Chapitre XVII. La Seine-et-Marne, un département modèle ? Les moyens d’échapper à la conscription
p. 273-290
Texte intégral
Arrondissements et cantons face à la conscription
1« Depuis deux ans, les préfets opèrent à la course, ils opèrent mal1. » Telle est la constatation que le directeur général de la Conscription adresse au ministre de l’Intérieur dès 1807. Dans la même lettre, il précise : « J’avoue que je n’attache pas un très grand prix à cette vitesse qui ressemble trop à la précipitation pour n’en avoir pas tous les inconvénients2. » On a vu plus haut le conflit qui avait éclaté à ce sujet entre lui et l’Empereur.
2On a vu aussi que ce jugement ne pouvait s’appliquer à la Seine-et-Marne. Si, de 1806 à 1812, les levées ont lieu rapidement, elles se déroulent bien. Est-ce toujours équitablement ? En principe, la répartition du contingent se faisait selon la population des départements mais ce principe souffre de nombreuses entorses dans la pratique. En alla-t-il de même à l’intérieur de chaque département ? Ne peut-on découvrir des arrondissements et même des cantons sacrifiés, comme il y avait des départements sacrifiés et d’autres « avantagés » ?
3En mettant en regard le contingent ordinaire exigé de chaque arrondissement en 1806, 1807, 1811, 1812 et 1813 et l’estimation du nombre d’habitants de ces mêmes arrondissements donné par le préfet, qu’il ne mentionne cependant pas de 1808 à 1810, on est amené à conclure à l’équité de la répartition du fardeau conscriptionnel, à d’infimes différences près3. En règle générale, il semble que cette équité s’étende aux cantons si l’on considère la répartition de la levée ordinaire de 1808 par exemple dans les cantons de l’arrondissement de Meaux et de celle de 1809 dans ceux de Coulommiers4.
4Mais la réalité mathématique est une chose, autre chose est la perception que les habitants de Seine-et-Marne peuvent en avoir. Les sous-préfets admettent eux-mêmes que la population pouvait ressentir une irrégularité, même quand elle était toute relative. Par exemple, même s’il est tenu compte de leur population, certains cantons de l’arrondissement de Coulommiers fournissent un homme sur trois cent quatre-vingt-huit, d’autres, un homme sur deux cent quatre-vingt-seize pour le contingent de l’active de 1811.
5Pour les cantons de l’arrondissement de Meaux, la proportion varie d’un homme sur trois cent quatre-vingt-treize à un homme sur trois cent quatre-vingt-un, pour ceux de l’arrondissement de Provins, elle va d’un homme sur trois cent quatre-vingt-sept à un homme sur trois cent soixante-douze et, pour ceux de l’arrondissement de Fontainebleau, c’est tantôt un homme sur trois cent soixante-seize, tantôt un homme sur trois cent soixante-quatre qui est levé, mis à part le canton de Fontainebleau auquel on ne demande qu’un homme sur quatre cent quarante-deux, le sous-préfet précisant qu’il en a donné précédemment l’explication au préfet5. Même si l’on place à part le cas « aberrant » du canton de Fontainebleau, il existe donc des distinctions qui, traduites en chiffres, sont faibles – le pourcentage exigé va de 0,25 % à 0,27 % – et qui n’infirment pas les calculs mentionnés plus haut. Mais les Seine-et-Marnais y sont sensibles et les remarques des sous-préfets font référence à cet état d’esprit.
6Pour le contingent de 1812, ils se livrent encore aux mêmes observations. Dans l’arrondissement de Coulommiers, on demande tantôt un homme sur deux cent quatre-vingt-six, tantôt un homme sur deux cent quatre-vingt-un, dans celui de Meaux, un homme sur deux cent quatre-vingt à un homme sur deux cent soixante-quatorze, dans celui de Provins, un homme sur deux cent quatre-vingt-sept à un homme sur deux cent quatre-vingt, dans celui de Melun, un homme sur deux cent quatre-vingt-six à un homme sur deux cent soixante-dix-huit. Dans celui de Fontainebleau, l’inégalité entre les cantons est moins importante que l’année précédente : soit un homme sur deux cent quatre-vingt-dix est demandé, soit un homme sur deux cent quatre-vingts6. De toute façon, les autorités ne disposent que d’estimations approximatives.
7En admettant cependant que le contingent demandé ait été parfaitement proportionnel à la population, l’égalité n’en aurait pas été pour autant strictement respectée ; le sous-préfet de Provins le dit lui-même.
« Une circonstance qui nous a frappé, c’est l’inconvénient qui résulte de la répartition du contingent entre les cantons en prenant pour base la population plutôt que le nombre de conscrits inscrits sur listes, nombre pourtant toujours connu des sous-préfets. La répartition de 1812 fera voir combien elle a blessé la justice distributive et l’égalité entre les cantons. Nous ne croyons pas que la nécessité de faire la répartition entre les arrondissements et les départements d’après la population entraîne celle de se servir de la même base pour la répartition entre les cantons7. »
8Cela dit, même si la perfection n’est pas atteinte en matière d’égalité de 1’impôt du sang, cela ne conduit pas la population des cantons les plus « surchargés » à la refuser et, au demeurant, ont encore lieu des engagements volontaires. Lors de la période précédente, il y en avait eu aussi mais les maires négligeaient de les signaler aux sous-préfets8, si bien que l’étude systématique n’en avait pas été possible. Cette fois, le second compte en dénombre neuf pour 1807, cinq pour 1808, cinq pour 18099. Les procès-verbaux de clôture des opérations livrent des chiffres légèrement supérieurs, vingt-deux conscrits de 1806, vingt de 1809, quatorze de 1810, treize de 181310. Il est vrai que leurs motivations sont parfois fort éloignées de ce que l’on peut attendre d’un enrôlé volontaire. Ainsi un manouvrier orphelin s’était-il enrôlé en mars 1806 devant le maire de Montereau. Son engagement est envoyé par le sous-préfet de Fontainebleau à Lagarde au début d’avril 1806 mais une semaine après le maire de Montereau écrit au sous-préfet que le conscrit se trouvait dans les prisons de Melun au lieu d’être incorporé dans le 88e régiment. Ce jeune homme, auquel il avait donné une paire de souliers et 24 sols, avait pris une route opposée à celle du régiment en disant au moment de son départ qu’il « se riait » de son engagement. Il fut rattrapé à Melun.
« D’après les renseignements ultérieurs qui ne sont parvenus sur le compte de Duchesne, encore bien qu’ils ne soient pas d’une certaine gravité, néanmoins, je désirerais, ainsi que sa famille, qu’on pût le faire partir pour les colonies, si cela était encore possible. Je crois d’ailleurs qu’il serait plus propre à ce service qu’à tout autre11. »
9Un autre conscrit, clerc de procureur et fils d’un fermier, conscrit de 1808, « ayant échappé au sort » lors du tirage de sa classe en mai 1807, s’engage en juin 1808 puis se rétracte en disant qu’il est atteint de plusieurs infirmités. Le sous-préfet de Meaux l’envoie au préfet et celui-ci lui répond qu’il ne peut regarder comme sérieuses les infirmités alléguées par ce jeune homme12.
10Si une analyse exhaustive est impossible, le chercheur constate, d’après l’étude des quelques cas pour lesquels il est fait mention de la profession de l’enrôlé volontaire ou de celle de son père, que le domestique, l’instituteur ou le serrurier qui s’engagent pour avoir un « état », pressés peut-être par de difficiles conditions matérielles, encore qu’ils ne touchent pas les sommes que recevaient les remplaçants, côtoient le fils du propriétaire, du laboureur, du marchand farinier13. Certains sont étrangers au département et peut-être en situation de rupture vis-à-vis de leur famille. On trouve même la pétition d’un jeune homme de seize ans, fils d’un chambellan de l’ancien archiduc Maximilien d’Autriche, né à Bonn mais établi à Rozay, qui souhaite entrer dans les corps qui composent la maison de l’Empereur14. Les enrôlés volontaires, du moins dans les exemples dont on dispose, sont d’ailleurs très jeunes. Ils ne sont pas dans la même situation que les remplaçants qui entrent dans l’armée pour assurer leur avenir et celui de leur famille mais des garçons de seize ou dix-sept ans qui devancent l’appel dans l’espoir de faire une carrière militaire.
11Il est donc légitime d’étudier avec les enrôlements volontaires ceux qui ont été contractés pendant la même période dans les vélites dont la création date de l’an XII. Après 1807, les vélites destinés à l’infanterie sont transférés aux fusiliers de la Garde mais les corps de vélites à cheval et ceux de l’artillerie continuent à recruter15. Les engagements ne sont pas très nombreux ; ils sont au demeurant subordonnés à des conditions de fortune. On en trouve trois en 1806, un en 1807, deux en 1808, un en 1809 et deux en 181016. Les pères de ces vélites, quand leur état est mentionné, sont en majorité des propriétaires. De même, se produisent des engagements dans ce corps d’élite – ou plutôt faits pour les élites puisqu’il fallait être fortuné – que pouvaient représenter les gendarmes d’ordonnance créés en 1806. On trouve celui du frère d’un vélite qui jouissait d’un revenu de 3 000 francs et le fils du maire défunt de la commune de Villeroy qui, désigné par le sort lors de la conscription de l’an IX, avait fourni un remplaçant. « Son père lui avait laissé un bien17. » Néanmoins, ce service devait être momentané puisque, parmi les hommes qui s’enrôlent en 1806, Marc Messier s’engage plus tard dans la garde nationale active de 1809 qui prend part ensuite à la défense des côtes.
12La bonne volonté n’est cependant pas totale. Le régime peut obtenir des enrôlements volontaires lorsqu’il s’agit d’enrôlements de « prestige » qu’il n’obtient pas pour des corps « classiques ».
13Ainsi la garde municipale de Paris recrute-t-elle par engagements volontaires : la Seine-et-Marne doit fournir soixante-dix hommes pour ses deux régiments d’infanterie, volontaires qui peuvent être conscrits de toutes classes depuis celle de 180618. Quelques semaines plus tard, le préfet est obligé d’avouer que, des soixante-dix hommes escomptés, il n’en est parti que cinq.
« Cette différence ne vous étonnera pas, lorsque vous vous rappellerez que l’appel fait pour la défense des côtes dans le cours du mois dernier a ouvert aux jeunes gens du département une nouvelle carrière dans laquelle ils ont dû s’empresser d’entrer. Ils ont préféré suivre à Lille un drapeau qu’ils recevaient des mains de leurs propres administrateurs et d’entrer dans un bataillon qui portait le nom de leur propre département19. »
14Mais les gardes nationaux de 1809 n’étaient pas tous volontaires, loin de là ! c’est en partie pour cette raison que ce recrutement a été étudié avec les levées ordinaires de 1809.
Remplacements, substitutions, mariages
15Il est donc permis de penser que le déroulement aisé des levées en Seine-et-Marne est dû en partie à la bonne volonté des conscrits mais aussi au fait qu’ils disposent de moyens plus ou moins détournés d’échapper à la conscription. Si l’insoumission et la désertion représentent les moyens de la refuser ouvertement, moyens peu utilisés en Seine-et-Marne, des démarches que l’on pourrait qualifier de légales et d’officielles existent aussi pour s’y dérober, tels le remplacement et la substitution. Les procès-verbaux rédigés par le conseil de recrutement donnent le nombre des remplacements opérés sur chaque classe : trente-cinq sur la classe de 1806, quarante sur celle de 1807 et onze pour le premier ban de la garde nationale, quarante-deux sur celle de 1808 et sept pour le premier ban de la garde nationale, trente-neuf sur celle de 1809 et quatre pour le premier ban de la garde nationale, trente-neuf sur celle de 1810 et six pour le premier ban de la garde nationale.
16À partir de 1811, une progression s’observe qui correspond d’ailleurs à l’augmentation du contingent levé : cinquante-cinq conscrits de 1811 et quatorze pour le premier ban de la garde nationale auraient été remplacés20. Il y aurait eu soixante remplacements pour la classe de 1812 et quinze, lorsque le premier ban de la garde nationale fut levé21, enfin soixante-six remplacements pour la classe de 181322. Pour les classes de 1806 à 1810, les chiffres d’Hargenvilliers correspondent à peu de chose près à ceux qui sont donnés par les procès-verbaux.
17Tout conscrit remplacé devait verser 100 francs à l’État. Les services de la Conscription établissent donc des états des remplacements. Selon ceux-ci, vingt-cinq remplacements ont lieu pour la classe de 1806, trente-trois pour la classe de 1807, trente-six pour la classe de 1808, trente-trois pour la classe de 180923. Même si les chiffres du Département sont légèrement supérieurs, leur modicité est tout de même frappante. Il est vrai qu’aux remplacements, il faut ajouter les substitutions. Le préfet précise la distinction entre les deux.
« La substitution est un arrangement de gré à gré entre les conscrits d’une même classe et du même canton jugés valides par le conseil de recrutement. […] Le remplacement est un arrangement de gré à gré au moyen duquel deux conscrits de classes différentes, c’est-à-dire portés sur des tableaux généraux de conscription différents, prennent la place l’un de l’autre. Les suppléants doivent appartenir au même département que les suppléés, appartenir aux classes antérieures à celle appelée, avoir 1 m 649 mm, avoir moins de trente ans24. »
18Cette distinction était utile à rappeler car elle n’était nettement établie que depuis le décret du 8 fructidor an XIV qui, en même temps, restreignait théoriquement les conditions de remplacement puisqu’auparavant les suppléants pouvaient appartenir à d’autres départements que les suppléés et par ailleurs pouvaient être âgés de plus de trente et de moins de quarante ans25.
19La substitution, dans la mesure où elle permet d’éviter le versement des 100 francs à l’État, est plus intéressante pour les conscrits que le remplacement. Celui-ci, même lorsqu’il s’opère entre deux frères et ne donne par conséquent pas lieu à un contrat, est accompagné de ce versement sauf dans des cas particuliers que le conseil de recrutement apprécie. Par exemple, un conscrit non appelé de l’an XI remplace son frère, conscrit de 1806,
« attendu que ces deux conscrits sont frères, qu’ils appartiennent à des parents pauvres, que celui qui s’offre de partir est d’une plus haute taille et d’une constitution bien plus robuste que l’autre, il n’y a pas lieu de soumettre le remplacé à justifier le versement de 100 francs pour l’habillement et l’équipement de son remplaçant26 ».
20À la longue, le conseil finit par considérer le remplacement d’un frère par un autre comme une substitution. Le sous-préfet de Coulommiers appuie en ce sens la demande de deux de ses administrés.
« Un conscrit de 1811 […] du canton de La Ferté-Gaucher s’est présenté pour déclarer que son intention était de remplacer son frère, conscrit de la même commune, de 1813. Il appartient à une pauvre famille et le conscrit de 1813 est le seul soutien, celui de 1811 ne leur est d’aucun secours, c’est pour cela qu’il se présente, il est plus grand et plus robuste que celui de 1813. Comme le remplacement est regardé comme une substitution, le conseil de recrutement l’admettra sans difficultés et ce sera un grand service rendu à une famille, dont il ne peut résulter aucun inconvénient27. »
21Pour la classe de 1806, se produisent vingt-cinq substitutions, quatorze pour celle de 1807, onze pour celle de 1808, treize pour celle de 1809, vingt-huit pour celle de 181028. Celles de 1811 et 1812 ne sont pas connues.
22La substitution n’est toutefois pas utilisée autant que le remplacement. En effet, elle comporte un risque puisqu’elle se déroule avant le tirage au sort et que le conscrit qui choisit un substituant laisse échapper la chance d’obtenir un bon numéro29. En additionnant le nombre des remplacements et celui des substitutions, on aboutit aux pourcentages suivants : ils représentent 5,5 % du contingent demandé pour 1806 et pour 1807, 5,7 % pour 1808 et 1809, 6,3 % pour 1810. Les remplacements représentent à eux seuls 5,15 % du contingent de 1811, 5,7 % de celui de 1812, 5,5 % de celui de 1813. Il semble que ce chiffre soit supérieur à la moyenne nationale que Louis Bergès estime être de 3,5 à 4 % pour les années 1807-1811, ce qui selon lui est faible30. Pour le Calvados, Gabriel Désert qui n’établit le pourcentage qu’à partir de 181l, le jauge à 2,3 % des conscrits de 1811, 2,8 % en 1812, 2,2 % en 181331. Pour le Maine-et-Loire de 1806 à 1814, Jean-Pierre Bois retrouve sensiblement la même proportion que celle de la Seine-et-Marne : une moyenne de 5,67 % des appelés à laquelle il ajoute 1,36 % de substitutions. Il pense que ce chiffre est relativement élevé32. Mais dans le Var les remplacements vont de 10 à 35 %33.
23Le remplacement est un moyen coûteux d’échapper à la conscription. Son prix augmente alors malgré des variations sensibles d’une partie du département à l’autre. Le prix n’est encore que de 2 400 francs à Donnemarie en 1812, pendant qu’il atteint à la même époque 5 500 francs à Provins et 6 000 francs à Melun34. Alors qu’en 1807 et encore en 1809, un conscrit ne payait « que » 2 962 francs à Melun même – mais il y avait donc eu une hausse très nette depuis l’an XII – le recrutement pour la levée complémentaire de 1809 introduit une brusque accélération des prix qui doublent quasiment. Il en coûte 4 600 francs à un conscrit touché par cette levée pour se faire remplacer. Cette accélération n’est en rien une flambée exceptionnelle puisque, mis à part un cas de remplacement à 1 800 francs en 1811, les sommes versées tournent autour de 5 000 francs35.
24Les contrats de remplacement pour le service de la Garde nationale de 1808 sont des cas particuliers ; ainsi l’observe-t-on dans le contrat stipulé dans l’étude Opoix entre un cultivateur de La Chapelle-Saint-Sulpice et un arquebusier alsacien de quarante ans travaillant chez un maréchal-ferrant de Donnemarie. Les règles d’âge et d’origine géographique ne sont donc pas respectées. L’acte précise que, si le premier est obligé de partir dans le contingent des gardes nationaux de 1809, il versera à son remplaçant 302 francs 17 centimes dont un premier acompte de 50 francs, puis 3 francs lors de l’arrivée à Provins du remplaçant, et ensuite 3 francs à son arrivée à Melun. Le remplacé s’engage en outre à loger, nourrir, coucher le remplaçant pendant le temps antérieur à l’acceptation de celui-ci par les autorités départementales36.
25Devant le notaire de Melun, les sommes sont également moins élevées que pour un remplacement classique. Un manouvrier de Saint-Mammès offre 148 francs 3 centimes, un cultivateur de Lorrez-le-Bocage 400 francs, un vigneron 500 francs et un meunier va jusqu’à 592 francs 9 centimes37.
26La Seine-et-Marne suit l’évolution de la courbe nationale des prix38 mais en demeurant à un niveau moyen, contrairement à la période précédente où elle le dépassait. Par ailleurs, la baisse relative que les historiens ont observée en 1811-1812 et qu’ils attribuent, d’une part à la crise économique, d’autre part au répit accordé à la classe de 1811, n’est pas décelable en Seine-et-Marne, du moins dans les exemples dont nous disposons. On retire plutôt le sentiment d’une progression constante, même s’il existe des disparités entre les études ou plutôt entre les zones géographiques où elles sont situées.
27On constate que les contrats ne respectent pas toujours les règles édictées en matière d’âge et d’origine géographique. Il est vrai que la plupart des remplaçants originaires d’autres départements travaillent en Seine-et-Marne et que, d’autre part, il fallait demander une autorisation spéciale du directeur de la Conscription : ainsi accepte-t-il un journalier de la Seine-Inférieure, un perruquier de Paris, ou un employé de la Somme39.
28Les sommes versées, parfois considérables, ne l’étaient pas immédiatement ni dans leur totalité, seule une partie, assez faible au demeurant, était payée au remplaçant le jour de son départ. Les traités de remplacement passés dans l’étude de Maître Lestang à Melun montrent que, si les intérêts fixés en général à 5 % étaient payables de trois mois en trois mois, le capital était « remboursable » en trois ans mais parfois aussi en six ans40. La même pratique est observable dans d’autres études. Devant un notaire de Melun, le fils d’un cultivateur, conscrit de 1811, stipule qu’il versera à son remplaçant, couvreur de son état, 4 000 francs en deux ans avec intérêts annuels à 5 %41. Devant un notaire de Provins, un conscrit de 1813, étudiant et fils de propriétaire, verse au berger qui va le suppléer 5 500 francs sur deux ans, avec intérêts annuels de 5 %. En outre, lors du départ du remplaçant, le père du remplacé s’engage à lui fournir un sac de militaire « garni comme d’usage » avec une montre à boucle d’or, tout cela évalué à 150 francs42. Ce contrat est d’ailleurs « préventif » puisqu’il a lieu avant l’appel du conscrit qui souhaite se faire remplacer.
29L’échelonnement du remboursement allégeait un peu le fardeau qui pesait sur le remplacé et sa famille. Ces contrats sont en effet une source précieuse parce qu’ils sont pratiquement les seuls à faire mention de la profession de celui qui « achète » un homme pour partir à sa place sous les drapeaux. Contrairement à une idée reçue, ce ne sont pas uniquement les notables qui recourent à une telle pratique. Dans les minutes de l’étude melunaise déjà citée, on trouve, certes, le marchand mais aussi les vignerons, les mariniers et même le manouvrier43. On trouve également les cultivateurs mais ce terme recouvre une catégorie fort hétérogène. On ne s’étonnera donc pas que l’achat d’un remplaçant s’accompagne dans la plupart des cas de l’hypothèque des biens du remplacé et de sa famille. Les exemples mentionnés plus haut d’une autre étude melunaise et de celle de Provins démontrent aussi que les remplacés sont acculés à cette nécessité. Cette nécessité demeure, même pour les remplacements dans la Garde nationale pour lesquels les sommes versées sont moins importantes, à Melun comme à Donnemarie44.
30Des levées rétroactives sur la classe à laquelle ils appartenaient étant systématiquement attendues par les conscrits, certains par précaution choisissent « préventivement » un remplaçant. Un exemple révélateur peut être étudié dans l’étude de Donnemarie. Un manouvrier marié qui s’engage à remplacer un conscrit de 1813, fils de cultivateur, soit dans l’armée soit dans la Garde nationale, recevra 2 400 francs en numéraire dont 300 francs au comptant, 600 francs un an plus tard, 600 francs trois ans après mais ne touchera pas d’intérêt. Sa femme disposera d’une rente viagère de quarante doubles décalitres de blé et de froment payables en quatre termes égaux mais seulement à partir du jour où le remplaçant marchera. Si l’appel a lieu à l’expiration de la première année, la somme de 300 francs sera réunie au terme de 600 francs. On voit qu’en tout état de cause le remplaçant éventuel touche une prime. En garantie, le remplacé et ses parents offrent une maison et des bâtiments45.
31Si les remplacés n’appartiennent pas forcément aux groupes sociaux les plus aisés, les remplaçants sont d’origine modeste. La mention d’un conscrit de 1806, originaire d’Ypres, qui se présente comme remplaçant et dont le maire dit qu’il appartient à une famille bourgeoise, est surprenante46. Même si, à l’inverse, il arrive que l’on trouve des manouvriers comme remplacés, ils fournissent le gros des remplaçants dont beaucoup sont chargés de famille ou aînés d’orphelins. Un certain nombre de conscrits qui appartenaient pourtant au dépôt de droit s’engagent moyennant finances. Tel est le cas d’un orphelin de père et neuvième enfant d’une mère pauvre et infirme, qui déclare s’enrôler uniquement pour venir au secours de sa famille47.
32Ce « trafic de chair humaine » n’est pas forcément perçu comme tel lors de la période impériale. En témoignent deux exemples. Dassy48, membre du conseil général et alors président du tribunal de commerce de Meaux, estime de son devoir de payer un remplaçant pour un garçon pauvre. Ayant rempli diverses fonctions depuis vingt-trois ans sans interruption et voulant se rendre utile à son pays, dit-il, il autorise son fils, lors du tirage de la dernière conscription, à faire l’échange du bon numéro qu’il avait obtenu avec le mauvais numéro du fils d’une famille malheureuse. Il s’est donc opéré une substitution qui doit en principe se conclure par le départ du fils Dassy. C’est alors que le père achète un remplaçant pour son fils. Mais la valeur de ce geste est en quelque sorte amoindrie par les considérations auxquelles il se livre quand le remplaçant qu’il a choisi n’est pas accepté au corps, parce qu’atteint de vice de conformité, de gibbosité et aussi d’affection à la poitrine. « Cet individu, accoutumé aux travaux de la campagne comme vigneron, n’a pas plus de défauts que ce genre d’ouvriers habitués à se courber pour leur travail […] d’ailleurs il exerce le métier de cordonnier quand les travaux de la campagne cessent49. » L’autre exemple est celui du propriétaire mentionné plus haut, qui avait payé un remplaçant à son fils étudiant, après avoir stipulé dans le contrat que celui-ci serait annulé si son fils n’était pas appelé ; il demande au sous-préfet de Provins que ce remplaçant parte, bien que son fils, conscrit du canton de Villiers-Saint-Georges, ait tiré un bon numéro ; il avait le n ° 66, et on en était resté dans le canton au n ° 55. Le sous-préfet de Provins demande au préfet de faire droit à cette demande et d’appeler le n ° 6650. En effet, ce propriétaire souhaitait que le remplaçant puisse toucher de l’argent.
33Il existe un autre moyen d’échapper à la conscription, c’est le mariage. Il fallait sur ce point respecter des conditions de date. Le mariage devait avoir eu lieu avant le 23 nivôse an VI. Mais un certain assouplissement se produit dans la pratique51 car il devenait matériellement impossible de rencontrer un seul conscrit qui se soit marié avant cette date. Il faut attendre le 10 septembre 1808 pour que soient dispensées les recrues mariées avant la publication du sénatus-consulte qui mettait leur classe à la disposition de l’État. Il faut bien reconnaître que, si mariage valait exemption, ce moyen n’est pas systématiquement employé par les conscrits de Seine-et-Marne ou du moins pas davantage qu’à la période précédente. Si on observe une augmentation de 1806 à 1809 – mais en 1807 le chiffre des mariages n’est pas plus élevé qu’en 1802 –, l’année 1809 étant une année « record », la décrue s’amorce dès 1810 et se poursuit en 1811. En 1812, la progression reprend. En 1806, 2 421 mariages sont célébrés, en 1807, 2 555, en 1808, 2 714, en 1809, 3 704, mais en 1810, 2 695 seulement, et en 1811, 2 323. En 1812, le nombre des mariages s’élève de nouveau à 2 75752.
34Sur ce point encore, la Seine-et-Marne est à peu de chose près fidèle à la courbe nationale telle que Gustave Vallée l’a établie53. Il décèle un changement à partir de 1808-1809 quand la pratique des levées rétroactives s’étend et que le mariage reprend toute sa valeur comme moyen de dispense. Cependant, contrairement à ce qui se passe en Seine-et-Marne, il constate qu’en 1810, année de paix pourtant, la prospérité économique favorise les mariages alors qu’en 1811, lorsque les levées reprennent, la crise économique et sociale est à l’origine d’une chute de la nuptialité, ce qui tend à prouver que l’évolution de la courbe des mariages n’a pas une cause univoque.
Les réformes
35S’il était difficile et coûteux d’utiliser le remplacement, voire la substitution, existe-t-il un moyen d’échapper à la vigilance des autorités et à celle du conseil de recrutement en obtenant une réforme par des voies malhonnêtes ? Le conseil condamne parfois des conscrits pour des maladies ou des infirmités qui, selon lui, étaient volontaires. Mais certains cas sont ambigus et des conscrits ont pu échapper à la conscription de cette manière sans que le chercheur puisse en évaluer le nombre exact.
36L’importance des réformes est très grande comme le prouvent les procès-verbaux de clôture des séances du conseil de recrutement : mille cent vingt et un réformés dans la classe de 1806, mille trente-huit pour celle de 1807, mille cent quatre-vingt-dix-huit pour 1808, mille deux cent trente pour celle de 1809, mille quatre cent six pour celle de 181054. Pour 1811, il y aurait eu six cent quatre-vingt-douze réformés, pour 1812, cinq cent quatre-vingt-dix-neuf, pour 1813, quatre cent quatre-vingt-dix-neuf. Dans ses rapports, le préfet donne des chiffres un peu différents. Il estime que, sur la levée ordinaire de la classe de 1811, il y eut six cent trente-six réformés, quatre cent quatre-vingt-onze sur celle de 1812, cinq cent vingt sur celle de 181355. Les chiffres du second compte sont nettement inférieurs : neuf cent soixante-treize réformés pour la classe de 1806, huit cent quatre-vingt-deux pour celle de 1807, mille quatre-vingt-un pour celle de 1808, mille cent vingt-huit pour celle de 1809, mille trois cent neuf pour celle de 181056.
37La proportion des réformés est de plus en plus importante. Étant donné la force de chaque classe, ils représentent 29 % de la classe de 1806, 34,8 % de celle de 1807, 41 % de celle de 1808, 43,6 % de celle de 1809, 44,8 % de celle de 1810.
38Hargenvilliers déplorait qu’à la période précédente la moyenne des réformes s’élevât à 40 % en Seine-et-Marne. On a le sentiment qu’après une pause relative en 1806 et 1807 les réformes reprennent de plus belle et retrouvent un niveau « habituel » pour le département. À titre de comparaison, on donnera l’exemple du Var où la proportion ne dépasse jamais 25 %. On peut aussi observer celui du Maine-et-Loire où l’examen de santé, jugé laxiste par Jean-Pierre Bois jusqu’en 1809, aboutit cependant à un nombre de réformes inférieur à celui de la Seine-et-Marne : 25,33 % pour 1806, 33,15 % pour 1807, 37,57 % pour 1808 et 40,50 % pour 1809. En 1810, le taux redescend à 35,83 %, en 1811 à 26,13 % et en 1812 à 20,71 %57.
39L’état sanitaire des conscrits peut expliquer beaucoup de choses. Les réformés pour taille inférieure à la normale sont légion et ces réformes ne peuvent en principe donner lieu à la fraude. Pour les autres, il faut admettre qu’il existe une fraude déguisée contre laquelle luttent les autorités mais qu’elles ne parviennent pas à éradiquer totalement. Elles-mêmes se justifient.
« Le directeur général de la Conscription voit avec surprise le grand nombre des réformes qui ont été prononcées et l’inégalité que présentent les divers cantons. Il demande plus de sévérité de la part du conseil et plus d’égalité. Le préfet répond que, lorsque la classe a été appelée, les conscrits n’étaient âgés que de dix-huit à dix-neuf ans et il en est peu qui à cet âge aient atteint la force et la taille à laquelle ils doivent parvenir. Sur les mille trois cent neuf réformes prononcées par le conseil de recrutement [il y en eut en fait davantage] y en a-t-il six cent quatre-vingt qui ont pour seul motif le défaut de taille des individus. L’inégalité entre cantons provient de motifs établis par la nature de la constitution physique des hommes des différents pays. L’homme, surtout celui qui vit à la campagne, est comme la végétation du pays qu’il habite, il est sain et robuste là où elle est belle et vigoureuse, il est faible là où elle languit […] ainsi dans les cantons de l’arrondissement de Meaux, les hommes sont en général grands, forts, bien constitués, dans ceux de l’arrondissement de Fontainebleau, ils sont, au contraire, généralement petits et faibles […] le nombre des réformes dans le premier de ces deux arrondissements n’a excédé que de trente celui des conscrits réformés dans le second, cependant, la conscription de l’arrondissement de Meaux s’élevait à neuf cent cinq hommes, tandis que celle de l’arrondissement de Fontainebleau à six cent quatre-vingt-dix-neuf58. »
40Mathieu-Dumas réplique cependant en janvier 1811 :
« Le conseil de recrutement doit ajourner les hommes qui ont un défaut de taille et non les réformer. Ainsi, ils sont disponibles pour la levée suivante. On espère que la Seine-et-Marne présentera pour la levée de 1811 des résultats plus avantageux. L’unanimité du conseil de recrutement sur les réformes est suspecte. En général, quand chaque membre met beaucoup d’attention, il y a divergence d’opinions59. »
41De même, en 1811, le sous-préfet de Meaux écrit :
« Les maladies alléguées pour parvenir à l’exemption nous ont paru très multipliées. Les hernies sont assez fréquentes dans le canton de La Ferté à cause des travaux rudes auxquels on emploie les jeunes gens de trop bonne heure dans les carrières à meule. Les humeurs scrofuleuses et la teigne sont, en général, communes (cette dernière surtout, que l’on se plaît à entretenir au lieu d’employer des moyens curatifs), les blessures, suite de brûlures ou de coupures, sont assez communes pour éveiller des soupçons sur leurs causes. Il serait à désirer que le gouvernement obligeât, sous peines fiscales, les parents à déclarer aux autorités les accidents survenus à leurs enfants dans les vingt-quatre heures de l’événement. Les maires devraient prendre des renseignements plus exacts sur les causes et les circonstances de cet accident.
L’examen des conscrits avant le tirage produirait le meilleur effet, l’expérience l’a démontré parce que la plupart des conscrits qui obtenaient un numéro élevé se retiraient sans avoir déclaré leurs infirmités car ils pensaient qu’ils ne seraient jamais appelés60. »
42Il s’agissait d’une plainte rituelle car lors de la levée de 1810 Lagarde s’en était déjà ouvert aux sous-préfets.
« J’ai remarqué dans les levées précédentes un abus qu’il importe de prévenir. La plupart des conscrits qui obtiennent un numéro élevé se retirent sans avoir déclaré leurs infirmités ou déclarent n’en avoir aucune parce qu’ils espèrent n’être jamais appelés. Plusieurs parviennent par ce moyen à se soustraire au paiement de l’indemnité à laquelle ils prévoient qu’ils seraient assujettis si leur réforme était prononcée. Les déclarations des réclamants devront être faites avant le tirage61. »
43Quoi qu’il en soit, il est difficile de faire la discrimination – et le conseil ne pouvait, dans certains cas, qu’avoir des présomptions et des soupçons – entre ce qui relevait de la maladie véritable et ce qui relevait de la mauvaise volonté, les deux étant parfois mêlées.
« Parmi les maladies, la teigne est trop commune, cette maladie peut être entretenue par la malpropreté, il importe que les teigneux soient traités et ne puissent pas prétendre à la réforme pour cette cause. La myopie et la surdité sont plus rares cette année, les mesures sévères adoptées à l’égard de ceux qui feignent ces maladies ont été couronnées de succès62. »
44Pour la levée de 1813, le sous-préfet de Meaux précise qu’il a rappelé aux maires que le préfet voulait que les jeunes gens soient rasés mais les conscrits se « rabattent » alors sur l’ankylose des doigts.
« Nous avons remarqué avec peine cette année qu’il se trouvait beaucoup de doigts ankylosés par la suite d’accidents qui, souvent, ne paraissent pas être l’effet du hasard. Nous avons témoigné combien les causes de ces amputations ou de ces ankyloses pouvaient faire naître de doutes sur la véracité des déclarants et nous avons fait connaître publiquement que nous inviterions le conseil de recrutement à proposer au gouvernement des mesures propres à déjouer ce système de mutilations sur le seul soupçon que la volonté de l’auteur n’y était point étrangère63. »
45Cependant, il fallait payer lorsqu’on était réformé64. Mais un conscrit réformé et insolvable ne payait rien. La réforme est vraisemblablement un moyen détourné pour échapper à la conscription en Seine-et-Marne, bien qu’on ne puisse prendre la mesure de ce phénomène. Au demeurant les autorités le pressentent sans pouvoir maîtriser le problème.
« La classe de conscription de 1813 comparée à celle de 1812 et de 1811 ne présente en Seine-et-Marne aucun résultat qui vienne à l’appui de l’observation faite dans d’autres départements que la plupart des hommes nés en 93 étaient affectés de diverses infirmités.
Cependant, dans la classe de 1813, plus nombreuse, on compte proportionnellement moins de réformes que dans celles de 1811 et 1812. On en attribue principalement la cause à la fermeté du conseil de recrutement, aux mesures prises par le préfet pour instruire les conscrits que ceux qui feindraient des infirmités seraient traités avec rigueur. Le nombre des réformes diminuerait encore considérablement si on avait le moyen de faire guérir les teigneux et de faire servir dans une arme quelconque les conscrits atteints de hernie susceptible d’être contenue et ceux qui ont un ou plusieurs doigts de la main en état de rétraction permanente, autrement, les plus jeunes de ceux qui sont attaqués des mêmes infirmités ne feront rien pour s’en guérir65. »
46Les motifs de réforme des conscrits peuvent être récapitulés à l’aide des registres de décision du conseil. Pour ceux de 1807, le défaut de taille vient en tête avec un pourcentage de 48 %. L’infirmité et la difformité représentent 11, 4 % des causes de réforme, la faiblesse de complexion 8, 7 %, la myopie ou la perte d’un œil 6 %66.
47Pour ceux de 1811 et de 1813, l’énoncé des motifs est beaucoup moins détaillé mais on observe que la difformité arrive largement en tête puis le défaut de taille67. Si une taille insuffisante est une réalité objective, les autres raisons sont plus complexes. Les conscrits avaient donc une certaine latitude pour jouer de cette complexité qui laissait le conseil dans l’embarras. Ses jugements comportent certainement des erreurs qui profitent aux conscrits mais entraînent l’accusation de laxisme par la direction de la Conscription.
48Il a paru suggestif de comparer les réformes prononcées lors de la période impériale avec celles d’une époque ultérieure mais proche dans le temps. L’anthropologie des conscrits de la Restauration établie par Emmanuel Le Roy Ladurie, Jean-Paul Aron et Paul Dumont le permet68. On peut supposer que la fin des guerres napoléoniennes fait disparaître une cause conjoncturelle du refus de la conscription, même si elle ne supprime pas totalement celui-ci. L’étude anthropologique autorise donc une approche de l’état sanitaire réel des conscrits, les maladies de « circonstance » ou les infirmités « prétextes » ayant disparu avec la chute de « l’Ogre de Corse », du moins en Seine-et-Marne. Or il faut constater que le pourcentage des réformés est toujours important et atteint 45,16 % des conscrits69.
49Les dénominations des motifs d’exemption ne sont pas toujours les mêmes que sous l’Empire, néanmoins une continuité apparaît sur beaucoup de points. Le défaut de taille reste toujours une cause essentielle de réforme. 11,4 % des réformés le sont pour cette raison, bien que la Seine-et-Marne n’en ait pas l’apanage puisqu’elle se classe à cet égard au soixante-troisième rang des départements français. La faiblesse de constitution est le second motif, plaçant la Seine-et-Marne au quatorzième rang.
50On trouve ensuite les difformités, non comprise la claudication comptabilisée à part, puis les maladies de peaux pour lesquelles la Seine-et-Marne est au deuxième rang, la myopie et les maladies d’yeux pour lesquelles elle est au quatrième rang – la myopie seule la classant au troisième rang –, les hernies – elle est au dixième rang –, ensuite la perte des dents qui lui assure le huitième rang, enfin la perte des doigts qui touche 0,80 % des réformés mais place la Seine-et-Marne au cinquième rang. Sous l’Empire, la perte des doigts était vraisemblablement dans beaucoup de cas une auto-mutilation pratiquée par les jeunes gens pour échapper à la conscription. Elle était d’ailleurs répertoriée comme telle mais, quand elle était considérée comme involontaire, elle n’était pas toujours clairement différenciée des infirmités des mains ou de l’impossibilité de s’en servir, mentionnées dans les registres du conseil. Or les auteurs de cette étude remarquent que dans la France du Nord, à laquelle appartient la Seine-et-Marne, les doigts coupés résultent d’accidents du travail liés à un type d’économie différent de celui de la France occitane où on peut davantage les attribuer à des mutilations volontaires. La remarque vaut donc aussi pour l’époque impériale70. Somme toute, le bilan de la Restauration n’est pas fondamentalement différent de celui de l’Empire, ce qui confirme l’hypothèse que certains conscrits ne faisaient que tirer parti jusqu’à l’abus des carences ou des déficiences d’un état sanitaire véritablement médiocre, bien qu’il ne fût pas catastrophique comme dans tant d’autres départements.
51Cependant, la guerre continuelle, même si elle se déroulait au loin, aggrave les problèmes médicaux du département, sillonné par les troupes de passage comme sous la Révolution. Selon Richard Cobb, des villages situés en bordure des grandes voies militaires, comme Champdeuil, ou des petites communes du Gâtinais, comme Guercheville, Jacqueville, Achères ou Amponville, connaissent presque sans interruption jusqu’à la fin de l’Empire des épidémies de typhus ou de dysenterie71.
Classes sociales et conscription
52Les remarques précédentes n’infirment pas le fait que la réussite, même tempérée par l’usage abusif des réformes, est indéniable au cours de la période qui s’étend de 1806 à 1812. La population de Seine-et-Marne accepte globalement la conscription, bien que le fardeau qu’elle représente se soit accru et ne touche pas équitablement toutes les classes sociales.
53Le profil social du conscrit de Seine-et-Marne, tel qu’il se dégage des registres matricules du 88e régiment, est conforme à ce qu’il était lors de la période précédente. Le libellé des professions ne permet pas aisément de dégager les fils des notables. La mention de « cultivateur » recouvre des catégories hétérogènes. Par ailleurs, le 88e régiment n’accueille pas tous les conscrits de Seine-et-Marne et on peut penser que, lorsqu’ils avaient plusieurs enfants, les notables ne les faisaient pas tous remplacer et acceptaient le départ de quelques-uns d’entre eux pour les régiments d’élite, la conscription étant alors pour eux synonyme de promotion et de carrière honorifique.
54Il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’une institution inégalitaire.
55Suzanne Lefèvre et Patrick Hautemulle, qui ont étudié la vie économique pendant l’époque consulaire et impériale, jugent qu’étant donné la concentration des propriétés et celle des exploitations, la catégorie dominante en nombre est celle des manouvriers. Citant le relevé de 1808, Suzanne Lefèvre donne un pourcentage de 50 %. Elle y adjoint aussi les domestiques qui sont 11 %72. Il n’est pas exclu que certains de ces manouvriers, à la différence des domestiques, possèdent de toutes petites parcelles, trop petites cependant pour qu’ils puissent être comptés au nombre des propriétaires qui sont 7 %. Patrick Hautemulle est plus optimiste puisqu’il estime à 20 % le pourcentage de ceux qui possèdent des terres dans le département73. Il faut remarquer aussi que la dénomination de propriétaire désigne un état social qui n’empêche pas l’exercice d’une profession, comme la levée des gardes d’honneur en 1813 permettra de l’observer. Et Suzanne Lefèvre pense que, parmi les 10 à 11 % des fermiers et des métayers qui apparaissent dans le relevé de 1808, il en est qui sont aussi propriétaires. Les artisans sont 6 % et sous cette dénomination sont vraisemblablement englobés aussi bien les petits patrons qu’une partie de leurs salariés. Les « établissements industriels », pratiquement tous liés à la transformation des produits agricoles dans ce département rural, sont de taille modeste. Même l’aciérie de Souppes où le machinisme a fait son apparition n’a que vingt ouvriers sous l’Empire74.
56Oublions les doléances intéressées des notables au sujet de l’effet qu’aurait la conscription sur la hausse des salaires et même sur la dépopulation du département, terme largement excessif, même si la conscription est un des facteurs de la baisse du nombre d’habitants. Pour une grande partie des Seine-et-Marnais, la conscription présente des avantages non négligeables et peut même représenter, tout comme certaines levées révolutionnaires, une soupape de sûreté. Ceux qui restent profitent d’une hausse des salaires, même si la conscription n’en est pas la cause unique et si cette hausse est toute relative75. Dans de telles conditions, on comprend aussi tout ce que le remplacement peut avoir d’attraits et pourquoi il n’est nullement remis en question. La période impériale est également un temps de bas prix du blé. Les notables le déplorent mais cela ne pouvait que satisfaire beaucoup d’habitants qui, ainsi, « ramassent les miettes » d’une prospérité qui ne fut pas entamée en 1812 – la récolte de 1811 reste excellente – malgré les intempéries de juin. La ruée des acheteurs parisiens vers les marchés du département risquait d’entraîner une disette factice et en conséquence une montée des prix qui fut enrayée toutefois par des mesures locales et gouvernementales assez rigoureuses76. Le prix des grains en Seine-et-Marne, tout en suivant la courbe générale, demeura bien au-dessous de la moyenne77, ce qui ne manqua pas de contribuer à l’acceptation du régime.
57Les notables attachés à la paix, comme lors de la période précédente, sont-ils lassés des conséquences de la guerre permanente ? Elle freine leurs profits, étant donné que par le biais de la conscription, elle contribue à la croissance des salaires. Et ils sont critiques envers la « faiblesse » du prix des grains. Encore convient-il de distinguer parmi ces notables ceux qui ont des emplois à la Cour et au gouvernement et qui composent une partie des douze fortunes les plus imposées du département, au sein desquels des membres de l’ancienne noblesse ralliés au nouveau régime78 dont on a vu plus haut qu’ils ne résident qu’une partie de l’année dans le département, et ceux dont toutes les attaches se trouvent au contraire en Seine-et-Marne. Les uns et les autres alternent à la présidence du conseil général, tels Lavollée en 1807, Dassy en 1809, Odent en 1811 et 181279 avec le duc de Choiseul-Praslin80 en 1810 et 1813.
58Mais pour les seconds, la tentation est peut-être forte de favoriser l’insoumission, d’autant que dans ce groupe se trouvent les maires. Ils peuvent la faciliter par exemple en employant des réfractaires à salaire réduit. Mais, dans la mesure où l’insoumission des Seine-et-Marnais est faible, où les insoumis employés proviennent d’autres départements et constituent une main-d’œuvre flottante, et à terme dangereuse pour la tranquillité publique, le désir d’ordre l’emporte chez ces notables.
59Il reste le cas de ceux qui, comme lors des appels d’hommes révolutionnaires, sont frappés de plein fouet par le départ d’un fils, c’est-à-dire les petits propriétaires exploitants. Il est significatif qu’on les retrouve parmi ceux qui se font remplacer mais tous ne parviennent pas à le faire. Faut-il penser que leur importance n’est pas assez grande pour que leurs protestations menacent la réussite de la conscription ? Il est très difficile de mesurer leur nombre et il faut garder à l’esprit que la distinction la plus pertinente n’est pas tant entre propriétaires et non propriétaires qu’entre grands et petits propriétaires. La petite propriété est tellement émiettée que ses possesseurs ne sont peut-être pas répertoriés en tant que tels dans les 7 % de propriétaires mentionnés par le relevé de 1808. Suzanne Lefèvre juge que tel est le cas des vignerons81. Plus nuancé quant au rôle de la viticulture, Patrick Hautemulle affirme cependant que la propriété viticole très divisée se trouve entre les mains de vignerons manouvriers obligés de se livrer à d’autres travaux82. En tout état de cause, les structures sociales de Seine-et-Marne ne peuvent constituer un obstacle à l’acceptation de la conscription.
Notes de bas de page
1 Arch. nat., F9 262, Lettre du directeur général de la Conscription au ministre de l’Intérieur, 25 janvier 1807.
2 Ibid.
3 Arch. dép., 4 K 8 et 4 K 16, Registres des arrêtés du préfet.
4 Ibid., 1R 85, Classe de 1808 ; 1R 94, Classe de 1809.
5 Ibid., 1R 111, Classe de 1811, correspondance et arrêtés de répartition du contingent, procès-verbaux des opérations.
6 Ibid., 1R 125, Classe de 1812, procès-verbaux du tirage au sort dressés par les sous-préfets.
7 Ibid., Procès-verbal du sous-préfet de l’arrondissement de Coulommiers, 6 février 1812.
8 Ibid., 1R 34.
9 Arch. nat., AF IV 1124, Compte sur la conscription…, op. cit., tableau 2.
10 Arch. dép., 1R 40.
11 Ibid., 1R 34, Lettre du maire de Montereau au sous-préfet de Fontainebleau, 19 avril 1806.
12 Ibid., Lettre du préfet au sous-préfet de Meaux, 6 juillet 1806.
13 Ibid., 1R 34.
14 Ibid., Lettre du ministre de la Guerre au préfet, 19 décembre 1807.
15 Ibid., Circulaire du directeur général de la Conscription aux préfets, 28 février 1807.
16 Ibid., 4R 1, Vélites, actes d’engagements volontaires et correspondance.
17 Ibid., 4R 6.
18 Ibid., 4R 7, Gardes d’honneur, garde municipale de Paris, circulaire du préfet aux maires, 5 juillet 1809.
19 Ibid., Lettre du préfet au directeur général de la Conscription, 21 septembre 1809.
20 Ibid., 4R 80, Remplacements pour la garde nationale active, 1812 ; 1R 41.
21 Ibid., 4R 80 ; 1R 133, Classe de 1812.
22 Ibid., 1R 146, Classe de 1813.
23 Arch. nat., AF IV 1124, Cahier par départements présentant la situation des sommes de 100 francs placées depuis la création de la Direction générale jusqu’au 1er janvier 1809 pour les conscrits des diverses classes qui ont été admis à se faire remplacer pendant cet intervalle.
24 Archives municipales de Brie, 1 H1, op. cit., arrêté préfectoral du 1er mars 1811.
25 Gustave Vallée, « Le remplacement militaire en Charente (1798-1814) », La Révolution française, tome 80, juillet-août 1927, p. 224-235.
26 Arch. dép., 1R 76, Remplacements conscription de 1806.
27 Ibid., 1R 148, Classe de 1813, renseignements divers et correspondance.
28 Ibid.
29 Gustave Vallée, « Le remplacement militaire en Charente… », op. cit., p. 234.
30 Louis Bergès, Résister à la conscription…, op. cit., p. 270.
31 Gabriel Désert, « Le remplacement dans le Calvados… », op. cit., p. 80.
32 Jean-Pierre Bois, « Conscrits du Maine-et-Loire… », op. cit., p. 490.
33 Michel Marguerite, « La conscription napoléonienne dans le Var… », op. cit., p. 98.
34 Arch. dép., 86 E 32, Étude Opoix, 1812, traité sur remplacement du 7 décembre 1812 ; 1R 147, Contrat notarié du 17 octobre 1812 ; Étude Charrier, Minutes de l’Étude Rémière, traité sur remplacement du 11 novembre 1812.
35 Étude Charrier, Minutes de l’Étude Lestang, traités sur remplacement du 5 juin 1807, des 5 juin et 20 novembre 1809, des 10, 20 avril et 12 septembre 1811.
36 Arch. dép., 86 E 29, Étude Opoix, 1809, Traité sur remplacement du 3 septembre 1809.
37 Étude Charrier, Minutes de l’Étude Lestang, traités sur remplacement des 16 et 26 août et des 10 et 11 septembre 1809.
38 Alain Maureau, « Le remplacement militaire… », op. cit., p. 131. Voir aussi Pascal Chambon, La Loire et l’Aigle…, op. cit., p. 214.
39 Arch. dép., 4 K 10, Arrêtés préfectoraux du 24 octobre au 31 décembre 1808 ; 4 K 11, Arrêtés préfectoraux du 2 janvier au 29 décembre 1809.
40 Étude Charrier, Minutes de l’Étude Lestang, traités sur remplacement du 5 juin 1807, du 20 novembre 1808, du 20 avril 1811 et du 11 novembre 1812.
41 Arch. dép., 1R 117, Classe de 1811, listes nominatives des remplacés, contrat du 6 mai 1811.
42 Ibid., 1R 147, Contrat notarié, 17 octobre 1812.
43 Étude Charrier, Minutes de l’Étude Lestang et de l’Étude Rémière.
44 Ibid., Voir en particulier les traités sur remplacement des 26 août, 10 et 11 septembre 1809 ; Arch. dép., 86 E 29, Étude Opoix, 1809, traité sur remplacement du 3 septembre 1809.
45 Arch. dép., 86 E 32, Étude Opoix, 1812, traité sur remplacement du 7 décembre 1812.
46 Ibid., 1R 117, Classe de 1811, Liste nominative des remplacés.
47 Ibid., 4R 80, Remplacements Garde nationale active.
48 Voir 2e partie, chapitre xi, note 7.
49 Arch. dép., 1R 147, Classe de 1813, Lettre de Dassy au ministre de la Guerre, 15 décembre 1812.
50 Ibid., Lettre du sous-préfet de l’arrondissement de Provins au préfet, 4 novembre 1812.
51 Gustave Vallée, « Population et conscription… », op. cit., p. 212.
52 Adolphe Hugues, Statistique du mouvement…, op. cit., p. 44.
53 Gustave Vallée, « Population… », op. cit., p. 217 sq.
54 Arch. dép., 1R 41 ; dans 1R 40, on trouve pour 1809 1249 réformés avant la levée des 100 000 hommes, pour 1810, 1415, pour 1811, 692, pour 1812, 599. On trouve aussi un bilan provisoire pour 1811 et 1812, 734 réformés pour 1811 et 668 pour 1812. 1R 146 établit un bilan provisoire pour 1813, 499 réformés.
55 Arch. nat., F9 249, État de la comparaison des résultats de la levée ordinaire de la classe de 1813 avec ceux de la levée ordinaire de la classe de 1811 et de la levée ordinaire de 1812, 6 janvier 1813.
56 Ibid., AF IV 1124, Compte sur la conscription…, op. cit., tableau 9.
57 Michel Marguerite, « La conscription napoléonienne…, op. cit., p. 97 ; Jean-Pierre Bois, « Conscrits du Maine-et-Loire… », op. cit., p. 485.
58 Arch. dép., 1R 40, Nouvelles observations et observations sur la levée de 1810, du directeur général de la Conscription au préfet, 17 juillet 1810.
59 Ibid.
60 Ibid., 1R 111, Classe de 1811, procès-verbal du sous-préfet de Meaux, 23 mars 1811.
61 Ibid., 1R 101, Conscription de 1810, circulaire du préfet aux sous-préfets, 10 janvier 1809.
62 Ibid., 1R 125, Classe de 1812, procès-verbal du sous-préfet de Provins, 5 février 1812.
63 Ibid., 1R 145, Conscription, classe de 1813, procès-verbal du sous-préfet de Meaux, 22 octobre 1812.
64 Arch. nat., AF IV 1124, Compte sur la conscription…, op. cit., tableau 10.
65 Ibid., F9 249, État de la comparaison des résultats de la levée ordinaire de la classe de 1813…, op. cit.
66 Arch. dép., 1R 82, Classe de 1807.
67 Ibid., 1R 112, Classe de 1811 ; 1R 146, Classe de 1813.
68 Jean-Paul Aron, Paul Dumont, Emmanuel Le Roy Ladurie, Anthropologie du conscrit français d’après les comptes numériques et sommaires du recrutement de l’armée (1819-1826), Paris La-Haye, Mouton, 1972, coll. Civilisations et sociétés, 28.
69 Ibid., p. 66 et p. 189.
70 Ibid., p. 26.
71 Richard Cobb, La protestation populaire en France de 1789 à 1820, Paris, Calmann-Lévy, trad. française 1975, p. 101.
72 Suzanne Lefèvre, Un département rural sous l’Empire, DES sous la direction du professeur Marcel Dunan, université de Paris, 1952, p. 106.
73 Patrick Hautemulle, L’agriculture dans le département de Seine-et-Marne…, op. cit., p. 13.
74 Suzanne Lefèvre, Un département rural…, op. cit., p. 82.
75 Ibid., p. 118-121.
76 Patrick Hautemulle, L’agriculture dans le département de Seine-et-Marne…, op. cit., p. 63 bis sq.
77 Suzanne Lefèvre, Un département rural…, op. cit., p. 29.
78 Arch. nat., AF IV 1076. Le duc de Choiseul-Praslin est en tête suivi d’un rentier polonais, Grabowski, établi en Seine-et-Marne après la Révolution, puis du conseiller général Fontaine-Cramayel, en même temps deuxième propriétaire de biens nationaux du département, et du comte de Mun, futur président du conseil général sous la Restauration. La Fayette est en neuvième position, Gigault de Crisenoy, président du conseil général en l’an VIII, au onzième rang.
79 Voir la biographie de ces personnages, 2e partie, chapitre i, p. 181-182.
80 Charles Raynard Laure Félix de Choiseul-Praslin (1778-1841), polytechnicien, officier du Génie, est propriétaire du château de Vaux-le-Vicomte et, pour cette raison, maire de Maincy de 1808 à 1814. Sénateur en 1802, il est conseiller général depuis 1803 et président du collège électoral de Seine-et-Marne en 1811. Chambellan de Napoléon de 1809 à 1811, il est fait comte d’Empire en 1810. En 1804 il est considéré comme le premier propriétaire de Seine-et-Marne, second contribuable en 1806, l’un des cinq cent cinquante les plus imposés en 1810.
81 Elle va même jusqu’à dire que la vigne n’est plus, dès cette période, qu’une tradition. Suzanne Lefèvre, Un département rural…, op. cit., p. 20.
82 Patrick Hautemulle, L’agriculture dans le département de Seine-et-Marne…, op. cit., p. 93.
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