La réécriture de textes de lois aux XVIIe et XVIIIe siècles. Généalogie de l’édit de Versailles de 1787
p. 299-317
Texte intégral
1Si l’histoire des protestants français est marquée principalement par trois principales lois à l’époque moderne – l’édit de Nantes de 1598, l’édit de Fontainebleau de 1685 qui révoque l’édit de Nantes, et l’édit de Versailles de 1787 –, ces textes de lois peuvent avoir une généalogie : des articles sont nouveaux, d’autres en revanche sont des reprises de textes de lois plus anciens. On ne peut rien comprendre à l’édit de Nantes si on ne connaît pas l’édit de Saint-Germain de 1562 et les autres édits de pacification qui ponctuent les sept premières guerres de religion1. Le culte de fief apparaît dès la première paix de religion d’Amboise en 15632, les places de sûreté protestantes lors de la paix de Saint-Germain de 1570 qui met fin à la troisième guerre de religion3, ou les chambres mi-parties des parlements, devant régler des conflits entre des membres des deux confessions, en 1576 à la paix de Beaulieu qui conclut la cinquième guerre de religion4. Cette question est bien connue. Plusieurs articles de l’édit de Fontainebleau de 1685 se retrouvent dans la législation antiprotestante des années 1660-1680, comme l’interdiction d’émigrer dès 16695 ou la condamnation des relaps en 16796 par exemple.
2La question peut également être posée en ce qui concerne l’édit de Versailles de novembre 1787, dénommé aussi édit de tolérance ou édit de Breteuil7. La France est alors dans un contexte prérévolutionnaire avec un premier ministre, l’archevêque de Toulouse Loménie de Brienne, qui s’est déjà préoccupé de la question protestante en France. En effet, depuis 1685 l’obligation catholique ne permet que le baptême, le mariage et la sépulture catholiques. Les protestants français qui refusent cette situation préfèrent faire baptiser leurs enfants par des pasteurs clandestins, se marier par simple contrat de mariage et éventuellement faire célébrer leur union par un pasteur, et enterrer leurs morts hors des cimetières catholiques dans des cimetières familiaux et naturellement sans sépulture catholique que, de toute façon, leur curé ne voudrait pas leur accorder. Il existe donc des Français sans état civil et l’édit de Versailles de 1787 a pour objectif avant tout de reconnaître un état civil pour les non-catholiques, et en aucune façon de permettre officiellement la liberté de conscience et la reconnaissance du culte réformé, la religion catholique, apostolique et romaine demeurant la religion d’État8. Les deux questions – d’un côté l’état civil, de l’autre les libertés de conscience et de culte – sont distinctes. Cet édit a été négocié par un des principaux conseillers et ministres de Louis XVI, Malesherbes, et un pasteur nîmois, Jean-Paul Rabaut Saint-Étienne9. Pour ce dernier, étant donné qu’il existe une tolérance – certes imparfaite – de fait du culte réformé qui s’est établie progressivement depuis les années 1760 et l’affaire Calas, le plus important est la question de l’état civil, même si aux yeux de l’opinion publique et des parlements, un mariage au Désert peut être reconnu comme légal10. Il est également souvent mis en avant l’influence autrichienne dans cet édit, dans la mesure où Joseph II a publié en 1781 un édit de tolérance reconnaissant le culte protestant dans les États habsbourgeois.
3L’objectif de cet article est d’essayer de comprendre ce qui a été repris dans des textes antérieurs concernant baptêmes, mariages, décès et sépulture. En effet, un ouvrage publié en 1788 par Claude Rulhière (1735-1791), historiographe du secrétariat d’État des Affaires étrangères et membre de l’Académie française depuis 1787, mentionne11 un mémoire de 1786 du baron de Breteuil, secrétaire d’État du roi, dans lequel est écrit :
Je n’hésiterai donc point à présenter sous les yeux du roi le projet d’un nouvel édit, pris tout entier dans le premier plan de Louis XIV, et composé presque dans sa totalité de deux arrêts du conseil d’État de ce prince, sur les baptêmes et sur les mariages, et d’une déclaration pour établir la preuve des décès. Tous trois ont pour époque le temps même de la Révocation, et furent rendus depuis le 16 juin 1685, jusqu’au 11 décembre de cette même année : l’édit révocatoire parut dans cet intervalle.
4Ainsi, au moment même où l’édit de Fontainebleau commence à peine à être appliqué, il existe déjà dans les grandes lignes des textes qui, un siècle plus tard, amélioreront le sort des protestants français prisonniers d’une situation devenue intolérable, l’absence d’état civil, sans toutefois mettre fin à la Révocation de l’édit de Nantes. Il s’agit d’essayer de comprendre les principales évolutions dans le temps de ces textes jusqu’à l’édit de Versailles de 1787, en analysant tout d’abord la question de la naissance, puis celle du mariage et enfin celle du décès et de la sépulture.
La naissance et le baptême
5Que dit l’édit de Versailles de 1787 sur la naissance et le baptême ? L’article 25 mentionne que « la naissance des enfants sera constatée soit par l’acte de leur baptême, s’ils y sont présentés, soit par la déclaration que feront devant le juge du lieu, le père et deux témoins domiciliés12 ». La loi prévoit donc deux possibilités : soit l’enfant est baptisé dans la confession catholique, soit une déclaration de naissance est faite devant le juge pour les enfants non catholiques. En 1685, l’édit de Fontainebleau rendait obligatoire le baptême catholique par son article 813. Ce texte est rappelé plusieurs fois ensuite dans la législation française, en particulier dans les déclarations du 13 décembre 169814 et du 14 mai 172415.
6Entre catholiques et protestants, il existe une reconnaissance mutuelle du sacrement du baptême. Cela signifie qu’une personne baptisée qui change de confession n’a pas besoin d’être rebaptisée, du moins théoriquement16. Dans la Confession de foi des Églises réformées, cette reconnaissance est motivée par le fait « qu’il reste encore quelque petite trace d’Église en la Papauté, et même que la substance du baptême y est demeurée, joint que l’efficace et vertu du baptême ne dépend de celui qui l’administre, nous confessons ceux qui y sont baptisés n’avoir besoin d’un second baptême […]17. Lors du concile de Trente, l’Église catholique rappelle que celui qui dit que « le baptême donné même par les hérétiques au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit, avec intention de faire ce que fait l’Église, n’est pas un véritable baptême », doit être excommunié18. Si une conversion ne nécessite pas une rebaptisation, des exemples de rebaptisations existent tout de même à chaque siècle. Au Havre, quelques jours après le massacre de protestants à Rouen en septembre 1572, 235 jeunes réformés sont rebaptisés à Notre-Dame et 65 à Saint-François19. En 1685, à Issoudun, des rebaptisations ont lieu afin de changer les prénoms de jeunes réformés20. En 1752, dans les diocèses de Nîmes et de Montpellier, des rebaptisations d’enfants baptisés au Désert sont obtenues sous la pression de soldats21.
7Dans les années qui précèdent la Révocation de l’édit de Nantes, dans certaines communautés les structures réformées réussissent à se maintenir jusqu’en octobre 1685 avec un fonctionnement à peu près normal des institutions, mais un nombre réduit se trouve cependant dans ce cas. Ces Églises accueillent ainsi pour le culte des protestants des communautés environnantes qui ont été interdites. Jean Migault de Mauzé en Poitou témoigne ainsi :
Comment notre maison était remplie de gens tous les samedis au soir pour y avoir le couvert, et non seulement la nôtre, mais aussi toutes celles des honnêtes gens, sans compter ceux qui logeaient dans des hôtelleries qui étaient en grand nombre, et toutes étaient remplies, et quelquefois la halle en logeait un grand nombre aussi22.
8En Anjou, les temples de Saumur et d’Angers sont fermés au début de l’année 1685 et pour la fête de Pâques, celui de Baugé resté ouvert accueille des protestants de l’ensemble de la province, comme le constate le procureur du roi de la sénéchaussée de Baugé qui écrit à l’intendant :
Des estrangers de la RPR qui depuis la demolition du temple de Saulmur et l’interdiction de celuy d’Angers viennent en si grand nombre au temple de nostre ville que l’on remarque que le samedy veille de Pasques il en passa plus de 400 qui venoient d’Angers pour assister le dimanche de Pasques au temple de Baugé23.
9Face à la suppression de lieux de culte dans de nombreuses localités au début des années 1680, la préoccupation du pouvoir est de permettre de donner un état civil – en particulier que le baptême des enfants soit célébré – à ces familles protestantes qui n’ont plus accès à un temple et un pasteur, si ce n’est dans un lieu éloigné de leur domicile. Cette inquiétude est exprimée par le parlement de Guyenne :
Ayant eu advis qu’il s’estoit commis en Saintonge un grand nombre de contraventions aux edits et declarations de Sa Majesté par les ministres et consistoires de ceux de la [RPR], ledit parlement auroit deputé un commissaire pour en informer, lequel ayant fait plusieurs procédures, et il se trouve qu’il n’y a plus d’exercice dans les lieux où ils faisoient leur residence. Et comme il est à craindre que les enfans qui y naissent de ladite RPR ne meurent sans baptesme par la difficulté qui se peut rencontrer à les porter en des endroitz eloignez où il y a exercice de ladite religion, à quoy estant necessaire de pourvoir […]24.
10Par l’arrêt rendu le 16 octobre 1684, le roi ordonne ainsi à l’intendant de Bordeaux, Faucon de Ris, de choisir le nombre de ministres nécessaire pour célébrer le baptême des enfants. Mais il est précisé que les ministres ne pourront faire aucun exercice de leur ministère outre la célébration des baptêmes, et les baptêmes auront lieu dans les maisons des parents. À Montpellier, un arrêt du parlement de Toulouse du 15 novembre 1682 demande la démolition du temple car les pasteurs de la ville, au nombre de cinq, sont accusés d’avoir accueilli une relapse. Un pasteur est maintenu en place à partir de l’année 1683 pour baptiser les enfants. À Montauban, l’intendant Foucault demande également la nomination d’un ministre, le culte réformé étant interdit depuis 168325. Comme l’analyse Claude Rulhière, « l’état qu’on leur donnoit alors étoit précisément celui que le clergé, avant la publication de l’édit de Nantes, avait autrefois demandé qu’on leur laissât26 ».
11C’est dans ce contexte qu’intervient l’arrêt du conseil du 16 juin 1685 qui reprend les dispositions prises séparément dans différentes généralités et qui demande en plus tous les mois un enregistrement au greffe des baptêmes célébrés. Dans la généralité d’Orléans, l’intendant Bazins de Bezons organise pour son département l’application de l’arrêté :
Il sera fait choix d’un nombre suffisant de ministres pour administrer les baptêmes aux enfants de la RPR, lesquels pères et mères seront tenus de faire porter les baptisés aux jours, lieux et heures qui seront marqués par lesdits commissaires départis. Auxquels baptêmes, les ministres ne pourront faire aucun prêche, exhortation ni exercice de ladite RPR que ce qui est marqué dans les livres de leur discipline27.
12Comme l’analyse Margreet Dieleman, l’État impose cette règle alors que d’autres projets existent à la même époque, en particulier ceux du clergé de France. En effet, au printemps 1685, l’assemblée générale du clergé propose au roi :
Qu’il sera permis aux curés, vicaires et autres ecclésiastiques des lieux où il n’y a pas d’exercice public de la RPR de baptiser les enfants de ceux de ladite Religion, et qu’à cet effet les pères et mères seront obligés d’avertir les ecclésiastiques de la naissance de leurs enfants, avec défenses à toutes personnes de donner aucun empêchement auxdits ecclésiastiques dans l’administration des baptêmes, sous les peines qu’il plaira à Sa Majesté28.
13Les raisons invoquées sont des textes protestants tirés de la Confession de foi des Églises réformées de France et de son article 28, en omettant toutefois le fait que « à cause des corruptions qui sont dans la papauté, on ne peut presenter les enfants au baptême sans se polluer » ; sont également cités les synodes nationaux qui mentionnent que le baptême catholique est valide, mais, plus surprenant, est fait référence à « un usage qui s’est desja establi en quelques endroits du Poitou et du Bearn où quelques religionnaires ont desja commencé d’appeler les ecclesiastiques pour baptiser les enfans ». Claude Rulhière mentionne enfin une note sur le cahier qui fut remit au gouvernement :
Ceux de la Religion consentiroient plus facilement à cet article, si au lieu d’être obligés de porter leurs enfants à l’Eglise, les curés les alloient baptiser chez eux, sans exiger aucun salaire ; et si on leur accordoit que leurs enfants, pour avoir été baptisés par les ecclésiastiques, ne seront pas censés catholiques, à moins qu’ils n’en fassent eux-mêmes une nouvelle déclaration après l’âge de sept ans29.
14Le gouvernement ne va pas suivre cette proposition émanant du clergé30. L’argument évoqué par Élie Benoist dans son Histoire de l’édit de Nantes, paraît tout à fait crédible :
On n’osoit à la cour ordonner que les enfans fussent portez aux curez de chaque paroisse. Il sembloit que pendant qu’il y avoit encore une ombre de l’Édit qui donnoit liberté d’exercice, on ne pouvoit ôter aux Reformez le droit de faire baptiser leurs enfants par des Ministres : et par une surprenante délicatesse de conscience, pendant qu’on detruisoit l’Édit par mille injustices eclatantes, on craignoit de donner un légitime sujet de plainte en le violant dans ce cas31.
15Quelle application est faite de cet arrêt du 16 juin 1685 ? Il faut noter les réticences des pasteurs du royaume dans la mesure où ils ne peuvent administrer que les baptêmes et sous le contrôle d’un homme de loi. Des registres sont conservés. Par exemple, dans le Poitou, cinq ministres sont nommés et ils se partagent l’ensemble de la généralité de Poitiers : un administre les baptêmes sur la région de Poitiers et Châtellerault, un autre sur Niort et Saint-Maixent, et un dernier sur Bressuire et Thouars. Des horaires précis sont fixés pour célébrer les baptêmes comme le dimanche de 10 h à 12 h à Poitiers32.
16Ainsi, à un siècle d’écart, l’arrêt du conseil du 16 juin 1685 et l’édit de Versailles de 1787 prévoient un enregistrement par un juge. Si l’arrêt du conseil de 1685 permet l’enregistrement des baptêmes, étant donné qu’il ne s’adresse qu’aux réformés dont les exercices publics sont peu à peu fermés, l’édit de 1787 concerne les naissances, prenant en compte l’ensemble des non-catholiques, certains faisant baptiser leurs enfants après la naissance – ou plus tard –, d’autres ne connaissant pas le baptême. Pour terminer, il ne faut pas s’étonner de la possibilité donnée en 1787 aux non-catholiques de faire constater la naissance par l’acte d’un baptême catholique dans la mesure où, comme nous l’avons vu, l’Église catholique propose en quelque sorte cette solution dès le printemps 1685. Et dans les faits, si entre l’édit de Fontainebleau de 1685 et l’édit de Versailles de 1787, des réformés font baptiser leur enfant par un pasteur clandestin – mais encore faut-il qu’il y en ait un –, beaucoup aussi se rendent chez le curé. Dans le cadre de la réorganisation des Églises réformées après 1715, synodes provinciaux et synodes nationaux insistent toutefois sur l’interdit du baptême catholique.
Le mariage
17L’analyse que nous pouvons faire sur le mariage sera plus brève dans la mesure où la législation concernant cet acte de l’état civil est très liée à celle du baptême33. Que prévoit l’édit de Versailles de 1787 sur le mariage des non-catholiques ? Ce sont les articles 8 à 24 de l’édit qui traitent de cette question, soit dix-sept articles sur trente-sept ? Les bans sont publiés dans le lieu du domicile des futurs mariés (article 8), soit par le curé, soit par un officier de justice (article 9), « à la porte de l’église, sans faire mention de la religion des contractants » (article 10). La déclaration de mariage est faite par le curé ou le juge qui déclareront « aux parties, au nom de la Loi, qu’elles sont unies en légitime et indissoluble mariage » (article 18). En s’adressant toujours au curé ou au juge, les couples protestants peuvent faire réhabiliter leur mariage contracté illégalement au Désert et obtenir ainsi la légitimité de leur descendance en déclarant le nombre, l’âge et le sexe de leurs enfants (articles 21 et 22).
18Pour comprendre ce texte, il faut remonter à l’arrêt du conseil du 15 septembre 1685 concernant les mariages de ceux de la RPR. Cet arrêt rappelle très fortement l’arrêt du conseil du 16 juin 1685 sur les baptêmes :
Et Sa Majesté désirant aussi donner moyen à ceux des religionnaires desdits pays qui se voudront marier de le pouvoir faire commodément. Sa Majesté a ordonné et ordonne que par les mêmes ministres qui seront établis par les intendants […] les religionnaires se pourront faire marier pourvu toutefois que ce soit en présence du principal officier de justice de la résidence où demeureront et auront été établis lesdits ministres. En la célébration desquels mariages, lesdits ministres ne pourront faire aucun prêche, exhortation ni exercice de ladite RPR que ce qui est marqué dans les livres de leur discipline, ni qu’aucuns religionnaires autres que les proches parents des personnes qui seront à marier, jusqu’au 4e degré y puissent assister34.
19Les ministres doivent apporter à la fin de chaque mois au greffe de la plus proche juridiction un certificat signé d’eux et des personnes mariées. Cet arrêt du conseil permet, comme plus tard en 1787, un enregistrement du mariage par un juge. Michel Johner analyse ainsi ce texte :
Positivement, le même arrêt peut être considéré comme étant, de la part du gouvernement, une manière habile, à la veille de la révocation de l’Édit de Nantes, de placer le mariage protestant sous la protection de l’État […]. Paradoxalement, cette sécularisation partielle, qui soustrait le mariage protestant à la juridiction catholique, le place sous la protection de la justice civile35.
20La situation entre baptême et mariage est donc assez comparable entre ces deux dates. Cependant, un mois après cet arrêt du conseil, l’édit de Fontainebleau est promulgué. Ce texte ne mentionne à aucun moment une quelconque obligation d’un mariage catholique qui serait faite aux Nouveaux Convertis. Cependant, l’édit de Fontainebleau a-t-il une incidence sur l’arrêt du 15 septembre ? L’abroge-t-il, comme le soutiennent le conseil du roi et la plupart des historiens ? Ou, si l’on suit Paul Bonifas, « l’édit révocatoire ne rend pas impossible l’exécution de l’arrêt de septembre, qui n’a pas été abrogé. Mais les protestants n’ont pas réclamé ce droit par crainte des persécutions36 ». Cependant, un siècle plus tard, Malesherbes prétend trouver dans l’arrêt du conseil du 15 septembre 1685 la preuve que Louis XIV, « tout en révoquant l’Édit de Nantes, n’avait pas voulu rejeter les protestants hors de la nation », « argument habile, susceptible de toucher Louis XVI, hésitant et timoré37 ». Claude Rulhière analyse ainsi l’absence d’article sur le mariage dans l’édit de Fontainebleau :
Le roi ne se crut pas en droit d’ordonner à des hérétiques de recevoir ce sacrement, ni à son clergé de le leur conférer ; et jamais le clergé, sous ce règne, n’osa demander au roi de déclarer que le simple contrat n’auroit pas pour eux une validité suffisante. […] Mais cet édit […] ne renferme aucun règlement par lequel le législateur se soit rétracté. Cet arrêt n’étoit ni confirmé ni abrogé38.
21Il faut ainsi attendre la déclaration du 13 décembre 169839 pour voir inscrit dans la loi la demande de se marier dans l’Église catholique. Cette obligation est reprise dans la déclaration du 14 mai 172440. Malgré ces deux textes, les réformés contractent des mariages jugés souvent illégitimes jusqu’à l’édit de Versailles de 1787 qui permet ainsi la réhabilitation de ces unions.
Le décès et la sépulture
22Que dit l’édit de Versailles de 1787 sur la déclaration de décès et l’établissement de lieux de sépultures ? Tout d’abord, pour la déclaration d’un décès, deux proches de défunt doivent se présenter au curé ou au juge qui l’inscrira dans un registre (articles 28-29). « Pourront les parents et amis de la personne décédée, accompagner le convoi, mais sans qu’il leur soit permis de chanter ni de réciter des prières à haute voix, comme aussi défendons à tous nos sujets de faire ou exciter aucun trouble, insulte ou scandale, lors et à l’occasion desdits convois […] » (article 30). Enfin, les administrateurs des villes, bourgs et villages doivent « destiner dans chacun desdits lieux un terrain convenable et décent pour l’inhumation » (article 27) ?
23Ces articles font écho à la déclaration du 11 décembre 1685 :
Qu’à l’avenir dans les lieux où ceux de la RPR viendront à décéder, les deux plus proches parents de la personne décédée, et à défaut de parents, les deux plus proches voisins, seront tenus d’en faire leur déclaration à nos juges royaux, s’il y en a dans lesdits lieux, ou aux juges des seigneurs, et de signer sur le registre qui en sera ainsi tenu […].
24Cette déclaration de décès donne lieu à l’établissement d’un certificat de décès, non d’un permis d’inhumer. Il ne s’agit donc pas en 1685 de lutter, comme plus tard, contre la clandestinité des sépultures, mais de permettre aux protestants d’obtenir à titre provisoire un substitut aux registres de sépultures tenus initialement par leurs pasteurs. C’est ainsi la première procédure laïque d’enregistrement des sépultures41. Ce texte a été très peu appliqué, principalement en raison de la dureté de la déclaration du 29 avril 1686 contre les relaps qui n’incite pas les protestants à se rapprocher des autorités judiciaires42. Sophie Molinier-Potencier constate que cette déclaration a été mal suivie et elle n’a retrouvé que peu d’actes d’application43. D’autre part, elle fait le constat de certaines interprétations de la loi, comme la pratique que l’on retrouve de demander à un notaire d’établir un certificat de décès, ou encore en Normandie, au moment des procès contre les cadavres, une demande peut être faite d’un permis d’inhumer en application de la déclaration de 1685. Or la déclaration de 1685 concerne les protestants, celle de 1686 les Nouveaux Convertis, ce qui constitue un détournement de la déclaration de 168544.
25Parallèlement à cette déclaration du 11 décembre 1685, la législation connait une première évolution à l’encontre des protestants étrangers résidant en France. Le 20 juillet 1720, un premier arrêt du conseil permet aux étrangers résidant à Paris d’obtenir un permis d’inhumer et un cimetière particulier, à la suite des négociations du traité d’Utrecht de 1713 avec l’Angleterre et du traité de commerce de 1716 avec les villes hanséatiques :
Les étrangers qui séjournent à Paris étant en plus grand nombre qu’en aucun autre lieu du royaume, il est également nécessaire et conforme au bon ordre d’y fixer un lieu pour inhumer les protestants qui y décèdent, et d’y faire un registre public où leur trépas soit authentiquement attesté pour la sûreté des familles. [...] Il sera désigné incessamment un emplacement d’une étendue convenable pour l’inhumation des étrangers protestants qui décèderont en ladite ville et banlieue […], que ledit emplacement sera clos de murs et qu’il y sera établi un concierge qui en aura la clef et sera tenu de l’entretenir décemment […]. Que ce lieu ne pourra servir à aucun autre usage qu’à l’inhumation des étrangers qui décèderont dans ladite religion et qu’à cet effet le concierge ne pourra permettre l’entrée sans la permission, expresse et par écrit, dudit sieur Lieutenant général de Police45.
26En 1726, un nouvel arrêt du conseil est rendu pour les villes de Marseille, Bayonne, Bordeaux, La Rochelle, Nantes, Le Havre, Rouen et Saint Valéry « et autres ports fréquentés par les étrangers de la RPR ». Les villes de l’intérieur du royaume s’en trouvent donc exclues, mais un cimetière est mentionné à Lyon pour les étrangers dès 171946.
27La deuxième évolution intervient avec la déclaration du 9 avril 1736 sur la tenue des registres paroissiaux. L’article XIII concerne – sans les nommer – les protestants :
Ne seront pareillement inhumés ceux auxquels la sépulture ecclésiastique ne sera pas accordée, qu’en vertu d’une ordonnance du juge de police des lieux, rendue sur les conclusions de notre procureur, ou de celui des hauts-justiciers ; dans laquelle ordonnance sera fait mention du jour du décès, & du nom & qualité de la personne décédée.
28La déclaration du 11 décembre avait déjà confié aux juges les actes de décès protestants : l’article XIII réitère cette fonction, non plus pour pallier la disparition des registres protestants mais pour confier aux juges le soin de délivrer les permis d’inhumer. Cette déclaration de 1736 permet donc de faire un trait d’union entre la déclaration de 1685 et l’édit de 1787.
29Concernant les cimetières, outre les arrêts du conseil de 1720 et 1726 au sujet des cimetières pour les protestants étrangers, la comparaison des articles de l’édit de Versailles de 1787 doit être réalisée avec l’édit de Nantes, deux siècles plus tôt47. Trois articles nous intéressent plus particulièrement. Par l’article 28 :
Ordonnons que l’enterrement des morts de ceux de ladite religion pour toutes les villes et lieux de ce royaume, qu’il leur sera pourvu promptement en chacun lieu par nos officiers et magistrats et par les commissaires, d’une place la plus commode que faire se pourra. Et les cimetières qu’ils avaient par ci-devant et dont ils ont été privés à l’occasion des troubles leur seront rendus, sinon qu’ils se trouvassent à présent occupés par édifices et bâtiments, de quelque qualité qu’ils soient, auquel cas leur en sera pourvu d’autres gratuitement.
30Il est complété par l’article 29 « enjoignant très expressément à nosdits officiers de tenir la main à ce qu’auxdits enterrements il ne se commette aucun scandale […] » et part l’article 45 des particuliers qui précise :
En cas que les officiers de Sa Majesté ne pourvoient de lieux commodes pour les sépultures de ceux de ladite religion dans le temps porté par l’Édit […], sera loisible à ceux de ladite religion d’enterrer les morts dans les cimetières des catholiques aux villes et lieux où ils sont en possession de le faire jusqu’à ce qui leur en soit pourvu […]48.
31Plusieurs remarques peuvent être faites. Tout d’abord, les similitudes sont fortes entre les deux textes de 1598 et de 1787 : un terrain doit être fourni aux communautés réformées ou tout « scandale » doit être évité. Mais, en 1787, les réformés ne peuvent récupérer un terrain qui avait été avant 1685 leur cimetière et il n’est pas non plus prévu d’enterrer les protestants dans les cimetières catholiques si aucun terrain ne leur est attribué. Enfin, si, dans de nombreuses familles protestantes du Désert, ce sont les cimetières familiaux qui ont pris le dessus, dans certaines communautés il existe déjà des cimetières officiels ou officieux pour enterrer les réformés, par exemple les cimetières pour étrangers. En 1783, à Rouen, quatorze familles ont présenté ensemble une requête au parlement de Rouen pour être autorisées d’acheter un terrain pour leur sépulture : un arrêt du 16 janvier 1784 les y autorise à condition que ce soit à l’écart de la ville et des faubourgs et qu’ils fournissent un relevé de leurs sépultures pendant six ans. En 1785, un autre arrêt leur enjoint d’acheter un terrain de 200 toises carrées et de l’enclore. Un terrain est acheté 400 livres au lieu-dit le Champ des oiseaux dans le faubourg Bouvreuil. Les parlements ont ainsi pu anticiper la loi et contraindre la législation royale à évoluer49.
32Pour conclure, il est indéniable que les différentes mesures prises en 1685 sur les déclarations de baptêmes, de mariages et de décès permettent de comprendre l’histoire de certains articles de l’édit de Versailles de 1787. Un des artisans de cette loi, Jean-Paul Rabaut Saint-Étienne en a aussi compris toute l’importance – comme Malesherbes, Breteuil ou Rulhière – quand il publie en 1788 la troisième édition du Vieux Cévenol, après celles de 1779 et de 178450. Il veut ainsi mieux montrer l’inhumanité de toute la législation à l’encontre des protestants, quand il évoque par exemple la mort de la mère d’Ambroise Borély, blessée à la suite de violences lors d’une assemblée du Désert. Avant de mourir, elle dit à son fils : « Préservez mes os de la persécution, en ensevelissant mon corps dans un lieu écarté51 ». Dans un autre chapitre, alors qu’Ambroise Borély vient de perdre sa femme, morte après un accouchement, les parents de l’épouse défunte refusent de payer la dot dans la mesure où ils n’ont pas été mariés « en face d’église ». Ambroise conteste alors les faits devant un huissier : « Il [Borély] soutenait que le consentement des parents et des parties fait le mariage, que le contrat en constate les conditions, que la cohabitation publique en fait notoriété, que les enfants qui en naissent resserrent ces liens précieux auxquels ils doivent l’existence, qu’ils sont légitimes parce que le pacte est réel et que les conditions en ont été remplies » ; mais il perd son procès52. Et il n’est pas étonnant que l’ouvrage se termine ainsi :
Parvenu à l’âge de cent trois ans, il [Borély] a toujours conservé le libre usage de sa mémoire, où étaient gravées toutes les déclarations du roi, et la longue liste de maux qu’elles lui avaient occasionnés. L’on dit pourtant que son dernier soupir s’est porté sur la France, et qu’il est mort en prononçant les noms de Henri IV et de Louis XVI53.
Bibliographie
Texte(s) d’étude / Source(s) :
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Migault, J., Journal de Jean Migault ou malheurs d’une famille protestante du Poitou victime de la révocation de l’édit de Nantes (1682-1689), présenté par Y. Krumenacker, Paris, Les Éditions de Paris, 1995.
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Rulhière, C., Éclaircissements historiques sur les causes de la révolution de l’édit de Nantes et sur l’état des protestants en France, depuis le commencement du règne de Louis XIV jusqu’à nos jours : tirés des différentes archives du gouvernement, Paris, 1788.
Études critiques :
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Notes de bas de page
1 Sur l’édit de Nantes, voir Grandjean, M. et Roussel, B. (dir.), Coexister dans l’intolérance : l’édit de Nantes (1598), Genève, Labor et Fides, 1998 ; Garrisson, J., L’Édit de Nantes, Paris, Fayard, 1998.
2 Article 1 de l’édit d’Amboise de 1563 : « Que doresnavant tous gentilzhommes qui sont barons, chastellains, haultz justiciers et seigneurs tenans plain fief de haubert et chacun d’eulx puissent vivre en leurs maisons, esquelles ilz habiteront, en liberté de leurs consciences et exercice de la Religion qu’ilz disent reformée avec leurs familles et subjectz, qui librement et sans aucune contraincte s’y vouldront trouver […] »
3 Ce sont dans cet édit les places de La Rochelle, Montauban, Cognac et La Charité qui sont choisies en 1570 (article 39 de l’édit de Saint-Germain).
4 Des chambres mi-parties sont prévues pour les parlements de Paris, Toulouse, Grenoble, Bordeaux, Aix, Dijon, Rouen et Rennes (articles 18, 19 et 20 de l’édit de Beaulieu).
5 Édit du mois d’août 1669, « à peine de confiscation de corps et de biens, et d’être censez et réputez étrangers, sans qu’ils puissent être cy-après rétablis, ny réhabilitez, ny leurs enfans naturalisez, pour quelque cause que ce soit ».
6 Déclaration du roi du 13 mars 1679 portant peine d’amende honorable, de bannissement du royaume et de confiscation de biens pour les relaps.
7 Le baron de Breteuil (1733-1807) est secrétaire d’État à la Maison du Roi de 1783 à 1788. Sur ce nom d’édit de tolérance, Mallet du Pan note déjà en janvier 1788 : « Le plus grand nombre des habitants de Paris est contre l’édit de tolérance. De toutes parts, on entend à ce sujet des propos du temps de la Ligue. Il y a même une timidité dans les esprits et le gouvernement telle, qu’on regarde comme une grande concession, une grande indulgence, d’accorder aux calvinistes leurs baptêmes et mariages » ; Mémoires et correspondance de Mallet du Pan pour servir à l’histoire de la Révolution Française, Paris, 1854, tome 1, p. 136-137.
8 Voir pour une première approche, Boisson, D. et Daussy, H., Les Protestants dans la France moderne, Paris, Belin, 2006 ; Cabanel, P., Histoire des protestants en France, xvie-xxie siècles, Paris, Fayard, 2012.
9 Voir sur la question de l’édit de tolérance et des négociations, Actes des Journées d’études sur l’Édit de 1787, Encrevé, A. et Lauriol, J. (dir.), Bulletin de la Société de l’Histoire du Protestantisme Français, t. 134, no 2, 1988 ; Bost, H., « Vers la tolérance ou vers l’édit (1750-1787) », Ces Messieurs de la RPR. Histoires et écritures de huguenots, xviie-xviiie siècles, Paris, Honoré Champion, 2001, p. 365-376 ; Borello, C., Du Désert au Royaume. Parole publique et écriture protestante (1765-1788), édition critique du Vieux Cévenol et de sermons de Rabaut Saint-Étienne, Paris, Honoré Champion, 2013 ; Grosclaude, P., Malesherbes, témoin et interprète de son temps, Paris, Fischbacher, 1961.
10 Carbonnier, J., « L’amour sans la loi », BSHPF, 1979, p. 47-75.
11 Éclaircissements historiques sur les causes de la révocation de l’édit de Nantes et sur l’état des protestants en France, depuis le commencement du règne de Louis XIV jusqu’à nos jours : tirés des différentes archives du gouvernement, Paris, 1788, 2e partie, p. 77.
12 Le texte de l’édit de Versailles de 1787 est reproduit dans Encrevé, A. et Lauriol, C. (dir.), « Actes des Journées d’études sur l’Édit de 1787 », op. cit., p. 179-186. Dans le même ouvrage est également publié le texte pour les colonies, p. 456-471.
13 « À l’égard des enfants qui naîtront de ceux de ladite RPR, voulons qu’ils soient dorénavant baptisés par les curés des paroisses. Enjoignons aux pères et mères de les envoyer aux églises à cet effet-là, à peine de 500 livres d’amende, et de plus grande s’il y échet […] ». Pilatte, L., Édits, déclarations et arrests concernans la Religion P. Réformée (1662-1751), Paris 1885, p. 243-244.
14 Article 8 : « Enjoignons à tous nos sujets, et notamment à ceux qui sont nouvellement réunis à l’Église de faire baptiser leurs enfants dans les églises des paroisses où ils demeurent dans les 24 heures après leur naissance […] ». Les sages-femmes doivent avertir les curés de la naissance de ces enfants. Pilatte, L., Édits, déclarations et arrests, op. cit., p. 375.
15 Article 3 : « Ordonnons à tous nos sujets, et notamment à ceux qui ont ci-devant professé la RPR, ou qui sont nés de parents qui en ont fait la profession de faire baptiser leurs enfants dans les églises des paroisses où ils demeurent dans les 24 heures après leur naissance […] ». Les sages-femmes sont de nouveau sollicitées. Pilatte, L., Édits, déclarations et arrests concernans, op. cit., p. 537.
16 Wanegffelen, T., « La reconnaissance mutuelle du baptême entre confessions catholique et réformée au xvie siècle », Études théologiques et religieuses, 69, 1994, p. 185-201. Pour l’ensemble de cette partie, je m’appuie également sur les recherches de Margreet Dieleman, Le Baptême dans les Églises réformées de France (vers 1555-1685) : un enjeu confessionnel. L’exemple des provinces synodales de l’Ouest, thèse de doctorat d’Histoire, université d’Angers, 2018.
17 Article 28. Confessions et catéchismes de la foi réformée, Fatio, O. (dir.), Genève, Labor et fides, 1986, p. 124.
18 Le Saint Concile de Trente œcumenique et general, celebré sous Paul III, Jules III et Pie IV, souverains pontifes […], Paris, Sébastien Mabre-Cramoisy, 1674, p. 81, VIIe session, du baptême, canon IV.
19 Daireaux, L., « Réduire les huguenots ». Protestants et pouvoirs en Normandie au xviie siècle, Paris, Honoré Champion, 2010, p. 88.
20 Boisson, D., Les Protestants de l’ancien colloque du Berry de la révocation de l’édit de Nantes à la fin de l’Ancien Régime (1679-1789), ou l’inégale résistance de minorités religieuses, Paris, Honoré Champion, 2000, p. 156.
21 Gaussent, J.-C., « La campagne de rebaptisations de 1752 dans les diocèses de Nîmes et de Montpellier », BSHPF, 1999, p. 729-749.
22 Cité par Dieleman, M., Le Baptême dans les Églises réformées de France, op. cit., p. 691. Migault, J., Journal de Jean Migault ou malheurs d’une famille protestante du Poitou victime de la révocation de l’édit de Nantes (1682-1689), présenté par Y. Krumenacker, Paris, Les Éditions de Paris, 1995, p. 56.
23 Cité par Dieleman, M., Le Baptême dans les Églises réformées de France, op. cit., p. 693.
24 Ibid., p. 701.
25 Ibid., p. 696-699. Voir Rulhière, C., Éclaircissements historiques sur les causes de la révocation de l’édit de Nantes, op. cit., 1re partie, p. 270-273.
26 Rulhière, C., Éclaircissements historiques sur les causes de la révocation de l’édit de Nantes, op. cit., p. 271.
27 Arch. dép. Loiret, 2 J 1883 Fonds Jarry. Cité par Boisson, D., Les Protestants de l’ancien colloque du Berry, op. cit., p. 144.
28 Cité par Dieleman, M., Le Baptême dans les Églises réformées de France, op. cit., p. 710.
29 Rulhière, C., Éclaircissements historiques sur les causes de la révocation de l’édit de Nantes, op. cit., p. 273-274.
30 Cité par Dieleman, M., Le Baptême dans les Églises réformées de France, op. cit., p. 711-713. Voir Rulhière, C., Éclaircissements historiques sur les causes de la révocation de l’édit de Nantes, op. cit., p. 273-274.
31 Cité par Dieleman, M., Le Baptême dans les Églises réformées de France, op. cit., p. 714.
32 Ibid., p. 735-751. Cet arrêt du conseil du 16 juin 1685 est d’autant plus justifié qu’une déclaration du 25 juillet 1685, proposée par l’assemblée du clergé, précise « que dorénavant aucunes personnes faisant profession de la RPR ne puissent aller à l’exercice aux temples qui se trouveront dans l’étendue des bailliages et sénéchaussées où elles n’ont pas leur principal domicile, ni fait leur demeure ordinaire pendant un an en entier sans discontinuation » : le motif est que « cette affluence de peuple cause des attroupements dans les lieux où l’exercice est permis, du scandale dans ceux où ils passent, par les irrévérences qu’ils commettent devant les églises, et des querelles avec les catholiques, par leur marche tant de nuit que de jour, pendant laquelle ils chantent leurs psaumes à haute voix » (Pilatte, L., Édits, déclarations et arrests, op. cit., p. 220-221). Voir Rulhière, C., Éclaircissements historiques sur les causes de la révocation de l’édit de Nantes, op. cit., p. 275.
33 Parmi l’importante bibliographie concernant le mariage protestant, notons tout particulièrement : Anquez, L., De l’état civil des réformés de France, Paris, 1868 ; Léonard, E.-G., « Le problème du mariage civil et les protestants français au xviiie siècle », Revue de théologie et d’action évangéliques, 1942, p. 241-299 ; Bels, P., Le Mariage des protestants français jusqu’en 1685, fondements doctrinaux et pratique juridique, Paris, 1968 ; Bonifas, E., Le Mariage des protestants depuis la Réforme jusqu’à 1789 ; étude historique et juridique, Paris, 1901 ; Grosclaude, P., Malesherbes, op. cit. ; Taillandier, P., Le Mariage des protestants français sous l’Ancien Régime, Clermont-Ferrand, 1919 ; Maire, C., L’Église dans l’État. Politique et religion dans la France des Lumières, Paris, Gallimard, 2019, p. 267-316 ; Johner, M., Les Protestants de France et la sécularisation du mariage à la veille de la Révolution française (1784-1789). Rabaut Saint-Étienne et l’édit de tolérance de 1787, thèse de doctorat, EPHE, 2013.
34 Pilatte, L., Édits, déclarations et arrests, op. cit., p. 235-237. Voir Rulhière, C., Éclaircissements historiques sur les causes de la révocation de l’édit de Nantes, op. cit., p. 276-278.
35 Johner, M., Les Protestants de France et la sécularisation du mariage, op. cit., p. 22.
36 Ibid., p. 28.
37 Grosclaude, P., Malesherbes, op. cit., p. 585.
38 Rulhière, C., Éclaircissements historiques sur les causes de la révocation de l’édit de Nantes, op. cit., p. 336.
39 Article 7 : « Enjoignons à nosdits sujets réunis à l’Église d’observer dans les mariages qu’ils voudront contracter les solennités prescrites par les saints canons, et notamment ceux du dernier concile, et par nos ordonnances […] ». Pilatte, L., Édits, déclarations et arrests, op. cit., p. 375.
40 Ibid., p. 546-547.
41 Sur cette question, voir Molinier-Potencier, S., La Sépulture des protestants de l’édit de Fontainebleau à l’« Édit de tolérance » (1685-1792), thèse de droit, université Paris II, 1996.
42 Boisson, D., « La justice royale et les procès contre les cadavres aux xviie et xviiie siècles », in D. Boisson et Y. Krumenacker, Justice et protestantisme, Lyon, Chrétiens et Sociétés, Documents et Mémoires no 14, 2011, p. 113-127. Selon cette déclaration, les protestants relaps sont condamnés, les hommes à faire amende honorable et aux galères à perpétuité avec confiscation des biens, et les femmes à faire amende honorable et à être enfermées, avec confiscation de leurs biens. Ceux qui meurent relaps, un procès sera fait aux cadavres ou à leur mémoire, et les corps seront trainés sur la claie.
43 Molinier-Potencier, S., La Sépulture des protestants, op. cit., p. 105-108. Un acte a été retrouvé à Florac en 1728, 140 à Anduze entre 1726 et 1736 (avec un seul témoin qui fait la déclaration au juge du marquisat, un transport du juge sur les lieux où se trouve le cadavre, ce qui n’est pas demandé par la loi, et l’audition de deux témoins), mais aussi à Castres entre 1723 et 1736, à Montvilliers en Normandie (113 actes entre 1702 et 1721) et Meaux (14 actes entre 1707 à 1733).
44 Ibid., p. 108-111.
45 Ibid., p. 119-126.
46 Ibid., p. 127-139.
47 Le premier édit de pacification qui prévoit l’attribution d’un cimetière aux protestants est l’édit de Boulogne de 1573 : « Enjoignons à nos baillis, sénéchaux, juges ordinaires ou subalternes, chacun en leur ressort, de pourvoir à l’enterrement des morts de ceux de ladite RPR le plus commodément que faire se pourra » (article 6). L’article 6 de l’édit de Beaulieu de 1576 prévoit : « Ordonnons que pour l’enterrement des morts de ceux de ladite religion étant en notre dite ville et faubourgs de Paris, leur sera baillé le cimetière de la Trinité. Et pour toutes les autres villes et lieu sera pourvu promptement par nos officiers et magistrats, en chacun lieu d’une place la plus commode que faire se pourra, ce que nous enjoignons à nosdits officiers de faire, et tenir la main qu’auxdits enterrements ne se commette aucun scandale. »
48 Pour ces trois articles, voir L’Édit de Nantes, présenté et annoté par J. Garrisson, Biarritz, Atlantica, 1997, p. 39, 40 et 86.
49 Arch. dép. Seine-Maritime, C 2209.
50 Borello, C., Du Désert au Royaume. Parole publique et écriture protestante (1765-1788), édition critique du Vieux Cévenol et de sermons de Rabaut Saint-Étienne, Paris, Honoré Champion, 2013.
51 Ibid., p. 179.
52 Ibid., p. 212.
53 Borello, C., Du Désert au royaume…, p. 217.
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