Les chrétiens et l’histoire universelle dans l’Antiquité tardive
p. 123-136
Texte intégral
1Hervé Inglebert
2Université de Paris X-Nanterre
3L’un des apports majeurs du christianisme à la culture antique a été une nouvelle conception de l’histoire universelle1, et cet aspect a intéressé les historiens modernes2. Certes, les traditions classiques et juives avaient déjà produit des histoires universelles, mais la créativité chrétienne dans ce domaine de l’historiographie antique fut importante. Du point de vue des genres littéraires, les computs, les chroniques universelles et les histoires ecclésiastiques furent les manières chrétiennes d’aborder ce sujet. La reprise de deux thématiques juives, la dispersion des descendants de Noé de Genèse 10 et la succession des quatre empires de Daniel (qui réinterprétait déjà le thème grec de la succession des empires), permirent de penser l’unité de l’histoire humaine. Enfin, les chrétiens ont eu des démarches originales pour réaliser des synthèses entre données classiques et bibliques3.
4L’universalisme du christianisme n’était pourtant pas une évidence originelle. Même si Jésus de Nazareth venait de Galilée, où les contacts avec les Nations et avec les Samaritains étaient nombreux, il a d’abord prêché à Israël. De même, si Paul de Tarse s’est bien défini comme l’apôtre des Gentils, ces derniers étaient avant tout les craignant Dieu proches des synagogues. Pour que le christianisme puisse devenir une religion universelle, il a dû accepter de devenir prosélyte, et pour le devenir, abandonner, comme fondement identitaire, la fidélité envers la Torah pour la foi au Christ. Ceci ne s’est produit réellement qu’après 70 (la rédaction de Matthieu 28, 19 en est un bon indice), et ceci a permis ensuite, après 150, aux chrétiens de concevoir une histoire universelle nouvelle. Pour apprécier ce phénomène, on va rappeler quels furent les héritages classiques et juifs, puis analyser les deux grandes manières chrétiennes d’écrire l’histoire universelle, par juxtaposition et par intégration.
5Chez les Grecs et chez les Romains qui les imitèrent, l’universalité historique ne fut pas une donnée première (elle est absente chez Hérodote qui ne parle pas de l’Occident), mais fut le produit d’une construction progressive. En fait, l’idée d’une histoire universelle de l’humanité semble être gréco-romaine car c’est l’extension de l’empire de Rome qui fut le modèle concret permettant aux Grecs de penser cette universalité dès le IIe siècle avant notre ère4. L’histoire universelle fut abordée dans deux types d’œuvres, les chroniques et les histoires. Les chroniques universelles ont intégré des données grecques, orientales (Ctésias, Bérose et Manéthon) et romaines comme le montrent, vers 60 av. J.C., les travaux de Castor de Rhodes, de Varron et de Cornélius Népos. Cette chronique mondiale était celle de la civilisation définie par les aspects politiques, militaires, cultuels et culturels. L’universalité temporelle de ces chroniques universelles s’étendait sur plus de deux millénaires : ainsi, la Chronique de Castor de Rhodes allait des règnes de Ninus en Babylonie et d’Aegialus en Grèce (2123 av. J.C.) à 60 avant notre ère. Quant à l’universalité spatiale, elle était obtenue par une double théorie diffusionniste et agrégative. En effet, la civilisation, définie par l’agriculture, un pouvoir politique organisé et par les inventions techniques, était diffusée par les conquêtes, celles des Assyriens, des Grecs, des Romains, ou acceptée par des envahisseurs extérieurs comme les Parthes. La zone de civilisation, qui incluait la Grèce, le Proche-Orient et l’Égypte, s’était, par conquête et colonisation, peu à peu étendue aux limites de l’oikouménè, telle qu’elle était conçue par Ératosthène et Strabon, de l’Atlantique au Gange.
6À côté des chroniques universelles, les histoires universelles tentaient d’ordonner les données par la causalité, et non seulement par la chronologie. On peut distinguer trois types d’histoires universelles, illustrés par Polybe, Diodore de Sicile, et Trogue Pompée. Polybe écrivit une histoire qu’il qualifiait d’ » œcuménique », c’est à dire une histoire de l’oikouménè, du monde habité, de 264 à 168 puis à 146145 av. J.C., de la première guerre punique à la destruction de Carthage et de Corinthe. Pour lui, l’universalité de l’histoire n’était pas une donnée première, mais le résultat de l’expansion romaine. Pour Polybe, l’histoire devenait universelle avec Rome, parce que pour la première fois une même puissance politique dominait les trois continents, l’Europe, l’Afrique et l’Asie. L’universalité était donc géographique et contemporaine : les comparaisons avec les hégémonies antérieures, celle des Assyriens, des Perses ou des Macédoniens, montraient que ces dernières n’étaient pas « œcuméniques » d’un point de vue géographique : l’universalité dans l’histoire était donc une originalité romaine. Cette domination de l’espace par Rome était par ailleurs pour Polybe un gage de sa durée temporelle : l’histoire, devenue universelle et romaine, le resterait. Par sa domination tricontinentale, Rome n’avait pas à craindre une nouvelle puissance extérieure et le seul danger de déclin ne pouvait provenir que de problèmes internes. Chez Polybe, l’histoire universelle n’était donc pas une donnée première mais ultime : l’histoire universelle dans l’espace devenait une histoire éternelle dans le temps. La domination romaine serait sans fin, et le thème fut repris par Virgile, qui définit le destin de Rome par un imperium sine fine où l’absence de limite géographique signifiait également l’assurance d’un pouvoir éternel. Les chrétiens appliquèrent ensuite cette théorie de l’universalité présente et future à l’Église conçue comme « l’empire du Christ ».
7Un siècle après Polybe, vers 5040 av. J.C., Diodore de Sicile écrivit une « histoire commune », une koinè historia, qui était fort différente. Diodore désirait montrer que l’universalité culturelle et politique des temps historiques, qui fut réalisée par Alexandre et Rome, n’était en fait que la répétition d’une autre universalité datant des temps « mythiques » (mal connus), et déjà réalisée par Dionysos en Orient et Héraclès en Occident. L’époque « mythique » (avant la guerre de Troie) fut en effet selon Diodore le temps où les héros civilisateurs firent passer l’humanité de la sauvagerie à la civilisation. Les grands hommes ultérieurs, ceux des temps historiques, ne firent que répéter cette geste héroïque, et l’Empire romain réalisait de manière durable, voire éternelle, la conquête d’un espace géographique déjà exploré par les héros grecs. Diodore écrivit une histoire universelle depuis les débuts de l’humanité, et utilisa pour cela les mythes, des chronologies orientales et des reconstructions philosophiques probables sur l’humanité primitive. Cela l’amena à proposer une histoire religieuse de l’humanité antérieure à l’histoire politique, objet habituel des chroniques. Lactance ou Eusèbe de Césarée devaient plus tard proposer une histoire religieuse de l’Antiquité s’achevant avec le christianisme.
8Une troisième manière d’écrire l’histoire universelle fut celle de Trogue Pompée et peut-être de Nicolas de Damas, et elle date de l’époque augustéenne. Elle peut être appelée pasa historia, « histoire générale », ou katholikè historia, « histoire universelle » (selon les manuscrits de Nicolas de Damas). Trogue Pompée rédigea vers 29 de notre ère une histoire universelle en quarante-quatre livres intitulée Histoires philippiques qui ne nous est parvenue que par l’abrégé qu’en fit un certain Justin à une date inconnue, que l’on estime traditionnellement vers 200 de notre ère5. Cette histoire universelle en latin utilisa des sources et des modèles grecs, peut-être une histoire universelle de Timagène, mais y ajouta certains développements sur l’histoire de la Méditerranée occidentale. L’histoire antérieure à Ninus est quasiment absente, et c’est la succession des empires qui rythme le déroulement du récit, avec les royaumes assyrien, mède, perse, macédonien, puis Rome, qui partage néanmoins la domination du monde avec les Parthes. L’histoire, dont le moteur est la guerre de conquête, se déroule donc de manière continue de Ninus à Auguste. Un peu avant lui, Nicolas de Damas6 avait suivi un plan chronologique depuis l’Assyrie de Sémiramis – et sans doute avant elle depuis Ninus – à la Rome d’Auguste et fut sans doute le premier à mêler l’histoire biblique et juive à l’histoire universelle. On sait qu’ensuite de nombreux chrétiens proposèrent des exégèses des quatre empires de Daniel, dans la lignée de cette « histoire générale ».
9Ainsi, dans la tradition classique, l’universalité spatiale était réalisée par les grands empires dont Rome était le dernier et le modèle le plus achevé7. L’universalité humaine était conçue comme celle de la diffusion de la civilisation, définie par les techniques et un pouvoir politique. Enfin, l’universalité temporelle était conçue de trois manières. Diodore de Sicile supposait une double universalité entraînant l’unité de l’humanité, une ancienne par diffusionnisme (histoire des religions, progrès des techniques), et une récente par les conquêtes macédoniennes et romaines. Castor et Trogue Pompée concevaient une universalité structurée par la succession des empires. Polybe pensait une universalité romaine récente et qui perdurerait dans l’avenir.
10Le problème de l’universalité fut posé très différemment dans les traditions bibliques et juives. L’universalité de l’histoire humaine était affirmée a priori avec les récits sur Adam et Noé, et la Bible fournissait une chronologie universelle depuis les débuts de l’humanité, sur laquelle des historiens, influencés par des modèles grecs, pouvaient s’appuyer. Eupolémos écrivit un livre Sur les rois de Juda, où il utilisait la Septante, comptant 5149 ans d’Adam à l’année 158157 av. J.C.8. Ensuite, Flavius Josèphe, dans ses Antiquités juives, décrivit la période d’Adam à 66 apr. J.C., en utilisant des auteurs profanes pour compléter les écrits bibliques. Juste de Tibériade9 retraça vers 9294 de notre ère les généalogies des rois hébreux depuis Moïse, contemporain selon lui du premier roi d’Argos, jusqu’à la mort d’Agrippa II. D’autres éléments grecs influencèrent parfois l’écriture juive de l’histoire. Vers 165 av. J.C., Daniel fut une apocalypse d’un genre nouveau, car elle intégrait un schéma hellénistique de succession des quatre empires, adapté à l’histoire juive (Babylone, Mèdes, Perses, Macédoniens). De même, aux IIe et Ier siècles, certains auteurs (Pseudo-Eupolémos, Oracles Sibyllins III, Artapanos, Cléodème Malchos) tentèrent des synthèses entre la Bible et des mythes grecs afin d’intégrer l’histoire biblique à l’histoire universelle. Les éléments juifs de l’histoire universelle furent donc : une chronologie depuis la Création, avec une variante courte fondée sur le texte hébreu (vers 150 de notre ère, le Seder Olam Rabbah utilisa pour la première fois l’ère de la Création de manière continue, et décrivit l’histoire d’Adam à la révolte de Bar Kokhba10), et une variante longue fondée sur le texte de la LXX ; et une ethnographie générale dérivée de Genèse 10. Mais l’histoire universelle ne concernait l’humanité qu’au début, d’Adam à Babel, et à la fin, au Jour du Seigneur11. Or, le temps mythique et le temps eschatologique étaient en dehors du temps historique des Grecs ; et entre Babel et la fin des temps, l’histoire biblique ne concernait qu’Israël. Cependant, cette histoire sainte devint obscure avec l’échec des révoltes juives contre Rome en 70 et 135. Les rabbis condamnèrent alors les spéculations eschatologiques et abandonnèrent l’écriture de l’histoire pour le commentaire de la Torah atemporelle.
11En revanche, pour les chrétiens qui reprenaient les catégories bibliques, l’histoire sainte se poursuivait, car l’enseignement du Christ inaugurait le temps de la mission et de l’Église. L’histoire du salut fut donc la manière chrétienne de penser l’histoire sainte. L’histoire de l’humanité pouvait être certes conçue comme rythmée par de grandes étapes théologiques, comme chez Paul de Tarse (avant la Loi, sous la Loi, sous la Grâce). Mais la rencontre avec la culture classique amena les chrétiens à interpréter l’histoire biblique de manière plus historique et à réinterpréter de manière chrétienne l’histoire universelle des Grecs et des Romains. Ils le firent de deux manières, par juxtaposition et par intégration.
12Les premières tentatives de juxtaposition des apports historiographiques bibliques et classiques furent faites vers 180. Théophile d’Antioche combina deux chronologies, une vétérotestamentaire et une romaine, en ignorant les Grecs, les peuples d’Orient et Jésus-Christ12. Clément d’Alexandrie procéda autrement13 : en utilisant Tatien et les chronographes juifs hellénistiques, il réalisa des synchronismes plus complets ; de plus, sa chronologie universelle, si elle suivait la Bible d’Adam à la prise de Jérusalem par Nabuchodonosor, reprenait ensuite la succession des rois perses et lagides et les empereurs romains14.
13Jules Africain, vers 220, intégra dans ses Chronographies des données bibliques, orientales, grecques, italiennes. Il réalisa ainsi des synchronismes, dont la finalité était de montrer la primauté chronologique de la tradition monothéiste, en présentant les dieux du paganisme comme des tardvenus dans une optique evhémériste. Il semble que son récit ait été structuré par l’histoire biblique et que les synchronismes aient été secondaires et non systématiques15, comme dans la tradition judéo-hellénique dont il s’inspirait.
14Vers 235, Hippolyte de Rome réalisa une Chronique en combinant une histoire biblique d’Adam à Esdras, puis des listes de rois perses, macédoniens et d’empereurs romains, reprises à Clément d’Alexandrie et à Jules Africain. Les mentions profanes étaient rarissimes : les nations étrangères n’étaient citées que parce qu’elles étaient déjà présentes dans la Bible, en relation avec Israël (comme Babylone ou Cyrus). L’intégration du passé des peuples non bibliques était donc très limitée, et s’opposait ainsi à la démarche de Jules Africain. Ce parti pris était si évident que les traductions ultérieures en latin ou en arménien ajoutèrent quelques éléments profanes, afin de rendre l’histoire du monde plus intelligible. L’histoire d’Hippolyte n’était universelle que dans le temps, et nullement dans son extension ; en cela, elle était très proche des modèles juifs palestiniens de l’histoire. L’intégration d’éléments classiques ethnographiques, le Diamérismos, et géographiques, le Stadiasmos, ne servait qu’à illustrer la dispersion des descendants de Noé après Babel16. On retrouve une telle histoire religieuse biblique et chrétienne vers 400 dans le Liber genealogus, et dans la Chronique de Sulpice Sévère, achevée en 403. Une variante syriaque de cette histoire biblique fut la première version (du IIIe siècle) de la Caverne des Trésors, dont la structure est fondée sur les générations17 et les millénaires18, d’origine juive. Cependant, vers 400 chez les Grecs, et après 600 chez les Latins et les Arméniens, un tel type d’histoire a pu paraître incomplet car trop peu ouvert sur l’histoire des nations, ce qui explique les ajouts d’histoire profane qu’on trouve ensuite dans les traductions.
15Vers 300310, dans sa Chronique, Eusèbe de Césarée distingua les connaissances sur le passé des peuples19, la Chronographie, où il donna une information plus large que celle de Jules Africain, et la chronologie, les Canons. La présentation synchronique en tableaux synoptiques, qui était une originalité eusébienne, permettait d’avoir une chronologie commune continue en années d’Abraham et de percevoir immédiatement les synchronismes. Eusèbe refusa de prendre en compte les données égyptiennes ou babyloniennes antérieures à Abraham, considérant méthodologiquement que sans comparaison possible entre texte profane et sacré, l’écriture de l’histoire n’était pas possible (cette attitude ruinait toute spéculation millénariste). Eusèbe rédigea donc une chronique moins universelle dans le temps que celles de ses prédécesseurs, mais qui était plus universelle du point de vue spatial et du point de vue des thématiques (car incluant les aspects politiques, militaires, religieux et culturels). Par la prise en compte des royaumes (inspirée par la tradition de la succession des empires et par le rôle exceptionnel de l’Empire romain), l’histoire divine s’étendait au-delà de l’histoire biblique.
16Enfin, les chroniqueurs alexandrins Panodoros et Annianos composèrent chacun, vers 400 pour le premier, vers 412 pour le second, une chronique universelle. Ils se démarquaient du travail d’Eusèbe20 sur deux points. Le premier était la datation de l’Incarnation, que les deux Alexandrins plaçaient comme Jules Africain et Hippolyte de Rome vers 5500 du monde, et non vers 5200 comme Eusèbe. Mais surtout, la Chronique de Panodoros affirmait pouvoir réaliser les synchronismes entre texte sacré et sources profanes pour les temps antédiluviens. Ceci permettait d’intégrer les données de Manéthon et de Bérose dans une chronique biblique universelle. On aboutissait ainsi à une intégration totale de l’histoire profane dans une histoire universelle dans le temps et l’espace, dont la chronologie et l’orientation restaient bibliques et chrétiennes.
17En Occident, après la traduction des Canons d’Eusèbe par Jérôme21, Prosper en 433455, un chroniqueur anonyme gaulois en 511, Cassiodore en 519, Isidore en 614630, réalisèrent des chroniques universelles. Mais malgré l’ajout d’un résumé biblique pour la période d’Adam à Abraham, ces œuvres ne reprirent guère la richesse d’information de la Chronique d’Eusèbe. Prosper revint même à une conception hippolytéenne, car pour lui, l’histoire était avant tout sacrée et ne devenait universelle que par l’évangélisation qui concernerait un jour tous les peuples. Cette universalité spirituelle, dont le centre était la Rome pontificale, intégrait les nations dont la seule histoire était celle du salut à venir et non des faits du passé. Enfin, dans les livres XVIXVIII de la Cité de Dieu, Augustin fit un parallèle entre l’évolution de « Babylone », la cité terrestre, représentée par les empires assyrien et romain, et celle de la cité de Dieu, symbolisée par les croyants monothéistes de l’histoire biblique, puis par l’Église. Mais les synchronismes systématiques avec les Assyriens, les Égyptiens, les Grecs, les Romains, n’étaient là que pour montrer l’antériorité de la cité de Dieu sur les traditions païennes. L’information d’Augustin était universelle, comme chez Eusèbe, mais son projet théologique séparait les informations profanes et sacrées au moment où il les réunissait dans un synchronisme. Ainsi, Augustin apparaît dans la Cité de Dieu comme réalisant une synthèse occidentale des deux traditions hippolytéenne et eusébienne.
18Ainsi, on peut dégager deux grandes manières d’écrire l’histoire universelle par juxtaposition chez les chrétiens. La première, d’origine juive et judéo-chrétienne, et développée par Hippolyte de Rome insistait sur l’universalité temporelle et sur la succession de ceux qui avaient transmis la doctrine monothéiste d’Adam aux évêques. Les autres nations n’étaient éventuellement citées qu’à l’origine, dans le cadre de l’exégèse de Genèse 10, et ensuite uniquement si elles entraient en contact avec le peuple de Dieu. Cependant, la mission chrétienne pouvait intégrer progressivement les peuples dans cette histoire du salut, identifiée avec celle de l’Église depuis le Christ, qui deviendrait universelle au fur et à mesure que le christianisme s’étendrait. Si on la rapproche des modèles classiques, cette conception chrétienne d’une universalité à venir, obtenue par la combinaison d’une histoire sainte biblique et d’une idée de mission universelle, est de type polybien.
19La seconde tradition supposait en revanche que l’histoire était universelle depuis les origines. Il s’agissait d’une reprise chrétienne de l’idée hellénistique d’unité culturelle22. Chez Clément ou Eusèbe, l’histoire profane était une histoire divine même si elle n’était pas une histoire sacrée, car les différents peuples voyaient leur histoire se fondre dans celle de la sagesse ou de l’empire de Rome qui les absorbait au fil du temps. Et pour Origène et Eusèbe, cette unification de l’histoire était la préparation de la diffusion de la vérité monothéiste, d’abord dans l’Empire, puis dans le monde entier. Rome réalisait une première universalité qui préparait celle, supérieure, de l’empire du Christ qui s’étendrait au-delà des frontières de Rome. Eusèbe combina la tradition érudite de Diodore – tous les peuples participaient à une histoire commune –, et une conception dynamique de l’universalité de l’Église – sur un modèle polybien –, car l’historien, désormais ecclésiastique, savait que l’histoire de l’empire de Rome était au service de la christianisation. Après lui, Panodoros paracheva le travail de compilation érudite en intégrant les données antédiluviennes profanes dans la tradition biblique. Toute l’histoire de l’humanité convergeait ainsi vers le christianisme.
20Une troisième manière d’exprimer l’histoire universelle était d’utiliser le schéma de la succession des empires, en lui donnant une signification divine et chrétienne grâce à la présence de ce schéma dans Daniel. Seul Orose, dans ses Histoires contre les païens, publiées en 417, allia par la théorie des quatre empires l’universalité temporelle, en commençant avec Adam (même s’il négligea la période d’Adam à Abraham-Ninus), à l’universalité spatiale, en prenant en compte l’oikouménè. Mais si la théorie des quatre empires d’Orose est originale avec ses équivalences entre les royaumes et les points cardinaux et le parallèle entre les empires babylonien et romain, l’absence quasi totale des Hébreux et des Juifs posait problème. Orose écrivit une histoire divine chrétienne d’où la tradition biblique était absente, aux antipodes des conceptions d’un Hippolyte de Rome. Cette tentative, où Orose apparaît comme un Trogue Pompée chrétien, n’eut pas de successeurs.
21De Jules Africain jusqu’à Panodoros et Annianos, les notices entre l’histoire profane et l’histoire biblique furent juxtaposées, mais séparées. En revanche, après 500, on réalisa un autre type d’histoire universelle, par intégration, en supposant que différentes histoires pouvaient être identiques, et qu’une fois éliminées les déformations dues aux variantes linguistiques, on pouvait retrouver une unique histoire commune. Cette manière d’écrire l’histoire, qui simplifiait considérablement le passé, était fort ancienne et remontait à Hérodote, voire à Hécatée de Milet. Elle fut d’abord appliquée aux dieux et à certains héros civilisateurs23, puis à des peuples comme les Étrusques ou les Latins, que l’on raccrochait à l’histoire commune hellénique grâce à des origines lydiennes ou troyennes. À l’époque hellénistique, la théorie évhémériste et les prétentions de chaque peuple à avoir créé la civilisation commune donnèrent un nouvel essor à ces pratiques. En étendant la méthode d’historicisation des mythes à ceux de tous les peuples, l’anachronisme allié au synchronisme permettait d’écrire une histoire globale. Ainsi, dans sa Chronique, Castor de Rhodes mentionnait Bélos, roi des Assyriens qui, avec ses Cyclopes armés par Ahura-Mazda, combattit les Titans, dont faisait partie Héraclès, et dont un des rois fut Ogygos24. Diodore, lui, présentait Teutamos, vingtième roi d’Assyrie aidant militairement Priam contre les Grecs, en lui faisant parvenir des troupes éthiopiennes et susiennes commandées par Memnon25. À la fin de l’époque hellénistique, les érudits étaient parvenus à fondre les traditions méditerranéennes et proche-orientales, de Bélos, premier roi assyrien, à Jules César ou Auguste, dans une histoire commune. Les Juifs s’inscrivirent eux aussi dans ce mouvement historiographique commun. Le point le plus délicat et le plus important pour eux était la relation entre les fils de Noé et les diverses histoires nationales : comment combiner la table des nations de Genèse 10 avec les chroniques hellénistiques ? Diverses réponses furent données du IIe siècle av. J.C. au Ier siècle apr. J.C., qui permettaient d’identifier les premiers rois des nations à des descendants de Noé. Il y eut ainsi des identifications entre Noé et Deucalion26, entre Noé et Ouranos27, entre le Titan Japet et le fils de Noé Japhet28, entre Moïse et Musée29 ; et on vit Héraklès épouser une petite fille d’Abraham30. Les chrétiens reprirent cette méthode de synthèse entre les histoires profanes et les thèmes bibliques. Au IVe siècle, les écrits pseudo-clémentins proposèrent des équivalences entre Zoroastre et Mestraïm, fils de Cham, ou entre Ninus d’Assyrie et Nemrod, petit-fils de Cham31. Eusèbe fit le parallèle entre les dix générations d’Adam à Noé et les dix rois antédiluviens de Bérose pour en conclure avec Polyhistor et Flavius Josèphe que Xisousthros et Noé étaient identiques32. Deux siècles et demi plus tard, Cosmas Indicopleustès reprit cette problématique, avec une identification systématique entre patriarches et rois chaldéens33.
22Mais vers 500, une nouvelle tradition chrétienne apparut, qui systématisa les histoires syncrétistes classiques, juives et chrétiennes antérieures pour créer une histoire commune. Un exemple nous en est donné dans l’original grec perdu du Barbarus Scaligeri34, chronique alexandrine qui situait l’existence de Picus-Ninus, fondateur de Ninive, mari de Sémiramis, puis roi d’Italie, au temps des Juges hébreux. Le fils de Picus, Faunus, régnait sur l’Italie puis allait ensuite en Égypte où il fut appelé Hermès Trismégiste. Les synchronismes avec la Bible fondaient une histoire universelle commune, mais le modèle grec du Barbarus donnait une datation trop basse au début de l’histoire profane, ce qui l’amena à des contradictions chronologiques insolubles35.
23La Chronique de Jean Malalas36, rédigée vers 53037, proposa une solution différente, à partir des Jubilés et de l’original grec du Barbarus38. Suivant le récit de la Genèse, Malalas signale l’existence de Nemrod, fondateur de Babylone, fils de Chus l’Éthiopien et petit-fils de Sem39. Mais il mentionne un autre descendant de Sem, Kronos, fils de Damnos, qui fut d’après lui le premier à régner (alors que la tradition biblique disait que c’était Nemrod). Ce premier roi des Assyriens avait pour épouse Sémiramis-Rhéa, et est donc à identifier avec le Ninos, fils de Bélos, de la tradition grecque classique. Mais chez Malalas, ces noms n’apparaissent qu’ensuite, car Kronos a pour fils Picus-Zeus et Ninus, et le premier a un fils qui s’appelle Bélos40. Ensuite, Kronos abandonna l’Assyrie pour aller conquérir l’Occident, où Picus-Zeus vint le rejoindre ensuite pour régner sur l’Italie41. Après lui, son fils Faunus-Hermès lui succéda, avant d’aller s’installer ensuite en Égypte, que dirigeait Mestraïm, descendant de Cham, à qui il succéda. Ensuite, Héphaistos devint roi en Égypte42. Malalas datait ces événements de manière bien plus précoce que l’original grec du Barbarus, et il créa des liens avec les généalogies bibliques, puisque les personnages mythologiques et bibliques partageaient la même histoire, sans toutefois être identifiés. Ainsi, chez Malalas, l’histoire commune commençait avec Noé et ses fils. À partir de ce tronc commun, les histoires nationales étaient ensuite étudiées de manière autonome, reliées à l’ensemble par quelques synchronismes. Cette présentation de l’histoire universelle comme unification générale des traditions classiques et bibliques fut ensuite reprise dans la tradition grecque ultérieure43, mais aussi, plus tardivement chez les Latins44, les Syriaques45 et même chez les Coptes, avec Jean de Nikiou46, qui couvrait la période allant d’Adam au règne de Constant II (641668). Un témoin grec de cette histoire universelle chrétienne est la Chronique pascale, rédigée vers 630 par un clerc de Constantinople. Après la dispersion des nations, l’histoire commune commence et le schéma général est à peu près le même que chez Malalas47. Mais les histoires nationales sont moins développées que chez Jean Malalas, car dans la Chronique pascale, si l’histoire commune est développée entre Noé et Abraham, elle est absente ensuite d’Abraham aux rois de Juda, et ne reprend qu’avec le début des Olympiades. On obtient donc une histoire universelle en trois phases : commune et mythique, sacrée et biblique, commune et historique.
24Ainsi, l’intégration des traditions mythiques profanes dans l’histoire biblique, encore ignorée des chroniqueurs alexandrins vers 400 et attestée chez l’original du Barbarus et Malalas devint-elle ensuite relativement fréquente ensuite. Les traductions et les continuations montrent que cette forme d’histoire répondait à un besoin, celui de la présentation d’une histoire universelle reliée au cadre ethnographique biblique. On passa donc vers 500 d’une histoire par synchronismes à une histoire par syncrétismes. L’histoire commune prenait son origine dans la dispersion des peuples noachiques, était structurée par l’émergence des pouvoirs monarchiques, se divisait ensuite dans les différentes histoires nationales, puis était réunifiée par l’Empire romain qui rassemblait les peuples, et était enfin parachevée par le christianisme. Ce schéma pouvait ensuite intégrer d’autres histoires nationales.
25Dans la Bible, l’histoire était structurée par la relation entre Dieu et son peuple, et était donc une histoire sainte. Mais pour les Juifs, après l’écrasement des révoltes en 70 ou 135, l’histoire n’était plus que le temps arrêté de la méditation de la Loi. Chez les chrétiens, en revanche, l’histoire sainte biblique devint le devenir chrétien du salut, grâce à l’idée de la mission universelle, qui fut transformé en une histoire chrétienne lorsqu’on y introduisit les savoirs grecs sur la chronologie. Mais l’histoire chrétienne ne naquit pas seulement de la rencontre entre la tradition biblique (universalité temporelle) et la paidéia hellénistique (universalité spatiale et ethnographique) ; cette rencontre avait déjà eu lieu dans le judéo-hellénisme palestinien et alexandrin, et n’avait produit qu’une histoire gréco-orientale particulière. Il fallait un thème capable de réunir ces deux dimensions dans une synthèse dynamique. Mais les aspects théologiques chrétiens sont également insuffisants pour expliquer l’apparition d’une histoire chrétienne : l’affirmation de la messianité de Jésus de Nazareth pouvait produire une théologie de l’histoire, mais pas nécessairement une historiographie. Et si l’idée de mission entraînait l’existence d’un devenir du salut marquant le passé et l’avenir du temps humain, cela ne suffisait pas non plus pour fonder une écriture de l’histoire universelle, comme le montre la tradition syriaque des premiers siècles.
26Pour produire l’histoire universelle chrétienne, il fallut la rencontre entre des idées bibliques et la paidéia, comme au temps de l’histoire juive hellénistique, mais aussi la rencontre entre la théologie chrétienne de la mission et l’universalité romaine. La mission universelle chrétienne commença dans l’Empire romain, avec les voyages de Paul de Tarse, puis avec la conversion de païens lettrés. En insérant dans leurs problématiques théologiques la culture universelle hellénistique et l’espace universel politique romain, les chrétiens n’écrivirent pas une histoire ethnique de plus, mais une histoire universelle nouvelle, dont les méthodes restaient cependant classiques. La finalité restait la même que chez les Juifs, le triomphe final du monothéisme, mais la dynamique était différente, puisque pour les chrétiens, l’histoire sainte se réalisait effectivement dans l’extension contemporaine du christianisme. Ainsi, l’idée juive d’un avenir eschatologique fut reprise par les chrétiens avec des perspectives historiques intermédiaires : la mission universelle, l’histoire ecclésiastique, l’Empire romain chrétien. Les Grecs de l’époque impériale avaient pensé que la signification de l’histoire était la réalisation d’un projet – l’expansion de la paidéia – tenté par Alexandre mais que seule Rome avait réussi. Cette conception d’un destin finalisé, achevé et arrêté, fut christianisée : Origène et Eusèbe affirmèrent que Rome était en réalité au service du christianisme. L’histoire universelle chrétienne fut donc une synthèse d’éléments juifs (universalité temporelle), grecs (universalité culturelle hellénistique) et romains (universalité géographique), structurée par des intuitions théologiques chrétiennes (la mission universelle). L’universalité chrétienne, c’est-à-dire l’édification de l’Église en un empire du Christ plus vaste que celui de Rome, récapitulait ainsi toute l’histoire humaine.
Notes de bas de page
1 H. Inglebert, Interpretatio Christiana. Les mutations des savoirs (cosmographie, géographie, ethnographie, histoire), dans l’Antiquité chrétienne (30630 après J.C.), Paris, 2001, p. 463-533.
2 Vois par exemple A. Momigliano, « The origins of universal history », Annali della Scuola Normale Superiore di Pisa, série III, vol. XII, fasc. 2 (1982), p. 533-560, repris dans Settimo contributo alla storia degli studi classici e del mondo antico, Rome, 1984, p. 77103 ; B. Croke, « The Origins of the Christian World Chronicle », History and Historians in the Late Antiquity, Sydney, 1983, p. 116131 ; W. Witakowski, The Syriac Chronicle of Pseudo-Dionysos of TelMahre, Uppsala, 1987, p. 59-75.
3 On n’abordera pas ici tous les thèmes de l’historiographie chrétienne liés à l’histoire universelle. En particulier, on ne développera pas les aspects théologiques des datations (relation eschatologique avec la création du monde, liens avec les fêtes liturgiques, comme celle de Pâques dans la Chronique Pascale).
4 H. C. Baldry, The Unity of mankind in Greek Thought, Cambridge, 1965, p. 173-193.
5 J.M. Alonso-Nunez, « An Augustean World History : the Historiae Philippicae of Pompeius Trogus », Greece and Rome, 34 (1987), p. 5672, pense que Justin a traduit Trogue Pompée avant 226 et l’établissement de la dynastie perse des Sassanides.
6 On peut désormais utiliser la thèse dactylographiée d’E. Parmentier Morin, L’œuvre historique de Nicolas de Damas, soutenue à Paris X-Nanterre en mars 1998, qui offre une nouvelle édition, avec traduction et commentaire, des fragments de Nicolas de Damas.
7 C’est ce que sous-entend également l’Histoire romaine d’Appien, organisée sur un modèle géographique.
8 B. Z. Wacholder, Eupolemus. A study of Judaeo-Greek Literature, New York, 1974, p. 7.
9 A. Barzano, « Giusto di Tiberiade », ANRW, II, 20, 1 (Berlin, 1987), p. 337-358.
10 L. F. Giron-Blanc, Seder Olam Rabbah. El gran orden del Universo, Estella, 1996. Dans le Seder Olam Rabbah, le fait de ne se fonder que sur les écrits bibliques amena l’auteur à confondre Darius Ier et Darius III, et à faire disparaître la période 490-335, d’où un décalage d’un siècle et demi avec la chronologie réelle : Seder Olam Rabbah, 30, 4, affirme que l’empire des Mèdes et des Perses n’a duré que 52 ans.
11 Isaïe, 42, 4 et 6 ; 49, 6 ; Hymnes de Qumrân, J, VI, 12 (Écrits intertestamentaires, p. 256).
12 Théophile d’Antioche, Ad Autolycos, III, 27.
13 R. Mortley, « The Past in Clement of Alexandria », E. P. Sanders, Jewish and Christian Self-Definition, t. 1 : The Shaping of Christianity in the Second and Third Centuries, Londres, 1980, p. 186200, qui analyse Stromates, I, 21.
14 Clément d’Alexandrie, Stromates, I, XXI, 140, 16 : compte des années depuis Adam au Déluge, 2148 ans et 4 jours ; de Sem à Abraham, 1250 ans ; d’Isaac au partage de la Terre promise, 616 ans ; des Juges à Samuel, 463 ans 7 mois ; pour les rois, 572 ans 6 mois 10 jours ; 235 ans de royauté perse ; 312 ans 18 jours de royauté macédonienne jusqu’à la mort d’Antoine ; puis l’empire des Romains jusqu’à la mort de Commode, 222 ans (ce qui fait une Incarnation en 5627 après Adam). Le détail de la liste des rois perses avec années de règne (total 235 ans) est en I, XXI, 128, 12 ; celui de la liste des rois lagides depuis Alexandre (total 312 ans) en I, XXI, 128, 3129, 2. En I, XXI, 141, 15, Clément donne les chronologies de Démétrios, tirée des Rois de Judée (sans total récapitulatif), de Philon (sans précision d’œuvre ni de date), et d’Eupolémos (qui comptait 5149 ans d’Adam à la douzième année de Ptolémée Évergète II). En I, XXI, 147, il cite Flavius Josèphe et un comput de Moïse à Vespasien.
15 A. A. Mosshammer, The Chronicle of Eusebius and Greek Chronographic Tradition, Londres, 1979, p. 147-157, qui analyse un fragment du livre III de la Chronique de Jules Africain cité par Eusèbe de Césarée, Préparation évangélique, X, 10, 1-2.
16 Voir l’analyse de ces ajouts dans H. Inglebert, Interpretatio Christiana. Les mutations des savoirs (cosmographie, géographie, ethnographie, histoire), dans l’Antiquité chrétienne (30-630 après J.C.), Paris, 2001, p. 125-159.
17 Caverne des Trésors, XLIV, 2052, sur les soixante deux (ou trois) générations d’Adam au Christ ; l’auteur est très fier de pouvoir donner le nom de toutes les épouses, et d’offrir ainsi à ses lecteurs (y compris juifs) une généalogie complète ; mais il utilise sans doute certaines sources juives apocryphes sur les femmes des patriarches.
18 Ibid., X, 16 ; XV, 15 ; XXIV, 27 ; XXXV, 16 ; XLIII, 22 ; récapitulation en XLVIII, 67. On retrouve la division en millénaires dans l’Expositio generationum de 775.
19 J. Sirinelli, Les vues historiques d’Eusèbe de Césarée durant la période prénicéenne, Dakar, 1961, remarque p. 110, que certains peuples sont absents : les peuples indiens, africains (Carthage, Nubie), orientaux (Parthes, Perses).
20 H. Gelzer, Sextus Iulius Africanus und die byzantinische Chronographie, Leipzig, t. 2, 1885, p. 193196, donne une liste des critiques de Panodoros envers Eusèbe.
21 H. Inglebert, Les Romains chrétiens face à l’histoire de Rome, Paris, 1996, p. 255-276.
22 R. Mortley, « The Hellenistic Foundations of Ecclesiastical Historiography », G. Clarke (éd.), Reading the Past in Late Antiquity, Singapore, 1990, p. 225-250, surtout p. 244-248.
23 Hérodote, Histoires, II, 4950 sur les dieux grecs d’origine égyptienne, et II, 44, sur Héraklès.
24 Eusèbe de Césarée, Chronique (version arménienne), p. 26.
25 Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, II, 22, 2 ; voir aussi Képhalion, cité par Eusèbe de Césarée, Chronique (version arménienne), p. 30.
26 Philon d’Alexandrie, De praemiis et poenis, 23.
27 V. Nikiprowetski, La Troisième Sibylle, Paris, 1970, p. 112-118, sur les différents syncrétismes entre Noé et Deucalion, Ouranos, Xisousthros.
28 Oracles Sibyllins, III, v. 105-115.
29 Outre l’équivalence entre Moïse et Musée, Artapanos proposa une version étonnante de l’histoire de Moïse où ce dernier créait les cultes polythéistes d’Égypte et battait les Éthiopiens, Eusèbe de Césarée, Préparation évangélique, IX, 27.
30 Ibid., IX, 20, 2-4 : citation de Josèphe, Antiquités juives, I, 239-241, lequel citait Polyhistor, qui citait Cléodème Malchos.
31 Recognitiones, IV, 27 et 29 ; mais les Homélies, IX, 3-7, proposent l’équivalence Zoroastre-Nemrod. L’identification Nemrod-Ninus est reprise par la Chronique Pascale, p. 50. On peut sans doute trouver un parallèle dans la Caverne des Trésors, XXIV, 24, où Nemrod, premier roi des Babyloniens, est un contemporain d’Abraham, et doit donc être identifié à Ninus.
32 Flavius Josèphe, Antiquités juives, I, 93, et Eusèbe de Césarée, Chronique (version arménienne), p. 10.
33 Cosmas Indicopleustès, Topographie chrétienne, XII, 1-3.
34 Barbarus, éd. Frick, p. 236-238, identifie Picus, petit-fils de Cronos, à Zeus, Pluton, Poséidon, Ninus et Sérapis ; ce roi épouse Sémiramis-Rhéa-Héra-Némésis-Hécate et a comme enfant Faunus-Hermès Trismégiste ; tout ceci se passe après Abraham, contemporain de Bélos, p. 222, et après Moïse, posé comme contemporain d’Inachos, p. 223.
35 Le rédacteur final a tenté d’harmoniser son histoire biblico-classique du Barbarus avec les listes de dirigeants données ensuite. Mais Barbarus, éd. Frick, p. 222, sur Abraham contemporain de Bélos, Barbarus, éd. Frick, p. 282, sur la liste assyrienne qui commence avec Bélos, puis Ninus-Picus, et Barbarus, éd. Frick, p. 234236, sur Picus qui vit après Samson sont incompatibles, même si Picus est le petit-fils de Cronos (Bélos).
36 Les pages sont données en référence à l’édition de L. Dindorf, Bonn, 1831. Mais il faut utiliser la traduction de E. et M. Jeffreys et de R. Scott, The Chronicle of John Malalas, A translation, Melbourne, 1986, pour la reconstitution du livre 1.
37 Voir les précisions biographiques dans E. et M. Jeffreys et de R. Scott, The Chronicle of John Malalas, Melbourne, 1986, p. XXIXXIII. Malalas est un terme syriaque qui traduit rhetor ou scolasticos. Jean Malalas appartenait sans doute à l’administration du Comes Orientis installé à Antioche. Les deux éditions s’achèveraient en 527 et en 565 (ou 574).
38 E. Jeffreys, « The Chronicle of John Malalas. Book I. A commentary », P. Allen et E. Jeffreys, The Sixth century. End or Beginning ?, Brisbane, 1996, p. 5274, a bien fait, p. 6667, le parallèle entre Barbarus et Malalas, mais n’insiste pas assez sur les différences.
39 Jean Malalas, Chronique, I, 7. C’est une erreur, car Nemrod descend de Cham, mais elle s’explique parce que Babylone est dans la région sémitique.
40 Ibid., I, 8.
41 Ibid., I, 910. Après sa mort, il est enterré en Crète, I, 13, selon une très ancienne interprétation évhémériste.
42 Ibid., I, 14-15.
43 E. Jeffreys, « The transmission of Malalas’ Chronicle. Malalas in Greek », E. Jeffreys (éd.), Studies in John Malalas, Sydney, 1990, p. 245-268.
44 J. Stevenson (ibid., p. 287-299) signale en particulier le Laterculus Malalianus de la fin du VIIe siècle à Canterbury qui proviendrait d’un original italien un peu plus ancien. Mais J. Stevenson, The Laterculus Malalianus and the School of Archbishop Theodore, Cambridge, 1995, p. 11, attribue l’ouvrage à Théodore de Tarse, évêque de Canterbury de 669 à 690.
45 W. Witakowski, « The transmission of Malalas’ Chronicle. Malalas in Syriac », E. Jeffreys (éd.), Studies in John Malalas, Sydney, 1990, p. 299-310.
46 Le texte original de la Chronique de Jean de Nikiou était en grec, avec quelques chapitres en copte sur l’Égypte ; il a été conservé en éthiopien à partir d’une version arabe. Si le chroniqueur mentionne Adam et Seth, en réalité, son histoire ne commence réellement qu’avec le Déluge. Voir le texte dans l’édition de H. Sotenberg, Chronique de Jean, évêque de Nikiou, Paris, 1883.
47 Chronique pascale, édition de L. Dindorf, p. 64 sqq.
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