Voyager : un programme républicain
p. 221-231
Texte intégral
1Dans la collection des Rapports et projets de décrets de la Convention se trouve un petit document d’une quarantaine de pages intitulé « Des voyages, de leur utilité dans l’éducation1 ». Le texte ne porte pas de date, mais d’après la place qu’il occupe dans cette collection de documents imprimés par ordre de la Convention, et d’après les allusions dans le texte à certains événements de la révolte de Kosciuszko en Pologne et à des événements politiques en France, nous pouvons aisément le dater du 20 ou du 21 messidor an ii, c’est-à-dire du 8 ou du 9 juillet 1794. L’auteur du texte est le conventionnel Louis Portiez, député de l’Oise.
2Il s’agit d’un texte sur l’éducation publique – un parmi tant d’autres. On estime à une bonne centaine au moins le nombre de textes similaires parus pendant le dernier quart de siècle de l’Ancien Régime et pendant les premières années de la Révolution2. Portiez lui-même a donné l’année précédente un autre opuscule sur l’instruction publique3. Et, d’un autre côté, c’est un texte sur l’utilité des voyages, sur les façons de concevoir une pratique voyageuse idéale : un ars apodemica. Encore une fois, un parmi tant d’autres. Il existe également une bonne centaine de documents de ce type rien que pour le XVIIIe siècle4.
3Néanmoins, tout en appartenant à deux univers textuels courants et bien établis, ce petit document est, de plusieurs points de vue, unique, et digne de notre intérêt. Par la suite, nous nous efforcerons de le placer dans son contexte politique et idéologique. À la fin de ce parcours, nous essayerons de prouver que, à plus d’un titre, il véhicule une – ou la – conception du voyage républicain par excellence.
4Louis Portiez ne figure certainement pas parmi les conventionnels les plus en vue. Né à Beauvais probablement en 1765, il fait ensuite des études de droit. Il est présent à la prise de la Bastille, ce qui lui permet de rentrer à Beauvais en héros. Il y est particulièrement connu comme fondateur et journaliste respecté du Journal de l’Oise ; il compte parmi les hommes importants de la ville, qui finalement l’élit à la Convention. Selon les notices biographiques5, ses idées l’auraient plutôt situé parmi les modérés, mais il se serait laissé entraîner par les événements. Nous pouvons certainement observer un changement tangible entre son texte sur l’instruction publique, qui parle des erreurs commises dans l’élan réformateur de la Révolution, et l’approche plus radicale du texte sur les voyages. Au cours des années de la Convention, Portiez n’occupe jamais le devant de la scène, travaille surtout dans les bureaux et intervient entre autres au sujet de la question des biens aliénés de l’Église. Il sera actif plus tard dans le projet d’annexer la Belgique à la France ; il sera également membre du Conseil des Cinq-Cents et du Tribunat. Finalement, il sera nommé en 1805 directeur des écoles de droit à Paris. Ici, les lacunes de son éducation se manifestent – il sera souvent critiqué pour la pauvre qualité de ses cours.
5L’un des peu nombreux ouvrages à mentionner Portiez – et encore, en passant – est le livre de Mona Ozouf, L’Homme régénéré. Portiez y apparaît comme l’un des rares hommes politiques qui ne partagent pas l’idée que le « nouvel homme », le « nouvel Adam » créé par la Révolution, ne peut plus dégénérer6. Portiez oppose aux partisans du discours du nouvel homme une conception peut-être inspirée de Montesquieu, selon laquelle toute civilisation a nécessairement son apogée – et sa décrépitude. Nous allons revenir encore à la question de savoir si cette idée se manifeste dans son texte sur les voyages : à notre sens, l’opinion de Portiez ne porte pas sur le niveau individuel, mais sur le niveau collectif. Ce n’est pas tant l’homme nouveau qui peut dégénérer, au niveau individuel ou collectif (comme nous le verrons plus loin, Portiez ne semble pas y croire), que chaque civilisation. Son texte sur les voyages, nous semble-t-il, a jusqu’ici échappé à la curiosité des chercheurs et est en fait absent de plusieurs notices biographiques consacrées à son auteur.
6Dans la biographie de ce dernier, nous pouvons noter un élément qui manque totalement : un lien quelconque avec l’idée du voyage. Nous reviendrons plus loin aux influences possibles de ce projet, mais il faut d’abord esquisser brièvement le contexte politique et pédagogique dans lequel ce texte s’insère.
7L’éducation était l’un des sujets les plus souvent discutés à partir de 1789 : au cours des deux premières années de la Révolution, on ne compte pas moins de soixante propositions de loi. Comme cela a été démontré par les spécialistes de la question, cette affluence ne fait que continuer un processus qui s’esquisse depuis les années 1760. Dans leur grande majorité, les questions qui seront discutées après 1789 sont en fait un héritage direct du quart de siècle précédent : la réforme des domaines et des lieux de l’enseignement, la nécessité de l’éducation physique, la question de la scolarisation des filles, celle du patriotisme dans l’éducation, et ainsi de suite. Ce qui sera par contre profondément nouveau après 1789, et surtout après 1793, ce sera la façon dont l’éducation sera mise au service de l’État.
8Entre la première période de la Révolution, jusqu’en 1793, et les années suivantes, se déroulent plusieurs changements importants. Le principal est peut-être que la préoccupation des plans d’éducation change profondément. L’élan de 1789 tendait avant tout vers la démocratisation, et ceci se manifeste également dans les réformes de l’éducation jusqu’au plan Condorcet de 1793, puis ce premier élan fut remplacé graduellement par la priorité donnée à la création de l’homme nouveau. Ce changement est bien sûr inséparable des événements politiques, dont avant toute chose le passage à la République : cet homme nouveau doit être produit par le nouveau système et il doit également apprécier le nouveau système, participer à sa création et à son fonctionnement.
9La situation politique, en constante évolution, demande que les idées nouvelles soient transmises au peuple rapidement – au risque que le peuple ne les comprenne pas tout de suite. Dans ces cas apparaît ce que James Leith appelle l’« inculcation » des valeurs par l’éducation7. Quand les « cours révolutionnaires » ou l’École de Mars apparaissent, ils servent tout à la fois des buts pratiques – transmettre des connaissances et savoir-faire essentiels liés à la défense du pays, telle la fabrication de la poudre – et ces buts idéologiques.
10Robert Palmer a comparé l’attitude de la Convention face aux diverses réformes de l’éducation à la tapisserie de Pénélope8. Les quatre grands projets qui sont formulés (le projet de Condorcet, le projet Sieyès-Daunou-Lakanal, le projet Lepeletier et le projet commune de Paris) ont été tour à tour refusés, mis de côté, acceptés mais avec des modifications qui ont dénaturé la proposition originale, ou acceptés et immédiatement suspendus. Après ceux-ci, un nouveau projet est déposé par Bouquier, un conventionnel tellement obscur que Robert Palmer pose la question de savoir si ce n’étaient pas Robespierre et son cercle qui étaient derrière le texte9. Le plan Bouquier est basé sur les trois principes de liberté, égalité et brièveté. Le système scolaire est simplifié à l’extrême – il existe un premier et un deuxième niveau. L’école primaire est le premier. Toutes les institutions scolaires de second degré existantes (donc tous les collèges) sont supprimées – le deuxième niveau de l’éducation est composé de réunions publiques, pièces de théâtres, fêtes populaires et ainsi de suite. C’est à la liste de ces éléments, censés remplacer l’éducation en collège, que Portiez suggère d’ajouter les voyages.
11Mais pourquoi les voyages ? Quand Portiez intervenait une année plus tôt dans le débat sur la réforme scolaire, dans un contexte encore bien différent (notamment avant la suppression des collèges), l’essentiel de sa proposition consistait à ne pas abolir l’enseignement de l’histoire et de la littérature, puisque ceux-ci sont essentiels dans la formation de l’esprit patriotique (ces idées sont répétées également dans une digression de son texte sur les voyages). L’idée qu’il développait alors n’était nullement nouvelle – on la retrouve dans plusieurs textes même avant 1789 ; particulièrement dans le contexte d’un concours académique qui se déroule en 178710, à l’occasion duquel la question portait justement sur les moyens d’inspirer le patriotisme, entre autres par l’éducation. Le voyage n’y était pas évoqué.
12Le voyage n’est certainement pas un sujet de débat habituel pour la France révolutionnaire, bien au contraire. Pendant tout le XVIIIe siècle, la France se regardait volontiers dans des miroirs extérieurs, anglais, prussiens ou autres – mais à partir de 1789, ce genre de médiation semble devenir inutile. Déjà la dernière décennie et demie de l’Ancien Régime semblait inaugurer ce processus, avec une légère accumulation des voyages en France même – une destination auparavant jugée peu intéressante. Quand Brissot de Warville publie ses voyages d’Amérique en 1790, il s’excuse dans l’introduction, avouant que le moment n’est pas aux voyages, et il justifie la publication de son texte par l’intérêt immédiat que présente l’exemple américain pour la jeune République française11.
13Nous ignorons si Portiez a jamais fait un voyage de quelque importance – le peu d’informations que nous possédons sur sa vie semble indiquer que ce n’était probablement pas le cas. Pourquoi pense-t-il donc soudain aux voyages lorsqu’il s’agit de suppléer à l’éducation en collège ? Quelles sont ses inspirations ?
14Nous devons sur ce point situer son texte dans la tradition des discours sur l’utilité des voyages, et plus particulièrement du voyage pédagogique. Parce que, si le voyage semble être un sujet rarement traité à partir de 1789, il est en revanche très présent dans toute l’Europe occidentale depuis deux bons siècles et quart, Portiez s’insérant dans toute la tradition de l’ars apodemica.
15Commençons par une influence chronologiquement proche, mais que nous pouvons rapidement exclure. Le comte morave Berchtold publie sa conception du voyage patriotique en 178912. C’est l’un des derniers, mais aussi l’un des plus parfaits exemples du genre. En même temps, le texte n’est pas encore traduit en français en 1794, et même si Portiez lisait l’anglais, la conception des voyages que le comte esquisse est diamétralement opposée à la sienne. Le mot « patriotique » signifie chez Berchtold connaissance du pays (avec un accent important sur les questions sanitaires, domaine central pour le philanthrope qu’était Berchtold) mais aussi collecte d’informations à l’étranger. Chez Portiez, il s’agit de renforcer l’amour du pays et de son régime politique.
16En parcourant la liste des autres textes français connus et discutés au XVIIIe siècle sur l’utilité des voyages, nous pouvons facilement exclure parmi les possibles influences Baudelot de Dairval et son voyage d’antiquaire13, et aussi le refus des voyages que prône le Suisse Béat de Muralt14. Portiez pouvait très facilement connaître le Spectacle de la Nature de l’abbé Pluche, best-seller pédagogique de l’époque – mais le traité sur les voyages qui figure dans le volume VII n’a que peu de points communs avec le texte qui nous intéresse15. Le discours académique de l’abbé Gros de Besplas, publié en 176316, et le texte peu connu, attribué à l’abbé Des Acharts, publié en Italie en 178017, partagent quelques idées avec Portiez, mais la similitude est tellement superficielle, les idées partagées sont tellement des topiques du genre, que nous pouvons parler de l’« air du temps » ou d’une continuité dans toute la tradition apodémique, plutôt que d’une influence directe.
17Nommons une autre influence qui, par contre, est indubitable, celle de Jean-Jacques Rousseau et de ses idées sur les voyages dans le livre V de l’Émile18. Toutes les conceptions de l’instruction publique à l’époque ont une relation complexe avec les idées de Rousseau. On l’admire, on le critique, on le corrige, mais on se situe toujours par rapport à lui. Le cas sera identique à propos des voyages chez Portiez, sans que le nom de Rousseau soit cette fois prononcé. L’année précédente, dans son texte sur l’instruction publique, Portiez l’avait toutefois explicitement cité, en le louant et en le critiquant.
18Venons-en finalement à l’influence éventuelle la plus proche et la plus probable. L’Académie de Lyon avait lancé en 1787 un concours dont le sujet était justement le voyage dans la pratique éducative. De cette compétition ont été publiés le rapport du jury, le discours vainqueur et une version abrégée du discours qui a obtenu l’accessit19. Tout d’abord, il faut souligner que les deux prix ont été remportés par des membres du Parlement de Paris, où Portiez se trouvait également à l’époque. Nous ne pouvons exclure ni que Portiez ait eu connaissance des textes de ses confrères déjà à l’époque, ni qu’il ait participé lui-même au concours, sans grand succès. En tout cas, aucune des idées originales du projet de 1794 n’est évoquée par le compte rendu du jury.
19Le discours vainqueur au concours, même si Portiez le connaissait, ne devait pas l’inspirer beaucoup : l’auteur, Turlin, tout en maintenant que théoriquement l’idée du voyage est bonne, suggérait néanmoins l’interdiction du voyage pour les jeunes, parce que le voyage, dans le contexte de l’époque, ne pouvait que corrompre les mœurs.
20L’accessit du concours alla à un certain Mathieu de Mirampal. Contrairement à Turlin qui ne fait plus parler de lui après avoir remporté le prix, Mathieu de Mirampal reste visible au cours des années suivantes. Et son chemin va croiser régulièrement celui de Portiez : tous deux juristes, ils écrivent tous deux pour le Journal de l’Oise à partir de 1789, et seront députés de l’Oise à la Convention, puis au Conseil des Cinq-Cents.
21Cette série de « coïncidences » nous paraît remarquable. La qualité du discours de Mirampal est soulignée par le jury de Lyon particulièrement lorsqu’il s’agit de démontrer les avantages du voyage pour le développement physique. Nous savons que l’éducation physique était un sujet omniprésent dans toutes les propositions de réforme déjà avant 1789, et on retrouve ce thème dans d’autres textes sur les voyages. Néanmoins, quand Portiez accentue également cet aspect dans sa conception du voyage, nous pouvons aisément supposer une influence immédiate20. Qui plus est, les deux textes portent la même citation de Montaigne en exergue : « Le commerce des hommes est merveilleusement propre à l’éducation, et la visite des pays étrangers21. » Même si c’est l’une des phrases les plus connues sur les voyages et sur leur utilité pour l’éducation dans toute la littérature française, le fait que tous les deux la placent en exergue est remarquable.
22Le texte de Mirampal lui-même diffère cependant de celui de Portiez sur un point crucial – ce qui constitue la nouveauté essentielle de la proposition de 1794. Rousseau, Pluche, Gros de Besplas, Des Acharts, Mirampal, mais aussi Berchtold et tous les classiques de l’ars apodemica parlent du rôle du voyage dans l’éducation à un niveau individuel. Même l’amour de la patrie et de son souverain, omniprésent, que l’on retrouve dans presque tous les textes du XVIIIe siècle sur les voyages (Émile étant ici une exception bien sûr), doit être inspiré au niveau individuel. Parallèlement, aucun des programmes d’éducation collective de la fin de l’Ancien Régime ou de l’époque révolutionnaire n’utilise les voyages comme moyen d’éducation. Ce lien entre l’éducation publique, civique et collective, et les voyages comme pratique éducative, est, à notre sens, entièrement inédit.
23Sur ce point, la proposition de Portiez apporte une nouveauté incontestable dans l’histoire des voyages tant pour le nombre des voyageurs que pour leur motivation. Il ne s’agit ni d’un voyage individuel ou en petit groupe, ni d’une migration massive ; c’est un voyage collectif, pour un nombre important de voyageurs, sans être un mouvement de migration. Quant à la motivation, ce n’est pas un voyage voulu par le voyageur, ni forcé, ni commandé par une institution – ce voyage est obligatoire, comme l’éducation. Sans grande exagération, nous pouvons dire que Portiez invente ici la « classe verte » – une classe verte qui est très distinctement bleu-blanc-rouge.
24Si on parle de voyages scolaires, il faut mentionner une autre influence potentielle. Les méthodes du pédagogue hollandais Martinet sont devenues très populaires vers la fin du XVIIIe siècle à travers l’Europe, y compris en France. Or, Martinet amenait régulièrement ses élèves en excursions pour étudier la nature22. Mais nous devons souligner ici la différence dans la durée et même dans le vocabulaire. Martinet organisait des excursions d’une journée, ou juste de quelques heures, tandis que le voyage tel que Portiez le décrit devait durer plusieurs mois. Quant au vocabulaire, nous reviendrons encore une fois à la question de la promenade, opposée au voyage, lorsque nous étudierons l’influence qu’a pu exercer le projet de Portiez.
25Dans l’analyse des propos de Portiez sur les voyages, il faut commencer par souligner qu’il s’agit d’une proposition qui n’est qu’une esquisse, une première idée – le texte étant renvoyé au Comité d’instruction publique pour qu’une proposition de loi soit formulée. Sur ce point, nous n’avons pas été en mesure de trouver la moindre trace d’une discussion ultérieure. Il faut dire que dans le contexte politique des semaines suivantes (chute de Robespierre), la discussion de l’utilité des voyages ne devait pas être un sujet prioritaire.
26Même s’il s’agit d’un voyage scolaire, Portiez ne veut pas faire voyager tous les jeunes, mais une « élite » – un nombre limité de jeunes qui seraient choisis, pour obtenir ce privilège, par leurs camarades. Le choix de son « groupe d’Émile » se fait de façon démocratique23.
27Dès le départ, il sépare les voyages qu’il faudrait faire faire aux jeunes en deux catégories – voyages à l’intérieur du pays, et voyages à l’étranger24. Cette distinction, sans être inédite, est plutôt inhabituelle, dans la mesure où la grande majorité des textes sur le voyage pédagogique, tant en France qu’ailleurs, s’intéresse uniquement au voyage à l’étranger : les exceptions sont les textes où l’on suggère d’abord un bref voyage dans son propre pays, avant de parcourir les contrées étrangères. Le cas est quelque peu différent dans la conception de Portiez. Le voyage à l’étranger est traité après le voyage en France, mais il n’est pas suggéré que le voyage en France soit l’école du voyage à l’étranger. En fait, les deux parties du voyage sont assez nettement séparées et ont des buts différents.
28Bien que cela nous oblige à traiter les deux sujets abordés dans le texte en ordre inverse, nous allons commencer par le voyage à l’étranger. Nous avons plusieurs raisons d’agir de la sorte. Tout d’abord, c’est cette dernière partie qui se situe davantage dans la continuation de la tradition apodémique. C’est aussi la partie la moins complexe, contenant le moins de nouveautés, et la partie où une influence extérieure majeure peut facilement être démontrée.
29La conception du voyage à l’étranger selon Portiez n’est que très superficiellement esquissée. Avant toute chose, c’est l’occasion pour Portiez de réciter sa leçon devant son public, et de condamner tous les pays qui attaquent alors la France républicaine – l’Angleterre en tête, bien sûr25. La Hollande est condamnée parce qu’elle est sous l’influence des Anglais26 ; l’Autriche est condamnée rien que pour avoir donné Marie-Antoinette ; la Prusse pour son despotisme militaire. Une courte digression concerne les heureux événements de la Pologne où, à ce moment-là, la révolte de Kosciusko accomplit un progrès prometteur. Le portrait de la Russie est centré autour de celui de Catherine II, « Sémiramis du Nord », qui trompe tout le monde, « jusqu’à ses complices ». Le temps de Pierre le Grand est révolu, la Russie est un pays despotique. Les pays de la péninsule Ibérique et l’Italie dépérissent sous l’influence de l’Église. Ailleurs dans le texte, Portiez dit clairement que la seule alliée de la France est la Nature27.
30Après tout cela, pourquoi faut-il voyager à l’étranger, si l’on n’y trouve que de mauvais exemples ? Plusieurs réponses sont données. Tout d’abord, l’expérience de la variété des gouvernements est utile dans la formation des futurs administrateurs, ce qui renvoie à une topique pluriséculaire de la littérature apodémique. Dans un deuxième temps, il est possible que, sur quelques points, lors du voyage à l’étranger, dans d’autres gouvernements qui, par ailleurs, sont – par définition – moins parfaits que le gouvernement français, l’on rencontre quelque chose qu’il faudrait adopter en France. On a déjà vu que Portiez n’est pas partisan de l’idée de la perfection absolue et immédiate – dans son texte sur l’instruction publique, il affirme même que dans l’élan de la Révolution, il a pu y avoir des erreurs. Ce qu’il donne ici comme exemple étranger à suivre éventuellement est celui de l’institution des jurés. Mais en la nommant, Portiez ajoute : cette institution a été adoptée par d’autres pays suivant l’exemple de ceux que Portiez appelle « nos ancêtres28 ». Ainsi, même ce qui est préférable à l’étranger est d’origine française.
31Mais le but principal du voyage à l’étranger est que, face à l’exemple des imperfections de l’étranger, les jeunes voyageurs soient confirmés dans l’amour de leur patrie, qu’ils voient sa perfection – y compris la perfection de son système. Ce thème s’inscrit contre la quasi-totalité de la littérature apodémique, dans laquelle, même s’il est toujours désirable que le jeune homme soit renforcé dans l’amour de sa patrie et de son souverain, c’est plutôt l’idée de surmonter les préjugés nationaux qui domine. L’imperfection intrinsèque de l’étranger est plutôt un sujet dans les discours contre les voyages, tels le Quo vadis de Joseph Hall29 ou la Lettre sur les Voiages de Béat de Muralt : tous les deux veulent interdire les voyages pour préserver la jeunesse des influences extérieures néfastes. Cela n’est pas nécessaire pour Portiez : même s’il ne croit pas à la perfection non dégradable de « l’homme nouveau » révolutionnaire, la supériorité de la République française est telle qu’il lui paraît inconcevable que les jeunes voyageurs soient attirés par un autre pays.
32Et, sur ce point, nous pouvons nommer une influence qui nous semble certaine : Émile. Lorsque le précepteur amène Émile à l’étranger, pour étudier le gouvernement, il sait à l’avance quel sera le résultat du voyage – et à l’arrivée, son élève a exactement les idées que le précepteur souhaitait lui inspirer. Il est certainement intéressant de souligner que Rousseau ne donne pas directement dans la bouche d’Émile sa réponse formulée au retour du voyage : c’est une réaction entièrement prévue par le précepteur. Si le voyage a été bien organisé, se dit le précepteur, Émile doit donc dire : « À quoi je me fixe ? À rester tel que vous m’avez fait être30. » Tout ce que nous devons faire pour l’adapter au propos de Portiez est de remplacer le précepteur par la République française.
33La partie sur le voyage à l’intérieur du pays est plus développée pour plusieurs raisons. Nous pouvons évoquer la difficulté de voyager à l’étranger pour les ressortissants de la jeune république française. De façon plus importante, il faut souligner que le point focal de la France, à cette époque, est la France même. Et, surtout, c’est en France même que l’impact des voyages doit se manifester.
34L’effet ne s’observe pas uniquement sur les jeunes qui voyagent. Comme dans le cas des cours révolutionnaires, la propagation des idées à travers la France est tout aussi désirable : ceux qui ont été instruits diffusent à leur tour la connaissance dans leur propre cercle. Cette idée était déjà soulignée par Portiez dans son texte sur l’instruction publique : les jeunes, instruits dans les valeurs républicaines, diffuseront ces valeurs dans leur entourage31. Mais nous devons ajouter à cela l’impact direct : ce que la visite d’un groupe parfaitement éduqué de jeunes citoyens républicains représenterait pour ceux à qui ils rendent visite, ou qui les voient. Il est intéressant de noter par ailleurs que cet aspect, c’est-à-dire influencer le peuple par la présence de ces élèves exemplaires, n’était pas évoqué lorsque Portiez dissertait sur le voyage à l’étranger : était-ce parce que, de ce point de vue, la république, selon Portiez, ne « voyageait » pas ? Connaissant l’importance de la propagation des valeurs républicaines à l’étranger pour le gouvernement français, nous avons plutôt tendance à suggérer qu’il s’agit d’un simple oubli de la part de l’auteur.
35Dans les voyages à l’intérieur du pays, on pourrait s’attendre à un itinéraire qui parcourrait la France d’une façon ou d’une autre, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, pour cet impact que peut avoir la présence des voyageurs. Également en tant que continuation des diverses traditions du Tour de France. Finalement, dans le programme d’éducation, ceci pourrait être l’occasion d’accumuler des connaissances sur le territoire.
36Or, rien de tel ne figure dans le projet : le voyage prévu par Portiez est presque sans itinéraire. Le leitmotiv à l’œuvre derrière certaines traditions du « tour du pays », c’est-à-dire celui qui consiste à prouver et renforcer l’unité du pays par le parcours, est absent, si on le regarde sous un angle géographique. Mais il est présent sur un autre plan, idéologique.
37Portiez suggère, dans une certaine mesure, un parcours social : une visite dans la hutte des pauvres, dans une ville commerçante, et ainsi de suite. Cette idée n’est pas nouvelle – plusieurs programmes de voyage, surtout ceux à l’usage des jeunes princes, suggèrent un parcours similaire. Encore une fois, la différence est dans le fait que cette visite soit collective.
38Un autre parcours est celui de la connaissance du terrain, essentiellement du point de vue militaire. Là encore, ce sujet est souvent présent dans les textes apodémiques et ici, il se trouve adapté au contexte républicain. Portiez utilise le terrain dans un but spécifique : « Ici, nous avons remporté une victoire éclatante : l’ennemi avait une excellente position ; mais le nombre des esclaves n’a pu tenir contre la bouillante intrépidité des défenseurs de la liberté. » L’idéologie prévaut sur les connaissances positives, militaires, mais celles-ci sont transmises également. Le paysage est rempli d’éléments de démonstration : « Là, nous avons essuyé une déroute : la trahison des généraux en fut la cause. Ces déserts, ces ruines ; voilà l’ouvrage du fanatisme32. » Encore une fois, Portiez récite bien sa leçon.
39Ce voyage ne sert pas à prouver ou renforcer l’unité géographique du pays (elle n’a pas besoin d’être prouvée) ; c’est l’unité idéologique qui est posée comme centrale. Le sol du pays est davantage un terrain de démonstrations qu’un objet de connaissances. C’est par la visite au lieu de la création artistique que les jeunes voyageurs participent au culte des martyrs qui est alors à son comble en France. Portiez cite deux exemples concrets, représentés par des œuvres d’art : on regarde l’artiste travaillant sur une peinture représentant Michel Lepeletier, que l’on commémore parce qu’il aurait été assassiné pour avoir voté la mort du roi, ou le jeune martyr vendéen Joseph Bara, dont la Convention venait d’instaurer le culte au niveau national33. Ce sont donc les événements de la jeune république : victoires, défaites, vestiges du passé, commémorations des actes héroïques, qui serviraient à poser les jalons d’un itinéraire indéterminé à ce stade.
40Portiez attribue encore une fonction au voyage – c’est, encore une fois, un sujet très ancien dans la littérature apodémique, mais réinterprété dans ce nouveau contexte. L’une des raisons de voyager est d’inspirer au jeune homme la curiosité et de l’orienter vers un métier. Ce sujet est donc souligné par Portiez, mais il le transpose dans le même contexte que les précédents. Ainsi, on reconnaît le futur maréchal quand celui-ci regarde les champs de bataille et le futur orateur lorsqu’il s’agira de rédiger le rapport de ce qu’il a vu au cours des voyages, parce qu’il fustigera les méfaits du despotisme, « d’un vers sanglant34 ».
41Portiez est le premier à admettre que ce système est loin d’être complet. Son texte est une collection faiblement structurée de suggestions variées. Le voyage à l’étranger est particulièrement peu développé ; mais même le voyage à l’intérieur du pays n’est pas encore développé en un véritable programme de voyage. Portiez prévoyait que le Comité d’instruction publique se chargerait de développer sa proposition en un programme cohérent, applicable35. On pourrait dire que le contexte historique immédiat n’était pas approprié – le régime jacobin échouera peu après.
42Il est certainement important de noter que Portiez reste présent dans la vie politique pendant encore une bonne décennie, mais, à notre connaissance, il ne revient plus jamais sur le sujet des voyages. On pourrait se demander pourquoi : la réponse qui nous paraît la plus appropriée est de dire que ce projet, avec sa dose d’« inculcation » de valeurs républicaines, était un produit typique de son moment, l’an ii, et que sa réinterprétation n’a jamais vraiment été d’actualité.
43Lorsque nous cherchons un éventuel « résultat » du projet de Portiez, il est difficile d’en trouver. L’une des exceptions possibles est une petite remarque que nous trouvons dans les procès-verbaux de la Convention, lors de la discussion sur la loi Daunou et sur la création de l’Institut de France : on suggère d’envoyer des agronomes en voyage d’étude à l’étranger36. Or, Portiez a dans son projet une petite réflexion – en réalité totalement coupée de son contexte – sur le fait qu’il est regrettable que ce soient les artistes, serviteurs inconditionnels des despotes, qui voyagent, tandis que ce sont plutôt des agronomes qui devraient voyager pour étudier les cultures37. S’agit-il d’une influence ? Difficile à dire. En fait, il existait, au sens propre du mot, un exemple vivant de cette pratique : Luc-Jacques-Édouard Dauchy. Dauchy était député du tiers état, plus tard administrateur de l’Oise et membre du Conseil des Cinq-Cents – mais c’était un ancien cultivateur qui avait fait un voyage d’Angleterre et de Hollande avant la Révolution38. Son exemple a pu inspirer tout autant Portiez que la remarque à l’occasion de la loi Daunou un an plus tard.
44Mentionnons encore une pratique où, éventuellement, une influence du projet Portiez peut être détectée. En 1801-1802, Louis-François Jauffret, secrétaire perpétuel de la Société des observateurs de l’homme, organisait des « excursions philosophiques » afin de « donner aux jeunes gens une idée du bonheur qui peut résulter pour l’homme de l’étude de lui-même et de la contemplation de la nature39 ». Il s’agissait d’excursions dans les environs de Paris, au cours desquelles des hommes de science reconnus expliquaient aux participants des aspects de la société et de la nature. Nous pouvons aisément discerner ici un parallèle avec le plan de Portiez : un « parcours initiatique et pédagogique40 », dans lequel l’effort physique du déplacement et les leçons apprises se combinent.
45Néanmoins, il faut souligner trois différences majeures. Le cadre du voyage selon Portiez est scolaire : des élèves sont choisis par leurs camarades, mais ce voyage reste obligatoire tandis que la participation aux « excursions philosophiques » est libre, même si parfois des classes entières y participaient. En second lieu, le but du voyage selon Portiez était, avant toute chose, la démonstration idéologique et la transmission (voire l’« inculcation ») des valeurs républicaines ; à l’inverse, les excursions de l’époque du Consulat ont un but qui est essentiellement scientifique. Retenons enfin la dénomination : « voyage » versus « excursion » ou « promenade ». Il s’agit, nous semble-t-il, de deux notions qui sont proches, mais cependant distinctes. Portiez lui-même mentionne notamment la tradition péripatéticienne, comme exemple de ce qu’il appelle l’« éducation en action41 ». Mais « voyager » et « être en promenade » demeurent deux actions différentes, voire deux dispositions mentales distinctes, tant dans la pratique pédagogique que plus généralement. La tradition péripatéticienne qui se prolonge à travers les siècles, et qui reste populaire par exemple à travers l’activité de Martinet que nous avons mentionnée plus haut, ne suffit pas pour expliquer l’innovation de Portiez dans la création du voyage scolaire. De même, la question de savoir si c’est de Portiez que nous voyons l’influence dans les « excursions philosophiques », ou bien s’il s’agit de la prolongation d’une tradition d’enseignement et de vulgarisation scientifique bien établie, reste posée.
46Malgré le fait que le plan de Portiez ait été peu développé et n’ait donné aucun résultat concret, son importance ne doit pas être sous-estimée. Il va à l’encontre de nombreuses idées reçues sur le voyage pédagogique. Il a dés-aristocratisé cette pratique, il l’a rendue collective, et – même si ce fut seulement à l’état d’ébauche – a réussi à la mettre au service de la République.
47Malgré ses défaillances, nous pouvons ainsi voir dans cette proposition de loi l’exemple par excellence du voyage républicain. Donnons-en les raisons en guise de conclusion.
48La pratique du voyage est rendue collective et est ouverte à toutes les classes sociales. Ceux qui voyagent sont choisis selon une démarche qui se veut démocratique. Ce voyage est conçu pour démontrer et renforcer la supériorité de la république. Il entend renforcer (voire inculquer) les valeurs républicaines. Il définit et interprète le passé républicain. Il réinterprète le paysage de la République, au sens propre et figuré. Il initie la formation des hommes dont la république a besoin, et doublement : d’une part vers les métiers nécessaires (soldats, hommes politiques), d’autre part en formant le corps (physique) par ce voyage.
49En bref, ce voyage est rendu possible par la république, et rend la république possible. Il la façonne et il est façonné par elle. C’est dans cette dualité, et dans la collectivisation d’une pratique jusqu’ici essentiellement individuelle, que réside l’intérêt du plan de Portiez.
Notes de bas de page
1 Louis Portiez, Des voyages, de leur utilité dans l’éducation. Par Louis Portiez, député de l’Oise, imprimé par ordre de la Convention nationale, s.l. s.d. [Paris, 1794].
2 Cf. Robert R. Palmer, The Improvement of Humanity. Education and the French Revolution, Princeton, Princeton University Press, 1985, p. 89.
3 Louis Portiez, De l’instruction publique, imprimé par ordre de la Convention nationale, s.l. s.d. [Paris, 1793]. Il est également l’auteur d’un opuscule qui critique les propositions de loi de nature pédagogique de certains autres députés : Instruction publique, imprimé par ordre de la Convention nationale, s.l. s.d. [Paris, 1793].
4 Cf. la bibliographie établie par Justin Stagl et ses collègues, Klaus Orda et Christel Kämpfer : Apodemiken : eine räsonnierte Bibliographie der reisetheoretischen Literatur des 16., 17. und 18. Jahrhunderts. Un projet en cours à l’Université de Galway vise à élargir cette bibliographie et à la transformer en base de données en ligne. L’auteur de cette intervention participe à ce travail.
5 Pour le portrait de Portiez, nous avons consulté les notices biographiques dans les ouvrages suivants : Nouvelle biographie générale (J. C. F. Hoefer et al., Paris, 1857) ; Biographie universelle ancienne et moderne (Louis-Gabriel Michaud, Paris, 1843) ; Dictionnaire des Parlementaires français (Adolphe Robert, Edgard Bourloton, Gaston Cougny, Paris, 1889-1891) ; La France littéraire (Joseph-Marie Quérard, Paris, 1824-1846) et le Dictionnaire des Conventionnels (Auguste Kuscinski, Paris, Société de l’histoire de la Révolution française, 1916).
6 Mona Ozouf, L’Homme régénéré. Essais sur la Révolution française, Paris, Gallimard, 1989, p. 136.
7 James Leith, « The Idea of the Inculcation of National Patriotism in French Educational Thought, 1750-1789 », in J. D. Browning (éd.), Education in the 18th Century, New York/Londres, Garland Publishing, 1979, p. 59-77.
8 Palmer, op. cit., p. 177.
9 Ibid., p. 179.
10 Cf. Discours présenté à l’académie de Châlons-sur-Marne en 1787, sur la question qu’elle avait proposée : Quels sont les meilleurs moyens d’exciter et encourager le patriotisme dans une Monarchie, sans gêner ou affaiblir en rien l’étendue du pouvoir et d’exécution qui est propre à ce gouvernement par J. de Meerman, seigneur de Dalem ; on y a joint le discours de M. Mathon de la Cour, auquel le prix a été décerné, Leide, 1789.
11 J.-P. Brissot de Warville, Nouveau voyage dans les États-Unis de l’Amérique Septentrionale, fait en 1788, 3 vol. , Paris, chez Buisson, 1791, vol. I, p. I.
12 L. von Berchtold, Essay to Direct and Extend the Inquiries of Patriotic Travellers, Londres, 1789.
13 C.-C. Baudelot de Dairval, De l’utilité des voyages, de l’avantage que la recherche des antiquitez procure aux sçavans, Paris, P. Aubouin et P. Emery, 1686.
14 B.-L. De Muralt, Lettres sur les Anglois et les François et sur les Voiages. Genève, Fabri et Barrillot, 1725.
15 Abbé A. Pluche, Le Spectacle de la nature, ou Entretiens sur les particularités de l’histoire naturelle, qui ont paru les plus propres à rendre les Jeunes-Gens curieux, et à leur former l’esprit. Tome septième : Contenant ce qui regarde l’Homme en Société, Paris, veuve Estienne et fils, 1747 (1re éd. 1732), les passages sur les voyages se trouvent p. 448-469.
16 Abbé J. M. Gros de Besplas, De l’utilité des voyages relativement aux sciences et aux mœurs, discours prononcé à l’Académie de Béziers, Paris, Berthier, 1763.
17 Abbé Des Acharts, Discours sur l’utilité des voyages, s.l. [Bologne ?], 1780.
18 Jean-Jacques Rousseau, Émile ou de l’éducation, La Haye, Jean Neaulme, 1762. Nous nous référons par la suite aux Œuvres complètes, Paris, Le Seuil, 1971, vol. 3, p. 306-321.
19 Extrait des discours… qui ont concouru pour le prix que l’Académie des Sciences, des Belles-Lettres et des Arts de la ville de Lyon a adjugé à M. Turlin, avocat du Parlement de Paris, sur cette question : « Les voyages peuvent-ils être considérés comme un moyen de perfectionner l’éducation ? », Lyon, A. de la Roche, 1787. De façon isolée, certains autres textes du concours ont également été publiés.
20 Un paragraphe est consacré à la question tout en tête du texte, p. 2.
21 Le passage est du chapitre XXV (« De l’institution des enfants ») du premier livre des Essais de Montaigne.
22 Voir Arianne Baggerman, « Children’s Walks in the Book of Nature. The reception of J. F. Martinet’s Katechismus der Natuur around 1800 », in Arjo Vanderjagt et Klaas Van Berkel (éd.), The Book of Nature in Early Modern and Modern History, Louvain, Peeters, 2006.
23 Portiez, Des voyages…, op. cit., p. 3.
24 Ibid., p. 2.
25 Le portrait des pays se trouve ibid., p. 18-24.
26 Dans une brochure plus tardive, Vues sur la Belgique et autres pays conquis par Portiez, député de l’Oise (Paris, Imprimerie nationale, thermidor, an iii), Portiez sera en revanche très favorable à la Hollande. Son changement d’attitude est bien sûr dû aux événements politiques qui se déroulent aux Pays-Bas où, après l’invasion du pays par les troupes révolutionnaires françaises, le parti pro-anglais perd son influence, et le stathouder pro-anglais, que Portiez fustige dans le texte que nous analysons ici, part en exil en Angleterre. La Hollande, reconnue également comme République sœur dans le traité de La Haye, sera désormais présentée comme l’alliée naturelle de la France. Je remercie Mme Van Strien d’avoir partagé cette information avec moi.
27 Portiez, Des voyages…, op. cit., p. 11.
28 Ibid., p. 14.
29 Joseph Hall, Quo vadis ? Or a Just Censure of Travell, as it is Commonly Undertaken by the Gentlemen of our Nation, Londres, Edward Griffin for Henry Featherstone, 1617.
30 Rousseau, op. cit., 320.
31 Portiez, De l’instruction publique, op. cit., p. 4.
32 Portiez, Des voyages…, op. cit., p. 4.
33 Ibid.
34 Ibid., p. 4. et 8 respectivement.
35 Ibid., p. 25.
36 Procès-verbaux de la Convention, vol. 72, p. 66-67 (3 brumaire de l’an IV).
37 Portiez, Des voyages…, op. cit., p. 15. Une remarque critique similaire sur les arts et les artistes figure dans un texte plus tardif (novembre 1794) de Portiez : Rapport sur les concours de sculpture, architecture et peinture ouverts par les décrets de la Convention nationale, Imprimerie nationale, s.l. s.d. [Paris, 1794]. Il y dénonce les artistes qui ont servi les tyrans, et suggère que la République mette à son service les arts comme l’avait fait la monarchie, puisque l’art peut participer à « modérer les maux de la guerre » (p. 1.).
38 Voir sa biographie dans le Dictionnaire des constituants 1789-1791 dirigé par E. H. Lemay, Paris, Universitas, 1991.
39 L.-F. Jauffret, Promenades à la Campagne, Paris, an XII, p. 1. Cité par Jean-Luc Chappey, « La science de l’homme du Consulat à l’épreuve de la sociabilité », Hypothèse, 1997, p. 157-164. Je remercie M. Chappey de m’avoir suggéré ce chemin de réflexion.
40 Jean-Luc Chappey, La Société des Observateurs de l’Homme (1799-1804). Des anthropologues au temps de Bonaparte, Paris, Société des études robespierristes, 2002, p. 383.
41 Portiez, Des voyages…, op. cit., p. 3.
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