Pour la modernisation de la police : projets de corps nationaux de sécurité dans l’Espagne de la fin de l’absolutisme
p. 191-215
Texte intégral
1L’Espagne du XVIIIe siècle fait ressortir deux réalités d’importance quant à la sécurité et l’ordre public. D’abord, le grand effort institutionnel appuyé par la monarchie dans le but de lutter contre les délits et de neutraliser la forte conflictualité sociale ; réalité qui, dans l’histoire espagnole, n’avait eu aucun précédent et n’en aurait par la suite plus jamais de semblable, et qui en fait la période la plus importante en ce qui concerne la création d’institutions et de corps de sécurité. La « bonne image » dont jouit habituellement le siècle des Lumières dans l’historiographie est ainsi remise en cause ; image qui exclut incontestablement les nombreux soulèvements, les conflits régnants1 et oublie qu’un État n’entreprend ni travail ni plan superflus et s’ingénie à maintenir « son ordre » face à tous ceux qui tentent de l’altérer ou de le corrompre. Ainsi, force nous est de reconnaître qu’une telle prolifération d’institutions de sécurité met l’accent sur l’existence de facteurs de déstabilisation négligés au moment de magnifier l’image historiographique du XVIIIe siècle.
2La seconde réalité à laquelle nous faisions allusion est que la création de telles institutions est due majoritairement à des initiatives gouvernementales, bien que les initiatives privées n’aient pas manqué, preuve de la diffusion de la vénalité au sein des forces armées2.
Le dispositif de sécurité espagnol du XVIIIe siècle
3Ce siècle se distingue par deux périodes où l’on enregistre un grand nombre de créations ou de réformes d’institutions de sécurité3, qui viennent s’ajouter à celles, en grande partie inefficaces, qui existaient déjà. La première période coïncide avec la guerre de Succession (1702-1713) et ses conséquences. Les institutions fondées durant ces années prétendent, d’une part, couvrir le vide imposé par la dissolution des corps de la Couronne d’Aragon – partisane de l’archiduc Charles – avec les décrets de Nueva Planta4 et occuper ces territoires avec des troupes fidèles aux Bourbons. De ce fait, ces unités et ces corps se sont initialement rapprochés des « armées d’occupation » de manière à contrôler la population et les régions hostiles, avant d’être chargés du maintien de l’ordre et de la sécurité. D’autre part, ils devaient prévenir une attaque anglaise en déployant une force susceptible d’entrer rapidement en action (réalité qui touche directement la Galice et l’Andalousie). Face à l’absence d’invasion anglaise, ces forces basculent progressivement vers le maintien de l’ordre public.
4La seconde période se développe surtout durant le règne de Charles III : c’est une étape, sans précédent, qui regorge d’initiatives variées.
5Il en résulte que, dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, nous trouvons une série d’unités pour garantir la sécurité publique réparties sur tout le territoire espagnol. Leur nom indique généralement leur nature (arquebusiers, gardes forestiers, fusiliers, etc.), leur situation géographique (de Rosas, de la Nouvelle-Castille, etc.). Elles se définissent comme des unités « fixes » (fijas) ou « détachées » (sueltas), sans qu’il n’y ait de critères clairs quant à l’emploi de l’un des deux termes, les secondes étant simplement plus itinérantes et mobiles. Dans certains cas il est difficile de rendre compte de leur véritable mission, dès lors qu’elles pouvaient éventuellement faire partie d’un régiment et que, de ce fait, la poursuite des malfaiteurs et des délinquants n’était pas leur fonction spécifique ou exclusive.
6Afin de mieux apprécier ce dispositif de sécurité, selon sa répartition territoriale, voici la distribution, non exhaustive, des principales unités5 :
Catalogne :
- Escadrons de fusiliers, Patrouilles de la police locale, Escadrons de Valls ou du Batlle de Valls (1713 ?, 1719 ? Pere Antón Veciana).
- Compagnie fixe de Rosas (1767, Ramón Castelló Vila).
- Patrouilles itinérantes extraordinaires de Catalogne ou Patrouilles itinérantes du Pirrot (1779, Isidro Sansó, Mariano Jou et Jacinto Puigmacia).
- Compagnie détachée et de Migueletes de Barcelone (1797).
Valence :
– Compagnie de fusiliers de Valence, réorganisés en 1774 (Miñones).
Aragon :
- Compagnie détachée de fusiliers d’Aragon (1766, Jerónimo de Torres).
- Compagnie fixe d’Aragon (créée en 1765).
Galice :
– Compagnies locales (1705, assimilées à une milice locale), réformées en 1743 : escadrons de 20 hommes, organisés en une division commandée par un capitaine.
Pays basque :
– Confréries.
Castille :
- Compagnie de fusiliers et gardes forestiers du Roi (1761).
- Compagnie détachée de la Nouvelle-Castille (Sièges Royaux, 1792).
- Compagnie détachée de la Vieille-Castille.
- Compagnies fixes de cavalerie de Castille (1719, pour remplacer les unités de Cavalerie royale ; après de nombreuses réformes, elles forment en 1766 le Régiment de cavalerie légère de volontaires d’Espagne).
Andalousie :
- Les Garde-côtes maintiennent leur présence.
- Compagnies de Milice urbaine.
- Elles furent toutes réorganisées en 1762 en 10 compagnies, qui s’appellent en 1780 Compagnies d’infanterie fixe de la côte de Grenade : contre les malfaiteurs et les attaques de piraterie.
- Fusiliers volontaires d’Andalousie (1776, deux compagnies dépendantes des audiences pour réprimer les vagabonds et les délinquants).
- Compagnie de fusiliers de Getares (1710).
Madrid :
- Surintendance générale de police (1782).
- Commission réservée (1790 ?).
7Par conséquent, en observant la trajectoire historique de ces corps et la composition de la mosaïque institutionnelle dont ils font partie et dont nous n’avons relevé que ce qui était d’importance, quels traits distinctifs ou quelles réalités pouvons-nous souligner ? Il convient de considérer que bon nombre de ces corps répondent à des circonstances particulières ; ils n’ont par conséquent ni grand futur ni grande signification. Effectivement, la majorité disparaît dès les premières décennies du XIXe siècle. Les patrouilles de la police locale catalane (mozos de escuadra)6 – créées à l’initiative de Pere Antón Veciana – sont la référence la plus importante et constituent, en grande partie, une sorte de modèle : nombreuses sont celles qui se constituent en les imitant et parfois à l’instigation des membres de la famille Veciana. Ce corps aspirait à poursuivre tous ceux qui altéraient l’ordre, tantôt il s’agissait d’austracistas (partisans de l’archiduc Charles lors de la guerre de Succession d’Espagne et défenseurs par la suite de ses droits), tantôt de malfaiteurs, de contrebandiers, ou de déserteurs, etc. Bien que généralement urbains puisque leurs casernements se trouvaient en ville, il n’en est pas moins vrai que leur action s’étendait en milieu rural. Quant à leur activité, il nous faut reconnaître qu’entre ces corps il n’existe ni concertation ni direction conjointe susceptible de planifier et de programmer leur travail dissuasif et répressif en un plan unifié et général. Il s’agit d’une réalité significative et, dans une certaine mesure, contradictoire à l’égard de la tendance générale que l’on observe dans l’administration espagnole de l’époque. En effet, alors que la centralisation est un objectif toujours présent dans l’esprit de ceux qui gouvernent, le secteur de la sécurité et de l’ordre public offre une large mosaïque de corps et d’unités sans connexion ni concertation professionnelle à même d’accroître leurs ressources et leurs champs d’activités.
8Mais en marge de ces considérations, on décèle des traits dans les corps les plus importants, durables et opérants, qui permettent de penser que le futur modèle du corps de sécurité espagnol est en train de s’ébaucher car on y décèle des caractéristiques que l’on retrouvera dans d’autres corps, comme par exemple le fait d’avoir leurs effectifs répartis sur de petites zones confiées à leur surveillance et protection. Cette caractéristique divisait le territoire en un lacis contrôlé par des détachements dont les membres connaissaient parfaitement la région, ainsi que le réseau de mouchards fourni par la population qui les informait des nouveaux délits probables ou de leurs possibles auteurs. De plus, leur insertion sociale au sein d’une population à laquelle ils offraient leurs services, qu’ils fréquentaient et connaissaient humainement et professionnellement, permettait un partage du quotidien.
9Toutes les prestations de services de ces corps, leur organisation et leur fonctionnement interne dépendaient à la fois des autorités civiles et militaires, et on leur accorda la jouissance du fuero (privilège) militaire.
10C’est sur ce modèle que s’instaurent très tôt, en Catalogne, les patrouilles de police locale et, à Valence, les Fusiliers : modèles qui vont servir de référence à la création d’autres corps similaires, à l’instar de la Compagnie de fusiliers et des gardes forestiers du Roi qui sont aussi placés sous la double dépendance des autorités civiles et militaires, connaissent une distribution en postes ou détachements à effectifs réduits (entre trois et cinq généralement), ainsi que la jouissance du fuero militaire.
11Nous trouverons plus tard dans la Garde civile ces mêmes caractéristiques d’organisation et d’action. Créé en 1844, ce sera le corps le plus représentatif du système de sécurité espagnol ; un corps militaire qui dépend sur le plan organique du ministère de la Guerre alors qu’il relève du ministère de l’Intérieur pour toutes les questions de service. Ses effectifs sont répartis en postes (généralement des détachements de quatre ou cinq hommes situés dans des villages ou bourgades délimitant un territoire qu’ils s’emploient à servir), reliés (organisations territoriales qui comprennent une ou plusieurs régions et les postes qui s’y situent), organisés en Légions (unités organiques qui embrassent plusieurs provinces ou régions historiques) en relation entre elles et qui possèdent une Inspection ou Direction générale unique, soit un organe supérieur coordonnateur des services sur la totalité du territoire national, centralisateur de toute l’information et centre de commandement pour l’ensemble des Légions. Dans cette configuration de la Garde civile (qui naît de la volonté de créer un corps de sécurité indubitablement national et unique), nous retrouvons en premier lieu le legs reçu du dispositif de sécurité fondé au XVIIIe siècle et également l’influence de la Gendarmerie française (institution qui sert de modèle au parti modéré, créateur de la Garde civile et fondateur d’un type d’État très attentif aux particularités de l’État français).
12Cependant, l’influence française dans la sécurité publique espagnole avait déjà un précédent. En ce sens, le programme de Joseph Ier, sur le trône d’Espagne durant la guerre d’Indépendance (1808-1814), est le plus abouti. La défaite française le laisse néanmoins sans suite et force est de considérer qu’il était loin de constituer une réalité7. Avant que ne se produise cette rupture franco-espagnole, un professionnel de la sécurité française, fort de ce titre, s’était installé en Espagne et avait présenté son plan de la Maréchaussée. C’est le premier des projets retenus pour notre étude. Le second est présenté aux Cortès en 1820, durant le Triennat libéral (18201823). Son auteur en est le ministre de la Guerre espagnol. Il n’aboutira pas non plus. Ainsi, ces deux projets ont de nombreux points en commun : la volonté d’instaurer une institution nationale – et non pas à caractère provincial ou régional – ; l’appartenance des auteurs au même groupe d’individus qui élaborent des plans en vue de la sécurité et de l’ordre public ; enfin, ces deux projets, à l’instar de tant d’autres, restent sur le papier. Nous ne pouvons éviter de les considérer, ce qui explique le titre de notre étude, comme des exemples de la volonté qui s’impose en Espagne de remplacer la mosaïque d’institutions plus ou moins régionales par une seule institution nationale présente dans tout le territoire du pays.
Les projets et leurs auteurs
13Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle et les premières décennies du XIXe siècle, une avalanche de projets de toute nature8 déferle sur les différentes Secrétaireries du Gouvernement espagnol, et en particulier sur la Première Secrétairerie d’État. Les auteurs proviennent d’horizons professionnels très variés, bien qu’ils aient tous un certain niveau culturel – assurément élevé. En effet, ils savent écrire, en des temps où il est déjà exceptionnel de savoir lire, et leurs écrits témoignent d’une formation et d’une instruction d’autant plus remarquables que le niveau d’alphabétisation de la population espagnole n’était pas élevé.
14Leurs projets présentent des thèmes et des sujets infiniment variés : scientifiques, économiques, littéraires, éducatifs, institutionnels… parfois tout bonnement extravagants à l’instar de la démonstration de la quadrature du cercle. Parmi tous ces projets, il ne pouvait manquer ni ceux destinés à améliorer l’armée ni ceux qui se proposaient de perfectionner le dispositif de sécurité.
15Pour ce qui est des auteurs, nous pouvons les classer en trois groupes :
- Le premier est constitué de simples aficionados, c’est-à-dire, d’individus qui n’ont eu aucune relation avec le secteur de la sécurité et de l’ordre public ni avec aucun secteur de l’administration (nous y trouvons des ecclésiastiques séculiers ou réguliers qui offrent des plans pour améliorer l’armée) ; ces projets reprennent tantôt ce qui existe déjà avec de légères modifications (raison accessoire pour qu’aucun de ces plans ne soit mis en pratique), ou offrent tantôt des propositions foncièrement irréalisables ou utopiques (comme la construction d’une ville qui enfermerait tous les délinquants que l’on nourrirait à travers les murailles) ;
- Le deuxième groupe, bien plus minoritaire, est composé de professionnels, soit rattachés à certains secteurs de l’administration, soit en faisant partie, soit encore exerçant une profession les mettant en contact avec elle. Les projets qu’ils présentent sont plus réalistes, indépendamment des possibilités d’application – finalement avortées. Leurs auteurs font montre de connaissances précises dans le secteur concerné ;
- Le troisième groupe, encore plus restreint, est formé par ceux qui proposent un projet en relation avec la sécurité et l’ordre public, un secteur de l’administration qu’ils connaissent parfaitement puisqu’ils en font partie.
16Chaque groupe justifie sa démarche de manière différente. Le premier groupe met surtout l’accent sur l’intérêt patriotique, le but étant de contribuer de manière désintéressée à la plus grande gloire de la monarchie. Cet aveu fait ressortir, plus ou moins ouvertement, une certaine « vanité » qui se manifeste par la volonté de prouver à chacun sa valeur intellectuelle et ses qualités professionnelles. Ce patriotisme est clairement perceptible dans les plans présentés entre 1808 et 1814 qui sont décrits comme une panacée pour gagner la guerre contre l’armée de Napoléon. À notre connaissance, aucun ne donna lieu ni à une réalisation ni même à une proposition.
17Pour ce qui est du deuxième groupe, il est intéressant de voir qu’au fond les individus qui le composent sont poussés par la volonté d’améliorer leur situation économique, voire professionnelle, en rattachant leur futur à la réalisation pratique du projet qu’ils présentent, ce qu’ils déclarent ouvertement, sans aucune discrétion. Dans certains cas, une partie du plan stipule que l’un des postes est réservé à son créateur, dans d’autres, le mentor omet des détails qu’il promet de révéler si le travail lui est confié. Assurément, la réalisation de ces projets aurait amélioré le destin de leurs auteurs. Cependant, à notre connaissance, aucun de ces plans ne s’est concrétisé.
18Les quelques individus qui composent le troisième groupe ont les mêmes objectifs que ceux du groupe antérieur. Nous le verrons clairement avec le premier des projets que nous allons analyser. Il en va tout autrement pour ce qui est du second. En effet, son auteur, ministre de la Guerre, se trouve déjà au sommet politique et est un professionnel des armées. Voilà pourquoi son attitude ne révèle nullement de l’ambition mais plutôt le désir d’améliorer la situation espagnole dans le secteur de la sécurité.
Le projet d’une Maréchaussée pour l’Espagne
19Le nom de son auteur nous est inconnu mais, et c’est ainsi qu’il se présente au comte d’Aranda, ambassadeur d’Espagne à Paris, dans une lettre qu’il lui adresse le 21 mai 1781, nous savons qu’il était commandant de la Maréchaussée en Avignon et dans le comté Venaissin. Dans l’espoir de raviver la mémoire du comte espagnol, dans sa lettre, il explique qu’il fut l’un des officiers qui ont accompagné le comte de Bussy dans son voyage en Espagne et qu’il resta à Madrid lorsque le séjour du comte français prit fin. Ce fut pour lui l’occasion de se lier d’amitié avec le colonel du Régiment de Soria, D. José de Rojas. Dans sa lettre, le commandant déclarait d’entrée son intention et sollicitait d’Aranda son autorisation pour présenter le plan qu’il avait élaboré dans le but d’implanter la Maréchaussée en Espagne. Il souhaitait avoir son opinion et savoir si son projet était susceptible d’être accepté ; dans l’affirmative, il requérait appui et protection. Ne souhaitant pas rester sans réponse, le commandant fit remarquer qu’il attendrait que le comte lui fasse signe pour remettre sa lettre en mains propres et qu’il repasserait ultérieurement pour connaître sa décision9.
20La lettre suivante nous invite à penser que le commandant dut s’entretenir avec Aranda et lui remettre son projet. Cependant, la réponse de l’ambassadeur se fit attendre et le commandant décida de la provoquer. Il dépêcha une nouvelle lettre, le 7 juillet de la même année, et y joignit un envoi différent : il l’honorait de la traduction de deux églogues de Garcilaso (« Daignez, Monseigneur, accepter une traduction manuscrite de deux églogues de Garcilaso de la Vega que j’ai l’honneur de joindre ici »). Il justifiait ensuite sa demande de protection en alléguant que, nemo propheta in patria, et ne doutait pas que, si son projet aboutissait, il y occuperait un poste de choix, ou bien dans une compagnie du Régiment des volontaires à cheval. Il s’engageait aussi, si ses idées étaient acceptées, à collaborer utilement et efficacement à la mise en place du projet.
21Par ailleurs, il sembla utile au commandant de « renforcer » son plan, c’est-à-dire d’apporter des éclaircissements et des précisions au projet qui était déjà entre les mains d’Aranda. C’est pourquoi il joignit à sa lettre un document commençant par une longue épigraphe : « Observations pour servir de suite à mon plan présenté à son Excellence Monseigneur le comte d’Aranda, Ambassadeur de sa majesté Catholique à la Cour de France. Portant pour titre Projet d’établissement d’un Corps de Maréchaussée en Espagne. » Le silence de l’Espagnol avait dû inquiéter le commandant français et le faire douter de l’excellence de son plan. Effectivement, ses « observations » étaient suivies d’un nouveau plan, très différent de l’antérieur, bien que d’une certaine manière il le complétât : il proposait le Projet d’un établissement très utile pour la ville de Madrid, qui consistait à créer un corps de sapeurs-pompiers chargé de combattre les incendies de la capitale espagnole. En théorie, la mise en place de ce projet pouvait être avantageuse. En effet, de par l’abondance de bois dans les immeubles madrilènes, les incendies étaient aussi fréquents que redoutés d’autant que Madrid manquait, dans ces années-là, d’un corps spécial pour lutter contre ce fléau qui, lorsqu’il se produisait, obligeait le voisinage, les troupes et les agents des diverses institutions de la ville à intervenir.
22Pour que son plan aboutît, le commandant français se montra dans ce nouvel envoi bien plus explicite quant aux avantages que rapporteraient ses projets. Pour ce qui était de la Maréchaussée, il précisait ses objectifs fondamentaux, son mode de financement et lui assignait comme principale mission de « maintenir le bon ordre, de se porter tout de suite aux endroits où il arrive des accidents […] [et] d’entretenir la sûreté sur les routes » et ajoutait dans le même paragraphe : « Donc tout le monde jouissant du travail des Maréchaussées, doit par conséquent concourir à l’établissement d’un Corps si utile et contribuer à son entretien. » Il précisait également le nombre de soldats qui seraient nécessaires : près de 200 dans le voisinage de Madrid et 600 autres pour couvrir les principales routes, outre les troupes légères de cavalerie qui collaboreraient avec eux.
23Dans ses écrits, le commandant faisait appel à ses souvenirs et évoquait des situations et des faits vécus ou observés durant son séjour à la cour d’Espagne. Il y soulignait les faiblesses susceptibles d’être corrigées si l’on mettait en place les institutions qu’il proposait. Il attirait l’attention sur les avantages de ces institutions de manière à faire ressortir l’excellence de ses propositions. Il soulignait le fait que, pour l’Espagne, ces institutions représentaient une « nouveauté » dont les autorités et le pays ne tarderaient pas à reconnaître les avantages liés à leur installation et à leur fonctionnement. De manière récurrente, il faisait appel à un raisonnement basique pour asseoir son plan : si la Maréchaussée a donné et continue à donner de bons résultats en France et dans les pays qui possèdent une institution similaire, il en sera de même pour l’Espagne. Partant de là, il n’était pas nécessaire de conclure de manière explicite que sa prompte mise en place était indispensable.
24La piste du commandant français se perd avec l’envoi de sa seconde lettre et des documents annexes. Nous n’avons nulle autre trace de sa personne ni de ses plans. Tout semble indiquer qu’Aranda se limita à envoyer les écrits de l’officier français à Madrid et que ceux-ci furent archivés comme tant d’autres qui arrivaient à la Première Secrétairerie d’État. En vérité, ils ne méritaient pas meilleur sort : eu égard à l’ambition du projet, ces écrits n’offraient que généralités, peu de précisions et étaient en totale discordance avec la politique officielle de la sécurité et de l’ordre public en Espagne.
25On ne peut donc s’étonner du rejet du projet, une fois analysé par les experts du ministère espagnol. En effet, il passait sous silence des questions de première importance, comme celle du budget (ne faisant que confusément référence à des coûts liés à l’incorporation des effectifs des autres unités, destinés aux nouvelles créations et à un financement spécial émanant des civils) et laissait dans l’ombre la question de savoir s’il fallait prévoir une nouvelle ligne budgétaire pour cette création. L’auteur n’aborde jamais clairement ce sujet fondamental que l’on doit prendre en compte dès que l’on envisage la création d’une nouvelle institution.
26D’autres sujets restaient sans réponse et obligeaient à faire des suppositions ou des comparaisons. Par exemple, quelle idée se faire du régime interne qui n’y était pas décrit ? Le corps que l’on prétendait implanter en Espagne n’étant qu’une imitation de celui, de caractère militaire, qui existait déjà en France, aurait-on maintenu cette particularité dans la Péninsule ? La solde n’étant nullement évoquée, égalerait-elle celle de leurs homologues de l’armée ? Le projet n’offrant aucune description de l’escouade, fallait-il penser à leurs homologues de l’armée régulière pour pouvoir s’en faire une idée ?
27En fin de compte, nous décelons beaucoup de volontarisme et peu de réalisme dans les projets présentés à Aranda. Indépendamment des autres raisons, celles-ci peuvent parfaitement expliquer que ces projets n’aient pas connu de suite et que, dans le meilleur des cas, Madrid leur ait accordé un regard négligent et sceptique. Quelles raisons pouvait avoir le commandant français pour ne pas traiter ces questions ? Nous l’ignorons. Cependant nous ne pouvons l’attribuer à un manque de connaissances profondes : le commandant était en effet un professionnel de haut niveau, qui connaissait parfaitement le secteur et le corps dans lequel il servait. Cette réalité nous autorise à penser que, de son avis, les questions omises devaient être régies par les Ordonnances générales des armées et les procédures habituelles. Mais peut-être souhaitait-il aussi éviter ces détails pour que son plan ne fût pas « copié » et mis en pratique par quelqu’un qui l’aurait évincé et exclu sans gratification. Car enfin il semblerait qu’il ne fît ressortir les excellences et les bons résultats prévisibles que dans le but de faire aboutir son projet et d’y être engagé, voire associé de manière directe, pour pouvoir développer les points qu’il omettait dans sa présentation à Aranda. Mais rien de tout cela n’eut lieu. Le projet fut écarté et archivé10.
Projet d’une « Legión de Salvaguardias Nacionales »
28L’auteur, D. Pedro Agustín Girón, marquis de Las Amarillas et premier duc de Ahumada, est le père du fondateur de la Garde civile. Né en 1778, il participe à la guerre des Pyrénées (1793-1795) et poursuit, à partir de cette date, sa carrière militaire : en 1810 il défend El Ferrol contre les Anglais et participe à la guerre des Oranges contre le Portugal ; il fait partie de la garnison de Cadix jusqu’en 1807 où il est à la tête d’un régiment de grenadiers provinciaux ; il retourne au Portugal avec les contingents qui accompagnent l’armée française pour envahir le royaume voisin. Il se distingue particulièrement durant la guerre d’Indépendance (1808-1814) contre les armées de Napoléon. Cependant, lorsque la guerre se termine et la menace du Premier Empire disparaît, le marquis se sent exclu en raison de son idéologie libérale. Une idéologie qui l’élève au ministère de la Guerre lorsqu’en 1820 le pronunciamiento militaire organisé par Riego à Las Cabezas de San Juan (Cadix) triomphe et que commence la période du Triennat libéral ou constitutionnel (1820-1823)11.
29Amarillas fut nommé ministre de la Guerre en mars 1820 et, le 30 juillet de cette même année, il présentait aux Cortès un projet de décret par lequel il proposait la création d’un corps spécial destiné à la défense de l’ordre et de la sécurité publique12. Dans son rapport, le marquis faisait l’historique de ce secteur en Espagne, analysait sa situation actuelle et concluait que « sa » Légion devait se composer d’environ 5 230 hommes (un pour 2 200 habitants et pour trois lieues carrées). De tels effectifs s’organisaient en 63 compagnies d’infanterie et 16 de cavalerie. Ces unités se divisaient en 12 territoires, chacune sous l’autorité de 4 sous-inspecteurs. Le chef de la Légion serait un général, titulaire de l’Inspection générale qui dirigerait l’institution.
30Pour ce qui est des Chefs et des Officiers, tous à cheval, leur nombre et leur salaire étaient les suivants :
Grade ou classe | Nombre d’individus | Solde annuel (en réaux) selon sa catégorie |
Inspecteur général | 1 | celui de sa classe de l’armée |
Sous-inspecteur | 4 | 40 000 |
Lieutenant-colonel | 5 | 24 000 |
Commandant | 8 | 18 000 |
Capitaine | 53 | 14 400 |
Lieutenant | 69 | 7 200 |
Sous-lieutenant | 66 | 6 000 |
31Les autres postes se composaient de 1 024 hommes de cavalerie et de 4 000 d’infanterie qui percevaient par classe les soldes annuelles suivantes (en réaux) :
Sergent 1er d’infanterie | 300 |
Sergent 1er de cavalerie | 390 |
Sergent 2e d’infanterie | 270 |
Sergent 2e de cavalerie | 360 |
Caporal 1er d’infanterie | 240 |
Caporal 1er de cavalerie | 330 |
Caporal 2e d’infanterie | 210 |
Caporal 2e de cavalerie | 300 |
Sauvegarde de 1re classe | 180 |
Sauvegarde de 1re classe à cheval | 270 |
Sauvegarde | 150 |
Sauvegarde à cheval | 240 |
32Il fallait ajouter à ces dépenses 60 000 réaux pour couvrir les frais de bureau et autre matériel assimilé. Le budget total était évalué à 19 291 955 réaux annuels, et l’auteur prévoyait des moyens particuliers pour la collecte de fonds.
33Selon le ministre de la Guerre, la Légion se répartirait dans les différentes Capitaineries générales, en disposant ses effectifs en fonction de la superficie, de la population et de leurs nécessités. Les postes seraient pourvus par des soldats nés dans le district où ils allaient servir et après avoir obtenu un certificat de bonne conduite à l’issue de leur service militaire. En cas de nécessité, on ferait appel à des soldats de milices qui auraient accompli plus de quatre ans de service sans blâme. Le remplacement des officiers serait assuré par des sous-lieutenants de l’armée qui auraient trois ans de service et de bonnes aptitudes. La promotion dans l’échelle hiérarchique serait régie par les Ordonnances de l’armée ainsi que par le régime disciplinaire. Une double dépendance était établie : l’une par rapport à l’autorité civile pour les questions de service et l’autre militaire pour l’organisation, le remplacement et l’inspection.
34Le succès du projet impliquait bien plus que la simple surveillance, prévention et répression des délits : il s’agissait de la réforme des lois. En effet, Amarillas se plaignait du mauvais système pénal qui permettait d’éviter les châtiments, facilitait les fugues des prisons et cellules, et rendait ainsi les délinquants aux champs et aux routes en les laissant perpétrer de nouveaux méfaits.
35À en juger par la conjoncture du moment, la Légion s’imposait comme une nécessité éclatante, ce que Martinez de la Rosa exprima lorsqu’il présenta la proposition suivante :
« Il est urgent de mettre en place tous les moyens nécessaires pour réprimer et châtier le nombre excessif de voleurs qui opèrent, soit sur les chemins, soit dans les agglomérations, et empêcher ainsi que des individus malveillants utilisent ce prétexte pour calomnier le régime constitutionnel. Je demande un jour pour ouvrir une discussion sur ce point important ; les Secrétaires du Cabinet que l’on jugera opportuns seront tenus d’être présents, le but étant de voir si le Gouvernement est en mesure de contenir un tel désordre, ou si la coopération des Cortès est nécessaire. »
36Pour appuyer sa proposition, le député andalou insistait sur l’urgence de rétablir l’ordre et la sécurité, afin de ruiner les arguments que les ennemis du régime constitutionnel avançaient :
« La nature de cette affaire est telle qu’elle consterne l’ensemble des provinces. […] Il s’agit d’une calamité qui s’abat sur ce que la société a de plus sacré, comme la propriété et la vie.
Les ennemis du régime constitutionnel se prévalent de ce désordre pour affirmer que le nombre excessif de voleurs est le résultat de ce système, parce qu’il ne permet pas de les poursuivre13. »
37Mais ce ne fut pas le seul député qui soulevât le problème. Deux jours plus tard, alors qu’était lue pour la seconde fois cette proposition, le secrétaire lut celle que Priego avait présentée :
« Compte tenu que la sécurité individuelle des citoyens se trouve fréquemment attaquée par des hordes de voleurs et de brigands qui infestent les chemins du Royaume, et que leur audace a réussi en de nombreux lieux à imposer des contributions aux propriétaires de champs et de maisons de campagne, ou, à les incendier si ceux-ci offraient une résistance au paiement ; étant donné qu’il est impossible que les troupes de l’armée nationale couvrent tous les points, que les administrations municipales et les maires doivent s’occuper de la sécurité des personnes et des biens des citoyens, conformément à l’art. 321 de la Constitution ; dans l’intention d’éviter la négligence et le laisser-aller que l’on observe dans l’application de cet article, je demande à ce que les Cortès déterminent et fixent la responsabilité des maires et des administrations municipales constitutionnelles à l’égard des vols commis dans le district de leur respective juridiction. »
38Martínez de la Rosa prit immédiatement la parole et, dans une longue allocution, il résumait les causes de cette situation et définissait les facteurs d’alarme sociale :
« Ne nous laissons pas tromper : les causes du nombre excessif de voleurs, en faisant abstraction des troubles de la révolution, sont bien connues de tous, bien trop pleurées par les Espagnols : la pauvreté, le manque d’intérêt pour le travail, la mauvaise répartition des propriétés, les difficultés qui accablent toutes les professions, notre terrible système fiscal, les rentes stagnantes, l’incommunicabilité entre les différentes provinces et les villages voisins, le dépeuplement du Royaume, le mauvais état de nos prisons, le manque de moralité publique qui entraîne toujours un régime arbitraire, n’y a-t-il pas là suffisamment de causes pour expliquer l’origine de cet ancien fléau qui s’abat sur notre Nation ? Et cela ne doit-il pas nous causer un double sentiment d’indignation et d’humiliation ? »
39Très rapidement le débat se complique. Les secrétaires du Gouvernement de la Péninsule, celui de la Guerre ainsi que divers députés qui participent au débat vont vite révéler de nouveaux éléments ainsi mis sur le tapis : la responsabilité des juges dans la prompte administration de justice, la présence de contrebandiers, la compétence des chefs politiques et des capitaines généraux dans le maintien de l’ordre, les causes morales qui peuvent influencer la situation14…
40Toutes ces questions dessinent une mer tourmentée dans laquelle le projet du marquis de Las Amarillas va faire naufrage. L’intervention du député Istúriz peut être considérée comme son arrêt de mort :
« Mon opinion étant que le projet présenté par le Secrétaire de la Guerre, prévoyant la formation d’une nouvelle force jusqu’alors inconnue dans l’intention de poursuivre les malfaiteurs, est une mesure qui porte atteinte à la liberté et désorganise la Milice Nationale ; j’invite personnellement le Secrétaire à retirer son projet, en étant persuadé qu’il a œuvré droitement mais sans en calculer les conséquences politiques : si S. S. n’en est pas d’accord, je demande aux Cortès de ne pas le prendre en considération, ou si elles le font que ce soit pour en délibérer, après avoir établi et consolidé par des lois adéquates :
Premièrement : les Milices nationales
Deuxièmement : l’administration de la justice criminelle par l’intermédiaire des jurés et des juges de facto.
Troisièmement : la liberté d’imprimer.
Car selon moi, ce sont les principales garanties de la liberté civile qui, s’il en était autrement, serait menacée par cette nouvelle institution, suivie de près, comme une conséquence nécessaire, par celle de l’abominable inquisition que l’on appelle police15. »
41L’évocation de la Milice nationale fut déterminante dans le débat car cette force constituait une des références emblématiques du libéralisme. Aussi, comme l’avait sollicité Istúriz, les Cortès s’occupèrent non seulement d’établir et de consolider la Milice nationale, mais encore d’une autre série de questions qui firent que le débat sur la Legión de Salvaguardias Nacionales ne parvint pas à s’imposer. Néanmoins, le jour même de l’intervention de Istúriz, le président de séance, Espiga, anticipant un peu les paroles du député, avait indiqué que « la commission de Guerre et celle concernant la Législation devaient examiner sans délai le plan présenté par le Secrétaire du Ministère de la Guerre, et que l’on en présentât le rapport en toute hâte aux Cortès16 ».
42Après l’intervention d’Istúriz, le débat dériva vers le légalisme qu’il fallait observer lors de l’arrestation des délinquants, car comme le soulignait le député Salanot : « Il s’agit d’exterminer les voleurs et les malfaiteurs, de réfléchir aux moyens d’y parvenir, car enfin les moyens aujourd’hui établis n’arrivent pas à ce résultat. » Une commission spéciale fut donc créée dans l’intention d’élaborer un projet de loi « sur l’extermination des voleurs ». Ses membres en étaient les députés Calatrava, Caro, Manescau, O’Daly, Hinojosa, Martínez de la Rosa, Ramirez Cid. Cañedo et Golfin17. Cependant, le même jour, la commission des Milices nationales recevait un projet de décret « sur la formation d’une Milice Nationale ».
43C’est ainsi que le projet sur la Legión de Salvaguardias Nacionales fut remis à plus tard et totalement éclipsé par celui de lutte contre les voleurs et de la mise en place d’une Milice nationale. En effet, dans les mois suivants les thèmes « vedettes » du Parlement espagnol, outre les deux récemment évoqués, furent l’abolition des majorats et l’inaliénabilité des biens, les réformes du clergé régulier et la desamortización, les « délits atroces » commis par les ecclésiastiques et les problèmes de compétence qu’ils entraînaient, la reconnaissance du soulèvement de l’armée à Cadix qui avait favorisé le retour du libéralisme, le budget de l’État, parmi d’autres questions et problèmes mineurs ; les discussions étaient récurrentes, abandonnées ou reprises à différents moments pour arriver à l’approbation de l’articulation des décrets relatifs aux problèmes retenus.
44Ce fut un retard funeste pour le projet du marquis de Las Amarillas. En effet, il ne resta que peu de temps au ministère car il fut relevé de ses fonctions et nommé directeur général du Corps des ingénieurs. Il y demeura jusqu’en 1823. À cette date, grâce à l’intervention de l’armée française surnommée Los Cien Mil Hijos de San Luis, la scène politique devait changer. Le général Girón abandonna alors la vie politique et se retira jusqu’en 1830. Les événements français et le tournant que prenait la situation interne espagnole, penchant alors vers des positions plus ouvertes, lui furent favorables : il fut désigné Capitaine général de Grenade et, peu de temps après, de Séville. Sa carrière reprit une dimension politique au cours de la législature de 1834, avec la présidence de l’Estamento de Próceres (membres de la Chambre Haute), alors que la première guerre carliste s’était déjà manifestée dans toute sa rudesse. Ses mérites d’alors lui valurent la distinction honorifique de duc de Ahumada, son titre le plus élevé. En 1835 il fut renommé – toujours pour une courte période – ministre de la Guerre. Il allait mourir peu de temps après.
45Force est de constater que l’auteur du projet sur la Legión de Salvaguardias Nacionales ne reprit à aucun moment son plan et qu’il ne chercha plus jamais à s’y atteler. En ce sens, il n’eut pas plus de chance que bien d’autres, présentés au Gouvernement. Cependant, le marquis de Las Amarillas goûta à la satisfaction de ne pas savoir son projet oublié au fond d’un tiroir et, bien que déçu, il connut un certain écho parlementaire. Par ailleurs, nous savons que son contenu correspondait à une proposition réfléchie, où tous les points avaient été pris en considération : les effectifs et leur composition, la distribution géographique, l’échelle hiérarchique, la dépendance, le financement, etc. Même les facteurs « externes », desquels dépendaient son organisation et sa mise en route, avaient été étudiés, comme par exemple l’extension territoriale des régions militaires où il fallait opérer ainsi que le nombre d’habitants ; le but étant d’apprécier la distribution d’effectifs optimale. En dépit de cela, son idée ne rencontra pas de succès.
46Les projets abordés dans ces pages constituent des propositions « discordantes » vis-à-vis du panorama qui prédominait en Espagne pour ce qui est du maintien de la sécurité et de l’ordre public. Il s’agissait de créer une institution « nationale » en dépassant la « fragmentation » des divers corps qui dominaient le pays. Il existait assurément entre ces projets de grandes différences quant à leur présentation matérielle : le premier, celui du commandant français, était tout bonnement superficiel alors que le second constituait un projet plutôt complet. Dans le premier cas nous sommes face à une première ébauche du sujet, face à une proposition « informelle » faite à un ambassadeur, alors que dans le second, nous avons affaire à une proposition ministérielle dont la viabilité était à la merci des circonstances qui l’entourèrent et qui eurent raison d’elle.
Annexe
ANNEXES. Plan d’un Corps de Maréchaussée à établir en Espagne18
Si la Maréchaussée a été trouvée nécessaire dans plusieurs états, combien ne doit-elle pas être utile en Espagne ; où il est aisé de prouver qu’elle y apporterait de très grands avantages.
1° La sûreté des routes ; est-il rien de plus intéressant que de protéger le commerce dans un état et de mettre à couvert les biens et même la vie des habitants, en faisant régner la tranquillité sur les routes et ayant dans les villes des gens préposés pour entretenir le bon ordre et remédier promptement aux vols et autres excès qui peuvent se commettre. Cela est si vrai et l’on a si bien senti cette nécessité en France, que l’on vient de faire une augmentation de deux cent brigades, dans ce corps pour qu’elles fussent plus rapprochées et par conséquent plus en état de se prêter des secours mutuels ; par le moyen de l’action continuelle de la Maréchaussée et par la correspondance des brigades, le prévôt général d’une province est instruit de tout ce qui se passe dans les villes ou villages de son département toutes les semaines et en envoie un état au Grand Prévôt Général tous les mois, qui se présente au ministre, qui par ce moyen est instruit généralement de tout ce qui se passe dans le Royaume et bien plutôt, si le cas ou les circonstances l’exigeaient.
Je prouve par l’attention que divers Royaumes et états ont eu de créer une Maréchaussée et de l’augmenter, combien elle doit être utile et nécessaire, je prouve de plus qu’en Espagne elle serait d’une plus grande utilité et bien plus essentielle.
Pour porter les ordres de Sa Majesté à l’armée, aux places frontières, dans les différents ports de mer, ou souvent et même toujours la célérité est très nécessaire, je dis que nul courrier extraordinaire ne peut porter ces mêmes ordres avec la vitesse de la Maréchaussée la raison est toute simple et prouvée par l’opération que voici.
Le ministre remet un paquet à l’officier de Maréchaussée suivant la cour, ce dernier le remet au cavalier d’ordonnance que est toujours botté et dont le cheval est sellé en luy recommandant la célérité selon l’exigence des cas, ce cavalier part et arrive à l’autre porte, remet son paquet au cavalier d’ordonnance qui part et ainsi de suite jusques à la destination du paquet.
Les ordres par ce moyen arrivent avec plus de célérité et de sûreté que par un courrier et d’ailleurs cette opération ne dénote rien dans les villes ou villages où le cavalier passe, attendu qu’on est accoutumé à les voir rouler sur les routes et les chemins de tournées, par conséquent on ne calcule rien, on ne conjecture rien, je parle et fais cette observation pour les cas urgents et extraordinaires qui peuvent arriver dans les provinces éloignées et dans les occasions où la Cour veut faire arrêter un fugitif ou un banqueroutier, cette voie devient la plus sûre et la plus brève.
Ce Corps serait réglé selon les ordonnances relatives au Royaume d’Espagne et serait très utile et nécessaire et produirait les meilleurs effets.
Le Corps de la maréchaussée dont je propose l’établissement procurerait beaucoup de retraites pour la cavalerie et l’infanterie par le nombre d’officiers, bas officiers et soldats que seraient employés dans ce corps.
En temps de guerre on détacherait cent hommes pris dans différentes brigades, le corps serait commandé par un prévôt général de l’armée pour mettre et entretenir la police et le bon ordre au champ et empêcher les vols, la désertion et les autres excès auxquels les soldats peuvent se porter.
Par tout ce que j’ai dit, il doit paraître très clairement qu’il n’est aucun pays où l’établissement d’un corps de maréchaussée produisit des meilleurs effets qu’en Espagne.
J’ay le Plan pour la formation et toutes les ordonnances qui y sont relatives.
Observations pour servir de suite à mon plan présenté à son Excellence Monseigneur le Comte d’Aranda ambassadeur de Sa Majesté Catholique à la Cour de France. Portant pour titre « Projet d’établissement d’un Corps de Maréchaussée en Espagne »
Je l’ai dit dans mon mémoire et je vais le répéter pour entrer en matière.
La Maréchaussée est dans les états une troupe utile et nécessaire, mais il en est où elle serait d’une nécessité absolue et indispensable c’est ce que je vais démontrer.
L’objet et le soin principal des Maréchaussée est
1° de maintenir le bon ordre, se porter de suite aux endroits où il arrive des accidents.
2° d’entretenir la sûreté par les routes ; dont tout le monde jouissant du travail des Maréchaussées, doit par conséquent concourir à l’établissement d’un corps si utile et contribuer à son entretien.
Je dis qu’il est des pais où la Maréchaussée est d’une nécessité absolue et indispensable.
En Espagne la Maréchaussée produirait les meilleurs effets. 1° en ce qu’elle maintiendrait le bon ordre et la police, remédierait aux abus qui se glissent et aux accidents qui arrivent journellement dans les villes. 2° en ce qu’elle assurerait les routes et qu’on verrait alors nombre de voyageurs qui outre l’incommodité des auberges et des routes, craignent encore aujourd’hui pour leur fortune et même pour leurs vies.
Cette sûreté procurant des voyageurs il serait nécessaire et même indispensable d’établir des bonnes hostelleries, avantage qui engagerait à voyager en Espagne ; de là suivrait la restauration des chemins, article très utile et alors ce Royaume que les voyageurs curieux fuient aujourd’hui, serait pour eux un objet de curiosité et leur procurerait ainsi qu’aux gens du pays des connaissances souvent très utiles pour l’histoire.
Lorsqu’on voyage soit pour s’instruire, soit pour ses affaires, il est très agréable de rencontrer des beaux chemins, sûretés, des bons gîtes et c’est précisément ce qui manque à l’Espagne ; cette facilité de voyager procurerait des établissements de voitures publiques fixes ce qui serait très nécessaires dans ce Royaume pour la communication et le commerce. Cet objet serait d’autant plus conséquent que partant à jour fixe, les voitures arriveraient aux hostelleries aux jours marqués qui à cet effet auraient des provisions pour y recevoir les voyageurs.
Parlons de l’article de la sûreté que procure la Maréchaussée dans tous les pays où elle est établie, je me souviens qu’en 1773 dans le temps que la Cour était à l’Escurial, il y a eu plusieurs personnes arrêtées et voleurs en plein jour, sur le chemin de ce Sitio, à la montée après Rozas et de plus, je puis dire n’avoir jamais rencontré sur les routes des diffèrent sitios (où j’ai fait plusieurs voyages) aucune troupe de cavalerie, je savais pourtant et j’ai vu qu’il y en avait de postés à Guadarrama, à Rozas, à la venta Santa Catalina, qui étaient en veste et leurs chevaux sans être sellés, cependant la troupe de los volontarios a cavallo, n’ont que pour la sûreté de Madrid et des routes jusques au sitios ou réside la cour ; quelle différence du travail actif et continuel des Maréchaussées et de leur utilité avec ce corps là dont foncièrement l’objet et l’institution sont les mêmes.
Il faudrait donc à Madrid environ 200 hommes de Maréchaussée qui fissent le service de Madrid, de la cour et des différentes routes à dix lieues à la ronde de Madrid et surtout sur celles des sitios plus 600 hommes sur les différentes grandes routes en y joignant des troupes légères à pied faisant corps ensemble pour les faire vaquer dans les endroits où les chevaux ne peuvent aller.
En temps de guerre on tirerait 100 hommes des dites brigades pour le service de l’armée, la quelle troupe la guerre finie se retirerait dans son département respectif d’ailleurs quel service utile peut faire aujourd’hui une troupe laquelle est tirée de divers régiments où elle rentre la guerre finie, ces gens la n’osent servir contre leurs camarades qui leur feraient payer cher ce qu’ils leur auraient fait ; de là survivent les abus et les excès qui doivent se commettre et qui viennent de cette impunité, ce qui n’arriverait pas si ce travail était fait par un corps de Maréchaussée ad hoc.
D’ailleurs quel état et de quelle considération jouit aujourd’hui ce corps en Espagne ; la place de prévôt y était presque ignominieuse et […] depuis qu’on a gradué de capitaine le prévôt que cette place est devenue militaire cette troupe étant abolie en temps de paix il faut par conséquent donner de la consistance à un corps si nécessaire, le faire commander en chef par un officier général, faire remplir les places d’officiers par des officiers qui demanderaient leurs retraites, et leur donner le même rang qu’elle a aujourd’hui en France où l’on a senti la nécessité d’honorer un Corps qui dans tous les temps, maintient la paix dans le royaume, procure sûreté aux habitants et est toujours en guerre avec les perturbateurs du repos public.
Pour mettre sous les yeux de la cour l’utilité de ce corps et le bien qu’il doit produire, il faut commencer de créer 200 hommes pour le service de Madrid, de la cour et des principales routes aux environs de Madrid et alors on sentira combien il est essentiel de créer un pareil corps.
Tout le monde connaît en France le travail des maréchaussées, il est des ordonnances qu’on peut feuilleter mais jusques à présent personne n’avait eu l’idée de faire servir dans l’occasion le corps de courriers de la cour. Cette célérité procurerait souvent de très grands avantages, soit pour le départ des flottes, soit pour des ordres propres pour l’armée ou pour les provinces qui portent remède à des événements qui journellement peuvent arriver et qui faute de pouvoir être prévus souffrent par le retard et où il faudrait souvent porter des prompts secours et l’établissement d’un corps de Maréchaussée en Espagne y remédierait […].
Project d’un établissement très utile pour la ville de Madrid
Il faudrait établir une compagnie de deux cent hommes qui serviraient dans les incendies, et autres accidents et donneraient des secours utiles.
On dresserait les dit deux cent hommes, les uns au service des pompes, les autres au service des feux et les autres seraient employés pour les transports sur des effets ; las dans ces moments il y a encore bien des gens qui sous prétexte de donner des secours, ne cherchent qu’à profiter du trouble et de l’embarras qui y règne, pour voler.
Par les Moyens des secours prompts que procurerait cette compagnie on tâcherait de remédier avec célérité aux accidents causés par le feu et autres, puisqu’on ne peut le prévenir.
La plus part des villes entretiennent des pompiers pour avoir soin des pompes, mais on voit souvent qu’au moment que les pompes sont nécessaires on ne peut s’en servir ce qui porte un très grand préjudice et c’est à quoi il faut obvier.
J’ai vu des incendies où il y avait beaucoup de demandes, point d’ordre et par conséquent peu de secours utiles, ce qui arrive presque toujours, surtout lorsqu’il n’y a personne d’entendu pour diriger les opérations, de sorte que l’embarras est plus considérable que les secours dans ces sortes d’occasions, et ne faudrait, s’il était possible que des gens en état de travailler efficacement d’ailleurs en employant des gens connus et instruits on évitera les abus tels que ceux qui se glissent dans ces sortes d’occasions, comme les voleurs et les gens inutiles que la curiosité seule attire.
Pour éviter la dépense qui causerait la création de cette compagnie, il faut y employer les soldats les plus valides et les plus robustes pris dans le corps des invalides en y donnant une petite augmentation de paye.
On repartira cette troupe en quatre quartiers de la ville pour pouvoir donner des secours plus prompts et cette troupe dans son quartier respectif fera les patrouilles le soir comme les autres compagnies d’invalides, mais ils ne fourniront point de postes au dehors.
Il y aura 60 hommes avec un officier détachés à tous les sitios et qui suivront la cour pour servir en cas de besoin.
Il faut à chaque quartier deux tonnes pleins d’eau et prêtes à partir au premier ordre ainsi que cent sceaux et deux pompes.
Au premier avis on fera partir une tonne, une pompe et cent sceaux escortés par quinze hommes et vingt-cinq hommes avec leurs farrots et habillement partiront avec l’officier de semaine à leur tête.
Le commandant de cette compagnie aura soin de faire exercer tous les mois les soldats pour le service des pompes et des sceaux, cela entretiendra l’agilité et on examinera par ce moyen les pompes et les sceaux pour voir s’ils sont en bon état.
Cet établissement est d’autant plus utile et intéressant qu’il se passe fort peu d’années, qu’il n’arrive quelqu’incendie ou accident dans Madrid et le feu est beaucoup à craindre que dans d’autres pays, où la grande quantité de bois qui entre dans les constructions des maisons et c’est ce qui cause le progrès des flammes ; il faut par conséquent tâcher d’y remédier avec le plus de célérité possible et c’est l’avantage qu’on retirera de cet établissement si utile, les habitants sont les premiers intéressés, par conséquent, c’est aux pères de la patrie à veiller à la sûreté du peuple
Il faudrait un Commandant
Deux capitaines
Deux lieutenants
Quatre sous lieutenants
Huit sergents
Huit caporals
Deux cent soldats
Pour les deux cents hommes de Maréchaussée il faudrait un prévôt général à la cour
Un prévôt général à Madrid
Un lieutenant à la cour
Deux lieutenants à Madrid
Deux sous lieutenants à la cour
Quatre sous lieutenants à Madrid
Six sous lieutenants dispersés
Huit maréchaux de logis
Vingt quatre brigadiers
Cent quatre vingt cavaliers
Deux trompettes servant de cavaliers
Un commissaire de guerre
Un secrétaire général
Un assesseur et la justice prévôtale au corps
Proyecto de creación de una Legión de Salvaguardias Nacionales
Le préambule du décret, retranscrit ci-dessous, insiste sur les avantages d’un système général et uniforme dans toute la péninsule, pour assurer la sécurité des chemins et faciliter de la sorte la circulation et le commerce.
Del establecimiento del Cuerpo de seguridad interior, cuyo proyecto se presenta, resultarán las ventajas propias de una fuerza calculada por la población y superficie del país a que se destina, y de una organización conveniente al objeto de su instituto. Y además resultarán también las que son correspondientes a la unidad de acción que tendrá esta misma fuerza, a la uniformidad de su servicio en toda la península, al entusiasmo de individuos escogidos que deberán componerla, y a la experiencia y datos con que se formará el reglamento peculiar de su instituto, por cuyos medios, a un mismo tiempo, sin cesar, y en todas partes se observará y perseguirá a los malvados.
No será difícil comprender estas ventajas si se considera que la institución que se propone reemplazará a escuadras en una provincia, a compañías sueltas en otras, a tropas del Ejército, escopeteros y partidas de paisanos en varios distritos, o lo que es lo mismo, a cuerpos incoherentes, algunos de ellos mal constituidos, y todos sin recíproca relación, sin una dependencia misma. Única en la Península, su sistema será general, uniforme su servicio, y en todas las provincias tendrá proporcionalmente la misma organización, la misma fuerza, dependencia y funciones. Sus Jefes, Oficialidad, y en general todos sus individuos, se dedicarán al desempeño de estas con el entusiasmo propio de militares escogidos y convenientemente organizados para este objeto, y el Gobierno se aprovechará de su disposición y celo para que correspondan a su objeto […]
Varias e indudables son las ventajas que han de resultar a la nación de la creación de un cuerpo particularmente encargado de la seguridad interior de la península ; pero de ellas se indicarán únicamente las principales.
En primer lugar se obtendrán eficazmente y desde luego el exterminio de los malhechores y la seguridad de los caminos, objeto principal de su instituto, cuyas circunstancias no se han podido lograr jamás a pesar de las medidas del Gobierno y de los esfuerzos y sacrificios de los pueblos de que se ha hablado anteriormente.
La circulación interior, obstruida en el día hasta un grado difícil de concebir, quedará inmediatamente libre de los inconvenientes que en la actualidad la entorpecen, y de este modo el comercio y tráfico de nuestro país, que debe prosperar rápidamente por efecto del nuevo orden de cosas, encontrarán en este cuerpo una protección bien necesaria a sus operaciones.
Su existencia y la exactitud de su servicio harán muy pronto ilusorio el aliciente que puede ofrecer a los malvados la profesión de salteadores. Por ellas, no sólo se evitarán las extorsiones que con tanta frecuencia se cometen, sino que disminuyéndose los crímenes, serán en menor número los castigos y una porción de la sociedad descarriada de su deber por la impunidad y poca vigilancia con que cuenta actualmente, dejará de emplearse en esta criminal ocupación, luego que conozca que hay unas tropas siempre dispuestas a perseguirla.
Pero todas las ventajas que el Gobierno se propone con esta nueva institución, serán del todo nulas, si no son auxiliadas eficazmente con otras medidas que no toca al Ministerio de mi cargo proponer, pues que es evidente que nada se habrá adelantado con la aprehensión de los malhechores, si estos no son prontamente castigados, y si como ahora sucede, tienen la funesta facilidad de sustraerse a las penas de la ley, o huir de los presidios para infestar de nuevo los caminos […].
Notes de bas de page
1 Pour un regard sur la conflictualité au XVIIIe siècle, ses différentes causes et la variété de ses manifestations, cf. E. Martínez Ruiz et M. Romero Samper, « Conflictos y conflictividad social en el siglo XVIII », Coloquio internacional sobre Carlos III y su Siglo, vol. I, Madrid, Universidad Complutense, Departamento de historia moderna, 1990, p. 387-424, et E. Martínez Ruiz, « Conflictividad social española en el siglo XVIII », El Dos de mayo y sus precedentes. Actas del Congreso internacional (Madrid, 20-22 mayo 1992), Madrid, Capital europea de la cultura, 1992, p. 31-54.
2 Voir F. Andujar Castillo, Monarquía, ejército y venalidad en la España del siglo XVIII, Madrid, Marcial Pons, 2004.
3 Pour ce qui est de la situation du XVIIIe siècle, dans le contexte général qui nous occupe, voir E. Martínez Ruiz, « El mantenimiento de la seguridad pública en España antes de la creación de la Guardia Civil », La Guardia Civil : pasado, presente y futuro, Madrid, Ministerio del Interior, Secretaría de Estado para la Seguridad, 1990, p. 25-36.
4 Les décrets de Nueva Planta concernent les royaumes de la Couronne d’Aragon qui participèrent à la guerre de Succession en défendant les droits de l’archiduc Charles contre Philippe V. Ce dernier les considérait comme des sujets insoumis et lorsqu’il gagna ces territoires il châtia tous les natifs de ces royaumes en les dépossédant de leurs fueros (privilèges) et en appliquant une centralisation suivant la législation castillane. Sur ce sujet voir notamment les actes du Congrès international coordonné par E. Serrano, Felipe V y su tiempo, 2 vol., Saragosse, Eliseo Serrano, 2004 ; J. L. Pereira Iglesias (dir.), Felipe V de Borbón (1700-1746), Cordoue, Fundación Municipal de Cultura-Universidad de Córdoba, 2002 ; C. Pérez Fernandez-Turégano, Patiño y las reformas de la administración en el reinado de Felipe V, Madrid, Ministerio de Defensa, 2006, ainsi que le t. XXIX de la Historia de España, de R. Menedez Pidal, La época de los primeros Borbones. La nueva Monarquía y su posición en Europa (1700-1759), Madrid, Espasa Calpe, 1985.
5 Nous faisons apparaître l’année de création et le nom de son fondateur lorsque celui-ci est connu. Pour plus de détails, M. de Pazzis Pi Corrales, « Aproximación al marco institucional del orden y la seguridad pública », dans E. Martínez Ruiz, M. de Pazzis Pi Corrales et J. Torrejón Chaves (dir.), Los ejércitos y las armadas de España y Suecia en una época de cambios (1750-1870), Cadix, Ediciones Puertollano, 2001, p. 69-90.
6 À propos de ce corps, voir N. Sales, Historia dels Mossos d´Esquadra. La dinastia Veciana i la policia catalana en el segle XVIII, Barcelone, Editorial Aedos, 1962, p. 123-126, et « Els Mossos d ´ Esquadra a l ´ Antic Regim (1721-1835) », Els Mossos d ´ Esquadra, Barcelone, L’Avenç, 1981, p. 28-29 ; A. Barruel i Llovera, Els Mossos d’Esquadra : Aportació documental a la seva història (1741-1821), Valls, Institut d’Estudis Vallencs, 1998, et Les esquadres de Catalunya a finals del segle XVIII : de la prosperitat a la decadencia, Valls, Arxiu H. Comarcal, 1994.
7 Pour une approche de ces corps, voir E. Martínez Ruiz, « Las fuerzas de seguridad y orden público en la primera mitad del siglo XIX », Cuadernos de Historia, t. IV, 1973, p. 120 sqq.
8 Ces projets sont conservés à l’Archivo Histórico Nacional (Madrid), Sección de Estado. Leur nombre est considérable et, dans la plupart des cas, ces projets sont regroupés par liasses. D’autres se trouvent dispersés et font partie de la documentation de l’époque. Nous n’avons sélectionné, le plus souvent, que ceux qui nous semblaient particulièrement significatifs. E. Martínez Ruiz, « Algunos proyectos de mejora para el Madrid de Carlos III », Estudios Iberoamericanos (Rio Grande do Sul, Brasil), vol. 14, 1988, p. 1-20 ; « Entre la utopía y la ilusión : propuestas de paisanos para concluir felizmente la guerra », II Seminario Internacional sobre la Guerra de la Independencia, Madrid, Ministerio de Defensa, Secretaría General Técnica, 1996, p. 145-165 ; « El presbítero José Bonet y su proyecto de incremento y mejora del Ejército », dans J. A. Armillas (dir.), La Guerra de la Independencia. Estudios, Saragosse, Institución Fernando el Católico, 2001, p. 363-383 ; « El proyecto de construcción de la “Romana Trina” en el arsenal de La Carraca (1809) », Revista de Historia Naval, vol. 82, 2003, p. 103-108, et E. Martínez Ruiz et M. de Pazzis Pi Corrales, « Un proyecto inviable : el cuerpo de cadetes nobles. 1800 », Homenaje a D. Antonio Bethencourt Massieu, Las Palmas, 1995, p. 419-436. Voir aussi E. Martínez Ruiz, La seguridad pública en el Madrid de la Ilustración, Madrid, Ministerio del Interior, Secretaría general técnica, 1988.
9 Cette lettre fait partie d’un dossier composé de quatre documents écrits en français. Ils peuvent être consultés à l’Archivo Histórico Nacional, leg. 2.855, no 46.
10 Les annexes I, II et III jointes à cette contribution permettront au lecteur de prendre directement connaissance des propositions du commandant français.
11 Nous ne procèderons pas à une analyse de ces événements ni de ceux auxquels nous allons faire allusion. Nous ne pouvons indiquer non plus l’abondante bibliographie qu’ils ont suscitée. Nous nous contentons de citer quelques ouvrages, parmi les principaux. M. Artola Gallego, La España de Fernando VII, t. XXVI de la Historia de España, de R. Menendez Pidal, Madrid, Espasa Calpe, 1968 ; J. Fontana Lazaro, La quiebra de la Monarquía absoluta (1814-1820), Barcelone, Ariel, 1971, et Hacienda y Estado en la crisis del Antiguo Régimen (1823-1833), Madrid, 1974 ; E. Martínez Ruiz, Creación de la Guardia Civil, Madrid, Editora nacional, 1976 ; B. E. Buldain Jaca, Régimen político y preparación de Cortes en 1820, Madrid, Publicaciones del Congreso de los Diputados, 1988 ; A. Moliner Prada, Revolución burguesa y movimiento juntero en España, Lleida, Editorial Milenio, 1997 ; E. González López, La regencia de María Cristina. Moderados, progresistas y carlistas, La Corogne, Edicios do Castro, 1984.
12 Malheureusement aucun exemplaire de ce projet n’a été conservé. Nous n’en avons trouvé aucun au cours de nos recherches. Les références – les seules dont on dispose – se trouvent dans J. Quevedo et J. Sidro, La Guardia Civil, Madrid, Imprenta y Litografía Militar del Atlas, 1858, et traitent de ce projet p. 468 sqq. Nous en avons extrait le texte du préambule que l’on trouvera en annexe IV. Les auteurs cités affirment avoir consulté un exemplaire du décret grâce au fils du marquis, fondateur de la Garde civile.
13 « Siendo urgente poner en práctica todos los medios convenientes para reprimir y castigar el excesivo número de ladrones, ya en los caminos, ya en poblado, y quitar así a los malévolos uno de los pretextos de que se valen para calumniar el régimen constitucional, pido se señale día para abrir discusión sobre un punto tan importante, asistiendo a ella los Secretarios del Despacho que se estime conveniente, a fin de ver si está al alcance del Gobierno contener tamaño desorden, o si necesita para alguna medida la cooperación de las Cortes » ; « Es de tal naturaleza este negocio que tiene en consternación a las provincias en general. […] Se trata de un mal que ataca lo más sagrado de la sociedad, como son la propiedad y la vida. Los enemigos del régimen constitucional se prevalecen de este desorden para decir que el excesivo número de ladrones es un resultado de este sistema, porque no permite perseguirlos » (Diario de Sesiones de Cortes, no 8, 12 juillet 1820, p. 49).
14 « En atención a que la seguridad individual de los ciudadanos se halla atacada con mucha frecuencia por las hordas de ladrones y bandoleros que infestan los caminos del Reino, y que su osadía ha llegado en muchas partes a imponer contribuciones a los dueños de los sembrados y casas de campo, o a incendiarlas en el caso de resistir estos su pago ; no siendo posible que las partidas del ejército nacional cubran todos los puntos, y debiendo los ayuntamientos y alcaldes constitucionales cuidar de la seguridad de las personas y bienes de los ciudadanos, conforme al art. 321 de la Constitución ; para evitar el descuido y falta de actividad que se nota en la observancia de este artículo, pido que las Cortes determinen y fijen la responsabilidad de los alcaldes y ayuntamientos constitucionales por los robos que se cometan en el distrito de su respectiva jurisdicción » (Priego) ; « No nos engañemos : las causas del excesivo número de ladrones, aun prescindiendo del trastorno de la revolución, son harto conocidas, demasiado lloradas de todo español : la pobreza, el poco estímulo para el trabajo, la mala división de la propiedad, las trabas que oprimían todas las profesiones, el bárbaro sistema fiscal, las rentas estancadas, la incomunicación entre las varias provincias y entre los pueblos más cercanos, la despoblación del Reino, el mal sistema de nuestros presidios, la inmoralidad pública que acarrea siempre un régimen arbitrario ¿no son suficientes causas para explicar el origen de esa plaga tan antigua en nuestra Nación, y que debe causarnos al propio tiempo indignación y vergüenza ? » (Martínez de la Rosa) [Diario de Sesiones de Cortes, no 26, 30 juillet 1820, p. 322-323].
15 « Siendo en mi opinión el proyecto presentado por el Secretario de la Guerra para la formación de una nueva fuerza, hasta ahora desconocida, con el objeto de perseguir a los malhechores, una medida atentadora a la libertad y desorganizadora de la Milicia Nacional, invito al mismo Secretario a que retire dicho proyecto, persuadido de que ha obrado con recta intención, pero sin calcular sus consecuencias bajo el aspecto político : en el caso de que S.S. no lo tenga a bien, pido a las Cortes que no lo tomen en consideración, o si lo toman sea para deliberar sobre él después de haber establecido y consolidado por leyes adecuadas ;
Primero. Las Milicias Nacionales
Segundo. La administración de la justicia criminal por medio de los jurados o jueces de hecho.
Tercero La libertad de imprenta.
Que en mi entender son las principales garantías de la libertad civil ; pues de otro modo quedaría amenazada por esta nueva institución, a la que seguiría en breve, como consecuencia necesaria, la de la abominable inquisición llamada policía » (Diario de Sesiones…, no 27, 31 juillet 1820, p. 344).
16 «Se examine con urgencia por la comisión de Guerra y la de Legislación el plan que ha presentado el Secretario del Despacho de la Guerra, y que presente su dictamen a las Cortes lo más pronto posible» (ibid., p. 341).
17 Diario de sesiones, no 28, p. 350-351.
18 Archivo Histórico Nacional, Sección Estado, leg. 2.855, no 46.
Auteurs
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