie Miste Notabili 11, introduction f° 16 v° ; dans une lettre datée du 23 décembre 1528, Girolamo Savorgnan confie la responsabilité du château d’Osoppo à Giulio : Bonato Savorgnan d’Osoppo F., « Aspetti della personnalità di Gerolamo Savorgnan », art. cit., p. 86-88.
29 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 2 r° ; Casella L., « “Nobilissima famiglia Savorgnana, seminario antico e fecondo di lettere bellicose e di armi letterate.” Una famiglia di militari friulani nella Repubblica Veneta », art. cit., p. 140 ; Panciera W., Il governo delle artigierie, op. cit., p. 201.
30 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 2 r°-v°, et Senato, Deliberazioni (Secreta), reg. 64, f° 93 r° ; Panciera W., Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 201.
31 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 3 r°-7 v° ; Bonato Savorgnan d’Osoppo Fulvio, « Palmanova e il suo creatore : Giulio Savorgnan », Memorie storiche forogiuliesi, vol. 46, 1965, p. 187 ; le texte de son rapport sur Pescheria a été publié par id., « Giulio Savorgnan e le sue scritture sulle fortificazioni della veneta repubblica », Bollettino dell’Istituto storico e di cultura dell’arma del genio, n° 106, 1969, p. 29-36.
32 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 8 r° ; Casella L., « “Nobilissima famiglia Savorgnana, seminario antico e fecondo di lettere bellicose e di armi letterate.” Una famiglia di militari friulani nella Repubblica Veneta », art. cit., p. 140 ; Panciera W., Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 201 ; Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., p. 58-61.
33 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 12 r°-15 r° ; Civico Museo Correr (Venise) [par la suite CMC], cod. Cicogna 581c, f° 364 r° ; Bonato Savorgnan d’Osoppo F., « Giulio Savorgnan e le sue scritture sulle fortificazioni della veneta repubblica », p. 19-20.
34 Colmuto Zanella Graziella, « La fortezza cinquecentesca di Bergamo », in L’architettura militare veneta del Cinquecento, Milan, Electa, 1988, p. 110-111 ; Manno A., « Politica e architettura militare. Le difese di Venezia (1557-1573) », art. cit., p. 108-111 ; Panciera W., Il governo delle artigierie, op. cit., p. 201.
35 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 15 v°-18 r° ; CMC, cod. Cicogna 581c, f° 364 r°-365 v° ; le rapport sur Famagouste est reproduit dans Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 1 ; Di Colmalisio F., « Giulio Savorgnan : aspetti inediti e poco noti della sua vita », art. cit., p. 18 ; Panciera W, Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 201.
36 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 28 r°.
37 Tel est le titre que lui accorde Girolamo Martinengo dans une lettre datée du 28 mars 1562 : ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 27 v° ; sur l’élection débattue de Giulio : Manno A., « Politica e architettura militare. Le difese di Venezia (1557-1573) », art. cit., p. 13.
38 Voir Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., p. 113-121, 163-178, doc. n° 7-11, 16.
39 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 36 r°-48 r° ; Steriotou Ioanna, Τα βενετικά τείχη του Χάνδακα (τον 16ο και τον 17ο αι.). Το ιστορικό της κατασκευής τους σύμφωνα με βενετικές αρχειακές πηγές, Héraklion, Bibliothèque Vikélaia, 1998, p. 22-29.
40 ASV, Senato, Deliberazioni (Secreta), reg. 73, f° 110 v° ; id., Senato Mar, reg. 37, f° 84 v°, 91 r° ; id., Materie Miste Notabili 11, f° 48 r°-51 r° ; le rapport sur Cythère a été publié par Bonato Savorgnan d’Osoppo F., « Giulio Savorgnan e le sue scritture sulle fortificazioni della veneta repubblica », art. cit., p. 15-18.
41 ASV, Senato, Deliberazioni (Secreta), reg. 74, f° 98 v°-99 r° ; id., Materie Miste Notabili 11, f° 52 v°- 56 r°.
42 Les dates sont calées sur celles du journal d’Orazio Governa : Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 115.
43 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 56 r°-66 r° ; sur les conceptions incohérentes de Giulio relatives aux murs d’Udine, voir Manno A., « Politica e architettura militare. Le difese di Venezia (1557- 1573) », art. cit., p. 123-124 n. 65.
44 ASV, Capi del Consiglio dei Dieci, Lettre di condottieri e di gente d’arme, b. 308, rapport du 9 février 1566 m.v., et Materie Miste Notabili 11, f° 66 r°-v° ; Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 25, 26, 115 ; le détail de la carrière de Giulio après 1571 est relaté par Panciera W., Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 203-204.
45 Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 44.
46 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 3 r°-4 v° ; Panciera W., Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 204.
47 L’évidence d’échanges entre les deux hommes est assurée par Ennio Concina, La macchina territoriale. La progettazione della difesa nel Cinquecento veneto, Rome-Bari, Laterza, 1983, p. 17, sur la foi d’un témoignage tardif, celui de filippo Pigafetta (1581) ; dans son rapport de 1557 sur Corfou, Giulio ne fait aucune allusion aux projets que le duc avait élaborés pour sa forteresse en 1533 : ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 16 v°-18 r°.
48 Concina E., La macchina territoriale, op. cit., p. 50-52, 135-155 ; Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 66 n. 3 ; on notera que Leonardi entretient une correspondance avec Mario Savorgnan : Salaris E., Una famiglia di militari italiani, op. cit., p. 94.
49 ASV, Materie Miste Notabili 13, f° 55 v°-58 r°.
50 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 4 v°-7 v°, 15 r° ; Bonati Savorgnan d’Osoppo F., « Palmanova e il suo creatore : Giulio Savorgnan », art. cit., p. 187 ; les ferlini sont des jetons remis aux ouvriers en fonction des quantités de terre transportées ; ce type de paiement au rendement accélère le rythme du travail, comparé au paiement à la journée, habituel sur les chantiers.
51 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 37 v°-40 r° ; Manno A., « Politica e architettura militare. Le difese di Venezia (1557-1573) », art. cit., p. 119-121 ; id., « Giulio Savorgnan : machinatio e ars fortificatoria a Venezia », in Istituto veneto di scienze, lettere ed arti (éd.), Cultura, scienze e tecniche nella Venezia del Cinquecento. Atti del convegno internazionale di studio Giovan Giovanni Battista Benedetti e il suo tempo, Venise, Istituto veneto di scienze, lettere ed arti, 1987, p. 231-232.
52 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 42 r°-48 r° ; Steriotou I., Τα βενετικά τείχη του Χάνδακα, op. cit., p. 22-29.
53 ASV, Archivio Proprio Contarini 4, f° 5 r°-6 r°, et Materie Miste Notabili 11, f° 49 r°-v°.
54 Bonato Savorgnan d’Osoppo F., « Palmanova e il suo creatore : Giulio Savorgnan », art. cit., p. 188 ; Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 21.
55 Manno A., « Giulio Savorgnan : machinatio e ars fortificatoria a Venezia », art. cit., p. 232-233 ; Vérin Hélène, La gloire des ingénieurs. L’intelligence technique du xvie au xviiie siècle, Paris, Albin Michel, 1993, p. 157-159.
56 ASV, Archivio Proprio Contarini 4, f° 7 v°-10 v°, et Materie Miste Notabili 11, f° 49 r°, 66 v°-67 v°, 68 v°-69 v°.
57 ASV, Materie Miste Notabili 8, f° 55 v°-56 r° (lettre de Sforza Pallavicino au doge, datée du 2 novembre 1567).
58 Relatione alla Signoria sulle fortificazioni di Zante, Cefalonia, Corfù, Albania, Cattaro, Dalmazia, Istria, Friuli di Giulio Savorgnano e Sforza Pallavicino, daté du 8 octobre 1571, disponible en plusieurs copies : ASV, Capi di guerra, b. 8 ; CMC, cod. P. D. 581, et cod. Cicogna 3098/XIX. En janvier 1573, Sforza souligne la convergence de leurs points de vue quant à la stratégie adoptée durant la guerre de Chypre : ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 184 v°.
59 Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 9, 11.
60 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 17 r°.
61 Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 3.
62 Sandri Maria Grazia, « Nuovi contributti. La lettera-testamento di Giulio Savorgnan al Doge », in Istituto italiano dei castelli (dir.), Palmanova da fortezza veneta a fortezza napoleonica, Udine, Istituto per l’enciclopedia del Friuli Venezia Giulia, 1982, p. 232.
63 Grivaud Gilles, « Nicosie remodelée (1567). Contribution à la topographie de la ville médiévale », Επετηρίδα του Κέντρου Επιστημονικών Ερευνών, vol. XIX, 1992, p. 281-306 ; id., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 85. Sur la construction de la forteresse de Nicosie, voir encore : Manno A., « Politica e architettura militare. Le difese di Venezia (1557-1573) », art. cit., p. 126-129 ; Levendis Panos, « Projecting Utopia : the refortification of Nicosia, 1567-1570 », in Albert Pérez-Gómez, Stephen Parcell (dir.), Chora five. Intervals in the philosophy of architecture, Montréal, McGill University Press, 2007, p. 227-258 ; Panciera Walter, « Défendre Chypre. La construction de la forteresse de Nicosie (1567-1570) », in Anne Brogini, Maria Ghazali (dir.), Des marges aux frontières. Les puissances et les îles en Méditerranée à l’époque moderne, Paris, Classiques Garnier, 2010, p. 81-101 ; id., « Giulio Savorgnan e la costruzione della fortezza di Nicosia », in Evangelia Skoufari (éd.), La Serenissima a Cipro. Incontri di culture nel Cinquecento, Rome, Viella, p. 131-142 ; Grivaud Gilles, « Le chantier insolite des murs vénitiens de Nicosie (1567-1570) », in Despoina Pileidou, Efthymia Alfa (dir.), Οχυρωμένες Πόλεις : Παρελθόν, Παρών και Μέλλον, Nicosie, Bank of Cyprus Cultural Foundation, 2012, p. 191-207 ; id., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., p. 259-276.
64 Vérin H., La gloire des ingénieurs, op. cit., p. 141-142.
65 Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., p. 272-273.
66 Ibid., p. 273.
67 Ibid., doc. n° 1.
68 Ibid., p. 274.
69 Marchesi Pietro, Fortezze veneziane, 1580-1797, Milan, Rusconi, 1984, p. 202-203 ; Grivaud Gilles, « The Drawings, Plans and Models of Venetian Military Engineers on Cyprus », in Gilles Grivaud, George Tolias (dir.), Cyprus at the Crossroads. Geographical Perceptions and Representations from the fifteenth Century, Athènes, Sylvia Ioannou Foundation, 2014, p. 115-117.
70 Tafuri Manfredo, Venezia e il Rinascimento. Religione, scienza, architettura, Turin, Einaudi, 1985, p. 200-208.
71 Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 90, 91, 92, 95, 102, 106 ; Manno A., « Politica e architettura militare. Le difese di Venezia (1557-1573) », art. cit., p. 129.
72 ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 51 r°-52 v°, 56 r°-62 v°.
73 Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., p. 551-552.
74 Lorini Buonaiuto, Delle fortificationi di Buonaiuto Lorini, nobile fiorentino, libri cinque, Venise, apresso Gio. Antonio Rampazetto, 1596, p. 70.
75 ASV, Materie Miste Notabili 5, lettre de Giulio Savorgnan du 23 mars 1594 et de juin 1595 ; dans son testament, Savorgnan assure qu’il a remis des instructions pour le projet de Palmanova à Giovanni Garzoni : BAM, cod. Q 122 sup., f° 142 r°.
76 De l’abondante bibliographie consacrée à Palmanova, on retient : De La Croix Horst, « Palmanova. A Study in Sixteeenth Century Urbanism », Saggi e memorie di storia dell’arte, vol. V, 1966, p. 23-41 ; Damiani Piero, Storia di Palmanova, Udine, Arti grafiche friulane, 1969-1972, vol. 1-2 ; Olivato Loredana, « Contributti alla genesi progettuale di Palmanova : il ruolo di Giulio Savorgnan », Memorie storiche forogliulesi, vol. LVI, 1976, p. 93-110 ; Di Sopra Luciano, Palmanova, analisi di una città-fortezza, Milan, Electa, 1985 ; Ghironi Silvano, Manno Antonio, Palmanova. Storia, progetti e cartografia urbana (1593-1866), Padoue, G. Buzzanca-Stampe antiche, 1993 ; Palmanova da fortezza veneta a fortezza napoleonica (catalogue d’exposition), op. cit. ; La Penna Pierlorenzo, La fortezza e la città. Buonaiuto Lorini, Giulio Savorgnan e Marcantonio Martinengo a Palma, 1592-1600, florence, L. S. Olschki, 1997 ; Molteni Elisabetta, « La scienza del fortificare », in Ennio Concina, Elisabetta Molteni (dir.), « La fabrica della fortezza ». L’architettura militare di Venezia, Vérone, Banca popolare di Verona, Banco S. Geminiano e S. Prospero, 2001, p. 187-207.
77 Soutenant au contraire que Giulio Savorgnan a été inséré tôt à des groupes de scientifiques gravitant autour de Nicolò Tartaglia : Manno A., « Giulio Savorgnan : machinatio e ars fortificatoria a Venezia », art. cit., p. 230.
78 ASV, Capi di guerra, b. 1 (lettre de Francesco Michiel, de Venise, le 25 octobre 1567) ; la correspondance directe entre Giulio Savorgnan et Guidobaldo Del Monte est attestée pour les années 1580, cf. les lettres contenues dans ASV, Archivio Proprio Contarini 19.
79 Des preuves d’échanges entre Giulio Savorgnan, Guidobaldo Del Monte et Giacomo Contarini durant les années 1580 sont apportées dans Rose Paul Lawrence, The Italian Renaissance of Mathematics. Studies on Humanists and Mathematicians from Petrach to Galileo, Genève, Droz, 1975, p. 232 ; Manno A., « Giulio Savorgnan : machinatio e ars fortificatoria a Venezia », art. cit., p. 238 ; Casella L., « I Savorgnan o delle piccole corti », art. cit., p. 398-399 ; Panciera W., Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 204.
80 Manno A., « Giulio Savorgnan : machinatio e ars fortificatoria a Venezia », art. cit., p. 238, considère que Pigafetta a traduit le traité de mécanique de Guidobaldo Del Monte sur commande de Giulio ; Casella L., « I Savorgnan o delle piccole corti », art. cit., p. 397-407.
81 Panciera W., Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 207-212.
82 ASV, Materie Miste Notabili 13, f° 55 v°-58 r° (« Questi 29 quesiti Giulio Savorgnano li fece dimandare da un suo ragazzo nano al famoso Nicolò Tartaglia del 1542 a fine di farlo ragionare cose diletevole ») ; Maria Francesca Tiepolo (éd.), Ambiente scientifico veneziano tra cinque e seicento. Testimonianze d’archivio, Venise, Archivio di Stato di Venezia, 1985, p. 35 n° 39 ; Tartaglia Nicolò, Quesiti et inventioni diverse, riproduzione in facsimile dell’edizione del 1554 edita con parti introduttorie da Arnaldo Masotti, Brescia, La nuova cartografica, 1959, f. 34 r° ; Manno A., « Giulio Savorgnan : machinatio e ars fortificatoria a Venezia », art. cit., p. 230 ; Panciera W., Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 121-123, 199.
83 ASV, Archivio Proprio Contarini 4, f° 181 r°, avec reproduction partielle chez Panciera W., Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 230 ; BAM, cod. D 34 inf., f° 128 r° (lettre de Giulio Savorgnan à filippo Pigafetta, d’Osoppo, le 8 juin 1581, relative à des mécanismes de traction), et cod. Q 122 sup., f° 150 v°-151 v° (testament du 19 janvier 1595) ; Sandri M. G., « Nuovi contributti : la lettera-testamento di Giulio Savorgnan al Doge », p. 233 ; Panciera W., Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 203.
84 BAM, cod. D 191 inf., f° 102 r° (lettre de Giulio Savorgnan à filippo Pigafetta, de Bergame, le 4 mai 1586).
85 Vérin H., La gloire des ingénieurs, op. cit., p. 176-178.
86 Sur la production éditoriale relative aux œuvres de fortification à Venise, voir Hale J., « Industria del libro e cultura militare a Venezia nel Rinascimento », art. cit., p. 245-288 ; Vérin H., La gloire des ingénieurs, op. cit., p. 146-149.
87 BAM, cod. D 167 inf., f° 6 r°-12 v° ; à partir d’un autre manuscrit, le texte a été édité par Gambuti Alessandro, « Invenzioni ed ammaestramenti di scienza militare nell’archivio mediceo », in Carlo Cresti, Amelio Fara, Daniela Lamberini (dir.), Architettura militare nell’Europa del XVI secolo, Atti del Convegno di Studi, firenze, 25-28 novembre 1986, Sienne, Periccioli, 1988, p. 356-364 ; Manno A., « Giulio Savorgnan : machinatio e ars fortificatoria a Venezia », art. cit., p. 234, soutient que Giulio ne pouvait concevoir un traité d’architecture défensive, car il ne considérait pas l’architecture comme une science, mais comme le produit d’une expérience formée de règles immuables ; sur le genre des dialogues dans la littérature scientifique relative aux fortifications, voir les réflexions de Vérin H., La gloire des ingénieurs, op. cit., p. 144-145.
88 Manno Antonio, « Buonaiuto Lorini e la scienza delle fortificazioni », Architettura. Storia e documenti, vol. 1, n° 2, 1985, p. 36 ; Casella L., « I Savorgnan o delle piccole corti », art. cit., p. 406 ; Sandri M. G., « Nuovi contributti : la lettera-testamento di Giulio Savorgnan al Doge », art. cit., p. 233 ; Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., p. 549-553.
89 Sur la forteresse d’Osoppo et les aménagements réalisés au cours du xvie siècle, voir la description attribuée à Mario Savorgnan par Salaris E., Una famiglia di militari italiani, op. cit., p. 102-104 ; Micelli Francesco, « Castello e monte di Osoppo (1510-1529). Per una storia della “Via da carri” tra Villaco e Portogruaro », in Andrea Del Col (dir.), Società e cultura del Cinquecento nel Friuli occidentale. Studi, Pordenone, Edizioni della Provincia, 1984, p. 57-71 ; Manno A., « Giulio Savorgnan : machinatio e ars fortificatoria a Venezia », art. cit., p. 229.
90 Voir les rapports des luocotenenti à Udine Francesco Michiel (26 janvier 1553) et Girolamo Morosini (20 avril 1559), in Istituto di storia economica dell’Università di Trieste (éd.), Relazioni dei rettori veneti in Terraferma I. La patria del Friuli (luogotenenza di Udine), Trieste, Libreria goliardica, 1979, p. 40, 68-69 ; ASV, Capi di guerra, b. 8, lettre de Giulio Savorgnan à Francesco Michiel, d’Udine, le 8 janvier 1567 ; id., Capi dei Dieci, Lettere di condottieri, b. 308, acte du 17 septembre 1567.
91 Casella L., « I Savorgnan o delle piccole corti », art. cit., p. 391-413.
92 Bonato Savorgnan d’Osoppo F., « Palmanova e il suo creatore : Giulio Savorgnan », art. cit., p. 187-188 ; Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 42, 55, 77.
93 Ibid., doc. n° 26, 28, 32, 50, 60, 61, 63, 64, 69, 70.
94 Ibid., doc. n° 2, 14, et ASV, Materie Miste Notabili 11, f° 12 r°-14 v°, 26 v°-27 r°.
95 Grivaud G., Venice and the Defence of the Regno di Cipro, op. cit., doc. n° 23, 28, 39.
96 Manno A., « Giulio Savorgnan : machinatio e ars fortificatoria a Venezia », art. cit., p. 228-229 ; Panciera W., Il governo delle artiglierie, op. cit., p. 198-199, 209-210.
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