12. Entre droits de l’homme et droits sociaux : l’individu abstrait et la personne concrète
p. 151-163
Texte intégral
1« Développement », « Personnalité/identité », « Fatigue/stress/épanouisse ment », « Confiance en soi/affirmation de soi », « Gestion des émotions », « performance/efficacité », « Amour », « Couple », « Sexualité », « Bonheur », « Psychologie », « Rapport aux autres » – telles sont les différentes rubriques en lesquelles est organisée la section « sciences humaines » de la librairie Payot qui accueille le voyageur débarquant à la gare de Metz. La fréquentation des bookstores de différents campus nord-américains m’a enseigné que la classification adoptée dans la disposition des livres sur les rayons est loin d’être innocente. Les modifications que l’on constate au fil des visites sont significatives des déplacements qui s’opèrent en sciences humaines aussi bien dans la délimitation des champs de recherche que dans leur dénomination : de la linguistique aux cognitive sciences, de l’histoire sociale aux gender studies.
2En sciences sociales désormais, le principal souci semble être celui du développement de la personne, de l’épanouissement du soi, dans la satisfaction émotionnelle d’aspirations personnelles et dans la recherche de l’efficacité par la performance individuelle. Ce permanent souci de soi appelle une psychologie du self davantage préoccupée par l’autonomie de la personne vis-à-vis de l’extérieur que par l’investigation dans les profondeurs de l’inconscient ou par la complexité des rapports sociaux avec l’environnement écologique et humain (l’intitulé du rayon de librairie « rapport aux autres » ne mérite que le singulier…).
L’individu néo-libéral dans la concurrence mondialisée
3Est-ce à dire que, du moins sur les rayons des librairies francophones, l’individualisme méthodologique a désormais assuré son triomphe sur le holisme méthodologique ? Est-ce à dire que, du point de vue sociologique, les individus doivent être considérés dans leurs singularités respectives comme les atomes de base fondant les relations sociales et que la société en tant que tout n’est finalement que la somme des individus qui la composent ? L’individu serait-il à situer, avec son soi, en aval du lien social (Wieviorka, 2008) ?
4Il est vrai que le monde de flexibilité individualisée et de mobilité concurrentielle prônées par l’idéologie contemporaine du libéralisme de marché (avec ses effets de « parcellitarisme » : cf. Caillé, 2006) a profondément modifié le concept de l’individu libéral né au Siècle des Lumières : un individu émancipé des pouvoirs féodaux de la monarchie et de la tutelle de l’Église ; un individu constitué en tant que personne autonome ; un individu qui, affranchi de pouvoirs transcendants, peut exercer dans le libre-arbitre et bientôt dans la conscience de soi une raison que partagent tout les êtres humains ; un individu dont l’autonomie peut s’exercer parce qu’elle est garantie par un certain nombre de droits civils et politiques imprescriptibles et universellement partagés ; un individu abstrait, égal en droit et en raison.
5Or, en s’appuyant sur les puissants moyens médiatiques offerts par les nouvelles technologies de la communication et par les profits financiers correspondants, l’idéologie du libéralisme économique a conduit à un remarquable tour de force : elle s’est imposée de manière totalitaire tout en favorisant le « parcellitarisme ». Portée par une série d’institutions internationales d’influence mondiale (OMC, FMI, BM, Commission européenne, mais aussi gouvernement étatsunien sans parler des réunions en principe informelles du G 8, du G 20 ou du WEF), la pensée unique du « néo-libéralisme » est parvenue à transformer des libertés civiles fondées sur la raison en libertés individuelles essentiellement axées sur la propriété privée, le profit financier, la consommation dans une société productiviste. Les ajustements structurels et autres mesures de convergence se sont avérés être des moyens contraignants pour imposer, par une nouvelle forme de colonialisme occidental, l’application des principes de l’économie de marché libéralisée selon l’idéologie du développement individuel des ressources propres à chaque être singulier1.
6Avec sa prétention à l’universalisme par la naturalisation implicite des lois du marché, le libéralisme économique totalitaire présuppose en effet une anthropologie, une conception de l’homme. Dans le « monde libre » tout être humain serait appelé à exploiter lui-même, dans la liberté individuelle, les capacités dont il dispose en quelque sorte par nature, pour le bénéfice d’une société entièrement ouverte2 ; seul le développement économique basé sur le gain serait susceptible d’assurer les bases individuelles de la vie en société. Le contrat social est implicitement réduit à la seule reconnaissance des règles de la concurrence (du marché) pour la réalisation de soi dans une « excellence » assise sur des choix autonomes et personnels. Mais par l’effacement des libertés fondamentales pour prôner la seule liberté économique, par la libéralisation du droit social ressenti comme un ensemble de contraintes imposées par un État dont on s’emploie à dénigrer l’action, par la marchandisation généralisée des réseaux de relations sociales, les individus égaux en droits deviennent les victimes d’inégalités matérielles qui provoquent déstabilisation identitaire, dissolution du lien social, assujettissements variés, discriminations de tout type, et finalement violences guerrières et migrations.
7De manière très concrète, l’introduction des principes du « management » économique fondé sur la règle de l’épanouissement de la personne et la règle du profit financier individuel dans l’organisation du travail salarié et dans celle des institutions sociales a des conséquences humaines considérables. Que l’on songe simplement à la diffusion du système de rétribution du travail productif comme « salaire au mérite », à la promotion d’un système de retraites par capitalisation en lieu et place d’un système fondé sur la redistribution des cotisations, ou à l’introduction d’un système fiscal de flat tax. Dans un cas comme dans les autres, il s’agit de favoriser ce qui est considéré comme des mérites individuels et d’en consacrer l’épanouissement : qui gagne davantage en raison de ses qualités et prestations personnelles méritera, individuellement, une retraite matériellement plus confortable tout en payant, proportionnellement, moins d’impôts. Les conséquences financières et sociales de mesures impliquant la marchandisation des services et effaçant tout principe de solidarité se lisent dans les statistiques publiées depuis l’introduction des mesures de libéralisation du commerce et des services : individus ou nations, les plus pauvres ne cessent de s’appauvrir tandis que les plus riches s’enrichissent de manière exponentielle (avec toutes les discriminations, les conflits et les mouvements migratoires que cela entraîne au niveau désormais mondial3). Par ailleurs, la réduction de l’assiette fiscale de l’État entraîne une dégradation des services publics tout en vidant le politique de sa substance. En régime de démocratie libérale, le débat politique égalitaire a cédé la place aux formes les plus insidieuses du populisme et de la démagogie.
8Mais en entretenant l’espoir du développement personnel privé et de la réussite entrepreneuriale individuelle en dehors de tout appui social, la pensée du libéralisme économique parvient à effacer l’impact concret de la publication des chiffres sur l’enrichissement matériel et de la dégradation des institutions politiques et démocratiques. L’une des revendications, d’ailleurs ambiguë, du mouvement de mai 1968 portait sur l’émancipation émotionnelle, la libération sexuelle et l’affirmation politique de l’individu. Dans le déploiement, dès les années quatre-vingt, de l’idéologie du libéralisme dans sa version la plus strictement économique, cette revendication de la singularité libératrice s’est transformée en une recherche du profit personnel dans un système de concurrence soumis aux « lois » du marché ; ceci d’ailleurs en contradiction totale avec l’autre grande revendication de mai 1968 quant aux différents domaines d’application du principe de solidarité.
9Aussi légitime qu’elle puisse être, l’émancipation de soi sur la base des principes néo-libéraux qui régissent le processus dirigiste de la mondialisation économique a un prix social et humain énorme. Sinistres preuves en soient la débâcle bancaire récente et, bien pire encore, la crise alimentaire provoquée par la libéralisation et la mondialisation asymétriques du marché des denrées de base. Ce sont là des conséquences d’un libéralisme unilatéral et dogmatique focalisé sur une société productiviste qui est basée sur la seule croissance économique (l’œil rivé sur l’augmentation du PIB et sur l’indice boursier).
L’individu de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme : entre personne juridique et droit sociaux
10Pourtant, les nations occidentales qui plaident pour la démocratie libérale et qui usent de tous les moyens (guerre néo-coloniale incluse : Afghanistan, Irak, Gaza) pour imposer l’application des sacro-saints principes de l’économie de marché, étendus à l’ensemble du monde habité, ne cessent de s’appuyer sur les droits de l’homme. Souvent repris et inscrits dans la constitution des pays qui se définissent comme démocratiques, les droits de l’homme sont inspirés de la conception de l’individu libéral née de la mise en cause des pouvoirs temporel et ecclésiastique au Siècle des Lumières ; ceci notamment par le biais de la Déclaration d’indépendance des États-Unis (4 juillet 1776) et de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (26 août 1789). Les droits de l’homme ont donc une histoire d’ordre philosophique, juridique et constitutionnel (Lochak, 2005, p. 11-27). Individu libéral donc parce que c’est la liberté qui, en tant que droit naturel fondamental, constitue l’homme, de manière universelle, en individu : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits » – proclame l’article 1 de la déclaration révolutionnaire ; mais pour ajouter aussitôt :
« La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi4. » (article 4)
11Le droit naturel exige, dans son application, le contrat social. L’individu abstrait, dans son universalité, ne peut se réaliser singulièrement qu’en relation avec les autres par le biais de la « loi » ; le droit naturel implique un droit positif, un droit destiné à assurer la liberté d’opinion et de conscience, la sûreté et l’inaliénabilité de la personne, mais aussi le droit « inviolable et sacré » qu’est la propriété (article 17).
12Marquée par le choc des massacres de populations civiles pendant la dernière guerre mondiale et par la faillite de l’humanisme européen face à la dénégation de la qualité d’homme qu’ont représenté les camps d’extermination, la Déclaration universelle des droits de l’homme (10 décembre 1948) oscille elle aussi entre droit naturel et droit positif, entre liberté innée dans l’égalité et obligations sociales, entre individu abstrait et réalisations concrètes par le biais de différents droits sociaux5. Si l’article premier précise que « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits » et qu’ils « sont doués de raison et de conscience », il ajoute d’emblée qu’en tant que tels « ils doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité ». On ne soulignera jamais assez le fait que le droit universel et imprescriptible à la liberté implique immédiatement, dans son exercice, un devoir, et un devoir d’ordre social.
13Et, de fait, si la plupart des articles de la DUDH instituent l’être humain en personne juridique, pour en assurer l’autonomie individuelle et la sûreté dans l’exercice de la liberté de disposer de lui-même et de ses biens propres (droit à la propriété), les dernières dispositions concernent les droits sociaux. Tel l’article 25, § 1 :
« Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté. »
14On le constate, les droits sociaux de l’être humain constitué en individu et en personne juridique correspondent à la satisfaction de ses besoins fondamentaux : alimentation, santé, habillement, logement, famille. Les deux articles suivants dans la DUDH y ajoutent le droit à l’éducation et le droit à la vie culturelle, avec la précision suivante :
« L’éducation doit viser au plein épanouissement de la personnalité humaine (!) et au renforcement du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. » (article 26)
15Or l’énoncé des droits sociaux de l’homme ne débouche pas sur la formulation explicite de leur contrepartie en termes de devoirs. Reprise aux Déclarations de la fin du XVIIIe siècle, la subtile dialectique entre le droit naturel (assurant l’égalité des droits fondée sur une liberté universellement partagée) et le contrat social (qui garantit l’exercice commun des libertés naturelles et fondamentales) ne parvient pas à attribuer au droit positif les moyens de sa réalisation. N’est pas explicité non plus le fait que l’exercice des libertés fondamentales et l’épanouissement de l’individu en tant que personne ne sont possibles que par la garantie et la réalisation des droits sociaux. Dans la mesure où les devoirs et les responsabilités découlant de l’application des droits sociaux dont la réalisation a été attribuée à l’État-nation ne sont qu’implicites, la DUDH est-elle bien suffisante pour assurer le développement harmonieux de l’individu moderne en société ? Ceci en particulier à l’heure où l’État social est tant décrié par les thuriféraires du catéchisme néo-libéral.
L’individu entre mort du sujet et construction culturelle de l’être humain
16Dans la tradition occidentale, l’individu libéral moderne est philosophiquement fondé sur la question du sujet. Successivement lié à l’intériorité spirituelle et morale, à l’intimité émotionnelle, à la réflexivité subjective, à la conscience de soi, à l’investigation et à la constitution du soi comme moi-même (entre idem etipse6), le sujet aurait connu plusieurs naissances, régulièrement attachées au développement de la tradition occidentale grecque, puis judéo-chrétienne7 ; jusqu’à ce que, dans les années soixante, on pense pouvoir en signer l’arrêt de mort. À vrai dire, entre psychanalyse, structuralisme et marxisme moins doctrinaires qu’envisagés comme approches de la réalité psychique et sociale de l’homme, l’extraordinaire développement de sciences humaines dans les années soixante du siècle dernier a fait du sujet occidental un champ ouvert aux déterminations les plus variées : sujet-psyché oscillant en équilibre instable et problématique entre le surmoi et le ça, entre un passé individuel refoulé dans l’inconscient et les forces instinctives de la libido ; sujet psychanalytique traversé par « lalangue » à la suite de la révolution saussurienne et déterminé dans son inconscient par une chaîne de signifiants qui le divise et le décentre ; sujet anthropologique dont les différentes manifestations symboliques et culturelles dépendraient en dernier ressort des structures inconscientes de l’esprit humain ; ou sujet en tant qu’individu inclus dans un groupe social (lui-même traversé par les structures économiques qui l’organisent) et animé dans sa constitution (notamment culturelle) par les rapports de force d’ordre économique et social.
17Donc pas de mort programmée du sujet occidental. Mais l’atome-individu abstrait est désormais soumis aux déterminations psychiques, sociales, culturelles, voire neuronales qu’impliquent sa constitution organique et psychique ainsi que son environnement. Le sujet-individu est donc à saisir en tant que sub-jectum, constamment soumis à des processus de subjectivation qui dépendent largement de son entourage matériel, familial, social et culturel. Loin d’entraver une autonomie morale et intellectuelle censée fonder l’individu philosophique dans une liberté égocentrée, ces paramètres d’ordre aussi bien organique que symbolique contribuent au contraire à l’enrichissement identitaire constant qui est rendu indispensable par l’extraordinaire plasticité constitutive de l’être humain. C’est ici qu’une perspective anthropologique sur l’individu peut se substituer avec quelque profit à une perspective sociologique avant d’y revenir.
18Chez Eschyle déjà, Prométhée, enchaîné aux confins du monde habité par les hommes, représente les humains dans un premier stade de développement comme aveugles et sourds (Prométhée enchaîné, 436-471) ; les premiers hommes vivaient comme des fourmis au fond de grottes obscures, regardant sans voir, écoutant sans entendre. Conçus en tant que mekhanémata et sophísmata, comme des moyens de l’ordre de l’artifice et comme des savoir-faire, les arts techniques inventés par Prométhée pour sortir les hommes de cet état premier d’indistinction sensorielle ressortissent à une sémiotique : manières d’interpréter les signes offerts par le monde environnant pour en exploiter les ressources (de la lecture des astres pour les pratiques de l’agriculture et du commerce au déchiffrement du vol des rapaces pour l’art de la divination en passant par la technique de la voile, l’écriture alphabétique ou l’usage médical des simples). Considérés dans leur utilité sociale (ophelémata), ces différentes tékhnai ressortissant aux habiles astuces de l’intelligence artisane font des êtres humains incapables d’user de leurs capacités sensorielles des « hommes sensés et maîtres de leur intelligence ». Les arts prométhéens contribuent donc à une véritable fabrication des êtres humains, au pluriel et dans le sens d’une civilisation artisane, par le recours à des moyens relevant des systèmes symboliques et des techniques herméneutiques qu’implique leur application. L’homme donc comme animal incomplet, mais remarquablement riche de capacités intellectuelles et sémiotiques à développer en interaction avec son environnement, en Grèce classique assurément, mais aussi au terme du siècle des Lumières, par l’avènement d’une raison humaine libérée des entraves métaphysiques. Mais de quel ordre est au juste cet inachèvement apparemment constitutif ?
19Déjà à l’issue du XVIIIe siècle, Herder (1989, p. 187-192 et p. 345-355) suggérait que, du point de vue physiologique, l’organe de la raison et de l’inventivité symbolique et culturelle est à l’évidence le cerveau ; il se fondait sur la disproportion chez le nouveau-né entre la dimension de la tête et celle des membres. Or en se basant sur les résultats relativement récents d’une part de la paléo-anthropologie, d’autre part de la neurologie, quelques anthropologues contemporains ont renoncé à situer l’incomplétude de l’homme dans sa nature originaire, comme le fait au contraire le Prométhée d’Eschyle. Autant du point de vue phylogénétique qu’en ce qui concerne l’essence organique de l’homme, il apparaît que la culture précède en quelque sorte la nature ; ou, en tout cas, il semble que la nature présuppose la culture.
20En résumant les résultats des recherches récentes de ses collègues paléo-anthropologues sur le processus de l’hominisation, Edgar Morin (1973, p. 63-105) parvient par exemple à la conclusion qu’on doit au développement des pratiques culturelles chez les hominidés un ralentissement progressif des comportements innés, avec un accroissement concomitant de la plasticité et des dispositions créatives du cerveau (Remotti, 2003, p. 41-47). Ce processus phylogénétique d’accroissement des capacités combinatoires non déterminées du cerveau de l’homme par le développement de la culture des communautés humaines aurait pour corollaire ontogénétique l’allongement de la phase de plasticité de l’enfance et donc de l’apprentissage. Si incomplétude de l’homme il y a, cet inachèvement réside essentiellement dans les facultés adaptatives et dans les possibilités d’innovation d’un cerveau qui se caractériserait par son extrême malléabilité. Sans aucun doute producteur de culture, l’inachèvement constitutif de l’homo sapiens est également, du point de vue phylogénétique, la conséquence du développement de la culture des hommes : « Ce sur quoi s’achève l’hominisation, c’est sur l’inachèvement définitif, radical et créateur de l’homme » (Morin, 1973, p. 105)8.
21En anthropologie culturelle et sociale, on a volontiers envisagé, de manière en quelque sorte plus traditionnelle, le travail symbolique et institutionnel de la culture comme le moyen de combler le vide laissé par la nature incomplète de l’homme. C ‘ est avec une telle proposition que Clifford Geertz conclut une étude déjà ancienne consacrée à l’impact du concept de culture sur le concept de l’homme : « We are, in sum, incomplete or unfinished animals who complete or finish ourselves through culture9 » (1973, p. 33-54). Mais Geertz a aussi affirmé qu’il n’y a pas de nature humaine de base, qu’il n’y a pas de constitution innée de l’homme à l’état pur, qu’il n’y a pas d’en-soi de l’homme pensant ; mais les moyens prométhéens de la civilisation, que peu à peu l’homme s’est donnés, auraient modelé l’organisme même de l’être humain pour devenir indispensables à sa survie et à sa pleine réalisation. Ainsi, fondées sur un système nerveux central particulièrement développé, les ressources culturelles apparaissent comme la condition même de l’exercice et du développement de la pensée humaine, dans ses aspects techniques et symboliques. Le rôle probablement joué par les pratiques de la civilisation des hommes dans l’évolution neuronale et donc intellectuelle d’Homo sapiens semble avoir orienté le développement de son appareil neuronal et cérébral dans le sens d’une plasticité, d’une flexibilité, d’une mobilité, en deux mots de potentialités créatrices et de capacités inventives tout à fait exceptionnelles (Geertz, 1973, p. 55-83)10.
22La plasticité est précisément le concept désormais fréquemment utilisé dans les neurosciences contemporaines d’une part pour rendre compte de la manière dont les cellules nerveuses réagissent aux stimuli extérieurs pour en mémoriser les effets, d’autre part pour expliquer la qualité particulière de certaines zones du cortex cérébral susceptibles d’accueillir les fonctions de parties lésées. Autant l’interaction du système nerveux central avec l’extérieur que le fonctionnement interne de l’organe correspondant seraient ainsi marqués par la plasticité. Il y a plus de vingt ans déjà, le neuropsychologue américain Howard Gardner attirait l’attention des représentants des sciences humaines sur la dimension plastique du système nerveux de l’être humain et sur la flexibilité qui en découle du point de vue de son développement biologique. Il en concluait que certaines zones du cerveau de l’homme restent longtemps malléables et singulièrement « disponibles » ; leur développement est non seulement sensible aux incitations extérieures, mais il requiert ces sollicitations de l’environnement physique et social (Gardner, 1993, p. 37-45 et 56-58)11.
Pour une « anthropopoiésis » culturelle des individus
23Inutile donc de nier la composante biologique, le probable donné génétique de tout homme en tant qu’être humain et en tant qu’individu pourvu d’un appareil neuronal particulièrement développé. Mais c’est cette composante organique même qui implique, dans son extrême plasticité, dans l’éventail de potentialités qu’elle offre, dans son indétermination de base, le travail de fabrication de l’humain en tant que processus « anthropopoiétique12 ». Ce travail de construction culturelle de l’homme ne peut être qu’interactif, ceci aussi bien pour le donné partagé par tous les êtres humains que pour les différences individuelles ; c’est un processus d’ordre social.
24Cela signifie-t-il que, du point de vue sociologique, il s’agit de choisir une voie moyenne entre individualisme et holisme méthodologiques ? Cela veut-il dire que les individus sont de nature essentiellement relationnelle et qu’ils ne sauraient exister sans la société qui à son tour n’existerait pas sans elles et eux ? Dans l’essai qu’il consacrait en 1939 déjà à Die Gesellschaft der Individuen, Norbert Elias montrait que « l’une des conditions fondamentales de l’existence humaine est l’existence simultanée de plusieurs êtres humains en relation les uns avec les autres ». Ainsi les hommes seraient liés à la société « par les dispositions les plus élémentaires de leur nature », car « seule la société fait du petit enfant avec ses fonctions psychiques encore malléables et relativement indifférenciées un être distinct de tous les autres » (Elias, 1987, p. 52-57). Cette notion de disposition élémentaire a été développée par Pierre Bourdieu en un habitus qui correspond à des dispositions durables qui se constituent dans notre expérience d’individu comme enfant puis comme adulte par un mouvement d’intériorisation de ce qui nous est extérieur. Les habitus s’inscrivent dans notre corps propre et dans notre intellect pour orienter nos pratiques en construisant la vie sociale en différents « champs » entendus comme des espaces sociaux dynamiques ; en retour ces champs structurent et déterminent nos actions (Bourdieu, 1980, p. 87-109 ; Corcuff, 2007, p. 27-30 et 87-89).
25Mais outre à être un zôionpolitikón (un homme de dispositions à la communauté sociale), l’être humain est aussi un homo symbolicus. Par les facultés neuronales et intellectuelles qu’il ne parvient à développer qu’en interaction avec son environnement matériel et humain, l’individu se fabrique une identité qui n’est pas uniquement de l’ordre de l’habitus social, de l’intimité émotionnelle ou de l’« ipséité » morale et philosophique13. D’emblée l’individu, avec ses dispositions et capacités organiques à la fois communes et différenciées, est pris dans le tissu des relations et déterminations organiques, psychiques, sociales et institutionnelles que l’on a indiquées à propos de la constitution du sujet dans la modernité d’après 68 ; ce vaste réseau relationnel est sans doute à saisir comme un « système complexe » avec les hiérarchies, les interactions et les tensions que cela implique entre les paramètres déterminants et avec la part d’indétermination et de hasard relatifs au dynamisme évolutif de ce type de réseau. L’individu use de ses dispositions physiologiques et intellectuelles, de ses capacités sensorielles et cérébrales propres en particulier pour se faire des « re-présentations » partagées, à la fois en tant que Vorstellungen et Darstellungen, autant comme reproduction mentale des données sensibles que comme fabrication configurante (et émotionnelle) de ces données (Borutti, 2003). Par ce biais d’ordre symbolique qui assume souvent la forme de différents types de discours, l’homme se constitue lui-même dans son identité affective et réfléchie en interaction nécessaire avec les différents cercles communautaires qui contribuent à sa fabrication, en interaction avec leurs différentes conventions et traditions. En tant que représentations partagées et pratiques souvent par les moyens configurants de la langue, ces fictions au sens étymologique du terme engagent l’individu à l’action sur l’environnement naturel et social qui l’a « fait », dans un processus d’anthropopoiésis qui se poursuit pendant toute sa carrière d’être humain mortel. L’individu se fabrique à la fois par les autres et pour les autres, avec des spécificités individuelles qui engendrent transformations et conflits.
26Une telle conception anthropopoiétique de l’individu rend caduque par exemple la distinction entre homo hierachicus et homo aequalis, sinon la coupure entre sociétés holistes et sociétés individualistes14. Que la communauté sociale soit traditionnelle ou postmoderne, l’autonomie absolue de l’individu tient du pur fantasme. À l’écart de toute distinction tendant à renforcer le Grand Partage (entre primitif et civilisé), il y a un rapport dialectique entre la nécessaire fabrication sociale et culturelle de l’homme et le développement de la singularité de l’individu ; cette relation interactive rend perméable l’une à l’autre d’une part l’identité humaine coïncidant avec le statut social et la reconnaissance par les proches, d’autre part l’identité attachée à l’épanouissement de l’individu-personne avec sa réflexivité critique. Même en régime néo-libéral, le développement exacerbé d’un individualisme marchand égocentré n’est possible que par l’omniprésence dans des médias particulièrement puissants d’une publicité aux formes particulièrement frappantes et par l’adoption collective (désormais mondialisée) des re-présentations sociales et symboliques qu’elle véhicule. L’émancipation affective et intellectuelle de l’individu, l’affirmation d’une identité personnelle épanouie ne peuvent advenir que dans l’interaction de la femme et de l’homme avec plusieurs cercles d’appartenance sociale, institutionnelle et culturelle ; l’individu ne peut s’affirmer que par le croisement et la combinaison pratiques de plusieurs niveaux identitaires collectifs15.
27Dans une perspective d’anthropologie différentialiste qui exclut, par la perméabilité des niveaux d’appartenance anthropopoiétique, tout dessin de catégories aux limites définies et par conséquent toute attitude de discrimination d’inspiration raciale/raciste, l’identité individuelle doit être garantie par une série de droits et de devoirs ; non seulement des droits et des devoirs qui instituent l’individu en personne juridique par un certain nombre de libertés fondamentales, mais des droits et devoirs civils et culturels réciproques, répondant aux nécessités de la constitution et du maintien anthropopoiétiques de l’individu ; des droits et des devoirs qui vont au-delà de la propriété sociale garantie par un certain nombre de droits instituant l’individu en sujet social responsable, bénéficiant des conditions matérielles propices à son épanouissement (Castel & Haroche, 2001, p. 163-206)16 ; des droits et des devoirs qui pourraient inclure, par exemple, le devoir de tisser entre membres d’une même communauté les liens d’une solidarité autre que marchande, en substituant à la propriété privée la propriété collective, dans un système de dons et de dettes de l’ordre du symbolique.
28Si l’individualisme peut devenir un « humanisme » (Singly, 2005), c’est à la condition que l’humanisme fondé en droits et devoirs civils donne les moyens d’une construction sociale et culturelle de l’homme dans l’interaction avec ses différentes communautés d’appartenance ; droits et devoirs égaux en raison sans doute, mais pour assurer une singularité de fait ; droits et devoirs universels tout en permettant de négocier et de modifier la référence à une universalité moins marquée que celle de la DUDH, pour éviter toute dérive totalitariste. Tel devrait être le socle anthropologique universellement partagé qui permettrait l’épanouissement « anthropopoiétique » de l’individu-personne en sujet social intersubjectif et interdépendant, par un système de responsabilités réciproques et solidaires : émancipation de l’individu dans, par et pour les autres, en interaction politique, civile et culturelle. Ces trois dimensions sont précisément celles qui, dans la vie des communautés humaines, ont été effacées par la marchandisation généralisée, en régime libéral, des relations sociales ; elles ont été occultées par la substitution de la valeur d’échange à la valeur d’usage et d’utilité sociale. Cet effacement a provoqué le reflux de la pensée sociale et, avec lui, la désaffection des sciences humaines (et des études littéraires) qui travaillent précisément sur les pratiques symboliques des femmes et des hommes, désormais intégrés dans des réseaux sociaux et culturels complexes et polyvalents. Ces réseaux multiformes et mobiles exigent une révision de la DUDH dans le sens de la solidarité sociale.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 Voir par exemple la critique de l’intérieur formulée par Stiglitz (2002, p. 101-152 et 341-397), ainsi que par Le Bart (2008, p. 153-180 sur le « second individualisme »).
2 Voir dans cet ouvrage le principe de la « selfreliance » évoqué par A. Ehrenberg, infra ; on se référera aussi à Flahaut (2006).
3 Voir par exemple le rapport du PNUD, 2002.
4 Voir aussi l’article 2 : « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l’oppression. »
5 Signée par les 58 États membres de l’ONU en 1948. Quant au contexte historique d’élaboration de la DUDH, les deux premiers considérants de son préambule sont particulièrement significatifs : « Considérant que la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde » et «considérant que la méconnaissance et le mépris des droits de l’homme ont conduit à des actes de barbarie qui révoltent la conscience de l’humanité et que l’avènement d’un monde où les êtres humains seront libres de parler et de croire, libérés de la terreur et de la misère, a été proclamée comme la plus haute aspiration de l’homme »…
6 Cf. Ricœur, 1990, p. 11-38.
7 Voir ici même la contribution de C. Le Bart ; ainsi que Taylor, 1989, p. 127-142.
8 Sur l’émergence du langage, voir l’utile mise au point de Dortier, 2004, p. 207-259.
9 Voir aussi Remotti, 2003, p. 47-51.
10 Voir aussi Geertz, 2002, p. 237-241 ; Relethford, 1997, p. 324-350.
11 Voir aussi Ansermet et Magistretti, 2004, p. 29-47.
12 Sur ce concept, voir les différentes contributions in Affergan et al., 2003.
13 Pour reprendre la proposition formulée par Paul Ricœur dans Soi-même comme un autre en relation avec une identité narrative qui doit être plutôt comprise comme une identité énonciative – l’individu en tant que « sujet de discours » impliqué par l’usage des formes de l’« appareil formel de l’énonciation » (Ricœur, 1990, p. 55-72 et 137-198, par référence à Benveniste, 1974, p. 79-88).
14 Dumont, 1983, p. 215-253, revisité par Renaut, 1989, p. 69-112.
15 Galissot, Kilani, Rivera, 2000, p. 63-96 ; Wieviorka, 2005, p. 67-102.
16 Voir l’« égalité d’obligation » évoquée ici même par Ph. Chanial.
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