Chapitre IX. L’impossible réforme fiscale ? (6 mars 1952-17 juin 1954)
p. 251-269
Texte intégral
1L’investiture de Pinay le 6 mars 1952 marque le retour de la droite et de l’orthodoxie budgétaire. Soutenu par la majeure partie des organisations patronales, le nouveau gouvernement organise une vaste concertation pour dessiner enfin la réforme fiscale, puis il fait adopter une loi d’amnistie et annonce un renforcement de la lutte contre la fraude. La concertation permet de confronter les points de vue des représentants des intérêts économiques et sociaux sur la fiscalité et la normalisation comptable et plus largement sur leurs relations avec l’État. Les résultats sont décevants. Le consensus sur les principes de la réforme à introduire reste insuffisant pour en préciser les contours. L’affirmation d’une conception plus moderne de la fiscalité et la prolongation des travaux du Conseil supérieur de la comptabilité stimulent les progrès des techniques comptables et les réflexions sur la normalisation sans convaincre davantage ceux qui s’opposaient à l’augmentation des réglementations. Le durcissement du contexte social et politique lié à la stabilisation des prix, à l’augmentation des revendications salariales et aux menaces pesant sur les marges des petits commerçants et producteurs ne favorise pas la réforme. Les méfaits d’un système fiscal à deux vitesses commencent à être dénoncés sans qu’aucune alternative ne se dessine. L’arbitraire des forfaits et le resserrement des contrôles sur les plus grands contribuables n’améliorent pas les relations entre les entreprises et le fisc. L’examen des conséquences de l’échec de la concertation initiée par Pinay sur le processus de normalisation comptable permet d’expliquer comment dès son investiture le 17 juin 1954 Mendès France réunit les conditions de la réforme.
L’embellie Pinay ?
2Ancien membre du Conseil national de Vichy, Pinay symbolise le retour du libéralisme offensif. Son investiture, ajoutée à l’insatisfaction croissante de l’opinion à l’égard des injustices du système fiscal, incite à confier à une commission, dite commission Loriot du nom du conseiller d’État qui en est le vice-président, le soin de présenter rapidement un projet de réforme des impôts, le 7 avril 19521. Pour accomplir sa tâche, la commission organise une vaste consultation sur les questions fiscales. Les organisations patronales, l’ordre des experts comptables et des comptables agréés et les administrations fiscales sont consultés. La nécessité d’éliminer les incohérences du système, d’éviter les cascades d’impôts et de trouver des taxes plus productives et moins fraudées fait l’unanimité. Il s’agit aussi d’arriver à changer les mentalités des agents du fisc et des contribuables et de les forcer à s’entendre sur des recouvrements rendus moins arbitraires par le recours aux normes comptables. L’amnistie fiscale accompagne cette quête de réforme.
La commission Loriot et les organisations patronales
3Présidée par Pinay, en charge du portefeuille des Finances, la commission compte vingt personnalités, dont six parlementaires, le commissaire général au Plan, des agents des directions du Budget et des Impôts et un représentant de l’Assemblée permanente des présidents des chambres de commerce. On y trouve aussi Caujolle, représentant le Conseil économique.
4La première séance se déroule le 10 avril 19522. Les auditions sont programmées. Les chambres de commerce et de métiers, le CNPF et la CGPME pour les chefs d’entreprises, l’ordre des experts comptables, le syndicat FO des Contributions directes et celui des cadres de l’administration centrale des Finances sont reçus. La rapidité de la convocation, la brièveté de chaque audition (une demi-heure) et la nécessité de fournir une documentation détaillée à la commission montrent que les organisations consultées ont déjà établi leur doctrine sur la question. La convocation les incite néanmoins à un effort de réflexion et de synthèse. Les auditions des chefs d’entreprises sont prévues le 18 avril 19523. Le CNPF est le seul à demander le report de son audition pour que sa commission de la fiscalité puisse préparer une « solide note de synthèse » présentant ses propositions. Les autres groupes répondent immédiatement à l’appel. Les inconvénients du système fiscal et les objectifs de la réforme à introduire font l’unanimité : il va falloir trouver les moyens de simplifier le système, de limiter les prélèvements, d’augmenter leur rendement, d’améliorer leur répartition et d’accentuer la lutte contre la fraude.
5Les positions de la CGPME, présentées par Gingembre, délégué général, et par Deleau, membre de sa commission fiscale, insistent particulièrement sur la nécessité de garantir les « droits des contribuables » contre l’arbitraire administratif « sévissant » dans la fixation des forfaits et dans les contrôles des comptabilités4. La confédération encourage aussi à recourir davantage aux impôts indirects exigeant un minimum de formalités, plus difficiles à frauder et « coûtant moins cher à recouvrer ». Comme autre avantage, cette fiscalité ne soumet pas les petites et moyennes entreprises à « un plan comptable particulièrement complexe et impossible à réaliser ». L’idée d’une taxe unique sur le chiffre d’affaires, perçue au stade de la transformation de la matière première et définie par grandes familles professionnelles en se basant sur un nombre restreint d’entreprises, est avancée. En matière d’impôt direct, la CGPME réclame « un impôt unique et équitable » établi sur le revenu réel, et non sur un « revenu fictif » issu d’évaluations comptables. Elle recommande d’envisager un « régime spécial » de calcul du bénéfice réel pour les entreprises individuelles et familiales et de limiter au maximum les déclarations exigées des petites et moyennes entreprises. La définition d’un « barème de marges bénéficiaires » appliqué au montant des achats des entreprises pour évaluer le bénéfice imposable qui soulagerait les forfaitaires ne disposant pas de « comptabilité probante », est aussi suggérée. La délégation de l’Assemblée des présidents des chambres de commerce de l’Union française succède à celle de la CGPME. Elle se réfère à plusieurs rapports dont celui de Rodolphe Hottinguer, lié aux grandes maisons bancaires alsaciennes et suisses et membre d’une des plus importantes maisons de la Haute banque, adopté par la commission financière et fiscale de la chambre de commerce de Paris le 4 juillet 19515. Ce rapport accuse « les excès de la fiscalité », les « contrôles tracassiers » et l’instabilité des réglementations fiscales tentant de contourner les effets de la fraude, de décourager les initiatives et de menacer le potentiel économique des entreprises. Invitant à restaurer « un climat plus serein entre l’administration et les contribuables », il suggère de revoir « les principes » de la politique fiscale et de cesser de « confisquer chaque enrichissement visible » en confondant « le revenu et le capital ». L’impôt sur le revenu est la cible principale de ses critiques : mal réparti, il frappe surtout les industriels et les commerçants en laissant les « contribuables politiquement influents » jouir « de privilèges étendus ». La réforme doit rétablir l’équité au profit des entreprises industrielles et commerciales qui sont les plus lésées. Pour y parvenir, Hottinguer préconise de calculer les bénéfices imposables à partir du bilan et de se baser sur l’enrichissement, conformément à la jurisprudence du Conseil d’État6. Il invite à mieux prendre en compte les variations des prix et celles de la valeur d’acquisition, de remplacement et de modernisation de l’outillage dans le calcul des amortissements, afin que la fiscalité ne soit plus « un obstacle à une meilleure productivité ». Il recommande aussi d’adopter le système du stock outil dès que son mode d’évaluation sera précisé. Un autre rapport présenté au nom des chambres de commerce invite à prendre en compte les effets de la dépréciation monétaire sur le bénéfice imposable et ne plus taxer « des bénéfices comptables » qui deviennent fictifs en période de dépréciation monétaire7.
6Desmyttère et Labarre, représentants du CNPF, sont auditionnés le 24 avril 19528. Leur prestation témoigne d’un réel effort de synthèse pour représenter des intérêts souvent contradictoires. Dénonçant la « fuite généralisée devant l’impôt » liée à l’excès des prélèvements, ils analysent les motifs des dysfonctionnements et présentent les « idées directrices de la réforme ». Ils recommandent de limiter « le prélèvement global » aux capacités de la richesse nationale, de comprimer les dépenses publiques et de rétablir l’égalité « des charges » entre les catégories sociales, même s’ils admettent certaines discriminations dans les taux « en fonction de la nature des revenus9 ». Le CNPF invite également à favoriser l’épargne, son investissement et le « développement de la productivité » et à mieux tenir compte de l’inflation pour que l’impôt frappe « le revenu net » et non le capital10. Il réclame aussi de pouvoir calculer les amortissements selon la valeur de remplacement et d’améliorer le système de la réévaluation des bilans répugnant « aux entreprises de caractère personnel qui y voient le danger d’une sur taxation de la valeur de l’entreprise ». En matière de surtaxe progressive, le CNPF suggère qu’elle soit imposée à un taux « extrêmement faible » pour freiner la fuite devant l’impôt. Il signale enfin les désaccords entre les industriels et les commerçants sur le projet de taxe sur la valeur ajoutée, les premiers étant « favorables à une taxe frappant toutes les opérations du secteur industriel et du secteur commercial », alors que les seconds demandent à en être exemptés. Tous s’accordent cependant pour réclamer une réforme de l’ensemble des trois taxes indirectes (à la production, sur les transactions et locale) et de l’impôt, ainsi que des pénalités plus rigoureuses contre les fraudes. Le CNPF se distingue toutefois de la CGPME en écartant tout impôt « assis sur une base unique et destiné à remplacer la quasi-totalité des autres impôts ». Ces désaccords demeurent et la commission Loriot continue ses auditions. Les comptables professionnels qui y ont déjà une place privilégiée avec la présence de Caujolle, et les représentants des directions financières défendent leur point de vue.
Les positions des experts comptables et des directions financières
7Les comptables professionnels partent du même constat que les représentants du patronat et des administrations fiscales : le système est inefficace, il génère la fraude et des inégalités croissantes et exige une réforme d’envergure.
8Justin Alexandre, président du Conseil supérieur de l’ordre est auditionné par la commission le 25 avril 195211. S’exprimant en son nom propre, il dénonce « l’avalanche » des formalités et des décisions fiscales « parfois contradictoires », l’omniprésence de l’administration dans le règlement des contentieux et le découragement de l’épargne et de l’investissement provoqué par la lourdeur des impôts directs. Alexandre propose quelques changements. Il suggère de remplacer la taxe sur le chiffre d’affaires, jugée trop complexe, par une taxe unique « appliquée au produit là où il est le plus facile à atteindre », d’aménager les taux des impôts directs en fixant un maximum de 50 % et de n’excuser « aucune défaillance » dans les prélèvements. Reprenant une idée défendue par le Conseil de l’ordre depuis son congrès de Strasbourg en 1949, il invite à généraliser l’application du plan comptable de 1947 pour faciliter les contrôles et la gestion des entreprises. Pour épauler le travail des comptables, les encourager en même temps à respecter les lois et à engager leur responsabilité par la certification des bilans destinés au fisc, il conseille d’augmenter les délais des déclarations.
9Les réflexions suscitées par la convocation de la commission Loriot incitent le Conseil de l’ordre à organiser une enquête interne sur la question fiscale, un « véritable Gallup de professionnels » selon Caujolle qui présente ses résultats à la commission le 21 mai 195212. Les comptables réclament une plus grande équité fiscale et une meilleure protection des contribuables13. Ils demandent d’accentuer la prédominance des impôts indirects, de simplifier la fiscalité, d’unifier les régies et de renforcer la lutte contre la fraude. Beaucoup souhaiteraient que l’administration leur reconnaisse une « qualité de mandataire, par analogie avec les avocats, » pour renforcer leur autorité et les aider éventuellement à remettre leur client « dans le droit chemin ». S’ils sont nombreux à suggérer d’envisager un plan comptable simplifié pour les petites et moyennes entreprises, peu demandent de renoncer au forfait ou d’imposer l’obligation comptable. Plus d’un quart dénonce la mauvaise adaptation de la fiscalité aux règles comptables. Certains invitent à distinguer de façon rigoureuse et obligatoire le bilan comptable et le bilan fiscal. Tous réclament que leur responsabilité soit dégagée lorsque les inexactitudes proviennent des fraudes ou des omissions d’un client. Caujolle indique aussi que l’Ordre est très réservé sur la question de la certification des bilans. Relançant le débat sur cette question devant la commission Loriot, il suggère que la certification relève de certains experts comptables « agréés par l’administration » afin qu’elle puisse se concentrer sur l’examen des comptes des entreprises dépourvues de certificat14. Selon un représentant de l’administration fiscale, cette mesure n’est pas nécessaire puisque le code des impôts oblige déjà les contribuables à indiquer le nom du comptable ou des experts chargés de leur comptabilité. Caujolle invite alors à simplifier le système, dénonçant la situation actuelle qui oblige les sociétés à effectuer chaque année 47 versements, dont 36 à fréquence mensuelle, à différentes caisses publiques « sans qu’aucune raison valable ne justifie ces chevauchements ». La question de la certification des bilans est à nouveau évoquée dans une note de synthèse adressée à la commission Loriot par des dirigeants de l’Ordre le 14 août 195215. Bien qu’elle contribue à garantir la régularité des comptabilités et qu’elle protège les contribuables des pénalités fiscales dès qu’ils ont payé leurs honoraires, la certification est rejetée. Elle ne se justifie pas dans les entreprises possédant déjà « un service comptable bien organisé » dont elle risque d’alourdir fortement les charges et reviendrait à accorder un monopole peu justifié aux experts comptables et aux comptables agréés aux dépens des comptables salariés. Ces débats internes conduisent l’Ordre à préciser ses principales orientations à l’égard de la fiscalité au congrès du 25 octobre 1952 : l’indépendance entre la comptabilité et la fiscalité, la nécessité que les comptables appliquent les règles conformes à la terminologie et au classement du plan de 1947 pour faciliter la gestion des entreprises, et l’établissement par l’État d’une « comptabilité publique ajustée au plan comptable général » permettant de donner l’exemple aux entreprises privées. La comptabilité analytique reste considérée comme « l’œuvre » de chaque entreprise ou de chaque famille professionnelle. À partir de la commission Loriot, la profession se reconnaît donc officiellement un rôle dans le processus de normalisation et dans l’amélioration du système fiscal.
10Pourtant, les représentants des différents échelons de l’administration financière auditionnés par la commission en avril et mai 1952 ne lui accordent pas de fonction particulière. Ils condamnent tous l’inefficacité et l’injustice du système fiscal et invitent à la réforme. Le 23 avril 1952, le syndicat national des cadres des Contributions directes et du Cadastre juge même la situation catastrophique16 :
« Quand la fraude atteint l’importance dont on a donné maints exemples, […] quand les commerçants, les industriels, les professions libérales peuvent dissimuler au fisc le tiers, la moitié – ou plus – de leur chiffre d’affaires ou de leurs revenus, quand enfin, le contrôle est à ce point inexistant que certains enquêteurs n’hésitent pas à considérer comme le moindre mal un régime de forfaits même sommairement établi, il existe encore des impôts, mais il n’existe plus de régime fiscal. »
11De son côté, le syndicat des cadres de l’administration centrale des Finances insiste sur l’incohérence de la surtaxe progressive prélevée en 1951 qui repose sur des dissimulations évidentes17. Ce point est confirmé par le comité des inspecteurs généraux des Finances dans le projet de réforme qu’ils soumettent à la commission. Précisant que le développement « irrépressible » de la fraude oblige à revoir les fondements mêmes du système basé sur les déclarations de contribuables dont « la sincérité » s’est révélée « tout à fait utopique », ils réclament la réduction des déclarations exigées et le remplacement de l’ensemble des taxes (production, prestations de services, achat et transactions) par une taxe unique à taux uniforme portant sur les ventes18. Tous recommandent de conserver la distinction entre les forfaitaires, commerçants de détails de moins de dix salariés, prestataires de service de taille réduite et artisans de moins de six ouvriers, et les autres contribuables réglant la taxe d’après une déclaration mensuelle du montant effectif de leurs ventes. La concentration des contrôles qu’ils suggèrent permettrait d’accroître leur efficacité sans augmenter le nombre des contrôleurs, mais elle suppose une réorganisation des régies financières. La conscience du problème fiscal est largement partagée comme le précise le représentant du ministère de l’Industrie et du Commerce à la commission Loriot : les augmentations successives expliquent la rentabilité croissante de la fraude et l’essor du « sans facture19 ».
12Les réflexions suscitées par cette commission témoignent bien d’un profond malaise. Visant à rétablir des relations plus satisfaisantes entre les contribuables et le fisc, l’amnistie apparaît comme une condition indispensable à la réforme.
L’amnistie fiscale
13Adoptés le 14 avril 1952, plusieurs articles de la loi de Finances pour l’exercice 1952 introduisent une amnistie fiscale : totale, illimitée et inconditionnelle. Les dissimulations et les falsifications sont astreintes au payement des droits simples, mais ne seront soumises à aucune pénalité si elles sont déclarées avant le 1er janvier 1952 et si elles n’ont fait l’objet d’aucune procédure administrative ou judiciaire, ni d’aucune reconnaissance d’infraction, avant cette date20. En contrepartie, le renforcement de la répression des fraudes compensera le coût de l’opération. Ses principes et ses conditions d’application sont précisés dans une étude préliminaire datée du 23 mars 195221. L’amnistie vise deux objectifs : permettre aux contribuables de faire réapparaître et d’utiliser « normalement » les fonds ou les biens provenant des bénéfices, revenus ou capitaux sur lesquels ont porté leurs fraudes et les « convertir à la sincérité fiscale » en gommant les erreurs passées et en faisant craindre des « sanctions draconiennes pour l’avenir ». Ses modalités sont précisées dans une instruction ministérielle du 16 avril 195222. Si les intentions sont bien établies, certaines procédures évoluent au gré des pressions. Ainsi, le projet accorde initialement aux contribuables deux mois pour rectifier leurs déclarations à compter de la promulgation de la loi, soit au 20 juin, et quinze jours seulement pour la déclaration de chiffre d’affaires, mais le CNPF obtient un délai supplémentaire jusqu’au 31 juillet pour la déclaration des avoirs à l’étranger et des valeurs mobilières étrangères détenues en France23. L’échéance de la régularisation de toutes les « remises en ordre » est ensuite repoussée au 31 juillet.
14Les débats suscités par l’amnistie témoignent de la diversité des interprétations du malaise fiscal. La critique vient de la gauche communiste et des socialistes. Certains sénateurs socialistes soutiennent l’opération, mais la jugent insuffisante pour résorber la fraude qu’ils expliquent par la multiplication des intermédiaires commerciaux ne pouvant survivre qu’en complétant leur bénéfice normal de façon illicite. L’un d’eux considère même que l’amnistie va creuser l’écart entre l’industrie, le commerce et les entreprises de petite taille en offrant aux gros fraudeurs qui se seront démasqués « un beau cadeau de Pâques », alors que rien n’est prévu pour les artisans, ni pour les petits boutiquiers « qui ont eu la malchance de se faire prendre ». Il précise que l’amnistie va aggraver la disparité des charges entre les artisans et les petits commerçants et les entreprises ou sociétés disposant de comptables ou d’experts fiscaux. La « course aux dégrèvements en faveur de l’industrie » qui conduit à « charger d’autres productions » et à créer d’autres inégalités fiscales, l’inconfort de la situation des commerçants forfaitaires « systématiquement contrôlés à l’occasion du renouvellement du forfait » et trop lourdement imposés alors qu’ils n’ont aucune aide de l’État sont également décriés. Les sénateurs demandent d’augmenter les effectifs des agents du contrôle pour améliorer les vérifications des « entreprises importantes ». Le syndicat national des cadres des Contributions directes reprend cette suggestion et invite à étendre le régime du forfait à tous les « commerces de détails dont les transactions se font au comptant » et à accélérer « les procédures de remises gracieuses ». Tous s’accordent sur la déception suscitée par les espoirs que le gouvernement avait fait naître en indiquant qu’il allait réformer et chacun appréhende le probable mécontentement des commerçants et des artisans forfaitaires lorsqu’ils constateront la forte augmentation du montant des forfaits en juillet et en août.
15L’analyse des effets de l’amnistie sur le nombre et la nature des déclarations rectificatives de revenus dans le département de la Seine (l’un des plus significatifs) présentée le 25 septembre 1952 par l’inspecteur général des Finances de Veyrac ne rassure pas24. L’étude est exhaustive puisque le délai des rectifications expirait le 31 juillet 1952. 2 061 déclarations rectificatives sont enregistrées sur un total de 104 872 entreprises imposées au bénéfice réel (52 001 sociétés et 52 871 personnes physiques), soit un rapport de 1,96 %. La comparaison du nombre des déclarations rectificatives et du nombre total des personnes physiques ou morales imposées à la surtaxe progressive ou à l’impôt sur les sociétés donne un pourcentage encore plus faible (2 061 déclarations rectificatives sur 952 794 impositions) de 2,15 pour 1 000. Ceci montre que la menace de sanctions plus rigoureuses accompagnant les mesures d’amnistie n’a pas beaucoup « impressionné » les contribuables. De Veyrac constate en outre que, sur le total des déclarations rectificatives de BIC ou d’impôt sur les sociétés, 90 % au moins concernent l’évaluation des stocks. Il en conclut que les rectifications profitent davantage aux entreprises qu’à l’administration puisque l’instruction ministérielle du 17 avril 1952 les autorise à déduire du bénéfice imposable du premier exercice non amnistié la fraction de la plus-value issue des rectifications de stocks afférente aux exercices amnistiés. L’autorisation est soumise à la condition de fournir des « justifications suffisantes » sur la valeur du stock à l’ouverture de l’exercice non amnistié. Or selon de Veyrac, si la rectification de la valeur du stock ne présente pas de difficulté lorsque les insuffisances d’évaluation viennent de sous-estimations, les quantités déclarées étant considérées comme exactes, « la preuve » de la valeur du stock à la date de l’ouverture du premier exercice non amnistié est « pratiquement impossible » quand elles viennent de dissimulations quantitatives, ce qui est le plus fréquent. L’administration tient compte de cette impossibilité en ne retenant qu’un quart de la plus-value issue de la rectification du stock dans le bénéfice imposable du premier exercice non amnistié. Le surplus, soit les trois quarts, censé provenir de dissimulations antérieures est donc couvert par l’amnistie. Ces « dispositions libérales » doivent permettre aux contribuables de « régulariser la valeur de leur stock au minimum de frais ». De Veyrac précise en outre que la mesure était nécessaire pour éliminer la « fraude par minoration » obligeant les contribuables « à minimiser sans cesse », ce qui attirait l’attention des vérificateurs et conduisait à une impasse. L’amnistie permet ainsi de sortir certains contribuables d’une voie sans issue, offrant également aux fraudeurs le bénéfice légal d’un dégrèvement.
16Le système permet en effet aux entreprises de réduire les bénéfices qu’elles avaient déclarés pour l’exercice 1951 lorsque la décote sur les stocks dépasse le montant de la rectification propre à l’exercice 1951, ou en l’absence de toute décote, si elles peuvent prouver que la minoration du stock est plus élevée au 31 décembre 1950. Selon De Veyrac, le rétablissement de bilans sincères entraînera « des effets heureux » à la condition que les rectifications de valeurs des stocks ne servent pas de tremplin à de nouvelles minorations frauduleuses. Il recommande donc d’établir un inventaire rigoureux des stocks des entreprises à l’occasion des vérifications de bénéfices pour éviter que « l’amnistie tourne au préjudice du Trésor et au triomphe des fraudeurs ». Il s’agit donc de montrer aux « contribuables honnêtes » que l’amnistie précède le déclenchement « d’une lutte acharnée contre la fraude ». Les résultats des travaux de la commission Loriot et ceux de l’amnistie engagent l’avenir de la réforme fiscale.
Une impasse ?
17Les prévisions les plus pessimistes sur les chances de réussite de la commission Loriot et de l’amnistie sont réalisées. La commission ne propose aucune synthèse susceptible de répondre aux attentes contradictoires qu’elle a provoquées. Elle ne peut donc qu’entraîner des frustrations. En août 1952, un comité lui succède, réunissant des techniciens et des parlementaires sous la direction de Pierre Abelin, futur secrétaire d’État aux Finances. Il hérite d’un contexte dégradé par l’annonce du renforcement de la répression des fraudes25 et par l’augmentation du montant de la plupart des forfaits26. L’échec probable des tentatives de réforme repousse d’autant la progression de la normalisation comptable.
L’échec des tentatives de réformes ?
18Le rapport général de la commission Loriot est présenté le 12 juillet 195227. Constatant l’alourdissement du poids des impôts et la réalité de la fraude, il invite à assainir la situation en allégeant les charges de l’État et en renforçant son efficacité. Il appelle à un effort de rénovation de la législation, de réorganisation administrative et de répression des fraudes pour modifier « l’état d’esprit à l’égard du devoir fiscal ». Les inconvénients du système fiscal de l’artisanat, qui fait du forfait « un marchandage » soumis à l’arbitraire de l’administration, sont particulièrement décriés. Pour réduire les inégalités entre contribuables, la commission préconise de remplacer tous les impôts et toutes les charges par un impôt unique sur l’enrichissement que l’entreprise procure à la nation. Cet impôt sur la valeur ajoutée correspondrait à la différence entre le montant des produits bruts acquis par l’entreprise et le montant des fournitures y afférents. Son taux serait déterminé en divisant le revenu national par l’ensemble des prélèvements effectués. Le CNPF juge ce rapport très positif, alors que la CGPME le critique28. Pour elle, la commission « a bien dégagé » les objectifs d’une « véritable » réforme du système, mais les choix retenus pour y parvenir sont inopérants29. Ces divergences sur la réforme à entreprendre hypothèquent ses chances de réussite.
19Le comité Abelin tente de surmonter les difficultés. Il préconise de simplifier les taxations, d’augmenter les bénéficiaires de forfaits, d’unifier les régies fiscales, de créer un casier fiscal géré par un bureau spécialisé30 et de supprimer les exonérations. Il invite aussi à encourager la normalisation comptable en simplifiant au maximum les évaluations et en détaxant les plus-values de réévaluation sous certaines conditions. Le comité suggère enfin de ne pas imposer trop lourdement les détaillants, chez qui la fraude est intense en matière de taxe sur le chiffre d’affaires, mais de confier à des vérificateurs spécialisés le suivi de la comptabilité d’un petit nombre d’entreprises et les croisements de données nécessaires pour contrôler les chiffres d’affaires. Ces suggestions sont mal reçues par les organisations patronales. Le CNPF reproche particulièrement au comité de renoncer aux allégements prévus par la commission Loriot31.
20La réflexion sur la réforme se prolonge. Certains comme Jean-Paul Palewski, député RPF de Seine-et-Oise, ou Guy Petit, Raymond Marcellin et Camille Laurens, proches du groupe Indépendant paysan, suggèrent de renforcer la représentation des contribuables et les pouvoirs des commissions départementales chargées des conciliations et des arbitrages32. D’autres comme Raymond Boisdé, président de la fédération professionnelle de l’habillement, député gaulliste33, ou Édouard Frédéric-Dupont, député de l’Action Républicaine et Sociale (ARS) de Paris, veulent « défendre le contribuable contre l’arbitraire de l’administration des Finances » et demandent qu’il soit assisté lors de la vérification de ses écritures comptables et devant les commissions de contentieux ou de recours. Les socialistes sont les plus constructifs car ils s’engagent à présenter un programme complet afin de rectifier l’échec de Pinay et celui de son successeur Mayer, qui n’ont pas rétabli l’équité fiscale ni réformé l’impôt. Le contre-projet socialiste vise à organiser une fiscalité rationnelle et à équilibrer les impôts indirects et directs, le produit des premiers dépassant alors du double celui des seconds. Il envisage de restaurer la taxe sur la production introduite en 1936, de définir une taxe unique, d’exempter le commerce de détail de toute imposition et de renforcer le contrôle fiscal. La mesure phare de ce contre-projet consiste à alléger les taux de l’impôt sur les sociétés grevant les sociétés non anonymes, et notamment les sociétés de famille à responsabilité limitée. Il prévoit aussi d’autoriser les entreprises soumises à l’impôt sur le revenu des personnes physiques d’après leur bénéfice réel, ou à l’impôt sur les sociétés, à constituer en franchise d’impôt une réserve d’équipement et de modernisation dont la dotation annuelle serait limitée. Une taxe sur la statistique, permettant d’évaluer « la consistance réelle des patrimoines » et d’effectuer les recoupements nécessaires pour le contrôle de la déclaration de revenus, est également envisagée. Tirant leurs informations des syndicats des agents des Contributions directes, les socialistes insistent sur les effets concrets de la disparité des régimes fiscaux et sur l’importance de la question comptable. La proposition de réforme présentée par le député Francis Leenhardt le 27 mars 1953 est la plus aboutie. Elle explique les différences d’attitudes des contribuables face à l’impôt par l’importance de leurs affaires et propose une réforme à deux vitesses passant par la généralisation du plan comptable aux grandes entreprises, les petites et moyennes ne pouvant pas supporter les frais d’un comptable ou d’un conseiller fiscal en seraient dispensées34. Ces dernières sont qualifiées de « fiscalement faibles » tandis que les premières regroupent les contribuables « fiscalement forts35 ». Le contre-projet écarte l’idée d’un impôt général et permanent sur le capital, suspecté d’inciter une fraude de grande ampleur. La direction du Budget retient deux idées : la généralisation de la tenue d’une comptabilité matière dans les entreprises industrielles et commerciales et la diffusion du plan comptable, mais elle rejette le projet d’imposer la publication du montant des impôts individuels pour ne pas heurter « le sentiment bien naturel du secret des affaires et des revenus36 ». Elle écarte aussi la réorganisation administrative préconisée, considérant que « le bureau fiscal unique » nécessaire à la réalisation du casier fiscal « n’est pas forcément la meilleure solution ».
21L’Assemblée repousse les propositions socialistes37. Les réflexions se prolongent au début de 1954. Plusieurs projets envisagent d’éradiquer la fraude en allégeant la fiscalité des petits détaillants et des petits producteurs et d’encourager la modernisation en soutenant l’investissement. Les Contributions directes suggèrent de supprimer la taxe sur les transactions et la taxe locale et de les remplacer par une taxe sur le chiffre d’affaires38. La création d’une taxe professionnelle forfaitaire est également suggérée par le gouvernement pour lutter contre les fraudes à la taxe sur le chiffre d’affaires39. Son application permettrait aux petits contribuables d’éviter de recourir aux coûteux services d’un comptable professionnel, et à l’administration de concentrer ses efforts pour contrôler les autres impositions. Marquant le retour aux signes extérieurs et incapable de combler la perte de recettes liée à la réforme, ce projet est condamné par les Contributions directes. Un autre motif du rejet tient à l’impossibilité de « fonder sur une évaluation indiciaire un impôt de très grand rendement », sous peine d’entraîner de profondes injustices. La réforme de la taxe à la production, pourtant nécessaire pour alléger les obligations du petit commerce et réprimer la fraude de ce secteur, reste donc à l’étude. Les Contributions directes suggèrent d’abandonner progressivement la taxe sur les transactions, dont le caractère cumulatif est unanimement critiqué, ainsi que la taxe locale additionnelle pour dispenser les commerçants non producteurs de toute déclaration de chiffre d’affaires. La suppression de l’assujettissement à la taxe proportionnelle sur le revenu des contribuables dont les bases d’imposition seront inférieures à un certain montant est également recommandée. Selon les Contributions directes, ces mesures permettraient de surmonter l’obstacle que la fiscalité « continue d’opposer » au développement économique au début de 195440. L’impossibilité d’améliorer le rendement de l’impôt freine effectivement les réformes. Le problème parait sans solution à la veille de l’investiture de Mendès France. Seule la nécessité du renforcement des contrôles est généralement admise.
Le renforcement des contrôles fiscaux
22L’évolution du contrôle fiscal est liée à la réorganisation des services fiscaux et à l’état des réflexions sur la réforme. Les actions engagées contre la fraude augmentent fortement depuis 1948 et la tendance s’accentue à partir de l’amnistie41. La réorganisation des contrôles explique ce succès. La polyvalence des agents des différentes régies intervenant dans les vérifications se généralise. Ainsi, entre le 1er juillet 1953 et le 1er juillet 1954, les agents qui n’appartiennent pas à l’administration des Contributions directes interviennent dans près d’un quart (22 %) du total des vérifications de déclarations d’impôts sur les bénéfices et rapportent 24,5 % du total des droits simples et des pénalités recouvrés. Selon une brochure du ministère des Finances consacrée au contrôle fiscale, la participation des agents de l’Enregistrement à la vérification des comptabilités peut même être encore développée. Le ministère envisage aussi d’accélérer le rythme des contrôles des entreprises assujetties aux bénéfices réels en élargissant le « champ du forfait des taxes sur le chiffre d’affaires ». La lutte contre la fraude qu’il entreprend ne recourt donc à « aucune nouveauté », mais s’appuie sur une « meilleure application » des directives et surtout sur une « meilleure coordination des tâches des trois régies ».
23C’est donc davantage la réforme de 1948 et les expérimentations qui l’ont suivie que l’amnistie de 1952 qui explique le renforcement de la lutte contre la fraude. La polyvalence des agents par exemple se diffuse depuis une première expérience effectuée à Cholet en 1947. Quarante brigades polyvalentes spécialisées par profession constituées dans la Seine en 1950 permettent ensuite de nouer des contacts avec les représentants des professions et d’effectuer de véritables « expertises économiques » pour contrôler les déclarations. D’autres mesures consolident davantage encore les contrôles. Ainsi en 1950, la création de brigades nationales et départementales pour vérifier les très grosses sociétés qui aboutissent à de forts rehaussements de bénéfices ou de taxe sur le chiffre d’affaires jusqu’à 1953. Ce résultat conforte l’analyse de la brochure du ministère des Finances qui réfute « l’objection technique contre les polyvalents » tendant à leur attribuer des rendements plus faibles que ceux « des monovalents ». Les mêmes succès sont enregistrés par les brigades de recoupement et de contrôle des stocks spécialisées dans la recherche des ventes sans facture. La première brigade de ce type est créée en novembre 1949 à Paris. Elle compte quatre inspecteurs principaux et quarante commissaires du contrôle économique dirigés par un inspecteur principal, incorporés à la DGI en 1950. Les recoupements et le contrôle des stocks sont pris en charge par 300 agents spécialisés dans chaque département à partir du 1er janvier 1953. Dans la Seine, les croisements d’informations et la concentration des contrôles sur une profession (les tailleurs, le commerce de parfumerie de détail, puis les pharmaciens) permettent aux brigades de contrôler 11 000 commerçants et de relever des irrégularités chez 19 % d’entre eux entre 1949 et 1953. Pour la France entière et au premier semestre de 1954, sur les 17 975 commerces contrôlés par les brigades de recoupement 41 % sont en situation irrégulière42. À partir de 1953 cependant, la baisse des résultats des brigades est notable et correspond à l’interruption des enquêtes des polyvalentes.
24Ce type de contrôles accentue le sentiment de surveillance. Il est d’autant plus efficace qu’il s’accompagne d’une véritable amélioration des échanges de renseignements entre les Contributions directes et indirectes grâce à la circulation d’une fiche comportant le double de la déclaration de bénéfice et le montant du forfait. La réunion des directeurs coordonne et dirige l’action des agents à l’échelle départementale, décide des pénalités et définit le programme de vérifications. Le service d’étude et de contrôle fiscal dirige ses activités et diffuse les informations. Il organise les grandes opérations comme l’opération margarine en 1953-1954 ou encore l’opération nationale « bulletin de commande » qui se déroule sur l’ensemble du territoire en juin 1953 auprès de 100 000 entreprises (5 % du total français), dont 20 000 comme source de renseignement et 80 000 comme objets du contrôle. La participation de la police à ces opérations et le recours aux signes extérieurs de dépenses sont également développés43. Des brigades de contrôle de revenus, spécialisées dans la taxation d’après les signes de dépenses sont créées à Paris en juin 1952 et à Antibes en avril 1953. Elles obtiennent de francs succès44. L’amélioration des techniques des vérificateurs, le contrôle des rapports de vérification par sondage et l’extension de la méthode des rapports de vérification, qui n’existait jusque-là que pour les impôts sur le revenu, favorisent aussi le rendement des contrôles. L’harmonisation des pénalités met fin aux pratiques « un peu anarchiques » des Contributions directes, dont témoignent les pourcentages moyens de pénalités variant de 0,2 % à 40 % selon les départements en 1950. La politique de pénalité graduée est d’abord introduite dans la Seine en 1950, puis étendue après l’amnistie de 1952. Son application se durcit ensuite, comme en témoigne l’augmentation des poursuites en correctionnelle. Ces résultats expliquent que les directions financières et fiscales considèrent que le travail des brigades est « capital pour la survie » de l’impôt sur le revenu. Au bout du compte selon la brochure du ministère des Finances, les effets indirects de la lutte contre la fraude sont incontestables, même s’ils sont limités par le nombre de vérificateurs. Plusieurs éléments tendent à montrer qu’ils permettent effectivement d’améliorer « la sincérité des déclarations ». Il en est ainsi par exemple de l’importance nouvelle des stocks apparue dans la comptabilité et dans les déclarations des entreprises après l’amnistie. En revanche, les progrès effectués restent faibles dans les secteurs où la sincérité fiscale était initialement « assez bonne » alors qu’ils sont très importants dans les secteurs où elle était moindre. De ce fait, l’augmentation des bénéfices déclarés par les sociétés après l’amnistie a été relativement faible, tandis que les revenus déclarés par les commerçants, les gérants majoritaires de société à responsabilité limitée et les membres de professions non commerciales ont connu une hausse « considérable ». Tout ceci contribue à la forte augmentation de la part de l’impôt direct dans les revenus de l’État, malgré l’accroissement de la taxe sur le chiffre d’affaires et alors que les impôts sur les revenus sont restés stables (impôt sur les sociétés mis à part). Pourtant, bien qu’il évalue les effets indirects du contrôle fiscal à 60 milliards de recettes annuelles pour les taxes sur le chiffre d’affaires et le triple pour celles qui proviennent des impôts sur le revenu, en francs de 1955, le ministère des Finances n’entend pas s’appuyer sur la généralisation du plan comptable pour soutenir ces bons résultats45.
Le report de la normalisation comptable
25Dans les années 1950, la diffusion des normes comptables homogènes est favorisée par l’augmentation de la concentration des entreprises. La meilleure connaissance des exemples étrangers, en particulier de l’organisation des firmes anglo-saxonnes depuis les missions de productivité, l’encourage également46. Il en va de même des publications de l’ordre professionnel et de l’amélioration de la formation des comptables d’entreprises qui profitent des enseignements des différentes structures comme le CNAM. Au tournant des années 1950, la nébuleuse calculatrice s’est étoffée et sa survie n’est plus menacée. Le succès de la diffusion du plan comptable de 1947 est un autre signe du nouvel attrait pour la normalisation.
26La première édition du plan comptable général de 1947 et de sa brochure de vulgarisation rencontre un succès inattendu. Dès sa parution, 3 000 exemplaires sont vendus en un mois, une seconde édition est tirée à 7 000 exemplaires. L’édition de 1950 est épuisée en cours d’année, laissant 4 000 demandes insatisfaites. Même si le succès d’édition ne préjuge pas de l’application spontanée du plan comptable général dans l’entreprise, on peut penser que la vente de plus de 45 000 exemplaires de l’édition officielle du plan comptable par l’imprimerie Delmas entre 1947 et 1956, ajoutée à l’augmentation constante des demandes de renseignements adressées au secrétariat du Conseil supérieur de la comptabilité, s’accompagne d’une application effective dans de nombreuses entreprises47. Ce succès marque la réussite de la stratégie de souplesse adoptée pour combattre les réticences initiales des chefs d’entreprises. La commission Loriot, qui envisage la normalisation comme remède efficace contre la fraude a soutenu ce combat48. Pourtant, le consensus n’est pas suffisamment solide pour convaincre.
27Le Conseil supérieur de la comptabilité s’engage à « emporter l’adhésion volontaire des entreprises » en leur fournissant un outil « hors pair ». Il confie à un comité d’études le soin d’examiner toutes les critiques et suggestions relatives au plan comptable général de 1947 et de suggérer une révision. Le comité achève ses travaux en novembre 1953 au terme de trente-deux séances qui aboutissent à la décision de refondre partiellement le plan de 194749. Il insiste sur l’importance de l’effort à fournir pour rédiger le nouveau plan comptable, sur l’absence de tout projet de sanction et sur la décision de laisser les entreprises totalement libres en matière de comptabilité analytique. Le comité suggère aussi d’ouvrir rapidement le débat sur la question des plans professionnels pour savoir s’ils doivent fixer certaines obligations et il recommande de remplacer ces plans par des « guides » ne présentant que les recommandations définies par les groupements professionnels. La question de l’obligation est à nouveau discutée lorsque les conclusions du comité sont adoptées par l’assemblée plénière du Conseil supérieur de la comptabilité en février 195450. Poujol et Turpin estiment que les organisations professionnelles devront rester libres d’introduire « des règles impératives » dans les dispositions générales de leurs plans ou de leurs guides. D’autres conseillent au contraire de renforcer les contraintes. La question des guides comptables professionnels est à nouveau examinée en avril 195451. Le Conseil décide de limiter la réglementation aux entreprises désirant contracter avec l’État ou recourir à son aide financière (marchés publics et demandes de crédit) et dans les autres cas, de procéder par recommandations en laissant une large initiative aux entreprises et aux associations professionnelles compétentes. Soulignant que les guides comptables devront s’insérer dans une amélioration d’ensemble de la documentation des chefs d’entreprise et les aider à promouvoir de meilleures méthodes de gestion, il précise qu’ils ne seront efficaces que s’ils permettent de résoudre le problème de la réévaluation des bilans, nécessaire à l’harmonisation. Il insiste enfin sur la nécessité de consulter les dirigeants d’entreprises, notamment ceux des petites et moyennes affaires, dès que les premiers travaux auront été menés en collaboration avec les associations représentatives de branches favorables à la normalisation.
28Un comité est chargé de réfléchir à l’établissement des guides comptables professionnels. Il va aussi s’assurer de la coordination des actions par branche et de la centralisation de renseignements homogènes dans le cadre de la comptabilité nationale. Les pressions en faveur d’un texte peu contraignant l’emportent. En juin 1954, le Conseil supérieur de la comptabilité décide de préciser en tête du futur plan comptable général que ses dispositions ne sont obligatoires que pour les entreprises visées par un texte législatif ou réglementaire52. La séance est consacrée à l’examen des principes exposés en guise d’introduction du futur plan comptable. Un comité de rédaction est constitué pour mettre au point le texte de la nouvelle édition du plan comptable. Les ultimes modifications sont apportées en mars 195553. Des mises au point ponctuelles sont encore étudiées par la troisième section qui s’intéresse aux nouvelles dispositions de la comptabilité analytique, mais aucun changement important ne doit plus modifier le document approuvé par le Conseil supérieur de la comptabilité. Les travaux sont encouragés par la DGI et par le groupe socialiste de l’Assemblée. Il faut pourtant attendre 1957 pour que le nouveau plan comptable général soit publié.
29Les réflexions suscitées par les réformes fiscales ralentissent le développement de la normalisation. Les crédits du Conseil supérieur de la comptabilité sont amputés. Son Bulletin d’informations cesse de paraître après le second numéro. Le comité Abelin préconisait d’obliger les entreprises imposées au bénéfice réel d’établir une déclaration fiscale dans des formes normalisées et envisageait de majorer les prélèvements de 25 % pour celles qui contourneraient ces prescriptions, mais il n’a pas été suivi54. La question de l’obligation demeure controversée. Le Conseil supérieur de la comptabilité suggère d’obliger les entreprises à joindre des documents normalisés à leur déclaration de bénéfices en attendant l’adoption du nouveau plan comptable. La nouvelle formule de déclaration des BIC établie par les Contributions directes permet de réaliser ce souhait : l’article 64 du projet de loi du 26 mars 1953 portant aménagements fiscaux impose aux entreprises au bénéfice réel de fournir des documents normalisés avec leur déclaration de résultats55. Le tableau à remplir comporte un résumé des comptes d’exploitation et de pertes et profits et l’indication détaillée des réfactions extracomptables à opérer en vue d’obtenir le résultat fiscal, le bilan et un relevé des amortissements et des provisions, présentés conformément à des modèles fixés par décret. Cette mesure doit faciliter le contrôle des déclarations de bénéfices et permettre de comparer les renseignements fournis par une même entreprise au titre de différents exercices et par les diverses entreprises d’une même branche professionnelle. André Brunet précise que l’article 64 ne vise pas à créer de nouvelles obligations, mais qu’il invite simplement à prévoir « une présentation uniforme des renseignements demandés » extraits de la comptabilité actuelle. Il souligne en outre que les comparaisons envisagées ne viseraient qu’à essayer « de trouver un moyen simple » d’aider les administrations fiscales à établir les forfaits. Les explications ne parviennent pas à convaincre et l’article 64 est disjoint de la loi par trente voix contre huit et une abstention. Il reste donc beaucoup à faire pour que la comptabilité normalisée et ses spécialistes soient comptés parmi les alliés de l’entreprise et de la lutte contre la fraude.
*
30La réforme fiscale rencontre des obstacles qui paraissent insurmontables. Contrairement aux attentes, la fraude s’amplifie et les techniques d’évasion se perfectionnent après l’amnistie de 195256. La déception suscitée par ce constat incite à renforcer la lutte. De sévères instructions introduites en septembre 1953 engagent à réprimer les insuffisances de déclarations commises de mauvaise foi. Parallèlement, le ministre des Finances décide de créer à titre temporaire des « commandos fiscaux » pour faire des redressements spectaculaires qui seront abondamment commentés par la presse. Ces mesures ont peu de poids sur la rentabilité fiscale. En revanche, le consentement à l’impôt est clairement compromis. De nouvelles propositions de loi tendant à améliorer le système se succèdent sans aboutir57. La restauration de la moralité fiscale paraît impossible malgré les efforts de concertation et les réflexions. Les recommandations du comité Abelin conduisent à de nouveaux projets de loi qui aboutiront au vote de la taxe à la valeur ajoutée (loi du 10 avril 1954), mais la réforme est inaboutie. La direction des Contributions directes analyse la crise de façon pertinente : la réforme est condamnée par la dégradation des marges des petits contribuables ne devant leur survie qu’à la dépréciation monétaire et au « sans facture », par la revalorisation des salaires pesant sur les résultats des entreprises et par le renforcement de la lutte contre la fraude et l’augmentation du poids des impôts. Se croyant victimes « d’intolérables brimades », certains artisans et commerçants fomentent une révolte contre l’impôt et contre l’État dans les régions atteintes par la crise économique partielle comme à Romans, où l’industrie du cuir invite à refuser les contrôles fiscaux. Si la fronde est localisée dans un premier temps, le mouvement se structure à Saint-Céré en juillet 1953, deux mois avant les mesures énergiques de répression décidées par le gouvernement Laniel.
31Cependant, même si la tentative de concertation pour dessiner une réforme globale de la fiscalité débouche sur une impasse, elle favorise le changement d’attitude d’une partie des producteurs et des commerçants à l’égard de la normalisation comptable. Les entreprises importantes et moyennes sont désormais acquises à la comptabilité. Mis en relief par Francis Leenhardt, le dualisme fiscal oppose les « fiscalement faibles et les fiscalement forts » se traduisant par deux attitudes distinctes à l’égard des pratiques comptables et scindant ouvertement les organisations patronales. Les pratiques des directions financières et fiscales confortent ce dualisme. Dans ce contexte, la normalisation des comptabilités privées peut apparaître comme une mesure de justice sociale, mais aucun gouvernement n’ose l’imposer.
Notes de bas de page
1 CAEF B 28 369. Commission de réforme fiscale (1952). Commission instituée par le décret no 52-373 du 7 avril 1952.
2 CAEF B 28 388. Réforme fiscale (1951-1954). CR des séances de la commission Loriot.
3 Idem. Séance du 18 avril 1952. Le CR contient cinq annexes : Annexe 1. Note de Caujolle relative à l’orientation des travaux de la commission ; Annexe 2. Texte de la CGPME ; Annexe 3. Texte de la chambre de commerce de Paris ; Annexe 4. Texte de l’Assemblée des présidents des chambres de métiers de France ; Annexe 5. Marcel Houyvet, « La réforme de la fiscalité », rapport présenté au congrès national de la fédération nationale des coopératives de consommation, juin 1952.
4 Id. Examen du texte de la CGPME, « Les principes d’une réforme ».
5 Idem. Annexe 3. Assemblée des présidents des chambres de commerce, « Éléments pour une réforme fiscale », rapport présenté au nom de la commission des questions financières et fiscales de la chambre de commerce de Paris.
6 Id. Exposé technique présenté au nom des chambres de commerce.
7 Id. Séance du 18 avril 1952. Rapport présenté au nom de la commission des questions financières et fiscale de la chambre de commerce de Paris par Robert Payolle, séance générale du 5 novembre 1947.
8 Id. Annexe 1. Commission de la fiscalité du CNPF, 24 avril 1952. Document complémentaire : note sur la réforme fiscale présentée par Robert Labarre.
9 Id. « Il est notamment impensable qu’en matière industrielle et commerciale, le taux de l’impôt varie de 18 à 34 % (ces 34 % étant accrus de l’impôt de 18 % sur les distributions), selon la personnalité juridique de l’exploitant. Il est également invraisemblable que parmi des activités concurrentes certaines soient pratiquement exonérées, notamment les coopératives, alors que d’autres supportent l’impôt. Il est enfin inadmissible que le revenu du portefeuille soit taxé à 18 % lorsqu’il est perçu par une personne physique alors qu’il supporte 34 % s’il est perçu par une personne morale ».
10 Id. Le « principe de la non-imposition des hausses sur stocks doit être absolu » car « la taxation de plus-values purement nominales sur les stocks, au titre de l’impôt sur les sociétés ou de la taxe professionnelle, aboutit à l’amputation du capital ».
11 Id. Audition de l’ordre des experts comptables et des comptables agréés.
12 CAEF B 28 369. Commission de réforme fiscale 1952. Séance du 21 mai 1952.
13 CAEF B 28 370. Commission de réforme fiscale 1952. Suggestions présentées par les organismes professionnels. Caujolle, présentation des résultats de l’enquête intitulée « Les experts comptables devant la réforme fiscale ». Il fait état de « plus de 350 réponses, dont certaines ont été élaborées en commun par des conseils ou par des syndicats régionaux ».
14 CAEF B 28 388. Réforme fiscale (1951-1954). CR des séances de la commission Loriot. Séance du 3 juillet 1952. Caujolle, observations sur le projet de rapport.
15 CAEF B 28 372. Réforme fiscale 1952. Commission Loriot. Notes d’études (août septembre 1952). Note no 19. Note sur la certification des bilans par les experts comptables, 14 août 1952.
16 CAEF B 28 388. Réforme fiscale (1951-1954). CR des séances de la commission Loriot. Séance du 23 avril 1952. Deux brochures sont publiées à cet effet : « L’harmonisation des fiscalités » et « La réforme fiscale ».
17 Idem. Séance du 7 mai 1952. Ébauche d’un projet de réforme du système fiscal élaboré par le comité des inspecteurs généraux des Finances et acceptés à l’unanimité de ce comité, 5 mai 1952.
18 Id. Séance du 23 avril 1952. Annexes 4 et 5. Rapport sur l’activité de l’IGF entre 1946 et 1947 présenté par Dussaussois.
19 Id. Séance du 8 mai 1952. Note du ministère de l’Industrie et du Commerce, 2 mai 1952.
20 CAEF B 650. Fonds fiscalité. Amnistie fiscale 1952. Conseil de la République, débats parlementaires, jeudi 10 avril 1952, CR de la séance, JO no 35, 11 avril 1952. Le sénateur Armengaud est rapporteur général de la loi.
21 Id. Étude préliminaire des principes et conditions d’application de l’amnistie fiscale, 23 mars 1952.
22 Idem. Conditions d’applications de l’article 46 de la loi no 52-401 du 14 avril 1952. Articles 46 à 60 sur l’amnistie et sur la poursuite des fraudes, JO no 94, 17 avril, signé Pinay et Jean Moreau, secrétaire d’État au Budget, le 16 avril 1952, p. 4 061-4 063.
23 Id. JO du 19 avril 1952, p. 4130. Texte signé par : Jean Moreau, Jean Berthoin, rapporteur général de la commission des Finances, Raymond Marcellin, secrétaire d’État à la présidence du Conseil, Pinay.
24 Id. IGF. Note no 175-52 de l’inspecteur général de Veyrac adressée au directeur général des Impôts sur le nombre et la nature des déclarations rectificatives de revenus faites dans le département de la Seine à la suite des mesures d’amnistie, 25 septembre 1952.
25 CAEF B 28 372. Réforme fiscale 1952. Comité Abelin. Rapport du comité Abelin.
26 CAEF B 58 847. Contrôle fiscal (1954-1958). Réorganisation du contrôle fiscal, note signée Pierre Allix, directeur général des Impôts, 30 octobre 1952.
27 CAEF B 28 388. Réforme fiscale (1951-1954). Rapport général de la commission Loriot, 12 juillet 1952.
28 ANMT 72 AS 1201. Assemblées générales du CNPF (1952-1954 et 1957). Rapport général sur l’activité de la commission économique générale pendant le second semestre 1952 présenté à l’assemblée générale du 16 janvier 1953. CR des travaux de la commission de la fiscalité présenté par Labarre, p. 6-8. Reconnaissant « l’effort sincère de hautes personnalités non techniciennes pour aboutir à une répartition plus équitable de la charge publique et à une détente importante des taux » dans le cadre du rapport Loriot, le rapporteur précise que le « projet pouvait servir de point de départ à l’élaboration d’un nouveau système fiscal acceptable par tous amendé et rectifié sur certains points ». L’acceptation du stock outil en mai 1952 contribue à la satisfaction du CNPF.
29 « La CGPME prend position sur la réforme fiscale ». Les informations confédérales, bulletin hebdomadaire de la CGPME, 23 septembre 1952. CR de la réunion du comité directeur du 17 septembre 1952 sous la présidence de Gustave Deleau. Extrait de la résolution adoptée à l’unanimité : la Confédération « constate que le projet présenté ne contribuera ni à juguler la fraude, ni à augmenter les ressources de l’État, ni à assurer une meilleure répartition de la charge fiscale tant qu’il ne sera pas mis fin aux privilèges et aux exonérations dont bénéficient certains secteurs ; adjure le gouvernement […] de procéder à une véritable refonte du système fiscal actuel […] ; tient à rappeler qu’une politique de stabilisation à caractère plus général et durable ne saurait être assurée du succès en dehors d’une réforme fiscale assise sur l’accroissement de la productivité ».
30 CAEF B 28 372. Réforme fiscale 1952. Comité Abelin, notes d’études (août septembre 1952). Note no 43. DGI, service de la coordination. Le casier est prévu par l’article 45 de la loi du 6 janvier 1948 qui envisage d’organiser dans chaque département sous l’autorité du ministère des Finances un ou plusieurs centres du casier fiscal réunissant les renseignements fiscaux sur les contribuables. Il constitue l’innovation principale du projet de la commission de réforme fiscale et comporte des inconvénients liés au fait que « le français répugne à toute mesure d’immatriculation qui comporte pour lui des sujétions administratives auxquelles il se plie mal ».
31 ANMT 72 AS 1201. Assemblées générales du CNPF (1952-1954 et 1957). Rapport général sur l’activité de la commission économique générale au second semestre 1952, op. cit. Labarre reconnaît cependant que le comité est à l’origine de la première mouture de la TVA et qu’elle comporte « un effort très appréciable dans le sens d’une détaxation des investissements et un effort notable pour réaliser une plus grande égalité fiscale entre industrie commerce et coopératives agricoles ».
32 CAEF B 58 847. Contrôle fiscal (1954-1958). Direction générale des Impôts. Réflexion sur la modification éventuelle de la commission départementale des impôts directs, secrétariat d’État au Budget. 21 juillet 1954. Amendement no 137 au projet de loi no 7-678.
33 F. Tristram, « La DGI… », doctorat, op. cit., p. 283.
34 CAEF B 58 840. Réformes fiscales (1952-1958). Suggestions, propositions, études. Proposition de loi no 6-057 présentée le 27 mars 1953 par Francis Leenhardt et les membres du groupe socialiste tendant à simplifier la fiscalité et à en corriger l’injustice. Article 46.
35 Idem. Assemblée nationale, annexe au PV de la séance du 27 mars 1953, discussion du projet de loi gouvernemental no 5 798 du 6 mars 1953 et proposition de loi no 6-057 déposée par Francis Leenhardt et par les membres du groupe socialiste.
36 Id. Direction du Budget. Comparaison du projet gouvernemental et du projet socialiste établie par l’administration fiscale.
37 Id. Direction des Contributions directes. Non signé, « Deux ans de retouches fiscales », Études et documents, novembre 1955.
38 CAEF B 58 841, Réforme fiscale. Direction des Contributions directes. Travaux préparatoires. Note relative au projet de réforme fiscale en matière de taxe sur le chiffre d’affaires, 31 août 1953.
39 Idem. Projet de loi no 7-164 portant réforme fiscale déposé à l’Assemblée nationale le 13 novembre 1953 et loi du 10 avril 1954. 1. Travaux préparatoires. Note sur la taxe professionnelle forfaitaire, 9 mars 1954.
40 Id. Note des Contributions directes, « À propos d’une réforme fiscale », 10 mars 1954.
41 Bibliothèque du CAEF. Non signé, Dix ans de contrôle fiscal en France…, ouvr. cit.
42 Ibid. Ce pourcentage est « exceptionnellement élevé à cause du grand nombre de pâtisseries visitées dans le cadre de l’opération margarine qui porte sur un domaine ou la fraude est très répandue sous une même forme et qui bénéficie de sources de renseignement concentrées ».
43 Ibidem. En guise d’expérience, la préfecture de police de Paris remet à DGI la liste de 3 000 propriétaires d’automobiles américaines domiciliées à Paris en 1948. Cette communication n’aboutit à aucun résultat pratique.
44 Ibid. La brigade de Paris parvient à des rehaussements dans 10 % des cas. Le contrôle vise des praticiens de méthodes non admises par la médecine officielle « qui inclinent à occulter leurs revenus ». Douze dossiers sont à l’étude. Le travail est fastidieux avec 298 affaires traitées pour 1204 cas examinés et 906 affaires abandonnées après enquête sommaire.
45 CAEF B 58 846. Réformes fiscales. Réforme des taxes sur le chiffre d’affaires dans le secteur de la distribution, projets (1954-1955).
46 D. Bensadon, « L’influence de la mission de productivité… », op. cit.
47 CAEF B 55 197. Commission de normalisation des comptabilités Réunions de la formation plénière-activités du bureau (1941-1982). Texte du plan comptable général (document interne, rédaction non définitive), octobre 1956.
48 CAEF B 28 372. Réforme fiscale 1952. Commission Loriot, notes d’études (août septembre 1952). Note no 18 concernant les impôts directs. Obligation du plan comptable pour les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 50 millions de francs, 14 août 1952.
49 CAEF B 55 204. Conseil supérieur de la comptabilité. Activités des sections d’études. Seconde section (1954-1957). Rapport sur les modifications à apporter au plan comptable, Georges Poujol, 16 novembre 1953.
50 Idem. PV de la séance consacrée à l’examen du rapport Poujol sur les modifications à apporter au plan comptable général, 24 février 1954.
51 CAEF B 55 198. Réunions de la formation plénière du Conseil supérieur de la comptabilité (1947-1961). Note préparant l’avis sur l’établissement des guides comptables professionnels, 13 avril 1954.
52 CAEF B 55 204. Conseil national de la comptabilité. Activités des sections d’études. PV de la séance du 10 juin 1954.
53 Idem. PV de la séance du 16 mars 1955.
54 CAEF B 28 372. Réforme fiscale 1952. Rapports du comité Abelin.
55 CAEF B 28 384. Réforme fiscale. Assemblée nationale, session de 1953, no 6038, annexe au PV de la séance du 26 mars 1953. Rapport fait au nom de la commission des Finances sur le projet de loi no 5-798 portant aménagements fiscaux par Charles Barangé, député.
56 CAEF B 58 841. Réforme fiscale. Direction des Contributions directes. Note « À propos d’une réforme fiscale », 10 mars 1954.
57 CAEF B 58 840. Réformes fiscales (1952-1958). Suggestions, propositions, études. Direction des Contributions directes.
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