Chapitre VI. Crise ou recomposition écologistes à la fin des années 1970
p. 223-260
Texte intégral
Les mouvements écologistes face aux sorties des années 68
1À l’orée des années 1970, les premiers militants écologistes en sont convaincus. La pollution est sur le point de submerger le monde, à moins que la surpopulation ne l’engloutisse ou que les déchets nucléaires ne l’empoisonnent irrémédiablement. Cette vision apocalyptique de l’avenir de l’humanité a une contrepartie plus réjouissante : la certitude que l’écologie est le ferment d’un monde inédit et la matrice d’une société nouvelle. Celle-ci peut et doit s’imposer très vite, dans une révolution d’un nouveau genre qui emportera les structures politiques, sociales et économiques d’un vieux monde de toute manière condamné. Face à de telles échéances, il ne saurait être question de manier des outils obsolètes qui ont fait la preuve de leur inefficacité : le parti politique sclérosé ou encore la démocratie représentative qui condamne l’électeur à la passivité doivent céder le pas aux mouvements sociaux dynamiques et aux citoyens enfin mis en capacité d’agir sur les problèmes qui les concernent directement.
2Certes, il ne faut pas être totalement dupe de ce discours radical. Pour certains militants, user d’une telle rhétorique est avant tout un moyen d’affirmer la spécificité de leur action et d’en asseoir la légitimité face à leurs concurrents et à une classe politique encore peu investie sur les questions environnementales. Pour autant, cette manière de se représenter le passé, le présent et l’avenir, autrement dit cette historicité, est plus fondamentalement caractéristique des années 68 en ce qu’elle révèle une volonté de rompre avec le passé et ses normes1. Le contexte social et politique des années 1970 influence donc de manière décisive les écologistes dans leur perception des problèmes auxquels ils sont confrontés et dans la définition des solutions les plus souhaitables à leurs yeux.
3C’est dire si la fondation des Verts en 1984 marque une rupture politique, symbolique et quasi-anthropologique avec les années 1970. Après avoir des années durant dénoncé les partis politiques, les écologistes acceptent finalement de se rallier à cette forme de régulation du débat démocratique, ce qui n’a pas manqué d’éveiller la curiosité des chercheurs. Sans évoquer directement cette question, Sylvie Ollitrault n’en souligne pas moins combien les associations de protection de la nature et de l’environnement tendent au début des années 1980 à s’institutionnaliser, privilégiant le dialogue et la compétence plutôt que le rapport de force2. Guillaume Sainteny voit dans ce processus une solution pour perdurer dans un système institutionnel français fermé et peu propice à l’apparition de nouveaux acteurs3. Cette proposition n’explique cependant pas pourquoi la marche vers l’unification des écologistes s’accélère au début des années 1980 et non pas plus précocement alors que les écologistes étaient déjà confrontés à la fermeture supposée des institutions de la Ve République. De la même manière, comment expliquer que les écologistes allemands, qui évoluent dans un système politique plus ouvert grâce au scrutin à la proportionnelle, plus favorable aux petites formations, se lancent à la même époque dans la création d’une structure partidaire ?
4Jusqu’à présent, aucune explication véritablement précise et spécifique n’a été avancée pour expliquer pourquoi ce mouvement d’institutionnalisation survient durant ce laps de temps finalement assez court allant de la fin des années 1970 au milieu de la décennie suivante. Une telle évolution est souvent considérée comme allant de soi, comme si les mouvements sociaux représentaient l’enfance de l’écologisme et la création d’une structure partidaire l’entrée dans l’âge adulte ou du moins dans une adolescence prolongée.
5Pourtant, faire de la création des Verts une évidence a l’inconvénient de présenter l’institutionnalisation comme la seule voie possible pour qu’un courant politique puisse perdurer, occultant ainsi les nombreuses propositions alternatives envisagées, et parfois mises en œuvre, durant cette période. Par ailleurs, se focaliser exclusivement sur l’aspect institutionnel de ces évolutions amène souvent à négliger le poids des questions proprement environnementales dans ces évolutions pour n’en faire qu’une question de théorie politique.
6Pour comprendre pleinement les enjeux de cette période et en restituer la complexité, il est nécessaire de revenir aux événements, comme le suggère une approche historiographique qui s’est développée récemment dans l’étude de Mai-juin 684. Au début des années 1980, les écologistes sont en effet contraints de s’adapter à une situation politique, économique, sociale et même intellectuelle sensiblement différente de la période précédente.
7Si les problèmes environnementaux perdurent et, dans bien des cas, s’aggravent, la catastrophe écologique généralisée que les militants prophétisaient n’est pas advenue. Quant aux partis politiques, de droite comme de gauche, ils ont, bon gré mal gré, ajouté un paragraphe consacré à l’environnement dans leurs programmes électoraux tandis que des politiques publiques spécifiques ont été mises en place. L’écologie se banalise, le nucléaire également, cependant que l’idée de révolution se conjugue de plus en plus au passé5.
8L’institutionnalisation de l’écologisme français n’est que la manifestation la plus spectaculaire d’une évolution plus profonde des mouvements écologistes en réponse à la métamorphose du champ de l’environnement et à la profonde transformation du contexte social, politique et économique qui a présidé à son apparition près d’une décennie plus tôt. Dès lors, nous proposons le concept de « sorties des années 68 » pour signifier le poids de la chronologie dans ces transformations et démontrer qu’en l’espace de quelques années, de la fin des années 1970 au début des années 1980, certaines questions cruciales sont envisagées sous un angle nouveau, fondamentalement différent de celui adopté durant les années 68.
9Dans un premier chapitre, il est nécessaire de préciser le concept de « sorties des années 68 » pour mieux comprendre les multiples recompositions de l’écologisme français à la fin des années 1970. L’unification de la nébuleuse au sein d’une organisation commune voire unique devient alors un point ardemment débattu par les militants. C’est donc à l’édification de cette structure, dans ses réussites comme dans ses échecs, ainsi qu’à la définition de ses nouvelles orientations que le dernier chapitre de cette étude est consacré.
Les sorties des années 68
10En mobilisant le concept d’« années 68 », les historiens appellent à ne pas réduire Mai 68 aux troubles du printemps dans le Quartier latin pour procéder au contraire à un élargissement géographique et surtout chronologique de leurs recherches à une période courant du début des années 1960 jusqu’au début des années 1980, redonnant toute leur importance à des phénomènes jusqu’à présent sous-estimés6. Toute proposition problématisée de périodisation pose immanquablement la question de ses bornes chronologiques, ce qui n’est pas sans entraîner des difficultés. Évoquant l’entrée dans les années 68, Philippe Artières et Michelle Zancarini-Fournel insistent sur l’importance de la fin de la guerre d’Algérie en 1962 qui favorise l’épanouissement d’une culture jeune et l’esquisse d’un renouveau politique et idéologique appelée à mûrir durant les deux décennies suivantes7. Pour sa part, Jean-François Sirinelli voit dans l’année 1965 une charnière décisive correspondant à une première baisse du taux de natalité après plus de vingt années de hautes-eaux, phénomène qui coïncide avec un décrochement significatif de la pratique religieuse chez les jeunes. L’historien interprète ces données comme le signe d’une affirmation de l’individu et de l’importance nouvelle dévolue à la sphère privée dans l’espace public, deux caractéristiques qui signent l’entrée dans les « Vingt Décisives8 ». De fait, loin d’être concurrentes, ces deux propositions ne s’excluent pas l’une l’autre et dessinent un court moment, quelques années, qui paraît déterminant dans les mutations de la France d’après-guerre.
11La borne finale des années 68 est toute aussi délicate à placer. Henri Mendras situe à 1984 le terme de La Seconde Révolution française9 alors que Pascal Ory choisit de terminer son récit à l’élection de François Mitterrand en mai 198110, qui signale tout à la fois l’apogée d’une aspiration à « changer la vie » et l’entrée prochaine dans une crise politique. De son côté, Robert Frank voit dans les années 68 un temps d’enchantement et d’optimisme et propose donc de s’arrêter à la tragédie cambodgienne de 1975 qui symboliserait la faillite des tentatives révolutionnaires de transformer l’homme et la société, démarche qui conduirait en fait au totalitarisme le plus meurtrier11.
12La concurrence de ces bornes chronologiques signale leur relativité ; postuler le caractère déterminant d’un événement singulier, le généraliser à l’ensemble d’une société revient souvent à sous-estimer le caractère équivoque de sa réception. Ainsi, L’Archipel du Goulag d’Alexandre Soljenitsyne, paru en 1973, est parfois crédité d’avoir dessillé les yeux des intellectuels occidentaux, leur révélant enfin la réalité du totalitarisme soviétique et contribuant à la fin des idéologies. Contre cette vulgate, Michael Christofferson a démontré combien cet événement s’insère dans une évolution plus large du rapport des intellectuels à la gauche qui ne peut être véritablement appréhendée que dans le contexte de la formation de l’union de la gauche et de sa rupture12. Le caractère symbolique et déterminant de cette date a été construit après coup dans un but précis, constat qui conduit à en relativiser la portée pour l’ensemble de la société française. Pour appréhender l’ensemble des processus sociaux, politiques et culturels à l’œuvre en cette fin des années 68, il paraît donc opportun de laisser de côté la recherche d’un moment précis supposé déterminant pour envisager cette question dans une perspective différente.
13Plutôt que de tenter d’assigner un terme précis à cette période, nous proposons d’employer l’expression de « sorties des années 68 » pour prendre en compte les processus spécifiques à l’œuvre durant ce court laps de temps. Cette approche s’inspire du concept de « sortie de guerre » notamment développée par Bruno Cabanes et Guillaume Piketty pour analyser les suites immédiates de la Première Guerre mondiale13. En effet, si l’armistice du 11 novembre 1918 signe l’arrêt des opérations militaires sur le front occidental, il marque aussi le début d’un processus plus ou moins long de retour des hommes et des institutions à la vie civile. La déprise de la violence et la démobilisation culturelle des anciens combattants et de l’arrière peuvent ainsi prendre plusieurs années voire, comme le signale Christian Ingrao, ne jamais prendre fin14. Ce concept présente donc le grand mérite de dépasser la recherche d’une date précise censée résumer une période pour s’intéresser à l’évolution complexe, heurtée et parfois asynchrone des sociétés dans le cadre d’une réflexion problématisée15.
14Appliqué à la fin des années 68, ce concept conduit à analyser en détail une courte période durant laquelle les aspirations politiques, le projet social, les formes d’expressions culturelles auparavant mis en avant se trouvent critiqués, redéfinis ou dépassés. Une telle approche a été mobilisée par Nicolas Defaud dans son étude consacrée à l’évolution de la CFDT d’un socialisme autogestionnaire à un « syndicalisme de proposition », envisagé comme un processus heurté et polysémique16. Sur ce point, la multiplicité des manifestations et des acteurs en cause – il peut tout aussi bien s’agir d’organisations que de simples militants, de phénomènes locaux, nationaux ou transnationaux – justifie l’emploi du terme « sorties » au pluriel plutôt qu’au singulier. Ainsi envisagées, les sorties des années 68 s’apparentent à un élargissement du « deuil de 68 » évoqué par Boris Gobille qui s’applique avant tout à des évolutions individuelles17.
15Le concept de sorties des années 68 permet donc de prendre au sérieux cette courte période de quelques années situées au tournant des années 1970 et 1980 durant laquelle les écologistes sont amenés à redéfinir leur militantisme dans ses pratiques comme dans ses finalités ainsi que leur approche de la politique.
16Le concept de sorties des années 68 permet par ailleurs d’analyser scientifiquement des phénomènes souvent envisagés sous un angle moral et polémique. Les commémorations successives de Mai 68 sont en effet propices à l’évocation douce-amère d’un temps qui n’est plus, d’un militantisme échevelé fait d’amitiés et de convictions qui se délitent au fil des épreuves de la vie18. Dans une veine plus critique, certains exemples de reconversion militante, qui ont amené d’anciens gauchistes à conquérir de belles situations dans le journalisme, la publicité ou les cabinets ministériels, ont parfois été montés en épingle pour dénoncer l’abandon des idéaux de jeunesse de toute une génération et l’intelligence achetée par le désir de parvenir19. Les itinéraires de Serge July, ancien maoïste devenu patron de presse et principal artisan en 1981 de la renaissance d’un journal Libération plus modéré20, ou encore de Jean-Christophe Cambadélis, passé du PCI (Parti communiste internationaliste) à la tête du PS via Convergences socialistes21, sont ainsi souvent invoqués pour faire le procès de la génération 68 et de ses reniements ultérieurs.
17Sur ce point, l’évocation du tournant des années 1970 et 1980 conduits bien souvent à la dénonciation d’une dérive idéologique résumée par l’étiquette « libéral-libertaire22 ». Son inventeur, le sociologue marxiste Michel Clouscard, entend à l’origine mettre en cause les métamorphoses du capitalisme dont l’emprise sur la société se renforcerait en s’appropriant un discours libertaire mis à la mode par Mai 6823. Il faut néanmoins relever que ce qualificatif n’est pas uniquement un stigmate puisque Serge July24 comme Brice Lalonde25 s’en réclament à la fin des années 1970. De fait, le parcours militant de ce dernier, candidat des écologistes à la présidentielle de 1981, ministre de François Mitterrand (1988-1992) avant de créer Génération écologie, parti politique concurrent des Verts, pour enfin nouer une alliance avec Démocratie libérale animée par Alain Madelin26, a également pu alimenter une réflexion critique sur le passage d’une critique hédoniste et individualiste de la société à une apologie du capitalisme néolibéral, acceptant toutes les inégalités sociales au nom de l’exaltation de la liberté.
18Qu’elles soient critiques ou nostalgiques, ces différentes approches ont pour point commun d’établir un lien direct entre les positions des acteurs durant les années 68 et leur évolution ultérieure malgré les dix à vingt ans qui les séparent. Pourtant, comme le souligne Boris Gobille, cette appréhension de Mai 68 à partir de ses conséquences supposées ne fait qu’obscurcir la compréhension de ces événements27. Il en va de même pour le début des années 1980 ce qui renforce l’intérêt d’une analyse spécifique des processus à l’œuvre grâce au concept de sorties des années 68.
19Étudier les sorties des années 1960-huit implique donc d’étudier les inflexions voire les ruptures dans les carrières militantes. Dans le cas des écologistes, les sorties des années 68 peuvent aussi bien se traduire par un abandon – temporaire ou définitif – du militantisme au profit de la recherche d’une transformation de la vie quotidienne, par le début d’une carrière politique dans le cadre d’un appareil partidaire renouvelé ou encore par un recentrage sur des activités ostensiblement associatives.
20Les sorties des années 68 sont par ailleurs l’occasion pour les militants de s’interroger de manière collective et conflictuelle sur la signification même de leur démarche. Analysant le répertoire d’action des associations de protection de l’environnement au début des années 1980, Sylvie Ollitrault constate notamment que l’expertise prend rapidement le pas sur la manifestation même chez les militants les plus politisés28. Néanmoins, ce passage de la rue aux salles de conférences, de la manifestation à l’expertise, reste une boîte noire que l’auteur se contente d’entrouvrir. Certes, plusieurs facteurs sont évoqués pour expliquer cette inflexion du répertoire d’action des écologistes tels qu’une plus grande propension des pouvoirs publics à mettre en œuvre des procédures de concertation, l’acculturation à des pratiques de lobbying à l’échelle européenne ou encore le rôle des médias. De notre point de vue, Sylvie Ollitrault tend cependant trop rapidement à considérer que cette évolution est naturelle et concerne l’ensemble des militants. Or, le concept de sorties des années 68 permet de restituer la variété et la conflictualité des interprétations suscitées par ces phénomènes à la fin des années 1970 et au début des années 1980 que certains acceptent de bonne grâce tandis que d’autres s’efforcent de combattre en redéfinissant l’écologisme comme alternative radicale, cependant que certains reconsidèrent leurs priorités en se lançant dans la construction d’une structure partidaire autrefois honnie.
21Face à des interprétations morales ou nostalgiques de la période allant de la fin des années 1970 au début des années 1980, le concept de « sorties des années 68 » permet donc de penser scientifiquement les évolutions à l’œuvre et d’en restituer l’ampleur et la complexité. Les organisations et les militants écologistes sont à la fois les acteurs et les sujets de ces sorties des années 68 qui les touchent au premier chef dans la mesure où leur démarche politique est née durant cette période. Dans leur définition d’un militantisme total qui se veut sociétal et culturel autant que politique, dans leur recherche d’un dépassement de l’idéologie marxiste ou encore dans leur ouverture au monde, les écologistes ont épousé bien des aspirations de leur temps. C’est pourquoi les sorties des années 68 constituent une zone de turbulence au terme de laquelle l’écologisme sort profondément transformé. En définitive, loin de tracer un chemin linéaire, les sorties des années 68 expriment au contraire une nouvelle donne souvent interprétée par les acteurs eux-mêmes comme une crise.
Les sorties des années 68, une crise de l’écologisme ?
22Dans les dernières années de la décennie 1970, de nombreux militants évoquent la crise que traverserait selon eux l’écologisme français. Ses symptômes seraient multiples, allant de l’érosion des adhésions à l’inefficacité chronique des actions entreprises. Lors de la campagne présidentielle de René Dumont, les militants sont convaincus que l’homme doit choisir entre l’écologie et la mort29. Quelques années plus tard, un militant s’interroge : « Qu’est-ce qui fait que nous ne trouvons pas le maillon indispensable entre les vérités dont nous sommes porteurs et les applications concrètes que nous sommes lucidement en droit d’attendre30 ? »
23Cette difficulté à passer des idées aux actes, des virtualités d’un mouvement à ses réalisations concrètes alimente ce sentiment de crise. Parce qu’il est construit par les acteurs mêmes du mouvement, ce bilan n’a pas uniquement une fonction analytique mais amène également les militants à réfléchir sur les nouvelles directions à donner à l’écologisme français dans le contexte des sorties des années 68.
24Le sentiment de traverser une crise multiforme, à la fois économique, sociale et politique, n’est pas propre aux écologistes et touche de nombreux acteurs des mouvements sociaux à la fin des années 1970. L’échec de la gauche aux élections législatives de 1978 est ainsi durement ressenti par de nombreux militants écologistes, malgré les différents qui les opposent au PS et surtout au PCF31. La reconduction de la majorité de droite est d’autant plus mal vécue que la politique menée par Valéry Giscard d’Estaing se fait plus conservatrice. Dans le domaine des politiques environnementales32 comme sur la question des radios libres, l’approche libérale de la première partie du mandat cède la place à une attitude plus répressive, dont témoigne la loi du 7 juin 1978 punissant d’une peine de prison et d’une forte amende les contrevenants au monopole d’État sur les stations de radio33.
25Parmi les écologistes, la participation aux élections suscite dès lors d’acerbes critiques. Les Amis de la Terre de Lille doutent par exemple qu’elles soient un instrument pertinent pour diffuser les idées écologistes au sein de la population. Ils regrettent notamment la faiblesse du débat d’idée entraînée par la nécessité de ne mettre en avant que quelques propositions marquantes ou encore les conflits personnels suscités par les procédures de désignation des candidats34. De même, en avril 1978, des groupes écologistes et des membres des communautés rurales expriment dans La Gueule Ouverte leur lassitude à l’égard d’une démarche électorale dont ils ne perçoivent plus l’intérêt au regard de l’investissement matériel et financier requis35.
26À ces perspectives électorales moroses s’ajoute le sentiment plus général d’une impasse des mouvements sociaux. Les actions terroristes des Brigades rouges en Italie et de la Fraction armée rouge en RFA apparaissent aux yeux de nombre de militants comme des dérives qui, loin d’ébranler l’État, ne pourront que le conforter36. Par ailleurs, face à la crise économique et à la montée du chômage, le répertoire d’action traditionnellement mis en œuvre dans les années 68 semble inefficace37. Le système politique et social paraît donc plus solide que certains ne l’avaient cru au cours des années 1970, alimentant le sentiment d’une impasse militante.
27Le front des conflits environnementaux est également source de désillusions. En mars 1978, le naufrage de l’Amoco Cadiz et de la marée noire qui s’ensuit sont particulièrement mal ressentis par les groupes écologistes qui peinent à proposer une réponse efficace et cohérente, alimentant chez les militants le sentiment de ne pas avoir prise sur les événements, comme si ceux-ci étaient appelés à se répéter sans cesse, en une désespérante litanie.
28En Bretagne, l’émotion suscitée par cette catastrophe est considérable et d’aucuns espèrent que les écologistes sauront en tirer parti pour promouvoir un changement collectif de comportement38. Pourtant, sur le plan national, les écologistes peinent à définir une position commune alors même qu’ils se sont coalisés au sein d’Écologie 78 quelques semaines auparavant. S’ils s’accordent à fustiger l’inefficacité des pouvoirs publics, en particulier celle du plan Polmar destiné à coordonner les moyens humains et matériels de lutte contre la pollution39, ils se révèlent incapables de proposer une réponse commune. Encore une fois, les Amis de la Terre de Paris font cavaliers seuls en lançant, de concert avec l’UFC-Que Choisir mais sans consulter les autres groupes, un mot d’ordre de boycott de la Shell, compagnie propriétaire de la cargaison40. Le groupe espère en effet que l’identification rationnelle et judiciaire des responsabilités conduira l’opinion publique à un sursaut éthique, restant ainsi fidèle à la théorie de la prise de conscience déjà mobilisée dans la lutte antinucléaire.
29Une telle décision est vertement critiquée par d’autres militants, tel Asselin, journaliste à La Gueule Ouverte, qui souligne que la précipitation rend inefficace tout appel au boycott dont la réussite nécessite au contraire un travail long et minutieux de mobilisation des militants, d’interventions répétées dans la presse et sur le terrain pour convaincre la population, ce dont les écologistes sont à ses yeux incapables41. De fait, hormis dans quelques stations-service, ce boycott semble n’avoir eu aucune efficacité.
30Un tel épisode illustre donc l’hésitation lancinante des écologistes entre des propositions réformistes reposant sur une expertise spécifique des enjeux environnementaux et une approche radicale propre à un mouvement politique né de la hantise d’une catastrophe imminente. L’action pour le moins cacophonique qui en découle remet alors en cause l’aspiration du mouvement à afficher une démarche unie et efficace d’autant que le naufrage de l’Amoco Cadiz ne provoque en définitive qu’une vague d’indignation sans conséquences directes sur les modes de vie.
31Ce constat est donc d’autant plus démoralisant pour les écologistes qu’une marée noire apparaît pourtant comme l’archétype de la catastrophe environnementale jusque dans sa matérialité. Contrairement à la radioactivité, dont les manifestations ne sont pas directement perceptibles par les sens, le déferlement de nappes de pétrole visqueux sur un littoral souvent considéré comme foncièrement naturel est particulièrement spectaculaire voire télégénique comme en attestent les images de matière noire souillant le sable et la roche42. Ainsi, loin d’amener une mise en cause radicale d’un mode de vie fondé sur les énergies fossiles, cet épisode manifeste au contraire une accoutumance aux débordements industriels qui ne paraissent pas pouvoir constituer le ferment d’une transformation de la société.
32Aux déceptions nées de l’action sur le terrain s’ajoute une autre facette de la crise : l’érosion militante continue qui toucherait le mouvement. Sur cette question, il est impossible de donner des statistiques globales dans la mesure où la plupart des groupes ne se soucient guère de tenir un recensement précis de leurs adhérents, sans parler de communiquer ces chiffres à une organisation nationale à l’époque inexistante. Néanmoins, à l’image d’autres mouvements sociaux, certains militants semblent effectivement ralentir très nettement leurs activités voire y mettre complètement un terme [voir cahier couleur, p. I].
33Cédric Philibert, journaliste et militant aux Amis de la Terre, évoque ainsi la lassitude qu’il ressent à l’égard d’un militantisme devenu répétitif et sans perspective, donc facteur de démobilisation43. De son côté, un couple de militants déclare que « la militance, les manifs, faut plus nous en causer. Envie de vivre tout de suite, ici, que ça circule et que la déprime aille se faire foutre ailleurs. […] Arrive un moment où il faut faire quelque chose. Alors on s’est mis à peindre, à écrire, à faire de la place dans la maison pour ceux qui y viennent44 ». Ces témoignages ponctuels sont corroborés par l’échec de l’opération « Écologie n + 1 » lancée dès octobre 1977 par La Gueule Ouverte. Celle-ci vise à retisser des réseaux militants sur le plan local en amalgamant les différents mouvements sociaux actifs dans un secteur donné45. Or, le résultat de cette opération est particulièrement démoralisant en raison du faible taux de réponse des lecteurs d’une part et d’autre part du caractère démoralisant des réponses reçues. Comme l’écrit l’un des correspondants du journal, « Quand on habitait Asnières, on connaissait sur un rayon de 3 km, six ou sept communautés, un groupe femmes, on participait au journal parallèle Parlons-en, à un groupe Amis de la Terre, à un réseau bouffe. Alors même si tout ça n’existe plus, il doit bien y avoir autre chose qu’une ou deux adresses sur le 9246 ». Ainsi, loin d’être le catalogue espéré des mouvements sociaux, l’opération Écologie n + 1 devient en quelque sorte la chronique de leur disparition. Ce phénomène n’est pas propre à l’écologisme et atteste que les sorties des années 68 se traduisent par de nombreux phénomènes de défection (exit) dès lors que les pratiques militantes sont jugées inefficaces ou délétères au regard de l’investissement requis47.
34Ces indices d’un fléchissement militant sont d’autant plus problématiques pour les mouvements écologistes qu’en l’absence de structures associatives ou partidaires fermement établies, toute action repose en priorité sur les épaules des militants dont l’investissement est essentiel. De fait, si le slogan « Changer la vie » reste d’actualité, il semble désormais concerner en priorité l’individu et non le groupe48. Le repli sur le bonheur privé et l’épanouissement personnel ne sont plus vécus comme une capitulation mais comme une autre manière d’accomplir une œuvre positive et concrète. Plus d’une décennie plus tard, le sociologue Jacques Ion discerne lui aussi l’avènement d’un « engagement distancié », ponctuel, méfiant à l’égard des mécanismes de délégation et surtout désireux de ne pas tout sacrifier au profit du groupe, qu’il s’agisse d’une association, d’un syndicat ou d’un parti politique49. L’écologisme participe de ces transformations de l’action collective qui ne sont cependant pas totales : une décennie plus tard, Florence Faucher relève encore que le militantisme écologiste reste encore largement perçu comme un don de soi pour des militants avides de cohérence50.
35Dans un autre domaine, la baisse des ventes des différents périodiques écologistes, puis, dans certains cas, leur disparition, est un autre facteur de fragilisation de cette nébuleuse51. Ainsi, le 18 avril 1978, Écologie Hebdo, dirigée par Jean-Luc Burgunder, lance une souscription pour trouver près de soixante-dix mille francs et ne parvient à perdurer qu’au prix de changements continuels de formule sans véritablement trouver une périodicité acceptable52. De son côté, La Gueule Ouverte doit faire face en octobre 1978 à un déficit de 150000 francs dus à une érosion continue du taux de réabonnement53. Ces difficultés financières, qui s’ajoutent à d’importants clivages au sein de l’équipe rédactionnelle, conduisent à une véritable scission au sein du journal au cours de l’année 1979. Le journal fait faillite en mai 1980 avant que La Gueule Hebdo ne tente, sans succès, de prendre le relais54. Le Sauvage disparaît également en mai 1981 quand Claude Perdriel refuse de continuer à financer un journal qui, lors de la campagne présidentielle, soutient Brice Lalonde et non François Mitterrand55.
36Cet affaiblissement durable de la presse écologiste militante se révèle très problématique pour la nébuleuse qui se trouve privée d’organes de liaison ouverts à un public plus large que les seuls militants les plus convaincus qui lisent les arides bulletins internes des groupes56. La disparition de ces deux périodiques qui, chacun dans leur genre, avaient accompagné l’émergence et l’affirmation de l’écologisme dans les années 1970 constitue un symbole particulièrement fort des difficultés de l’ensemble du courant.
37À bien des égards, le constat d’une crise généralisée de l’écologisme français est excessif. Malgré les difficultés et dans un contexte propice à la bipolarisation de l’électorat, les élections législatives sont loin d’être une déroute – les candidats Écologie 78 obtiennent 4,6 % des voix là où ils sont présents – et de nombreux conflits environnementaux perdurent en France, non seulement à Plogoff et au Pellerin mais également à Golfech ou encore à Nogent tandis que des groupes nouveaux apparaissent régulièrement [voir cahier central, p. III].
38De fait, si les sorties des années 68 alimentent un sentiment de déclin, cette période est aussi perçue par de nombreux acteurs comme l’occasion de faire évoluer l’écologisme français. Éprouvant la résistance du réel à la force de leurs convictions, les militants se mettent en quête de nouvelles formes d’actions et d’organisations. Dans ce contexte, si l’unité du mouvement demeure un idéal particulièrement prégnant chez les militants, l’établissement de diagnostics différents par les acteurs du mouvement conduit à l’affermissement de deux rameaux distincts de l’écologisme, comme nous allons le voir dans le chapitre suivant.
Les Amis de la Terre ou l’écologisme comme mouvement social
39À la fin des années 1970, un premier examen quantitatif des effectifs des Amis de la Terre semble faire mentir ceux qui insisteraient sur la crise de la nébuleuse écologiste. Forte d’environ cinq57 à sept58 mille adhérents, répartis dans environ cent trente groupes locaux, l’organisation constitue à l’époque un pôle incontournable de l’écologisme français. Or, malgré cette situation a priori favorable, de nombreux animateurs des Amis de la Terre invoquent la crise supposée de l’écologisme pour convaincre de la nécessité de réformes structurelles et d’une inflexion stratégique.
40La métamorphose de l’organisation se traduit par un renforcement de l’autonomie politique d’une poignée d’animateurs nationaux qui se posent alors en interlocuteurs d’organisations autrement plus puissantes dans le cadre d’une stratégie dite de convergence. Parallèlement, les Amis de la Terre évoluent dans leurs rapports aux pouvoirs publics et envisagent désormais de collaborer ponctuellement avec eux au niveau local et même national. De fait, cette nouvelle politique, adoptée aux termes de débats internes parfois très vifs, manifeste une nouvelle manière d’appréhender les enjeux environnementaux et la transformation de la société, caractéristiques des sorties des années 68 des Amis de la Terre.
Stratégie de convergence et ambiguïtés stratégiques
41Dès le milieu des années 1970, le groupe de Paris des Amis de la Terre a souligné la nécessité de bâtir une structure nationale capable de coordonner l’action des groupes locaux tout en préservant leur autonomie59. Au terme de négociations parfois difficiles, un réseau national, plaisamment appelé le RAT, est constitué lors de la réunion des 29-31 octobre 1977 à Asnelles (Calvados) ; son principal objectif est d’assurer la cohérence de l’expression nationale des Amis de la Terre par-delà la diversité des actions et des positions des groupes locaux. Pourtant, malgré ses ambitions, le RAT n’est d’abord qu’une coquille vide sans prérogative clairement définie ni instance qui permette une concertation réelle entre les groupes.
42De ce fait, la stratégie nationale des Amis de la Terre demeure à la fin des années 1970 définie par quelques acteurs plus particulièrement investis sur ces questions qui s’opposent cependant autour de la question du rapport de l’écologisme au champ politique. C’est à cette géopolitique interne complexe que ce passage est consacré dans la mesure où ces débats constituent l’esquisse de nouvelles stratégies appelées par la suite à instaurer de profonds clivages au sein de l’écologisme français.
43À la suite de la manifestation de Malville du 31 juillet 1977, qui symbolise aux yeux de nombreux militants l’impuissance du mouvement antinucléaire, et après les tensions suscitées par la campagne des législatives de 1978, les Amis de la Terre définissent une nouvelle stratégie dont le maître-mot est la « convergence60 ». Il s’agit de dépasser le cercle des seuls écologistes pour s’allier – voire s’amalgamer – à des courants extérieurs dont les valeurs fondamentales seraient analogues à celles des Amis de la Terre. Néanmoins, au-delà des déclarations iréniques, deux visions différentes de cette démarche de convergence s’affrontent.
44Une première tendance entend faire des Amis de la Terre le levain d’un large mouvement social rassemblant des groupes et des individus aux sensibilités différentes, qu’ils soient régionalistes, antimilitaristes ou encore féministes. Yves Lenoir est l’un des fers de lance de cette stratégie. Ingénieur, membre des Amis de la Terre de Fontainebleau et pilier de la commission énergie de l’association, il est l’auteur de Technocratie française dans lequel il appelle à une vaste refondation politique qui fasse de la diffusion la plus libre possible de l’information le socle d’une nouvelle démocratie61. À ses yeux, la recherche de convergences est indispensable pour sortir du « ghetto écologiste » et ainsi élargir la réflexion des militants à l’ensemble des problèmes de société62. Pierre Radanne, animateur du groupe de Lille, qui a noué sur place de fructueuses relations avec le maire PS de la ville, Pierre Mauroy, est également partisan de cette stratégie qui doit conduire à l’écologisme à approfondir la dimension sociale des enjeux environnementaux63.
45Cette première stratégie définit donc la convergence comme le renforcement des liens avec les mouvements sociaux – et notamment avec la CFDT – en considérant que les Amis de la Terre n’ont pas à intervenir directement dans l’arène électorale64. Parce qu’il assimile l’écologisme à un combat contre la technocratie, Yves Lenoir refuse toute participation à la gestion des institutions, qui conduirait selon lui à la concentration des pouvoirs et au triomphe final des experts contre lesquels l’écologisme prétendait lutter65.
46Au sein du RAT, une seconde tendance partage l’idée d’une nécessaire convergence mais dans une perspective qui promouvrait une autre manière de faire de la bousculant les clivages les mieux établis et les rapports de force partisans.
47Le journaliste Laurent Samuel, pilier de l’association et proche de Brice Lalonde, s’en fait l’écho dans son compte rendu enthousiaste de deux ouvrages écrits par des intellectuels liés à la deuxième gauche66. Pierre Rosanvallon et Patrick Viveret, tous deux passés par le PSU avant de rejoindre le PS, travaillent au sein de la revue Faire. Dans Pour une nouvelle culture politique, ils opposent une culture de gauche social-étatiste à une culture autogestionnaire encore embryonnaire mais appelée à se développer au sein de la CFDT, d’une partie du PS et chez les écologistes. Laurent Samuel relève que les deux auteurs citent Ivan Illich, penseur particulièrement prisé des écologistes, et qu’ils assignent à ces derniers la mission de fragiliser les partis politiques pour remettre en cause le clivage gauche/droite. À terme, une telle évolution permettrait un exercice renouvelé de la démocratie qui ne se résumerait plus à une opposition stérile entre deux camps. Évoquant également Contre la politique professionnelle de Jacques Julliard, membre du SGEN (fédération CFDT des enseignants) et éditorialiste au Nouvel Observateur, Laurent Samuel conclut « Pas de doute : la démarche de Rosanvallon et Viveret, de Julliard et du courant qui se cristallise autour du remarquable mensuel Faire rejoint largement les préoccupations des écologistes. La convergence est nette. Reste à voir de quelle façon elle pourra se traduire et essaimer dans nos vies quotidiennes ».
48Dès 1978, Brice Lalonde souligne lui aussi la nécessité d’une remise à plat des clivages idéologiques et partisans, entreprise qui implique que les écologistes ne se tiennent pas à l’écart de la vie politique67. Dans son esprit, le renouvellement des pratiques politiques ne pourra s’opérer qu’au prix d’une marginalisation d’une culture politique encore majoritaire à gauche, incarnée par le CERES comme par le PCF, et favorable au nucléaire, à l’industrialisation et à des solutions privilégiant l’intervention de l’État. Pour ce faire, Brice Lalonde en appelle à la convergence des mouvements sociaux et politiques dans une optique de libération de la société civile, de décentralisation des institutions et de lutte contre toutes les formes d’autoritarisme qui dépasserait le clivage gauche-droite car « où sont les vrais clivages entre, par exemple, Delors, Rocard, Attali, et, de l’autre côté, J-J S-S [Jean-Jacques Servan-Schreiber], Françoise Giroud, Stasi et sûrement beaucoup de personnes si l’on se donnait le mal de chercher ?68 ».
49En 1979, après de houleux débats, le RAT tente de faire la synthèse de ces deux tendances en se fixant pour but de « s’ouvrir aux mouvements et aux forces qui agitent aujourd’hui la société » mais aussi de « constituer avec ces mouvements la première force d’opposition69 ». Au début des années 1980, le RAT refuse donc de trancher et cherche à s’ériger à la fois en mouvement social et politique. À bien des égards, la pétition nationale énergie constitue la traduction effective de cette fragile synthèse.
La pétition nationale énergie ou les apories de la convergence
50En juillet 1979, à l’issue de son congrès de Brest, la CFDT accepte la proposition du Réseau des Amis de la Terre d’organiser une grande campagne nationale contre la politique énergétique du gouvernement et plus particulièrement contre la part prédominante dévolue au nucléaire. Cette opération doit entre autres se traduire par la diffusion à grande échelle d’une pétition appelant à délaisser le nucléaire au profit des énergies nouvelles dans le cadre d’une croissance économique plus sobre70. Aux deux partenaires initiaux s’adjoignent bientôt le PS, le PSU, le MRG ainsi dix-huit autres organisations appartenant à la constellation socialiste.
51Principale manifestation de la stratégie de convergence arrêtée par le RAT en 1977, la pétition nationale énergie ne recueille que 500000 signatures ce qui est peu au regard de l’importance des organisations impliquées. Cet épisode permet ainsi de mesurer la portée concrète de la stratégie de convergence des Amis de la Terre et l’écart qui sépare parfois les espoirs des écologistes et la réalité des rapports de force entre des organisations aux objectifs et à la culture politique parfois très différents les uns des autres.
52La pétition nationale énergie trouve son origine dans des collaborations parfois étroites nouées sur le terrain dans le cadre de la lutte antinucléaire que nombre d’Amis de la Terre voudraient voir se généraliser.
53Le Cotentin apparaît comme un laboratoire scruté avec attention par les animateurs des mouvements écologistes. Dans un territoire où l’industrie nucléaire est très présente71, les résultats électoraux des écologistes sont parmi les plus élevés du pays72. Dans ces conditions, la gauche ne peut se permettre de les ignorer et scelle précocement une alliance – non exempte de conflits – avec eux. Ainsi, dès 1975, Louis Darinot, député socialiste (1973) puis maire (1977) de Cherbourg, s’oppose à la construction de la centrale de Flamanville et à l’extension de l’usine de La Hague73. Ces contacts aboutissent à l’organisation de colloques communs. Les 21 et 22 octobre 1978, deux organisations antinucléaires de Basse-Normandie, le CRILAN et le CCPAH organisent avec le RAT les Assises du nucléaire à Cherbourg pour dénoncer les dangers induits par les activités de retraitement des déchets au sein de l’usine de La Hague. Or, à la grande joie des écologistes locaux, la CFDT et le PS acceptent à la dernière minute de s’associer à cet événement74. De même, dans l’Aube, la contestation antinucléaire à l’œuvre sur le site de Nogent-sur-Seine conduit à la création d’un « collectif aubois » rassemblant le PS, les Amis de la Terre, la FEN et le MRG. À l’occasion des élections cantonales de mars 1979, trois candidats PS dans l’Aube sont officiellement soutenus par les Amis de la Terre locaux en raison de leur opposition déclarée au projet de centrale75.
54Aux yeux du RAT, ces convergences locales ne sont en rien un épiphénomène. Celui-ci, constatant que les positions de la CFDT – et plus encore celles du PS – sont nettement plus mesurées que les siennes, espère en effet que ces alliances locales permettront d’établir un rapport de force décisif pour infléchir par capillarité la ligne nationale de ces organisations dans un sens plus radicalement antinucléaire76.
55Les premières négociations menées avec la CFDT dès le printemps 1977 se heurtent pourtant à des obstacles certains tant les positions respectives des Amis de la Terre et de la CFDT diffèrent sur des points importants77.
56Dès avril 1975, la CFDT condamne officiellement le programme nucléaire gouvernemental, jugé surdimensionné et mal mis en œuvre78. La priorité accordée à une source unique d’énergie est dénoncée car elle conduit à l’abandon progressif de l’exploitation charbonnière et à l’arrêt des investissements dans le domaine hydraulique. La CFDT s’oppose également à ce qu’elle considère comme un « démantèlement » du CEA, dont certaines activités, en particulier le retraitement des déchets nucléaires à La Hague, sont privatisées pour donner naissance à la COGEMA, société de droit privé, au sein de laquelle les conditions de travail et de sécurité seraient particulièrement dégradées. Dans ce domaine, la CFDT peut compter sur un groupe confédéral consacré aux questions énergétiques qui profite de l’expertise pointue de certains de ses membres tels que Bernard Laponche, physicien nucléaire, secrétaire de ce groupe et permanent de la fédération SNPEA79.
57Néanmoins, la CFDT ne se déclare jamais officiellement opposée au principe du recours à l’énergie nucléaire. La direction confédérale doit en effet prendre en compte les points de vue de ceux qui, parmi ses adhérents, voient le nucléaire comme un outil de travail à préserver et une recherche scientifique à poursuivre. Elle entend par ailleurs ne pas se couper de la CGT et du PCF, tous deux favorables au recours à l’énergie nucléaire, en adoptant des mots d’ordre trop hardis80. Enfin, contrairement à ce que certains Amis de la Terre semblent croire, la CFDT éprouve une certaine méfiance à l’égard des écologistes parfois considérés comme des héritiers de Charles Maurras81. Qui plus est, le syndicat se défie de ces groupes qui fleurissent sans orientation politique claire et toujours suspects, à ses yeux, de vouloir se lancer dans quelque action irresponsable, comme le démontreraient les heurts de la manifestation du 31 juillet 1977 à Malville.
58Cette défiance se vérifie dans le discours d’Edmond Maire, alors secrétaire général, à la tribune du congrès d’Annecy de 1976 où il dénonce les « coucous gauchistes » qui viennent nicher au sein du syndicat. Il encourage alors une stratégie de recentrage refusant toute surpolitisation des activités syndicales, abandonnant progressivement la référence autogestionnaire au profit d’un « syndicalisme de proposition82 ». Dans leurs contacts avec la CFDT, les Amis de la Terre sont donc confrontés à une organisation bien différente du mouvement social qu’ils avaient espéré, ce qui rend les négociations plus difficiles que prévu.
59Disposée à s’investir sur les questions énergétiques, la CFDT refuse d’abord de s’engager au niveau national aux côtés des seuls écologistes. À la fin des années 1970, deux événements changent la donne.
60Le premier d’entre eux est la rupture de l’Union de la gauche en septembre 1977 car la CFDT juge dès lors possible un accord dépassant le seul tête-à-tête avec les écologistes. Le PS adopte en effet une stratégie d’ouverture aux mouvements sociaux et, délivrés du souci de ménager leur ancien allié communiste, semble disposé à adopter une position plus critique à l’égard du programme nucléaire83. De ce fait, le RAT et la CFDT s’accordent au début de l’année 1978 sur un texte exigeant un moratoire de trois ans sur la construction de nouvelles centrales et prônant la mise en œuvre de nouvelles procédures démocratiques pour renforcer le contrôle des citoyens sur les questions énergétiques84. En novembre de cette même année, plusieurs organisations, dont la CFDT et le RAT, mettent en place une Coordination énergie-développement pour centraliser toutes les informations disponibles sur les enjeux énergétiques et apporter des réponses communes aux questions soulevées par le programme nucléaire du gouvernement85.
61Le RAT souhaite cependant aller plus loin et mettre en œuvre une action plus spectaculaire. C’est alors que survient un second événement déterminant dans le lancement de la pétition nationale énergie. Le 28 mars 1979, une série de dysfonctionnements techniques entrave le refroidissement du cœur du réacteur n° 2 de la centrale de Three Miles Island (Pennsylvanie) et provoque sa fusion partielle (sans que la cuve ne soit percée). Il s’agit de l’un des accidents nucléaires les plus graves connus à l’époque et son retentissement est mondial. En France, les pouvoirs publics doivent accepter l’envoi d’une mission d’information aux États-Unis pour tirer les enseignements de cet accident, notamment dans le domaine de l’évacuation des populations environnantes en cas d’alerte86. De leur côté, les écologistes y voient la démonstration qu’un accident grave est toujours possible dans une centrale malgré des mesures de sécurité draconiennes. L’émotion suscitée par Three Miles Island est donc décisive dans la conclusion d’un accord national impliquant les Amis de la Terre, la CFDT, le PS et de nombreuses autres organisations autour d’une pétition nationale en faveur d’une autre politique énergétique.
62Sa rédaction s’avère néanmoins fort délicate. Parmi les militants écologistes, beaucoup regrettent que la conclusion d’un accord les amène à abandonner le principe de l’opposition à toute forme d’utilisation de l’énergie nucléaire, civile comme militaire87. De fait, la pétition se borne à réclamer un moratoire sur la construction de nouvelles centrales, acceptant implicitement l’existence des installations nucléaires créées depuis les années 1950 jusqu’à la fin du programme dit « CP188 ». Le texte se prononce néanmoins contre la construction de Superphénix et contre l’extension de l’usine de La Hague, deux projets souvent considérés comme la clé de voûte du programme nucléaire français.
63La pétition nationale énergie entend par ailleurs aborder l’ensemble des enjeux énergétiques. Les économies d’énergie sont ainsi particulièrement mises en avant, tout comme la nécessité d’une approche régionale des systèmes de production d’énergie. Les militants considèrent en effet qu’envisager les problèmes à cette échelle permettrait un réel débat démocratique tout en prenant en compte les spécificités locales, marginalisant de fait EDF89.
64En définitive, la rédaction de la pétition nationale énergie conforte au sein des différentes organisations la position des experts et des tendances les plus pragmatiques au détriment des militants les plus radicaux. La commission énergie de la CFDT exerce sur ces questions une influence prédominante tout comme son équivalent au sein du RAT, animé notamment par Yves Lenoir et Jean-Pierre Orfeuil, tous deux ingénieurs des mines. Au travers de ces négociations, le RAT passe ainsi progressivement d’une posture centrée sur l’opposition au nucléaire à la promotion d’une politique énergétique alternative reposant sur la maîtrise des dossiers et la recherche de solutions dites réalistes90.
65À l’issue de deux ans de discussions, le RAT parvient donc à mettre sur pied la grande campagne convergente dont il a au préalable théorisé l’importance. Les écologistes se plaisent à comparer cette campagne à une forme de référendum d’initiative populaire sur le modèle de la Suisse et de l’Autriche où, en novembre 1978, les électeurs se sont prononcés contre la mise en service de la première centrale nucléaire autrichienne jamais construite91. À l’origine, les partenaires se fixent pour objectif de rassembler deux millions de signatures ce qui équivaudrait à 5,6 % du corps électoral en 1981. Cet objectif est relativement ambitieux dans la mesure où la CFDT compte alors officiellement 800000 adhérents et le PS un peu moins de 200000.
66Cette campagne fait pourtant très vite face à de nombreuses difficultés qui n’iront qu’en s’aggravant. Au-delà des dysfonctionnements matériels et logistiques inhérents à de nombreux collectifs d’association (absence de secrétariat, financements aléatoires), la campagne pâtit des divergences entre les partenaires92. Il s’avère par exemple impossible de s’accorder sur une affiche unique : après des débats animés, il est donc décidé que chacun serait libre de choisir son slogan auquel serait accolé un logo commun93. En Loire-Atlantique, l’union départementale CFDT empêche la coordination des comités de la Basse-Loire de s’associer à la campagne en arguant de son « approche essentiellement antinucléaire » et de « nos expériences passées des relations avec ces comités, le caractère hétérogène de leur composition, les difficultés de bien cerner ce qu’ils sont, les ambiguïtés sur ce que recouvre cette coordination94 ».
67Principal partenaire politique, le PS se distingue quant à lui par sa mauvaise volonté, en particulier dans quelques fédérations-clés. Dans le Nord, Albert Denvers, président du Conseil général et maire PS de Gravelines, commune où se construit la plus puissante centrale nucléaire française, s’oppose à la participation de son parti à la pétition95. Sur le plan national, les principaux dirigeants du parti, François Mitterrand, Pierre Mauroy, Gaston Deferre ou encore Michel Rocard, refusent de rendre publique leur signature. Plus grave encore aux yeux des écologistes, en juin 1980, Philippe Marchand, délégué aux énergies du PS, se prononce en faveur d’une extension de l’usine de retraitement de La Hague, en dépit des engagements de la pétition nationale96. Ainsi, contrairement à ce que les Amis de la Terre avaient espéré, la pétition nationale énergie ne semble pas infléchir la ligne officielle du PS, qui, tout en condamnant le recours exclusif à l’énergie nucléaire, n’en accepte pas moins un usage modéré et réfléchi.
68L’issue de cette campagne est à l’image de son déroulement. Incapables de s’entendre sur une action spectaculaire qui en constituerait le point d’orgue, ne disposant que de 500000 signatures, les partenaires se séparent dans le désintérêt ou la rancœur, chacun rejetant sur les autres la responsabilité de l’échec de l’œuvre commune97. Néanmoins, sur le plan local, le résultat n’est cependant pas totalement négatif puisqu’une trentaine de collectifs se sont mis en place dont une dizaine est considérée comme viable sur le long terme. Principale concrétisation de la stratégie de convergence des Amis de la Terre, la pétition nationale énergie était conçue comme un moyen de renforcer la deuxième gauche non étatiste et ouverte aux mouvements sociaux au sein du PS et de la CFDT et de concrétiser au sein de collectifs nouveaux des proximités parfois à peine esquissées. Cet échec manifeste ainsi les obstacles importants qui s’opposent à un bouleversement rapide des clivages politiques.
69Malgré cette issue infructueuse, cet épisode constitue pour le RAT un jalon majeur dans sa transformation en un acteur de la société civile valorisant l’expertise technique et entretenant des rapports plus pacifiés avec les pouvoirs publics.
Les Amis de la Terre, le papier recyclé et le capteur solaire
70À la fin des années 1970, l’activité des Amis de la Terre ne se résume pas à la pétition nationale car un nouveau répertoire d’action s’affirme dans deux domaines-clés : la promotion des énergies nouvelles et le recyclage du papier et du verre. La création par des membres des Amis de la Terre de l’Association pour la promotion du papier recyclé (APPR) ou encore leur participation à la journée du soleil aux côtés d’Antenne 2 et de la firme PUK sont ainsi les symboles des nouvelles orientations de l’organisation dont les implications sont nombreuses.
71La lutte antinucléaire du milieu des années 1970 était propice à un militantisme conflictuel valorisant les questions idéologiques et l’idéal de rupture avec la société telle qu’elle est ; désormais, de nouvelles formes de concertation sont promues dans le cadre d’un dialogue pragmatique avec les pouvoirs publics au nom de l’inévitable lenteur de la transition vers la société écologique.
72Les Amis de la Terre s’engagent dans des actions dont l’intérêt et la réussite sont évalués à l’aune de critères nouveaux tels que la recherche d’effets concrets et immédiatement mesurables, le pragmatisme voire la rentabilité économique. En promouvant la méthode Jean Pain de compostage, les Amis de la Terre du Morvan se montrent par exemple particulièrement soucieux de rompre avec une forme de militantisme considérée comme dépassée :
« Pas d’été lent pour les Amis de la Terre du Morvan – s’il y en a jamais eu – ni longues considérations désenchantées sur le reflux de la vague écologiste après Malville ou mars 1978. Pas non plus de militantisme militaire ou d’activisme surexcité…
Un tournant : l’été 77. Depuis des années, nous nous battions sur de nombreux fronts, souvent avec succès […] mais toujours « contre ». […] Mais nous cherchions le moyen de faire des propositions concrètes, adaptées à notre région, correspondant à nos idées en matière d’énergie et d’utilisation de l’espace (agriculture d’abord…), susceptible à terme de retenir une population dans un Morvan qui se dépeuple quatre fois plus vite que le reste de la Bourgogne rurale98. »
73De leur côté, les Amis de la Terre de Lille organisent en mars 1980 un colloque intitulé « Énergies nouvelles et développement régional » dont ils soulignent l’importance en déclarant qu’après « des années de travail militant, qui n’ont pu déboucher sur une politique régionale de l’énergie, ni sur un arrêt du nucléaire dans la région, nous voulons que le débat s’ouvre […] parce qu’il est temps de démarrer des études sérieuses et des réalisations concrètes au lieu de discuter des dessins de Reiser99 ».
74Dessinateur à Charlie Hebdo et à La Gueule Ouverte, Reiser s’est fait une spécialité de représenter l’énergie solaire comme une alternative tout à la fois politique et poétique à la société industrielle ; aux yeux des Amis de la Terre de Lille, une telle démarche confine à l’impuissance. Il faut désormais aborder les questions techniques et s’appuyer sur des installations témoins qui auront prouvé leur efficacité avant d’envisager la manière dont celles-ci pourraient transformer la structure sociale dans son ensemble.
75Chez les Amis de la Terre du Morvan comme au sein du groupe de Lille, cette nouvelle démarche paraît se traduire par la recherche d’une action dans le cadre de la région, entendue comme un espace vécu et approprié par ses habitants100, où l’impact des actions entreprises est immédiatement mesurable à défaut d’être en lui-même décisif.
76Cette nouvelle orientation s’explique pour une part par les échecs de la lutte antinucléaire, qu’il s’agisse de la divergence des centrales de Fessenheim et de Gravelines ou de la poursuite de la construction de Superphénix. Néanmoins, les actions entreprises dans le domaine du recyclage du papier attestent d’une volonté des militants de mettre son militantisme en adéquation avec une nouvelle donne idéologique, politique et économique.
77À la fin des années 1970, l’organisation de collectes sélectives de déchets est donc particulièrement en vogue au sein des groupes locaux. Celui de la vallée de Chevreuse (Essonne) organise depuis juin 1978 des collectes de papier, tout comme celui de Caen101. Dans ce domaine, les Amis de la Terre de Lille vont plus loin en suscitant, de concert avec l’UFC, un organisme spécifique, l’APPR, en avril 1979. À cette occasion, les Amis de la Terre utilisent un vocabulaire relevant davantage de l’expertise économique que de l’éthique de la conviction. Nicolas Desplats, permanent de l’agence de service des Amis de la Terre, constate ainsi qu’« il n’y a plus de difficultés majeures ou insolubles pour la production ou l’utilisation du papier recyclé. Ce n’est pas là seulement l’opinion d’écologistes rêveurs. C’est un point de vue partagé par les professionnels et les responsables de l’Agence nationale pour la récupération des déchets102 ». Il est révélateur que l’auteur oppose, ne serait-ce que d’un point de vue rhétorique, les écologistes d’une part, dont le point de vue est ici dévalué, et d’autre part les professionnels et les experts dont les arguments sont censés être décisifs. La promotion du papier recyclé se fait donc au nom de la nécessaire conservation des ressources, abordée sous l’angle macroéconomique avant d’évoquer la préservation de l’environnement.
78L’installation de la crise économique dans la durée – la France compte plus d’un million de chômeurs en 1980 – et l’ampleur des restructurations industrielles incitent indéniablement les écologistes à se saisir des questions économiques et financières ; cependant, au-delà de ce contexte, les implications de ces évolutions sont particulièrement profondes.
79Ainsi, au sein des Amis de la Terre, la petite entreprise prend place aux côtés du bricoleur militant comme acteurs de la transformation de la société. À en croire Brice Lalonde, tout le monde n’a pas le temps ou les capacités de construire lui-même sa propre maison solaire : ceux qui le désirent devraient pouvoir acquérir des capteurs solaires sans avoir à les construire103. Le marché devient donc chez les Amis de la Terre une catégorie légitime de l’action militante à la condition que les consommateurs, par le biais des associations, puissent peser sur ses orientations. Il faut néanmoins se garder de faire des Amis de la Terre les thuriféraires d’un néolibéralisme alors à peine émergent en France dans la mesure où le marché libre et sans entrave n’est jamais présenté comme l’unique acteur de référence de cette configuration qui fait la part belle aux associations de consommateurs et aux collectivités locales dans un éloge du « small is beautiful » considéré comme une solution possible à la crise104.
80Au-delà d’une recherche de respectabilité au travers de l’expertise économique, de telles analyses sont révélatrices des évolutions de la critique artiste qui voit dans le marché et les entreprises innovantes, caractérisées un refus des hiérarchies pesantes, des facteurs de libération individuelle et d’expression de la créativité de chacun, renouvelant la justification de la raison d’être du capitalisme105. Le papier recyclé est donc l’un des vecteurs qui précipite les sorties des années 68 des Amis de la Terre.
81Ce processus se traduit également par une inflexion du rapport des Amis de la Terre aux pouvoirs publics : là où la confrontation était de mise, la concertation, voire une réelle collaboration, sont désormais d’actualité. C’est particulièrement le cas au niveau municipal dans la mesure la très nette victoire de l’union de la gauche aux municipales de 1977 a permis l’élection de maires davantage disposés au dialogue avec les écologistes et soucieux de marquer la ville de leur empreinte par la création d’infrastructures et services dans l’air du temps.
82Ainsi, à Castres, une exposition est organisée en juin 1978 par les Amis de la Terre. Consacrée aux « Énergies nouvelles pour notre région106 », elle bénéficie du soutien financier de la municipalité d’union de la gauche élue en 1977 et même du patronage du Commissariat à l’énergie solaire, organisme nouvellement créé par les pouvoirs publics. De même, les Amis de la Terre de Caen bénéficient du soutien logistique de la municipalité d’Hérouville-Saint-Clair pour récupérer huit tonnes de déchets recyclables au cours d’une campagne de collecte107.
83Il en va de même sur le plan national où les relations entre les Amis de la Terre et les pouvoirs publics s’améliorent autour d’une volonté commune de promouvoir l’énergie solaire. En 1978, le scientifique et prospectiviste Joël de Rosnay propose de célébrer en France un Jour du soleil sur le modèle du Sun Day américain108. Les multiples événements envisagés (conférences, démonstrations pratiques) se veulent accessibles, positifs et pédagogiques pour attirer un large public et un comité d’organisation se constitue autour de Louis Bériot, rédacteur en chef d’Antenne 2, créateur de l’association Espaces pour demain et ancien présentateur de La France défigurée, de Joël de Rosnay, de Jean-Claude Colli, délégué à la qualité de la vie et de Brice Lalonde109. Cet événement bénéficie du soutien financier des pouvoirs publics mais également d’entreprises privées telles que Leroy-Somer, spécialisé dans la production d’alternateurs, Saint-Gobain, EDF ou PUK110. Si le retentissement du Jour du soleil reste modeste, il traduit une amélioration du rapport des écologistes aux pouvoirs publics, accusés peu de temps auparavant d’électrofascisme, et aux entreprises privées dont certaines, notamment PUK, étaient dénoncées pour la pollution induite par leurs activités111. La participation des Amis de la Terre à cette manifestation signale par ailleurs un affaiblissement de la dimension politique et sociétale des représentations associées aux énergies renouvelables au profit d’un lobbying auprès des pouvoirs publics attentif les enjeux techniques et économiques.
84Coopérant sur certains dossiers avec les pouvoirs publics, les Amis de la Terre acceptent également de siéger au sein des instances officielles. C’est ainsi que sur proposition de Philippe Saint-Marc, Pierre Samuel, l’un des principaux animateurs des Amis de la Terre, intègre le Conseil d’information sur l’énergie électronucléaire, organisme consultatif créé par Valéry Giscard d’Estaing aux lendemains de la manifestation de Malville112. Les Amis de la Terre exigent à cette occasion que l’ensemble des documents non couverts par le secret militaire soient rendus publics de manière à pouvoir diffuser l’information le plus largement possible. De ce fait, l’association n’a pas le sentiment de trahir ses valeurs fondamentales mais de profiter des occasions qui s’offrent à eux pour combattre la tendance au secret du technocratisme.
85Cette coopération avec les organismes publics devient aux yeux d’un certain nombre d’Amis de la Terre la préfiguration des nouvelles relations qui pourraient s’établir au sein d’une société apaisée, où la collaboration entre des acteurs divers et les majorités d’idée l’emporteraient sur les clivages partisans et les frontières idéologiques. Brice Lalonde, l’un de ses plus enthousiastes avocats, baptise cette nouvelle approche du militantisme le « judo politique113 ». Une telle ambition, qui n’est pas sans rappeler le projet giscardien de « société libérale avancée114 », participe indéniablement des sorties des années 68 dans une aspiration à un reflux de la conflictualité sociale et politique.
86Pour faire sens à cette évolution, l’association insiste d’autant plus sur la dimension antitechnocratique de son action. Sa plaquette de présentation rédigée en 1979 insiste ainsi sur le refus des militants de devenir les conseillers écologistes du pouvoir ou d’être les pionniers d’une nouvelle technocratie verte, et proclame leur ambition d’être au contraire les catalyseurs d’un large front antitechnocratique citoyen115. De même, à partir de 1979, la promotion par l’association du référendum d’initiative populaire se fait au nom de l’idée qu’une société démocratique ne peut laisser les grands choix techniques entre les mains des technocrates116.
87À bien des égards, les Amis de la Terre mettent en avant l’antitechnocratisme pour faire sens à leur mue réformiste. En définitive, les hésitations des militants et les débats nés de l’évolution des Amis de la Terre vers une démarche propre à un groupe de pression reflètent des questions anciennes auxquelles la gauche est confrontée depuis le xixe siècle117.
88Pour autant, l’évolution des Amis de la Terre ne fait pas l’unanimité et les critiques émises à cette occasion reflètent la persistance de deux visions différentes du militantisme écologiste.
89Évoquant le succès de la collecte du papier, le groupe de la vallée de Chevreuse fait indirectement référence à ces critiques en constatant que « certains qualifient trop facilement [ces actions] de scoutisme118 ». De même, lors d’une réunion des délégués régionaux, un débat surgit « sur ce que certains appellent l’épicerie (papier recyclé, autocollants)119 ». Les termes utilisés traduisent un certain mépris, ou du moins une relative condescendance, à l’égard d’activités jugées triviales au regard d’une certaine image du militantisme valorisant le débat d’idée et la confrontation idéologique. La promotion du papier recyclé est dans cette perspective envisagée comme une forme de repli favorisant la dépolitisation de l’association.
90De fait, les travaux de Nina Eliasoph démontrent que lorsqu’une association se focalise exclusivement sur ce qui est faisable et concret ainsi que sur une action dont elle peut maîtriser les tenants et aboutissants, une propension à l’évitement du politique peut survenir pour préserver le sentiment qu’il est possible d’agir120. La collecte du papier recyclé prendrait alors le pas sur la remise en cause globale d’un modèle de consommation et les réunions de travail consacrées à l’installation d’un chauffe-eau solaire sur le toit de l’école conduirait insensiblement à une « évaporation du politique ».
91Néanmoins, rares sont les militants des Amis de la Terre qui expriment frontalement une opposition à cette nouvelle orientation de l’association. Beaucoup semblent davantage tiraillés entre la satisfaction née des rétributions apportées par ces activités et les doutes quant à leur efficacité politique. Un membre des Amis de la Terre de Lille s’en fait l’écho en soulignant que la vogue du recyclage peut être considérée comme une victoire des écologistes mais qu’il « ne faut pas se figurer que le recyclage va changer le monde121 ».
92À la fin des années 1970, les Amis de la Terre connaissent deux évolutions en apparence indépendantes l’une de l’autre mais dans les faits concomitants. Dans la promotion du papier recyclé comme dans celle des énergies renouvelables, les Amis de la Terre tendent insensiblement à devenir un groupe de pression, défendant une cause particulière auprès des pouvoirs publics sans chercher à les concurrencer directement ni à participer contre eux à la compétition électorale. Tout en fustigeant les dérives technocratiques de la société nucléaire, les instances dirigeantes des Amis de la Terre n’en tendent pas moins à devenir des contre-experts dans le domaine des politiques énergétiques. Les causes de cette évolution sont multiples : déceptions nées de l’échec de la contestation antinucléaire, remise en cause du modèle de militantisme propre au gauchisme des années 1970 ou encore réévaluation positive de la capacité du marché à être un acteur de la transformation sociale.
93L’exemple des Amis de la Terre permet de souligner combien les sorties des années 68 sont un processus complexe, heurté et parfois paradoxal. Confrontés à ce qu’ils présentent comme une crise de l’écologisme, un certain nombre d’acteurs s’attachent à transformer l’organisation tant dans ses structures que dans sa stratégie. Les résultats de ces réformes paraissent contradictoires puisqu’ils conduisent à affirmer la vocation des Amis de la Terre à être un mouvement social tout en renforçant les liens avec la CFDT et le PS, implicitement présentés comme des médiateurs possibles de l’action politique des écologistes. Dans tous les cas, ces évolutions illustrent un nouveau positionnement d’une partie de la nébuleuse écologiste qui abandonne l’idée d’incarner à elle seule la matrice d’une transformation de la société. Acceptant la relative légitimité des distinctions opérées dans le monde social entre l’action associative, syndicale et politique, les Amis de la Terre connaissent donc une forme de dépolitisation dès la fin des années 1970122.
94Il ne saurait cependant être question de généraliser le cas des Amis de la Terre à l’ensemble de la nébuleuse écologiste. De fait, alors que les sorties des années 68 conduisent cette organisation à renforcer son caractère associatif, une situation similaire amène d’autres acteurs à privilégier au contraire l’action électorale.
De la CIME au MEP, les Européennes de 1979 et l’affirmation de la voie politique
95En réponse à la crise supposée de l’écologisme, les Amis de la Terre s’efforcent de nouer un dialogue approfondi avec d’autres mouvements sociaux et politiques à la recherche de convergences idéologiques et militantes, considérant que l’écologisme seul ne peut constituer une alternative crédible ; à la même période, d’autres écologistes tirent d’un constat similaire des conclusions très différentes.
96Aux lendemains des élections législatives, certains animateurs d’Écologie 78 estiment en effet que l’écologisme doit incarner une alternative globale au système en place par la constitution d’une organisation pérenne essentiellement voire exclusivement consacrée à la compétition électorale. Mise en place au cours de l’année 1978, la CIME (Coordination interrégionale des mouvements écologistes) est le premier avatar de cette démarche qui aboutit, en novembre 1979, à la création du MEP (Mouvement d’écologie politique).
97Cette division progressive des rôles entre des organisations tournées vers une action associative et d’autres à vocation électorale participe des sorties des années 68. Elle constitue en effet une rupture avec l’aspiration antérieure à agir sur la société par le biais de collectifs fluides, temporaires et polyvalents ; la création de la CIME puis du MEP alimente donc le processus de différenciation des tendances au sein des mouvements écologistes, ce dont témoignent les élections européennes de 1979.
Les recompositions politiques aux lendemains des législatives
98Avec 4,6 % des voix recueillis dans quelques 250 circonscriptions, les élections législatives de 1978 sont loin d’être un échec pour les écologistes dans un contexte politique propice à la bipolarisation des comportements électoraux. Pourtant, dresser un bilan apaisé de cette campagne se révèle impossible pour les écologistes tant les tensions sont fortes autour de la question du bien-fondé de la stratégie électorale.
99Alors que le débat sur l’opportunité de présenter une liste pour les élections européennes fait rage, les tensions et les désaccords sous-jacents s’exposent au grand jour et conduisent à d’importantes recompositions politiques à l’aube des européennes de 1979.
100Nombreux sont les militants, tout particulièrement au sein des Amis de la Terre qui estiment que les écologistes n’ont pas vocation à présenter une liste aux européennes. Le groupe de Lille préconise ainsi un moratoire électoral de plusieurs années pour permettre à la nébuleuse de reconsidérer sa stratégie, de reconstituer son unité et de s’investir dans les luttes quotidiennes123. De son côté, le groupe de Marseille craint que la participation systématique aux élections ne conduise l’écologisme à devenir un parti politique classique uniquement tourné vers « l’exercice de fonctions gestionnaires », trahissant sa vocation à changer la société sur le terrain124.
101L’Europe telle qu’elle s’est bâtie depuis les traités de Rome suscite par ailleurs d’importantes réticences chez des militants qui considèrent que cette construction est incompatible avec leur projet de société. Proche des écologistes, le MAN (Mouvement pour une alternative non-violente) estime par exemple que participer aux élections européennes reviendrait à conforter une Europe commerciale, technocratique et militariste sans que la présence de quelques députés écologistes ne suffise à en faire un modèle de socialisme autogestionnaire125. De même, Pierre Samuel se dit sceptique à l’égard d’institutions européennes dont il regrette la pesanteur productiviste126.
102Ces réactions témoignent de doutes profonds quant à la pertinence d’une stratégie électorale, qu’elle soit conçue comme une action de propagande ou comme un levier pour transformer la société en profondeur. Il n’est donc pas étonnant qu’à l’issue de la réunion nationale de Seignosse (Toussaint 1978), les groupes des Amis de la Terre se prononcent contre la participation du RAT à la constitution d’une liste écologiste.
103Au moment où les Amis de la Terre font, au travers des européennes, le procès d’une stratégie reposant sur la participation aux élections, une autre sensibilité adopte une ligne de conduite très différente en se rassemblant au sein d’un collectif électoral pérenne.
104Dès la période des législatives de 1978, certains groupes écologistes se sont associés à l’échelle départementale et parfois régionale notamment dans le nord-ouest de la région parisienne, en Bourgogne ou encore en Auvergne127. À l’origine, il s’agit de coordonner les candidatures et de faire face aux contraintes logistiques et financières inhérentes aux périodes électorales. Celles-ci passées, ces regroupements perdurent et conduisent à la création de la CIME (Coordination interrégionale des mouvements écologiques) lors d’une réunion à Mulhouse les 13 et 14 mai 1978128.
105Celle-ci prend la relève du Mouvement écologique créé en 1974 et en sommeil depuis 1977, tout en s’appuyant sur un réseau de groupes autrement plus étoffé qu’auparavant129. Contrairement à d’autres collectifs, celui-ci présente la spécificité de ne rassembler que des groupes écologistes, à l’exclusion des autres mouvements sociaux. Par ailleurs, à la différence du Mouvement écologique, qui proclamait sa vocation à représenter l’ensemble de la nébuleuse écologiste, la CIME prend soin de préciser que ses décisions ne s’imposent qu’à ceux qui désirent y prendre part130. Anodine en apparence, cette décision ouvre symboliquement la voie à la séparation de l’écologisme français en deux sensibilités distinctes qui, si elles existaient déjà auparavant, insistaient sur le fait que leurs points communs étaient autrement plus importants que leurs divergences éventuelles.
106Cette logique de différenciation est également idéologique. Dénonçant « le modèle actuel de société, basé sur l’expansion matérielle indéfinie, le pillage des ressources naturelles, le mépris de l’être humain et de la vie », la CIME affirme en effet que l’écologie est la seule alternative susceptible d’éviter l’impasse et l’effondrement de la civilisation. Alors que les Amis de la Terre considèrent que l’écologisme ne peut permettre une transformation de la société qu’en se mêlant aux autres mouvements sociaux, la CIME estime que ce courant politique peut être à lui seul la matrice de cette évolution. Dès lors, certains de ses militants affirment la vocation de la CIME à rendre obsolète le clivage gauche-droite au profit d’une opposition entre écologistes et productivistes131. Celle-ci n’entend cependant pas s’ériger en parti politique ; cette idée apparaît au contraire comme un repoussoir car les militants considèrent qu’une structure hiérarchisée serait par nature contraire aux lois de l’écologie telles que l’auto-organisation et la diversité.
107À l’automne 1978, la CIME se prononce en faveur d’une participation aux européennes avec l’objectif d’affirmer l’originalité de leurs analyses en considérant que quatre à cinq élus écologistes pourraient porter une voix différente au sein du Parlement européen132. C’est ainsi que les 11 et 12 novembre 1978, à l’occasion de la réunion de Saint-Germain-en-Laye, la CIME met officiellement en place Europe Écologie, structure destinée à réunir l’ensemble des groupes et des militants désireux de s’investir dans ces élections et à constituer une liste133.
Quelle liste pour les européennes ?
108Plus encore que les législatives, ces élections européennes au suffrage universel constituent un enjeu d’importance pour les écologistes car le choix d’un mode de scrutin à la proportionnelle leur permet d’espérer un certain nombre d’élus dans certains pays de l’Europe des neuf, en RFA, en Belgique mais également en France.
109Encore faut-il pour cela constituer une liste de 81 noms. À bien des égards, l’opération s’annonce délicate car, comme c’est le cas à chaque élection, la mise sur pied d’un collectif est l’occasion pour les militants de confronter différentes visions de l’écologisme et de débattre de son rôle politique, de ses alliances et de ses combats. La composition de cette liste ne saurait donc être ramenée au seul choc des ego et des ambitions – même si ces enjeux ne sont en rien absents de l’équation – tant elle touche à la définition même de l’écologisme.
110Quelques mois avant le scrutin, fixé en France au 10 juin 1979, les positions apparemment arrêtées des différentes tendances de l’écologisme français évoluent à la suite des bons résultats obtenus aux élections cantonales de mars 1979. Un dépouillement exhaustif des résultats donnés par le journal Le Monde permet de retrouver la trace de quarante-huit candidats, répartis dans onze régions et vingt et un départements, Leur score moyen s’élève à 7,20 % et sept d’entre eux dépassent les 10 % au premier tour en Alsace, dans la Manche et dans le sud de la région parisienne.
Tableau 9. – Résultats supérieurs à 10 % réalisés par les écologistes aux élections cantonales de mars 1979.
Département | Canton | Nom du candidat | Résultat au premier tour |
Manche | Beaumont-Hague | Catherine Girard | 26,37 % |
Bas-Rhin | Mundolsheim | Sinclair | 12,89 % |
Essonne | Brunoy | Jacques Exbalin | 10,94 % |
Haut-Rhin | Habsheim | Bitterlin | 10,45 % |
Bas-Rhin | Illkirch-Graffenstaden | Schortanner | 10,37 % |
Val-de-Marne | Saint-Maur-des-Fossés | Catherine Bonnel | 10,29 % |
Yvelines | La-Celle-Saint-Cloud | Georges Bodu | 10,22 % |
111Le meilleur score est réalisé par Catherine Girard dans le canton de Beaumont-Hague (Manche) sur un programme d’opposition à l’extension de l’usine de retraitement de La Hague et à la construction de la centrale de Flamanville134. La candidate, membre du CCPAH (Comité contre la pollution atomique à la Hague), devance ses concurrents socialistes et communistes et contraint le conseiller général sortant, l’UDF Paul Gosselin, à un second tour inattendu.
112Ce succès relatif aux cantonales laisse présager une réussite similaire aux européennes du mois de juin d’autant plus que la France fait le choix d’une élection à la proportionnelle sur liste nationale. À l’image des libéraux du début du xxe siècle135, les écologistes considèrent que ce mode de scrutin leur est profitable car il relativise l’importance du clivage gauche/droite et atténue l’influence des notables locaux mieux enracinés. Comme le souligne Le Sauvage, au vu des 7,20 % obtenus aux cantonales, atteindre sur le plan national le seuil de 5 % nécessaire pour avoir des élus aux européennes est loin d’être irréaliste136. Un tel contexte apparemment favorable suscite néanmoins des remous au sein de la nébuleuse écologiste en attisant la concurrence entre les candidats potentiels, dont certains se déclarent tardivement.
113Malgré la décision officielle des Amis de la Terre de ne pas prendre part aux européennes, Brice Lalonde n’abandonne pas l’idée d’échafauder une liste. Membre d’Écoropa depuis sa fondation, il a en effet toujours été favorable à une participation des écologistes à cette élection et son action a été décisive pour convaincre les écologistes allemands d’en accepter le principe137. C’est dans cet esprit que paraît le 19 avril 1979 dans Le Matin de Paris un appel intitulé « Écologie et Liberté » destiné à rassembler sur une même liste non seulement les écologistes mais plus largement l’ensemble des militants qui se reconnaîtraient dans une aspiration à renouveler la vie politique138.
114Les signataires de l’appel, pour la plupart des membres des Amis de la Terre, déclarent refuser la professionnalisation de la vie politique et vouloir œuvrer à sa refondation dans le cadre d’une liste valorisant des convergences larges, au-delà du clivage gauche/droite. De fait, ce court texte est construit autour de l’opposition, présentée comme allant de soi, entre le champ politique professionnel et l’action des citoyens : aux « politiciens » qui tirent profit d’un système électoral inégalitaire sont opposées les convictions des individus et la certitude que les Français sont désireux d’élire des citoyens aptes à se concentrer sur des objectifs immédiats. Ce texte met donc délibérément en scène la supposée marginalité politique des signataires pour justifier leur transgression des décisions prises collectivement au sein du RAT et convaincre de leur capacité à faire de la politique autrement139.
115Faisant écho à la stratégie de convergence des Amis de la Terre, l’appel « Écologie et liberté » est révélateur de la démarche de Lalonde pour qui des actes volontaristes et intentionnellement provocateurs peuvent à eux seuls faire bouger les lignes et les clivages politiques les plus solides. À la suite de cet appel, il annonce avoir pris contact avec diverses organisations de gauche (le MRG, le PS, les Paysans-Travailleurs) mais également avec Françoise Giroud140. L’animateur des Amis de la Terre présente ces discussions comme la conséquence directe de la diffusion de son appel, comme si cet hypothétique rassemblement reposait uniquement sur l’adhésion à des idées et non sur une combinaison d’appareil. Il s’agit en réalité de contacts parfois entretenus de longue date, tant avec Jean-Michel Baylet, propriétaire de La Dépêche du Midi, secrétaire national du MRG et opposant déclaré à la construction de la centrale nucléaire de Golfech, qu’avec Françoise Giroud141.
116Il est difficile de savoir dans quelle mesure Brice Lalonde a mesuré le caractère irrecevable de ses propositions. Lors de l’assemblée générale du RAT, le nom de François Giroud suscite immédiatement des « mouvements divers dans la salle142 » et le représentant des Amis de la Terre de Marseille dénonce une attitude relevant de « la plus basse politique politicienne143 ». De fait, pour la très grande majorité des écologistes, Françoise Giroud est sans contestation possible étiquetée à droite en tant qu’ancienne secrétaire d’État de Valéry Giscard d’Estaing144 et actuelle vice-présidente de l’UDF. Dans ces conditions, elle n’est pas considérée comme une alliée potentielle par la plupart des militants ce qui montre combien les pétitions de principes autour du dépassement du clivage gauche/droite chères à certains écologistes doivent être relativisées.
117En définitive, les convergences mises en avant par Brice Lalonde se délitent avant d’avoir réellement vu le jour, le MRG et le PSU refusant finalement de s’allier aux écologistes145. Anecdotique en lui-même, cet échec démontre combien, contrairement à ce que semblait penser Brice Lalonde, des formations politiques minoritaires, en position dominée dans le champ politique, n’ont pas forcément vocation à s’allier, même pour des raisons circonstancielles. Au bout du compte, les clivages partisans et les différences idéologiques semblent plus solides que l’animateur des Amis de la Terre ne le présumait. Alors que l’appel « Écologie et Liberté » insistait sur la nécessité de leur dépassement, ces négociations démontrent au contraire la centralité des structures partisanes dans les négociations électorales.
118Parallèlement aux débats qui secouent les Amis de la Terre, la CIME poursuit ses travaux et c’est dans une relative sérénité qu’Europe Écologie se met en place avec pour objectif d’affirmer l’originalité absolue de l’écologisme face à une Europe productiviste146.
119Emmenée par Solange Fernex, la liste compte 23 femmes (soit 28,3 % de l’ensemble) avec une moyenne d’âge de 39 ans147. Celle-ci tend donc à être plus élevée que pour la plupart des listes présentées à l’occasion des municipales. Par ailleurs, 33 membres d’Europe Écologie – soit près de 40 % de l’ensemble – ont déjà été candidats dans le cadre d’Écologie 78. S’il ne s’agit pas encore d’un processus de professionnalisation des écologistes puisqu’aucun d’entre eux ne dispose d’un mandat politique et ne peut donc vivre de cette activité, il n’est cependant plus possible de les considérer comme de parfaits néophytes dans ce domaine.
120Il faut par ailleurs souligner l’importance du nombre de candidats dont le métier implique une proximité quotidienne avec l’écrit et, très probablement, le fait d’avoir accompli des études supérieures (60,5 %). Dans cet échantillon, les enseignants sont surreprésentés (22 %), caractéristique classique chez les écologistes, tout comme les professions scientifiques. La liste compte ainsi neuf ingénieurs et scientifiques et sept membres des professions médicales (19,8 %). Par ailleurs, les agriculteurs sont relativement nombreux (7,4 %), caractéristique récurrente des listes écologistes.
121Si l’on se fie à l’appellation choisie par les candidats pour se présenter au sein d’Europe Écologie, seuls onze d’entre eux sont investis dans une autre cause que la protection de la nature et de l’environnement, en dépit de l’annonce d’une ouverture de la liste aux défenseurs du quart-monde148. Par ailleurs, seul Jean-Pierre Mortreux, placé en cinquième position, affiche son appartenance aux Amis de la Terre. Les spécificités de cette liste confirment donc à la fois la polarisation d’une partie de la nébuleuse écologiste sur l’action électorale ainsi que le processus de différenciation de ses tendances en différents rameaux distincts.
122Comme il est d’usage chez les écologistes, de multiples possibilités d’alliances et de combinaisons sont donc envisagées, et parfois esquissées, avant d’aboutir à la constitution de la liste Europe Écologie. Ces multiples rebondissements, anecdotiques en eux-mêmes, sont pourtant lourds de conséquences. En effet, au moment où Brice Lalonde appelle à la constitution d’un courant minoritaire puis négocie avec les petites formations de gauche, la liste Europe Écologie a déjà été déposée en préfecture. Solange Fernex, tête de liste Europe Écologie, dénonce alors vigoureusement la stratégie poursuivie par Brice Lalonde, considérant qu’« à vouloir confondre, à la hâte, alliances tactiques et convergences politiques de fond, on s’expose à brader un peu vite ses propres engagements149 ». Ces péripéties pré-électorales creusent ainsi un fossé entre les Amis de la Terre d’une part et les soutiens de la liste écologiste d’autre part dont l’écho se fera sentir au-delà de la création des Verts en 1984150. Néanmoins, pour l’heure, une liste proprement écologiste s’impose et peut diffuser son programme sur le plan national.
Europe Écologie, pour une société écologique à l’échelle européenne
123Contrairement aux élections municipales et législatives, où les propositions des écologistes varient selon les situations locales et la sensibilité des candidats, les européennes de 1979 conduisent une seule tendance à rédiger un programme cohérent et valable pour l’ensemble du pays, sinon pour le continent. Son analyse est donc l’occasion de s’interroger sur les fondements et les spécificités d’une approche qui entend s’ériger en alternative globale dans un contexte de sorties des années 68, se situant tout à la fois dans la continuité mais également en rupture avec les réflexions propres à la période précédente.
124Dans son Histoire de l’écologie politique, Jean Jacob a défendu l’idée que les clivages entre écologistes trouveraient leur origine dans des définitions différentes de la nature et des relations que la société doit entretenir avec celle-ci151. De fait, il est indéniable qu’Europe Écologie insiste sur la préservation et l’épanouissement nécessaire d’une nature sauvage que l’homme devrait renoncer à modeler à son image. Néanmoins, l’examen du programme d’Europe Écologie invite à élargir les fondements de la culture écologique au-delà de la seule idée de nature. Au sein de cette tendance de l’écologisme, une approche binaire prédomine et considère que, de la même manière que la nature se distingue de l’homme, l’écologisme doit également se poser en alternative globale au productivisme.
125Héritage des réflexions menées depuis les années 1970, la notion de productivisme désigne un modèle de développement dont l’écologisme se distinguerait en tout point car, comme le déclare Solange Fernex, « l’écologie veut rendre sa place et sa dignité à l’homme qui est complètement bafouée par le productivisme et la politique actuelle152 ». Au cours de la campagne des européennes, les écologistes dénoncent donc une société qui mêle nationalisme, centralisation des activités et négation de la nécessaire solidarité qui doit unir les hommes entre eux ainsi qu’à leur environnement153. Aux yeux d’Europe Écologie, la mentalité productiviste irriguerait l’ensemble des partis politiques : Europe Écologie entend s’opposer autant à une Europe des États-nations voulue par le PCF et le RPR qu’à une Europe compétitive et efficace, surexploitant les ressources naturelles qui auraient la préférence du PS et de l’UDF154.
126Europe Écologie prolonge donc l’effort de montée en généralité entrepris dans les années 1970 en le plaçant explicitement dans une perspective idéologique et électorale, ce qui se vérifie dans les propositions figurant dans son programme. Sur le plan institutionnel, inspirée en cela par Écoropa mais également par les militants wallons, Europe Écologie promeut une société décentralisée, reposant sur des régions autonomes sur le plan économique, politique et culturel et représentées au niveau européen par une seconde chambre parlementaire155. Devenu bicaméral, le Parlement européen rendrait obsolète le Conseil des ministres et serait en charge de l’élaboration d’une constitution fédérale pour le continent reposant sur le principe de subsidiarité de telle sorte que la CEE ne disposerait que des pouvoirs explicitement abandonnés par les régions dont les limites seront déterminées par consultation des populations156.
127Europe Écologie entend également déconstruire l’association étroitement entretenue depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale entre croissance économique et progrès social157. La coopération avec les comités quart-monde conduit par exemple à dénoncer les conséquences proprement sociales d’un mode de développement reposant sur la performance158. Celui-ci exclut en effet ceux qui ne sont pas en mesure de prendre part à cette compétition, qu’il s’agisse des personnes handicapées ou encore des illettrés, favorisant la crise et la montée du chômage.
128Il faut néanmoins relever que, sur bien des points, les propositions des écologistes demeurent encore vagues. Évoquant les deux millions de Français vivant dans la pauvreté, Europe Écologie exige ainsi la mise en place d’un droit à l’instruction, à un logement décent ou à la santé sans préciser en quoi ces idées se distingueraient des dispositifs déjà en place159. Ces revendications n’en témoignent pas moins d’un approfondissement des réflexions des écologistes sur les questions non directement liées à l’environnement.
129Au-delà de ces propositions concrètes, les valeurs qui inspirent cette opposition au productivisme rapprochent Europe Écologie d’une culture politique valorisant l’autonomie, la communauté et le respect de la personne humaine.
130Refusant des relations humaines fondées sur la compétition, l’agression et les hiérarchies, Europe Écologie prône une société organisée en réseau selon les principes de la non-violence, de l’autogestion et de la communauté160. En ce sens, le projet d’Europe Écologie met en cause une société matérialiste fondée sur l’avoir et non sur l’être et qui, en tant que telle, menacerait l’homme dans sa dignité comme dans son intégrité physique. Dans une perspective qui n’est pas sans rappeler les réflexions non-conformistes des années trente, Europe Écologie dénonce une civilisation qui a multiplié les facteurs de maladie, considérant également qu’une consommation excessive de drogues – légales ou pas – s’explique par la dureté des conditions de vie et de travail161.
131Cette approche humaniste s’observe également dans le refus d’une démarche qui valoriserait la rupture avec l’ordre existant, considérant qu’« une révolution brutale ne peut amener qu’un pouvoir totalitaire162 ». Ce réformisme radical, qui doit tenir compte de la lenteur de l’évolution des mentalités, tire ses origines des difficultés de la lutte antinucléaire mais aussi du « renversement des tendances » à l’œuvre en RFA depuis le milieu de la décennie ; il participe donc plus globalement des sorties des années 68163. Ce programme pour les élections européennes de 1979 apporte ainsi la démonstration qu’on ne saurait réduire la pensée des écologistes à une forme de deuxième gauche.
132Au-delà de son programme, Europe Écologie tient aussi à affirmer la spécificité de son rapport au champ politique, prolongeant les réflexions et les pratiques mises en œuvre dans le cadre d’Écologie 78. Un code déontologique du candidat, censé préserver le mouvement d’une dérive politicienne, est ainsi élaboré par une commission spécialement créée pour l’occasion164.
133Participer aux élections dans la perspective d’avoir des élus oblige en effet les écologistes à préciser la manière dont ils entendent faire de la politique. Jusqu’aux élections municipales de 1977, ces derniers ne prétendent se présenter que pour diffuser un message, éveiller les consciences voire porter la voix des citoyens au sein des conseils municipaux, tout en affichant une méfiance ostensible à l’égard des tâches gestionnaires et de l’idée de carrière politique. De manière quelque peu factice, les écologistes pouvaient affirmer qu’ils ne faisaient pas de politique dans le sens où ils en refusaient les pratiques, le rôle à tenir et les finalités165. À l’occasion des élections européennes, les écologistes ne peuvent plus afficher une telle extériorité à l’égard du champ politique.
134Pour « faire de la politique autrement166 », Europe-Écologie insiste sur la solidarité collective des députés à l’égard de l’ensemble du mouvement voire leur subordination à celui-ci, y compris sur le plan financier. Il est notamment décidé que les éventuels élus céderaient leur siège à leurs colistiers à deux reprises au cours du mandat ; ainsi, dans l’hypothèse où la liste écologiste dépasserait les 5 %, obtenant ainsi quatre élus, douze députés successifs siégeraient à Strasbourg durant la mandature167. Cette mesure semble avoir été proposée par Jean-Claude Delarue mais s’inspire également des pratiques au sein du Partito radicale italien. Elle présente l’intérêt pratique de former un plus grand nombre d’élus au travail parlementaire. Sur le plan éthique, ce système de rotation des sièges permet d’affirmer que nul député n’est propriétaire de son mandat car celui-ci appartient à l’ensemble du mouvement : à l’image des socialistes allemanistes, l’affirmation de la prééminence du groupe sur l’élu doit empêcher que le mandat ne se transforme en délégation de pouvoir168.
135Il est également décidé que le traitement des députés serait versé à un fonds commun administré collectivement ; en échange, ces derniers percevraient un salaire dit « raisonnable », le reliquat permettant de former les futurs députés et de faire circuler l’information auprès des militants169. L’élu serait donc au service du mouvement dont il serait l’émanation plutôt que le représentant sans pouvoir tirer parti de son statut pour améliorer sa condition personnelle. Implicitement, la rémunération directe d’une fonction politique est perçue comme le prélude à son avilissement, d’où l’importance d’en détourner le sens en faisant du traitement de l’élu le symbole d’un dévouement au collectif. Particulièrement développées par les écologistes, de telles réflexions sont fréquentes au sein des mouvements émergents qui prétendent à une certaine extériorité à l’égard du champ politique classique ou s’y intégrer tout en en détournant les règles, en transgressant les normes sociales et politiques établies, comme c’est le cas des ouvriers socialistes de 1880 ou des communistes dans les années vingt170.
136Pourtant, l’existence même de ce code de déontologie que tous les candidats de la liste Europe-Écologie sont tenus de signer démontre combien les gratifications offertes par la profession politique paraissent attractives et donc menaçantes. En multipliant les garde-fous, les écologistes reconnaissent implicitement que l’abîme de la politique conserve bien des attraits.
137L’unité du programme et de la démarche d’Europe Écologie n’est donc pas à chercher spécifiquement dans son idée de la nature. Celle-ci s’intègre plus largement dans un système de pensée binaire : au productivisme s’opposerait ainsi la société écologique qui émergerait par un renversement des valeurs dont les écologistes doivent hâter l’avènement ; aux dérives de la démocratie représentative et du monopole exercé par les grandes formations politiques doit se substituer une nouvelle déontologie illustrant la rectitude morale des écologistes. Ce faisant, les membres d’Europe Écologie construisent l’écologisme en un nouvel avatar d’une troisième voie à laquelle ils s’attachent à donner corps à l’occasion de ces européennes.
Le 10 juin 1979 et ses suites
138Au soir du 10 juin 1979, Europe Écologie obtient 4,39 % des suffrages exprimés (soit près de 900000 voix) ce qui place les écologistes en cinquième position, loin derrière la liste du RPR menée par Jacques Chirac (16,31 %) mais clairement devant celles de LO/LCR (3,08 %) ou celle de Jean-Jacques Servan-Schreiber (1,84 %)171. Dans une élection plutôt favorable aux petites listes, qui totalisent 12 % des suffrages exprimés contre 9 % aux présidentielles de 1974, Europe Écologie réalise un résultat en demi-teinte puisque, faute d’atteindre le seuil de 5 % des suffrages exprimés, elle n’obtient aucun élu et ne peut donc pas rembourser de ses frais de campagne. Les listes présentées par les écologistes dans le reste de l’Europe des neuf ne connaissent pas plus de succès – en RFA, les Grünen n’obtiennent que 2,6 % des voix – et seul le Partito Radicale italien, alors proche de l’écologisme, fait élire trois des siens172.
139À première vue, les élections européennes marquent un reflux de l’écologisme français. Ce constat doit être nuancé en remettant les résultats obtenus par Europe Écologie dans une perspective chronologie plus longue. En dépit de cet échec, les élections européennes confirment en effet l’enracinement des écologistes dans le paysage politique français. La répartition du vote écologiste montre un territoire métropolitain coupé en deux par une ligne qui irait grossièrement du Mont-Saint-Michel à Nice [voir cahier couleur, p. VIII]. Au nord de cette ligne, les écologistes tendent à recueillir plus de 4 % des suffrages (hormis dans la Somme et le Pas-de-Calais173) dans l’ensemble des circonscriptions législatives. Les zones d’influence privilégiées de l’écologisme, où les bons résultats sont confirmés scrutin après scrutin, se trouvent également dans cette partie du territoire : l’Alsace174, la Manche175, l’Ile-de-France ou, dans une moindre mesure, dans la région Rhône-Alpes176. Un phénomène de diffusion du vote écologiste à partir de ces esquisses de bastions est par ailleurs observable en Bourgogne, en Lorraine (5,94 % sur l’ensemble de la région) ou encore en Basse-Normandie177.
140En revanche, dans la France de l’ouest et du sud, les écologistes n’obtiennent des résultats au-dessus de leur moyenne nationale que dans quelques circonscriptions urbaines de Loire-Atlantique178 et de Gironde179, où la présence de populations plus aisées et plus diplômées constitue des conditions sociologiquement propices à un vote écologiste plus important que la moyenne180. Dans cette partie du territoire, les zones rurales paraissent particulièrement peu sensibles à l’écologie politique, notamment dans le Massif central ou dans les Pyrénées181. La cartographie des résultats d’Europe Écologie à l’échelle des circonscriptions législatives manifeste donc clairement l’incomplète nationalisation de l’électorat écologiste dans la mesure où les disparités régionales et locales des votes prédominent.
141Dans un certain nombre de cas, les conflits environnementaux sont un facteur de mobilisation électorale en faveur des écologistes sans que cela soit systématique. Les bons résultats obtenus dans le Doubs permettent de préciser la question de l’influence éventuelle d’un conflit environnemental sur le vote des électeurs182. La région est en effet particulièrement concernée par le projet de mise à grand gabarit du canal Rhin-Rhône prévu dans le cadre du VIIIe Plan (1980-1985) et qui implique d’importants travaux entre Saint-Symphorien (Côte-d’Or) et Mulhouse (Haut-Rhin) soit 229 km de voies d’eau183. S’inscrivant dans une approche de l’aménagement du territoire où il serait légitime de modeler l’environnement régional en fonction de considérations macroéconomiques d’équilibrage du territoire européen, ce projet suscite rapidement l’inquiétude des écologistes et des protecteurs de la nature qui craignent une altération irrémédiable de la vallée du Doubs et la disparition de très bonnes terres agricoles184. La contestation de ce projet est donc analogue à celle des centrales nucléaires et repose sur le CLAC (Comité de liaison anti-canal) créé en 1975 par Solange Fernex (n° 1 sur la liste Europe Écologie) et Pierre Parreaux (n° 28). Durant la campagne, le CLAC envoie une lettre à l’ensemble des électeurs du Doubs pour souligner les problèmes posés par le projet et appeler à voter en faveur d’Europe Écologie185. Ainsi, la conjonction d’un conflit environnemental majeur sur le plan régional et de la présence des animateurs de cette lutte dans la compétition électorale semble nécessaire pour que la contestation d’un projet d’infrastructure se traduise en un vote écologiste plus important que la sociologie électorale locale ne le laisserait supposer.
142Les bons résultats obtenus par les écologistes dans certaines régions s’expliquent également par l’implantation des têtes de liste d’Europe Écologie. En effet, loin d’être anecdotique, le profil politique des militants situés dans les premières places sur la liste Europe Écologie a son importance en ce qu’il traduit l’existence d’une stratégie délibérée d’enracinement dans certaines circonscriptions.
143Les politologues désignent sous le terme d’« effet d’amitié locale » la corrélation entre l’origine géographique d’un candidat et un vote en sa faveur très sensiblement supérieur à sa moyenne nationale186. Lors des élections présidentielles, ce phénomène, régulièrement évoqué pour les candidatures de témoignage, constitue par ailleurs un réservoir de voix crucial pour les candidats des grands partis187. Courant politique nouveau, dont certaines tendances refusent la détention d’un mandat électif et n’utilisent les élections que comme un moyen de diffuser l’information, les écologistes sont, a priori, moins susceptibles que d’autres formations de bénéficier de l’effet d’amitié locale. Néanmoins, le tableau suivant montre que les candidats Europe Écologie sont loin d’être tous des néophytes en politique et certains d’entre eux ont déjà accumulé un capital politique qui, s’il reste modeste, n’en contribue pas moins aux bons résultats obtenus par leur liste dans certaines circonscriptions.
Tableau 10. – Enracinement politique des candidats Europe Écologie188.
Nom du candidat | Position sur la liste | Circonscription | Score réalisé |
Fernex Solange | 1 | 3e circonscription du Haut-Rhin (6,82 %) | 8,26 % |
Dufetelle Michel | 2 | 3e circonscription de Haute-Garonne (5,27 %) | 5,78 % |
Anger Didier | 3 | 4e circonscription de la Manche (12,63 %) | 9,32 % |
Schneiter Laure | 6 | 18e circonscription de Paris (6,19 %) | 6,42 % |
Klein Gilles | 7 | 6e circonscription de Seine-Maritime (4.96 %) | 5,11 % |
Labey Marie-Paule | 8 | 5e circonscription du Calvados (3,69 %) | 6,26 % |
Rodes Michel | 9 | 2e circonscription des | 4,91 % |
Delarue Jean-Claude | 10 | 1re circonscription de Paris (5,34 %) | 6,72 % |
144Le tableau 10 montre que huit des dix premiers membres de la liste Europe Écologie ont déjà été candidats aux élections législatives de 1978 et qu’à cette occasion ils ont souvent obtenu un score appréciable : alors qu’Écologie 78 avait obtenu 4,6 % dans les circonscriptions où ce collectif était présent, les candidats d’Europe Écologie présents dans ce tableau ont dépassé ce score dans six cas sur huit. Solange Fernex se distingue plus particulièrement puisqu’elle est la seule à détenir un mandat électif en tant que conseillère municipale dans le village de Biederthal (Haut-Rhin) depuis 1965189.
145Ainsi, la composition de la liste montre que la détention d’un capital politique, même modeste en l’absence de mandat électif, constitue désormais une ressource valorisée et un critère dans le choix des candidats. Cette stratégie, qui tire parti de l’effet d’amitié locale dans une stratégie plus ou moins réfléchie d’enracinement, contribue donc, autant que les conflits environnementaux, à dessiner la carte de France de l’écologie politique aux élections européennes de 1979.
146En dépit de l’enracinement électoral de l’écologisme dans certains territoires, il n’en demeure pas moins qu’Europe Écologie ne parvient pas à réunir 5 % des voix, ce qui constitue indéniablement un échec dans la mesure où il s’agissait du premier objectif de la liste.
147Aux yeux de certains militants, cet échec s’explique avant tout par la division dans leurs rangs et notamment la défection des Amis de la Terre. Dans le Doubs, la campagne semble avoir profondément divisé les écologistes locaux et le CLAC (Comité de liaison anti-canal) déclare que « ces résultats ont été obtenus à Besançon dans l’hostilité générale du milieu militant (AT, MAN, etc.). Ils ont beaucoup ri, et je n’ai pas vu s’ils rient encore de l’inefficacité de leur appel au boycott190 ». De même, Solange Fernex déplore que seules certaines régions comme l’Alsace ou la Basse-Normandie se soient véritablement mobilisées191.
148L’absence de structure militante capable de mener une campagne électorale efficace sur l’ensemble du territoire constitue un autre facteur d’explication tant cette situation a des conséquences financières et organisationnelles importantes. En effet, faire campagne a un coût, d’autant plus quand celle-ci se déroule au niveau national. Deux postes de dépenses sont incontournables : le versement à l’État d’une caution de cent mille francs nécessaire pour se présenter d’une part192 et d’autre part les frais d’impression des professions de foi et des bulletins de vote193. En 1979, les écologistes chiffrent le montant de ces dépenses à près de trois millions de francs.
149Or, Europe Écologie ne peut à l’époque compter ni sur des financements publics – ceux-ci ne sont mis en place qu’à partir de 1988 – ni sur le reversement d’une partie de leurs indemnités par des élus – les écologistes n’en comptent pour ainsi dire aucun194. Les militants ne peuvent donc espérer présenter une liste qu’en organisant une vaste souscription auprès des sympathisants. Jean-Luc Burgunder, candidat en dix-neuvième position, se souvient que certains membres de la liste sont allés jusqu’à hypothéquer leur maison pour contribuer au financement de la campagne195. Il n’en reste pas moins que la perception de ces ressources est très aléatoire. Ainsi, au début du mois de mai 1979, seul la moitié des candidats ont versé les 1500 francs nécessaires au paiement de la caution196. Après d’âpres débats, Europe Écologie décide de limiter les risques financiers en ne faisant imprimer les bulletins de vote que pour le territoire métropolitain et en ne distribuant des professions de foi que dans dix-sept départements, ce qui limite inévitablement la notoriété de la liste donc ses résultats électoraux197.
150Dès le début de la campagne, Europe Écologie a protesté contre ces obstacles financiers et réglementaires décriés comme autant de moyens d’empêcher de nouveaux courants politiques de menacer le monopole électoral dont bénéficieraient les quatre grandes formations. Les écologistes créent ainsi un Comité pour l’égalité électorale pour protester contre l’obligation faite à l’ensemble des listes d’avancer les frais d’impression des bulletins de vote et des professions de foi198. Après le scrutin, faute de remboursement de la part des pouvoirs publics, les écologistes doivent verser plus d’un million deux cent mille francs et ce, malgré plusieurs recours et un rendez-vous obtenu par Solange Fernex auprès de Valéry Giscard d’Estaing199.
151Les diverses démarches d’Europe Écologie sont révélatrices d’un positionnement nouveau à l’égard du champ politique. Une posture morale consisterait à dénoncer le rôle de l’argent dans la sélection des candidats en réclamant le plafonnement des dépenses ou la transparence des comptes200. Or, Europe Écologie envisage avant tout ces enjeux comme une question d’équité dans la compétition électorale, affirmant ainsi qu’elle ne se considère pas comme une liste purement protestataire mais qu’elle appartient, à sa manière, au champ politique. De même, entrer en contact avec les présidents de groupe parlementaire pour obtenir une évolution de la législation ou solliciter Valéry Giscard d’Estaing pour obtenir un remboursement partiel des frais de campagne revient à endosser un rôle de professionnel de la politique, reconnu comme tel par ses pairs et intégrant, par ses actes, les règles du jeu propres à ce champ201.
152Ainsi, loin d’être périphériques, ces questions financières et logistiques ont des conséquences politiques et électorales directes. Elles contribuent fortement à l’échec d’Europe Écologie et conduisent les militants à envisager leur action sous un angle nouveau. Dans les dernières semaines de la campagne, et plus encore après son dénouement, plusieurs voix s’élèvent donc parmi les militants pour souligner que la participation à des élections d’envergure nationale implique une structure pérenne capable d’assurer une gestion financière saine et durable202. Les élections européennes constituent donc une étape cruciale dans l’acceptation du fait partidaire au sein de la CIME.
153C’est dans cette perspective qu’à la suite de la réunion de Dijon, (24-25 novembre 1979), la plupart des membres d’Europe Écologie s’accordent pour jeter les bases d’une structure nationale permanente, le Mouvement d’écologie politique (MEP), contre l’avis de la majorité des membres des Amis de la Terre présents sur place203. Si le MEP n’est formellement créé qu’à l’occasion d’une réunion à Versailles (16-17 juin 1980), il n’en reste pas moins que son émergence est la conséquence directe du résultat et des aléas des élections européennes dont le déroulement favorise donc la différenciation des tendances de l’écologisme français.
154Pour mesurer combien la campagne européenne des écologistes s’inscrit dans la perspective des sorties des années 68, il peut être intéressant de la comparer à celle de René Dumont en 1974. Largement improvisée, cette dernière est présentée à l’époque comme un cri d’alarme visant à sensibiliser les Français et le monde politique à la gravité de la crise écologique. Cinq ans plus tard, si cette dimension alarmiste est toujours présente, la principale préoccupation est d’ériger l’écologisme en une alternative crédible et globale au mode de développement productiviste.
155De même, la figure de René Dumont devait à l’époque manifester voire susciter l’unification de la nébuleuse écologiste. En 1979, les élections européennes précipitent la division des écologistes en deux tendances de plus en plus clairement distinguées et respectivement incarnées par la CIME et les Amis de la Terre.
156Les élections constituent-elles un moyen efficace de transformation de la société ? Le simple fait d’envisager cette idée constitue un signe des sorties des années 68, caractérisées par une progressive perte de foi dans la capacité des mouvements sociaux à mettre en œuvre une nouvelle forme de changement de société. Bien qu’elle s’en défende, la liste Europe Écologie, en cherchant à s’ériger en acteur politique légitime, induit implicitement une distinction entre une écologie proprement politique et une autre tournée en priorité vers l’action associative, que les Amis de la Terre incarnent de plus en plus nettement.
Notes de bas de page
1 Frank F., « 68 après 68 : de la contestation du passé à la crise de l’avenir », in Artières P. et al. (dir.), 68, op. cit., p. 774.
2 Ollitrault S., Militer pour la planète, op. cit., p. 61 sq.
3 Sainteny G., L’introuvable écologisme français, op. cit., p. 5.
4 Gobille B., « Crise du consentement et rupture d’allégeance », in Damamme D. et al., op. cit., p. 20.
5 Frank F., « 68 après 68 : de la contestation du passé à la crise de l’avenir », in Artières P. et al. (dir.), 68, op. cit., p. 777.
6 Dreyfus-Armand G. et al., Les années 68. Le temps de la contestation, Bruxelles, Complexe, 2000 ; Artières P. et al. (dir.), 68, op. cit. ; Artous A., et al. (dir.), La France des années 68, Paris, Éditions Syllepse, 2008 ; Dreyfus-Armand G., Les années 68 : Un monde en mouvement, Paris, Éditions Syllepse, 2008.
7 Artières P. et al., 68 une histoire collective, op. cit., p. 17 sq.
8 Sirinelli J.-F., Les Vingt Décisives. Le passé proche de notre avenir (1965-1985), Paris, Arthème Fayard, 2007, p. 53.
9 Mendras H., La Seconde Révolution française, 1965-1984, Paris, Gallimard, 1988.
10 Ory P., L’entre-deux-Mai. Histoire culturelle de la France, mai 1968-mai 1981, Paris, Seuil, 1983.
11 Frank R., « Le temps de 68 », in Dreyfus-Armand G., Les années 68, op. cit., p. 59.
12 Christofferson M., Les intellectuels contre la gauche, op. cit., p. 31.
13 Cabanes B., Piketty G., « Sortir de la guerre : jalons pour une histoire en chantier », Histoire@Politique, n° 3, 2007, p. 1 [htpp ://www.histoire-politique.fr/index.php?numero=03&rub=dossier&item=22].
14 Ingrao C., Croire et détruire. Les intellectuels dans la machine de guerre SS, Paris, Fayard, 2010.
15 Cabanes B., Piketty G., « Sortir de la guerre », art. cit., p. 3.
16 Defaud N., La CFDT (1968-1995), op. cit., p. 20 sq.
17 Gobille B., « La parabole du Fils retrouvé. Remarques sur le “deuil de 68” et la “génération 68” », Mots, 1998/2, n° 54, p. 30.
18 Stora B., La dernière génération d’Octobre, Paris, Hachette, 2003 ; Lindenberg D., Choses vues. Une éducation politique autour de 68, Paris, Bartillat, 2008 ; Goupil R., Mourir à trente ans, MK2, 1982.
19 C’est l’approche adoptée par Guy Hocquenghem dans Lettre ouverte à ceux qui sont passés du col Mao au Rotary, Marseille, Agone, 2003.
20 Mongin O., « Citizen July et Libération à travers les “trente bouleversantes” », Esprit, août/septembre 2006/8-9, p. 8.
21 Yon K., « Que faire de la théorie au Parti socialiste ? La carrière écourtée du marxisme de Convergences socialistes », Sociétés contemporaines, 2011/1, n° 81, p. 81.
22 Margairaz M., Tartakowsky D., « Introduction », in Michel Margairaz et al. (dir.), 1968 entre libération et libéralisation, op. cit., p. 11.
23 Albouy M., Le Sauvage, op. cit., p. 231.
24 Mongin O., « Citizen July et Libération à travers les “trente bouleversantes” », art. cit., p. 8.
25 MV. Fonds Yves Cochet. Carton « Bulletins de liaison ». « Réunion des délégués régionaux des 4-5 octobre 1980 », Bulletin de liaison des Amis de la Terre, n° 55, 80-9, 21 octobre 1980, p. 9.
26 Vrignon A., « Quelques réflexions sur l’évolution récente de l’écologie politique au travers des autobiographies de leurs leaders », op. cit., p. 76.
27 Gobille B., « Crise de consentement et rupture d’allégeance », in Damamme F. et al. (dir.), Mai-juin 1968, op. cit., p. 19.
28 Ollitrault S., Militer pour la planète, op. cit., p. 63.
29 Dumont R., L’écologie ou la mort, op. cit.
30 Aucher T., « Courrier. « Debout les paumés de la terre ! », GO, n° 202, 22 mars 1978, p. 3.
31 « Compte rendu de l’AG des AT-Lille du 17 septembre 1978 », Légitime défense, n° 14B, septembre 1978, p. 1.
32 CARAN. Fonds Présidence Valéry Giscard d’Estaing. 5 AG/3 – 2395. Louis Timbal-Duclaux, « 1978 : tournant écologiste ? (un scénario parmi d’autres possibles) », Informations et Réflexions, octobre 1978, n° 3, p. 3.
33 Collin C., Écoutez la vraie différence. Radio Verte Fessenheim, Radio SOS Emploi-Longwy et les autres…, Claix, La pensée sauvage, 1979, p. 33.
34 Les AT-Lille, « Les élections, une information qu’ils disent », CB, n° 36, mai 1978, p. 4.
35 Pascal M., « Réunion à la Clayette des 8 et 9 avril », Légitime défense, n° 13C, avril 1978, p. 5.
36 Treillard C., « Les non-violents responsables », GO, n° 192, 12 janvier 1978, p. 1.
37 Richard G., « « L’expérience Barre » ou l’entrée de la France dans l’ère néolibérale », in Dard O. et al., Les droites et l’économie en France au xxe siècle, Paris, Riveneuve, 2011, p. 286.
38 Kernalegenn T., Luttes écologistes dans le Finistère, op. cit., p. 98 sq.
39 Klein G., « Le groupe Poséidon : non aux CRS de la mer !! », GO, n° 204, 5 avril 1978, p. 8.
40 Les AT-Paris, « Marée noire : pourquoi le boycott ? », CB, n° 36, mai 1978, p. 2.
41 Asselin, « Des U.S. et coutumes du boycott », GO, n° 205, 5 avril 1978, p. 4.
42 Delporte C., « “N’abîmons pas la France !” L’environnement à la télévision dans les années 1970 », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 2012/1, n° 113, p. 57.
43 Philibert C., « Des écologistes sur le gazon », GO, n° 205, 5 avril 1978, p. 9.
44 Babeth et Jean, « La vie est dure », GO, n° 275, 22 août 1979, p. 2.
45 Cabut I., « Écologie 78, 79, 80… n + 1 », GO, n° 179, 13 octobre 1977, p. 1.
46 « Écologie n+1 à l’eau ? », GO, n° 192, 12 janvier 1978, p. 1.
47 Neveu E., « Trajectoires de « soixante-huitards ordinaires », in Dominique Damamme et al., Mai-juin 1968, op. cit., p. 312 sq.
48 Benquet P., « Les militants du repli », Le Monde Dimanche, 12 avril 1981, p. 1.
49 Ion J., La Fin des militants ?, Paris, Les éditions de l’Atelier, 1997, p. 79.
50 Faucher F., Les habits verts de la politique, op. cit., p. 29.
51 « La presse écolo », Bulletin de liaison des Amis de la Terre, supplément au Courrier de la Baleine n° 48, 18 septembre 1979, p. 5.
52 Entretien avec Jean-Luc Burgunder. 16/12/11.
53 « 150000 francs pour la GO », GO, n° 233, 25 octobre 1978, p. 17.
54 Colombat C., La Gueule Ouverte, op. cit., p. 12.
55 Entretien avec Alain Hervé. 12/03/10.
56 Silence n’apparaît qu’en 1982 et sa diffusion est bien moindre que celle de La Gueule Ouverte ou du Sauvage à leur apogée.
57 CHT. Fonds Marie-Françoise Gonin. GON 5. Bulletin du MEP par Philippe Lebreton. 17 juin 1980.
58 « Liaisons. Nouvelles internationales », CB, n° 32, janvier 1978, p. 4.
59 Samuel L., « Les Amis de la Terre à la plage », CB, n° 31, décembre 1977, p. 4.
60 Samuel P., « Éditorial. La convergence, avec qui et pourquoi ? », CB, n° 37, juin 1978, p. 1-2.
61 Lenoir Y., Technocratie française, op. cit., p. 272 sq.
62 Lenoir Y., « Vaguelette velléitaire ou lame de fond ? », CB, n° 49, octobre 1979, p. 4.
63 Radanne P., « Commentaire », Écologie, n° 317-318, juillet-septembre 1979, p. 26.
64 De Cazotte H., « Un RAT à 3 pattes », CB, n° 47-48, juillet-août 1979, p. 36.
65 « Contre la technocratie », CB, n° 54, juin 1980, p. 6.
66 Samuel L., « La vraie crise de la gauche », CB, n° 36, mai 1978, p. 1.
67 Lalonde B., « Le pôle radical », LS, n° 52, avril 1978, p. 7.
68 Lalonde B., « Alors, c’est pour quand cette naissance ? », LS, n° 65, mai 1979, p. 6.
69 « Trois objectifs », CB, n° 54, juin 1980, p. 11.
70 ACFDT. 8H 876. Dossier aux organisations. S. d. [fin juin-début juillet 1979].
71 Le Cotentin abrite en effet l’arsenal de Cherbourg, l’usine de retraitement de La Hague et la centrale de Flamanville, alors en construction.
72 Didier Anger rassemble ainsi 12,63 % des voix aux législatives de 1978 (quatrième circonscription de la Manche) tandis que Catherine Girard obtient 26,37 % des voix dans le canton de Beaumont-Hague en 1979, devançant les candidats PS et PCF, parvenant ainsi à se maintenir au second tour. Cf. « Cantonales », GO, n° 253, 21 mars 1979, p. 8.
73 Anger D., Chronique d’une lutte, op. cit., p. 195.
74 « Le retraitement à la retraite », CB, n° 40, décembre 1978, p. 20.
75 CAC. Fonds Amis de la Terre. 20050521/4. Agenda des Amis de la Terre de Paris. Réunion du 12 mars 1979.
76 ACFDT. 8H 876. Lettre des Amis de la Terre à Pierre Bérégovoy. 11 février 1980.
77 Lenoir Y., « Problématique antinucléaire », GO, n° 233, 25 octobre 1977, p. 6.
78 ACFDT. 8H1473. Prise de position de la CFDT sur la politique de l’énergie. Bureau national des 11 et 12 mars 1976.
79 ACFDT. 8H1473. Compte rendu du groupe confédéral énergie. Réunion du 13 janvier 1977.
80 ACFDT. 8H1464. Notes manuscrites « Rencontre “Amis de la Terre” ». 31 janvier 1978.
81 Ibid. Extrait de Syndicalisme, « Comment peut-on être écologiste ? 1. Écologie et politique ». 25 août 1977.
82 Defaud N., La CFDT, op. cit., p. 14.
83 Évrard A., Contre vents et marées. Politiques des énergies renouvelables en Europe, Paris, Les Presses de Science Po, 2013, p. 196.
84 Lenoir Y., « Problématique antinucléaire », GO, n° 233, 25 octobre 1977, p. 6.
85 Le GSIEN, l’UFC-Que Choisir, le PSU et la CSCV en sont également parties prenantes. Cf. « Coordination Énergie Développement sur l’énergie nucléaire », CB, n° 39, novembre 1978, p. 11.
86 Samuel L., « L’information nucléaire en question », CB, n° 45, mai 1979, p. 5.
87 ACFDT. 8H1464. Notes manuscrites « Rencontre “Amis de la Terre” ». 31 janvier 1978.
88 CP1 est un acronyme pour « Contrat-Programme 1 » soit le plan pluriannuel de construction de centrales nucléaires décidé en 1973-74. Cf. Barconnière L., « À propos du collectif. “Pour un moratoire nucléaire et pour le développement des énergies nouvelles” », Bulletin de liaison des Amis de la Terre, n° 38, 12 septembre 1978, p. 17.
89 ACFDT. 8H 1473. Rapport provisoire de la commission énergie par Louis Puiseux. Août 1978.
90 CAC. Fonds Amis de la Terre. 20050521/43. Yves Lenoir, « Synthèse de la « Présentation d’une variante technico-économique » au programme de la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine ». Décembre 1980.
91 Mortreux J.-P., « Pot pourri autour d’une bulle », CB, n° 45, mai 1979, p. 6.
92 ACFDT. 8H 876. Note de Michel Rolant à Hubert Prévot et au « groupe énergie ». 29 juin 1979.
93 Ibid., réunion de la pétition nationale énergie. 4 septembre 1979.
94 Ibid., Note manuscrite « Conflits et difficultés avec les partenaires ». S. d. [janvier 1980].
95 Ibid., Lettre de Jean Delaby (secrétaire général de l’UR CFDT) à Michel Rolant. 4 décembre 1979.
96 « Double face : PS pour La Hague », L’envert du Nord, n° 25, septembre 1980, p. 9.
97 « Fin de la pétition nationale », L’envert du Nord, n° 22, avril 1980, p. 3.
98 Labellery F., « N’oubliez pas de composter », Le Courrier de la Baleine, n° 40, décembre 1978, p. 12.
99 « Pourquoi ce colloque ? », L’envert du Nord, n° 21, février 1980, p. 9.
100 Frémont A., « État des lieux. À propos de l’espace vécu », Communications, n° 87, 2010, p. 161 sq.
101 Les AT-Caen, « Caen : les fanatiques du recyclage ont frappé », CB, n° 45, mai 1979, p. 16.
102 Desplats N., « Papier recyclé, très beau, pas cher ! », CB, n° 39, novembre 1978, p. 5.
103 Lalonde B., Sur la vague verte, op. cit., p. 110.
104 Blanquart P., « Écologistes, à vos cervelles », GO, n° 232, 18 octobre 1978, p. 20.
105 Boltanski L., Chiapello E., Le nouvel esprit du capitalisme, op. cit., p. 109 sq.
106 Lavigne J.-L., « Énergies douces à Castres », GO, n° 216, 28 juin 1978, p. 3.
107 Les AT-Caen, « Caen : les fanatiques du recyclage ont frappé », CB, n° 45, mai 1979, p. 16.
108 « Article sur la journée du soleil prévue pour le 23 juin 1979 », Bulletin de liaison des Amis de la Terre, n° 38, 12 septembre 1978, p. 19.
109 Ibidem.
110 Soit Péchiney-Ugine-Kulhmann, premier groupe industriel privé en France, présent aussi bien dans l’aluminium que dans le combustible nucléaire. Cf. « Jour du soleil moins cinq mois », LS, n° 62, février 1969, p. 5.
111 CAC. Fonds Présidence Valéry Giscard d’Estaing. 5/AG3-2396. Panorama de la contestation écologique, p. 137.
112 Samuel P., « À propos du Conseil Électronucléaire », Bulletin de liaison des Amis de la Terre, n° 36, 20 mars 1978, p. 2.
113 Lalonde B., « Le judo politique », LS, n° 48, 1er décembre 1977, p. 1.
114 Bernard M., « Le projet giscardien face aux contraintes du pouvoir », in Berstein S., Sirinelli J.-F. (dir.), Les années Giscard, op. cit., p. 14.
115 « Contre la technocratie », CB, n° 54, juin 1980, p. 6.
116 Gille F., « Démocratie française », CB, n° 47-48, juillet-août 1979, p. 26.
117 Lazar M., « Le réformisme des socialistes français », Histoire@politique, n° 13, janvier-avril 2011 [http://www.histoire-politique.fr/index.php?numero=13&rub=dossier&item=129], p. 3.
118 « Vieux papiers en vallée de Chevreuse », CB, n° 42, février 1979, p. 21.
119 MV. Fonds Yves Cochet. Carton Bulletin de liaison. « Réunion des délégués régionaux du RAT (21-22 février 1981) », Bulletin de liaison des Amis de la Terre, n° 57, 2 mars 1981, 81-2, p. 3.
120 Gayet-Viaud C., « Est-il devenu indécent de parler politique ? », La vie des idées.fr, 8 décembre 2010 [http://www.laviedesidees.fr/IMG/pdf/20101208_CR_Evitement.pdf], p. 3-4.
121 MP, « L’APPR », L’envert du Nord, n° 19, décembre 1979, p. 9.
122 Lagroye J., « Les processus de politisation », in Jacques Lagroye (dir.), La politisation, op. cit., p. 361.
123 Les AT-Lille, « Vers un troisième tour », GO, n° 201, 15 mars 1978, p. 6.
124 Les AT-Marseille, « Un tournant pour le mouvement écologiste », GO, n° 216, 28 juin 1978, p. 6.
125 Civel Y.-B., « Le MAN entre l’Europe et le Larzac », GO, n° 236, 15 novembre 1978, p. 6.
126 CAC. Fonds Amis de la Terre. 20050521/90. Pierre Samuel, « Aide-mémoire sur les élections européennes », Bulletin de liaison des Amis de la Terre, n° 38, 12 septembre 1978, p. 3.
127 « Sur le terrain », GO, n° 195, 2 février 1978, p. 18.
128 « Écologie : le label CIME », GO, n° 219, 19 juillet 1978, p. 15.
129 MV. Fonds Les Verts. Carton « Mouvement Écologique ». Courrier. Groupe, presse. CIME. Proposition de statuts. S. d. [1978].
130 Ibid. Compte rendu de la CIME. 13-14 mai 1978.
131 Dumontet B., « L’entité Rhône-Alpes. Entretien réalisé par Isabelle Cabut et Jean-Louis Soulié », GO, n° 208, 3 mai 1978, p. 10.
132 Arthur, « Les mouvements écologiques : oui hélas ! », GO, n° 230, 4 octobre 1978, p. 7.
133 « Européennes : écologie et confusion », LS, n° 61, janvier 1979, p. 9.
134 « Beau score écologique à La Hague », CB, n° 45, mai 1979, p. 22.
135 Le Béguec G., « La représentation proportionnelle : cent ans de controverses », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 1986/1, n° 9, p. 72.
136 « Cantonales : le PC contre l’écologie », LS, n° 64, avril 1979, p. 17.
137 Etopia. Fonds Jean Liénard. Liasse Europe. Jean Liénard, « L’internationale écologiste est née », Feuille de Chou, n° 2, octobre 1977.
138 « Écologie et liberté », CB, n° 45, mai 1979, p. 20.
139 Guionnet C., « Marginalité en politique et processus d’institutionnalisation », in Arnaud L., Guionnet C. (dir.), Les frontières du politique, op. cit., p. 265.
140 CAC. Fonds Amis de la Terre. 20050521/90. « Débat sur les élections européennes », Bulletin de liaison des Amis de la Terre, n° 45, 10 mai 1979, p. 8.
141 Découan C., « Le fond de l’air est vert ! », GO, n° 198, 23 février 1978, p. 20.
142 CAC. Fonds Amis de la Terre. 20050521/90. « Débat sur les élections européennes », Bulletin de liaison des Amis de la Terre, n° 45, 10 mai 1979, p. 8.
143 Samuel L., « Grenoble : le RAT face à l’aigle », CB, n° 46, juin 1979, p. 3.
144 Elle a été secrétaire d’État chargée de la Condition féminine (1974-1976) puis de la Culture (1976-1977).
145 Bergeroux N.-J., « La constitution de la liste de M. Servan-Schreiber risque de compliquer la compétition », Le Monde, 22 mai 1979, p. 1.
146 Fernex S., « Europe Écologie, c’est vous », LS, n° 66, juin 1979, p. 98.
147 MV. Fonds LV. Carton « Europe Écologie. Les candidats ». Liste des candidats. 15 mai 1979.
148 MV. Fonds LV. Carton « Europe Écologie. Les candidats ». Liste des candidats. 15 mai 1979.
149 Fernex S., « Europe Écologie, c’est vous », LS, n° 66, juin 1979, p. 98.
150 CAC. Fonds AT. 20050521/90. « Débat sur les européennes », Bulletin de liaison des Amis de la Terre, n° 45, 10 mai 1979, p. 10.
151 Jacob J., Histoire de l’écologie politique, op. cit., p. 20.
152 Fernex S., « L’enjeu du 10 juin : l’Assemblée doit devenir une véritable constituante. Entretien avec Patrick Jarreau », Le Monde, 7 juin 1979, p. 13.
153 MV. Fonds LV. Carton « Europe Écologie. Propagande ». « Proposition des écologistes ». Juin 1979.
154 MV. Fonds LV. Carton « Europe Écologie. La confrontation des idées ». Souscription nationale pour les élections au Parlement européen. S. d. [avant le 10 juin 1979].
155 Etopia. Fonds Europe Écologie. Liasse 1. Brochure, « L’Europe des écologistes ». S. d. [1er semestre 1979].
156 Ibidem. De telles réflexions peuvent être rapprochées du fédéralisme intégral prôné par Alexandre Marc ou encore Denis de Rougemont.
157 MV. Fonds LV. Carton « Mouvement Écologique. Courrier. Groupe. Presse ». Note « Autogestion et écologie, quelle croissance ? ». S. d. [1978].
158 Fernex S., « L’enjeu du 10 juin : l’Assemblée doit devenir une véritable constituante. Entretien avec Patrick Jarreau », Le Monde, 7 juin 1979, p. 13.
159 Etopia. Fonds Jean Liénard. Liasse Europe. Tract, « Le quart-monde interpelle l’Europe ». S. d. [avant le 10 juin 1979].
160 MV. Fonds LV. Carton « Europe Écologie Propagande ». « Proposition des écologistes ». Juin 1979.
161 MV. Fonds LV. Carton « Europe Écologie. La confrontation des idées ». Texte de la plate-forme « Santé et alimentation ». S. d. [1er semestre 1979].
162 MV. Fonds LV. Carton « Mouvement Écologique. Courrier, groupe, presse », note du Mouvement Écologique. 10 décembre 1978.
163 Keller T., Les verts allemands, op. cit., p. 25.
164 Arthur, « Les mouvements écologiques : oui hélas ! », La Gueule ouverte, n° 230, 4 octobre 1978, p. 7.
165 Guionnet C., « Marginalité en politique et processus d’institutionnalisation », in Arnaud L., Guionnet C. (dir.), Les frontières du politique, op. cit., p. 265.
166 Hatzfeld H., Faire de la politique autrement, op. cit., p. 8.
167 Etopia. Fonds Jean Liénard. Liasse Europe. Note d’Europe-Écologie, « Déontologie du candidat ». S. d. [avant juin 1979].
168 Offerlé M., « Illégitimité et légitimation du personnel politique ouvrier en France avant 1914 », Annales. ESC, 1984/4, vol. 39, p. 693.
169 Etopia. Fonds Jean Liénard. Liasse Europe. Note d’Europe-Écologie, « Déontologie du candidat ». S. d. [avant juin 1979].
170 Offerlé M., « Illégitimité et légitimation », art. cit., p. 690.
171 Manigand C., « Les Verts aux couleurs de l’Europe », in Jérôme Grévy et al., Vert et orange, op. cit., p. 209.
172 Thivolle M., « Italie, victoire de la ténacité », La Gueule ouverte, n° 265, 13 juin 1979, p. 5.
173 Les écologistes y recueillent respectivement 3,37 % et 3,32 % des voix.
174 La liste écologiste y recueille parmi ses scores les plus élevés (7,62 % dans le Bas-Rhin et surtout 10,62 % dans le Haut-Rhin).
175 Dans la Manche, Europe Écologie obtient notamment 9,32 % dans la quatrième circonscription (Valognes) et 10.05 % (Cherbourg) dans la cinquième.
176 La liste écologiste recueille 5,95 % en Isère ou encore 5,79 % en Haute-Savoie.
177 Europe-Écologie recueille 6,23 % des voix sur l’ensemble de la région.
178 La première et la deuxième circonscription de Loire-Atlantique, qui recouvrent la ville de Nantes et certaines communes périurbaines, donnent respectivement 5,63 % et 5,05 % aux écologistes qui ne recueillent que 3,98 % sur l’ensemble du département.
179 Europe Écologie réalise ses meilleurs scores dans la deuxième (5,29 %), troisième (5,39 %) et sixième circonscription (5,22 %) de Gironde, autrement dit dans la ville de Bordeaux ainsi que certaines communes périurbaines favorisées telles que Mérignac.
180 Bonnetain P., Boy D., « Electorat écologiste et risque industriel », Revue française de sciences politiques, 1995/3, n° 45, p. 457.
181 Europe Écologie recueille 4,44 % dans la première circonscription du Puy-de-Dôme, la plus urbaine du département. Ses résultats baissent à mesure que les circonscriptions deviennent plus rurales : 4,17 % dans la deuxième circonscription qui est mixte, 2,68 % dans la quatrième qui recouvre les cantons d’Ardes, d’Issoire ou de Jumeaux. La liste écologiste obtient par ailleurs son plus faible résultat dans la Creuse (2,08 %).
182 Europe Écologie obtient 6,63 % des voix sur l’ensemble du département et jusqu’à 8 % dans première circonscription qui recouvre une partie de Besançon.
183 « La liaison Rhin-Rhône. Soulagements et incertitudes », Le Monde, 26 novembre 1975, p. 12.
184 Amboise-Rendu M., « Un ouvrage qui inquiète les écologistes », Le Monde, 26 novembre 1975, p. 12.
185 MV. Fonds LV. Carton « Europe Écologie Courrier ». Lettre du CLAC à Europe Écologie. 12 juin 1979.
186 Bussi M., Freire-Diaz S., « Les nouvelles disparités des comportements électoraux français », art. cit. [http://cybergeo.revues.org/4136], consulté le 06/02/12.
187 En 1981, Michel Crépeau, député-maire de La Rochelle, obtient ainsi 17,17 % des voix dans la première circonscription de Charente Maritime et 11,94 % sur l’ensemble du département contre 2,21 % à l’échelle nationale.
188 Seuls Benoît Fabiani (n° 4) et Jean-Pierre Mortreux (n° 5) n’étaient pas candidats aux législatives en 1978.
189 Schulthess S., Solange Fernex, op. cit., p. 67. Elle a par ailleurs été candidate aux élections cantonales dans le canton de Ferette, obtenant 10,36 % des voix.
190 MV. Fonds LV. Carton « Europe Écologie. Courrier ». Lettre du CLAC à Europe Écologie. 12 juin 1979.
191 Fernex S., « Quelques réflexions et perspectives au lendemain du 10 juin », Écologie, n° 317-318, juillet-septembre 1979, p. 20.
192 Versée au trésor public, celle-ci n’est remboursée que si la liste dépasse le seuil de 5 % des voix.
193 MV. Fonds LV. Carton « Europe Écologie. Courrier ». Lettre des candidats MIDEP à Europe Écologie. S. d. [début mai 1979].
194 Sur ces questions, voir Phélippeau E., « Genèse d’une codification. L’apprentissage parlementaire de la réforme du financement de la vie politique française, 1970-1987 », Revue française de science politique, 2010/3, vol. 60, p. 529.
195 Entretien avec Jean-Luc Burgunder. 16/12/11.
196 MV. Fonds LV. Carton « Europe Écologie. Courrier ». Lettre des candidats MIDEP à Europe Écologie. S. d. [début mai 1979].
197 MV. Fonds LV. Carton « Europe Écologie. La confrontation des idées ». Lettre de Solange Fernex aux députés européens français. 16 juillet 1979.
198 « Européennes : écologie et confusion », LS, n° 61, janvier 1979, p. 9.
199 MV. Fonds LV. Carton « Europe Écologie. La confrontation des idées ». Lettre de Christian Huglo au ministre de l’Intérieur. 24 septembre 1979.
200 Phélippeau E., « Genèse d’une codification », art. cit., p. 531-532.
201 Neveu E., « Métier politique, d’une institutionnalisation à une autre », in Jacques Lagroye (dir.), La politisation, op. cit., p. 110.
202 Ibid. Lettre de Gisèle Artaud à Solange Fernex. 13 juin 1979.
203 MV. Fonds Yves Cochet. Carton « bulletin de liaison ». « Assises de Dijon des 24 et 25 novembre 1979 », Bulletin de liaison des Amis de la Terre, n° 50, 1er février 1980, p. 5.
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