La traduction comme pratique politique chez Antoine-Gilbert Griffet de Labaume (1756-1805)
p. 233-243
Texte intégral
1Le marché de la traduction ne cesse de s’accroître au cours du XVIIIe siècle, jouant un rôle essentiel non seulement dans les transferts culturels mais encore, et peut-être surtout, dans la circulation des idées politiques. Traduire s’impose progressivement, de part et d’autre de l’océan Atlantique, comme une activité centrale pour tous ceux qui cherchent à s’appuyer sur l’introduction d’ouvrages et d’idées étrangers pour critiquer les systèmes établis, promouvoir des réformes ou simplement se construire un nom. Dans un contexte d’essor du commerce et des échanges, les entreprises éditoriales de traduction mobilisent, dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, des ressources de plus en plus importantes en capitaux, en techniques et en hommes. Le contexte particulier de révolutions et de révoltes qui caractérise le « monde atlantique » dès 1760 ne fait qu’accroître ce mouvement d’ensemble et densifier les réseaux de traducteurs. En France, les traductions occupent une place essentielle dans les débats et les luttes politiques qui émergent en 1789, jouant particulièrement un rôle majeur dans la gestation de l’idée républicaine1. Paradoxalement, si les circuits et les modalités de circulation des textes ont fait l’objet de plusieurs études, le monde des traducteurs, à l’exception de quelques traducteurs occasionnels tel Morellet obligé pour survivre de traduire des romans anglais en 1795, reste méconnu. Or, l’étude de leurs parcours et l’analyse des enjeux de la traduction doit permettre de mieux apprécier leur rôle dans les dynamiques politiques de la Révolution française. Dans cette perspective, l’analyse de la trajectoire d’Antoine-Gilbert Griffet de Labaume (1756-1805) offre l’opportunité de questionner les relations entre des opérations d’écriture et des formes d’actions politiques. Né à Moulins au sein d’une famille de petite noblesse, Labaume se spécialise, entre la fin des années 1780 et 1805, quasi exclusivement dans la traduction de textes. Il apparaît que les formes et les enjeux des différentes traductions qu’il publie se modifient, non seulement en fonction des déplacements de sa position sociale, mais aussi des mutations de l’environnement politique2. Entre l’Angleterre et l’Allemagne en passant par la Suisse et l’Afrique, le travail de traducteur de Labaume permet de lever le voile sur divers « laboratoires » de la traduction sous la Révolution, mais aussi de s’interroger sur les différents « effets » de sa pratique de traduction de textes en langue française dans les contextes successifs d’élaboration de l’idée républicaine, de son expansion territoriale dans le cadre de la « Grande Nation » jusqu’à sa redéfinition dans la mise en place de l’Empire. Il s’agit donc de s’interroger sur les différentes fonctions jouées par la traduction dans l’espace intellectuel et politique autour de la période révolutionnaire.
Tradition et médiation
2Après une formation au sein de diverses institutions pédagogiques parisiennes, Labaume effectue plusieurs voyages en Europe sans qu’il soit possible de préciser ses différentes destinations. Entre janvier 1786 et juillet 1787, il est l’un des rédacteurs du Censeur universel anglais3 aux côtés de Louise-Félicité de Kéralio (1757-1821). Ce périodique, quotidien puis hebdomadaire, dédié à Madame (comtesse de Provence), a été fondé en juillet 1785 par le chevalier Jean-Nicolas Jouin de Sauseuil (1731- ?), militaire et membre de la Société anglaise pour l’encouragement des arts4. Traducteur, auteur de plusieurs méthodes pour apprendre le français et, en 1783, d’un traité sur la langue (Anatomie de la langue française5), ce dernier parvient à imposer le Censeur comme un des vecteurs essentiels des échanges entre l’Angleterre et la France6. Dans les années 1780, la traduction d’ouvrages et l’introduction d’idées d’Outre-Manche constituent un moyen privilégié pour intervenir dans les débats politiques, littéraires et scientifiques et se construire ainsi une réputation en France, en dépit de la forte concurrence qui caractérise le milieu anglophile en particulier dans un monde des périodiques particulièrement surveillé par les autorités7. Parallèlement à son activité au sein du Censeur dont il devient le rédacteur principal en 1787, Labaume publie une série de traductions de romans anglais et allemands. Il obtient ainsi une petite reconnaissance grâce à sa traduction, en 1787, du roman épistolaire et sentimental de Fanny Burney (1752-1840), Eveline ou l’Histoire de l’entrée d’une jeune dame dans le monde (1778). Il joue encore, dès 1785, un rôle essentiel dans l’introduction en France des œuvres de Laurence Sterne (1713-1768) dont il traduit une partie du fameux Tristam Shandy8. Durant ces années, Labaume collabore avec le libraire-imprimeur parisien Jean-François Royez qui diffuse le Censeur à partir de 17869. Royez participe alors activement à l’agitation des idées comme le reflète son catalogue qui comprend aux côtés d’ouvrages légers et érotiques, des récits des voyages et de nombreux traités en faveur des réformes judiciaires, fiscales, médicales et politiques. S’il est difficile de faire parler un catalogue de librairie et de le transformer en lieu de sociabilité, notons néanmoins qu’entre 1787-1788 s’y côtoient des auteurs aussi différents que Chaussard, Cubières, Castera, Mercier de Compiègne, Lezay-Marnésia, Gin, Dulaurens, Delacroix, Beffroy de Reigny ou Ronsin, représentants de ce demi-monde des lettres parisiennes au sein duquel Labaume semble s’introduire.
3Produit de cette collaboration, c’est chez Royez que sont publiées en 1788 les Réflexions sur la traite de l’esclavage des nègres, traduction de l’ouvrage d’Ottobah Cugoano (1757-1801), « Africain, esclave à la Grenade et libre en Angleterre10 », paru en langue anglaise à Londres en 178711. Si la traduction est anonyme, Labaume en est le maître d’œuvre. Ce récit est l’un des premiers slave narratives qui se multiplient à partir des années 1760 en Angleterre et dont la diffusion est assurée par les sociétés abolitionnistes à vocation philanthropique. Il est naturellement complexe de « piéger » le traducteur derrière sa traduction. Néanmoins, préface et notes permettent de lever le voile sur les objectifs de ce dernier. Si le traducteur revendique la liberté de pouvoir acclimater son texte aux « goûts » du public français, il n’hésite pas à rajouter en note certains passages qui, considérés comme encombrants dans le corps du texte, sont jugés essentiels dans la défense de certaines positions12. Si cet ouvrage est important, ce n’est pas seulement qu’il fait entendre une voix africaine particulièrement virulente dans la dénonciation des méfaits de la « civilisation » européenne (une Europe qui se serait barbarisée par l’esclavage), mais encore qu’il permette d’introduire en France une tradition anti-esclavagiste spécifiquement anglaise qui puise ses racines dans la pensée religieuse :
« Depuis quelques années, l’humanité s’est élevée contre la servitude des Nègres ; tous les philosophes, tous les gens de bien, ont dit : l’esclavage est contraire à la nature ; il faut abolir l’esclavage ; mais tous employaient seulement les armes de la raison. Une voix s’est fait entendre en Angleterre et a prouvé, par les Livres saints, que le vol, l’achat et la vente des hommes sont des forfaits dignes de mort ; et cette voix est la voix d’un Nègre. Ce malheureux, longtemps esclave lui-même, a vu les traitements affreux que subissent les Africains transportés en Amérique ; libre ensuite, il a vu les Européens insulter et calomnier les Nègres sans les connaître ; il a étudié la Bible, il a vu l’avarice protéger la servitude, pendant que la religion la proscrivait. Il a écrit sans méthode, il est vrai, ses sentiments et ses réflexions ; il n’a pas connu les formes qu’exigent les règles austères du goût ; mais il a fait un ouvrage intéressant pour tous ceux qui aiment le talent sans culture, et pour tous les amis de l’humanité et de la religion13. »
4Charge virulente contre le système esclavagiste assimilé à un véritable « brigandage14 », l’ouvrage apparaît comme une pièce centrale de la campagne d’opinion menée par les abolitionnistes français réunis, à partir de février 1788, au sein de la première Société des amis des Noirs. Certes, il est difficile de mesurer les effets de la réception de cet ouvrage et les motivations d’un Labaume qui préfère encore rester anonyme. Reste que ses compétences, sa connaissance des débats en Angleterre et sa proximité avec l’éditeur Royez lui permettent de donner une orientation nouvelle à sa pratique de la traduction, quittant le monde des Lettres et les traductions spécifiquement littéraires pour investir le terrain politique. Cette orientation est confirmée et renforcée à partir de 1789. Même si le terme est souvent galvaudé, on peut parler d’une réelle « politisation » des productions de Labaume sous la Révolution. Sans occuper une place de premier plan dans les institutions et les dynamiques politiques, son rôle n’est pas négligeable.
5En 1791, Labaume publie chez un libraire-imprimeur parisien également spécialisé dans la traduction des ouvrages anglais, Pierre-François Gueffier, une traduction du Sens commun, sans doute à partir de la nouvelle édition du texte publiée à Londres en 179115. Dans un contexte politique particulièrement agité, la traduction de ce texte participe à la campagne menée en faveur de l’idée républicaine. Cette traduction lui permet sans doute de se rapprocher d’un haut lieu de la promotion de la régénération sociale et politique, le Cercle social. Il y retrouve de nombreux traducteurs (tels que Théophile Mandar ou Marie-Louise Kéralio) réunis pour donner corps à la vocation cosmopolite revendiquée par cette institution qui s’illustre en publiant une version polyglotte de la Constitution de 1791. Le projet des membres de cette institution, comme le rappelle Marcel Dorigny, est en effet de créer une « confédération universelle du genre humain », en brisant « les frontières linguistiques et les particularismes nationaux », ce qui se manifeste notamment par une intense activité de traduction des constitutions, discours et écrits politiques français16. En 1792, Labaume confirme encore son activité en faveur de la promotion de la République en publiant, en collaboration avec un ancien membre de la Société des amis des noirs, François-Xavier Lanthenas (1754-1799), une traduction de l’ouvrage Théorie et pratique des droits de l’homme de Paine17. Ce dernier, ne parlant pas français, s’appuie sur ses traducteurs pour construire sa réputation en France et appuyer la campagne entreprise en faveur de son élection à la Convention nationale. Or, signe de la faible reconnaissance pour celui qui n’est que traducteur ou prudence nécessaire de Labaume qui cherche à rester à distance des luttes politiques, ce dernier n’apparaît que comme le « traducteur du Sens-commun » alors que le nom de Lanthenas est mentionné sur l’ouvrage. Médiateur, Labaume reste un acteur effacé. S’il peut sembler évident qu’il fréquente les nombreux cercles anglophones de Paris au sein desquels les femmes comme Helen-Maria Williams ou Mary Wollstonecraft, jouent un rôle important, on ne peut qu’être surpris en constatant qu’il n’apparaît jamais dans les différentes correspondances publiées de ces personnalités. Si la pratique occasionnelle de la traduction semble apporter des bénéfices à celui qui fait carrière en politique, le seul « métier » de traducteur semble encore le condamner à une forme d’invisibilité qui lui permet sans doute de s’adapter aux transformations des rapports de force. En 1793, il poursuit ses activités au sein du Cercle social où il collabore avec le libraire-imprimeur Jean-Louis-Antoine Reynier (1762-182418), un des acteurs majeurs, avec Nicolas de Bonneville, de l’organisation de l’imprimerie dès 1792, à la publication d’une nouvelle édition du Sens commun19, concurrencée d’ailleurs par celle éditée par François Buisson (1754-1814), un libraire-imprimeur proche de la Gironde20. Cette concurrence semble encore souligner la fragilité du statut de traducteur dont le travail n’est pas protégé. En 1794, après avoir bénéficié d’une mise en réquisition lui permettant d’échapper au décret contre les nobles21, il publie, sous le nom de « M. Nobody », une première édition de La Messe de Gnide22, petit ouvrage licencieux, et s’installe surtout, avec Reynier, comme « imprimeur et libraire » au no 4 de la rue du Théâtre-Français23. Cette collaboration avec Reynier semble correspondre à une nouvelle orientation de ses travaux.
Traduction et Grande Nation
6Au lendemain de la Terreur, Labaume apparaît dans la liste des savants, hommes de lettres et artistes pensionnés par la Convention Nationale dans le processus de remise en ordre de l’espace intellectuel mené, à l’initiative de Grégoire, par les Thermidoriens24. Il y figure sous le statut de « traducteur de plusieurs ouvrages anglais » et reçoit à ce titre 1 500 livres. À ses côtés, on trouve d’autres traducteurs d’ouvrages anglais tels que Théophile Mandar et Jean-Louis Blavet (1719-1809), traducteur d’Adam Smith. Notons néanmoins que les traducteurs qui reçoivent le plus de faveurs sont les spécialistes de langues antiques et orientales : 3 000 livres sont ainsi accordées à Bitaubé, traducteur d’Homère, à Dutheil, traducteur d’Eschyle et à Pierre-Henri Larcher, traducteur d’Hérodote. Mais si cette récompense accorde au travail de Labaume une reconnaissance officielle, la pension ne saurait lui permettre de survivre. Aux côtés d’un Jean-Henri Castera25 (1749-1839) ou d’un Pierre-Vincent Benoist (1758-1834), Labaume est en quelque sorte mobilisé par l’administration pour mener à bien la construction d’un espace de circulation au sein des États de la Grande Nation. Dès lors, il élargit ses horizons d’intérêt pour se tourner vers d’autres espaces linguistiques et politiques.
7Après une traduction d’un récit de langue allemande s’inscrivant dans la veine d’un moralisme familial en accord avec l’air du temps (Les souffrances maternelles26), il participe activement au mouvement « d’éclosion des bardes » analysé par Anne-Marie Thiesse27, en publiant, en collaboration avec Jean-Joseph-Alexis David de Saint-Georges (1759-180928), une des premières traductions en français des poèmes d’Ossian de James MacPherson, ouvrage qui connaît alors un important succès commercial en Angleterre et dans les États allemands29. Ce travail est suivi d’une traduction de l’Histoire des Suisses de Jean de Müller (1752-1809), professeur d’histoire à l’université de Göttingen30. Après avoir traduit de l’allemand un ouvrage de Christoph Marin Wieland31, Labaume publie encore une traduction des Tableaux du déluge de Johann Jakob Bodmer (1698-178332), auteur, en 1757, des célèbres fragments des Niebelungen. L’intérêt porté à ce type d’ouvrages semble correspondre à une fonction nouvelle assignée aux traductions : loin d’être un simple médiateur, Labaume s’érige, avec d’autres, en collecteur, à l’image du voyageur naturaliste chargé de rapporter les matériaux de savoirs au savant sédentaire. Entre Macpherson et Bodmer en passant par Müller, il semble en effet suivre une même démarche, celle de retrouver les mythes et les grands récits fondateurs des nations voisines de la France. Au moment où se mettent en place (autour d’un Herder, par exemple) les fondements d’une croisade culturelle contre l’influence française (par le biais de l’émergence d’une littérature nationale), les traductions de Labaume peuvent être considérées comme des tentatives pour marquer une appropriation française des cultures européennes : les traducteurs ayant alors pour mission de « franciser » les productions étrangères, Paris semble érigé en une sorte de dépôt des trésors des États européens dans la même logique que celle consistant à confisquer les collections naturalistes ou les objets d’arts des pays conquis pour les exposer au Louvre ou au Muséum national d’histoire naturelle de Paris.
8On peut encore penser qu’en traduisant en français ces récits, l’auteur cherche à en neutraliser les effets « nationalistes » : il confère en effet à ces récits une portée universelle qui s’oppose à la volonté d’en faire des supports de langues et de cultures nationales et anti-française. La valorisation des traditions et origines de ces mêmes nations peut aller à l’encontre de la légitimation de la tutelle politique du Directoire sur les peuples étrangers au nom de leur prétendue « minorité politique ». La traduction de l’Histoire des Suisses de Müller peut être considérée comme un moyen de valoriser le propre passé républicain des Suisses. Cette ambiguïté révèle sans doute la complexité même de la Grande Nation, entre volonté hégémonique et modèle de fédérations liant différentes nations républicaines33. Face aux attaques menées contre la République, Labaume n’hésite pas à sortir progressivement de ses seules activités de traducteur. À partir du coup d’État du 18 fructidor an V/4 septembre 1797, il collabore ainsi à la rédaction d’un quotidien républicain, particulièrement engagé dans le combat contre les ennemis de la Constitution de l’an III, Le Bien informé34, fondé le 17 fructidor par Bonneville avec le soutien de Paine, de Mercier et de Bernardin de Saint-Pierre35. Cette activité de journaliste et son soutien à la République lui ouvrent les portes de l’administration, position certes enviable, mais fragile.
9En 1798, il entre en effet dans l’administration du ministère de l’Intérieur, faisant partie de cette nébuleuse d’hommes de lettres qui peuplent, autour d’un François de Neufchâteau, les différents bureaux. On le retrouve ainsi sous-chef en 179836, puis seulement principal commis à la division de l’Instruction publique en 179937. Avec d’autres membres de cette administration, Labaume semble jouer un rôle important dans la défense et la diffusion des principes républicains, investissant les principaux lieux de sociabilité. Comme le souligne la mention de son nom dans un registre de présence daté du 19 janvier 1798, on le retrouve ainsi parmi les membres de la « seconde » Société des amis des noirs38. Durant ces années, on peut penser qu’il joue un rôle essentiel dans les tentatives des autorités pour régénérer les populations et « républicaniser » les esprits. Cette place est plus que précaire, particulièrement après le coup d’État du 18 brumaire contre lequel s’étaient fait entendre des mécontentements dans les colonnes du Bien informé. En 1800, Labaume n’est plus que commis de deuxième classe dans la division des Travaux publics39. Face à la fragilisation de sa position au sein de l’administration, il se déplace encore vers le monde de la presse : après avoir joué un rôle important dans la médiation franco/anglaise, c’est désormais vers la presse et l’Allemagne qu’il fixe désormais son attention.
Traduction et civilisation
10Parallèlement à sa collaboration au Bien informé, Labaume s’impose sous le Directoire comme un collaborateur assidu de plusieurs journaux, en particulier de la Décade philosophique et, de manière plus effacée, du Magasin encyclopédique, deux périodiques qui cherchent à valoriser le « commerce » entre les individus et les peuples et soutiennent l’entreprise d’expansion de la Grande Nation au nom du progrès de la civilisation40. C’est vers la presse qu’il oriente progressivement ses activités et inscrit ses activités de traducteur dans la configuration des progrès de la civilisation. La traduction est considérée comme une des conditions centrales de la perfectibilité des individus et des sociétés. À la fin de l’année 1799, il collabore ainsi à la rédaction de la Bibliothèque germanique aux côtés de Joseph de Maimieux, auteur en 1797 d’un projet de langue universelle, la « pasigraphie », et premier président de la Société des observateurs de l’homme en 1799. Ce périodique, lié directement à l’installation à Paris, rue de Seine, d’une succursale de la librairie des frères Levrault de Strasbourg, joue un rôle essentiel dans l’organisation des réseaux qui se cristallisent autour de cette institution savante et dans la formalisation de l’anthropologie dont se réclament ses membres41. Labaume y rejoint un groupe composé de traducteurs réputés comme les sœurs Le Polier, rédactrices du Journal littéraire de Lausanne entre 1794 et 1798, cousines de Madame de Montolieu42, et Karl Friedrich Cramer (1752-180743). La Bibliothèque germanique qui consacre ses premiers volumes à traduire et commenter des extraits des œuvres de Kant ou de Herder joue certes un rôle majeur dans l’introduction des idées allemandes en France, mais ce périodique a également une vocation politique : ses auteurs présentent leur travail de traduction comme un antidote contre le « nationalisme » ou l’égoïsme national. En rendant compte régulièrement des productions publiées en Allemagne, le périodique doit favoriser les échanges entre les deux rives du Rhin et permettre ainsi les « progrès » des nations européennes en prévenant contre tous les risques de « dégradation » et de barbarie :
« Nous croyons concourir à la réunion des lumières et à l’utile échange des travaux des meilleurs esprits de l’Europe, en publiant un ouvrage périodique intitulé, Bibliothèque germanique, rédigé par des plumes favorablement connues, et en y joignant une Bibliographie universelle […]. Il ne s’agit pas ici d’établir ou de combattre une prééminence ou une infériorité douteuse entre les chefs-d’œuvre incomparables de nations qui diffèrent autant par le génie que par l’idiome. Où trouver l’arbitre désintéressé ? Quel bien résulterait-il de discussions oiseuses, que prolongerait si vainement des deux côtés une prévention retranchée dans l’extrême difficulté de posséder à fond l’une et l’autre langue ? Au lieu de disputer, les rédacteurs de la Bibliothèque Germanique n’aspirent qu’à mettre une plus grande masse de richesses littéraires dans le commerce, et laisseront toujours, à l’Allemand comme au François le droit de louer ou de censurer son compatriote44. »
11Or, en dépit des différents soutiens qu’il obtient auprès des membres de la forte communauté germanophone de Paris, ce journal disparaît rapidement. Labaume parvient néanmoins encore à trouver une place, en partie grâce à ses relations tissées au sein du ministère de l’Intérieur. À la fin du Directoire et au début du Consulat, il participe, sous la direction d’Adrien Duquesnoy (1759-1808), employé au ministère de l’Intérieur et membre au Conseil des Hospices, à l’entreprise ambitieuse soutenue par François de Neufchâteau (1750-1828) : la publication du Recueil de Mémoires sur les établissements d’humanité45. Ce corpus, « première encyclopédie philanthropique » selon Catherine Duprat, joue un rôle essentiel dans l’introduction des théories philanthropiques en France (hospices, prisons…) venues d’Europe qui doivent alimenter la réflexion sur les modalités d’organisation et de gestion des établissements d’assistance après l’adoption des lois de vendémiaire et frimaire an v qui mettaient fin à l’assistance nationale instaurée par la Convention Nationale46. Aux côtés de Grégoire, La Rochefoucauld-Liancourt, Roberjot et Barbé-Marbois, Labaume est plus précisément chargé de traduire, avec Rumford, tous les textes de langue allemande. Répondant encore à une commande officielle, il donne plusieurs traductions d’ouvrages majeurs comme le Robinson Crusoé de Daniel Defoe en 179947 puis le journal de voyage de Friedrich Honermann à l’intérieur de l’Afrique et du désert égyptien48. À travers ces différentes productions, Labaume réaffirme avec force le fait que les progrès des nations civilisées ne peuvent se faire qu’à travers les relations qu’elles entretiennent entre elles et avec les différentes nations de la Terre. Le récit de voyage s’inscrit en effet dans le contexte particulier des interrogations sur les entreprises coloniales et leurs enjeux, particulièrement en Afrique intérieure, terrain susceptible de servir de laboratoire à une « colonisation moderne » défendue par certains républicains sous le Directoire49.
12Labaume meurt à Paris le 18 mars 1805 après avoir collaboré à la rédaction de la traduction en français des Recherches asiatiques50. La participation de Labaume à cette entreprise quasi-officielle, coordonnée encore par Adrien Duquesnoy51, peut être considérée comme le signe évident de la reconnaissance obtenue par un traducteur qui y côtoie les plus grandes personnalités scientifiques du moment52. Cette collaboration constitue néanmoins un tournant important dans sa trajectoire. S’écartant progressivement de l’idéal repris par les rédacteurs des Archives littéraires de l’Europe dès 180453, selon lequel la traduction doit être un moyen d’échange et de progrès des civilisations, la traduction en français des Recherches asiatiques peut en effet apparaître comme un moyen d’appropriation et d’affirmation de l’hégémonie politique et culturelle de la France, marquée fortement par le traumatisme lié à la perte d’Haïti en 1804. En réunissant les représentants les plus éminents des institutions scientifiques autour de cette entreprise, le pouvoir ne cherche-t-il pas à réaffirmer « sur le papier » la domination impériale de la France au moment où, dans les faits, la position française au-delà des mers se trouve fragilisée. La traduction doit dès lors servir à la promotion d’une « civilisation » française dont la finalité n’est plus le progrès des hommes et des sociétés. Elle est appelée à servir d’instrument de promotion de la « supériorité » politique et militaire de la France à travers l’affirmation de l’hégémonie de sa langue contre laquelle se formalisera progressivement une nouvelle herméneutique incarnée, en Allemagne, par Johann Gottfried von Herder et ou Friedrich Schleiermacher.
Conclusion
13De la fin des années 1780 à 1805, Labaume a tenté d’adapter sa pratique de traducteur aux transformations du contexte et à en faire un mode d’action politique. Entre la volonté d’introduire dans les débats français sur l’esclavage et la république des textes étrangers, à la promotion de la traduction comme instrument nécessaire au « commerce » et au progrès des civilisations, l’analyse de la trajectoire de Labaume révèle les nombreuses ressources qu’offre la traduction sous la Révolution. Sous le Directoire, cette pratique semble même s’imposer comme un facteur essentiel dans la construction de la Grande Nation. Reste que le statut de traducteur se caractérise par sa fragilité tant il est soumis, d’un côté aux aléas du marché éditorial, de l’autre aux changements rapides des protections politiques et administratives dont il reste dépendant. Rédigée par l’écrivain républicain, également « victime » des mutations rapides des configurations politiques et intellectuelles, Michel de Cubières (1752-1820), la notice biographique de Labaume publiée dans les colonnes de la Revue philosophique témoigne clairement des difficultés auxquelles ce dernier fut confronté dans les dernières années de sa vie :
« M. François de Neufchâteau, ministre, ami des lettres et de l’humanité, eut alors le projet de perfectionner l’organisation des hospices civils […]. Il chargea M. de la Baume de traduire en français tous les mémoires écrits en langue allemande qui traitaient des établissements d’humanité ou maisons de charité […] Hélas !… peu de temps après, il fut réformé ou supprimé par l’effet d’un changement dans le ministère, et en perdant sa place, qui lui donnait juste ce qu’il fallait pour vivre, il perdit sa fortune. […] Il publia de nouvelles traductions. Peine perdue ! Ces diverses traductions parurent au moment où plusieurs libraires de Paris firent banqueroute. Il fut une de leurs premières victimes ; et alors une noire mélancolie s’emparant de lui, il parut détester la vie54. »
14Derrière la « mélancolie » du traducteur se dévoilent les difficultés liées à la crise du monde de la librairie parisienne, mais sans doute aussi les désillusions face à un usage de la traduction comme simple outil de domination impériale. Sous le Directoire, les travaux des traducteurs s’inscrivent dans la valorisation du principe de « circulation » et d’échange sur lequel doivent reposer les « progrès » de la République en France et en Europe. Les traductions doivent en effet garantir la communication entre les différents peuples, en particulier entre ceux qui composent la Grande Nation. Comme le rappellent les rédacteurs du Conservateur, il convient en effet de favoriser l’essor des possibilités de « commerce » entre les différentes nations : « Il était beau de vaincre l’Europe, il sera bien plus beau d’entrer, avec toutes les nations, dans un commerce d’amitié, de lumières, de richesses et de bonheur55. » Appréhendée dans la perspective des rapports de force entre les nations, la traduction ne renvoie pas seulement à des logiques de « transferts » d’idées et de textes56. La représentation et la fonction du travail de traducteur évoluent selon le contexte politique : considéré comme un voyageur chargé de faire circuler les textes dans un espace politique de réciprocité sous la République, le traducteur devient progressivement un collecteur dont la mission est d’enrichir le dépôt parisien des matériaux récoltés dans toute l’Europe sous l’Empire. D’un côté, il valorise l’idée d’échange entre les nations, de l’autre, il participe à une dynamique de centralisation. Cette transformation renvoie à l’abandon progressif de l’idéal républicain sous l’Empire ; elle explique également la marginalisation progressive de la figure de traducteur ravalée à une position de second rang dont le travail se réduit à des procédures techniques. Dans cette perspective, on comprend que la question de la traduction occupe une place centrale chez une partie des opposants à l’entreprise de centralisation et d’uniformisation sous l’Empire57. L’attention actuelle portée aux traducteurs ne doit donc pas uniquement enrichir la sociologie du monde des Lettres, mais doit contribuer au renouvellement de l’histoire politique des périodes révolutionnaire et impériale58.
Notes de bas de page
1 Voir par exemple l’étude réalisée par Raymonde Monnier sur les enjeux de la traduction du traité de Nedham par Théophile Mandar en 1791 : Raymonde Monnier, « Nedham, Machiavel ou Rousseau ? Autour de la traduction par Mandar de The Excellency of the Free State », in Marc Belissa et al. (dir.), Républicanismes et droit naturel à l’époque moderne. Des humanistes aux révolutions de droits de l’homme et du citoyen, Paris, Éditions Kimé, 2009, p. 119-134.
2 Johan Heilbron, Gisèle Sapiro, « La traduction littéraire, un objet sociologique », Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 144, 2002, p. 3-5.
3 Le Censeur universel anglais… par M. de Labaume et une société de gens de lettres, Paris, chez l’auteur, rue Pierre Sarrazin, au magasin de M. Windsor, chez Royez, libraire, à partir de 1786, chez Lagrange au Palais Royal.
4 Il est successivement capitaine des gardes du prince de Liège, capitaine d’infanterie au service de la France, capitaine et major-adjudant de la légion de Tonnerre. Voir la notice en ligne : http://dictionnaire-journalistes.gazettes18e.fr/journaliste/423-jean-jouin-de-sauseuil
5 Cf. sur cet ouvrage, Daniel Droixhe, La Linguistique et l’appel de l’histoire (1600-1800). Rationalisme et révolutions positivistes, Genève, Droz, 1978, p. 282-283.
6 Madeleine Fabre, « Censeur universel anglais », in Jean Sgard (dir.), Dictionnaire des journaux 1600-1789, Paris, Universitas, 1991, notice 204 [http://c18.net/dp/dp.php?no=204].
7 Robert Darnton, Le diable dans un bénitier. L’art de la calomnie en France 1650-1800, Paris, Gallimard, 2010.
8 Il publie la Suite et fin des opinions de Tristam Shandy (Londres, 1785) ; Sermons choisis de Laurence Sterne, traduits de l’anglais par Mr. D. L. B., Londres et Paris, Buisson, 1786 ; Lettres de Sterne, nouvellement publiées à Londres et traduites de l’anglais…, Londres/Paris, Desray, 1788. Ces traductions serviront à la publication postérieure des Œuvres complètes de Sterne (1803) à laquelle participera Jean-Baptiste Salaville (1755-1832).
9 Royez publie ainsi en 1787 les Quelques vers de Labaume et une traduction du Daniel de Friedrich Carl von Moser (1713-1798).
10 Réflexions sur la traite de l’esclavage des nègres d’Ottobah Cugoano, Paris/Londres, Royez, 1788.
11 Connu plus tard sous le nom de John Stuart, Ottobah Cugoano (né dans l’actuel Ghana) est enlevé à l’âge de treize ans. Esclave à Grenade, il arrive en Angleterre avec son maître, Lord Hoth, et y est émancipé. Il se fait baptiser afin de ne pas être remis en esclavage et entre au service de Richard Cosway, premier peintre du prince de Galles. Il se fait alors le porte-parole de la communauté noire. En 1786, avec le soutien de Granville Sharp, il aide à sauver Henry Demane, en passe d’être renvoyé comme esclave aux colonies. L’année suivante, il publie ses Thoughts and Sentiments on the Evil and Wicked Traffic of the Slavery and Commerce of the Human Species…, Londres, 1787. Ce livre condamne la violence des razzias (le livre comprend un récit de sa capture couvrant près de sept pages), les traitements inhumains à bord des navires et aux plantations, et accuse tous les Britanniques d’être complices de l’oppression des Africains, à moins qu’ils ne s’insurgent contre la traite et l’esclavage.
12 Cf. la note 10 dans les Réflexions sur la traite et l’esclavage des nègres, Paris, La Découverte, coll. « Zones », Avant-propos d’Elsa Dorlin, 2009, p. 68 : « Cugoano ajoute à ce que l’on vient de lire, une assez longue dissertation sur les lois criminelles ; comme elle ne m’a pas paru avoir aucun rapport avec la traite des Nègres, j’ai cru devoir la retrancher. Mais, comme mon but, en traduisant l’ouvrage de Cugoano, a été, et je l’ai déjà dit, d’essayer de détruire deux préjugés 1) celui de la légitimité de la traite des Nègres ; 2) celui d’un abrutissement incurable, dont on a gratifié tous les Africains, je crois que l’on ne sera pas fâché de trouver cette dissertation dans une note ; surtout actuellement, où le gouvernement s’occupe plus que jamais de l’intérêt public et de la réforme de nos lois, si généralement désirée. Au reste, il serait injuste de reprocher cette digression à l’auteur nègre : on doit se ressouvenir du lieu où il est né, se rappeler qu’il a été esclave et ne pas oublier que la manie de disserter est la maladie épidémique de l’Angleterre. Il est peu de leurs meilleurs écrivains qui en soient exempts. »
13 « Préface du traducteur à la première édition française » [1788], Réflexions sur la traite et l’esclavage des nègres, op. cit., 2009, p. 22.
14 Notons que Cugoano rencontre, à Londres, Olandah Equiano, auteur d’un ouvrage fameux publié en 1790 (The Interesting Narrative of the Life…). Ils créent ensemble une société abolitionniste, The Sons of Africa.
15 Le Sens-commun, ouvrage adressé aux Américains, et dans lequel on traite de l’origine et de l’objet du gouvernement, de la constitution anglaise, de la monarchie héréditaire, et de la situation de l’Amérique septentrionale. Traduit de l’anglais de Th. Paine,… Paris, Gueffier, 1791.
16 Marcel Dorigny, « Le Cercle social ou les écrivains au cirque », in Jean-Claude Bonnet (dir.), La Carmagnole des Muses, Paris, Armand Colin, 1988, p. 58.
17 Théorie et pratique des droits de l’homme par Th. Paine,… traduit en français par F. Lanthenas,… et par le traducteur du « Sens commun », Paris, chez les directeurs de l’imprimerie du Cercle social, 1792.
18 Julie Halbout, « Louis Antoine Reynier, le parcours multidisciplinaire d’un naturaliste suisse (XVIIIe -XIXe siècles) », mémoire de master 2 (université Paris 1 – Ea 127/CHST), 2010 ; Marita Gilli, Le Cheminement de l’idée européenne dans les idéologies de la paix et de guerre, Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté, 1991, p. 33.
19 Le Sens-commun. Ouvrage adressé aux Américains, et dans lequel on traite de l’origine et de l’objet du gouvernement, de la constitution anglaise, de la monarchie héréditaire, et de la situation de l’Amérique septentrionale. Traduit de l’anglais de Th. Paine,… Nouvelle édition revue et corrigée, Paris, Gueffier & Reynier, an II/1793.
20 Notons qu’en mai 1791, Buisson publie une traduction des Droits de l’homme. En réponse à l’attaque de M. Burke sur la Révolution française. Traduit de l’Anglais par François Soulès avec des notes et une nouvelle préface de l’auteur, À Paris, chez F. Buisson, 1791.
21 AN, AF II 61 : « Réquisitions et permissions de résider, concernant les personnes atteintes par les lois qui obligeaient les nobles, parents d’émigrés, à sortir de Paris et de la République : pétitions, mémoires et arrêtés sur cet objet (an II) ». Dossier 459, fol. 61 : Lettre du Comité d’instruction publique en faveur du citoyen Griffet Labaume (3 brumaire an III).
22 [Anonyme], La Messe de Gnide, à Paris, chez les Marchands de nouveautés, an II.
23 Imprimerie et librairie. Reynier et Labaume, imprimeurs-libraires, rue du Théâtre-Français, no 4, offrent à leurs concitoyens leur correspondance pour leur procurer, non-seulement les livres de leur fonds de commerce, mais aussi les livres tant anciens que modernes dans toutes les langues, Paris, Reynier et Labaume, 1794.
24 Stéphanie Le Calvez, « La réorganisation du monde des Lettres en l’an III », mémoire de master 2 (université Paris 1 – Ea 127/IHRF), 2010 ; Jean-Luc Chappey, Antoine Lilti, « L’écrivain face à l’État. Les demandes de secours et pensions par les hommes de lettres et savants (1780-1820) », RHMC, 2010/4.
25 Notons que Castera appartient au noyau des auteurs réunis autour du libraire-imprimeur Royez dans les années. 1780. Il traduit le Voyage à l’intérieur de l’Afrique de Mungo Park (1799).
26 Les Souffrances maternelles ou Histoire de Mme Haller, écrite par elle-même traduite de l’allemand, par le traducteur d’Éveline, Paris, chez Lepetit, an III/1795.
27 Anne-Marie Thiesse, La Création des identités nationales, Paris, Le Seuil, coll. « Points Histoire », 2001, p. 31.
28 Ancien conseiller au Grand Conseil, auteur d’un projet de langue universelle. Cf. Charles Nodier (1780-1844), Archéologue, ou Système universel et raisonné des langues, Prolégomènes, Paris, impr. de P. Didot, (1810), 16 p.
29 Poèmes d’Ossian et de quelques autres bardes, pour servir de suite à l’Ossian de Letorneur [i. e. Le Tourneur], tome second, Paris, impr. de Gueffier, an III/1795.
30 Il semble que la traduction de Labaume ne commence qu’au tome II, le tome I ayant été traduit par un certain Boileau – Histoire des Suisses traduite de l’allemand de Jean Müller à Paris, chez Bossange, Masson et Besson, an III/1795 ; Histoire des Suisses, traduite de l’allemand de Jean Müller, Lausanne, J. Mourer, 1795-1803, 12 t. Les tomes 2 à 9 sont traduits par Labaume.
31 Christoph Martin Wieland, Peregrinus Protee, ou les dangers de l’enthousiasme, Paris, imprimerie du Magasin encyclopédique, an III/1794 ou 1795.
32 Antoine Gilbert Griffet de Labaume, Johann Jakob Bodmer, Tableaux du déluge, Paris, Gueffier, an v/1797.
33 Pierre Serna (dir.), Républiques sœurs. Le Directoire et la Révolution atlantique, Rennes, PUR, 2009.
34 Le Bien informé (17 fructidor an V-30 germinal an VII), Paris, à l’imprimerie-librairie du Cercle social, 4 vol. [BnF LC2 968]. Suspendu une première fois depuis le 3e complémentaire an VI jusqu’au 13 vendémiaire an VII. A publié, dans l’intervalle, un numéro intitulé Le Monde daté du 3 vendémiaire an VII, et formant le no 382 de la série. Suspendu une seconde fois depuis le 6 ventôse an VII jusqu’à la fin de fructidor, sans doute du fait des positions hostiles à Sieyès.
35 Publié par les presses du Cercle social, ce journal absorbe, en octobre 1799, Le Voyageur de Louis-Marie Prudhomme. Plusieurs fois inquiété (en particulier pour ses attaques contre Sieyès), il est définitivement supprimé en 1800 après que Bonneville compare Bonaparte à Cromwell.
36 Il touche alors un salaire de 3 500 livres. Il vit rue de Vaugirard [AN, AF/III/93]. Cf. Sur ces renseignements, Catherine Kawa, Les Ronds de cuir en Révolution, Paris, CTHS, 1996. Dictionnaire biographique [ www.lirmm.fr/~dony/kawa/DicoIndexe.rtf].
37 Il ne touche alors plus qu’un salaire de 1 900 livres [AN, F1/bI. 5].
38 Marcel Dorigny, Bernard Gainot, La Société des amis des noirs, 1788-1799. Contribution à l’histoire de l’abolition de l’esclavage Paris, Unesco, 1998, p. 332-333.
39 AN, F1/bI. 6.
40 Le Magasin encyclopédique présente la traduction de l’ouvrage de Müller : Histoire des Suisses, traduite de l’allemand de Muller, conseiller aulique et bibliothécaire de l’Électeur de Mayence, membre de l’Académie d’Erfurt, de la Société des Antiquités de Cassel, de la Société d’Otten etc., t. 7, Paris, chez Mourer et Pinparé, libraires et commissionnaires, rue St André des Arts, no 42, 1 vol. : « L’accueil que le public a fait à cette traduction qui manquait à notre littérature a engagé les éditeurs et l’auteur à presser leur travail. Ils mettront sous 15 jours les tomes 8 et 9 en vente. […] Nous donnerons un extrait de cet important ouvrage quand la traduction sera terminée. »
41 Jean-Luc Chappey, La Société des observateurs de l’homme (1799-1804). Des anthropologues sous Bonaparte, Paris, Société des études robespierristes, 2002.
42 La chanoinesse de l’ordre réformé du Saint-Sépulcre, ancienne dame d’honneur à la cour de Saxe-Meinigen, Marie-Elisabeth Le Polier (1742-1817), dirige entre 1794 et 1798 le Journal littéraire de Lausanne et s’est fait connaître par des traductions en français de romans de langue allemande ; elle s’établit à Paris, en janvier 1800, avec sa sœur, Jeanne-Louise-Antoinette (1738-1807), devenue Mme de Cérenville. Les sœurs animent un salon rapidement très prisé sous le Consulat.
43 Exilé de Kiel en mai 1794 pour ses sympathies à l’égard de la Révolution française, ce dernier s’établit à Paris et y exerce, à partir de 1795, l’imprimerie et la librairie (rue des bons enfants). Cf. Carl Friedrich Cramer : Revolutionär, Professor und Buchhändler, Petra Blödorn-Meyer, Michael Mahn, Rüdiger Schütt (éd.), Nordhausen, T. Bautz, 2002.
44 « Prospectus » de la Bibliothèque germanique, de l’imprimerie de Didot-Jeune, an IX/1800.
45 Recueil de mémoires sur les établissements d’humanité, traduits de l’allemand et de l’anglais, Paris, impr. de H. Agasse, an VII-an XIII.
46 Catherine Duprat, Le temps des philanthropes, Paris, CTHS, 1997, p. 417-422.
47 La Vie et les aventures de Robinson Crüsoé, Paris, an VIII, tome 1er. Le Robinson traduit par Labaume est réédité plusieurs fois. L’édition de 1821 est augmentée d’une « Vie » de Defoe rédigée par Labaume.
48 Friedrich Conrad Hornemann (1772-1801), Voyage de F. Hornemann dans l’Afrique septentrionale, depuis Le Caire jusqu’à Mourzouk… Suivi d’éclaircissements sur la géographie de l’Afrique, par M. Rennell. Traduit de l’anglais par… [Griffet de La Baume] et augmenté de notes et d’un Mémoire sur les Oasis… par L. Langlès,… [et d’observations sur la langue de Syouah, par M. W. Marsden. Introduction et mémoire sur les antiquités de Siwah, par Young], Paris, Dentu, an XI (1803). Le texte est publié en 1801 en allemand puis traduit en anglais en 1802.
49 Bernard Gainot, « La Décade et la “colonisation moderne” », AHRF, no 1, 2005, p. 99-116.
50 Recherches asiatiques, ou Mémoires de la Société établie au Bengale pour faire des recherches sur l’histoire et les antiquités, les arts, les sciences et la littérature de l’Asie, traduit de l’anglais par A. Labaume, revus et augmentés de notes pour la partie orientale, philologique et historique par M. Langlès, membre de l’Institut, conservateur des manuscrits orientaux de la Bibliothèque nationale, et pour la partie des sciences exactes et naturelles, par MM. Cuvier, Delambre, Lamarck et Olivier, membres de l’Institut, Paris, de l’imprimerie nationale, an XIV/1805.
51 Stuart Woolf, « Les bases sociales du Consulat. Un mémoire d’Adrien Duquesnoy », RHMC, 4, 1984, p. 598-618.
52 Les collaborateurs sont Louis Langlès (1763-1824), Georges Cuvier (1769-1832), Jean-Baptiste Delambre (1749-1822), Jean-Baptiste Lamarck (1744-1829), Guillaume-Antoine Olivier (1756-1814) et Adrien Duquesnoy (1759-1808). Ce dernier publie le prospectus.
53 Jean-Luc Chappey, « Les Archives littéraires de l’Europe (1804-1808). Un projet intellectuel et politique », La Révolution française, revue en open access de l’IHRF, à paraître en 2011 [http://lrf.revues.org/index.html].
54 Michel Cubières-Palmezeaux, « Extrait d’une notice sur Antoine-Gilbert Griffet de la Baume », Revue philosophique, littéraire et politique, vol. 45, 3e trimestre an XIII/1805, p. 182-184.
55 Le Conservateur. Journal politique et littéraire, Paris, no 111 – 30 frimaire an vi/mercredi 20 décembre 1797.
56 Pascale Casanova, La République mondiale des lettres [1999], Paris, Seuil, 2008, p. 43.
57 Pensons par exemple au rôle assigné à la traduction par Mme de Staël et les membres du groupe de Coppet dans leurs réflexions menées sur les échanges, nécessaires selon eux aux progrès des sociétés d’Europe, entre les différentes littératures « nationales ».
58 Voir les contributions de Raymonde Monnier et de Pierre Serna sur le traducteur Théophile Mandar dans Belissa et al. (dir.), Républicanismes et droits naturels, op. cit.
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