Les « tribunaliers » et la construction du péril criminel en France (1880-1939)
p. 265-279
Texte intégral
1Les chroniques judiciaires, qu’il ne faut pas confondre avec les faits divers, lorsqu’elles sont réunies en un ou plusieurs volumes, témoignent à la fois de la vitalité d’un genre, de la pérennité d’une démarche et du succès d’une entreprise éditoriale sans commune mesure. Entre 1880 et 1940, plus de 20 000 pages imprimées s’offrent ainsi à la curiosité du public et mettent en évidence les dangers dont il faut protéger la société. Il ne s’agit pas, pour les auteurs, de proposer des solutions, quoique certains s’y essayent, mais de témoigner et d’alerter. En effet, la réitération de gestes sanglants, de circonstances singulières et de scènes criminelles, envahit les discours et dicte les politiques pénales1. Certaines chroniques, avant d’être publiées en volume, touchent 100 000 acheteurs de journaux, d’autres près de un million. De la sorte, les « tribunaliers », rédacteurs de ces chroniques, membres de l’Association de la presse judiciaire, contribuent à la fois à désigner les conduites dangereuses et à dessiner, pour un large public, les conduites à risque2. À plusieurs reprises, les autorités sont sommées de réagir. Sur le plan méthodologique et conceptuel, il convient de lire et d’interpréter ces textes qui se déploient en séries. Ils donnent en effet des clés pour comprendre la « médiatisation » des affaires criminelles et la construction d’une société où le risque criminel est présenté comme une menace envahissante. Jamais sans doute autant d’information n’a été portée à la connaissance d’un public de plus en plus vaste3, comprenant aussi bien les spécialistes que l’homme de la rue. À lire les comptes rendus, nul doute que le risque criminel ne constitue pas un bloc ; tantôt il concerne des individus isolés et des familles, tantôt il menace l’ensemble de la société4. Toutefois, les récits des procès, semaine après semaine, donnent l’impression que le risque criminel est dévoilé par les « journalistes judiciaires », formant une « secte terrible et généreuse5 ». Sans eux, le risque culturel n’aurait guère d’existence et il faudrait se contenter des déclarations des porte-parole de la justice ou de la police. De la sorte, il s’agit bien d’une construction soudant les lecteurs autour des mêmes angoisses, même si la plupart d’entre eux n’en ont pas conscience6.
Le proche et le lointain
2Les statistiques et les discours des acteurs du système judiciaire enregistrent un tassement, voire un fléchissement du nombre d’infractions les plus graves jugées par les tribunaux à la fin du XIXe siècle7. Si les délits enregistrés par le Compte général de l’Administration de la Justice criminelle augmentent, les crimes de sang, les plus médiatisés, sont en retrait8. Le risque criminel semble à priori contenu et pourtant, à partir des années 1880, tandis que la presse populaire triomphante multiplie les titres et connaît des tirages « fantastiques9 », l’escroquerie, le scandale financier, le crime de sang, le crime de mœurs s’étalent à la une et dans les pages intérieures, donnant le sentiment que jamais le crime n’a été aussi présent, barrant l’horizon des sociétés contemporaines. Pour le lectorat de cette époque – près de 9 millions –, peu importe la réalité du « compte » du crime. Les chiffres les plus précis comme les plus fantaisistes circulent, mais seuls importent les articles qui chaque jour font part de crimes commis et donnent ainsi le sentiment que le risque criminel devient de plus en plus important.
Le risque près de chez soi
3L’une des nouveautés de la chronique judiciaire est de présenter, avec insistance, le risque criminel comme un phénomène de proximité. La menace ne viendrait pas seulement des lieux excentrés, des ruelles tortueuses des centres-villes, des barrières ou des marges de la ville. Le crime peut s’inscrire dans l’espace familier et les voisins constituent alors une menace qui n’est plus lointaine mais proche. Sans doute peut-on souligner avec Jean Bazin que « la proximité sociale n’exclut nullement la violence, elle contribue seulement à en spécifier les moyens et les formes10 ».
4La multiplication des comptes rendus n’est pas sans effet. La réitération, en effet, joue comme une preuve. Le criminel est parfois montré comme un être inquiétant et étrange, parcourant les villes et les campagnes, animé par ses pensées et ses envies. Mais, le plus souvent, il n’est pas présenté comme un être désocialisé. Au contraire, il est inséré dans un quartier, une rue, un immeuble, un bourg. On le connaît. La familiarité ne rassure plus. Connaître autrui ne constitue plus une protection, disent en substance les journalistes qui rapportent des audiences criminelles une moisson presque quotidienne. Les relations de voisinage peuvent déraper. Un locataire, ébéniste, fait part, dans l’enceinte du palais de justice de Paris, d’un « différend » l’opposant à sa concierge : « Mme Plisson me lança une injure, puis un coup de pied ; une autre injure et un autre coup de pied… Alors, je l’ai tapée, malheureusement, c’est l’os qui a cogné. Voilà11 ! »
5Les cas criminels évoqués n’ont donc pas pour fonction d’édifier ou d’instruire. S’ils permettent de saisir les attentes et les normes en matière de relations de voisinage, ils colorent aussi les actions des hommes et des femmes qui vivent à côté de vous d’une teinte singulière : celle de la brutalité, de la cruauté, voire du mal, disent les contemporains, en dehors d’autres qualificatifs disponibles. Certains immeubles, certaines rues offrent parfois la même familiarité que le village. Malgré la mobilité urbaine et les déplacements à l’intérieur de la ville, tout le monde connaît chacun ou presque. Du moins, les procès criminels montrent qu’il n’existe guère d’anonymes dans la ville. Les rôdeurs isolés, les guets-apens audacieux tendus par des inconnus, les assassins mystérieux qui frappent à l’aveugle ne constituent que quelques sinistres exceptions. Ceux qui s’aventurent en territoires inconnus s’évertuent à rendre les lieux plus familiers. En effet, l’assassin qui ne réside pas sur place agit rarement spontanément. L’affaire Hélène Dumaire, à la fois crime passionnel et de proximité, l’illustre. Après avoir vécu avec son amant qui lui avait promis le mariage, elle apprend qu’il va se marier avec une autre femme. Elle loue un logement à Vendressen, tout près de la maison des fiancés, et devient une familière des lieux. Les espaces, la distribution des pièces, les aménagements intérieurs n’ont plus aucun secret pour elle. Le repérage minutieux est poussé à l’extrême : « Chaque jour, pendant des heures entières, elle passe devant cette maison, elle attend, elle épie12. »
6Le criminel urbain, tel qu’il est restitué dans les comptes rendus d’assises, est donc le plus souvent un familier, du moins quelqu’un que l’on connaît. Indépendamment de l’échelle retenue, celle du palier ou du bourg, les faits et gestes ne peuvent pas s’accomplir dans la clandestinité, ils laissent toujours un indice ou une trace. Aussi, au lendemain d’un crime, c’est bien souvent la stupeur qui l’emporte. Les habitants se disent qu’ils ont côtoyé pendant quelques jours ou quelques années l’auteur d’un crime particulièrement sanglant. La proximité avec celui qui s’est révélé criminel constitue une surprise d’autant plus forte que le cadre quotidien apparaît dans toute sa banalité. Le contraste entre l’extraordinaire du geste accompli et l’ordinaire de l’existence au jour le jour crée bien, avant d’autres sentiments ou réactions, l’étonnement.
7À sa manière, Maurice Talmeyr le confirme. De tous les « tribunaliers », il est peut-être le plus expressif. Il ne se contente ni de l’instruction judiciaire ni des audiences. Souvent, à la veille d’un procès, il se rend sur la scène du crime, non pour s’imprégner d’une atmosphère particulière, mais pour mener une véritable enquête de voisinage afin d’aborder l’affaire de façon plus intime et de tenter d’atteindre, au-delà du rituel judiciaire et des rôles que chacun endosse, la vérité de chaque accusé. De la sorte, la parole des voisins ne se réduit pas à l’enrichissement du récit, elle n’a pas non plus pour fonction de donner une note d’authenticité à la chronique, elle est le soubassement de sa démarche. Ainsi, à l’occasion d’une affaire singulière, macabre et mystérieuse, il semble s’adresser en temps réel à ses lecteurs et donne le sentiment de retranscrire ses pensées : « Les voisins, toutefois, en ont peut-être vu quelque chose…13. » Pour prévenir le crime il faudrait donc, et c’est un peu la morale de tels comptes rendus, renforcer le contrôle social et faire en sorte que les habitants ne se contentent pas d’observer et d’épier mais interviennent au moindre bruit suspect14.
Le risque lointain
8Quelques affaires relatées par les grands journaux se déroulent dans des milieux particuliers et apparaissent en partie pittoresques. Souvent extraordinaires, elles donnent le sentiment d’être exotiques. Les affaires jugées qui appartiennent à cet ensemble relèveraient d’une sorte de passé archaïque. Les tribunaliers ne se privent pas de recourir à ce cliché lorsqu’ils évoquent telle campagne immobile, tel village qui n’a pratiquement pas bougé depuis plusieurs siècles. Ces crimes apparaissent comme des « risques résiduels » qui ne menacent ni l’édifice social ni l’avenir de la société. Ils permettent également de mesurer le chemin parcouru. Désormais, les citoyens ne sont plus des sujets ou des individus anonymes, mais des individus responsables, capables, dans une société libérale, de maîtriser leurs instincts et leur conduite.
9De la sorte, ces crimes sont comme le legs d’un passé ancien. Pour autant, ils n’ont pas disparu. Ils présentent alors une sorte de menace marginale sur laquelle les contemporains n’ont pas de prise, puisqu’ils apparaissent archaïques ou irrationnels et peuvent surgir brusquement. Il existe en effet des « êtres d’exception », ainsi que Georges Claretie le martèle à plusieurs reprises :
« Non, jamais, on n’a vu en cour d’assises rien d’aussi terrifiant que ces petits fauves. Il serait à souhaiter que ces monstres fussent des fous. À côté d’une conscience ou d’une inconscience monstrueuse, on voudrait trouver un cerveau monstrueux de dément15. »
10En règle générale, cette forme de risque criminel trouve à s’incarner dans des figures singulières et célèbres. Ce sont celles de Menesclou, de Pel, de Landru, du Dr Hachet. Quelques crimes de sang suffisent pour imposer des figures « exemplaires » et contribuent ainsi à personnaliser le risque criminel. Peu importe que ces affaires soient peu nombreuses, ce qui compte c’est le traitement médiatique. Arrêtons-nous sur l’exemple de l’affaire Pranzini, qui montre bien que le risque criminel est une construction médiatique à un moment particulier. En 1887, trois femmes sont sauvagement assassinées dans leur appartement16. La principale victime est une demi-mondaine et l’enquête judiciaire met en avant le fantasme du tueur de femmes. Chaque victime est l’objet d’un traitement journalistique particulier, conférant à chaque cadavre ou à chaque mise à mort, donnée par surprise ou reçue en connaissance de cause, ses caractères originaux. Il importe ensuite d’apporter des précisions sur le cadre du crime lui-même : « Sur le tapis du salon, dans une flaque de sang coagulé, apparaissait nettement l’empreinte d’un pied d’homme17. Le gros orteil était particulièrement bien visible18. » Le souci de livrer aux lecteurs des éléments précis et concrets qui fassent « vrai » l’emporte sur le réalisme. Les descriptions ne sont pas saturées d’explication. En effet, presque personne ne semble se demander pourquoi l’assassin s’est déchaussé. Pourquoi a-t-il marché, après la perpétration de son crime, dans une mare de sang pour y laisser une trace visible ? Ces aspects ne sont pas alors l’objet d’interrogations, mais ils sont présentés comme des données. Ce qui importe évidemment, c’est de créer une ambiance, de restituer une atmosphère, de donner le sentiment qu’un véritable carnage s’est accompli, l’impression d’ensemble l’emportant sur la crédibilité du détail. L’une des stratégies de communication consiste, pour la presse, non pas à concurrencer la police, mais à la précéder. De la sorte, il s’agit de devancer l’information, ou plus exactement d’en être à l’origine. Ainsi, le sous-chef de la Sûreté se rend en Belgique, puis en Allemagne. Deux journaux, Le Temps et Le Soleil, organisent la filature. À Breslau, leurs correspondants occupent les chambres contiguës à celle du policier. Le 21 avril, dans sa troisième livraison, celle de six heures du matin, Le Soleil publie l’article de son rédacteur, daté de la veille au soir. Il offre aux lecteurs des renseignements confidentiels sur le développement de l’enquête et les faits et gestes du « limier » français. Dans la course à l’information et à la primeur des nouvelles, le journal précède ainsi les services de police. Si le sous-chef a bien envoyé un télégramme urgent, quelques heures avant la dépêche du journaliste, cette missive n’a été distribuée que tardivement et n’est parvenue que fort tard au palais de justice. Aussi le procureur et le juge d’instruction apprennent-ils « la nouvelle » non pas en consultant le message officiel, mais en lisant la presse. Si le secret de l’instruction apparaît ainsi « malmené », la transparence rend aussi le crime moins dangereux, puisque chacun peut avoir l’impression de le maîtriser19.
11De la sorte, les contemporains prennent connaissance d’un risque criminel urbain pesant sur certaines catégories sociales. Mais dans les colonnes du Figaro, du Temps, du Journal, du Petit Journal, du Parisien, du Matin… le crime ne restera pas impuni, puisque les limiers de la police ou de la presse sont sur les rangs. C’est en effet, écrivent de nombreux journalistes, l’impunité qui fait courir à la société les risques les plus graves. Poursuivre le criminel avec efficacité constitue ainsi une assurance sur l’avenir.
L’ancien et le nouveau
12Le crime existe depuis la plus lointaine antiquité ; seuls ses formes et le regard que la société porte sur lui ont changé, déclare notamment Gabriel Tarde20. Pour autant, à lire les chroniques, la menace criminelle n’est pas restée identique. Chacun semble s’accorder sur le fait que le crime, comme la maladie, existera toujours. Plutôt que de vouloir l’éradiquer, il convient de le comprendre, de le reconnaître et d’accepter de le côtoyer. Le crime change alors de statut, il devient une sorte d’invariant dont on ne peut pas véritablement se protéger, mais que l’on peut prévoir.
Le risque autorisé
13De même que Durkheim avait affirmé que le nombre de candidats ou candidates au suicide est relativement stable dans une société, les contemporains considèrent que la criminalité violente ne connaît pas de progression fulgurante21. Bien au contraire. Pour autant, les tribunaliers soulignent régulièrement que les criminels resteront toujours aussi nombreux et que les crimes se situeront, du point de vue quantitatif, au même niveau. Les « faits criminels » constituent une sorte de risque acceptable et un indicateur de l’état de la société. S’ils augmentaient brusquement ou diminuaient tout aussi soudainement, ils seraient un indicateur de transformations sociales. Trop d’infractions graves ou pas assez de crimes signalent que la société est véritablement menacée et qu’il convient alors de réagir vivement. Dans cette perspective, le danger criminel ne saurait disparaître. Il s’avère pratiquement impossible de « l’apprivoiser ».
14Malgré tout, pour prévenir le risque criminel, quelques tribunaliers rapportent les propos d’un président d’assises ou d’un avocat. Certains lisent les rares ouvrages de souvenirs et accompagnent leurs chroniques d’une citation. Bérard des Glajeux est ainsi souvent cité, lui qui proposait des « remèdes ». Le crime s’apparente au mal, toutefois le « mal appelle le remède, mais le remède ne peut être indiqué avec fruit qu’après une analyse nue et sans artifice de langage, du mal à traiter22 ». Nul doute, à le lire, qu’il se situe bien dans le sillage d’une réponse morale à la criminalité, à la manière d’un Alfred Fouillée ou d’un Henri Joly23. Pour remédier au mal criminel, il existerait donc des remèdes préventifs et répressifs. Mais il n’est pas possible d’appliquer de manière indifférenciée le même traitement à tous les crimes. Il importe en effet d’opérer un travail de repérage, puis de catégorisation. Un tribunalier comme Vonoven, par ailleurs auteur d’une somme sur l’erreur judiciaire, ne dira pas autre chose. Ainsi, pour certains, du strict point de vue préventif, seules trois grandes catégories de crimes peuvent faire l’objet d’une action efficace : ce sont les crimes de mœurs sur enfants, les crimes de mœurs des ascendants et les crimes d’amour. Pour ces derniers, seule une action à l’égard des individus permettrait de préparer l’avenir. Les conditions sociales et les modes de vie n’interviennent que de manière marginale. Pour cela, il convient d’assurer la plus large publicité aux débats de cours d’assises, qui joueront en quelque sorte le rôle d’exemple. De la sorte, s’il est impossible d’agir sur les sentiments ou sur la passion, il est malgré tout possible d’agir sur la volonté24. En ce qui concerne les crimes de mœurs des ascendants, il faut appliquer, disent un certain nombre de chroniqueurs, la loi du 24 juillet 1889 sur la protection des enfants maltraités ou moralement abandonnés, puis de « favoriser la création des logements économiques, comme ceux de la Société philanthropique, qui sauvegardent les lois de la pudeur dans les familles pauvres25 ». Après le crime, les remèdes sont plus flous. Des tribunaliers insistent sur la sévérité des condamnations. Pour prévenir le risque criminel, il importe que le châtiment soit exemplaire. Seule la sévérité de la sanction impressionnera « l’armée du crime ». Mais cette opinion n’est pas, bien sûr, partagée par tous. Les membres de la presse judiciaire qui suivent les débats des tribunaux correctionnels et des cours d’assises sont plus sensibles à la juste mesure de la décision26. D’autres envisagent des solutions plutôt vagues. Il importe, en effet, suggèrent-ils, de rendre des citoyens à la société. Pour cela, il convient de « régénérer » les condamnés et de développer le patronage. Ainsi, il ne s’agit plus seulement de prévenir le crime initial, mais de se protéger de la réitération du crime en rendant presque impossible la récidive. Toutefois, ajoutent des journalistes, le crime, dans ses diverses formes, n’est pas statique. Il suit parfois les évolutions de la société et il faut être capable de discerner les tendances à l’œuvre. Les statistiques de la Chancellerie nivellent les singularités et ne permettent pas de prendre la mesure des formes neuves de la criminalité.
Les risques nouveaux
15Il convient donc de reconnaître les risques nouveaux. Pour de multiples raisons, la maltraitance des enfants a longtemps été ignorée ou minorée27. Quant aux violences sexuelles à l’encontre des petites filles ou des petits garçons, elles ont été niées ou minimisées. Or, au début du XXe siècle, des articles en plus grand nombre traitent des sévices sexuels. Si le parricide représentait, au XIXe siècle, le crime suprême et le risque majeur28, il est désormais progressivement remplacé par un autre. Toutefois, au lendemain de la Première Guerre mondiale, il n’existe pas encore de mot pour le dénommer ou pour qualifier le crime de pédophilie. Commis parfois avec rapt, il fait son apparition dans les colonnes des journaux populaires, sans tintamarre, mais sans cacher l’essentiel des faits. Les propos d’un procureur, rapportés par l’un des chroniqueurs judiciaires les plus célèbres de son temps, Geo London, l’illustre :
« Il était léger de bagages, mais lourd de noirs desseins. Que fait-il ? Ce monstre qui aime la chair fraîche et tendre, erre à l’aventure comme une bête malfaisante en quête d’une jeune proie. Il aborde les petites filles, leur offre des friandises, leur demande de l’embrasser29. »
16Il y a donc bien de nouvelles « cibles » et de nouvelles vulnérabilités. Des êtres fragiles, victimes de la débauche, s’en accommodent parfois, car ils ne peuvent plus faire autrement. Ce sont notamment des femmes qui se livrent au commerce charnel. Les procès criminels, tels qu’ils sont restitués dans les principaux journaux, montrent des jeunes femmes, parfois des jeunes filles, « jetées dans le vice par la fatalité ». Chaque affaire peut être exemplifiée, tout en renseignant sur des trajectoires de vie singulières. L’histoire d’une déclassée qui a rencontré le malheur très tôt l’illustre. Élisa Saint-Juste des Grottes « est vraiment de noble famille, cette petite brune aux cheveux plats, est traduite en cour d’assises à l’âge de vingt ans ». Le récit de son existence est bien celui d’une longue descente aux enfers. Son père, chirurgien-major de la marine, aurait bu pour 800 000 francs d’absinthe avant de mourir en 1876. Peu de temps avant, il avait désigné comme tuteur pour sa fille « un de ses camarades de beuverie », qui l’a prise chez lui et l’a engrossée alors qu’elle était âgée de 15 ans, puis l’a chassée peu de temps avant l’accouchement. Dès lors, elle a « roulé dans la boue ». Devenant mère une seconde fois, elle est ensuite parvenue jusqu’au « dernier degré de l’abjection30 ». Accusée de chantage, d’enlèvement d’enfants, elle est acquittée. Nul doute que la décision du jury a été en grande partie construite sur de la pitié, effaçant les derniers actes pour ne retenir qu’une vie misérable qu’il a voulu en quelque sorte racheter. Jeunes modistes, couturières, blanchisseuses et servantes connaissent, sans tumulte ni réclame, un sort identique à celui de cette jeune aristocrate, comme l’attestent les chroniques judiciaires qui, de 1880 à 1940, hésitent moins à restituer pour les lecteurs des procès de ce type.
17Du côté des hommes, l’amour tarifé qui déséquilibre le budget et menace de ruine la vie bourgeoise est aussi l’objet de remarques morales. C’est moins la volonté de satisfaire ses envies ou ses goûts qui se trouve incriminée que les largesses financières et la dilapidation d’une partie de l’argent accumulé au cours d’une vie de travail. Ainsi, à Aix-en-Provence, un médecin, accusé d’assassinat, est d’abord obligé de répondre au président qui l’interroge sur sa « vie de débauche » à Marseille, sur ses nuits d’orgie et sa liaison avec une « péripatéticienne de la plus basse classe ». L’accusé semble lire un livre de comptes et répond : « Mais tout cela ne me coûtait guère. Tenez, monsieur le président, quand j’étais marié, mon budget mensuel était d’environ 6 000 francs. Or, Andréa ne me coûtait que 4 000 francs par mois31. »
18Toutefois, à l’orée de la Belle Époque, le sadique devient la figure la plus expressive des pervertis et attise l’angoisse d’une société fin-de-siècle. Le risque criminel change de visage. Albert Bataille, rapportant les propos tenus à l’audience, parle, à propos de l’affaire Lesteven, de « passions bestiales » ou de « véritables orgies de luxure cruelle ». Il est vrai que l’accusé, surnommé, lorsque l’on ignorait encore son identité, « la terreur de Montmartre », « l’Espagnol de Montmartre » ou encore « le bandit de Montmartre », infligeait d’abominables tortures aux femmes sur lesquelles il avait jeté son dévolu. Manifestement, il a agressé au moins une dizaine de victimes. Il est aussi soupçonné d’être l’auteur de l’assassinat d’une malheureuse découpée en morceaux. Mais, faute d’éléments de preuve plus substantiels, le « crime de la rue Botzaris » ne sera pas retenu lors du procès devant la cour d’assises. Le portrait de l’assassin n’est guère flatteur : « ignoble personnage », « tête de fouine », « être dégradé ». Depuis 1888, et sans doute la liste n’est-elle pas exhaustive, il martyrisait des femmes en procédant de manière souvent identique. Il les conduisait chez lui, les frappait, les menaçait de mort, leur arrachait des cheveux et il avait besoin des « cris de douleur » et d’épouvante de ses victimes pour assouvir ses passions. « La vue du sang me réjouit », déclare-t-il. Il est présenté comme appartenant à une « bonne famille », mais ne travaillant pas depuis l’âge de 16 ans, devenu « souteneur », condamné à plusieurs reprises pour violence. Le président de la cour d’assises de la Seine remonte au mois de juin 1888, où il avait effrayé une « fille » avec un couteau, lui disant qu’il allait l’éventrer. En 1890, le même scénario s’était répété ; en 1891, une autre « fille » s’était jetée par une fenêtre peu élevée « d’un bouge de la Lavieuville » où il l’avait entraînée32.
19Au cours de l’entre-deux-guerres, des affaires similaires sont portées à la connaissance des lecteurs, donnant au crime, loin des discours savants, des aspects imprévus et inquiétants. En effet, le crime peut prendre des formes inattendues et il devient parfois difficile de s’en protéger, car la « menace criminelle » n’est pas reconnaissable.
Crimes et périls sociaux
20Comment prévenir certains risques criminels quand la société tout entière ne reste pas statique, mais s’est mise en marche, désorientant les observateurs sociaux qui ne sauraient prédire l’avenir ? Les lentes transformations des campagnes et l’essor de la ville provoquent en effet des mutations profondes et irréversibles. Mais il existe parfois un « crime qui tient à la fois de la terre et du pavé33 ». Dans cet ébranlement du monde rural, les crimes « archaïques » ne vont-ils pas s’effacer devant de nouvelles activités criminelles dont presque personne n’a pris la mesure, incapables que sont les hommes modernes de se projeter dans l’avenir ?
Crimes d’adaptation
21Si les crimes de sang sont les plus recherchés par les lecteurs et sont ceux qui sont le plus souvent offerts à leur curiosité, il existe aussi d’autres types de crimes, présentés dans la littérature criminologique et morale de la fin du XIXe siècle et de l’entre-deux-guerres comme des crimes d’adaptation. Leurs auteurs ne ressemblent pas à des brutes, bien au contraire. Ils occupent une place plus ou moins importante dans le monde des affaires, ont su maîtriser un domaine de compétence, ils manipulent avec aisance les colonnes de chiffres, se jouent des règles comptables. Les montages financiers hasardeux relèvent parfois de la simple spéculation ; mais ce sont le plus souvent des opérations frauduleuses, les fraudeurs entraînant dans leur chute de petits épargnants. Plusieurs affaires de ce type, complaisamment rapportées dans la presse, donnent au risque criminel de nouveaux contours. Parmi les grands procès, le scandale de Panama, l’affaire de l’Union générale, le scandale du Comptoir d’escompte, l’affaire Humbert, l’affaire Rochette, l’affaire Stavisky et quelques autres jouent le rôle de « paniques morales34 ». Sans doute s’agit-il d’un crime de suradaptation sociale35. Le risque criminel change alors de nature.
22Dans l’affaire Rochette, le grand public découvre l’existence de plaintes truquées, de malversations, de faux bilans imprimés, de cours fictifs publiés, d’infractions à la loi de 1867 sur les sociétés anonymes, d’escroqueries frauduleuses, notamment la « réclame excessive et mensongère » avec laquelle Rochette faisait la promotion de ses sociétés36. Dans l’affaire Thérèse Humbert, présentée comme la « plus grande escroquerie du siècle », selon la formule, abondamment reprise, de Waldeck-Rousseau, les lecteurs prennent connaissance de détournements incroyables qui éveillent subitement la curiosité et qui tiennent en haleine le public fébrile, avide de « nouvelles à sensation37 ». Et pourtant, par l’ampleur des sommes détournées, par la place occupée par le couple Humbert au sein des élites, par la prestance de Thérèse, l’affaire est exceptionnelle tout en constituant un révélateur du fonctionnement de la société. Alors que le Code civil réduit les épouses à un rôle subalterne, les obligeant à demander l’autorisation de leur mari pour réaliser un acte commercial, Thérèse Humbert parvient, en s’assurant de multiples complicités, à capter des « millions et des picaillons38 ». La somme officielle s’élevait à 100 millions de francs, à une époque où le banquier Seillière avait une fortune de l’ordre de 32 millions, un riche hobereau du Vaucluse un revenu de 90 000 francs par an et un charretier d’Île-de-France un salaire annuel de 500 francs39. Sans doute Thérèse Humbert est-elle plus coupable que victime, même si, lors du procès d’assises, la défense tenta parfois de la présenter comme victime de son milieu familial, d’une époque accordant à l’argent roi la première place et d’une situation politique, mondaine et judiciaire rendant possible la plus audacieuse des escroqueries, qui dura presque 20 ans40. L’affaire41 est bien le point de départ d’une imagerie sans précédent à l’origine de la notion de risque malveillant.
Crimes du changement social et risques de désagrégation
23Les comptes rendus de procès révèlent les changements en cours dans la société et amènent les contemporains à réfléchir à la notion de danger et à renouveler les perceptions du risque criminel. Le crime illustre alors le danger que les déclassés de toutes sortes font courir. L’affaire de la Banque noire montre ainsi que certains groupes sociaux en devenir se caractérisent par leur instabilité :
« Partis tous les deux d’origines différentes, l’un d’une origine régulière, l’autre d’une origine suspecte, ils sont arrivés au crime progressivement, et dans les notes rédigées par eux pour leur défense, on peut suivre pas à pas leurs étapes vers l’abjection42. »
24Dans la manière de rendre compte de ces mutations se dessine ainsi le « péril » des sociétés contemporaines. Il s’agit notamment de se demander comment un petit bourgeois de naissance, « plus ou moins destiné au commerce, à la basoche, aux grades inférieurs de l’armée », devient un brigand. Les transformations sociales troublent aussi des journalistes. L’un d’eux écrit :
« Il semble beaucoup plus et beaucoup mieux, et l’on peut voir en lui un échantillon suggestif des “nouvelles couches politiques” amenées au pouvoir par Gambetta, un spécimen de cette demi-bourgeoisie de mauvais notaires, de juifs, d’avoués louches, de boulevardiers crasseux et de négociants compromis, qui monte à la puissance sociale du fond de la vie de bourse et de caboulots43. »
25De la sorte, les tribunaliers participent à la désignation de nouvelles « cibles ». Ils contribuent à montrer qu’il existe bien des « déviants » nuisibles à la société dont il faut enrayer les agissements44.
26Les changements sociaux, toutefois, ne concernent pas que les groupes. Ils affectent aussi les individus, dont certains ne veulent plus rester enfermés dans des rôles qui leur étaient dévolus. Lorsque les vieux cadres de la société sont ébranlés, des individus, dans des domaines les plus variés, s’engouffrent dans les brèches : les uns ne connaissent plus aucun frein à leur « appétit sexuel », d’autres à leur désir de s’enrichir à tout prix, d’autres encore à leur tendance à régler par la violence des dissensions domestiques. À partir de la fin des années 1860, les alarmes se multiplient. La prolifération des récits fait entrer le fait divers dans la vie quotidienne, puisqu’ils peuvent partager la une avec l’actualité politique et sociale. Ainsi, on assiste bien à une prise de conscience. De multiples voix annoncent que la société marche d’un pas alerte vers le mieux-être, mais de nombreuses voix discordantes affirment que le progrès ne saurait être seulement matériel ; dessinant un avenir radieux, il doit aussi être « moral45 ». La dislocation des couples, les partenaires mal assortis, les choix individuels et le renoncement aux mariages arrangés font à leur tour peser une menace grandissante sur la société. Les exigences de liberté ne se règlent pas dans le seul cadre légal. Il est impuissant à prévenir les élans du cœur, les tourments de l’âme ou les affres de la jalousie. Le risque est ainsi ramené au cercle de la famille ou à celui plus étroit encore du couple. Il existe « cette divergence de goûts qui devait troubler votre intérieur et qui a été la cause première de l’affreux événement qui a plongé dans la désolation une des familles les plus honnêtes de Paris46 ».
27On voudrait pouvoir prévoir et prévenir. Le crime, même le plus abominable, doit être une source d’enseignement. Ainsi, en 1930, un chroniqueur judiciaire du Petit Journal semble s’interroger à voix haute :
« Si l’on pouvait selon la vieille formule, se mettre à la place des malfaiteurs – pour un instant ! – si l’on pouvait pénétrer le secret de leur acte, souvent inconnu d’eux-mêmes, il semble que l’on serait mieux armé pour y parer, pour essayer au moins de conseiller, ceux qu’on voit s’écarter du bon chemin, et pour les défendre contre eux-mêmes47. »
28Un autre écrit en 1933 :
« Crimes de toutes parts. La conscience publique s’effraie et s’indigne. Elle a, par la voix des jurés, le moyen de réprimer le mal, et de défendre la société contre de nouvelles attaques de la part des coupables. On voudrait mieux : qu’elle pût les prévenir…48. »
Conclusion
29La notion de risque s’avère tout à fait opératoire pour saisir les perceptions de la criminalité partagées par plusieurs millions de lecteurs. Les précédents développements ne sauraient être une présentation exhaustive de la notion de risque, mais ils illustrent, par l’exemple, sa pertinence. Cependant, les contemporains n’ont pas théorisé la criminalité comme risque, mais l’ont parfois présentée comme un mal nécessaire, d’autres fois comme un péril, une menace, un danger, voire un fléau social49. Cependant, si les mots n’existent pas toujours ou si les concepts ne sont pas encore élaborés, les informations données montrent que la criminalité fait appel à des notions comme la « régularité » et l’« aléatoire ». Certaines formes de déviances criminelles apparaissent aux yeux du public comme des manifestations rationnelles dont on peut comprendre les logiques. Pour prévenir le risque criminel, il importe, disent de nombreuses voix, de « moraliser » la société. Les chroniqueurs ne sont pas en reste. En effet, rendant compte de tel ou tel procès, un certain nombre d’entre eux insistent sur les ressorts sociaux. Les ambitions immodérées et les déclassements sociaux vers le bas constituent deux registres particuliers. Paul Bourget, préfaçant un recueil de chroniques, écrit même :
« J’y trouve l’extraordinaire figure de Mimaut, l’inventeur, un des plus curieux représentants, qui aient paru depuis des années, du déclassé scientifique. J’y trouve cet étrange Allmayer, ce type accompli du flibustier moderne50. »
30De la sorte, le risque criminel est d’abord « la mise en forme donnée à un problème51 ». Progressivement, à travers le discours des tribunaliers, c’est aussi une nouvelle économie de la responsabilité qui se met en place. Des années 1880 à la fin des années 1930, les lecteurs sont directement interpellés. Tout se passe comme si on assistait à une sorte d’individualisation de la responsabilité reposant sur chaque justiciable. La description de cloaques putrides et nauséabonds, celle de la fange dans laquelle se complaisaient les criminels au début du XIXe siècle ne sont plus de mise après les années 1880. Les milieux sociaux présentés dans les chroniques n’appartiennent plus aux bas-fonds, ne mettent plus en scène des êtres infâmes, mais plutôt de « petites gens », des employés, des artisans. Les chroniqueurs parlent désormais des bourgeois de province, des représentants du monde élégant des quartiers parisiens, des membres de professions libérales. Les comptes rendus de procès construisent progressivement, en multipliant les exemples concrets, le risque criminel. Ils donnent ainsi une traduction tangible des angoisses d’une société52.
Notes de bas de page
1 Pour prendre le seul exemple de la peine de mort, voir Baal, G. (novembre 2001). « Le débat de 1908 sur la peine de mort », Le Temps de l’histoire (RHEI), hors série no 1, p. 113-126 ; Berlière, J.-M. (2003). Le crime de Soleilland : les journalistes et l’assassin, Paris, Tallandier. Voir aussi Garnot, B. (dir.) (2007). Normes juridiques et pratiques judiciaires, du Moyen Âge à l’époque contemporaine, Dijon, EUD.
2 Voir, par exemple, Burton-Jeangros, C., C. Grosse et V. November (dir.) (2007). Face au risque, Genève, Georg éditeur, coll. « L’Équinoxe ».
3 Kalifa, D. (2001). La culture de masse en France, 1. 1860-1930, Paris, La Découverte ; Mollier, J.-Y. (2001). La lecture et ses publics à l’époque contemporaine. Essais d’histoire culturelle, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Le nœud gordien » ; Mollier, J.-Y. (1997). « La naissance de la culture médiatique à la Belle Époque », Études littéraires, vol. 30, no 1, p. 15-26.
4 Sur la notion de « risque collectif », voir en particulier Claude, G. (dir.) (2003). Risques collectifs et situations de crise. Apport de la recherche en sciences humaines et sociales, Paris, L’Harmattan, coll. « Risques collectifs et situations de crise ».
5 Loewel, P. (1929). Tableau du Palais, Paris, Gallimard, coll. « Les Documents bleus », p. 211.
6 Sur cette conception du risque, voir en particulier Douglas, M. (automne 1990). « Risk as a forensic resource. From “chance” to “danger” », Daedalus, vol. 119, no 4, p. 1-16. Sans doute aussi peut-on considérer l’ensemble des chroniques judicaires comme formant une institution ou du moins fonctionnant comme « des machines à penser », Douglas, M. (1999 [1986]). Comment pensent les institutions, Paris, La Découverte/MAUSS, p. 127.
7 Même si avant la Première Guerre mondiale les alarmes se multiplient. Voir en particulier Maxwell, J. (1909). Le crime et la société, Paris, Flammarion, p. 316-317.
8 Perrot, M. et P. Robert (dir.) (1989). Compte général de l’administration de la justice criminelle en France pendant l’année 1880, Genève-Paris, Slatkine Reprints, p. 17-18.
9 Charle, C. (2004). Le siècle de la presse (1830-1939), Paris, Seuil, coll. « L’Univers historique », p. 136.
10 Bazin, J. (2008). « Le bal des sauvages », dans J. Bazin, Des clous dans la Joconde. L’anthropologie autrement, Toulouse, Anarchis Éditions, p. 77.
11 Londres, G. (1940). Les grands procès de l’année 1939, Paris, Les Éditions de France, p. 9.
12 Bataille, A. (1887). Causes criminelles et mondaines de 1880, Paris, Dentu & Cie éditeurs, p. 165.
13 Talmeyr, M. (1890). Sur le banc, Paris, Genonceaux, p. 7.
14 Ces considérations sont très proches de celles relatives à l’îlotage policier. Voir à ce sujet Dreuilhe, A. (1996). « Les propositions de l’organisation policière », dans É.-F Callot (dir.), Villes et sécurité, Villeurbanne, Programme Rhône-Alpes Recherches en sciences humaines, p. 89-95 et Perroudon, D. (2003). « La police de proximité. De l’îlotage à la proximité, un siècle et demi d’histoire », dans J.-C. Froment, J.-J. Gleizal et M. Kaluszunski (dir.), Les États à l’épreuve de la sécurité, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, p. 286-290.
15 Claretie, G. (1910). Drames et comédies judiciaires, Paris, Berger-Levrault, p. 218.
16 Voir Bataille, A. (1888). Causes criminelles et mondaines de 1887, Paris, E. Dentu, p. 419-489. Voir aussi, sur la même affaire, Goron, M. (1897-1898). Les mémoires de M. Goron, Paris, Flammarion, t. 2, p. 5.
17 Voir notamment Beaubatie, Y. (dir.) (2004). Empreintes, Tulle, Mille Sources.
18 Andre, P. (1933). Pranzini, Paris, Éditions Émile-Paul frères, p. 43.
19 Bouchardon, P. (1934), Pranzini, Paris, Albin Michel.
20 Tarde, G. (1900 [1890]). La philosophie pénale, Lyon, A. Stock.
21 Voir par exemple le célèbre livre de Joly, H. (1889). La France criminelle, Paris, Léopold Cerf, p. 1-55.
22 Glajeux, B. (1893). Les passions criminelles. Leurs causes et leurs remèdes, Paris, Plon, p. 258.
23 Joly, H. (1889). Op. cit. et Joly, H. (1888). Le crime, étude sociale, Versailles, Cerf. Ces deux livres se retrouvent sous une forme allusive sous la plume de tribunaliers.
24 Voir Dallemagne, J. (1895). La volonté dans ses rapports avec la responsabilité pénale, Paris, Masson. Ce thème de la volonté se retrouve très fréquemment dans les comptes rendus de procès.
25 Talmeyr, M. (1896). Sur le banc, 3e série, Paris, Plon, p. XII.
26 Vonoven, H. (1925). La Belle Affaire, Paris, Gallimard, p. 17.
27 Voir en particulier, pour un état de la question, Bourquin, J. (juin 2007). « Pages d’histoire. La protection judiciaire des mineurs, XIXe-XXe siècles », RHEI hors série et Bourquin, J. (mai 1999). « Cent ans de répression des violences à enfants », Le temps de l’histoire (RHEI), no 2.
28 Lapalus, S. (2004). La mort du vieux. Une histoire du parricide au XIXe siècle, Paris, Tallandier.
29 Londres, G. (1937). Les grands procès de l’année 1936, Paris, Les Éditions de France, p. 254.
30 Bataille, A. (1893). Causes criminelles et mondaines de 1892, Paris, E. Dentu, p. 137-141.
31 Londres, G. (1928). Les grands procès de l’année 1927, Paris, Les Éditions de France, p. 81.
32 Bataille, A. (1895). Causes criminelles et mondaines de l’année 1894, Paris, E. Dentu, p. 253-260.
33 Talmeyr, M. (1890). Sur le banc, op. cit., p. 169.
34 Cohen, S. (1972). Folk Devils and Moral Panics, Londres, Mac Gibbon and Kee, p. 9. La notion de « panique morale » nécessite un effet de répétition mais aussi une controverse publique.
35 Rappelons que cette notion a été forgée, mais dans un autre contexte, par Merton, R.K., F. Adler et W.S. Laufer (dir.) (1995). The Legacy of Anomie Theory, Londres, Transaction Publishers.
36 Claretie, G. (1910). Op. cit., p. 156.
37 Séguin, J.-P. (1959). Nouvelles à sensation. Canards du XIXe siècle, Paris, Armand Colin, coll. « Kiosque ».
38 La complainte de la Grande Thérèse : « Ma grande Thérèse/On va vivre à l’aise/On a des millions/Et des picaillons… ».
39 Daumard, A. (dir.) (1973). Les fortunes françaises au XIXe siècle, Paris, La Haye, Mouton ; Braudel, F. et E. Labrousse (dir.) (1976-1979). Histoire économique et sociale de la France, Paris, Presses universitaires de France, tomes III et IV.
40 Labori, F. (1903). L’affaire Humbert, plaidoirie de Me Labori, Paris, LGDJ.
41 L’affaire a donné lieu à quelques travaux plus récents qui reprennent en général Chevalier-Maresque, A. (1903). Revue des grands procès contemporains. Signalons plus particulièrement parmi une production peu abondante : Guimard, P. (1956). « Thérèse Humbert », dans G. Guilleminault (dir.), Le roman vrai de la Troisième République : Prélude à la Belle Époque, Paris, Denoël, p. 292-328 ; Martin, B.F. (1984). The Hypocrisy of Justice in the Belle Epoque, Baton Rouge, Louisiana State University Press; Spurling, H. (2003). La grande Thérèse, Paris, Allia.
42 Talmeyr, M. (1890). Sur le banc, op. cit.
43 Bataille, A. (1884). Causes criminelles et mondaines de l’année 1883, Paris, E. Dentu, p. 286.
44 Goode, E. et N. Ben-Yehuda (2009). Moral panics: The Social construction of Deviance, Oxford, Blackwell.
45 Voir par exemple Fouillee, A. (1900). La France au point de vue moral, Paris, Félix Alcan.
46 Bataille, A. (1884). Causes criminelles et mondaines de l’année 1894, op. cit., p. 204.
47 Le Petit Journal, 3 et 4 juillet 1930.
48 Londres, G. (1934). Les Grands procès de l’année 1933, Paris, Les éditions de France, p. 75.
49 Les thèses de la défense sociale, comme celles de la réaction sociale ou encore celles que proposent certains courants de la criminologie, ne trouvent guère d’écho parmi les chroniqueurs judiciaires, qui se moquent aussi bien de Lombroso que de Freud.
50 Bourget, P. (1889). « Préface », dans A. Bataille, Causes criminelles et mondaines de 1888, Paris, E. Dentu, p. I-XII.
51 Gilbert, C. (2007). « Les risques : problèmes à gérer », dans A. Campana, E. Henry et J. Rowelle (dir.), La construction des problèmes publics en Europe, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, coll. « GSPE ».
52 Douglas, M. (1990). « Risk as a forensic resource. From “chance” to “danger” », loc. cit., p. 14.
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