Isabelle Trivisani-Moreau (sous la dir. de), Paysage politique. Le regard de l'artiste
PU de Rennes, 2011, 268 p., 16 euros
p. 196-197
Texte intégral
1Ce volume, qui est le fruit d'un colloque pluridisciplinaire, propose, avec la notion de paysage politique, une réflexion originale aux enjeux multiples. Prenant d'emblée de la hauteur, I. Trivisani-Moreau pose, comme prémisse de ce parcours en six étapes, que le regard est le dénominateur commun des trois facteurs que ce livre met en relation : le paysage, la politique, l'artiste. Elle précise le caractère propre de chaque terme : le paysage, c'est ce qui a besoin d'un regard pour exister. Il n’y a pas d’en soi du paysage alors qu'il y en a un du pays. Une approche phénoménologique analogue à celle que Michel Collot met en évidence dans La Pensée-Paysage (Actes Sud/ENSP, 2012) rappelle, de son côté, que le paysage, qui s’ouvre au regard subjectif, s’oppose au simple lieu de transit, au lieu contemporain d'errance et de parcours balisé. Il y a comme une ouverture, une respiration dans le paysage, qui est associée à ce que les Allemands appellent une Stimmung, une émotion, une affection. La politique a le rôle d'une herméneutique : elle donne du sens aux questions que pose l'environnement : « elle est donc en quête du meilleur point de vue ». Et « l'artiste enfin est un voyant qui sait découvrir derrière les choses ce que l'homme ordinaire n'a pas su percevoir ». Sans l'invention permanente de l'artiste, sans l'engagement d'une conscience inspiratrice de sens, l'objet paysage ne répondrait pas. L'intelligence de l'artiste s'exerce à la maîtrise du paysage, elle se met à son écoute.
2D'appropriation en révélation du paysage, selon les titres mêmes des sous-ensembles de ce faisceau de regards croisés (historiens de la littérature, géographes, historiens de l’art, philosophes, architectes paysagistes, critiques de cinéma), l'itinéraire proposé convie le lecteur à une belle variété d'interrogations. En dix-huit chapitres se déploie ainsi une carte du paysage : fresques encomiastiques dans l'Italie du xve siècle, récits de voyages maritimes aux xvie, xviie, xviiie siècles, constructions esthétiques et philosophiques aux xixe et xxe siècles, polémiques et dénonciations nées d'une blessure ou d'un malaise lorsque le paysage disparaît sous l'action d'aménageurs de tout poil et que meurt ainsi quelque chose d'essentiel à l’homme, inscription d'une écriture du paysage dans la conjoncture historique des xve, xvie et xviie siècles.
3La conclusion invite à une forme renouvelée de face-à-face entre les trois volets du triptyque : politique, artiste et paysage. Elle se veut provisoire, suggérant « des possibles à déployer » pour des rencontres à venir. Acceptons-en l'augure et gageons que « les fruits passeront la promesse des fleurs ».
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