Introduction générale
p. 7-19
Texte intégral
1Tout le monde connaît la formule écrite, le 15 mars 1968, par Pierre Viansson-Ponté dans le journal Le Monde, que les événements de mai rendront célèbre : « La France s’ennuie ». Aujourd’hui elle est remplacée par une autre formule qui trouve place à la Une des journaux de la presse écrite, à la radio, à la télévision ou sur internet : « La France a peur ». C’est ainsi que l’éditorial d’un grand quotidien du soir s’ouvre en septembre 2010 par ses mots : « Les Français ont peur1 », donnant l’impression de reprendre la phrase d’ouverture prononcée par Roger Gicquel lors d’un journal télévisé devenu proverbial, le 18 février 1976, après l’assassinat du petit Philippe Bertrand par Patrick Henry. Les contextes sont évidemment différents, mais il est vrai que depuis quelques années les sondages se multiplient, fouillant les sentiments et les émotions, auscultant les arrière-pensées, tentant de dévoiler les perceptions du temps présent et de l’avenir. Le 12 octobre 2009, un sondage IFOP rendu public montrait que la dette de l’État faisait peur aux Français. Ils étaient 83 % à se dire inquiets. Plus tôt, un autre sondage IFOP révéla que les Français avaient désormais moins peur du nucléaire que du réchauffement climatique, 27 % contre 83 %2. D’autres enquêtes plus anciennes ont parfois été baptisées les sondages de la peur. C’est ainsi qu’en septembre 2008, l’institut de veille sanitaire dévoilait que 7 % de la population seraient déprimés, voire dépressifs. L’âge jouerait un rôle important, les plus jeunes s’avèrent être les plus inquiets, persuadés de ne pas pouvoir bénéficier des mêmes conditions de vie que les générations de leurs parents et de leurs grands-parents. Si le peureux est celui qui est accessible à la peur, cette dernière recouvre des phénomènes fort différents : angoisse face à l’avenir, frayeur d’une nouvelle inondation, affolement devant la récidive, devenue une des grandes peurs des sociétés contemporaines, alarmes de toutes sortes face à l’insécurité alimentaire3 ou aux dangers potentiels de certains médicaments mis trop rapidement sur le marché et retiré tardivement. Si la peur sous toutes ses formes est de plus en plus présente, elle n’a pas toujours été identique. Jean Palou dans un petit livre précurseur s’était fixé pour objectif de « faire moins l’histoire d’un sentiment, celui de la Peur, que de montrer les projections de ce sentiment sur le plan humain collectif4. »
2Les travaux de Lucien Febvre5, de Georges Lefebvre6, de Jean Lucas-Dubreton7, de Jean Delumeau8, d’Alain Corbin9, de Michel Porret et Jacques Berchtold10 et de chercheurs appartenant à d’autres disciplines comme Michela Marzano11, Michel Viegnes12, Alain Morvan13, Anne-Marie Dillens14, ou Robin Corey15, ont permis de repérer des grandes peurs collectives et individuelles16 au point d’évoquer la question de « L’administration de la peur17 ». L’analyse des discours, l’étude des représentations et l’examen des pratiques ont donné lieu à des analyses de qualité, décryptant aussi bien la peur de l’au-delà, que celle de la maladie, des marginaux, de l’ennemi sans oublier celle de l’insécurité18. L’ouvrage de référence, publié il y a trente ans, reste celui de Jean Delumeau qui, du XIVe au XVIIIe siècle, traquait d’abord la peur du plus grand nombre puis abordait ensuite la question des liens complexes et multiples entre la peur et la culture dirigeante. Son omniprésence, la peste et les séditions lui donnaient des contours particuliers. Dans le cadre de la société d’Ancien Régime, « l’attente de Dieu », Satan et ses agents, la sorcellerie et l’hérésie en constituaient les éléments structurants. Pour l’avenir, il envisageait de poursuivre des travaux portant sur les manières de « sortir de la peur ». Nul doute qu’elle est bien « une composante majeure de l’expérience humaine19 » et qu’elle concerne tous les individus et les collectivités humaines. Et l’auteur de citer Jean-Paul Sartre qui, dans une de ses œuvres romanesques, Le Sursis, fait parler un de ses personnages : « Tous les hommes ont peur. Tous. Celui qui n’a pas peur n’est pas normal, ça n’a rien à voir avec le courage. » La littérature permet sans doute de saisir les sentiments mieux que ne pourraient l’exposer des disciplines académiques. Maupassant parvient en quelques phrases à pénétrer à l’intérieur d’une âme : « La peur (et les hommes les plus hardis peuvent avoir peur), c’est quelque chose d’effroyable, une sensation atroce, comme une décomposition de l’âme, un spasme affreux de la pensée et du cœur dont le souvenir seul donne des frissons d’angoisse20. » Si chacun est capable de l’éprouver, de la décrire ou de l’expliquer21, elle échappe le plus souvent à l’analyse : « la peur, l’épouvantable peur entrait en moi ; la peur de quoi ? Le sais-je ? C’était la peur, voilà tout22 ». Les « savoirs de la littérature » offrent à des générations des exemples et des manières de se comporter dans certaines situations23. Ils sont aussi une façon d’exorciser les monstres enfouis à l’intérieur de soi-même24. En 1927, André de Lorde et Albert Dubeux rendaient un hommage aux maîtres de la peur, c’est-à-dire aux auteurs qui pouvaient susciter le malaise, l’anxiété ou encore la frayeur la plus extrême25. Le cinéma offre bien sûr nombre de situations et d’exemples26, sans oublier la bande dessinée27.
3De leur côté, les lexicographes sont souvent peu diserts même s’ils donnent en quelque sorte une version quasi officielle. Dans le Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle, la peur est définie comme un « sentiment d’inquiétude que l’âme éprouve à la présence ou à la pensée du danger : Avoir PEUR. Trembler, mourir de PEUR ». La peur peut donc être réelle, tangible et présente, mais aussi envisagée, projetée, inventée. Les peurs imaginaires créent souvent plus d’incertitude et d’angoisse que les peurs effectives, sans qu’il soit véritablement possible d’en mesurer les effets. Pour quelques chercheurs, la peur est moins un sentiment qu’une émotion28, à moins qu’il s’agisse plus particulièrement d’une idée politique29, ou encore de l’ennemi intime de l’homme30, sans oublier les phobies31. Mais la peur peut aussi être considérée comme une blessure propre à chaque être humain que l’on ne peut guérir et c’est sans doute au bout du compte préférable, car on peut se demander « si cette faille qu’on cherche à combler était la porte qui nous préserve de l’étouffement, et non pas une blessure qui nous menace32 ? » Il est encore possible de jouer avec la peur afin de la tenir à distance ou de l’apprivoiser. C’est ainsi que Vigor Renaudière s’amuse avec son lecteur. Sous la Restauration, il fait paraître une petite plaquette publiée à Paris « Au bureau de la peur33 ». Depuis, nouvelles fantastiques, romans gores et thrillers, films de « suspense » et d’horreur ont creusé le sillon avec plus ou moins de virtuosité34.
4Les peurs, semblables à une boule de pâte à modeler, connaissent de multiples nuances et degrés35. Lorsque l’une d’elles s’empare de quelqu’un, elle a un effet d’entraînement redoutable, comme le souligne un insurgé de juin 1848 : « La peur va toujours – et j’ai eu cent fois l’occasion de le constater – directement contre ses fins. Elle craint un danger, elle le fait naître ; elle appréhende la mort, elle l’attire. J’essayais d’abord de faire, par la persuasion, une propagande contraire. Erreur ! La peur ne se discute pas ! Il faut qu’une force extérieure l’enchaîne et la muselle là où il n’y a pas assez de volonté pour la vaincre et la dompter36. » Pour Descartes, elle diminue chez les enfants la « matière des larmes » et, chez les adultes, « la peur ou l’épouvante […] n’est pas seulement une froideur, mais aussi un trouble et un étonnement de l’âme qui lui ôte le pouvoir de résister aux maux qu’elle pense être proches37 ». La peur infantile38 n’est pas celle des adultes. L’expérience vécue montre qu’elle peut venir de phénomènes extérieurs, contre lesquels les hommes et les femmes n’ont aucune prise39. Tout au plus, d’une époque à l’autre, essayent-ils de faire face, dans l’instant. En 1887, par exemple, un tremblement de terre affola les habitants d’Antibes. Il offrit à un observateur, qui ayant connu « trois secousses », avait distingué un « bruit bizarre » et avait entendu les murs craquer, l’occasion de s’interroger sur ce phénomène qui laisse en nous « une émotion très spéciale qui n’est point la peur connue dans les accidents, mais la sensation aiguë de l’impuissance40 ». En fonction des époques, la peur de vivre l’emporte sur la peur de la mort41. Elle peut aussi venir de dispositions personnelles42. Publié en 1957, le journal d’un psychiatre donne de multiples exemples de situations et de personnalités. Une jeune fille timide éprouve une sorte de malaise allant jusqu’à la panique lorsqu’il fallait se rendre dans le monde. Pour autant, elle ne se soustrait pas, essaye de paraître enjouée, veut faire des plaisanteries, dire des paroles aimables, mais elle a les mains moites et donne l’impression de « se débattre comme une noyée43 ». Un autre de ses patients est un « crâneur, qui a peur, très peur, mais joue au courage ! À force de jouer, il s’étourdit. Il finit par n’avoir plus peur et dans l’excès du jeu, il peut commettre des imprudences qui le livreront au bourreau qu’il voulait dérouter. » Il rapporte l’affolement d’un ingénieur des travaux publics qui n’avait jamais pu prendre le métro ni monter seul dans une automobile. Il avait « peur d’un accident, d’un déraillement, d’un croisement, d’un aiguillage. Il ne tient pourtant pas tant que ça à la vie. Mais la peur, la peur universelle a pris ce prétexte44 ». Pendant la Seconde Guerre mondiale, il n’écrit rien, pas un mot. Il reprend son journal en 1945 et note, changeant de registre et d’échelle : « Un dictateur qui excite son peuple ? Complexe de peur ! En attendant, il vous possède45. » Individuelle ou collective, la peur est un phénomène social global, mais souvent inavouable46. Il faut toute la force de caractère de Blaise Cendrars pour mêler « les extérieurs à l’intérieur », et écrire, en 1912, que « J’ai peur des grands pans d’ombre que les maisons projettent47 ».
5Le présent ouvrage n’entend pas offrir une vision panoramique des peurs depuis le XVIe siècle48, mais veut insister sur des aspects essentiels, d’autant que les archives disponibles présentent un large éventail49. En premier lieu, il s’agit de s’intéresser aux images et aux mots relatifs à la peur afin de saisir les perceptions d’une époque. Puis, il convient de s’attacher aux peurs suscitées par les éléments déchaînés, la nature ou les épidémies sur lesquels l’homme semble, pendant des siècles, ne pas avoir de prise. Après l’étude des représentations et l’examen des peurs « naturelles », il importe de s’arrêter sur l’analyse des peurs sociales. La délinquance et la prison, l’effroi suscité par des catégories particulières – comme les ouvriers ou les jeunes – nécessitent en effet d’être revisités. Enfin la vie publique est confrontée à son cortège de peurs : la peur des mendiants est depuis le début du XIXe siècle l’une des plus expressives, puis les peurs politiques donnent une dimension plus complexe aux craintes, inquiétudes et alarmes sourdes. La peur que ses idées ne soient pas comprises, la peur d’être battu lors d’une élection, la peur de l’adversaire politique présenté comme un ennemi, la peur de se trouver impuissant face à une situation de crise ou devant la montée des extrêmes illustrent en partie les peurs publiques.
6Mais les peurs collectives ne sont pas immuables. Elles fonctionnent aussi par cycle. La perception d’un danger et les craintes plus ou moins vives suscitées peuvent surgir brusquement, se retirer, disparaître, voire rejaillir brutalement. C’est ainsi que la peur du nucléaire après Hiroshima a connu des pics d’intensité. Tchernobyl a réactivité la peur de l’atome, pour autant ce n’est plus celle d’une attaque militaire mais celle d’un accident civil aux conséquences incontrôlables qui s’est imposée. La centrale de Fukushima est devenue en 2011, après un tremblement de terre de grande amplitude et un tsunami gigantesque et dévastateur, le symbole de la menace nucléaire, à partir de laquelle s’est exprimée, à l’échelle mondiale, toute la palette des angoisses, des craintes et des paniques.
7L’ambition du présent livre est donc de rendre compte de la pluralité des peurs qui se présentent souvent de manière stratifiée. En effet, la peur, sentiment universel50, est composite et ambivalente51. Tantôt elle relève plutôt des émotions qu’historiens et ethnologues tentent d’analyser et de mettre en perspective52 ; tantôt elle bascule plutôt du côté des affects ; tantôt encore, elle est réduite à un instant passager, celui d’un « état émotionnel ». Au lieu de distinguer a priori les émotions et affects, et de proposer une sorte d’échelle de gradation entre la peur, l’angoisse, l’inquiétude, l’effroi, il a paru préférable de s’inscrire dans le sillage des travaux valorisant « le pragmatisme émotionnel53 », c’est une façon de ne pas réifier la peur, de ne pas la considérée comme « un objet fabriqué » mais bien comme un objet de recherche mouvant qui échappe à tout « système fermé ».
8Organisées à partir des expressions, des perceptions et des effets, quatre entrées sont ici privilégiées. Saisir comment les hommes et les femmes mettent en scène les peurs, les perçoivent et réagissent, permet assurément de mieux comprendre les sociétés du passé comme les sociétés contemporaines. Les images et l’esthétique des craintes, angoisses et frayeurs apportent de multiples éclairages pour saisir un phénomène54. Un rien parfois peut provoquer la peur. Un des personnages de Rodolph Töpfler, à partir de la vue d’une pierre blanche, a subitement « toutes sortes d’idées sinistres sur les morts, sur les sépultures ». Un autre ne peut se défaire de l’angoisse primordiale des êtres humains : « J’ai une horrible peur de mourir, toutes mes idées se sont portées du côté d’un mal intérieur qui me mine et qu’on me cache55. » Dans un autre registre, Goya a été, selon nombre de critiques, l’un des plus grands peintres de la peur56. « Panique » est peut-être le tableau qui l’illustre le mieux : « Sur un fond de nuages se dresse un géant nu qui martèle le ciel de ses poings énormes. Ses pieds disparaissent dans des flocons de ciel blanchâtres. En bas du tableau, de tout petits hommes fuient éperdument avec leurs charrettes dans un mouvement précipité de panique. » De nombreux artistes ont, dans des registres très différents, traité de la peur générale ou d’une peur en particulier. Le très célèbre tableau de Gustave Courbet, « Le Fou de peur (1844-45) », reste la référence en matière de peinture57. D’autres toiles peuvent provoquer un frémissement d’horreur. À la fin des années 1960, l’actionnisme viennois n’a pas pour visée de peindre la peur, mais les spectateurs l’éprouvent bien souvent devant les photographies exposées. Il convient toutefois de porter tout d’abord une grande attention à « la chute imaginaire » restituée par Godehard Janzing qui permet de comprendre nombre de représentations, aussi bien celles de la Saint-Barthémy lorsque des gravures font figurer des malheureux défenestrés ou lors du 11 septembre 2011 quand une photographie capte la chute d’un corps qui n’en finit pas de rester suspendu. De tous temps, l’homme semble attiré par la verticalité. La peur de la chute est présente dans l’imaginaire et la psyché collective. Après tout Lucifer ne tombe-t-il pas pendant neuf jours ? Les retranscriptions artistiques ou iconographiques de la peur possèdent une charge émotionnelle dont sont dépourvus d’autres supports. Sans doute conviendrait-il de multiplier les approches afin de traiter de la « dimension tragique » d’un événement58. Entre le XVIIe et le XVIIIe siècle, notamment, on observe une évolution nette dans le sens de la représentation du drame et de la douleur, non seulement liée à des nouvelles modalités d’expression des passions mais aussi à de nouveaux idéaux sociaux et esthétiques.
9De la sorte, la dramaturgie musicale offre à son tour de multiples compléments et permet de s’arrêter un peu plus longuement sur les attentes des problématiques énoncées. En effet, on peut se demander, dans le sillage des remarques de Cécile Auzole, « qui n’a frissonné en entendant le cri du libertin attiré dans les enfers par la main de pierre du Commandeur à l’avant-dernière scène emblématique du Don Giovanni de Mozart ? » À la fin du XVIIIe siècle, sous l’impulsion de Mozart et de son dramma giocoso de 1787, l’opéra acquiert une dimension homogène, mêlant, à l’imitation de la vie, des éléments comiques et tragiques. Lieu de représentation à vocation cathartique, le théâtre lyrique ne néglige alors pas la représentation de la peur, de l’angoisse, de l’effroi. Ainsi, perçue dans une acception comique à travers la crainte d’un personnage couard devant un danger (Papageno face au monstre dans la première scène de la Flûte enchantée de Mozart) ou tragique (Lulu face à Jack l’éventreur à la fin de l’opéra de Berg), la peur peut aussi irriguer l’œuvre d’une puissance métaphysique (« J’ai peur, j’ai peur, j’ai peur sur la route » sont les premiers mots chantés par le principal protagoniste de Saint-François d’Assise de Messiaen), stigmatisant la condition humaine : la connaissance et la crainte de la finitude. La représentation de la peur, dont il s’agit de se libérer, repose sur des effets musicaux (instrumentation, orchestration, harmonie, rythme, dynamique) traduisant la surprise, l’attente ou le suspense. En effet la peur, si elle parle directement aux nerfs et à l’imagination du spectateur s’inscrit dans un contexte social. Comment, par exemple, le genre opératique réagit-il aux grandes peurs collectives des deux guerres mondiales ? Si les horreurs de la Première ont été assez majoritairement évacuées dans la dérision, force est de constater que l’après-1945 voit le déclin de l’opéra bourgeois au profit de la naissance d’un spectacle résolument tourné vers la société, traquant et dénonçant la barbarie en utilisant la réminiscence de la peur comme catharsis collective.
10On peut aussi se faire peur avec les créatures de la nuit qui ne réduisent pas aux brigands, maraudeurs et autres détrousseurs. Le sommeil et les cauchemars apportent ainsi leur lot d’images et d’interrogations59. Susanna Caviglia montre bien que, dans une certaine peinture, la menace de l’enlèvement terrorise les femmes. Toutefois le thème ne reste pas immuable. Au XVIe siècle, les peintres lorsqu’ils traitent de l’enlèvement d’Hélène par les Troyens insistent sur la « dimension tragique », alors qu’au siècle des Lumières la dimension érotique s’impose nettement. La fantasmagorie peut être considérée comme une sorte de « préhistoire du cinéma ». Entre 1793 et 1798, ses liens avec la Terreur s’imposent au public. Grâce à l’illusion, il s’agit de faire apparaître des personnes défuntes. Robertson animent des spectres qui semblent prendre consistance mais refuse de faire apparaître le fantôme de Louis XVI. Gilles Chabaud montre bien comment la peur collective peut prendre des formes inusitées et s’inscrire dans un contexte précis.
11Les expressions et les perceptions des peurs ne peuvent se déprendre d’une approche à la fois culturelle et sociale. Mais les peurs les plus anciennes, celles sur lesquelles les discours ont d’abord porté, se rapportent à la nature hostile ou incompréhensible. Nombre d’historiens, comme Lucien Febvre, ont insisté sur la peur nocturne ou la peur de la Forêt. Depuis, les travaux se sont multipliés. La peur du rivage, de la tempête, des séismes meurtriers ont enrichi l’historiographie et montré, s’il en était besoin, que les peurs sont multiples60. Toutefois, ici, il s’agit plutôt d’étudier les peurs des « colères de la nature » sur la longue durée. Pendant longtemps règne une sorte de fatalisme comme l’illustrent certains proverbes. Les attitudes face à la mort, à la maladie ou à la catastrophe trahissent la résignation face à l’adversité. À partir de la deuxième moitié du XXe siècle, l’impression de dominer les forces de la Nature s’impose. Les risques sont oubliés où ignorés. Aussi importe-t-il de revenir sur les peurs face aux calamités « naturelles », à leurs forces incontrôlées, à leurs images et aux réactions qu’elles suscitent : panique, recours à Dieu, au Diable, à la violence. La peinture pré-romantique s’avère tout à fait efficiente pour comprendre comment la peur est mise en scène à travers des paysages terrifiants : mer déchaînée, vagues violentes, naufrages, éruption du Vésuve. Jean-Roger Soubiran montre bien comment, progressivement, la distance entre le tableau et la peinture exposée se réduit au point, parfois, de donner l’impression d’une disparition complète. Emmanuel Brouard s’attache à montrer que l’eau intérieure peut se déchaîner, rompre au milieu du XIXe siècle des digues construites au Moyen Âge, emportant culture, bétail et maisons. Par la suite, par glissement, la peur s’érode, disparaît ainsi que les savoirs sur les inondations. Dans le même temps s’abaisse la vigilance des autorités. De la sorte, Thierry Sauzeau fait la démonstration que les conséquences de la tempête Xynthia sont d’abord une catastrophe humaine. Dès le Moyen Âge, des digues furent dressées, des mesures de protection prises. Lors des grandes marées et des tempêtes, les alarmes se multipliaient et la peur les accompagnait. Or, au XXe siècle, les seuils de la peur s’abaissent, les demandes sociales en matière de logement et de cadre de vie s’accroissent au point que murs, remblais et digues disparaissent. Ailleurs, l’éruption de la montagne Pelée, le 2 mai 1902, s’inscrit en partie dans cette perspective. Saint Pierre, construite en dur, devient le « Petit Paris », doté de grands magasins et d’un tramway. Le réveil du volcan, la pluie de cendre, la destruction de la ville provoquent une peur intense restituée finement par Michel Desse, avec son cortège de panique et de déplacements de population. De la sorte, ces études de cas mis en perspective permettent de donner consistance aux territoires de la peur et aux milieux hostiles. Entre histoire de l’environnement et histoire culturelle, les approches sont assurément variées, mais elles restituent les « imageries » que ces peurs ont produites, ainsi que les réactions qu’elles ont suscitées.
12Si la peur est d’abord une sorte de sentiment d’inquiétude « en présence ou à la pensée d’un danger », elle prend des formes multiples. Les peurs sociales ne sont pas ces « peurs maladives », celles qui causent « tant d’avanies » ni celles qui relèvent des « craintes des forces obscures » ou des éléments déchaînés. De l’époque moderne à nos jours, les peurs sont d’abord celles des gueux, des miséreux, des sans logis, des « déshérités de la fortune ». Louis Chevalier a bien montré que la peur des classes dangereuses et des classes laborieuses structurait l’imaginaire social61. Pour explorer ce dernier, la caricature apparaît essentiel. La peur, souligne Solange Vernois, peut y être brutale et inattendue. La caricature est également un moyen d’accès à la peur de la vulnérabilité, de la faiblesse, de la lâcheté, de l’exclusion et de la mort. La tuberculose relève bien de ce dernier aspect. Maladie romantique au début du XIXe siècle, elle devient un fléau effrayant. Dans un premier temps, son caractère héréditaire focalise l’attention avant de s’effacer devant sa dimension sociale. Les attitudes à l’égard des tuberculeux ne sont pas si différentes que celles vis-à-vis des pestiférés ou des malades du sida : même tentation d’isoler, d’exclure et de parquer. La maladie, les malades et les établissements spécialisés continuent à faire peur après la Première Guerre mondiale comme le souligne Stéphane Henry. La peur de l’insécurité et celle du crime incarnent aux yeux des édiles, des politiques, des chercheurs et des praticiens la question sociale. La peur du bandit de grand chemin, puis celle du crime organisé sont parmi les plus connues62. L’angoisse est tantôt une inexplicable impression d’insécurité, tantôt un sentiment né de peurs concrètes amplifiées. À partir de la guerre de 1870 et de la mise en place de la Troisième République, deux figures semblent dominer la scène publique : celle du criminel endurci63 puis celle du jeune délinquant. Selon Michelle Perrot, la peur de la jeunesse s’affirme au tournant des années 188064. Nous verrons ainsi, dans les pages suivantes, les récidivistes, les garçons délinquants et les filles délinquantes. Mais il ne faudrait pas oublier, même si elles ne sont pas abordées en tant que telles dans le présent ouvrage, les peurs sociales inextricablement liées aux activités économiques. La peur de l’accident du travail comme la peur de perdre son emploi prennent des formes différentes en fonction des époques et des contextes. C’est ainsi qu’à l’aube de l’ère industrielle les « mangeuses de bras » suscitent la crainte puis l’effroi65. Au XXIe siècle, la peur de voir son entreprise délocalisée a remplacé des peurs plus anciennes. Sans verser dans la déploration ni le misérabilisme, le travail est source de souffrances sociales et de peurs. Simone Weil écrivait ainsi à propos de la peur des ouvrières métallos :
« La peur. Rares sont les moments de la journée ou le cœur n’est pas un peu comprimé par une angoisse quelconque. Le matin, l’angoisse de la journée à traverser. Dans les rames de métro qui mènent à Billancourt, vers 6 heures ½ du matin, on voit la plupart des visages contractés par cette angoisse. Si on n’est pas en avance, la peur de la pendule de pointage. Au travail, la peur de ne pas aller assez vite, pour tous ceux qui ont du mal à y arriver. La peur de louper des pièces en forçant sur la cadence66. »
13Il existe encore bien d’autres formes et manifestions des peurs sociales67. La peur du déclassement ou celle du chômage, par exemple, est individuelle et collective. Elle est partagée par un groupe ou par une classe d’âge. Il conviendrait de s’interroger sur l’instrumentalisation des peurs sociales et en particulier celle de l’autre68. Les travaux récents sur le risque traduisent assurément un élargissement des peurs sociales et une interrogation sur le devenir des sociétés contemporaines. Sur la scène de l’espace public, selon l’acception d’Habermas, la plus ancienne peur est assurément celle des criminels que l’on ne parvient pas à identifier. Régulièrement les gouvernements et les autorités locales prennent des mesures pour l’éradiquer ou en décréter la suppression. La grande loi sur la relégation qui ambitionne d’envoyer au-delà des mers les récidivistes l’illustre69. La peur guide ainsi les politiques pénales et devient un moyen de gouverner. Jean-Claude Vimont montre que depuis 1938 les récidivistes ne sont plus envoyés en Guyane ou en Nouvelle Calédonie mais sont retenus en métropole. La presse à gros tirage dresse souvent d’horribles portraits et dessine d’effrayants tableaux. À l’intérieur de l’institution pénitentiaire, les rédivistes sont l’objet de tris, de classements, mais les plus dangereux ne sont pas nécessairement ceux qui font le plus peur. L’enfance et la jeunesse délinquante suscitent l’inquiétude ou la panique. Au XIXe siècle, le « bandit en herbe » inquiète, puis effraye car on le retrouve derrière les barricades. La peur sociale des jeunes, analyse Jean-Jacques Yvorel, se construit par stéréotypes successifs : les Apaches, les J3, les Blousons noirs et les jeunes banlieusards. Pendant longtemps les filles suscitent plutôt la pitié. Dans l’imaginaire collectif, ou du moins masculin, il apparaît impensable que la violence puisse être associée à la féminité. Les jeunes filles qui glissent dans la prostitution sont des victimes pour lesquelles la compassion est de mise, mais, comme le souligne David Niget, si la fille abusée peut provoquer le dégoût, la fille dépravée fait peur70. Au final, la justice elle-même est prise dans ce cercle. Pauline Chaintrier examine les justiciables, suspects et témoins, magistrats et avocats qui doivent composer avec la peur. Pendant l’enquête les juges d’instruction tentent parfois de l’instrumentaliser afin de s’approcher au plus près de la vérité et de la transformer en révélateur. Cependant altération ou destruction de preuve sont parfois des conséquences de la crainte devenue véritable panique.
14À leur tour, observateurs sociaux et enquêteurs contribuent à attiser une angoisse diffuse et à désigner les conditions dangereuses. Les rôdeurs de barrière, les chemineux des campagnes, sans oublier les bohémiens, attisent les inquiétudes. Anthonys Kitts restitue la grande peur des mendiants qui va parfois jusqu’à la construction d’une altérité radicale. Le voleur provoque souvent une peur plus intense mais plus méconnue. S’il se déplace dans les rues, sur les chemins, sur les toits, il surgit dans l’espace privé. Lorsque les journalistes, en particulier ceux de la presse régionale, étudiés par Geoffrey Fleuriaud, en rendent compte, ils contribuent à alimenter les angoisses collectives et à donner des visages variés allant du chapardeur au véritable cambrioleur. Pendant longtemps, toutefois, l’une des peurs publiques les importantes fut celle de la désorganisation du royaume et de la guerre civile. Ainsi, au début du XVIIe siècle, la mort du roi suscite un trouble profond. Quelques textes fondamentaux et sans cesse répétés, tel celui de Pierre de L’Estoile, présent à Paris le 14 mai 1610, brossent le visage d’une capitale tétanisée et plongée dans l’étonnement à l’annonce de la blessure mortelle d’Henri IV. Michel Cassan montre le roi frappé dans son carrosse, au cœur de sa capitale. Une enquête nationale permet de répondre à des questions essentielles : comment face à ce « grand événement » les autorités centrales ont-elles réagi afin qu’une « Grande peur » ne submerge le royaume ? En juin 1791, un peu partout en France, la fuite du roi a entraîné dans les villages la création de comités de vigilance devant faire face au moindre danger71. Si les historiens ont restitué les émeutes, les journées révolutionnaires, les affrontements fraternels, les moments répressifs, ils ont en général négligé la peur de la guerre civile, brandie comme une menace et instrumentalisée. De la sorte, la thématique devient source d’une profusion de discours dont il importe de retracer la généalogie, de suivre les mécanismes et surtout les usages. Ainsi, c’est bien à l’ombre de la guerre civile, sans cesse invoquée que se déroule la vie politique comme l’analyse Jean-Claude Caron. Parallèlement, la peur du vandalisme politique met en relief à la fois des formes singulières de violence et de peurs face aux destructions commises ou annoncées72.
15Au XXe siècle, plus apaisée, la peur politique prend des formes différentes. Toutefois si la peur des rouges ou des fascistes ne s’efface que lentement73, il existe aussi une peur plus discrète et pourtant essentielle, celle de l’entrée des femmes en politique restituée par François Dubasque. À ces aspects, il faudrait aussi ajouter la peur des utopies qui a été une constante de l’histoire européenne. Si les utopistes sont parfois raillés, ils suscitent une véritable frayeur : ne vont-ils pas dévoyer des esprits et des forces vives et jeter dans la mêlée des foules assoiffées de changement ? pour reprendre une expression de la philosophie morale du début du XXe siècle. Les pages qui suivent sont un peu comme le recueil de Maurice Renard, publié pour la première fois en 1926, une « invitation à la peur74 ». L’écrivain racontait, par l’entremise de plusieurs personnages, des histoires effrayantes : celle d’un savant traversant un miroir et incapable de revenir en arrière, celle d’un cadavre percé de trois blessures infligées par un trident, celle d’une longue lettre écrite à un procureur annonçant que son auteur allait se tuer. Les contributeurs du présent volume s’interrogent sur les manières qu’ont les individus et les sociétés de tenir la peur à distance, souvent qualifiée d’ennemie intime. Il s’agit bien pour eux, au-delà d’une histoire des affects, de s’intéresser plus particulièrement aux expressions, aux expériences et aux usages des peurs75.
Notes de bas de page
1 Évoquant la situation en Tunisie et en Égypte, l’éditorial du même quotidien titre « Le monde arabe défie le mur de la peur ». Celui-ci est présenté comme « une muraille invisible mais omniprésente », Le monde, 30 et 31 janvier 2011.
2 Le Monde, 21 juillet 2008, Le Nouvel Observateur, 22 juillet.
3 Madeleine Ferrières, Histoire des peurs alimentaires. Du Moyen Âge à l’aube du XXe siècle, Paris, Le Seuil, 2002, 476 p.
4 Jean Palou, La peur dans l’histoire, Paris, Les éditions ouvrières, Coll. « Vous connaîtrez », 1958, p. 11.
5 Lucien Febvre, « Pour l’histoire d’un sentiment : le besoin de sécurité », Annales, ESC, no 2, avril/juin 1956, p. 244-246.
6 Georges Lefebvre, La grande peur de 1789, Paris, Armand Colin, 1932, 272 p.
7 Jean-Lucas Dubreton, La grande peur de 1832, le choléra et l’émeute, Paris, Gallimard, 1932, 253 p.
8 Jean Delumeau, La peur en Occident, XIV-XVIIIe siècles, Une cité assiégée, Paris, Fayard, 1978, 486 p.
9 Alain Corbin, Le monde retrouvé de Louis-François Pinagot. Sur les traces d’un inconnu, 1798-1876, Paris, Flammarion, 1998, 342 p.
10 Michel Porret et Jacques Berchtold (dir.), La peur au XVIIIe siècle, discours, représentations, pratiques, Genève, Droz, 1994, 276 p.
11 Michela Marzano, Visages de la peur, Paris, PUF, coll. « La condition humaine », 2009, 152 p.
12 Michel Viegnes (dir.), La peur et ses miroirs, Paris, Imago, 2009, 380 p.
13 Alain Morvan (dir.), La peur. L’Angleterre des Tudor à la Régence, Villeneuve d’Ascq, PUL, 1985, 164 p.
14 Anne-Marie Dillens (dir.), La peur : émotion, passion, raison, Bruxelles, Facultés universitaires Saint-Louis, 2006, 234 p.
15 Robin Corey, La Peur. Histoire d’une idée politique, Paris, Armand Colin, 2006 [2004], 365 p.
16 Par exemple, Mathilde Bernard, Écrire la peur à l’époque des guerres de religion : une étude des historiens mémorialistes contemporains des guerres civiles en France, 1562-1598, Paris, Hermann, 2010, 396 p.
17 Paul Virilio, L’administration de la peur, Paris, textuel 2010, 94 p.
18 Laurent Bonelli, La France a peur. Une histoire sociale de l’insécurité, Paris, La Découverte, 2010, 422 p.
19 Jean Delumeau, La peur en Occident, op. cit., p. 21.
20 Guy de Maupassant, La peur, Paris, LGF, 2000 [1884], p. 34.
21 Voir par exemple Robert Hollier, La Peur et les états qui s’y rattachent dans l’œuvre de Maupassant, Lyon, 1912, thèse de médecine.
22 Guy de Maupassant, La peur, ouv. cit., p. 41.
23 Voir par exemple Annales, HSS, mars-avril 2010, no 2, 562 p.
24 Martine et Caroline Laffon, Les Monstres. L’Imaginaire de la peur à travers les cultures, Paris, La Martinière, 2004, p. 6.
25 André de Lorde et Albert Dupeux, Les Maîtres de la peur, Paris, Delagrave, coll. « Palas », 1927, 430 p.
26 Voir notamment, Jacques Tourneur, Les figures de la peur, Rennes, PUR, coll. « Le Spectaculaire », 2007, 247 p.
27 Voir en particulier Michel Porret, « La grande menace », dans Michel Porret (dir.), Objectif bulles, Chêne-Bourg, Georg éditeur, coll. « L’équinoxe », 2009, p. 203-231.
28 Voir par exemple l’ouvrage déjà ancien de Francis Heckel, De l’émotion aux troubles nutritifs. La névrose d’angoisse, Paris, Masson, 1917, p. 202-207. Voir aussi Michèle Bompard-Porte, L’angoisse : psychanalyse des peurs individuelles et collectives, Paris, A. Colin, 2004, 302 p.
29 Robien Corey, La peur. Histoire d’une idée politique, op. cit.
30 Michel Viegnes, La peur et ses miroirs, Paris, Imago, 2009, p. 7.
31 Christophe André, Psychologie de la peur : craintes, angoisses et phobies, Paris, Odile Jacob, 2004, 366 p.
32 Michela Marzano, Visages de la peur, op. cit., p. 149.
33 Vigor Renaudière, Des diverses peurs paniques en ce moment, Paris, Au bureau de la Peur, 1823, 14 p.
34 Éric Dufour, Le cinéma d’horreur et ses figures, Paris, PUF, 2006, 224 p.
35 Avoir peur, Paris, Autrement, 1997, 260 p.
36 François Pardigon, Épisodes des journées de juin 1848, Paris, La fabrique éditions, 2008 [1848-1852], p. 168.
37 René Descartes, Les Passions de l’âme, Paris, LGF, [1649], p. 125 et p. 154-15.
38 Cyrille Koupernick, Le livre des peurs, Paris, Ramsay, 1987, 241 p.
39 La peur de la fin du monde, ou explications rassurantes sur la comête de 1857, Paris, Grouard, 1857, 2 p.
40 Gil Blas, 1er mars 1887.
41 François de Nion, La peur de la mort, Paris, A. Savine, 1891, 307 p. ; Jean Proal, La peur de vivre, pièce radiophonique, 1947, 42 ff.
42 Christophe André, Psychologie de la peur, Paris, Odile Jacob, 2004, 366 p.
43 G. Durtal (pseudonyme de Gilbert Robin), Journal d’un psychiatre, Paris, Éditions Mondiales, coll. « Del Duca », 1957, p. 27.
44 Ibidem, p. 40.
45 Ibid., p. 108.
46 Michel Viegnes (dir.), La peur et ses miroirs, op. cit., p. 13.
47 Blaise Cendrars, Du monde entier au cœur du monde, Paris, Gallimard, 2006, p. 37.
48 Pierre Mannoni, La peur, Paris, PUF, coll. « Que-sais-je ? », 1982,, 127 p.
49 Annie Stora-Lamarre (dir.), Archives de la peur. Les « populations à risque » dans la Franche-Comté au XIXe siècle, Besançon, Presses universitaires franc-comtoises/Annales littéraires de l’université de Franche-Comté, 2000, 191 p.
50 Sur l’histoire des sentiments et des émotions, voir notamment, Anne-Claude Ambroise Rendu et Christian Delporte (dir.), L’indignation. Histoire d’une émotion politique et morale, XIXe-XXe siècles, Paris, Nouveau Monde éditions, 2008, 254 p. et Frédéric Chauvaud et Ludovic Gaussot (dir.), Histoire et actualité de la haine, Rennes, PUR, 2008, 313 p.
51 Serge Vallon, La peur de la peur, Ramonville Saint-Agne, ERES, 1998, p. 5.
52 Voir les deux livraisons de la revue Écrire l’histoire consacrées aux émotions, Éditions Gaussen, mai 2008 et octobre 2008.
53 Jan Plamper, « The History od Emotions: An Interview with William Reddy, Barbara Rosenwein, and Peter Stearns », History and Theory, 49, 2010, p. 237-265.
54 Voir par exemple, Joanna Bourke, Fear : a cultural history, London, Virago, 2005, 500 p.
55 Rodolphe Töpfler, Nouvelles et mélanges, Genève-Paris, Le double et AB Cherbuliez, 1840, p. 325 et p. 38.
56 Goya, Panique ou Le Colosse (1808), Museo del Prado, Madrid.
57 Courbet, Le Fou de peur ou Le Désespéré (1843-45), Nasjonalmuseet, Oslo.
58 François Dosse, Renaissance de l’événement, Paris, PUF, coll. « Le nœud gordien », 2010,, 352 p.
59 Pour un aperçu, voir André de Lorde, Cauchemars, Paris, Renaissance du livre, coll. « In extenso », 1921,, 80 p.
60 Voir notamment Alain Duhamel, Les peurs françaises, Paris, Flammarion, 1992, 275 p. ; Éric Maurin, La peur du déclassement : une sociologie des récessions, Paris, Le Seuil, coll. « La République des idées », 2009, 93 p.
61 Louis Chevalier, Classes laborieuses, classes dangereuses à Paris pendant la première moitié du XIXe siècle, Paris, Plon, 1958, 566 p. Voir aussi Dominique Kalifa, Crime et culture au XIXe siècle, Paris, Perrin, 2005, 331 p.
62 Céline Regnard-Drouot, Marseille la violente. Criminalité, industrialisation et société (1851-1914), Rennes, PUR, 2009, 361 p.
63 Françoise Briegel et Michel Porret (dir.), Le criminel endurci, récidive et récidivistes du Moyen Âge au XXe siècle, Genève, Droz, 2006, 395 p.
64 Michelle Perrot, « Quand la société prend peur de sa jeunesse en France au XIXe siècle », dans Les jeunes et les autres. Contributions des sciences de l’homme à la question des jeunes, Vaucresson, CRIV, 1986, p. 19-27.
65 François Jarrige, Au temps des tueuses de bras : les bris de machine à l’aube industrielle, 1780-1860, Rennes, PUR, coll. « Carnot », 2009, 368 p.
66 Simone Weil, « La vie et la grève des ouvriers métallos », Œuvres, Paris, Gallimard, coll. « Quarto », [1936] 1999, p. 163.
67 Robert Castel, L’insécurité sociale. Qu’est-ce qu’être protégé ?, Paris, Seuil, 2003, 95 p.
68 Gérard Noiriel, Immigration, antisémitisme et racisme en France (XIXe-XXe siècle). Discours publics, humiliations privées, Paris, Fayard, 2007, 717 p.
69 Jean-Pierre Allinne et Mathieu Soula (dir.), Les Récidivistes. Représentations et traitements de la récidive, XIXe-XXIe siècle, Rennes, PUR, 2010, 286 p.
70 Voir aussi Aurore François, Veerle Massin, David Niget (éd.), Violences juvéniles sous expertise(s), Louvain, Presses universitaires de Louvain, coll. « Histoire, justice, sociétés », 2011, 294 p.
71 Voir notamment Jean-Clément Martin, Violence et révolution française : essais sur la naissance d’un mythe national, Paris, Le Seuil, coll. « L’univers historique », 2006, 338 p.
72 Voir par exemple Emmanuel Fureix, « L’iconoclasme politique (1814-1848) : une violence fondatrice ? », dans Jean-Claude Caron, Frédéric Chauvaud, Emmanuel Fureix et Jean-Noël Luc (dir.), Entre violence et conciliation. La résolution des conflits socio-politiques en Europe au XIXe siècle, Rennes, PUR, 2008, p. 231-242.
73 Voir notamment, Dominique Lejeune, La peur du rouge en France : des partageux aux gauchistes, Paris, Belin, 2003, 303 p.
74 Maurice Renard, L’invitation à la peur, Toulouse, Éditions Ombres, coll. « Petite bibliothèque Ombres », [1926] 2010, 247 p.
75 En prolongement, voir notamment, Carlo Ginzburg, Peur, révérence, terreur : quatre études d’iconographie politique, Dijon, Presses du réel, 2011, ouvrage reprenant quatre textes dont l’un entreprend une « histoire oblique du présent ».
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