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Régis Boyer (traduit du norvégien et présenté par) : Henrik Ibsen : Poèmes

Paris, Les Belles Lettres, coll. « Les Classiques du Nord / Percée », 2006, 253 p.

p. 222-223


Texte intégral

1Il faut saluer brièvement la publication, par l’éminent spécialiste des littératures scandinaves Régis Boyer, des œuvres poétiques d’Henrik Ibsen. En effet, si l’on reconnaît maintenant l’importance mondiale de cet auteur dans la modernité théâtrale, on connaît peu en France ses poèmes, qui ont pourtant largement contribué à sa célébrité en Norvège et en Europe, certes tardive (comme le rappelle Jacques de Decker dans sa récente biographie : Ibsen, Paris, Gallimard, coll. « Folio biographies », 2006, 221 p.) mais durable.

2Il s’agit ici d’un choix de poèmes, conforme à l’édition standard de 1871, auxquels s’ajoutent quelques textes écartés, dont certains extraits des pièces de théâtre. La présentation, particulièrement éclairante, insiste sur les conditions dans lesquelles l’œuvre poétique d’Ibsen a vu le jour, et sur le lien permanent que les poèmes tissent avec l’Histoire. Le lyrisme ibsénien ne peut se comprendre que dans son rapport à la vie personnelle de l’auteur (et notamment à ses difficultés à faire reconnaître son talent littéraire), mais surtout dans son rapport à l’émergence du nationalisme norvégien et à sa progressive libération de l’influence politique et culturelle dano-suédoise. Par ce dialogue continu avec l’Histoire nationale, Ibsen parvient à donner une dimension mythique à des textes dont bon nombre relève de la poésie de circonstance. C’est cet équilibre délicat qui donne sa valeur à ce recueil où l’on retrouve des chefs-d’œuvre encore méconnus en France tels que « Le Mineur » ou « Terje Vigen », qui chantent l’héroïsme national, sans doute, et, par-dessus tout, la résistance de l’homme face au destin ou à la Nature. A travers la traduction de R. Boyer, le lecteur pourra sentir combien ce chant n’est cependant pas celui des certitudes, mais des interrogations humaines : « Je questionne avant tout, je n’ai pas mission de répondre » écrit le poète dans « Une lettre en vers » (p. 186).

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