1 Comme c’est le cas dans La distinction (Bourdieu, 1979) pour ne prendre qu’un exemple parmi beaucoup d’autres cédant à une même imprécision ou négligence.
2 Cf. Verret M., Chevilles ouvrières, Paris, Éd. de l’atelier, 1995.
3 Un exemple peut être tiré de la manière dont Pierre Bourdieu procède dans le regroupement des catégories socioprofessionnelles définissant les classes populaires. En effet, celles-ci rassemblent les catégories d’employés et d’ouvriers dans Les Héritiers mais les ouvriers seuls composent les dites classes dans La Distinction (les employés étant transférés dans les classes moyennes). Outre le différentiel de poids statistique des classes populaires induit par ces deux modes de regroupement, leur composition interne et par conséquent l’analyse sociologique s’en trouvent sensiblement changées notamment sous le critère de sexe (mais aussi, par corrélation, sous le critère de l’âge, du niveau d’étude et du taux d’urbanisation). Autrement dit, les variations si séduisantes et si cohérentes (trop ?) sur le thème de la forme et de la substance, des « goûts de nécessité » des classes populaires, du raffinement esthétique et des « goûts de liberté » des fractions supérieures de la « bourgeoisie », épousent une catégorisation qui semble construite en concordance avec la théorie des habitus de classe (et secondairement avec l’image que l’auteur se fait des propriétés attachées à ces différentes classes). Pour une analyse détaillée, cf. Gruel L., Pierre Bourdieu, illusionniste, Rennes, PUR, 2005.
4 Il importe de souligner que la dot scolaire parentale compte davantage, sous le rapport à l’école, que la position sociale (l’approche par les CSP étant un indicateur par défaut), d’autant que la correspondance entre le niveau d’études et le niveau de qualification des emplois s’est considérablement relâchée et masque l’enjeu véritable du capital scolaire détenu par le père et/ou la mère.
5 Alain Dérosières et Laurent Thévenot notent que « les processus cognitifs de catégorisation ne peuvent pas, lorsqu’il s’agit de catégorisation sociale, être disjoints des procédures et principes de représentation politique », in Les catégories socioprofessionnelles, Paris, La Découverte, 1996, p. 63.
6 Marx qui, rappelons-le, relie directement la puissance matérielle dominante avec la puissance spirituelle dominante et fait de la pensée des groupes dominants la pensée dominante.
7 Face à la difficulté de codifier sociologiquement et de produire des identités stables, Michel Verret propose une grille « abstraite » visant à cerner les contours du populaire et à le chiffrer, sous quatre angles : moyens d’exister (économique), moyens de pouvoir (politique), moyens de savoir (scolarité) et enfin, moyens de valoir (social). Les « peuples » ainsi dénombrés changent de façon absolue selon les critères retenus et de façon relative suivant leur rapport aux autres groupes de la population totale. Cf. Verret M., op. cit.
8 Comme le montre l’augmentation régulière des codifications dans le poste « autres » des nomenclatures de catégories socioprofessionnelles de l’INSEE, pour ne rien dire des évolutions portant sur les statuts et les contrats précaires ou de la progression de l’intérim dans les emplois peu ou non qualifiés.
9 Le secteur industriel représentait 44 % de la main-d’œuvre en 1968 mais 28 % seulement vingt ans plus tard.
10 En effet, à la lumière des données actuelles, 82 % environ des ouvriers actifs sont des hommes, et inversement pour la population des employés composée à 83 % environ de femmes. Source : Femmes et hommes. Regards sur la parité, INSEE Éditions, 2004.
11 Dans sa chronique d’une lutte menée face à la menace d’une fermeture d’usine, Jean-Pierre Levaray, ouvrier et écrivain (comme il se définit lui-même), dit à quel point le fait d’être dans ces moments-là, procure à chacun « l’impression de se réapproprier sa vie », in Classe fantôme, Le reflet, 2003, p. 25.
12 C’est le sens des analyses de Jean-Pierre Terrail qui, au travers d’histoires de transfuges, fait apparaître des processus de réussite scolaire sans reniement de classe et de ses origines. Ils procèdent soit d’une articulation du « je » et du « nous » (lorsque l’émancipation de classe sociale implique la réussite scolaire individuelle) soit, plus radicalement, d’une mise à distance visant à s’affranchir d’un conformisme de groupe et d’un déterminisme social. In : Destins ouvriers. La fin d’une classe ?, Paris, PUF, 1990.
13 Bien sûr, les techniques d’échantillonnage aléatoire permettent de garantir l’équiprobabilité de tirage des éléments mais elles supposent des conditions rarement réunies (disposer du fichier de la population mère, couverture géographique du territoire…) et n’évitent pas l’écueil des biais induits par certaines fractions de non-répondants. Les hommes ouvriers font ainsi partie des groupes les moins enquêtés et rarement représentés comme ils le devraient.