La diplomatie de la neutralité
p. 129
Texte intégral
1À partir de la fin du règne de Louis XIV jusqu’au crépuscule napoléonien en 1815, l’Angleterre est la principale rivale de la France en Europe et dans le monde. L’affrontement dépasse la simple confrontation militaire et relève aussi de la « jalousie de commerce ». L’expression désigne une conjonction de l’économie et de la politique par laquelle les rivalités dans le commerce international intègrent la raison d’État1. Par conséquent, tous les pays européens directement, s’ils sont alliés, ou indirectement, s’ils sont neutres, sont concernés par les conflits franco-anglais. Lors de la période allant de la guerre de la Ligue d’Augsbourg (1688-1697) à celle d’Indépendance américaine (1778-1783), la Suède, le Danemark et les Provinces-Unies à partir de 1713, cherchent à demeurer neutres. Cette position, combinée avec une navigation de plus en plus dynamique, donne à ces trois pays une place particulière sur l’échiquier politique européen, singulièrement pour la diplomatie française. En effet, ils avaient été auparavant, à un moment ou à un autre, des alliés recherchés pour leur capacité à animer des diversions contre la Maison d’Autriche. Mais avec les affrontements franco-anglais, les stratégies de guerre et d’alliance prennent une nouvelle configuration. Vu de France, il ne s’agit pas d’obtenir des pays du Nord une assistance militaire à travers la mobilisation de leurs armées ou de leurs vaisseaux mais, au contraire, de les voir conserver leur neutralité. Ainsi, leurs pavillons sont en mesure de participer au commerce de France en se chargeant d’une partie de ses exportations et en assurant, autant que possible, l’approvisionnement du royaume. Cette perspective permet de déterminer l’importance des questions relatives à la neutralité dans les rapports avec les gouvernements de Stockholm, de Copenhague, puis de La Haye, afin de voir comment Versailles a cherché à profiter, voire à instrumentaliser, leur non-belligérance pour répondre au défi maritime que lui a imposé l’Angleterre. Les guerres franco-anglaises de la fin du règne de Louis XIV et du XVIIIe siècle font surgir au premier plan les questions relatives à la neutralité. Elles imposent d’articuler les stratégies de guerre et les impératifs commerciaux afin de donner une cohérence aux relations de la France avec les pays neutres. Il se dessine progressivement une diplomatie de la neutralité qu’il faut caractériser afin de voir comment il est possible d’entretenir des puissances dans la paix pour espérer gagner la guerre.
Notes de bas de page
1 Hont I., Jealousy of Trade, op. cit., p. 5-6.
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