L’enfermement à l’épreuve de la gestion des risques
Une réforme contemporaine des prisons françaises
p. 299-316
Texte intégral
1Dans un recueil d’hommage à François Bédarida consacré à des réflexions sur l’entreprise d’une histoire du temps présent, Eric Hobsbawm désigne, non sans humour, une limite fondamentale de la capacité à écrire le récit d’événements dont la postérité est encore incertaine : « L’arme secrète de l’historien, c’est la rétrospective. On gagne toujours si on parie sur les courses de chevaux déjà terminées. Mais le drame de l’historien du temps présent, c’est précisément qu’il – ou elle – ne peut jamais se passer de la prévision de l’avenir. Or la prédiction n’a pas été précisément le point fort des historiens1. » Antoine Prost, dans le même ouvrage, décrit l’histoire du temps présent comme « une histoire bancale, boiteuse, incomplète, inachevée », mais encourage à « assumer cet inachèvement même » plutôt que de « tenter d’[y] remédier2 ». Une étude portant sur une réforme des prisons, dont la nécessité a été publiquement mise en débat au début des années 2000, qui a fait l’objet entre 2000 et 2009 de propositions concurrentes par des acteurs politiques, juridiques et militants, qui a été écrite par le gouvernement à partir de 2007 et a finalement été votée en 2009, est, au premier chef, concernée par la prudence nécessaire à qui ne connaît pas l’issue de la course. Non seulement parce que sa genèse est récente, mais surtout, et plus fondamentalement, parce que son application est partielle, incertaine, objet de conflits et même de remises en question politiques – puisque le ministère de l’Intérieur a, en 2010, émis l’idée qu’une part de la loi pourrait être réformée avant même d’avoir été mise en œuvre.
2Présentée comme l’aboutissement de la modernisation et de l’humanisation du système pénitentiaire français, cette loi était attendue depuis dix ans. En 2000, la révélation du scandale de l’état des prisons françaises par la publication d’un livre de témoignages d’un médecin3 ouvre une période marquée par une exceptionnelle visibilité médiatique de la prison. Les parlementaires des deux chambres mènent l’enquête sur le système carcéral, dénoncent avec vigueur une situation « humiliante » pour la République française4, et une réforme est mise à l’ordre du jour. Un texte de loi est élaboré en 2000-2001 puis abandonné, au moment où la droite met l’insécurité et sa supposée croissance au cœur de la campagne présidentielle de 2002. L’idée même d’une loi est ainsi enterrée de 2002 à 2007. Après avoir été, de nouveau, promise par tous les candidats lors de la campagne présidentielle de 2007, la loi est votée en 2009 sans empressement, et sans que ce vote soit suivi d’espoirs de transformations importantes de la condition des prisonniers comme des agents de l’administration pénitentiaire. Depuis lors, un de ses volets, portant sur l’aménagement des peines, est régulièrement remis en cause par des députés de l’Union pour un mouvement populaire (UMP).
3Ce qui ressort de l’examen de ce processus réformateur est justement l’incertitude de son sens, qui se niche au croisement entre deux manières concurrentes de présenter ce travail législatif : comme une œuvre de reconnaissance des droits des personnes détenues, d’une part, ou comme une transformation de la gestion de la prison autour de l’idée centrale de gestion de la dangerosité et des risques, d’autre part. Ainsi, nous ne nous risquerons pas à conclure que la réforme a débouché sur tel avenir certain ou probable, mais soulignerons plutôt justement que le processus n’a pas clos dans l’espace public la conflictualité concernant les prisons. Les récentes manifestations de surveillants en ont donné une image5, illustrant là un acquis de la sociologie de la création de la loi, selon laquelle « la mise en œuvre du droit nouveau fournit en quelque sorte le carburant des réformes à venir, par l’utilisation stratégique qu’en font les acteurs pour en mettre les lacunes ou les limites en lumière6 ».
4Il est cependant possible de comprendre la manière dont droits des personnes et gestion des risques se sont entrecroisés, en les plaçant dans deux temporalités de longue et de moyenne durée7. La temporalité de long terme est la nécessité du maintien de l’ordre dans une institution fermée. C’est ce qui, depuis le XIXe siècle, a entraîné la conception de divers moyens de contrainte et de punition et la latitude donnée aux agents de l’administration pénitentiaire pour en faire usage. La temporalité de moyen terme est l’émergence, depuis les années 1970 et la naissance du Groupe d’information sur les prisons (GIP) puis du Comité d’action des prisonniers (CAP)8, d’une critique de la prison comme lieu d’absence de respect des droits des personnes, qui vise justement, en repoussant l’idée que les traitements disciplinaires seraient orientés vers l’amendement des individus, à dénoncer leur violence et leur caractère arbitraire.
5Notre hypothèse est que le couple de notions dangerosité/risque est, dans la réforme des prisons, l’opérateur par lequel l’institution promeut une manière renouvelée de gérer ces impératifs contradictoires. Le cœur de la réforme a consisté à entériner la différenciation des régimes de détention selon l’évaluation du risque et de la dangerosité supposée des personnes détenues. Le gouvernement n’a cessé de répéter que les régimes différenciés de détention ne signifiaient pas des droits différents. En réalité, la consécration législative de ces régimes pénitentiaires nous semble vouée au contraire à devenir une manière de moduler l’exercice des droits, légale et légitimée par des expertises – la plupart du temps d’ordre psychocriminologique, selon des modèles actuariels ou hybrides actuariels/cliniques. Pour tester cette hypothèse, nous montrerons dans un premier moment de quelle façon le double impératif de reconnaissance des droits et de différenciation des régimes de détention a pesé sur le long processus de conception de la réforme. Nous tenterons ensuite de voir de quelle façon la conception parallèle de réformes pénales et de la réforme pénitentiaire institue la gestion des risques comme sens central de la peine.
6Il ne s’agira donc pas tant, du point de vue de la sociologie du risque, d’explorer les modalités concrètes de « fabrique d’un risque9 » ou de « mise en risque10 » afin, entre autres choses, de montrer son caractère arbitraire11, son « faillibilisme scientifique12 » ou, plus globalement, l’imaginaire social et l’effet de pouvoir qui le sous-tend : nous ne proposerons pas ici de déconstruction sociologique du calcul concret de tel ou tel risque13. Il s’agira plutôt de nous intéresser à l’effet institutionnel et politique de la « rhétorique du risque » telle qu’elle se déploie dans le champ politique à propos de la réforme des prisons, dans sa capacité à (re)légitimer une institution en quête de sens, et contrainte, pour se reproduire, de domestiquer les critiques dont elle est l’objet. Cette relégitimation de la prison au moyen de la rhétorique du risque doit son efficacité à deux processus complémentaires : d’abord l’hybridation des missions sécuritaires et correctionnalistes de l’institution, par une sophistication grandissante de la différenciation des régimes de détention ou, dit autrement, l’intensification et la légalisation de pratiques sécuritaires opérées au nom de la réinsertion, conçue comme absence de récidive ; ensuite l’« endogénéisation14 » de la dénonciation de la violation des droits des personnes détenues, par l’affirmation selon laquelle la différenciation des régimes de détention ne serait pas, simultanément, une différenciation des régimes de droits15.
Entre défense des droits et sévérité pénale : la nécessité de classer
7Une discussion législative sur le monde carcéral, ce « mauvais objet politique16 », est un événement rare. Une loi pénitentiaire a certes été votée en 1987, mais elle ne comportait que six articles et l’essentiel de son propos était d’organiser une nouvelle répartition des tâches entre secteurs public et privé17. Les derniers moments de réforme importante sont ceux qui ont suivi les révoltes des années 1971-1975 et l’alternance de 198118, et ils ont, pour l’essentiel, été opérés par décrets et circulaires19. Le nom demeuré associé à la précédente réforme de 1945 n’est pas celui d’un ministre de la Justice ou d’un député, mais celui de Paul Amor, directeur de l’administration pénitentiaire20. Cette absence des législateurs a sans doute des sens différents. À la Libération, elle doit davantage à la relative stabilité administrative pour mettre en œuvre une orientation nouvelle, comparée à l’instabilité gouvernementale de la Quatrième République. Après les révoltes des années 1970, on peut lui donner un sens plus fondamental : la réforme n’a pas opéré un réinvestissement du sens de la peine de prison. Elle n’a pas divisé des orateurs de premier ordre qui seraient en même temps, comme Tocqueville ou Charles Lucas au XIXe siècle21, des théoriciens du système pénitentiaire. Son orientation principalement gestionnaire et modernisatrice et le rapide dépassement, dans le débat public, des questions pénitentiaires au profit de l’émergence de la question de l’insécurité22 expliquent que la réforme ait été une œuvre principalement administrative et marginale pour les responsables politiques les plus importants23.
Le sens absent
8De ce point de vue, la séquence qui s’est achevée en 2009 par le vote de la loi pénitentiaire est paradoxale. La dimension de scandale public suscitée par la « révélation », dans les années 2000, de l’état de vétusté des prisons a mis à l’ordre du jour politique une entreprise législative24. La première moitié de la décennie 2000 a ainsi été l’occasion de dénonciations répétées de l’état des prisons25, d’une importante production institutionnelle sur les orientations d’une réforme pénitentiaire, venue des parlementaires26, d’une commission présidée par haut magistrat27, de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH28) et, à une autre échelle, du Conseil de l’Europe29. Sur des modes différents, les diverses propositions, en partant du constat des lacunes du droit pénitentiaire et de la dénonciation de l’arbitraire carcéral, ont réfléchi aux façons de faire entrer l’État de droit en prison, de reconnaître, codifier et garantir les droits des détenus et de contrôler l’exercice du pouvoir de l’administration.
9Ces programmes réformateurs forment certes des énonciations politiques nouvelles concernant la prison, mais, à la différence des visées « fondatrices30 » qui reformulent la croyance en un sens thérapeutique de l’enfermement31, il s’agit fondamentalement de conceptions pour défendre les individus contre l’institution. Ces conceptions héritent donc plus des critiques de la prison menées au nom des droits des personnes à partir des années 1970 que des théories positives du sens de la peine. Contre la tradition d’arbitraire des établissements pénitentiaires, les militants du Groupe d’information sur les prisons et du Comité d’action des prisonniers avaient fait valoir leur droit d’avoir des droits, c’est-à-dire la nécessité que l’administration reconnaisse le socle de ce qui est permis à tous les détenus et ne saurait être modulé pour des raisons disciplinaires32. C’est ainsi que l’on peut lire, par exemple, la déclaration des détenus de Fresnes lors du mouvement des 7 et 8 février 1972 :
« – Droit d’avoir un transistor dans chaque cellule.
– Fin de l’isolement en promenade pour les détenus en haute surveillance.
– Droit de cantiner des livres de poche.
– Droit de faire entrer dans la prison des nouveautés qui ne sont pas encore à la bibliothèque.
– Droit au service religieux pour les isolés en haute surveillance.
– Prolongation de la durée des parloirs.
– Cinéma pour tous (seuls les classés y ont accès).
– Suppression de la responsabilité du directeur en ce qui concerne la discipline intérieure33. »
10La liste combine trois registres de mise en cause du fonctionnement traditionnel de la prison. Elle demande à la fois des droits nouveaux, la fin de l’exercice modulé des droits selon les choix de l’administration (les classés, les isolés en haute surveillance) et la suppression de la clef de voûte du système disciplinaire qu’est le pouvoir discrétionnaire du directeur sur son établissement. Les rapports des années 2000, s’ils ne partagent pas la radicalité critique de la première moitié des années 197034, s’inscrivent dans cette logique, car ils désignent ce qui ne peut plus être toléré plus qu’ils n’expliquent comment rendre l’enfermement bénéfique. Les textes qui appellent à la réforme manifestent en même temps leur scepticisme à l’égard des vertus de la prison.
11Or les ministres de la Justice de droite ont, à partir de 200235, concentré leur effort politique sur la loi pénale, en insistant notamment sur la nécessité de peines dissuasives pour prévenir les passages à l’acte. Ils ont jugé qu’ils pouvaient sans dommage politique laisser à l’administration le soin de mener des transformations pénitentiaires. La politique de sévérité pénale a produit une nouvelle et rapide inflation carcérale36, entraînant à sa suite la demande, par l’administration, de moyens renforcés de maintien de l’ordre37. De nombreuses transformations ont ainsi été menées pour renforcer la sécurité pénitentiaire, selon l’orientation donnée par le garde des Sceaux Dominique Perben38 : création d’un état-major de sécurité au sein de la direction de l’administration pénitentiaire, mise en place d’équipes régionales d’intervention et de sécurité (ERIS), installation ou consolidation des filins anti-hélicoptères, introduction de nombreuses technologies telles que les systèmes de brouillage des téléphones portables, la biométrie ou les tunnels à rayon X, amélioration des postes de sécurité périmétrique, instauration de glacis autour des prisons et réduction des mouvements à l’intérieur des établissements. Pour la seule année 2003, une trentaine de notes ou circulaires relatives à la sécurité ont ainsi été rédigées39. La politique menée depuis 2002 a déplacé l’urgence réformatrice d’une loi en faveur des droits vers une loi pour moderniser la gestion de l’administration et maîtriser les risques.
Contre l’égalitarisme juridique
12C’est donc paradoxalement dans un contexte sécuritaire qu’une loi pénitentiaire est finalement mise à l’ordre du jour en 2007. En réponse à l’interpellation d’un groupe d’associations et de syndicats, Nicolas Sarkozy, alors candidat à la présidence de la République, a répondu qu’une loi devait être votée pour « fixer les droits et les devoirs des détenus » et « appliquer » les normes considérées comme indispensables que sont les règles pénitentiaires européennes (RPE), dont une version nouvelle a été adoptée en janvier 2006. Mais cette promesse est accompagnée de celle d’un nouveau durcissement de la loi pénale (les « peines-plancher », qui prévoient, sauf motivation particulière du magistrat, des peines de prison ferme minimales à l’encontre des personnes récidivistes) qui annonce une nouvelle séquence d’augmentation du nombre de prisonniers. Ce contexte – inflation carcérale et orientation sécuritaire de la politique pénitentiaire – a influé sur la manière dont la direction de l’administration pénitentiaire a perçu les « enjeux » d’une réforme qu’elle savait inévitable. Dans un document interne, elle a anticipé un « accroissement de la durée des longues peines » et un « fort accroissement des violences en détention, que subissent autant les détenus que les personnels40 ». La direction de l’administration se fixe alors comme objectif l’application des RPE41, et affirme en expérimenter, en 2007, 8 – sur 108 – dans 28 établissements sur 190. Mais la faveur manifestée par l’administration pénitentiaire pour les règles européennes est, du point de vue de la défense des droits, très ambiguë.
13Cette faveur manifeste sans doute l’acceptation formelle de la reconnaissance des droits des détenus. Mais, de ce point de vue, les RPE donnent une orientation ambivalente. Elles s’inscrivent dans le double mouvement de reconnaissance des droits et de distinction des régimes de détention selon l’évaluation des risques. Le premier élément est central, et constitue l’essentiel des principes affirmés par les règles européennes. Mais elles stipulent également que chaque détenu doit être évalué « afin de déterminer le risque qu’il ferait peser sur la collectivité en cas d’évasion [et] la probabilité qu’il tente de s’évader seul ou avec l’aide de complices extérieurs42 ». Chaque détenu doit, en conséquence, être soumis « à un régime de sécurité correspondant au niveau de risque identifié », le niveau nécessaire devant être « réévalué régulièrement43 ». La juriste Martine Herzog-Evans explique que cette mention a, dans les RPE, moins pour objet de légitimer un tel mode de classement que d’en prévenir les excès44. Cette mention n’en sert pas moins aux promoteurs de la différenciation des régimes de détention de source de légitimation de leur entreprise de réforme.
14Par ailleurs, l’administration pénitentiaire met surtout en avant le caractère « non contraignant », non « impératif » des RPE, « qui doivent pour la plupart s’appliquer dans la mesure du possible45 ». La raison de la préférence du ministère de la Justice pour des règles indicatives et morcelables est que, pour lui, le corrélat nécessaire au double mouvement de reconnaissance des droits des détenus et de l’enfermement de plus de personnes pour des durées plus longues est de laisser à l’administration une latitude pour classer la population carcérale et varier les régimes de sécurité. Dans un texte d’orientation préalable aux débats législatifs relatifs à l’élaboration de la loi, l’administration pénitentiaire opère ainsi un glissement tactique depuis la prise en compte de la nécessité de reconnaître des droits aux détenus vers la critique de l’égalitarisme juridique, égalitarisme qui empêcherait la pleine réalisation de ses prétentions pénologiques quant à la rectification des comportements déviants ; in fine, ce glissement lui permet d’opposer clairement la volonté de classement et la reconnaissance de droits égaux :
« Au nom d’une approche égalitaire des détenus, qui restreint la possibilité de créer des catégories, au nom de sa non-prédictibilité, qui interdit de considérer que telle caractéristique prédispose à tel comportement, il nous a été impossible de parvenir à une véritable classification des détenus qui est pourtant le fondement de tout régime différencié digne de ce nom46. »
15L’administration fait référence à un principe de la réforme de 1975, menée en réponse au renouvellement critique porté par les militants du GIP et du CAP. Celle-ci s’était fondée sur l’idée que, s’il était nécessaire de reconnaître des droits nouveaux, il fallait en même temps donner la possibilité à l’administration pénitentiaire d’en exclure certains prisonniers. Cette logique a abouti à la création des « quartiers de haute sécurité ». Mais ceux-ci ont été à leur tour critiqués pour la brutalité qui y régnait et sont devenus, à la fin des années 1970, un symbole pour les défenseurs des droits des prisonniers. C’est pour cela qu’ils ont été supprimés par la gauche après 1981. Le ministère de la Justice est revenu, en 2007, sur les raisons de l’échec de cette tentative :
« Ce sont ainsi les abus constatés dans l’utilisation des Quartiers Haute Sécurité (QHS) qui ont provoqué non seulement leur suppression mais aussi la disparition de toutes les mesures officielles de la dangerosité des détenus à l’exception toutefois de la catégorie très restreinte des Détenus particulièrement surveillés (DPS). Naturellement se sont recréées ipso facto des listes officieuses tant il est vrai que la question de l’évaluation de la dangerosité des détenus est la condition de la mise en œuvre de programmes de réinsertion47. »
16L’administration reconnaît que la différenciation des régimes de sécurité, bridée depuis la fin des QHS, fonctionne en dehors de tout cadre législatif. Pour le déplorer, semble-t-il, elle signale que « des groupes de pression ont su habilement exploiter l’impact des illégalités commises par l’administration en obtenant la remise en cause de tout classement48 ». De fait, la tentative de recréer, hors du droit, des régimes de détention différenciés rend l’administration vulnérable. C’est ainsi, par exemple, que la décision prise par un directeur de placer un détenu en régime fermé a été annulée par le tribunal administratif de Nantes49. Les juges ont estimé qu’un tel classement, par la transformation du régime de détention qu’il imposait, devait entrer dans la catégorie des mesures à prendre au terme d’une procédure contradictoire et soumise à l’appréciation des juges. En conséquence, aux yeux de l’administration, il est nécessaire, si des droits nouveaux sont reconnus, de donner une existence législative à des régimes de détention différenciés, au sein desquels l’application des droits est modulée.
La gestion des risques comme sens de la peine
17Le couple dangerosité/risque est ainsi ce qui permet de diffracter la notion de droit des prisonniers en une série de régimes de détention. À la suite de l’Administration pénitentiaire, le Comité d’orientation restreint chargé de préparer la réforme s’appuie sur les règles pénitentiaires européennes pour affirmer la nécessité de distinguer les régimes de détention selon l’évaluation des risques, tout en insistant sur les garanties qui doivent empêcher cette classification de devenir permanente et/ou arbitraire. Il préconise d’« objectiver les critères d’affectation de certains condamnés dans des établissements à sécurité renforcée, par référence aux règles pénitentiaires européennes » et de « réexaminer périodiquement et au moins annuellement la pertinence du maintien du condamné dans ce type d’établissement50 ».
18Le texte de la loi pénitentiaire, à partir de sa conception, connaît une trajectoire parlementaire tourmentée. Le gouvernement veut l’examiner selon une procédure d’urgence, qui permet de ne procéder qu’à une lecture par chambre, mais sa démarche intervient au moment où entre en vigueur la réforme constitutionnelle qui transforme cette procédure, ce qui engendre de longs débats. Par ailleurs, le texte du gouvernement suscite une déception tangible, y compris dans les rangs de la majorité51. Le rapporteur du texte, le sénateur Jean-René Lecerf, effectue un important travail d’amendement. Rachida Dati, ministre de la Justice de 2007 à 2009, qui défend le texte devant le Sénat, est remplacée par Michèle Alliot-Marie, qui quitte elle-même le ministère après quelques mois52. Il faut plus de six mois pour que le texte soit examiné par l’Assemblée nationale. Plusieurs points ont, dans les deux chambres, fait l’objet de discussions houleuses, concernant l’encellulement individuel et la transformation des règles de l’aménagement des peines. Nous ne revenons pas sur l’ensemble de ces points, mais sur ce qui, en matière pénitentiaire, constitue le centre de la réforme.
Le « nœud » de la réforme
19Au sein de la majorité, des conceptions différentes de la réforme pénitentiaire émergent dans les débats. Le député de l’UMP Christian Vanneste, tenant d’une ligne dure en matière de sécurité, explique, au début des débats, qu’« une société qui croit en ses valeurs ne doit pas avoir honte de punir ceux qui les transgressent53 ». Une telle formulation est en tension avec les présentations gouvernementales du texte de loi, qui insistent à l’inverse sur son ambition dans la reconnaissance des droits et en faveur de la réinsertion, comme celle de Michèle Alliot-Marie : « Le projet de loi a aussi pour objectif de répondre aux lacunes et aux insuffisances – il faut savoir reconnaître la réalité et la nommer – du droit pénitentiaire » ; « dès leur incarcération, tous les détenus devront adhérer à un parcours de peine personnalisé au sein duquel ils pourront se former, se soigner et travailler54 ». Au cours des débats, en face des mises en cause de la gauche sur les insuffisances de la loi, les orateurs de la majorité oscillent entre la défense de l’ambition du texte et sa présentation comme un texte cohérent avec une politique pénale fondée sur l’extension du parc pénitentiaire et la réaffirmation d’un sens punitif de la sanction.
20Ces positions contradictoires, relatives au sens général de la punition, passent cependant au second plan dans le débat, précédées par ce qui est, pour le ministère de la Justice, « le nœud » de la réforme55. Celui-ci résulte de l’articulation entre deux articles de la loi :
« Article 22
L’administration pénitentiaire garantit à toute personne détenue le respect de sa dignité et de ses droits. L’exercice de ceux-ci ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles résultant des contraintes inhérentes à la détention, du maintien de la sécurité et du bon ordre des établissements, de la prévention de la récidive et de la protection de l’intérêt des victimes. Ces restrictions tiennent compte de l’âge, de l’état de santé, du handicap et de la personnalité de la personne détenue.
Article 89
La répartition des condamnés dans les prisons établies pour peines s’effectue compte tenu de leur catégorie pénale, de leur âge, de leur état de santé et de leur personnalité. Leur régime de détention est déterminé en prenant en compte leur personnalité, leur santé, leur dangerosité et leurs efforts en matière de réinsertion sociale. Le placement d’une personne détenue sous un régime de détention plus sévère ne saurait porter atteinte aux droits visés à l’article 22 de la loi no 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire. »
21L’article 22 énonce à la fois un impératif de respect des droits et la liste des raisons permettant d’y déroger. L’article 89 formalise l’idée de régimes de détention différenciés et, au vu des exceptions que l’article 22 prévoit, peut sans contradiction affirmer que ces régimes différents ne portent pas atteinte au respect des droits. Rachida Dati explique ainsi que « l’instauration des régimes différenciés à l’intérieur d’un même établissement ne comporte aucune conséquence sur les droits des détenus56 ». Le sénateur socialiste Alain Anziani tente de discréditer cette affirmation : « Méfions-nous aussi des régimes différenciés, car ils respirent l’arbitraire. J’ai entendu ce matin, en commission, l’exposé à cet égard de Mme la garde des Sceaux : permettez-moi de vous dire, avec beaucoup de respect, qu’il s’agit d’une histoire pour enfants, car la réalité est tout autre57. » Contre ce risque d’arbitraire, il demande que « la référence à la dangerosité soit supprimée dans l’ensemble du texte » : « La notion de dangerosité est vague. Qui est dangereux ? Pour qui ? Pour quoi ? En fonction de quels critères ? Tout cela est bien flou58. » Le député socialiste Jean-Jacques Urvoas reprend à l’Assemblée cette ligne de critique : « L’instauration d’un tel dispositif reviendrait à abolir toute référence à une norme générale et impersonnelle dont la personne détenue pourrait revendiquer le respect. Et tout cela pour instaurer un régime mouvant, fluctuant, répondant aux seules exigences de l’Administration pénitentiaire59. » À cela il oppose l’idée qu’« un droit fondamental doit rester un droit fondamental en toutes circonstances, y compris en prison ». Contre certaines formulations passées des projets réformateurs socialistes, l’opposition fait valoir dans l’enceinte de l’Assemblée une critique de la réforme au nom des droits. Cette innovation signe l’échec de la volonté de la majorité d’aboutir à un consensus politique autour de sa réforme.
22En contrepoint, contrairement à ce qu’elle a tenté au Sénat, la droite définit moins sa loi comme une parenthèse dans le combat politique, qui devrait réunir les partis autour d’objectifs partagés, que comme une continuation de sa politique pénale. La rhétorique du risque sert à établir cette continuité. Michèle Alliot-Marie assume plus directement les conséquences juridiques de la différenciation des régimes de détention, affirmant qu’il « sera ainsi mis un terme à un égalitarisme injuste et inefficace qui a prévalu jusqu’à ces derniers temps60 ». C’est la position de Jean-Paul Garraud, député de l’UMP et rapporteur du texte à l’Assemblée. Il a été l’un des plus ardents défenseurs de l’instauration de la rétention de sûreté61 et présente ainsi la cohérence entre réformes pénales et réformes pénitentiaires :
« Pour pouvoir s’amender, il faut d’abord reconnaître sa faute, et en cela la peine a une valeur pédagogique, une valeur dissuasive et d’exemplarité. Cela doit aller dans les deux sens : d’une part, les régimes différenciés en fonction notamment de la dangerosité et, d’autre part, toute la palette des aménagements de peine à disposition de l’autorité judiciaire, qui apprécie au cas par cas les garanties de réinsertion et l’absence de risque de récidive62. »
23Un trait important est que Jean-Paul Garraud croit que la réforme pénitentiaire ne doit pas viser l’amoindrissement des risques mais bien leur éradication. Il le dit ailleurs plus nettement encore :
« À la convergence de nombreux impératifs qui peuvent sembler contradictoires, le monde pénitentiaire évolue et doit également faire évoluer ses détenus vers une réinsertion excluant tout risque de récidive63. »
24Pour lutter contre les libérations anticipées, Christian Vanneste prend l’exemple du criminel récidiviste Guy Georges. Patrick Braouezec, député communiste, lui répond qu’il est « très facile de prendre l’exemple ultime et assez exceptionnel de Guy Georges64 ». Christian Vanneste juge, pour sa part, que « même un seul mort, c’est un mort de trop65 ! ». Ici, l’inscription de la loi pénitentiaire dans la droite ligne de la politique pénale menée par le gouvernement, et, notamment, dans la continuité idéologique des débats relatifs à la loi sur la rétention de sûreté promulguée une année plus tôt, s’appuie sur un discours dont la simplicité même est la force : la recherche du « risque zéro » et l’application du « principe de précaution66 ».
La récidive criminelle comme risque central
25La prégnance de la question de la récidive criminelle et de ses relations avec l’octroi contesté d’aménagements de peine a été illustrée par le débat pénal qui a immédiatement suivi l’adoption de la loi pénitentiaire. Même si cela demanderait une vérification quantitative, il est probable que ce débat a eu une plus grande ampleur médiatique que la discussion de la loi pénitentiaire, attendue depuis une décennie67.
26Le 28 septembre 2009, Marie-Christine Hodeau est enlevée dans l’Essonne. Elle est retrouvée morte quelques jours plus tard. Il apparaît très vite que le principal suspect du meurtre est un homme déjà condamné pour crime. Le drame prend rapidement une dimension politique, par l’intervention des plus hauts responsables de l’État. Le 1er octobre, Nicolas Sarkozy demande à Brice Hortefeux, ministre de l’Intérieur de 2009 à 2011 et représentant de l’aile droite de son parti en matière de sécurité, d’étudier les moyens de surveiller davantage les condamnés ayant purgé leur peine, pour réduire les risques de récidive68, éventuellement par une modification de la législation. Par ailleurs, « le président a indiqué que le projet de loi destiné à limiter les risques de récidive présenté en novembre dernier en Conseil des ministres serait examiné “en priorité” par le Parlement avant la fin octobre69 ». Le président, explique alors l’Agence France Presse, exhume « un projet de loi précisément conçu pour renforcer la “surveillance de sûreté” des condamnés remis en liberté, qui dormait depuis près d’un an dans les cartons70 ». Dès lors, le débat porte sur la nature des révisions législatives à apporter, autour de la question de la « castration chimique », c’est-à-dire des possibilités d’imposer un traitement hormonal à un condamné71. Une discussion s’élève au sujet de la responsabilité des juges de l’application des peines :
« M. Hortefeux avait affirmé jeudi que l’“assassinat” de Marie-Christine Hodeau “aurait pu être évité”, mettant en cause “les juges d’application des peines qui ont pris la décision de libération conditionnelle72”. »
27Une ancienne garde des Sceaux socialiste juge ces propos « irresponsables ». Ils sont également dénoncés par le Syndicat de la magistrature, syndicat minoritaire des magistrats qui, dans une lettre ouverte à la ministre de la Justice, dénonce une « immixtion insupportable dans le fonctionnement de l’autorité judiciaire, surtout lorsqu’il est manifeste que la décision contestée était fondée en droit et en fait73 ». Le 16 octobre, Nicolas Sarkozy confirme qu’il privilégie l’idée d’un recours accru à la « castration chimique » comme condition de la libération des délinquants sexuels74. Le recours à la castration physique est un temps évoqué par Michelle Alliot-Marie75, notamment parce que Francis Evrard, criminel récidiviste, la réclame pour lui-même quelques jours avant l’ouverture de son procès76. Dans un entretien au Figaro, elle déclare : « Pour l’instant, la castration physique est interdite en France, mais elle existe ailleurs. Je pense que cela mérite une analyse et qu’aujourd’hui la question de la castration physique peut se poser et être débattue, y compris au Parlement77. » Finalement, la ministre renonce à ce débat… mais le projet de loi est déposé en urgence au Parlement. Il est examiné en commission début novembre, et est voté le 24 novembre 2009. Les députés de la majorité ont durci le texte du gouvernement. La loi prévoit notamment l’extension de la surveillance de sûreté et le retour en prison des condamnés libérés qui refusent leur traitement chimique dans le cadre d’une injonction de soin.
28En revanche, l’Assemblée a rejeté des amendements sur les réductions de peine et sur l’obligation de se signaler au maire d’une ville où elle s’installe pour une personne condamnée pour une infraction sexuelle78. Outre les partis de gauche et les associations de défense des droits de l’Homme, le Syndicat de la magistrature, le Syndicat des avocats de France et le principal syndicat des travailleurs sociaux (SNEPAP) dénoncent le texte, en insistant sur la répétition des réformes en matière de récidive, le durcissement et les atteintes aux libertés que celle-ci provoque, et l’inefficacité des mesures adoptées79. Le texte a été voté au Sénat, avec des transformations concernant le quantum de peines pour la mise en œuvre d’un placement sous surveillance de sûreté à l’issue de la surveillance judiciaire ou du suivi socio-judiciaire. Abaissé de 15 à 10 ans par les députés, il a été rétabli à 15 ans par les sénateurs, qui ont obtenu gain de cause en commission mixte paritaire80. Le texte a été définitivement voté au début 201081.
29L’intense médiatisation qui a suivi la mort de Mme Hodeau, et la rapidité avec laquelle une loi a été votée, peu après l’achèvement du long parcours de la loi pénitentiaire, illustre la complexité du rapport politique actuel avec les aménagements de peine : promus dans le cadre de la loi, certes avec des réserves, ils sont mis en accusation avec virulence lorsqu’un cas de récidive criminelle se produit, et la loi est transformée pour en rendre les conditions d’octroi plus difficiles, voire pour faciliter le retour en prison, ou à d’autres formes d’enfermement comme la rétention de sûreté, des personnes qui ont purgé leur peine mais ne respectent pas leurs obligations.
30La clôture du débat parlementaire sur la loi pénitentiaire s’accompagne du recouvrement de l’enjeu politique de la condition des prisonniers par le retour de celui de la prévention des risques de récidive. Au final, le sens de la gestion des risques qui domine est celui de la neutralisation des menaces par l’enfermement ; l’enjeu des droits des prisonniers a, quant à lui, été oublié. L’institution pénitentiaire est le réceptacle de ces impératifs et définit en conséquence ce dont elle a besoin, à ses yeux, pour gérer des risques qui n’ont que le nom de commun avec ceux que désigne la politique pénale. En tendant à enfermer pour une durée indéfinie les auteurs d’infractions pour lesquelles l’absence de risque est promue comme la condition de la libération, la politique pénale lègue à la prison la tâche de gérer les conséquences d’une telle politique : la violence potentielle de personnes qui considèrent qu’elles n’ont rien à perdre, la dégradation de leur état de santé, physique et psychologique, etc. L’allongement des longues peines de prison pèse ainsi sur toute tentative de réforme, parce que, comme le montre la sociologie de la prison, la violence carcérale est d’abord celle des durées d’enfermement82. Moins les prisonniers peuvent préparer leur libération à une échéance prévisible et pas totalement hors d’atteinte, plus l’administration pénitentiaire a besoin de moyens pour maintenir l’ordre, par des transferts dans des établissements de plus haute sécurité, par des placements à l’isolement. Une politique pénale fondée sur l’idée d’un risque zéro met en danger l’équilibre des établissements pénitentiaires, qui répondent à ces transformations par un usage renouvelé de la notion de risque comme légitimation de la classification des prisonniers et de la distinction entre leurs droits.
31Une idée des conséquences possibles de la mise en application de régimes pénitentiaires tels que prévus par la loi peut être donnée par un regard porté sur le système canadien, modèle souvent évoqué en matière de droits des détenus mais également en termes de classification sécuritaire des établissements et des détenus. Aux droits accordés en prison de sécurité dite « minimale » répond un système sécuritaire omniprésent en établissement de sécurité « maximale » et plus encore en « unité spéciale de détention » (« supermax »), dans laquelle tout mouvement est contrôlé (un seul déplacement de détenu effectué à la fois, port des menottes en cas de proximité physique avec un surveillant, etc.). Plus généralement, les observateurs officiels constatent la tendance à « l’excès de prudence » qui conduit les experts à « surévaluer » massivement les cotes sécuritaires des détenus, malgré l’exigence légale d’incarcérer le détenu dans le milieu le moins coercitif possible. Les chercheurs décrivent au Canada le faux-semblant généralisé qui teinte les interactions entre les détenus et des psychologues entièrement voués à l’évaluation des risques, sapant les bases d’une confiance indispensable à une relation d’aide83. Ils dénoncent, enfin, le pouvoir exorbitant de l’agent de libération conditionnelle (en matière de transfert en établissement moins coercitif, lors de l’octroi ou non de sortie sans surveillance, de mise à l’isolement, etc.). Trente ans après la vague critique qui s’est abattue sur les services correctionnels durant les années 1970, les observateurs désabusés en viennent à se demander si l’ensemble des acquis en matière d’ouverture et de droits sont devenus autre chose qu’un dispositif de bon fonctionnement managérial84.
Conclusion
32L’intérêt de déplacer le regard depuis une sociologie des instruments statistiques proprement dits et de la déconstruction des modes experts de calculs des risques vers une sociologie politique de l’usage de la rhétorique du risque en matière de réforme des prisons dans un contexte pénal particulier permet, en retour, d’envisager l’hypothèse selon laquelle ce n’est pas tant la technicité du risque qui rend sa rhétorique efficace, mais au contraire le flou sémantique qui l’entoure, parce qu’il permet d’entretenir une triple ambigüité aux gains politiques non négligeables :
- D’abord entre un simple calcul de probabilité (les chances de survenue d’un événement, quelle que soit sa gravité) et le rapport entre cette probabilité et les conséquences de survenue de cet événement (les meurtres sont rares, mais leurs conséquences sont, à l’échelle de l’individu, incommensurables85), permettant un continuum rhétorique entre les cas extrêmes et les cas banals, par exemple lorsqu’on se saisit d’un fait divers exceptionnel pour promulguer une nouvelle loi, malgré l’accumulation de lois antérieures à peine mises en œuvre.
- Ensuite entre la notion de risque et celle de dangerosité, répondant « à une représentation hybride des événements, faite d’oscillation entre les deux termes et où la présence de l’un entretiendrait celle de l’autre86 », renforçant le flou et l’efficacité de la première ambigüité.
- Enfin, entre le risque pénitentiaire (comportement transgressif en détention) et le risque criminologique (risque de récidive), qui permet à l’administration d’entraver certains droits au nom de la protection de la société.
33Mais au-delà de ces déplacements sémantiques, et des lois concrètes qui leur donnent forme, il n’est pas aisé de savoir en quoi la promotion de cette gestion pénitentiaire des risques sera un opérateur de transformation concrète de la condition des prisonniers et des agents de l’Administration pénitentiaire. D’un côté, l’essentiel a été acquis pour le ministère de la Justice par le vote des dispositions concernant la différenciation des régimes. De l’autre s’est exprimée à ce propos une conflictualité politique nouvelle, qui empêche que la loi fasse l’objet d’un consensus entre les partis. De plus, la question pénitentiaire n’a pas tardé à redevenir secondaire dans l’espace public. C’est pourquoi les conséquences d’un tel texte sont incertaines. Une partie des décrets d’application de la loi n’a été que récemment publiée87. Et l’histoire de longue durée de la prison apprend à ne pas confondre les rythmes différents des transformations du discours politique et législatif, des modifications des règles effectives dans les détentions et des pratiques des agents.
Notes de bas de page
1 Hobsbawm, E. (1993). « Un historien et son temps présent », dans Écrire l’histoire du temps présent. En hommage à François Bédarida, Paris, CNRS éditions, p. 98.
2 Prost, A. (2000). « Pour une histoire sociale du temps présent », dans Écrire l’histoire du temps présent, op. cit., p. 359.
3 Vasseur, V. (2000), Médecin-chef à la prison de la Santé, Paris, Le Cherche Midi.
4 Assemblée nationale, « La France face à ses prisons », juin 2000 ; Sénat, « Prisons : une humiliation pour la République », juin 2000.
5 Des journées d’action ont été organisées les 15 et 22 novembre 2010. Voir, par exemple, « 2e journée d’action dans la pénitentiaire : nouveaux blocages prévus mercredi », AFP, 22 novembre 2010 ; « Contestation interrégionale à Clairvaux », Est-Éclair, 25 novembre 2010.
6 Lévy, R. (2002). « Sociologie et création de la loi pénale », dans L. Mucchielli et P. Robert (dir.), Crime et sécurité, l’état des savoirs, Paris, La Découverte, p. 73.
7 Sur les différentes temporalités historiques de la prison, voir notamment Chantraine, G. (2004). « Les temps des prisons. Inertie, réformes et renforcement d’un dispositif institutionnel », dans P. Artières et P. Lascoumes (dir.), Gouverner, enfermer. La prison, un modèle indépassable ? Paris, Presses de Sciences Po, p. 57-82.
8 Bérard, J. (2010). « Libérer des détenus, libéraliser les prisons ? Révoltes des prisonniers et réformes pénitentiaires (1968-1975) », dans M. Margairaz et D. Tartakowsky (dir.), 1968 entre libération et libéralisation, Rennes, Presses universitaires de Rennes, p. 183-200.
9 Gilbert, C. (2003). « La fabrique des risques », Cahiers internationaux de Sociologie, vol. 114, p. 52-72.
10 Ewald, F. (1991). « Insurance and risk », dans G. Burchell, C. Gordon et P. Miller (dir.), The Foucault Effect. Studies in Gouvernmentality, Chicago, University of Chicago Press, p. 197-210.
11 Chantraine, G. et J.-F. Cauchie (2007). « Entre réalisme et constructivisme, les états épistémologiques du risque », dans Y. Cartuyvels (dir.), Variations sur le risque, Bruxelles, Faculté universitaire Saint-Louis.
12 Beck, U. [2001 (1986)]. La société du risque. Sur la voie d’une autre modernité, Paris, Aubier.
13 Pour des travaux de ce type, voir par exemple Hannah-Moffat, K. (2005). « Criminogenic needs and the transformative risk subject », Punishment and Society, vol. 7, no 1, p. 29-51.
14 Chantraine, G. et D. Kaminski (2007). « La politique des droits en prison », Champ pénal/Penal field, <http//champpenal.revues.org/2581>.
15 Cette contribution s’inscrit dans la continuité des approches qui, entre science politique et sociologie politique du droit, cherchent à reconstituer le processus qui va de l’émergence d’un problème social au choix d’une issue législative (Voir notamment Enguéléguélé, S. (2002). « Création de la loi pénale et analyses des politiques publiques », dans L. Mucchielli et P. Robert (dir.), Crime et sécurité. L’état des savoirs, op. cit., p. 76-83, ou Lascoumes, P. (1990). « Pluralité d’acteurs, pluralité d’actions dans la création contemporaine des lois », dans Acteur social et délinquance. Études en hommage à C. Debuyst, Liège, Bruxelles, Mardaga, p. 145-163). Elle repose ainsi sur l’examen des documents administratifs, politiques, associatifs et médiatiques produits autour de l’adoption de la loi pénitentiaire, soit : le rapport du Comité d’orientation restreint de la loi pénitentiaire, les versions du projet de loi, les débats parlementaires au Sénat puis à l’Assemblée, le recours déposé devant le Conseil constitutionnel, la décision du Conseil constitutionnel, les recommandations des instances de protection des droits de l’homme françaises et européennes (CNCDH, CPT, etc.), les prises de position des associations et syndicats dans le champ policier, judiciaire et pénitentiaire, les prises de position des experts et universitaires spécialistes de la question et l’étude d’une revue de presse spécialisée sur les questions pénales et pénitentiaires autour du moment de l’adoption définitive du projet de loi. Ces sources écrites ont été complétées par des discussions fréquentes avec des acteurs de ce débat, issus du monde associatif et de l’administration pénitentiaire, rencontrés sur le terrain pendant les mois de polémique autour de la loi et dans le cadre d’enquêtes distinctes.
16 Artières, P., P. Lascoumes et G. Salle (2004). « Gouverner et enfermer. La prison, un modèle indépassable ? », dans P. Artières et P. Lascoumes (dir.), Gouverner et enfermer. La prison, un modèle indépassable ? op. cit., p. 23-51.
17 Loi no 87-432 du 22 juin 1987.
18 Les élections présidentielles de 1981 voient la première victoire de la gauche sous la Cinquième République. Sous l’égide du garde des Sceaux Robert Badinter, elle met en œuvre une série de réformes pénales, dont l’abolition de la peine de mort, la suppression de la Cour de Sûreté de l’État et la création du travail d’intérêt général sont les plus emblématiques. La réforme des prisons s’inscrit dans ce mouvement.
19 Bérard, J. (2010). Loc. cit., p. 183-200.
20 Magistrat et résistant, Paul Amor entreprend à la Libération une ambitieuse entreprise de réforme. Voir le dossier documentaire qui est consacré à sa réforme sur Criminocorpus : <http://www.criminocorpus.cnrs.fr/rubrique70.html>.
21 Petit, J.-G. (1998). Ces peines obscures. La prison pénale en France, 1780-1875, Paris, Fayard.
22 Bonelli, L. (2007). La France a peur, une histoire sociale de l’« insécurité », Paris, La Découverte.
23 Petit, J.-G. et al. (dir.) (1991). Histoire des galères, bagnes et prisons, XIIIe-XXe siècles, introduction à l’histoire pénale de la France, Paris, Privat.
24 Salle, G. (2009). La part d’ombre de l’État de droit, la question carcérale en France et en République fédérale d’Allemagne depuis 1968, Paris, Éditions de l’EHESS, chapitre V.
25 Observatoire international des prisons – section française (2003, 2005). Rapport sur les conditions de détention, Paris, La Découverte.
26 Assemblée nationale, « La France face à ses prisons », juin 2000 ; Sénat, « Prisons : une humiliation pour la République », juin 2000.
27 L’amélioration du contrôle extérieur des établissements pénitentiaires, Commission présidée par le premier président de la Cour de cassation, Guy Canivet. Le rapport a été remis au garde des Sceaux le 6 mars 2000.
28 Commission nationale consultative des droits de l’homme (2007). Sanctionner dans le respect des droits de l’homme, tome I : Les droits de l’homme dans la prison, Paris, La Documentation française.
29 Conseil de l’Europe, « Recommandation sur les Règles pénitentiaires européennes », janvier 2006.
30 Faugeron, C. et J.-M. Le Boulaire (1992). « Prisons, peines de prison et ordre public », Revue française de sociologie, vol. 33, no 1, p. 3-32.
31 En ce sens, les théories de la réinsertion par la prison partagent davantage de points communs que de divergences avec les théories de la rétribution et de la dissuasion, en plaçant l’obligation de punir, la punition comme source de souffrance et la prison comme peine de référence comme trois éléments centraux de la rationalité qui les sous-tend. Voir Garcia, M. (2009). Le rapport paradoxal entre les droits de la personne et le droit criminel : les théories de la peine comme obstacles cognitifs à l’innovation, Thèse de doctorat en sociologie, Montréal, Université du Québec à Montréal.
32 Voir les listes de revendications publiées dans Artières, P., L. Quéro et M. Zancarini-Fournel (2003). Groupe d’information sur les prisons, archives d’une lutte, 1970-1972, Paris, Éditions de l’IMEC ; voir également la première liste de revendications du Comité d’action des prisonniers, CAP, no 2, 15 janvier 1973.
33 Artières, P., L. Quéro et M. Zancarini-Fournel (2003). Op. cit., p. 186.
34 Voir, par exemple, Zancarini-Fournel, M. (2008). Le moment 68, une histoire contestée, Paris, Seuil.
35 En 2002, la droite remporte les élections après une campagne centrée sur la question de l’insécurité. Nicolas Sarkozy devient alors ministre de l’Intérieur, avant d’emporter l’élection présidentielle en 2007.
36 Aubusson de Cavarlay, B. (2008). « La nouvelle inflation carcérale », dans L. Mucchielli (dir.), La frénésie sécuritaire. Retour à l’ordre et nouveau contrôle social, Paris, La Découverte, p. 52-63. Le nombre de personnes écrouées était de 49 718 au 1er juillet 2001, de 60 963 au 1er juillet 2003, de 62 438 au 1er juillet 2005 et de 64 616 au 1er juillet 2007.
37 Chauvenet, A., C. Rostaing et F. Orlic (2008). La violence carcérale en question, Paris, Presses universitaires de France.
38 « Je veux non seulement rendre quasiment impossibles les évasions, mais je veux surtout renforcer la sécurité des personnels parce que c’est d’abord à eux que je pense ». Cité dans Bérard, J. et S. Coye (2005). « Sécurité renforcée en prison : la fabrique de violences », Dedans-dehors, no 49.
39 Bérard, J. et S. Coye (2005). Loc. cit.
40 Direction de l’administration pénitentiaire, Projet de Loi pénitentiaire, Comité d’orientation, Enjeux, juillet 2007.
41 Conseil de l’Europe, « Recommandation sur les règles pénitentiaires européennes », janvier 2006.
42 Comité d’orientation restreint de la loi pénitentiaire, Orientations et préconisations, novembre 2007.
43 Conseil de l’Europe, « Recommandation sur les Règles pénitentiaires européennes », janvier 2006.
44 « Certes, la règle 51.4 pose le principe de la soumission de chaque détenu à un régime de sécurité qui correspond à son niveau de risque identifié. Cependant, le commentaire qui en est fait par le Conseil de l’Europe précise que si cette question a été traitée à l’occasion de la refonte des RPE en 2006, c’est en raison de l’augmentation du recours des États aux régimes différenciés ». Herzog-Evans, M. (2010). « Loi pénitentiaire no 2009-1436 du 24 novembre 2009 : changement de paradigme pénologique et toute-puissance administrative », Recueil Dalloz.
45 Direction de l’administration pénitentiaire, Projet de loi pénitentiaire, Comité d’orientation, Enjeux, juillet 2007. En effet, il n’est pas question, dans le document de l’administration pénitentiaire, de l’application des recommandations précises, en matière de droit pénitentiaire français, de l’Étude sur les droits de l’homme dans la prison de mars 2004 de la Commission nationale consultative des droits de l’homme. Commission nationale consultative des droits de l’homme (2007). Sanctionner dans le respect des droits de l’homme, tome I : Les droits de l’homme dans la prison, Paris, La Documentation française.
46 Direction de l’administration pénitentiaire, Projet de loi pénitentiaire, Comité d’orientation, Enjeux, juillet 2007.
47 Ibid.
48 Ibid.
49 Tribunal administratif de Nantes, décision du 27 juillet 2007.
50 Comité d’orientation restreint de la loi pénitentiaire, Orientations et préconisations, novembre 2007.
51 « Je ne vous cacherai pas, madame le garde des Sceaux, que l’autre partie du projet de loi, celle qui est consacrée au service public pénitentiaire et aux conditions de détention, a suscité plus de déceptions, tant au cours des visites d’établissements que lors des auditions d’une centaine de personnalités », Lecerf, J.-R., Sénat, 3 mars 2009.
52 Pour occuper le poste de ministre des Affaires étrangères, qui lui vaudra d’être mise en cause et de démissionner en raison de ses relations avec le régime tunisien, après la chute de Ben Ali.
53 Vanneste, C., Assemblée nationale, 2e séance du 15 septembre 2009.
54 Alliot-Marie, M., Assemblée nationale, 1re séance du 15 septembre 2009.
55 Selon l’expression employée par le directeur de l’administration pénitentiaire dans un courrier adressé à ses directeurs régionaux le 18 septembre 2009.
56 Dati, R., Sénat, 5 mars 2009.
57 Anziani, A., Sénat, 3 mars 2009.
58 Anziani, A., Sénat, 5 mars 2009.
59 Urvoas, J-J., Assemblée nationale, 15 septembre 2009.
60 Alliot-Marie, M., Assemblée nationale, 15 septembre 2009.
61 Disposition qui permet de maintenir enfermés certains condamnés à l’issue de l’exécution de leur peine, en raison de leur dangerosité. Loi no 2008-174 du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.
62 Garraud, J-P., Assemblée nationale, 1re séance du 15 septembre 2009.
63 Ibid.
64 Braouezec, P., Assemblée nationale, 3e séance du jeudi 17 septembre 2009.
65 Vanneste, C., Assemblée nationale, 3e séance du jeudi 17 septembre 2009.
66 Fin février 2008, la loi relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental a été promulguée. Dorénavant, les personnes condamnées à une peine de réclusion criminelle d’une durée égale ou supérieure à 15 ans pour les crimes, commis sur une victime mineure, d’assassinat ou de meurtre, de torture ou actes de barbarie, de viol, d’enlèvement ou de séquestration, de même que pour les crimes, commis sur une victime majeure, d’assassinat ou de meurtre aggravé, de torture ou actes de barbarie aggravés, de viol aggravé, d’enlèvement ou de séquestration aggravé, pourront, à l’issue de cette peine, être placées en rétention de sûreté pour un an renouvelable sans limitation de durée. Lors des débats relatifs à la question de savoir si cette loi devait être rétroactive, une responsable politique de droite se référait explicitement au principe de précaution : « Poser la question de la rétroactivité de la loi pour les violeurs d’enfants et les assassins déjà condamnés, c’est d’abord vouloir assurer la sécurité des Français […] Il s’agit d’appliquer le principe de précaution ». « Nadine Morano accuse le PS de “se ranger” du côté des assassins », 13 juin 2008. <http://tempsreel.nouvelobs.com/article/20080224.OBS1994/nadine-morano-accuse-le-ps-de-se-ranger-du-cote-des-assassins.html>, consulté le 28 mars 2011. Standard de jugement dont le sens et la portée se construisent en situation, la notion générale de principe de précaution s’est d’abord développée en matière d’environnement, puis de santé. Elle suggère que l’absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de mesures effectives visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles. Voir Lascoumes, P. (1997). « La précaution : un nouveau standard de jugement », Esprit, vol. 237, p. 129-40.
67 Comme exemple d’analyse des positions de la presse à propos d’un fait divers tragique, en l’occurrence l’affaire Buffet et Bontems, voir Lascoumes P. et G. Moreau-Capdevielle (février 1976). « Presse et justice pénale, un cas de diffusion idéologique », Revue française de sciences politiques, vol. 26, no 1, p. 41-69.
68 « Sarkozy : surveiller davantage les condamnés ayant purgé leur peine (Elysée) », AFP, 1er octobre 2009.
69 Ibid.
70 « Sarkozy réactive le thème de la lutte contre la récidive pénale », AFP, 10 octobre 2009.
71 « Affaire Hodeau : MAM veut renforcer les mesures de castration chimique », AFP, 1er octobre 2009.
72 « Guigou (PS) juge “irresponsables” les déclarations d’Hortefeux sur les juges », AFP, 2 octobre 2009.
73 Syndicat de la magistrature, « Lettre ouverte relative aux dernières déclarations de messieurs Brice Hortefeux et Eric Besson », 2 octobre 2009.
74 « Sarkozy veut la castration chimique pour les délinquants sexuels dangereux », AFP, 16 octobre 2009.
75 « Castration physique : “la question peut être débattue” (Alliot-Marie) », AFP, 22 octobre 2009.
76 « Dix jours avant son procès, Francis Evrard écrit au président de la République et demande sa castration physique », La Voix du Nord, 17 octobre 2009.
77 « Une loi pour la castration chimique avant la fin de l’année », Le Figaro, 23 octobre 2009.
78 « L’Assemblée vote le projet de loi récidive après l’avoir durci », AFP, 24 novembre 2009.
79 Syndicat de la Magistrature, « Récidive criminelle : bienvenue dans “le meilleur des mondes” », Communiqué, 12 novembre 2009 ; SNEPAP, « Projet de loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle : une nouvelle récidive », Communiqué, 17 novembre 2009 ; Syndicat des Avocats de France, « Dérive sécuritaire et dictature de l’émotion », Communiqué, 17 novembre 2009.
80 Lecerf, J-R., Sénat, séance du 25 février 2010.
81 Loi no 2010-242 du 10 mars 2010 tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale.
82 Chauvenet, A., C. Rostaing et F. Orlic (2008). Op. cit.
83 Chantraine, G. (2006). « La prison post-disciplinaire », Déviance et société, vol. 30, no 3, p. 273-288 ; Chantraine, G. (2007). « Gouvernement des prisons et résistances infrapolitiques », dans M. Cicchini et M. Porret (dir.), Les sphères du pénal avec Michel Foucault, Genève, Éditions Antipodes, p. 181-194.
84 Chantraine, G. et M. Vacheret (2005). « Expertise psychologique, gestion des risques et rapports de pouvoir dans les pénitenciers canadiens », Questions pénales, vol. 18, no 4, p. 1-4 ; Vacheret, M. (2006). « Gestion de la peine et maintien de l’ordre dans les institutions fédérales canadiennes », Déviance et société, vol. 30, no 3 ; Chantraine, G. et P. Mary (dir.) (2006). « Prisons et mutations pénales », Déviance et société, vol. 30, no 3 p. 289-304.
85 Aubusson de Cavarlay, B. (été 2007). « Risques calculés », dans G. Chantraine (dir.), Politiques du risque, dossier de la revue Vacarme, vol. 40, <http://www.vacarme.org/article1327.html>.
86 Cliquennois, G., « Vers une gestion des risques légitimante dans les prisons françaises », Déviance et société, 2006, vol. 30, no 3, p. 362.
87 Décret no 2010-1634 du 23 décembre 2010 portant application de la loi pénitentiaire et modifiant le code de procédure pénale ; Décret no 2010-1635 du 23 décembre 2010 portant application de la loi pénitentiaire et modifiant le code de procédure pénale.
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Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008