La République des sciences dans les guerres révolutionnaires. Les missions des commissaires des sciences et des arts en Europe septentrionale et en Italie (1794-1797)
p. 285-298
Texte intégral
1The Sciences Were Never at War. Sous ce titre provocateur, Gavin de Beer décrivait en 1960 l’état des relations savantes franco-anglaises entre les années 1660 et 1815, plus particulièrement pendant les guerres de la Révolution et de l’Empire : soixante années de guerres sur une durée d’un siècle et demi n’avaient pas suffi à rompre les liens savants de part et d’autre de la Manche1. La formule qui donne son titre à l’ouvrage est empruntée à une lettre du médecin anglais Edward Jenner à l’Institut national de France probablement datée de 18032. Pourtant, à y regarder de plus près, de 1791 à 1803, tout se passe comme si la formule, petite ritournelle, glissait de bouche en bouche : Lavoisier l’utilise en 1791 dans une lettre au Comité d’instruction publique à propos des opérations espagnoles de Méchain3 ; Lakanal la reprend dans une lettre à Étienne Geoffroy Saint-Hilaire datée de 17934 ; ce dernier en aurait fait sa maxime vers 1800 après avoir reçu une lettre de Kléber qui le félicite de sa correspondance avec Banks et ajoute que « ce commerce réciproque des lumières est important pour la science, et les guerres politiques ne doivent jamais l’interrompre5 ». Partant du cas des relations franco-allemandes entre 1789 et 1832, Kai Torsten Kanz aboutissait en 1997 à des conclusions voisines mais néanmoins plus nuancées6. Dans un cas comme dans l’autre, il s’agissait de se déprendre de la manie rétrospective qui tend à lire et interpréter la science à la charnière des deux siècles au travers de ce qu’elle est devenue au cours du XIXe siècle, une « Big Science » dépendant autant des intérêts militaires des États que des intérêts économiques des industries.
2Entre 1794 et 1797, plusieurs commissions sont envoyées dans les pays occupés du Nord de l’Europe ainsi qu’en Italie pour confisquer et ramener en France des objets des sciences et des arts7. C’est en effet l’occupation militaire, même passagère, et non le mode d’administration des territoires qui circonscrit l’espace des confiscations. De l’été 1794 à la fin du printemps 1795, une commission, dirigée de facto par le jardinier en chef du Muséum André Thouin, opère en Europe septentrionale entre le Rhin et la mer du Nord8. L’année suivante, du printemps 1796 à la fin de l’été 1797, une autre commission, à laquelle Thouin participe également, est à l’œuvre dans le nord et le centre de l’Italie. Parallèlement, de septembre 1796 à l’été 1797, une troisième mission dirigée par Anton Keil, Allemand rallié à la Révolution et professeur de droit, opère dans la région entre le Rhin et la Meuse. Ces missions sont l’occasion de rencontres entre les savants européens9. Les premières années de la Révolution ont été marquées par un net ralentissement des échanges au sein de la communauté naturaliste européenne : le nombre de correspondants de Thouin est divisé par presque trois entre 1786, à son apogée, et 179110 ; le nombre des naturalistes allemands visitant Paris diminue nettement entre 1792 et 179511. Cependant, fin 1796, un article de la Décade philosophique indique que « la communication commence à se rétablir entre les diverses parties de la république des lettres en Europe, malgré la continuation de la guerre qui l’avait interrompue12 ». Les trois missions françaises s’opèrent ainsi de part et d’autre de la progressive restauration de la République des lettres. Comment évoluent ces relations savantes transnationales au cours des voyages des commissaires français venus en Europe du Nord et en Italie pour y confisquer des collections et des jardins ? L’étude portera d’abord sur l’étrange absence de réactions aux saisies naturalistes, puis sur l’endurance des sociabilités entre les commissaires et les savants rencontrés et, enfin, sur le commerce des sciences au cours des missions de confiscation.
L’absence de réactions aux confiscations naturalistes
3Les confiscations de collections naturalistes, cabinets et jardins, ne suscitent que peu de réactions en France comme ailleurs en Europe. Les saisies artistiques et bibliographiques, notamment en Italie mais aussi dans le monde rhénan, ont pourtant suscité de vives protestations mobilisant les gens de lettres de différents pays et conduisant parfois à l’émeute13. Il est possible d’appréhender les réactions aux saisies naturalistes à trois niveaux et selon trois types de sources : sentiments privés tels qu’ils peuvent ressortir des correspondances savantes ou familiales conservées dans des fonds privés ; intervention des autorités administratives pour dénoncer une saisie ou exiger une restitution et qui serait conservée dans les archives publiques ; organisation d’un débat sur les confiscations françaises, débat rendu public par l’imprimé. En Europe septentrionale et en Italie, nous n’avons pu trouver de réactions individuelles aux confiscations françaises, ce qui ne veut bien sûr pas dire qu’il n’y en eut pas. De même, à notre connaissance, aucune réaction administrative ne concerne spécifiquement les saisies naturalistes, à la différence des confiscations de livres et d’œuvres d’art. Bénédicte Savoy a étudié le cas de la plainte de la municipalité de Cologne après la saisie, en novembre 1794, de l’ancien cabinet des Jésuites devenu propriété de la ville14. La plainte, relayée par la municipalité de Cologne, concerne principalement des livres et des monnaies et seulement marginalement des spécimens naturalistes. Nous n’avons pas non plus trouvé trace de réactions publiques aux saisies des collections naturalistes lors du débat qui s’organise sur les saisies françaises à partir de 1796. Bénédicte Savoy, qui a étudié minutieusement la presse allemande, n’a pas relevé de récriminations portant spécifiquement sur des objets d’histoire naturelle15. Cette absence de réactions est surprenante et mérite d’être analysée.
4Afin de mieux comprendre cette singularité, il nous faut faire un détour par les réactions aux saisies artistiques. En juillet 1797, le diplomate allemand Meyer, en mission à Paris, dénonce la « manière équivoque de rassembler des Musées » qui fait ressembler Paris à Rome « à l’époque de sa liberté expirante & de son système de pillage16 » :
« Le plan de Buonaparte de dépouiller l’Italie de tous ses chefs d’œuvres, & de transplanter dans un climat étranger les antiquités grecques, naturalisées dans cette belle contrée par la possession millénaire, était l’objet général des conversations.
Je vis partir des commissaires pour aller former à Rome un tribunal d’inquisition pour les chefs d’œuvres de l’art, & très-peu de gens enviaient leur mission. Plusieurs journaux prenaient les armes pour défendre cette disposition ; mais à Paris l’opinion publique était très partagée. Quelques-uns des meilleurs journaux Allemans ont exposé les raisons très-graves, d’après lesquelles les Allemans, & beaucoup de Français, prévoyans & raisonables, combattaient ce projet. L’opinion très-publique & défavorable des savans & des artistes Parisiens a été repoussée par l’autorité, ou combattue par des sophismes.
Je ne veux pas me jetter [sic] dans la répétition des raisons solides d’après lesquelles on blâmait cette entreprise, ni des défenses sophistiques de ses partisans, étrangers à la voix de la justice sur l’usurpation de la propriété d’une nation ; ces hommes injustes, soit par ignorance, soit pas un zèle ultra-patriotique, rejettent tous les motifs présentés par les meilleurs artistes, dont le patriotisme n’est pas douteux, surtout contre le déplacement des sculptures chefs-d’œuvre de la Grèce, qui me paraissent appartenir nécessairement à ce territoire classique, où peuvent exclusivement se former les disciples de l’art de la Grèce […].
La suite nous apprendra si le traité fait avec Pie VI pour la livraison forcée des plus belles statues sera exécuté, & si le peuple Romain verra tranquillement l’enlèvement de cette propriété nationale. »
5En quelques lignes, Meyer décrit la situation des esprits à Paris où il réside, à Rome dont les bruits lui viennent par bribes et en Allemagne, d’où il est originaire. Dès l’été 1796, dans la foulée des confiscations italiennes, un débat public s’ouvre en France qu’Édouard Pommier qualifie avec justesse de « polémique17 ». Il est possible de présenter succinctement les termes de cette guerre des discours qui oppose la liberté française au ciel italien : d’un côté, le discours officiel du « patrimoine libéré » qui fait du génie de la liberté la cause première de la création artistique et justifie ainsi le « rapatriement » des œuvres dans la nouvelle Athènes ; de l’autre, le discours encore minoritaire du patrimoine national qui lie les œuvres à leur « pays natal », c’est-à-dire à leurs contextes de production et d’exposition, et voit dans leur transfert à Paris une « captivité18 ». Meyer indique que l’opinion publique parisienne est très partagée, notamment entre les publicistes souvent favorables aux saisies et les artistes et savants qui lancent une pétition19. Cette polémique s’élargit bientôt à l’échelle de l’Europe. Encore faut-il remarquer que la ligne de fracture entre condamnation et justification des saisies ne se superpose pas à la frontière entre le dedans et le dehors de la République comme le montre assez l’exemple allemand. En 1797, Meyer blâme ainsi les « défenses sophistiques » des partisans des saisies et publie une lettre rédigée au mois de juin par l’historien Schloezer de l’université de Göttingen sur l’emploi du mot « Vandalisme » :
« Cessez d’être injuste envers un peuple Allemand, et d’appeler Vandalisme les horreurs que les nouveaux Francs de la dernière Convention ont commis dans leur patrie. Je connais les Vandales intimement, même de source […] et jusqu’à ce moment je n’ai trouvé nulle part un seul mot, qui prouve que les Vandales ayent jamais détruit à dessein les chefs d’œuvre de l’art, surtout antiques, non plus les Goths, quoique des ignorants en accusent généralement ces deux peuples20. »
6« Vandalisme », le mot serait donc fort mal à propos pour définir la « barbarie française ». Mais en 1798, Johann Ludwig Völkel, antiquaire et bibliothécaire de la cour du Landgrave de Hesse, rédige un texte savant sur les confiscations romaines d’objets grecs, discours que Millin utilise pour justifier les saisies françaises, avançant que celles-ci « engageront peut-être les Italiens à reprendre les fouilles négligées depuis long-temps, pour remplir les vuides [sic] causés par les derniers enlèvemens21 ». En 1803, Friedrich Carl Ludwig Sickler formule la thèse d’un cheminement, dans la longue durée, des œuvres de l’Orient vers l’Occident, de Troie à la péninsule grecque, puis en Italie et enfin à Paris22. Le transfert dans la capitale française des collections artistiques italiennes est ainsi justifié par une petite philosophie de l’Histoire, cette migration au long cours étant presque « dans le plan de la nature » selon Millin23. Ces quelques exemples tirés des réactions allemandes suffisent à montrer que l’on ne parle pas seulement d’où l’on vient. Les saisies sont parfois condamnées en France et justifiées au sein même des pays confisqués.
7Ce bref détour par les choses de l’art nous offre deux éléments pour mieux comprendre l’absence de réactions aux confiscations naturalistes : l’un relève de la chronologie ; l’autre de la conception même du spécimen. D’une part, ce n’est qu’au moment des confiscations italiennes, à partir de 1796, qu’est formalisé le discours du patrimoine national. Or lors de la mission italienne, à la différence de ce qui s’est passé plus tôt en Europe septentrionale, ce sont principalement les œuvres d’art qui sont confisquées, les collections naturalistes ayant été relativement délaissées. D’autre part, il nous semble que l’absence de réactions tient aussi au sens donné au « patrimoine ». Dans le moment révolutionnaire, la notion est redéfinie. Dans les premières années de la Révolution, elle impliquait principalement la nécessaire sauvegarde des œuvres d’art, le sauvetage du patrimoine étant une réponse au vandalisme. Depuis les saisies artistiques italiennes de 1796, le discours patrimonial insiste sur le lien entre les œuvres d’art et leur « pays natal » : l’œuvre d’art emporte désormais avec elle un peu de son sol natal, comme on dit de l’exilé qu’il emporte un peu de sa patrie à la semelle de ses souliers. Or, pour les objets naturels, cet ancrage dans un territoire originel n’est jamais mobilisé pour condamner les saisies. Pourtant, ceux-ci sont habituellement pensés dans leurs rapports avec un contexte géographique ou plutôt climatique, bref avec un sol natal. La chose est évidente pour les plantes vivantes. Au cours du siècle, les naturalistes s’interrogent sur la position zonale des plantes quand il est question d’acclimater des espèces exotiques. Pour les animaux, les auteurs font souvent référence aux « lieux qui les ont vu naître24 ». Migrations, retours au bercail ou exils nostalgiques, les animaux vivants ont l’âme accrochée à un sol25. Parallèlement, la rhétorique de l’acclimatation est mobilisée à propos des choses de l’art. Meyer, nous l’avons vu, mentionne « le plan de Buonaparte de dépouiller l’Italie de tous ses chefs-d’œuvres, & de transplanter dans un climat étranger les antiquités grecques, naturalisées dans cette belle contrée ». Alors que les êtres naturels relèvent d’une patrie originelle et que les œuvres d’art peuvent être transplantées et naturalisées, les notions de Nature et de patrimoine ne se rencontrent jamais. Avant le XIXe siècle, les saisies naturalistes ne sont pas appréhendées au travers d’un discours patrimonial et nous ne saurions parler sans anachronisme d’un « patrimoine naturaliste ». Il est encore possible d’avancer deux autres raisons à cette absence de réactions aux saisies. Elles tiennent à la nature même du spécimen d’histoire naturelle. La possibilité de multiplier les êtres vivants fait de leur confiscation « une conquête qui sans appauvrir les vaincus enrichit les vainqueurs » selon la formule de justification des commissaires26. Les spécimens de cabinets ne sont que très rarement des représentants uniques de leur espèce et la notion de spécimen type, c’est-à-dire le choix d’un individu comme seul représentant de l’espèce, n’apparaît qu’à la fin du XIXe siècle27. Jusque-là, un spécimen peut aisément être remplacé par un autre de la même espèce ; sa valeur peut être grande, elle n’est jamais unique.
Les relations anciennes de la République naturaliste
8Les journaux de voyage de Thouin décrivent les rencontres entre les commissaires révolutionnaires et les savants et amateurs d’histoire naturelle, dans les pays septentrionaux puis en Italie. En s’appuyant sur ce récit, quelques sources d’archives complémentaires et une importante littérature secondaire, il est possible d’observer les relations anciennement entretenues par les commissaires français avec les savants rencontrés lors des deux voyages. La production du savoir naturaliste, c’est-à-dire essentiellement le travail de nomenclature et de classification, requiert la mise en place de réseaux d’échanges d’informations, de dessins et plus encore de spécimens. Ces réseaux s’organisent d’abord à l’échelle régionale. Entre 1776 et 1822, Giorgio Santi est ainsi en relation épistolaire avec environ la moitié des savants italiens rencontrés par les commissaires au cours de leur mission dans la péninsule28. Le milieu naturaliste italien est un monde de l’interconnaissance comme pourrait également le confirmer l’étude d’autres correspondances comme celles de Fabbroni ou d’Allioni29. Or ces réseaux épistolaires intègrent aussi des commissaires français et d’abord Thouin, au « centre d’une correspondance qui [s’étend] dans toutes les parties du monde » selon Cuvier30. Depuis longtemps, Thouin échange lettres et graines avec plusieurs des savants rencontrés comme Brugmans, Nahuys, O. Targioni Tozzetti et Fabbroni31. Le cas italien révèle également que nombre de ces savants connaissent la France pour avoir déjà entrepris un pèlerinage savant dans la capitale française : le marquis de Malaspina a « voyagé en France et s’y [est] lié avec plusieurs de nos illustres savants » sans doute en 177732 ; entre 1775 à 1782, Santi a été vu « à Paris pendant plusieurs années suivant avec assiduité le cours de notre Muséum33 » ; Fontana et Giovanni Fabbroni y séjournent entre 1776 et 177934 ; Volta réalise des expériences électrostatiques devant l’Académie des sciences en présence de Monge en mars 178235. En outre, de nombreux savants appartiennent au monde des loges européennes. Sur la quinzaine de savants rencontrés en Italie par les commissaires, environ la moitié seraient maçons comme Santi, Moscati, Fabbroni, Fontana, Mascagni et peut-être aussi Zuccagni36. Dans les relations avec les commissaires français, cette appartenance maçonnique a aussi pu jouer un rôle, notamment par l’intermédiaire des Neuf Sœurs dont Santi, Fontana, Fabbroni sont membres tandis que Monge enseigne au lycée, émanation directe de la loge37. Le petit monde naturaliste européen semble ainsi structuré à la fois par les réseaux de la correspondance épistolaire et par la commune appartenance de nombre de ces savants aux loges maçonniques. C’est sans doute là, dans l’ancienneté et la solidité des liens entretenus avec Paris, le Muséum d’histoire naturelle et ses professeurs, qu’il faut rechercher les premières raisons du maintien des réseaux de la sociabilité naturaliste à l’échelle européenne malgré les guerres et les confiscations.
9L’accueil réservé aux commissaires français dépend essentiellement de la logique propre au fonctionnement des sciences naturelles mais les facteurs politiques y ont aussi leur place. Les savants des pays soumis aux confiscations ont en partage avec les commissaires certaines idées propres aux Lumières européennes et quelques principes tirés de l’épisode révolutionnaire. Giorgio Cosmacini, dans une étude sur le milieu médical lombard entre Révolution et Restauration, a pu montrer que celui-ci était en quelque sorte préparé à recevoir les Français par des réformes déjà entreprises notamment au sein de l’université de Pavie38. Le sentiment n’est pas très différent à propos du milieu naturaliste toscan. À partir des années 1780, Fabbroni et Santi soutiennent auprès du grand-duc des projets de réformes d’inspiration physiocratique : libéralisation du commerce des grains, introduction de nouvelles plantes et amélioration des procédés agricoles. D’après Renato Pasta, on observerait ainsi, à partir des années 1770 et 1780, une convergence de vues entre le projet réformateur de Pierre Léopold et les idées répandues dans les loges dont les savants sont membres39. Ils ont en partage des idées physiocratiques et libérales reposant sur des principes utilitaristes, sur le primat accordé à la propriété et sur la réalisation du bonheur public. Ces convergences intellectuelles expliquent à leur tour l’adoption, au moins partielle, des principes révolutionnaires venus de l’autre côté des Alpes : Fontana, proche des idées révolutionnaires, passe quelque temps en prison au moment de la révolte antifrançaise d’Arezzo ; les réformes léopoldines rencontrent un très vif soutien de la part de Thouin pour lequel elles devraient accroître la productivité agricole40 ; en 1799, à Paris, Fabbroni publie De la Toscane où il propose une lecture libérale de la Révolution associant le régime léopoldin au Directoire avec pour mots-clés ceux de « liberté » et de « propriété41 ». Dans les pays septentrionaux, la situation est peut-être différente quoique les idées révolutionnaires d’un naturaliste allemand comme Georg Forster l’aient amené à s’engager dans la République de Mayence puis à émigrer à Paris42. C’est d’ailleurs en Allemagne que les commissaires rencontrent le baron Hüpsch43 :
« Nous avons visité plusieurs cabinets d’histoire naturelle, entre autres celui du baron Hüpsch, en réputation parmi les étrangers et les voyageurs ; ce naturaliste ami de la Révolution française a des mœurs simples et douces. Sa fortune a été employée à former une vaste collection en histoire naturelle et en toutes sortes d’objets de science, d’arts et de curiosités. Ami des pauvres, il leur distribue journellement des remèdes et leur donne des soins. Il a offert de rendre son cabinet public, afin d’en faire jouir ses concitoyens. Il a donné à la République un manuscrit sur vélin du temps de Charlemagne et un bas-relief en marbre représentant Hercule. »
10Il entre sans doute une part d’opportunisme dans le comportement de Hüpsch qui fait allégeance aux vainqueurs du jour en leur offrant deux pièces de sa collection. Les commissaires n’hésitent cependant pas à l’ériger en modèle du savant républicain : il se distingue moralement par ses mœurs vertueuses et sa philanthropie et, politiquement, par sa proximité avec les idéaux de la Révolution et l’ouverture démocratique de ses collections au public. Les cas toscan et allemand révèlent ainsi que le bon accueil réservé aux commissaires français tient aussi à des convergences politiques, soit que la diffusion des idées nouvelles de la fin du siècle ait préparé le terrain aux principes révolutionnaires, soit que certains savants se montrent sensibles aux idées républicaines nouvelles, tout au moins dans leur version conservatrice qui est aussi celle des Thermidoriens. À cette occasion, se recrée un « parti français » au sein de la communauté scientifique européenne.
Le commerce des sciences
11Les rencontres avec les commissaires révolutionnaires obéissent encore aux formes de la sociabilité savante d’Ancien Régime. Certes, comme l’écrit Gilles Bertrand, la vieille habitude de la visite des cabinets commence à passer lors de la campagne italienne de Bonaparte au profit de la découverte des espaces ruraux44. Cependant, lors de ses deux missions, Thouin mêle formes anciennes et plus nouvelles du voyage savant. Il observe les campagnes, parfois accompagné de savants du cru comme le marquis de Malaspina qui le conduit dans les alentours de Pavie45. Mais il visite encore les cabinets naturalistes des villes, devenus au cours du siècle des étapes nécessaires du Grand Tour46. Les savants rencontrés lui ouvrent les portes de leurs cabinets, le guidant au travers des collections dont ils sont propriétaires ou directeurs : Scarpa le conduit dans la galerie d’anatomie de Pise ; Fabbroni dans le cabinet minéralogique à Florence ; Mascagni dans le cabinet d’histoire naturelle de Sienne ; Fontana dans celui de Florence47. Les commissaires font ainsi le tour du propriétaire, s’attardant sur les pièces les plus rares ou curieuses, ce qui s’inscrit dans une vieille habitude mondaine de monstration des collections aux voyageurs de passage. Cet accueil amical peut surprendre alors que le but des missions est précisément la saisie des collections étrangères. Il se comprend mieux quand on considère que les cabinets, propriétés des savants, sont préservés au nom de motifs idéologiques et politiques. Il s’agit de respecter le principe de la propriété des particuliers, de « produire un bon effet auprès d’un peuple où nos ennemis dans leur fuite avaient dépeint les Français comme des Barbares48 » et de présenter la nouvelle République comme protectrice des sciences, des arts et de l’Instruction publique. Ainsi, Keil trouve à Coblence de superbes cabinets « mais ces cabinets appartiennent à des particuliers ; la nation française respecte les propriétés des individus, par conséquent je n’y ai pas touché49 ». Parfois, les propriétaires sont d’ailleurs aidés en particulier lorsque leurs jardins et cabinets sont ouverts au public. À Bonn, les quatre commissaires ont découvert trois jardins : ils confisquent les deux jardins de plantes ornementales mais promettent des envois au seul jardin destiné à l’Instruction publique50. À Cologne, les représentants du peuple se montrent particulièrement généreux avec Hüpsch. Ils lui accordent « la jouissance d’une maison d’émigré pour y placer les nombreuses collections entassées dans un local trop resserré et une gratification proportionnée à la dépense que ce déplacement occasionnera ; un jardin attenant à cette maison servira à cultiver des plantes usuelles à l’usage des hôpitaux51 ». Les motifs de la préservation et de l’enrichissement des cabinets savants ne sont donc pas tout à fait les mêmes : les collections particulières sont préservées au nom du respect de la propriété privée, du moins tant que leur propriétaire n’est pas défini comme un « ennemi idéologique » ; lorsqu’elles sont aidées, c’est d’abord en raison du large accès qu’elles offrent au public et de leur finalité pédagogique.
12Les rencontres permettent également aux savants d’échanger des références bibliographiques, des données tirées de l’observation ou des résultats d’expérimentations52. À Rotterdam, Ten Haaff décrit à Thouin ses expériences sur les tourbes. À Turin, Allioni présente au commissaire l’économie rurale du Piémont. À Milan, Castiglioni discute avec lui des mérites respectifs des voyageurs et des naturalistes français et Moscati lui rapporte les résultats de recherches sur la qualité nutritive des aliments. À Florence, Ottaviano Targioni Tozzetti lui indique les « produits naturels » de la Toscane. Surtout, à Bologne, Galvani reproduit devant Thouin et avec l’aide de son neveu les expériences sur l’« irritabilité des nerfs des animaux » qui l’ont fait connaître53. Au travers de ces démonstrations, Galvani, qui refuse pourtant de faire allégeance à l’occupant français, se cherche des alliés parisiens, et notamment l’appui de Berthollet, dans la controverse savante qui l’oppose alors à Volta sur l’origine, animale ou métallique, de l’électricité54. Enfin, ces sociabilités de voyage prennent une dernière forme, sans doute plus révélatrice des relations continuées entre naturalistes européens, celle du don de livres ou de spécimens naturels. Parmi les quelque quatre-vingts livres d’histoire naturelle recueillis par les commissaires français dans leur mission italienne, un quart leur ont été donnés par les savants de la péninsule comme Moscati et surtout Pini qui offre « dix-huit échantillons de minéraux peu connus et dont la plupart manquent aux collections nationales » accompagnés de cinq « opuscules […] où il parle des susdits minéraux » pour la bibliothèque du Muséum d’histoire naturelle55. Au travers de ces dons, les savants italiens cherchent encore des relais parisiens, essayent de se faire connaître et peut-être aussi bien voir sans qu’il soit pour autant nécessaire de parler à ce propos de patronage.
13Projetons-nous un peu plus loin pour observer l’évolution de ces relations savantes après le départ des commissaires français. Les correspondances n’ont pas cessé après les guerres de la Révolution et de l’Empire et, parfois, elles se sont même nouées lors de la première rencontre avec les commissaires français. Ainsi, Thouin considère que la mission dans les pays du Nord a été « instructive », entre autres raisons, parce qu’il a « lié ou correspondance ou amitié avec des savants distingués56 ». Pour la mission italienne, la correspondance de Santi est éclairante57. Il est en relation avec Thouin entre mars 1797 et 1813, ce dernier lui donnant en 1811 du « monsieur et très ami ». Entre les années 1810 et 1820, il se met aussi en relation avec Faujas de Saint-Fond (1810), René Just Haüy (1811 à 1816), Georges Cuvier (1812) et quelques autres. Quant aux envois de Thouin, ils se poursuivent, puisque dans la liste des plantes envoyées par le Muséum en 1815, figurent les noms de Van Marum, Fabbroni, Targioni Tozzetti et encore Santi58. À côté de cette tradition de l’échange, les savants italiens et leur progéniture continuent également à voyager à Paris : Fabbroni retourne à Paris dès 1798 et envoie son fils y suivre les cours de Lamarck en 179959 ; Volta de passage à Paris en 1801 découvre le cabinet de Berthollet et les serres de Thouin60. Enfin, certains savants rencontrés vont recevoir tous les honneurs sous l’Empire et, parfois, se recycler dans l’administration napoléonienne61 : Spallanzani se voit proposer un poste à Paris avant de mourir en 179962 ; Moscati est comblé d’honneurs ; Volta obtient une pension et devient comte et sénateur du royaume de Lombardie en 1801 ; Fabbroni reçoit une dédicace amicale de Millin dans le Magasin encyclopédique en 179963, la légion d’honneur et une nomination comme directeur des Ponts et Chaussées des départements italiens en 181064 puis un éloge historique de Cuvier65 ; Santi est nommé vice-recteur de l’université de Pise et inspecteur de l’Académie impériale où il participe à la réforme éducative de l’Italie napoléonienne à partir de 1810 sous la houlette de Cuvier66. Les savants toscans Fabbroni et Santi n’hésitent donc pas à se mettre au service du nouveau prince qui est français comme Léopold était autrichien : qu’importe l’origine du pouvoir pourvu qu’il paraisse éclairé. La tradition des Lumières se poursuit donc à l’aube du nouveau siècle, même si les savants ont pris la place des philosophes auprès du prince réformateur.
Conclusion
14L’analyse des relations entre les commissaires français et les savants étrangers donne raison à la thèse de Gavin De Beer. Les sciences naturelles tout au long de la Révolution « ne furent jamais en guerre ». Le cas étudié ici s’inscrit dans des circonstances exceptionnelles, ces voyages savants étant d’abord destinés à saisir les richesses artistiques et scientifiques des pays soumis par les armées révolutionnaires. Pourtant, tout se passe alors comme si les pratiques cosmopolites des Lumières se continuaient dans et malgré les guerres européennes. Dans le bon accueil des commissaires par les savants étrangers entre sans doute une part d’opportunisme politique qui sera bien récompensé sous l’Empire. Mais l’essentiel est ailleurs et la permanence de ces relations tient d’abord à l’ancienneté et à la solidité des réseaux européens d’échange de lettres et de spécimens, à la participation des uns et des autres aux loges maçonniques mais aussi au partage des idées nouvelles, qu’elles soient d’inspiration physiocratique, libérale ou républicaine. C’est peut-être tout simplement que le couple collaboration/résistance est mal taillé pour comprendre les relations savantes à l’échelle européenne durant les guerres de la Révolution et qu’il est impossible de réduire l’« intérêt scientifique » à la seule géopolitique67. Cela dure au moins jusqu’en 1815 comme le montre assez l’état des relations entre Thouin et Brugmans lors des « restitutions » aux puissances victorieuses.
15En 1809, alors qu’il annonce l’envoi de graines au Royaume d’Italie, Thouin écrit d’ailleurs que « la circonscription des États n’est pas celle de la République des Lettres qui n’a de bornes que celles du globe68 ». Cet idéal républicain est sans doute une fiction irénique mais il a une fonction, servant à la fois de liant social pour tout ce petit monde et de support identitaire pour la circulation des textes et des objets dans un domaine de savoir, l’histoire naturelle, qui est, par définition, une science de réseau69. En 1817, Thouin écrit encore à Wallich, intendant du jardin de Calcutta :
« J’ai communiqué avec votre établissement par l’entremise de M. Dacosta, depuis 6 ou 7 ans, en lui faisant des envois de semences de nos récoltes européennes. Mais la distance qui nous sépare et surtout la Révolution française et les guerres cruelles qui en ont été les suites, ont toujours mis des entraves insurmontables à notre correspondance directe et réglée70. »
16Si les guerres de la Révolution et de l’Empire ont perturbé le fonctionnement de la communauté savante européenne en provoquant la raréfaction des circulations (des voyageurs, des lettres, des livres, des spécimens), elles n’ont mis un terme ni aux réseaux transnationaux ni aux amitiés savantes. Parler de la pérennité de ces relations n’implique certes pas l’absence d’un « intérêt national » dans la production du savoir scientifique. Mais cette notion est trop confuse et son emploi revient souvent à réunir des acteurs et des stratégies discursives qu’il s’agirait justement de distinguer. Quand un savant tient le discours de l’intérêt national dans ses correspondances avec les organes gouvernementaux, ne s’agit-il pas d’abord d’une traduction des intérêts scientifiques dans les termes des intérêts politiques71 ?
17L’étude se limite certes à l’histoire naturelle mais divers éléments indiquent que cette constatation peut être étendue à d’autres disciplines, peut-être même à la plus suspecte d’entre elles, la cartographie, considérée comme le savoir par excellence de la domination impériale parce que les cartes, « ça sert d’abord à faire la guerre ». Valeria Pansini a en effet pu observer que la section cartographique française du Piémont se composait principalement de topographes locaux, anciens officiers de l’armée vaincue comme, par exemple, un Marie de Martinel, jacobin, proche des milieux éclairés et membre de la société d’agriculture72. Allons plus avant en partant du cas, bien connu, de la saisie puis de la restitution des collections formées par Labillardière en Océanie. Au cours de l’expédition d’Entrecasteaux lancée à la recherche de La Pérouse en 1791, le voyageur naturaliste rassemble de très nombreux spécimens bientôt saisis par les Hollandais à Java à l’automne 1793, puis envoyés en Grande-Bretagne comme prise de guerre. En 1796, Joseph Banks obtient que le gouvernement anglais remette à Labillardière les collections rassemblées pendant son voyage à la recherche de Lapérouse. Le Magasin encyclopédique précise que dans une lettre à Jussieu annonçant cette restitution, Banks ajoute « qu’il n’a pas cru devoir se permettre de parcourir cette collection, qui sera remise à son auteur, sans avoir été examiné par le dépositaire73 ». La Décade précise alors que « cette restitution ne peut que faire beaucoup d’honneur au gouvernement Anglais ; sa conduite honore l’humanité et les nations civilisées, et le plaisir que nous ressentons en lui rendant cette justice prouve que nous voudrions être plus souvent dans le cas d’approuver ses mesures74 ». Dans cette affaire, l’intervention décisive de Banks apparaît moins comme le geste singulier, et par là remarquable, d’un gentleman anglais, que comme le produit et le symbole de l’organisation d’un domaine de savoir, l’histoire naturelle, à l’échelle européenne.
Notes de bas de page
1 Gavin De Beer, The Sciences Were Never at War, Londres/Édimbourg/Paris, Thomas Nelson and Sons, 1960.
2 Ibid., p. 197. La formule précise est écrite au présent.
3 Charlotte H. Boatner, « Certain Unpublished Letters from French Scientists of the Revolutionary Period Taken from the Files of Joseph Lakanal », Osiris, 1, 1936, p. 177.
4 Ibid., p. 177.
5 Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, Vie, travaux, et doctrine scientifique d’Étienne Geoffroy Saint-Hilaire…, Paris, Éd. Bertrand, 1847, p. 171 et n. 1.
6 Kai Torsten Kanz, Nationalismus und internationale Zusammenarbeit in den Naturwissenschaften. Die deutsch-französichen Wissenschaftsbeziehungen zwischen Revolution und Restauration. 1789-1832, Stuttgart, Franz Steiner, 1997.
7 Voir les cartes à la fin de cette cobtribution, p. 297-298.
8 Voir la contribution de Madeleine Van Strien-Chardonneau dans ce volume.
9 Dans les pays du Nord, ils rencontrent le baron Hüpsch à Cologne, Jean-André Saur à Andernach, les frères Geervers, Van Schinne, William Rouppe et Gérard Ten Haaffà Rotterdam, Martinus Van Marum à Harlem, les Themaat et Brakel à Utrecht et surtout Brugmans à La Haye. En Italie, ils rencontrent Carlo Allioni à Turin, Pietro Moscati, Alfonso Castiglioni et Alessandro Volta à Milan, Pascal Baldassare à Parme, Paolo Mascagni à Sienne, Ottaviano Targioni Tozzetti, Attilio Zuccagni, Giovanni Fabbroni et Felice Fontana à Florence, Giorgio Santi à Pise ainsi que Luigi Galvani et son neveu à Bologne (d’après : Claude-Joseph Trouvé, Voyage dans la Belgique, la Hollande et l’Italie. Par feu André Thouin, Paris, Chez l’éditeur, 1841, 2 t.)
10 Emma C. Spary, Le Jardin d’Utopie. L’Histoire naturelle en France de l’Ancien Régime à la révolution, Paris, Muséum national d’histoire naturelle, 2005 [éd. orig. 2000], p. 85, fig. b.
11 Kanz, op. cit., p. 108-111.
12 Décade philosophique, vol. 11 (septembre à novembre 1796), p. 557 : « République des lettres ».
13 Édouard Pommier, L’Art de la Liberté. Doctrines et débats de la Révolution française, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des histoires », 1991, p. 403-443 ; Bénédicte Savoy, Patrimoine annexé. Les biens culturels saisis par la France en Allemagne autour de 1800, Paris, Maison des sciences de l’homme, 2003, vol. 1, p. 201-238.
14 Savoy, op. cit., t. 1, p. 40-41.
15 Je remercie Benédicte Savoy pour ses remarques sur ce point.
16 Friedrich Johann Lorenz Meyer, Fragments sur Paris, Hambourg, s.n., 1798 [éd. orig. 1797],t. II, p. 168-183 ; ici, p. 178-180.
17 Pommier, op. cit., p. 403-443.
18 Ibid., p. 407-408 et p. 423-424. La thématique du contexte géographique et historique des œuvres d’art a d’abord été élaborée par Roederer dans le Journal de Paris à l’été 1796, puis reprise et amplifiée la même année par Quatre-mère de Quincy dans ses Lettres à Miranda.
19 Décade philosophique, vol. 10 (juin à août 1796), p. 431-432 : « Sur la pétition des artistes concernant les œuvres italiennes ».
20 Meyer, op. cit.,t. II, p. 184-185.
21 Johann Ludwig Völkel, Ueber die Wegführung der Kunstwerke aus den eroberten Ländern nach Rom…, Leipzig, Breitkopf und Härtel, 1798 ; Magasin encyclopédique, 4e année, vol. 5, p. 406-407 : « Sur le livre de Voelkel sur les confiscations à l’époque de Rome ».
22 Friedrich Carl Ludwig Sickler, Geschichte der Wegnahme und Abführung vorzüglicher Kunstwerke aus den eroberten Ländern in die Länder der Sieger…, Gotha, C. W. Ettinger, 1803.
23 Magasin encyclopédique, 1804, vol. 5, p. 179-195 : « Sur l’histoire de l’enlèvement et du transport d’ouvrages remarquables de l’art, du pays des vaincus dans ceux des vainqueurs ; par F. K. L. von Sickler ». Millin mentionne également les écrits de Johann Ludwig Völkel et Karl August Boettiger en 1798.
24 L’expression se retrouve chez : G.-L. L. Buffon et C.-N.-S. Sonnini De Manoncourt, Histoire naturelle, générale et particulière, Paris, F. Dufart, an ix [1800/1801], t. 39, p. 289 ; J.-B. Pujoulx, Promenade au Jardin des plantes, à la ménagerie et dans les galeries du Muséum d’histoire naturelle, Paris, Librairie économique, 1803, vol. 2, p. 192.
25 G. Cuvier, B.-G.-E. Lacepède et É. Geoffroy Saint-Hilaire, La Ménagerie du Muséum national d’histoire naturelle…, Paris, Miger, an xii [1803/1804], p. 20 : à propos d’un projet de ménagerie, les auteurs indiquent que les animaux « vivant au milieu des plantes et des arbres de leur pays, à l’ombre du moins des végétaux les plus analogues à ceux de leur patrie, se livrant comme sur leur terre natale, à des jeux et à leurs mouvements chéris, ne sentant ni l’exil, ni la perte de leur indépendance, présenteront à l’œil de l’observateur le tableau fidèle des productions de la nature dans les contrées les plus remarquables du globe ».
26 AN, F/17/1276 : Lettre de Thouin et Faujas au Comité de salut public et au Comité d’instruction publique. Bruxelles, le 6 vendémiaire an iii.
27 Voir Lorraine Daston, « Type Specimens and Scientific Memory », Critical Inquiry, vol. 31, no 1, 2004, p. 153-182.
28 D’après l’inventaire complet des correspondants de Santi proposé par Mario De Gregorio, « Lettere a Giorgo Santi (1776-1822) », Nuncius, fasc. 2, 1989, p. 165-245. Santi reçoit des lettres de Fabbroni (1798-1822), Mascagni (1810-1815), O. Targioni Tozzetti (1798-1822), Spallanzani (1794-1795), Pascal (1795-1799) et Zuccagni (1799).
29 Dizionario Biografico Degli Italiani, s.v. « Allioni Carlo » : il est notamment en correspondance avec Scarpa, Spallanzani, Targioni Tozzetti mais aussi avec Banks, Fabricius, Linné, Haller, Réaumur et Saussure.
30 Georges Cuvier, « Éloge historique de Thouin », Recueil des éloges historiques lus dans les séances publiques de l’Institut de France, Paris, Firmin Didot, 1861,t. II, p. 355-367 ; ici, p. 360. Voir aussi Spary, op. cit., p. 87-102.
31 MNHN, MS 313 : « Liste des personnes auxquelles il faudra envoyer des semences en février 1791. À choisir dans les tiroirs depuis le no 14 jusqu’au no 31 et demi, c’est-à-dire les centaures qui remplissent la moitié du tiroir » ; « État de la distribution des graines en 1792. À choisir dans les tiroirs depuis le no 32 jusqu’à et y compris le no 45 pour les jardins de Botanique » ; Trouvé, op. cit., t. 1, p. 270 et t. 2, p. 227.
32 Trouvé, op. cit., t. 2, p. 90. Voir aussi Giovanni Sforza, « Un Feudatario giacobino », Giornale Storico e Letterario della Liguria, vol. 4, no 1-3, 1903, p. 8.
33 Op. cit., t. 2, p. 424. Voir aussi Vittorio Simonelli, « Diario di un viaggio da Parigi a Firenze nel 1782 del. Prof. Giorgio Santi, naturalista e diplomatico pientino », Bullettino senese di storia patria, 1926-1927, p. 3-33 et 103-118 ; et De Gregorio, art. cité, p. 165-169.
34 Renato Pasta, Scienza politica e rivoluzione. L’opera di Giovanni Fabbroni (1752-1822), intellettuale e funzionario al servizio dei Lorena, Florence, Leo S. Olschki, 1989, p. 58-91.
35 René Taton, L’Œuvre scientifique de Gaspard Monge, Paris, PUF, 1951, p. 326.
36 Renato Pasta, « Fermenti culturali e circoli massonici nella Toscana del Settecento », in Gian Mario Cazzaniga (dir.), Storia d’Italia, Annali 21 : La Massoneria, Turin, Einaudi, 2006, p. 447-483. Je remercie Renato Pasta pour ses indications complémentaires.
37 Ibid., p. 462 et p. 478-479 ; François Pairault, Gaspard Monge. Le fondateur de Polytechnique, Paris, Tallandier, 2000, p. 53.
38 Giorgio Cosmacini, « Teorie e prassi medichi tra Rivoluzione e Restaurazione. Dall’ideologica giacobina all’ideologica del primato », in Franco Della Peruta (dir.), Storia d’Italia, Annali 7 : Malattia e medicina, Turin, Einaudi, 1984, p. 153-205.
39 Pasta, art. cité, p. 470-477.
40 Trouvé, op. cit., t. 2, p. 244-245. Voir aussi Pasta, op. cit., p. 416-417.
41 Dizionario Biografico Degli Italiani, s.v. « Fabbroni, Giovanni ».
42 Kanz, op. cit., p. 123.
43 AN, F/17/1277 : Lettre des commissaires à la Commission des Arts, Bonn, le 24 frimaire an III.
44 Gilles Bertrand, « Regard des voyageurs et image de l’Italie : quelques réflexions autour de la campagne de Bonaparte », in Jean-Paul Barbe, Roland Bernecker (dir.), Les intellectuels européens et la campagne d’Italie. 1796-1798, Münster, Nodus Publikationen, 1999, p. 53-54.
45 Trouvé, op. cit., t. 2, p. 90
46 Osvaldo Raggio, « Collecting Nature in Genoa, 1780-1870. From aristocratic patronage to civic patrimony », Journal of the History of Collections, vol. 10, no 1, 1998, p. 41.
47 Trouvé, op. cit., t. 2, p. 82, 227, 274 et 320.
48 AN, F/17/1277 : Lettre de Faujas et Thouin à la Commission des Arts, Bonn, le 24 frimaire an III.
49 AN, F/17/1276 : Lettre de Keil au Bureau consultatif pour l’amour des Lettres, Coblence, le 4 brumaire an V.
50 AN, F/17/1245 : Lettre de Faujas et Thouin au Comité de salut public, Bonn, le 10 nivôse an III.
51 AN, F/17/1277 : Lettre de Faujas et Thouin à la Commission des Arts, Bonn, le 24 frimaire an III.
52 Pour ce qui suit : Trouvé, op. cit., t. 1, p. 218 et t. 2, p. 26, 58, 66 et 249-250.
53 Ibid., t. 2, p. 196.
54 Voir notamment Giovanni Polvani, Alessandro Volta, Pise, Maison galiléenne, 1942, p. 233-379.
55 AN, F/17/1275-A : « Liste de livres d’histoire naturelle, d’agriculture et de voyages pour le Muséum d’histoire naturelle », Rome, germinal an v ; Notes des minéraux adressés au Muséum national de la République par le Prof. Pini, s.l. n.d. ; Liste d’objets d’histoire naturelle saisis à Milan, s.l. n.d.
56 Trouvé, op. cit., t. 1, p. 349.
57 De Gregorio, art. cité, p. 232-234 et p. 237-238.
58 MNHN, MS 313 : « État de la distribution des végétaux, en graines et en nature pendant l’année 1815 », [Paris, 1815]. Voir aussi Pasta, op. cit., p. 85 ; Yvonne Letouzey, Le jardin des Plantes à la croisée des chemins avec André Thouin. 1747-1824, Paris, Éditions du Muséum, 1989, p. 619.
59 Pasta, op. cit., p. 443-456. Voir aussi Pietro Corsi, Lamarck, genèse et enjeux du transformisme. 1770-1830, Paris, CNRS, 2000, p. 363.
60 Voir l’extrait du Journal de Luigi Valentino Brugnatelli, qui accompagne Volta lors de son séjour à Paris du 26 septembre au 4 décembre 1801 dans Alberto Gigli Berzolari, Alessandro Volta e la cultura scientifica e tecnologica tra ‘ 700 e ‘ 800, Milan, Cisalpino e Istituto Editoriale Universitario, 1993, p. 435-494.
61 Voir Pasta, art. cité, p. 483 ; De Gregorio, art. cité, p. 183.
62 Pericle Di Pietro, Lazzaro Spallanzani, Modène, Aedes Muratoriana, 1979, p. 40.
63 Magasin encyclopédique, 5e année, t. 2, 1799, p. 7.
64 Dizionario Biografico Degli Italiani, s.v. « Fabbroni, Giovanni ».
65 Cuvier, « Éloge historique de Fabbroni », op. cit.,t. III, p. 373-394. Sur les relations entre Cuvier et Fabbroni, voir : Dorinda Outram, « Storia naturale e politica nella corrispondenza tra Georges Cuvier e Giovanni Fabbroni », Ricerche storiche, vol. 12 (1982), no 1, p. 185-235 ; Martin Rudwick, « Recherches sur les ossements fossiles : Georges Cuvier et la collecte d’alliés internationaux », in Claude Blanckaert et al. (dir.), Le Muséum au premier siècle de son histoire, Paris, Muséum national d’histoire naturelle, 1997, p. 593-594.
66 De Gregorio, art. cité, p. 232-234 et p. 181-183. Voir aussi Georges Cuvier, Discours prononcé par Monsieur Cuvier… devant les professeurs de l’Académie de Pise le 21 décembre 1809, Pise, Imprimerie de la Société littéraire, 1809.
67 Marie-Noëlle Bourguet, « La Collecte du monde : voyage et histoire naturelle (fin XVIIe siècle-début XIXe siècle) », in Blanckaert et al., op. cit., p. 193.
68 Cité dans Letouzey, op. cit., p. 598.
69 Sur la République des sciences au siècle des Lumières, voir : Lorraine Daston, « The Ideal and Reality of the Republic of Letters in the Enlightenment », Science in Context, vol. 4, no 2, 1991, p. 367-386.
70 Letouzey, op. cit., p. 631.
71 Sur cette question, voir l’analyse lumineuse du cas Pasteur par Bruno Latour : Bruno Latour, La Science en action. Introduction à la sociologie des sciences, Paris, La Découverte, Poche, 2005 [nouv. éd.], p. 285.
72 Valeria Pansini, « Saisir des cartes et des hommes : la politique de conquête des institutions cartographiques françaises (1794-1815) », présentation orale à la 21e conférence annuelle de la Society for the Study of French History à l’Université de St Andrews, le 3 juillet 2007.
73 Magasin encyclopédique, 2e année, vol. 3 (1796), p. 423-424.
74 Décade philosophique, vol. 10 (juin à août 1796), p. 566-567 : « Restitution anglaise de la collection de Labillardière ».
Auteur
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008