Les communautés virtuelles : structuration sociale ou outil de gestion ?

Pierre-Jean Benghozi

p. 151-168

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Index géographique : France


Texte intégral

INTRODUCTION1

1Internet s’est développé, dès l’origine, sur une base communautariste. Il s’agissait simplement, au départ, de s’organiser autour de groupes d’échanges à base de mails ou forums notamment2 ; ce sont désormais, avec Linux, des structures complexes de production et de développement de logiciels qui sont concernées, des modes élargis et renouvelés de distribution et de commercialisation de biens, avec Ebay ou Amazon.com, des modes renouvelés de rencontres sociales, sur Meetic ou MSN, des pratiques de troc généralisés avec les échanges de fichiers musicaux sur Emule. Le concept de communauté, développé de longue date dans la littérature sociologique, a ainsi fait, ces dernières années, l’objet d’un renouveau d’intérêt dans les travaux portant sur l’économie de l’Internet et, plus généralement, la société de la connaissance. Le concept a fait flores car Internet a permis l’émergence de formes hybrides de structures sociales, relevant d’une coopération à la fois volontaire et contrainte par des cadres institutionnels ou contractuels. Ont pu ainsi apparaître des modèles radicalement nouveaux de production (logiciels libres), d’information (wikis) et de distribution (commerce électronique), centrés autour de la coopération au sein de communautés aux frontières évolutives, offrant des alternatives efficientes aux organisations traditionnelles

2La généralité même du terme de communauté rend cependant le concept difficile à étudier et à mobiliser pour caractériser ces nouvelles formes de structurations sociales qui se font jour en ligne. La notion recouvre une diversité de phénomènes et de situations (groupes sociaux d’appartenance, collectifs d’activités et d’échanges…) qui se fondent sur une grande variété de relations. Pour certains, Internet et, plus généralement, les TIC ont affecté très fortement les organisations productives et les marchés existant. Ces auteurs voient dans la dématérialisation des biens et des transactions un facteur de redéfinition des chaînes de valeur et des formes d’intermédiation3 : la coopération et les marchés se réorganisant autour de communautés d’échanges4. Pour d’autres, les marchés réels se sont simplement étendus à des sites d’achat virtuels en y déployant des pratiques nouvelles de marketing et de contrôle des consommateurs, en stimulant des interactions autour d’échanges d’informations sur les contenus et les pratiques, à la base de nouvelles socialités5.

3Face à la difficulté de dessiner précisément les contours des communautés en ligne et leurs principes de fonctionnement, les différents auteurs ont été amenés à introduire de multiples définitions et éléments de caractérisation. Dans la plupart des cas, ces approches sont restées largement ancrées dans une tradition consistant à analyser, décrypter et comprendre les dynamiques économiques et sociales à la base de telles structures. Nous allons voir que les communautés sur Internet sont aussi intéressantes parce qu’elles traduisent l’opérationnalisation et la redéfinition constante d’un réseau social dans une perspective d’action stratégique. Les modèles économiques de croissance de telles communautés reposent en effet sur une dynamique d’ajustement permanent des rôles et des compétences nécessaires à leur développement, leur gestion et leur animation. Elle se traduit par une structuration progressive des principaux services proposés : de l’offre d’informations à l’organisation de transactions.

UN DOMAINE BIEN COUVERT DANS LA LITTÉRATURE

4L’alternative entre une vision sociale ou communautaire de l’espace public est traditionnelle en sociologie. Très tôt, Tönnies (1922) a opposé la communauté – où les individus partagent des liens qui les unissent malgré leurs différences – à la société – où les individus interdépendants vivent pour eux-mêmes, en tension avec les autres. Weber (1922) prolongera la distinction en distinguant le sentiment subjectif d’une appartenance commune à l’existence d’une coordination d’intérêts motivés rationnellement. Cette tradition a été très féconde, notamment aux États-Unis, et a connu un renouveau avec le développement de l’Internet et, plus généralement, d’une économie de la connaissance. Au début de l’Internet, beaucoup ont utilisé le terme de communauté dans une acception très large, relevant d’une simple coopération collective à base de TIC, se contentant de distinguer des formes de coordination interne (à partir de caractéristiques communes et partagées) et externe (par construction progressive de dépendances dans l’interaction). Rapidement, pourtant, les auteurs ont pointé la spécificité et l’importance des communautés en ligne. Les tentatives pour les caractériser et les définir se sont multipliées, à la fois dans le champ « académique » et chez des professionnels soucieux d’identifier les facteurs clés de succès d’une communauté6.

Des fondements économiques

5Les approches des communautés dans le monde de l’Internet et leur opérationnalisation dans le cadre de stratégies économiques ont pris, d’une certaine mesure, à rebours la conception traditionnelle qui opposait le fait communautaire à l’organisation sociétale. Elles ont mis l’accent sur le fait que des pratiques d’organisation efficaces et des stratégies commerciales de développement peuvent s’appuyer sur des « liens faibles » et des relations d’appartenance commune. Deux raisons principales sont notamment mises en avant dans la littérature économique et stratégique pour l’expliquer.

6La fréquence des interactions dans une communauté réduit d’abord les risques de comportements opportunistes alors qu’Internet a favorisé une augmentation radicale des informations disponibles et des opportunités de transactions, sans encourager pour autant la sélectivité ex ante. Par contre, la répétition des coopérations et des interactions dans le cadre d’un même groupe social modèle des normes et des routines d’action et favorise les mécanismes de réputation ; elle limite, ce faisant, les incertitudes sur le comportement des autres et permet la résolution spontanée de nombreux conflits. Les groupes d’échanges, d’avis ou de conseils contribuent à la régulation des marchés et des réseaux en structurant leur organisation et en les rendant plus efficaces. C’est en interagissant pour échanger des informations, produire une œuvre commune ou générer des transactions que les individus constituent ce que l’on qualifie de communauté en ligne.

7La seconde raison mise en avant pour expliquer le succès des communautés sur Internet tient à l’importance de l’économie de la connaissance. En favorisant l’engagement, la passion et le partage d’expériences autour d’affinités et de projets communs, les communautés réduisent les coûts d’apprentissage7 : qu’il s’agisse de générer, d’accumuler ou d’échanger de connaissances (Cowan, David et alii, 2000). Des exemples aussi différents que celui des réparateurs chez Xerox (Orr 1990) ou des développeurs de Linux sont, à ce titre, régulièrement cités (Raymond, 1998). Ils montrent comment les communautés contribuent à définir des solutions organisationnelles et des modèles économiques alternatifs, particulièrement flexibles.

Des types de communautés à définir

8Depuis que les TIC ont contribué au renouveau de la notion, les efforts de nombreux auteurs ont porté sur la spécification des communautés, à la fois aux niveaux empiriques et conceptuels. Les articles fondateurs de Lave et Wenger (1990), ainsi que Brown et Duguid (1991), ont contribué à fonder la notion séminale de « communauté de pratiques ». Ils montrent que les pratiques en vigueur dans les communautés sont le support de trois grandes dynamiques : mobilisation de mécanismes d’apprentissage par les individus, diffusion et production en masse d’informations, ajustement et développement de coopérations et d’échanges entre individus ne se connaissant pas a priori. Rheingold (1993) a été ensuite l’un des premiers à populariser la notion de « communauté virtuelle » en se référant aux agrégations sociales émergeant en ligne sur les réseaux à base de TIC. Le terme sera largement repris et affiné, notamment par Wenger (1998).

9De manière générale, la plupart des typologies de communautés analysent leur formation de manière statique, en cherchant à identifier les propriétés structurelles des membres ou du collectif8. Une grande partie de la littérature sur les communautés virtuelles s’efforce ainsi d’identifier les différentes variables qui structurent et expliquent les configurations observables. Les économistes constituent par exemple des typologies de communautés sur la base du type de biens primaires échangés : biens d’expérience, complexes, numérisés… Ainsi, parmi les travaux français récents, Lazega (2001) caractérise les communautés épistémiques par une répartition inégale du savoir entre les différents intervenants, à la différence de communautés d’experts aux compétences complémentaires. Gensollen (2003) définit les communautés médiatées comme des construits sociaux spécifiques s’appuyant sur l’échange de biens complexes informationnels : un lieu de rencontre virtuel à base de règles formelles plus qu’un réel groupe d’individus en interaction.

10L’observation et le suivi précis des constitutions de communautés conduisent toutefois à remettre en cause une approche purement structuraliste au profit d’une perspective plus dynamique. On constate en effet qu’elles se développent en s’appuyant tantôt sur la conception et l’acquisition des différents échanges (informations, biens, transactions commerciales…), tantôt au contraire sur la gestion du fait identitaire et des relations entre membres. Tout se passe souvent comme si les réseaux à base de TIC permettaient de définir de nouveaux équilibres entre le développement de relations interpersonnelles à distance et celui d’espaces publics virtuels (telles que les communautés en ligne) à même de suppléer le besoin de contacts individuels d’ordre affectif. C’est ce que montrent les dynamiques de croissance des communautés s’appuyant, de façon complémentaire, sur l’organisation des relations horizontales entre membres et la constitution de services génériques et spécifiques au profit de la communauté.

11Différentes recherches empiriques9 établissent qu’au moment où se constituent de telles communautés, les acteurs et les formes institutionnels sont largement indéterminés : qu’il s’agisse de l’offre proposée, de l’identité, du rôle et des responsabilités des prescripteurs, utilisateurs, clients ou intermédiaires, de la forme et des mécanismes de fonctionnement. Plus précisément, l’absence de structure et de hiérarchie visible est même le premier facteur marquant quand on étudie les communautés par comparaison avec d’autres organisations ou institutions. Cela ne signifie toutefois pas que les communautés sont totalement dépourvues de structuration. Les nombreux travaux menés sur les communautés Open Source10 montrent que celles-ci se différencient très clairement par leur structure de gouvernance et d’engagement (noyaux actifs, cercles de droits…) et sont bien marquées, en pratique, par l’existence de hiérarchies informelles, d’organisation du travail et de procédures d’autorité.

12Pour Wenger (1998) ainsi que Brown et Duguid (1991 ; 1998), l’auto-organisation reste néanmoins une caractéristique essentielle des communautés de pratique et elle contribue à leur donner une forte capacité d’adaptation sans contraintes particulières d’autorité ou de contrats. Les développements et la structure des communautés s’établissent par des prises de conscience progressives et successives, et résultent de l’interaction permanente entre tous les contributeurs plus que de la décision ou de la détermination de l’un d’eux. Ainsi, des projets a priori très proches dans leur modèle ou dans leur contenu (sites d’enchères, librairie en ligne ou production Open Source par exemple) peuvent s’orienter sur des trajectoires différentes à partir de différences minimes de choix et d’usages, en conduisant à des types de partenariats et de communautés différents.

13Les caractéristiques ainsi soulignées dans la littérature expliquent le caractère ambigu de la notion de communauté sur Internet : il s’agit d’une organisation sociale émergente telle que décrite dans la littérature sociologique et anthropologique, mais c’est aussi une structure spécifique constituée ad hoc. Fernback et Thompson (1995) notaient fort justement que le caractère « virtuel » des communautés en ligne tient moins à la dimension immatérielle des échanges qu’à la virtualité que possède un collectif d’individus de se regrouper et de s’envisager comme une communauté solidaire.

14Rheingold (1993) avait déjà relevé ce caractère particulier d’un fonctionnement-rassemblant des personnes, se connaissant ou pas, avant de se découvrir un intérêt commun fédérateur : il distinguait pour cela communautés « naturelles » et communautés « artificielles ». Cette particularité explique que la notion a rapidement été envisagée dans le monde managérial comme un concept à instrumenter. À la suite des travaux mettant en lumière le rôle prépondérant des communautés dans les nouvelles formes de coopération et de gestion des connaissances, plusieurs entreprises ont ainsi cherché à instrumenter la notion et à exploiter ces avantages en envisageant d’une part des formes décentralisées d’organisation, reposant sur la notion de « communauté de communautés », en construisant d’autre part les marchés autour de communautés. De façon très explicite, Hagel et Armstrong (1997)11 développent l’idée que les communautés virtuelles constituent un puissant outil commercial pour les entreprises. Ils proposent de développer le marché des services en ligne en concevant des services en fonction de communautés potentielles identifiées a priori autour d’un intérêt commun, d’une manière parfaitement cohérente avec les conceptions du marketing les plus récentes dans l’approche du consommateur : marketing one to one, hypersegmentation, CRM. Alors que ces thèses ont eu un énorme impact, il est frappant de souligner que les communautés n’ont été que rarement étudiées sous cet angle dans la littérature académique.

DES COMMUNAUTÉS QUI ÉMERGENT DE PLUSIEURS POINTS DE DÉPART ET DE DIFFÉRENTS PORTEURS DE PROJET

15Le caractère structurant et structuré des communautés en ligne tient à ce qu’Internet constitue simultanément un réseau de production, de diffusion et de consommation. Les fonctions sont difficilement distinguables aussi bien pour les individus qui y participent que pour les structures que constituent les communautés. Cette situation comporte des conséquences importantes pour les modèles de développement des communautés. D’abord, ils s’établissent aussi bien à partir d’une dynamique de production que d’une logique d’usage. Ensuite, chacun des nombreux acteurs participant à l’activité peut concourir à leur structuration.

Les acteurs des communautés

16Comme toute communauté, celles qui se construisent en ligne se définissent d’abord par leurs membres. Toutefois, ceux-ci ne contribuent pas nécessairement tous de la même façon à leur fonctionnement (Wenger, McDermott et alii, 2002). Les communautés Open Source illustrent parfaitement l’existence, parmi l’ensemble des membres, d’un premier cercle. On constate même parfois l’existence d’institutions représentatives de la communauté, dotées d’une véritable organisation et existence juridique. Le noyau actif peut être à la fois au cœur des échanges et des contributions ; il assure aussi souvent le rôle de régulateur ou de coordinateur de la communauté. Un « gérant » est en effet nécessaire pour faire circuler l’information, se porter garant des valeurs de la communauté, organiser les relations entre les membres, identifier les besoins de services et de contenus : en un mot assurer le bon fonctionnement.

17D’autres acteurs que les membres proprement dit jouent donc un rôle important dans leur organisation, leur gestion, leur animation, leur croissance : en un mot dans la construction de l’« offre de communauté en ligne ». Différents prestataires12 participent à leur fonctionnement. Il peut s’agit d’opérateurs, intégrateurs de services et de contenus, garantissant l’animation en ligne de la communauté grâce à la fourniture et à la mise à disposition d’applications techniques et de services-support. Des fournisseurs de services et de contenus peuvent également être nécessaires pour répondre aux besoins d’information et de communication des membres : élaboration d’informations génériques, formatage selon les profils des membres, mise à disposition d’outils d’échanges.

18Chacun de ces différents acteurs, de l’intérieur ou de l’extérieur des communautés, peut être à leur origine ou à leur initiative et contribuer de manière différente à leur mode de structuration.

Une structuration par les usages

19Comme nous l’avons vu dans l’introduction, une large part des communautés en ligne relèvent de la consolidation de réseaux d’échanges et de communication, informels ou déjà structurés. Ce sont les cas les plus fréquemment documentés dans la littérature : les communautés de pratique, réseaux d’experts ou de partenaires industriels. Le partage de compétences et d’expériences communes et exclusives constitue le ciment de telles communautés. Il permet à ses membres de renforcer leurs échanges, en se démarquant éventuellement des autres. De telles communautés apparaissent par exemple lorsque les transactions électroniques favorisent des regroupements spécifiques d’utilisateurs. Ces communautés sont apparues très tôt, dès l’apparition des nouveaux réseaux de télécommunications, et ont vite été très nombreuses sur Internet, autour des forums ou des newsgroups à une époque, des blogs, des wikis ou des guildes de joueurs aujourd’hui.

20Ce type de communauté se rencontre également quand les utilisateurs participent directement à des activités économiques communes. L’intérêt commun peut alors se repérer dans le cadre d’une association (comme une société savante), dans le cadre d’une activité professionnelle partagée (juridique, comptable ou médicale par exemple), à l’occasion d’une manifestation spécifique (participation à une conférence internationale), à l’intérieur d’une même chaîne de valeur (réseau mondial des équipementiers et sous-traitants d’une même entreprise) ou en collaborant à un même projet. Ces communautés sont généralement hiérarchisées et très structurées.

21La création d’une communauté peut s’opérer aussi, de façon plus indirecte (et dans ce cas moins maîtrisée), par la consolidation et l’élargissement d’associations d’usagers ou de clubs techniques d’utilisateurs. Des exemples de telles communautés se trouvent, tout naturellement, parmi des réseaux de spécialistes (y compris universitaires), mais également dans des situations beaucoup plus ouvertes, à la fois géographiquement et structurellement. Elles peuvent être constituées à partir de personnes qui partagent une caractéristique commune en apparence simple (ethnique, religieuse, sociale, locale, préférences, pratiques sociales, centres d’intérêt). L’absence d’un gérant empêche ces communautés de s’organiser facilement et spontanément en ligne. Elles se prêtent alors plutôt, dans ce cas, aux formes de structuration initiées par l’offre et que nous allons voir plus loin. En effet, pour une l’entreprise, un club d’utilisateurs permet de fidéliser des clients en leur offrant une offre de services plus adaptée et plus large ; il lui permet également de récupérer une forme nouvelle d’expertise sur ses produits.

Une structuration par l’offre

22Pour une grande part, le développement de communautés répond ainsi aux stratégies d’offre des offreurs de services en ligne et des opérateurs de réseau. Ceux-ci proposent et commercialisent des applications de gestion de communautés, en allant largement au-delà de leur métier d’origine et en adoptant une position très active et volontariste pour structurer de telles communautés. Leur stratégie d’offre se déploie à partir d’applications très différentes. Elle consiste à identifier des filières, des secteurs, des collectifs ou des groupes d’individus à même d’adopter de tels outils.

23Les offreurs de technologie et de services en ligne ont pour objectif de susciter une demande. Ils proposent des fonctionnalités nouvelles pour attirer des groupes d’utilisateurs, les fidéliser en les constituant comme une communauté où ils seront incités à multiplier échanges et transactions. La capacité de recueillir et de traiter les données d’usage joue ici un rôle important : il s’agit de l’analyse statistique des profils d’utilisateurs comme celle des pratiques et des flux d’informations au sein des groupes d’individus ou d’entreprises qui échangent et travaillent ensemble. Ces données permettent de constituer a posteriori les individus utilisateurs d’un même service en collectif, c’est-à-dire comme un segment de marché homogène, qui peut ensuite être affiné et divisé en communautés. Dans ce cas, l’appartenance d’un individu à une communauté lui confère un certain nombre de caractéristiques concernant son profil d’utilisateur (âge, sexe, localisation géographique, activité, etc.) et son comportement en ligne (appropriation des outils, fréquence des visites, comportement vis-à-vis des publicités). Après l’avoir constitué comme une audience, les offreurs de services en ligne qualifient cette communauté afin de la rentabiliser avec des services plus ciblés. Par contre, les relations existant entre les utilisateurs des services en ligne ne sont pas posées ici a priori comme un critère d’identification d’une communauté. Quand elles existent, les relations directes entre « membres » servent essentiellement aux offreurs pour renforcer la notoriété de leurs services et fidéliser leurs clients. Dans ce type de communauté en ligne, les participants sont essentiellement attachés au site support de l’échange, qu’ils ont conscience de bâtir collectivement ; ils se soucient moins d’entretenir les relations personnelles qui s’avèrent dès lors peu investies voire inexistantes.

24Les offreurs stimulent également les communautés en ligne par une seconde stratégie. Elle consiste à proposer à des groupes d’individus déjà structurés des outils de gestion de communauté pour améliorer leurs processus de collaboration et réduire leurs coûts de traitement et de diffusion de l’information. C’est le cas par exemple des fournisseurs de plates-formes de marché électronique ou des éditeurs de progiciel d’aide aux achats : la promotion et l’adoption de leur application ne peuvent passer que par la capacité à structurer une communauté d’acheteurs et de fournisseurs partageant catalogues, références, bases de tarifs et procédures d’achat. Pour ce faire, les offreurs doivent pouvoir s’appuyer sur des communautés d’intérêt se vivant déjà en tant que telles ; quand elles n’existent pas, ils contribuent à les fédérer en favorisant d’abord leur structuration dans le monde réel, pour pouvoir ensuite leur proposer des outils ou des prestations spécifiques en ligne.

Une structuration par les transactions commerciales

25Un des plus remarquables effets de l’Internet a été sa capacité de redynamiser les circuits de vente traditionnels. L’adaptation des circuits de diffusion physique aux TIC a conduit à une redéfinition des communautés d’échanges sur une base géographique renouvelée ou confortée : en fidélisant, par une offre de biens adaptée, un ensemble de consommateurs partageant potentiellement13 des intérêts communs, en stimulant les modalités d’échanges et d’appariement entre individus, en redéfinissant les conditions d’agrégation et les modalités d’appartenance aux communautés, notamment par des procédures spécifiques d’abonnement et de paiement14. Certains sites, tels que Meetic ou EBay, se sont ainsi d’emblée constitués avec une telle visée. D’autres, comme certains moteurs de recherche, se sont progressivement tournés vers une position de fournisseur d’informations, en l’accompagnant de la structuration d’échanges communautaires (Yahoo. music, MSN ou GoogleBlog par exemple)15.

26Cette évolution a notamment répondu à l’échec des premiers modèles d’affaires de commerce électronique reposant essentiellement sur la gratuité16. Pour faire face à la compétition par les prix, il est en effet indispensable de pouvoir valoriser autre chose qu’une simple fonction d’intermédiaire : valeur ajoutée de transaction, services d’information, fidélisation des utilisateurs, création de nouvelles structures d’offre17. La compétition tend donc à s’organiser sur la conception même des transactions et des marchés, notamment par la capacité de segmenter des communautés permettant de capter les consommateurs et de fournir autant de micromarchés et de cibles publicitaires. La pertinence et la spécialisation du contenu est très importante pour ces communautés organisées en fonction de segments verticaux extrêmement spécialisés. Une raison du succès d’Amazon.com tient sans doute ainsi à ce que l’entreprise ne propose pas seulement des livres mais un outil de recherche gratuit sur une gigantesque base de données, couplé à la fourniture d’informations sur les livres personnalisés par les lecteurs. Pour s’imposer, l’entreprise a développé une stratégie de structuration thématique et communautaire en stimulant les échanges de commentaires entre internautes et en signant très tôt des accords de partenariat avec des dizaines de milliers de sites web pour valoriser, dans les livres commercialisés, les thèmes d’intérêts de ces sites18.

Premiers éléments de conclusion

27Dans un cas comme dans l’autre, les communautés virtuelles apparaissent donc comme des structures d’interaction adaptée à des modèles d’échanges ou des productions éclatés. Elles offrent à la fois un support pour la coopération et les échanges, et une plate-forme permettant aux savoirs pertinents de circuler : entre les concepteurs, les producteurs et les utilisateurs, tout autant qu’entre les vendeurs, les distributeurs et les acheteurs.

28Les communautés en ligne induisent donc de nouvelles régulations sociales… tout comme elles en sont le résultat. La simple caractérisation structurale est donc insuffisante pour rendre compte de leur dynamique de développement et de la constitution progressive. Nous allons voir, dans la partie suivante, que l’on peut en identifier des trajectoires singulières de développement.

DES MODÈLES D’AFFAIRES ET DES MODÈLES DE CROISSANCE

29L’opérationnalisation du concept de communauté par les fournisseurs de services et de technologies se manifeste dans leursa dynamique : le développement de l’architecture des rôles et des compétences nécessaires à la gouvernance des communautés, la structuration de l’offre de services et du modèle économique. C’est à partir de ces deux dimensions que nous nous proposons de caractériser les modèles de croissance des communautés : l’évolution dans le temps de l’offre de services19, l’évolution du modèle économique et de la structure relationnelle des membres formant la communauté.

30Les résultats obtenus dans notre recherche20 recoupent les constats tirés de la littérature en marquant deux archétypes de développement relativement contrastés. Le premier est principalement tiré de la configuration a priori de nouveaux modèles économiques et caractérise les communautés qui se constituent autour d’une offre de services en ligne (cf. infra 4.1.). On les retrouve par exemple dans les users groups impulsés par les éditeurs de logiciels, les communautés d’échange des grands sites de commerce électronique ou les sites « communautaires » commerciaux tels que gay.com. Ces formes de communauté sont en général de nature « verticale » car elles privilégient surtout les échanges de chacun des membres avec le site ; le gestionnaire de la communauté a même souvent tendance à limiter les échanges entre membres pour garantir le maintien de sa position d’intermédiaire. Le second modèle de communauté est tiré, pour sa part, par l’élaboration et la fourniture de nouveaux services visant à faciliter la circulation de ressources entre membres (cf. 4.2.). Il caractérise plutôt des structures horizontales constituées, par exemple, autour de compétences métier similaires21. Contrairement au cas précédent, le gérant de la communauté a intérêt à ce que les échanges entre membres s’y multiplient pour justifier la fourniture d’infrastructures ou d’outils associés.

Communauté constituée à partir d’une offre de service en ligne

31Dans ce premier modèle (figure 1), l’opérateur conçoit les services en fonction du profil des membres escomptés et de leur comportement ; l’offre de services vise à séduire et à fidéliser une cible préalablement choisie ; elle est souvent gratuite au départ, puis ajustée au fur et à mesure en suivant précisément les profils et comportements en ligne des utilisateurs.

32Dans de telles communautés, les premiers services proposés reposent souvent sur un financement par la publicité car le choix initial de la cible permet aussi de sélectionner des annonceurs ou partenaires22. Les premiers services s’articulent essentiellement autour de l’échange et du partage d’informations (accès à des bases partagées, listes de diffusion, forums) ; la fourniture de services de webmail ou de messagerie instantanée est également caractéristique de cette phase. Dans cette étape, la constitution de communautés permet à la fois de stimuler les échanges sur le site (et donc la consommation du service) et de construire puis consolider le segment de marché ainsi constitué.

33Dans une deuxième étape, il devient ensuite possible d’envisager la conception d’un modèle économique fondé sur l’abonnement, éventuellement inclu dans une prestation plus globale23. La tarification du site communautaire s’accompagne de nouveaux services pour les membres : annuaires, référencement ou qualification de prestataires par exemple. La publicité reste une source de financement, mais sa part relative décroît lentement.

34La complexification du modèle économique ne s’opère vraiment que dans une troisième étape, avec la diversification des sources de financement : vente de prestations de services, ventes de produits ou d’informations en ligne, ventes liées. À ce stade, de nouveaux services accompagnent les partenaires et les membres dans la réalisation de transactions (négociation, informations associées, notification, paiement, reporting) ; parallèlement, les nouvelles sources de financement permettent d’innover en matière de services et de développement d’outils de gestion commerciaux.

35Une quatrième étape correspond à l’établissement de commissions sur les transactions réalisées. La conception d’un tel modèle économique n’est possible qu’en s’appuyant sur les services d’annuaire et de gestion des transactions développés dans les phases précédentes. Cette modalité de financement permet à son tour d’enrichir la palette des services, en particulier ceux associés à la sécurisation du paiement en ligne.

36Les opérateurs de communautés sont souvent tentés par une cinquième étape consistant à développer un paiement des services à l’usage. Il s’agit, pour eux, de stabiliser le modèle économique en assurant l’équilibre des rémunérations entre les différents contributeurs de la chaîne de valeur. Cette étape suppose cependant une forte stabilité des communautés et des acteurs de l’offre. Ce n’est pas le cas dans une économie de l’Internet, encore en voie de consolidation dans ses technologies, ses marchés comme ses modèles économiques.

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Fig. 1 : Croissance d’une communauté autour de services en ligne (d’après Bitouzet 2001).

Communauté constituée autour de compétences et pratiques partagées

37Le second modèle de croissance observable (figure 2) est celui des communautés qui se structurent autour de relations sociales préexistantes (partage24 de compétences, de métiers ou de pratiques professionnelles similaires). Un opérateur identifie, avec les utilisateurs envisagés, les services à valeur ajoutée nécessaires pour générer une dynamique communautaire en ligne (diffusion d’informations ciblées, accès à des bases de données, expertises…).

38Dans de tels cas, la difficulté pour l’opérateur consiste à construire un modèle économique rentable sans pouvoir nécessairement jouer sur les contours et la structure de la communauté. La condition nécessaire – et le point de départ – du développement de services en ligne est par exemple l’existence d’équipements en réseau, de connexions, d’appropriation des outils de navigation, de forums et de messageries entre membres de la communauté visée. Dans le cas où la communauté en ligne se développe à partir de communautés préexistantes qui ne sont pas exclusivement centrées sur l’Internet, la condition précédente ne va pas nécessairement de soi ; les outils techniques dont disposent les membres peuvent être, par exemple, de niveau très disparate, si la communauté regroupe à la fois des individus en entreprise (bénéficiant d’investissements et de services collectifs performants) et des individus isolés et sous-équipés. L’équipement de telles communautés ne peut pas toujours être financé par ses membres et ses instances représentatives : il doit souvent être subventionné au départ par l’opérateur qui souhaite s’y positionner.

39Une fois acquis le support technique (connectivité au réseau et maîtrise des applications logicielles notamment), les premiers services proposés par l’opérateur relèvent en général de l’échange et du partage d’informations : accès réservé à des bases de données partagées, diffusion de bulletins d’informations spécialisées à une liste d’abonnés, forums… Ces premiers services sont le plus souvent financés également par l’opérateur et mis à disposition gratuitement afin de séduire et de fidéliser les membres de la communauté. Dans cette première étape, la publicité reste la source naturelle de financement car il est relativement aisé de cibler des partenaires et annonceurs potentiels selon le profil des membres de la communauté.

40La deuxième étape dans la construction de l’offre de services consiste à proposer des services de référencement : annuaire des membres, repérage de compétences partagées, normalisation, identification des qualifications des fournisseurs. Ces services peuvent être construits grâce aux informations recueillies dans la première phase et lors de l’identification des besoins. La réalisation de référencements et d’annuaires en ligne peut alors générer d’autres formes de rémunération : droits d’inscription, location d’espace sur le site, commercialisation de données, requêtes informationnelles spécifiques.

41La troisième étape consiste à assurer la réalisation de transactions en ligne. Elle suppose la mise en relation des partenaires, l’aide à la négociation, le catalogage et la gestion des documents associés à la transaction et la résolution de la transaction proprement dite. La réalisation de transactions en ligne conduit l’opérateur de communautés à mettre en place d’autres modes de rémunération, liés à la prestation de services spécialisés : expertises, tiers de confiance, commercialisation de données…

42La quatrième étape dans l’enrichissement de l’offre de services est constituée par le paiement sécurisé en ligne. Il s’agit de boucler la gestion des transactions en automatisant les relations avec les banques (autorisation de paiement, identité des parties, confidentialité). Cette informatisation des transactions génère de nouvelles sources de financement car elle autorise la perception d’une commission sur les transactions réalisées.

43Avec cette dernière phase, la communauté se transforme en une véritable plate-forme de marché électronique permettant une valorisation spécifique des services selon les besoins et les contributions des membres, en ouvrant la possibilité de modes sophistiqués de répartitions de la rémunération (correspondant à la valeur ajoutée dégagée ou à l’intensité de l’usage par exemple).

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Fig. 2 : Croissance de communauté autour de compétences partagées (d’après Bitouzet 2001).

Des modèles de croissance qui convergent

44Les deux variables que nous avons dégagées – modèle économique et composition de l’offre de services – ne sont donc pas indépendantes l’une de l’autre. Un modèle économique basé sur une rémunération à la transaction suppose la mise en place d’outils pour gérer et accompagner la réalisation de transactions ; réciproquement, la diffusion d’informations spécialisées et coûteuses appelle généralement l’établissement d’abonnements. Les deux variables évoluent de concert au fil du temps : l’offre de services s’enrichit, le modèle économique sur lequel repose la construction des nouveaux services se construit.

45Malgré leur similarité, les dynamiques de croissance des modèles que nous avons identifiées sont cependant profondément différentes. Dans le cas des communautés de pratiques et de compétences, l’offre de services précède l’élaboration d’un modèle économique : c’est l’enrichissement des services et la diversification de l’offre qui garantit ensuite la construction d’un modèle d’affaires. À l’inverse, dans le cas des communautés de services, c’est bien la création de nouveaux modèles économiques qui représente le moteur de la croissance et non pas l’enrichissement de l’offre de services.

46Les communautés que nous avons étudiées montrent néanmoins que les deux modèles de croissance identifiés convergent tous deux. Que ce soit dans le monde du « B2B » ou du grand public, les communautés en ligne s’organisent progressivement dans un modèle économique complexe où s’emboîtent plusieurs sources de financement : publicité, abonnement, location d’espaces, souscription de services, commissions sur les transactions, paiement du référencement. Parallèlement, l’offre de services évolue en passant d’une offre de bases de données liées à l’échange et au partage d’informations pour aller vers des services plus élaborés à partir d’annuaires, de moteurs de recherche et de technologies transactionnelles.

47L’analyse met moins en évidence l’émergence d’une dynamique communautaire intrinsèque que le rôle moteur des acteurs de l’offre pour créer une nouvelle structuration communautaire autour de la construction de services en ligne répondant à des besoins spécifiques. Cette convergence des modèles a fait passer les acteurs de l’offre de la notion de « communauté » à celle de « place de marché ». Dans beaucoup de cas, le concept de communauté n’apparaît, a posteriori, que comme le support du marketing nécessaire à un moment, pour générer des relations et des échanges commerciaux.

CONCLUSION

48Quelles que soient les dynamiques sociales de structuration, que les communautés soient créées « artificiellement », de l’extérieur, par un opérateur technique ou commercial, ou qu’elles résultent du développement d’une communauté préexistante, nous avons constaté que les modes d’organisation en ligne tendent à converger en partageant progressivement des traits communs.

49À côté des services initialement proposés par l’opérateur, sa capacité de comprendre et de gérer la dynamique identitaire de la communauté devient aussi essentielle que la sélection d’un modèle économique rentable. C’est d’ailleurs la principale difficulté pour les opérateurs des communautés que de parvenir à initier et entretenir une telle dynamique en intervenant dans la « gestion des identités » des participants. Cette gestion de la posture identitaire des communautés en ligne ne relève pas du simple établissement d’une configuration sociologique, elle tient d’abord à la capacité opératoire d’apporter des solutions organisationnelles à des difficultés concrètes. La question de l’identité sur Internet commence très banalement lorsqu’il s’agit de s’inscrire à une communauté (fiche d’identité), de définir ses profils d’intérêt, de définir (ou d’exclure) des groupes d’utilisateurs et des groupes d’informations auxquelles les utilisateurs ont accès, d’identifier et de décrire les différents acteurs dans un annuaire, d’établir des rôles, d’habiliter chaque usager en fonction de règles, d’offrir à un utilisateur la possibilité d’utiliser plusieurs personnalités, etc.

50La capacité d’organisation et de croissance des communautés en ligne repose donc sur la maîtrise de cette dimension managériale et instrumentale. Ce constat conduit à s’interroger pour savoir si les utilisateurs d’Internet forment des communautés, au sens défini par les auteurs cités dans l’introduction, ou bien s’ils ne constituent que des réseaux et configurations changeantes se recomposant en permanence. La question n’est pas purement rhétorique. Elle fait écho à une hypothèse forte des travaux menés sur les TIC : la capacité de ces dernières de susciter, avec les communautés virtuelles électroniques, des formes originales de relations et de structurations sociales qui ne sont pas de simples espaces de communication fonctionnelle ou d’accès à la consommation de biens et services.

Bibliographie

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Notes de bas de page

1 La contribution qui suit reprend un article paru dans Entreprises et Histoires (juin 2006 n° 43, p. 67-81), ainsi que des éléments déjà développés in Benghozi, Bitouzet, Soulié et Zacklad, 2001.

2 Flichy, 2001.

3 Biglaiser, 1993.

4 Gensollen, 1999.

5 Shapiro et Varian, 1999.

6 Il est intéressant de souligner que dans le contexte d’un phénomène émergent comme l’Internet, les travaux académiques et les réflexions de cabinets de conseil spécialisés se sont énormément alimentés les uns les autres : notamment parce que les consultants ont souvent été les premiers à disposer d’observations empiriques.

7 Le concept de communauté épistémique développé par Haas (1992) a été récemment mobilisé pour rendre compte d’un tel phénomène.

8 Pour Granovetter (1995), par exemple, les « occupational communities » constituent des « réseaux sociaux endurcis » qui dépendent de la structure originelle des relations personnelles.

9 Bono, 2004 ; Bitouzet, 2001.

10 Citons notamment : Kogut et Turcanu, 1999 ; Cohendet, Creplet et Dupouet, 2003.

11 Il s’agit d’anciens consultants chez McKinsey

12 Car Internet relève à la fois de services de transport (accès au réseau, transport de données et logiciels d’applications) et de services d’usage (de communication, d’information et de transaction).

13 « Virtuellement », pour ainsi dire.

14 Pour une réflexion sur ces nouveaux modèles d’affaires, par exemple Resnick et Varian, 1997.

15 Les économistes ont montré que les activités de commerce ou de distribution en ligne ont encouragé cette émergence et ce repositionnement des fonctions d’intermédiation et de prescription. (Brousseau, 1999 ; Benghozi et Paris, 2005).

16 Dang NGuyen et Penard, 2004 ; Benghozi, 2001.

17 Shapiro et Varian, 1999.

18 Dans les marchés de biens informationnels (livres, CD, DVD, presse), et, plus généralement, des biens d’expérience (dont la valeur ne peut être éprouvée et connue avant l’achat), l’information peut être obtenue en faisant appel à des prescripteurs et experts spécialisés ou bien en s’appuyant sur les compétences des membres de la communauté.

19 Derrière ce terme générique, nous entendons les ressources rendues disponibles et circulant en ligne dans la communauté, tout autant que le niveau d’équipement et d’usage des TIC

20 Nous nous appuyons sur l’étude de communautés professionnelles effectuée de 1997 à 2003 dans le cadre de recherches menées en collaboration avec Christine Bitouzet (2001) ; puis Alberto Bono (2004). Les résultats ont été confrontés parallèlement à l’observation de modèles de commerce électronique grand public ; (Benghozi, 2001).

21 C’est le cas des communautés organisées autour de filières industrielles telles que celles du transport ou du vin.

22 Le modèle de départ est, à ce titre, très proche de celui de la presse magazine spécialisée.

23 Dans les sites grand public, la stratégie des journaux économiques en ligne est tout à fait symptomatique d’une telle évolution ; dans les sites professionnels, on retrouve cette situation dans les services que certaines associations professionnelles proposent à leurs adhérents.

24 Révélé par l’introduction et l’usage des TIC.


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