Dossier documentaire
p. 341-373
Texte intégral
1Ce dossier documentaire vise à étayer tout autant qu’à illustrer les analyses qui précèdent. En le constituant, nous nous sommes efforcés de ne négliger aucune des dimensions du fait cantonal. De même, le lecteur le constatera, si, pour d’évidentes raisons pratiques, nous avons été conduits à privilégier l’Ouest et plus encore le département d’Ille-et-Vilaine, nous avons malgré tout voulu élargir ce dossier aux autres régions du pays, bien conscients que l’histoire du canton est depuis sa création une histoire fondamentalement nationale, qui ne prend sens et ne se laisse comprendre qu’à cette échelle. Qu’il nous soit permis de remercier ici, pour leur aide précieuse, Guillaume Bailly, Guy Baudelle, Emmanuel Cherrier, Henri Courrière, Noël Lagadec, Laurent Le Gall, Michel Le Guénic, Corinne Marache, et Jean-François Tanguy.
2Yann Lagadec et Jean Le Bihan
I. Le canton, entre histoire et géographie
3Chaque canton est un petit territoire qui peut se définir par deux principaux caractères : son centre – entendons son chef-lieu – et ses limites. Un territoire dont l’étendue est pensée et justifiée depuis l’origine en fonction des missions, politiques et administratives, dévolues au canton, ou, pour dire mieux encore, en fonction des conditions pratiques de réalisation de ces missions. Il était inévitable, dans ces conditions, que le nouveau maillage cantonal, inventé puis stabilisé au cours de la décennie révolutionnaire, fût révisé au fil du temps, au nom même des transformations affectant l’exercice de ces missions.
L’invention d’un nouveau maillage
4Le découpage des cantons, au printemps 1790, s’est fait parfois dans la précipitation. D’où, dès l’été 1790, de multiples réclamations et pétitions de la part des communes souhaitant devenir chef-lieu ou changer de circonscription. Les modifications de la carte cantonale restent cependant rares, y compris en l’an VI lorsque des projets d’« arrondissement » et d’agrandissement des cantons, discutés à Paris, suscitent localement de nouvelles interrogations, de nouvelles suggestions aussi, sous forme de plans notamment. Ce n’est qu’en l’an IX, pendant le Consulat, que de profondes modifications sont apportées à la carte de 1790.
DOCUMENT 1. Le difficile ajustement des limites : le cas de Saint-Germain-en-Coglès (Ille-et-Vilaine, 1790)
5« Vu la requête présentée au Département par la municipalité de S[ain]t-Germain-en-Coglais tendante à ce que cette paroisse soit distraite du canton de S[ain]t-Georges pour être réunie à celui de Fougères, le renvoy au Directoire du District pour donner ses observations et son avis, l’ordonnance soit communiqué à la municipalité de S[ain]t-Georges pour avoir ses observations, sa réponse insérée dans une lettre.
6Le Directoire du District après avoir entendu le procureur sindic, est d’avis que la paroisse de S[ain]t-Germain étant bien plus voisine de Fougères que de S[ain]t-Georges, il lui serait plus commode d’être réunie au canton de la ville. En effet, S[ain]t-Germain est à peu près situé sur une grande route, distante de Fougères d’environ une lieue et demi et y aïant des relations continuelles soit d’affaire, soit de commerce ; il n’en est pas de même de S[ain]t-Georges ; il y a de l’une à l’autre paroisse environ trois lieues, toujours par des chemins bas et en général fort mauvais. Elles ont très peu d’occasions de communiquer et le marché de S[ain]t-Georges n’est presque pas fréquenté par les habitants de S[ain]t-Germain.
7Le Directoire sait que ces raisons ne sont pas entièrement décisives, cependant elles méritent quelque considération quand, comme ici surtout, il y a une distance au moins double d’un endroit à l’autre. C’est en général la proximité des lieux, la commodité des paroisses, la facilité des communications qui a déterminé l’arrondissement des cantons. C’est ce que S[ain]t-Germain réclame en demandant à être de celui de Fougères et ce qui décide le Directoire du District à penser que provisoirement la paroisse de S[ain]t-Germain peut être réunie au canton de la ville. »
8Archives départementales d’Ille-et-Vilaine L 333. Arrêté du 9 septembre 1790.
DOCUMENT 2. Convaincre par la carte : l’exemple des cantons de l’ancien district de Dol (Ille-et-Vilaine, an VI)

Archives départementales d’Ille-et-Vilaine L 333. Frimaire an VI.
Une carte en évolution
9La carte cantonale a beaucoup évolué depuis les années soixante. Cela tient à l’importance des changements intervenus depuis cette époque dans la répartition de la population, changements marqués du sceau de l’urbanisation, qui accroissent mécaniquement les écarts démographiques entre cantons puis poussent l’État à intervenir pour corriger ces écarts. Le remodelage de la carte est particulièrement important au cours des années 1966-1973 : durant le seul été 1973, ce ne sont pas moins de 311 nouveaux cantons qui voient le jour, notamment dans la grande couronne parisienne. Les demandes de remaniement sont récurrentes. Elles surgissent en deux circonstances principales : lorsque sont redessinées les circonscriptions législatives, et lorsque sont publiés les résultats des recensements de population.
DOCUMENT 3. La réception de la réforme de 1973 en Corse

Le Monde, 21 août 1973, p. 7.
DOCUMENT 4. La sempiternelle question de la représentativité des cantons (2000-2001)
10« M. Jacques Oudin attire l’attention de M. le ministre de l’Intérieur sur les inégalités de représentativité des cantons au niveau des départements. Il lui demande, en premier lieu, de bien vouloir lui préciser quels sont les critères qui président aux décisions prises par l’État pour le redécoupage des cantons en fonction de l’évolution des populations. Il lui demande, en second lieu, les raisons qui ont conduit le Gouvernement à ne pas tenir compte des résultats du recensement de mars 1999 pour tenter d’aller vers un meilleur découpage des cantons de façon à réduire les écarts constatés au sein des départements. Il lui demande, enfin, de lui préciser ce qu’il entend faire, d’ici les prochaines élections cantonales de mars 2004, pour améliorer une situation doublement critiquable marquée par les différences de nombre de conseillers généraux rapporté à la population entre les départements et par les inégalités constatées entre les cantons au sein d’un même département. »
11Journal officiel du Sénat, 16 novembre 2000, p. 3894.
12« Réponse. – En l’état actuel du droit, le remodelage de la carte cantonale est décidé par décret en Conseil d’État conformément aux dispositions de l’article L 3113-2 du code général des collectivités territoriales. Il ne peut intervenir dans l’année précédant l’échéance normale du renouvellement des conseils généraux ainsi que le précise l’article 7 de la loi du 11 décembre 1990. Par ailleurs, le Conseil d’État encadre strictement l’action du Gouvernement en matière de remodelage. Sa jurisprudence constante vise, par application du principe d’égalité du suffrage prévu au troisième alinéa de l’article de la Constitution, à diminuer les disparités démographiques qui existent entre les cantons d’un même département. Aucun texte législatif ne prévoit, enfin, une norme de répartition des sièges entre départements. Or les résultats définitifs du recensement général de la population de 1999, au niveau infra-communal dans le cas des secteurs urbains, n’ont été officialisés que dans le courant du premier trimestre 2000, c’est-à-dire dans des délais incompatibles avec ceux de la loi du 7 décembre 1990 précitée. Il est désormais raisonnable de reporter une telle réforme au-delà des élections cantonales des 11 et 18 mars 2001, en l’associant le cas échéant avec celle du mode de scrutin des conseillers généraux prévue dans le cadre de la nouvelle étape de la décentralisation exposée par le Premier ministre à Lille le 27 octobre dernier. »
13Journal officiel du Sénat, 25 janvier 2001, p. 278.
II. La brève expérience des municipalités de canton
14La constitution adoptée à l’été 1795, sans modifier le cadre cantonal défini en 1790, dote le canton de fonctions qu’il n’avait jamais eues encore : ainsi la suppression des districts et des municipalités de commune est-elle compensée par la promotion des administrations départementales et cantonales. Cependant, la mise en place des municipalités de canton s’avère parfois difficile, en raison à la fois du contexte économique et politique global – notamment la Chouannerie dans l’Ouest – et des réticences voire des résistances opposées par les représentants des communes du canton, attachés au maintien d’une administration communale propre.
DOCUMENT 5. La constitution fondatrice du 5 fructidor an III
15« Titre VII – Corps administratifs et municipaux.
16Art. 174 – Il y a dans chaque département une administration centrale, et dans chaque canton une administration municipale, au moins.
17Art. 175 – Tout membre d’une administration départementale ou municipale doit être âgé de vingt-cinq ans au moins.
18Art. 176 – L’ascendant et le descendant en ligne directe, les frères, l’oncle et le neveu, et les alliés aux mêmes degrés, ne peuvent simultanément être membres de la même administration, ni s’y succéder après un intervalle de deux ans. […]
19Art. 178 – Toute commune dont la population s’élève depuis cinq mille habitants jusqu’à cent mille, a pour elle seule une administration municipale.
20Art. 179 – Il y a dans chaque commune, dont la population est inférieure à cinq mille habitants, un agent municipal et un adjoint.
21Art. 180 – La réunion des agents municipaux de chaque commune forme la municipalité de canton.
22Art. 181 – Il y a de plus un président de l’administration municipale, choisi dans tout le canton. […]
23Art. 182 – Dans les communes, dont la population excède cent mille habitants, il y a au moins trois administrations municipales. – Dans ces communes, la division des municipalités se fait de manière que la population de l’arrondissement de chacune n’excède pas cinquante mille individus, et ne soit pas moindre de trente mille. La municipalité de chaque arrondissement est composée de sept membres. […]
24Art. 185 – Les membres de toute administration municipale sont nommés pour deux ans, et renouvelés chaque année par moitié ou par partie la plus approximative de la moitié, et alternativement par la fraction la plus forte et par la fraction la plus faible.
25Art. 186 – Les administrateurs de département et les membres des administrations municipales peuvent être réélus une fois sans intervalle.
26Art. 187 – Tout citoyen qui a été deux fois de suite élu administrateur de département ou membre d’une administration municipale, et qui en a rempli les fonctions en vertu de l’une et l’autre élection, ne peut être élu de nouveau qu’après un intervalle de deux années. […]
27Art. 190 – Les administrateurs sont essentiellement chargés de la répartition des contributions directes et de la surveillance des deniers provenant des revenus publics dans leur territoire. – Le Corps législatif détermine les règles et le mode de leurs fonctions, tant sur ces objets, que sur les autres parties de l’administration intérieure.
28Art. 191 – Le Directoire exécutif nomme, auprès de chaque administration départementale et municipale, un commissaire qu’il révoque lorsqu’il le juge convenable. – Ce commissaire surveille et requiert l’exécution des lois.
29Art. 192 – Le commissaire près de chaque administration locale, doit être pris parmi les citoyens domiciliés depuis un an dans le département où cette administration est établie. – Il doit être âgé de vingt-cinq ans au moins.
30Art. 193 – Les administrations municipales sont subordonnées aux administrations de département, celles-ci aux ministres. – En conséquence, les ministres peuvent annuler, chacun dans sa partie, les actes des administrations de département ; et celles-ci, les actes des administrations municipales, lorsque ces actes sont contraires aux lois ou aux ordres des autorités supérieures. […]
31Art. 199 – Les administrations, soit de département, soit de canton, ne peuvent correspondre entre elles que sur les affaires qui leur sont attribuées par la loi, et non sur les intérêts généraux de la République.
32Art. 200 – Toute administration doit annuellement le compte de sa gestion… »
33Godechot Jacques, Les Constitutions de la France depuis 1789, Paris, Garnier-Flammarion, 1979, p. 121-123.
DOCUMENT 6. « Il m’a été impossible de parvenir à l’organisation du canton » ou les déboires d’un commissaire du Directoire (Gévezé, Ille-et-Vilaine, an V)
34« Rennes, le 5 brumaire an V de la République française, une et indivisible.
35Le commissaire du Directoire près l’administration municipale du canton de Gévezé.
36Au commissaire du Directoire exécutif près l’administration centrale du Département d’Ille-et-Vilaine.
37Le 17 thermidor dernier, j’ai écrit une lettre circulaire aux cinq communes composant le canton de Gévezé afin de se réunir le 27 du même mois en assemblée communale pour nommer leurs agents municipaux et adjoints afin de les organiser de suite pour pouvoir mettre les administrés à lieu de jouir du bienfait de la Constitution et de les délivrer, par le moyen, de l’espèce d’anarchie à laquelle ils sont en proie, faute d’organisation.
38Je les prévenais que, faute de procéder à leur élection, le Directoire en aurait nommé aux frais des communes qui refuseroient de le faire, et que ceux qui seroient nommés et qui n’accepteraient pas, le gouvernement en nommerait à leurs frais ; que j’étois instruit qu’on devoit envoyer dans les communes récalcitrantes des garnisons à leurs frais et qui y séjourneroient jusqu’à leur organisation.
39La commune de La Mézière m’adressa son procès-verbal de nomination que je reçus au commencement de fructidor.
40Je reçus dans le même temps celui de la commune de Gévezé. La commune de Pacé m’adressa également le sien quelque temps après.
41La commune de Parthenay ne s’est réunie pour nommer que le 25 fructidor, et je n’en ai reçu le procès-verbal que les premiers jours de vendémiaire.
42Relativement à la commune de Montreuil-le-Gat, elle ne s’est point réunie pour procéder à la nomination. J’ay été instruit indirectement qu’ils n’avaient pas cru devoir le faire, attendu que le citoyen Sevedavy qui avoit été nommé agent municipal le 18 brumaire d[erni]er lors de l’assemblée primaire qui eut lieu au chef-lieu de canton, exerçoit les fonctions depuis ce moment malgré qu’il eut donné son remerciement le 4 frimaire suivant. Je dois observer que la nomination du citoyen Sevedavy est nulle, égallement que celle de son adjoint, attendu qu’il est dit dans le procès-verbal de nomination dont extrait est cy-joint, que les citoyens de Montreuil ont nommé d’une voix unanime pour leur agent municipal le dit Mathurin François de Sevedavy du chef-lieu, et pour adjoint le citoyen Jean-Marie Lefeuvre fils, de Souvenel, tandis qu’au terme de la loy, les élections se font au scrutin, que d’un autre côté, ils ne se sont pas retirés en assemblée communale pour faire cette nomination, ce qui est encore une nullité.
43Ne pouvant parvenir à faire la commune de Montreuil nommer ny avoir aucune réponse, je fis une circulaire le 17 vendémiaire d[erni]er, que j’adressai aux agents municipaux des différentes communes du canton pour se trouver le 22 du même mois à Gévezé, chef-lieu du canton, à neuf heures du matin, pour être installés dans leurs fonctions, et que je m’y trouverois pour l’organisation.
44Je m’y transportai effectivement, il ne se trouva que les agents municipaux et adjoints des communes de La Mézière et de Pacé pour être instalés, comme le prouve le procès-verbal cy-joint. Le cit[oyen] Aubin nommé agent municipal pour la commune de Gévezé, se présenta, comme le prouve le même procès-verbal, pour mettre sa démission d’une manière fort malhonnête, mais il ne fut pas possible de rien décider attendu qu’il n’y avait pas un nombre suffisant d’agents municipaux. Voilà la seconde fois qu’il est nommé et qu’il refuse sous prétexte qu’il veut quitter l’endroit, tandis qu’il y est étably. J’observe à son égard qu’il ne refuse que parce qu’il faut remplir la place gratuitement, mais qu’il dit à tous ceux qui veulent l’entendre, qu’il accepteroit bien la place de juge de paix s’il étoit nommé, place qu’il n’est pas en état de remplir. L’adjoint de Gévezé ne se présenta pas non plus. Celui qui avait été nommé pour la commune de Parthenay ne se présenta pas non plus pour être instalé, ny son adjoint. Il prétend n’être pas capable de remplir les fonctions, ne sachant qu’à peine lire l’écriture imprimée, et incapable d’écrire, tandis que l’ordre qu’il a écrit en marge du dénoncé qu’il a fait le 26 fructidor d[erni]er, et qu’il a attaché à une pétition qu’il a présentée au Département qui est cy-jointe, prouve qu’il est en état suffisamment de la remplir puisqu’il a bien rempli la place de maire de la même commune il y a quelques années. Il prétend qu’il y a nullité dans sa nomination en soutenant avoir été nommé à haute voix. Le procès-verbal de nomination qui est ci-joint prouve le contraire.
45Personne ne se présenta non plus pour la commune de Montreuil et je n’ai point reçu de procès-verbal de nomination, comme je l’ay déjà observé.
46Vous voyez, Citoyen, que malgré toutes les stimulations que j’ai pu faire, il m’a été impossible de parvenir à l’organisation du canton par la mauvaise volonté de ceux qui ont été nommés qui ne veulent pas accepter.
47Je pense que le seul parti qu’il y ait à prendre est celui d’en faire nommer par le Directoire exécutif aux frais de ceux qui refusent, et aux frais de la commune qui n’a pas voulu nommer. […]
48Salut et fraternité.
49Ridard. »
50Archives départementales d’Ille-et-Vilaine L 340. Lettre du président de l’administration cantonale de Gévezé à l’administration du département d’Ille-et-Vilaine, 5 brumaire an V.
III. Une tentation récurrente : la réforme cantonale
51Par l’expression de réforme cantonale on entendra l’ensemble des projets qui, depuis la fin du Directoire, ont réclamé que le canton redevienne une collectivité territoriale. Il est difficile en vérité de classer tous ces projets, dont l’inventaire complet n’est pas fait à ce jour. Au moins peut-on dire qu’ils n’ont cessé de faire périodiquement surface depuis la Restauration, souvent en période de transition politique : Seconde République, années 1880, Libération, années 1960. Ils ne sont pas le propre d’un camp : si, au XIXe siècle, ces projets sont âprement défendus par des républicains, comme en témoignent la constitution de 1848, le projet Goblet, ou bien encore le projet de l’ancien préfet de 48 Jules Chevillard, ils ont aussi leurs défenseurs parmi les monarchistes. Il se pourrait qu’ils perdent un peu en intensité au XXe siècle, mais ce n’est en l’état qu’une hypothèse ; et, quoi qu’il en soit, ce reflux n’est pas général : la réforme cantonale a ainsi conservé de zélés partisans au sein de la mouvance régionaliste lato sensu, que hante alors le spectre de la dévitalisation en cours des campagnes. Mais elle n’a pas abouti ; pas nominalement du moins, l’intercommunalité, on le sait, ayant en certains endroits constitué une « cantonalisation » sans le nom.
DOCUMENT 7. Le projet constitutionnel de 1848
52« Chapitre VII – De l’administration intérieure
53Art. 76 – La division du territoire en départements, arrondissements, cantons et communes est maintenue. Les circonscriptions actuelles ne pourront être changées que par la loi.
54Art. 77 – Il y a : 1° Dans chaque département, une administration composée d’un préfet, d’un conseil général, d’un conseil de préfecture ; 2° Dans chaque arrondissement, un sous-préfet ; 3° Dans chaque canton, un conseil cantonnal ; néanmoins, un seul conseil cantonnal sera établi dans les villes divisées en plusieurs cantons ; 4° Dans chaque commune, une administration, composée d’un maire, d’adjoints et d’un conseil municipal.
55Art. 78 – Une loi déterminera la composition et les attributions des conseils généraux, des conseils cantonnaux, des conseils municipaux, et le mode de nomination des maires et des adjoints. […].
56Art. 80 – Les conseils généraux, les conseils cantonnaux et les conseils municipaux peuvent être dissous par le président de la République, de l’avis du conseil d’État. La loi fixera le délai dans lequel il sera procédé à la réélection ».
57Godechot Jacques, Les Constitutions de la France depuis 1789, op. cit., p. 273.
DOCUMENT 8. Réflexion d’un ancien préfet (1862)
58« A quel observateur sincère n’a-t-il pas été donné de constater la perturbation que les doctrines du XVIIIe siècle jettent aujourd’hui dans les campagnes ? Ce qui n’était qu’un jeu d’esprit dans l’enceinte des académies, ce qui, dans les salons, s’appelait métaphysique et restait dans le domaine de la philosophie, ici est descendu dans les réalités de la vie. L’erreur gouverne d’autant plus despotiquement le peuple qu’elle règne sur lui sans partage ; désormais rien ne lui fera contrepoids, ni les hautes lumières, ni le respect de soi-même ; tout a disparu devant le cynisme de l’ignorance et des mœurs. S’il est un mal immense, c’est celui-là : la nature verse l’abondance sur les champs après la disette ; mais les choses ne se passent pas dans l’ordre moral comme dans l’ordre physique ; le soleil ne dissipe pas les vapeurs qui voilent les intelligences, la mer ne reçoit pas l’erreur qui couvre la terre comme le flot débordé qu’elle absorbe dans son réservoir. C’est à l’homme qu’est remis le soin de panser les blessures que l’homme a faites ; créé libre, il est condamné à porter le fardeau de sa grandeur et de ses faiblesses : s’il abuse de la liberté pour propager l’erreur, qu’il se serve de la liberté pour la combattre. Voilà la loi de sa nature !
VI
59Un gouvernement qui vit au jour le jour secoue ces soucis importuns ; a-t-il le temps de se poser ces problèmes ? mais celui qui croit à son lendemain et qui veut le préparer ne les perdra pas de vue. Ce n’est pas ici une question de force publique : la répression par les mesures matérielles est impuissante, l’action qui doit se faire sentir est toute morale. Or, quels sont aujourd’hui, dans notre système d’administration, les moyens purement moraux, je ne parle pas des sources religieuses, que possède le gouvernement pour agir sur les populations ? Ces moyens sont nuls, et les formes anciennes d’administration les refusent : il faut donc les demander à une nouvelle institution.
VII
60Ici se présente l’organisation cantonale ; avec elle vous constituerez à la base de votre système administratif un ensemble complet et fort, unissant l’influence morale à la force matérielle, pouvant employer avec les moyens vulgaires de répression l’influence de la parole et de l’exemple. Jetez un juge de paix isolé au milieu d’un canton, vous n’aurez qu’un juge de paix ; placez à côté de lui un agent cantonal bien choisi, soutenu lui-même par un conseil solidement constitué, fort par sa composition et ses attributions, aussitôt viendront se grouper autour d’eux les fonctionnaires et les agents de tous les ordres qui se trouvent au chef-lieu de canton, et qui seront étonnés d’être à la fois et une véritable force matérielle et une puissance morale, alors qu’isolés et divisés ils ne sentaient que leur impuissance.
61La colonie cantonale, voilà le nom de la nouvelle institution. »
62Chevillard Jules, De la division administrative de la France et de la centralisation, Paris, Durand, 1862, t. 1, p. 426-428.
DOCUMENT 9. Le projet de loi Goblet (1882)
« CHAPITRE PREMIER. Constitution du canton.
63Art. 1er – Il y a dans chaque canton un conseil cantonal.
64Art. 2 – La circonscription actuelle des cantons est maintenue ; elle ne pourra être changée que par une loi, de l’avis du conseil général, et après que les conseils des cantons intéressés auront été préalablement entendus.
CHAPITRE II. Composition des conseils cantonaux.
65Art. 3 – Le conseil cantonal se compose :
- Des membres du conseil général et du conseil d’arrondissement élus par le canton ;
- Des délégués des conseils municipaux du canton en nombre égal à celui des communes.
66Chaque conseil municipal élit son délégué et un délégué suppléant à la majorité absolue parmi les membres domiciliés dans le canton.
67Le maire peut être élu délégué ou suppléant. […]
68Art. 5 – Lorsqu’une ville forme à elle seule un ou plusieurs cantons sans adjonction de communes rurales, le conseil municipal de la ville, réuni aux conseillers généraux et aux conseillers d’arrondissement, fait fonction de conseil cantonal.
69Art. 6 – Lorsqu’une ville est divisée en plusieurs cantons, auxquels sont adjointes des communes rurales, le conseil cantonal de ces cantons réunis se compose :
- Des membres du conseil général et du conseil d’arrondissement élus par ces cantons ;
- D’un nombre de membres du conseil municipal du chef-lieu déterminé par un règlement d’administration publique d’après le chiffre de la population de la ville relativement à celle des communes rurales et désignés par le conseil municipal ;
- De représentants des communes rurales dont le nombre sera fixé par le même règlement.
70Art. 7 – Le conseil cantonal est présidé par le conseiller général élu par le canton, et, à son défaut, par le vice-président […].
CHAPITRE III. Des assemblées des conseils cantonaux.
71Art. 17 – Le conseil cantonal se réunit quatre fois par an en session ordinaire, dans les mois de mars, juin, septembre et décembre et au jour fixé par un arrêté préfectoral. Chacune de ces sessions peut durer 5 jours.
72Le préfet et le président peuvent, en outre, convoquer le conseil cantonal toutes les fois que les intérêts du canton l’exigent. […]
73Art. 20 – Le conseil cantonal siège au chef-lieu de canton.
74Néanmoins, le préfet peut, dans des cas extraordinaires, autoriser par un arrêté motivé, la réunion du conseil cantonal dans une des communes du canton autre que celle du chef-lieu. […]
CHAPITRE IV. Attributions.
75Art. 23 – Le conseil cantonal procède à la sous-répartition entre les communes du canton, du contingent cantonal des contributions directes fixé par le conseil général.
76À cet effet, les états de répartement par commune, dressés par le directeur des contributions directes, lui sont communiqués. […]
77Art. 27 – Le conseil cantonal est chargé de dresser par canton la liste préparatoire de la liste annuelle du jury. […]
78Les juges de paix et leurs suppléants ont le droit, dans ce cas, et pour cette attribution spéciale, de prendre part aux délibérations du conseil cantonal en ce qui concerne leur canton respectif. […]
79Art. 28 – Le conseil cantonal donne son avis sur les objets d’intérêt général ou départemental dont l’énumération suit, savoir :
- Changements à apporter aux circonscriptions territoriales qui intéressent le canton ou les communes qui en font partie ; – projet de translation du chef-lieu de canton ; – établissement ou modification des sections électorales pour l’élection des membres des conseils municipaux.
- Création ou suppression d’offices de notaires, avoués, huissiers, commissaires-priseurs, dans l’étendue du canton et résidence des titulaires ;
- Changement à apporter aux circonscriptions de perception et résidence des percepteurs ;
- Création, translation et modification des circonscriptions des bureaux de postes ;
- Règlements concernant la pêche et la chasse dans l’étendue du canton ;
- Établissement, translation et suppression des receveurs buralistes et des recettes particulières sédentaires de la régie des contributions indirectes. Changement de résidence des agents préposés aux services spéciaux ;
- Classement et tracé des chemins vicinaux de grande communication et d’intérêt commun ;
- Part contributive des communes à l’entretien desdits chemins ; […]
- Règlements d’administration publique concernant le régime des eaux non navigables dans l’étendue du canton ;
- Classement, tracé et déclasse ment des routes nationales et départe mentales qui traversent le canton. […]
80Art. 30 – Il peut émettre des vœux sur toutes les questions d’intérêt public et d’utilité générale à l’exception des vœux politiques.
81Ces vœux sont transmis au préfet qui les adresse aux ministres compétents.
82Ceux qui se rapportent aux services publics du canton peuvent être adressés directement par le président du conseil cantonal au président du conseil général. […]
83Art. 32 – Le conseil cantonal règle par ses délibérations les affaires d’intérêt cantonal ci-après désignées, savoir :
- Acquisition, aliénation, échange, mode de gestion, baux des propriétés cantonales ;
- Changement de destination des édifices cantonaux autres que le local affecté à la justice de paix ;
- Acceptation ou refus des dons et legs faits au canton quand ils ne donnent pas lieu à réclamation ;
- Projets, plans et devis de tous travaux à exécuter sur les fonds cantonaux et désignation des services auxquels ces travaux seront confiés ; […]
- Concessions de travaux d’intérêt cantonal […]
84Art. 34 – Il exerce les attributions conférées aux maires par les lois des 16-24 août 1790, – sauf les droits réservés au préfet par les articles 11, derniers §§, et 15 de la loi du 18 juillet 1837, – en ce qui touche les règlements permanents concernant :
- L’inspection de la salubrité des denrées, boissons, comestibles, et autres marchandises mises en vente publique, et la fidélité de leur débit ; les mercuriales ;
- Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et celui de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et fléaux calamiteux, tels que les incendies, les épidémies […].
85Art. 37 – Le conseil cantonal ad ministre la caisse des écoles instituée par les articles 15 de la loi du 10 avril 1867 et 17 de la loi du 28 mars 1882, lorsque toutes les communes du canton ont été réunies pour la fondation et l’entretien d’une caisse unique. […]
86Art. 42 – Le conseil cantonal statue définitivement sur les affaires intéressant les établissements de bienfaisance créés et entretenus par le canton. Il approuve et rend exécutoires par son approbation les délibérations des commissions administratives de ces établissements portant sur des emprunts qui ne dépasseraient pas les revenus ordinaires ou dont la durée du remboursement n’excéderait pas douze années ; l’article 12 de la loi du 24 juillet 1867 restera applicable à tous les autres emprunts. Il approuve les budgets, autorise les actions judiciaires, les acquisitions, aliénations et échanges d’immeubles appartenant à ces établissements, l’acceptation des dons et legs qui ne donnent pas lieu à des réclamations.
87Il approuve les délibérations des commissions administratives ayant pour objet le changement d’affectation des immeubles appartenant à ces établissements, mais en leur conservant une destination charitable. […]
CHAPITRE V. Du budget et des comptes du canton.
88Art. 47 – Le projet de budget du canton est préparé et présenté par le préfet ou son délégué dans l’arrondissement du chef-lieu, par les sous-préfets dans les autres arrondissements.
89Il est délibéré et approuvé par le conseil cantonal et définitivement réglé par le conseil général. Les dépenses du canton sont obligatoires ou facultatives.
90Les recettes sont ordinaires ou extraordinaires. […]
91Art. 49 – Les recettes ordinaires du canton se composent :
- Du revenu des biens cantonaux ;
- Du produit des deux des huit centimes sur le principal de la contribution des patentes, attribués aux communes par l’article 32 de la loi du 25 avril 1844 ;
- Du tiers du produit de la taxe municipale des chiens telle qu’elle a été établie par la loi du 2 mai 1855, sans préjudice du prélèvement du cinquième prescrit par l’article 3 de la loi du 16 juin 1881 ;
- Du tiers de la part attribuée aux communes sur la taxe des permis de chasse, sans préjudice du prélève ment du cinquième prescrit par l’article 3 de la loi du 16 juin 1881 ;
- Du produit des amendes de police municipale et autres attribuées aux communes ;
- Du produit des centimes spéciaux applicables à l’instruction primaire supérieure dont la perception pourra être autorisée par des lois spéciales ;
- Du produit des concessions autorisées sur le domaine cantonal ;
- Du produit des expéditions des actes administratifs ;
- Des subventions qui seraient al louées au canton par le département ou l’État pour des dépenses ordinaires ;
- Et, généralement, du produit des contributions, taxes et droits dont la perception sera autorisée par les lois dans l’intérêt des cantons. […]
92Art. 50. — Les recettes extraordinaires se composent :
- Des subventions qui seraient al louées au canton par le conseil général ou l’État pour des dépenses extraordinaires ;
- Du produit des emprunts que les conseils cantonaux sont autorisés à voter pour une durée qui n’excédera pas quinze ans, remboursables sur les revenus ordinaires ou extraordinaires ;
- Des dons et legs ;
- Du prix des biens aliénés ; […]
93Art. 53 – Les dépenses cantonales seront ordonnancées par le préfet ou le sous-préfet, selon les cas, dans la limite des crédits ouverts par les budgets du canton.
94Art. 54 – Les comptes pour l’exercice clos sont présentés au conseil général avant la délibération du budget. […]
CHAPITRE VII. Dispositions transitoires.
95Art. 58 – La présente loi ne sera applicable provisoirement qu’à la France continentale et à la Corse, à l’exception de la ville de Paris dont l’organisation fera l’objet d’une loi spéciale. […] »
96« Le projet de loi d’organisation cantonale », Revue générale d’administration, 1882, t. 2, p. 163-187.
DOCUMENT 10 Régionaliste et leplaysien : Pierre du Maroussem (1927)
97« Voici que le régionalisme a envahi l’enceinte de l’Académie des sciences morales et politiques. Les communications s’y succèdent, au sujet des essais de déconcentration et de décentralisation que les décrets du ministre de l’intérieur ont mis à la mode. Or, un mouvement semble gagner de proche en proche l’esprit des hommes érudits qui constituent la docte assemblée. L’idée de la grande commune cantonale, qu’avait créée un instant le Directoire et qui disparut devant l’arrondissement de l’an VIII, apparaît de plus en plus comme la cellule la plus pratique de l’administration locale émancipée. Pourquoi ? Quelle est la raison apparente ou secrète du premier plan attribué à ce faisceau que la suprématie communale semblait dominer ? Quelques explications vont nous en rendre compte.
98Le canton est en réalité une subdivision ecclésiastique, qui, dès les premiers temps de la prédication du christianisme dans les clans celto-ligures, se partagea les archiprêtrés et les diocèses.
99Tout d’abord – vérité historique partout vérifiée ! – le diocèse, bien entendu celui d’avant le Concordat, demeura inexorablement placé sur le territoire de chasse des évangélisés primitifs : le diocèse de Limoges nous conserve rigoureusement les frontières des Lemovices, celui d’Angoulême, les frontières des Engolimenses, celui de Poitiers les limites des Pictaves, celui de Saintes les limites des Santones. La raison de ce fait, souvent signalé par les archéologues et historiens locaux, est que les premiers missionnaires, fondateurs des évêchés, avaient dû prendre comme domaine rigoureux la peuplade, à cause même de l’idiome. […] Peu à peu, dans l’ordre logique des révoltes, des invasions, des chocs de guerre, des fondations de donjons, de la force des dynasties locales, les provinces, sièges militaires et judiciaires, sont sorties de ces civitates, pour durer mille ans, jusqu’en 1789 ; et l’unité qui se partage ces provinces est la seigneurie locale, dont quelques-unes ont dû laisser la liberté à des communes commerçantes et industrielles qui se sont émancipées des seigneurs. […] C’est autour de la forteresse locale, qui conserve souvent ses fourches patibulaires, que la justice seigneuriale s’exerce, avec son cortège de juges, d’assesseurs, procureurs, avocats, huissiers, notaires, qui avec les gros marchands d’épices ou de blé, et les artisans de toute corporation, forment la classe moyenne. Dans la douzaine de paroisses qui s’espacent autour du bourg central, les communautés paysannes dominent avec une intensité bien plus marquée, et ne sont séparées que par quelques artisans du gentilhomme installé, à côté du curé, dans le manoir relevant du fief principal.
100Cette seigneurie est, le plus souvent, plus vaste que le canton actuel. Quand on cherche paroisse par paroisse, et même hameau par hameau, à faire coïncider ses limites avec celles de l’unité cantonale, on ne tarde pas à s’apercevoir qu’elle dépasse le canton en long ou en large, mais le chef-lieu de la plupart des cantons se confond avec l’ancienne capitale de la seigneurie, et les autres sont constituées toujours par quelque gros bourg, démembré d’une seigneurie analogue et ayant une tendance par sa formation sociale et son rôle économique à se rapprocher de ses voisins ou prédécesseurs. Donc le canton, survivance en fait de l’ancien chef-lieu de seigneurie, et prédisposé, par la force de la bourgeoisie résidante, à fournir les effectifs de l’administration locale, devait frapper comme unité “naturelle” les hommes d’État du Directoire, qui cherchaient à fonder sur les comités pluraux le gouvernement central, provincial et communal de la France. La conception unitaire du Consulat balaya l’essai qui était logique. Nos recherches reprises, dans un esprit analogue à celui de 1792-1800, nous ramènent à cette unité à la fois antique et novatrice, appuyée sur les clans celtiques, la seigneurie féodale, et le faisceau communal de la première Révolution. Elle est demeurée le siège du plus bas degré de la justice, celle qui s’occupe des minuscules intérêts et des petits délits. La justice de paix, conception déformée de la coutume anglaise, a pour siège le chef-lieu de canton. Peu importe que, par suite de la réforme aujourd’hui en cours, le juge de paix soit contraint de visiter chaque semaine deux ou trois cantons, la mobilité du magistrat ne touche pas à l’immutabilité du ressort ; là se trouvent le greffier, l’huissier et le ministère public des contraventions. C’est là aussi que réside l’auxiliaire nationale de la police locale : la gendarmerie, le brigadier et ses hommes dépendant de leur légion et recevant leur inspiration de l’officier placé à l’arrondissement. L’agent voyer y surveille le réseau routier et les ponts ; le receveur de la poste, des télégraphes et des téléphones y commande ses facteurs ; la fiscalité y a installé la caisse du percepteur et celle du receveur de l’enregistrement ; c’est là que se réunit le conseil de révision, qui répartit le plus terrible des impôts : celui du sang. Le service d’hygiène y a son centre : là se trouvent le médecin, le pharmacien, la sage-femme. Le chemin de fer y aboutit, les services d’autos en partent. Le secteur électrique y a installé, bien avant les communes, ses lignes secondaires. Aussi, la vie économique y fourmille-t-elle : l’usine s’y est édifiée à cause du “courant” ; les petits artisans s’y sont fortifiés par des moteurs ; de tout temps, les commerçants y résident, les grandes foires s’y réunissent une fois par mois. La population y croît pendant que les communes diminuent. Le cinéma s’y installe. Aussi le maire y est-il un personnage plus important que partout ailleurs, ses services sont plus chargés. Il est souvent conseiller général – car le véritable délégué provincial est au canton – il est au moins conseiller d’arrondissement.
101Il est donc naturel que les réformateurs aient lié tout ce passé à tout ce présent et qu’ils méditent, en tâtonnant, une organisation cantonale dont la région serait formée, comme la généralité de jadis était formée des bureaux d’élection. »
102Maroussem Pierre (du), « L’unité cantonale sera-t-elle la forme future du régionalisme ? », L’Action régionaliste. Bulletin mensuel de la Fédération régionaliste française, mars 1927, p. 1-2.
DOCUMENT 11. Jean-François Gravier et l’« éloge du canton » (1984)
103« Après maints découpages purement électoraux (et avant ceux de 1982), on dénombrait en 1975, dans la métropole, 3 509 cantons (dont les 20 arrondissements de Paris), contre moins de 3 000 cinquante ans auparavant. Mais il n’y avait, en fait, que 2 911 communes chefs-lieux de canton hors de Paris et de la “petite couronne”, parmi lesquelles une centaine étroitement suburbaines, c’est-à-dire finale ment quelque 2 800 “espaces cantonaux”, d’une surface moyenne proche de 200 kilomètres carrés. Plus du quart d’entre eux – 728 exactement – n’atteignaient pas cet effectif de 5 000 habitants qui, à la lumière des études allemandes, de la carte scolaire, des analyses commerciales et autres éléments, paraît bien conditionner une administration efficace et une organisation sociale satisfaisante. Des regroupements – parfois délicats dans les zones de faible densité – et une révision partielle de la géographie cantonale sont par conséquent nécessaires avant que cette circonscription “à l’échelle humaine” puisse accueillir les nouvelles institutions locales.
104Lorsqu’on tente de définir ces institutions, quatre objectifs doivent être présents à l’esprit : en milieu urbain, unifier les agglomérations ; en milieu rural, édifier des organismes viables ; partout, éviter un éloignement excessif du centre nerveux ; enfin respecter l’identité des communes et des quartiers.
105Ces objectifs amènent à concevoir un couple canton-commune, symétrique du couple région-département, mais où le canton deviendrait la collectivité de plein exercice. Ce serait, en somme, l’aboutissement institutionnel logique des Sivom, districts, etc., lesquels disparaîtraient évidemment pour faire place à un seul type de communauté fédérative.
106On peut, en effet, appliquer la même méthode aux grandes agglomérations et aux cantons ruraux, ainsi que nous l’avons montré naguère1. Voici, par exemple, la ville de Clermont-Ferrand, qui forme avec ses quatre cantons (redécoupés en 1982) un ensemble plus cohérent que l’unité urbaine définie par l’Insee. Les 18 communes appartenant à ces cantons vivent dans une intimité journalière avec la capitale de l’Auvergne ; pourtant, cette osmose ne se traduit par aucun lien institutionnel obligatoire.
107D’autre part, la ville, enserrée dans une agglomération pluricommunale, ne dispose que de 43 kilomètres carrés pour ses 147 000 habitants, alors que les quatre cantons couvrent 265 kilomètres carrés pour 240 000 âmes, soit une densité de 9 habitants par hectare au lieu de 34. Une assemblée administrant ce territoire, égal à celui de Cologne, régnerait sur un espace où elle pourrait implanter à son aise des zones résidentielles aérées, en ménageant les réserves végétales. En outre, alors que les “communautés urbaines” et les districts sont des corps étrangers au milieu des structures préexistantes, le “grand Clermont” serait juridique ment identique aux cantons limitrophes de Riom, de Pont-du-Château ou de Rochefort-Montagne et ne présenterait avec eux que des différences quantitatives.
108Quant à l’élection de l’assemblée cantonale, elle doit se faire dans le cadre des quartiers et des communes, en respectant des règles précises. Ici, la solution la plus expédiente serait que chaque circonscription élise un conseiller cantonal pour 0,5 % de la population globale (soit environ 1 200 habitants) et un conseiller supplémentaire pour 3 % de cette même population : cette disparité maximale, comparable à celle qui existe entre les circonscriptions législatives de la métropole, permet une représentation équitable des citoyens aussi bien que des communautés. Supposons que Clermont-ville soit divisée en sept quartiers, peuplés de 15 000 à 28 000 âmes : chacun d’eux élira trois ou quatre conseillers au scrutin de liste majoritaire. De leur côté, les communes périphériques éliront chacune de un à trois conseillers, selon leur importance ; toutefois, deux d’entre elles, qui n’atteignent pas le quotient de 1 200 habitants, seront rattachées à une commune voisine pour le scrutin cantonal. Au total, le conseil du “grand Clermont” comprendrait, sur la base du dernier recensement, 47 membres, dont 26 pour les quartiers urbains.
109Cependant, les normes de pourcentage qu’on vient d’énoncer doivent comporter des “butoirs”. Il serait, en effet, aberrant de définir des quartiers trop peuplés pour que des relations de “voisinage piéton” puissent s’y nouer : un effectif de 30 000 habitants – maximum retenu par Ebenezer Howard pour ses new towns – semble bien être la limite à ne pas dépasser. Les conseils des agglomérations “millionnaires” de Lyon et de Marseille émane raient alors d’une soixantaine de scrutins uninominaux se déroulant dans des circonscriptions de 5 000 à 30 000 âmes, cette “sectorisation” assurant par ailleurs la représentation des minorités. En revanche, au bas de l’échelle, il serait également absurde de conserver des communes de moins de 50 habitants (soit une quinzaine de ménages). Dans les cantons de moins de 10 000 habitants, chaque commune dépassant ce minimum serait donc maintenue et élirait un conseiller, plus un conseiller supplémentaire pour 300 habitants (certaines sections, éloignées du centre municipal, pouvant d’ailleurs être érigées en commune). Notre canton de Darney verrait disparaître trois “micro-communes” et élirait un conseil de 28 membres, dont 6 pour le chef-lieu, qui abrite 32 % de la population. On voit que, grâce aux inégalités tempérées que nous avons admises, on éviterait presque toujours une prépondérance excessive du chef-lieu de canton dans le conseil. […]
110Le second volet de la réforme concerne le statut des collectivités élémentaires, que l’on ne saurait négliger sans commettre une grave erreur fonctionnelle et psychologique. Les communes conserveraient donc des assemblées d’effectif restreint (9 à 27 membres) et les quartiers, à l’image des boroughs londoniens ou des arrondissements parisiens, en seraient pourvus. Mais ces assemblées seraient élues en deux fois : d’abord le ou les conseillers cantonaux, un mois plus tard les simples conseillers municipaux (ainsi, les candidats malheureux au conseil cantonal auraient la faculté de se présenter au second scrutin). Ces conseils de commune ou de quartier géreraient les affaires purement locales (dossiers d’assis tance, entretien de voies et bâtiments, petits espaces verts, formalités administratives à la mairie annexe, manifestations diverses, etc.) grâce aux crédits qui leur seraient délégués par le conseil cantonal en fonction de leur population. Pour des raisons psychologiques évidentes, leur président garderait son titre de maire, son écharpe tricolore, ses fonctions d’officier d’état-civil. De même, un canton à nette prédominance urbaine pourrait s’intituler “ville” (encore que ce terme soit sans valeur légale, le ministère de l’Intérieur ne connaissant que la commune) et son assemblée cantonale “conseil urbain”.
111Ces ménagements de vocabulaire rendraient plus supportables aux vanités les transferts de pouvoirs. Car il s’agit bien de substituer le canton ou la ville “polycellulaire” aux communes actuelles en tant que collectivité territoriale. C’est le conseil cantonal ou urbain qui votera les recettes et les dépenses, qui percevra les impôts et les taxes, qui réalisera et gérera les principaux équipements (déjà confiés, très souvent, à des syndicats intercommunaux). C’est encore lui qui administrera, dans la plupart des cas, les biens des communes.
112Une telle mutation, qui réduirait le nombre des collectivités locales à part entière de plus de 36 000 à 2 500 ou 3 000, sera grandement facilitée par la liaison organique entre canton et communes, celles-ci étant généralement représentées par leur maire au conseil cantonal. D’autre part, ce changement d’échelle rend possible une décentralisation qui ne soit pas surtout verbale. Car, dans un canton de 5 000 âmes qui a la consistance d’une petite ville, on est à peu près assuré de voir surgir des édiles compétents et l’on a, en tout cas, les moyens de recruter un personnel qualifié à plein temps formé dans des instituts régionaux d’administration.
113Au demeurant, une opinion mieux éclairée serait bientôt convaincue, car les avantages de la réforme cantonale apparaîtraient vite éclatants. Financièrement, elle supprimerait les irritantes disparités entre communes-centres et communes-dortoirs en intégrant les unes et les autres dans un même ensemble. Administrativement, elle ferait du canton une entité polyvalente aussi fortement structurée que le département, avec cette différence qu’il s’agit ici d’une communauté de voisins quotidiennement solidaires. Dans cette communauté nouvelle, l’élargissement de l’horizon géographique entraînerait celui de l’horizon intellectuel ; la modification du cadre de gestion provoquerait la modification des comportements ; l’esprit parcellaire reculerait devant l’esprit de synthèse. Pour les milieux urbains déshumanisés comme pour les milieux ruraux trop souvent dévitalisés, aucune entreprise ne saurait être porteuse d’espoir autant que ce remembrement social. »
114Gravier Jean-François, L’espace vital, Paris, Flammarion, 1984, p. 218-221.
IV. Les élections cantonales… et le canton
115C’est sous la monarchie de Juillet, en 1833 précisément, que le canton devient la circonscription pour l’élection des conseillers généraux et des conseillers d’arrondissement. Il l’est toujours, on le sait, pour les premiers et l’est resté pour les seconds jusqu’en 1940. La seule modification importante apportée au mode d’élection des conseillers généraux – mais quelle modification ! – est le passage au suffrage universel en 1848. L’étude des campagnes cantonales révèle combien sont subtils les liens tissés au fil des deux derniers siècles entre le candidat, sortant ou non, et le canton. Manifestement, l’ancrage cantonal constitue une ressource électorale clé, dont jouent la plupart des candidats, aujourd’hui comme au XIXe siècle. En s’adressant, de diverses manières, aux électeurs, le candidat est par ailleurs conduit à formuler, énoncer, expliciter les intérêts du canton, et, ce faisant, à le « produire » dans une large mesure.
DOCUMENT 12A. La fixation du mode de scrutin des élections au conseil général et au conseil d’arrondissement : la loi du 22 juin 1833
« Titre 1er – Formation des conseils généraux
116Art 1er – Il y a, dans chaque département, un conseil général.
117Art. 2 – Le conseil général est composé d’autant de membres qu’il y a de cantons dans le département, sans pouvoir toutefois excéder le nombre trente.
118Art. 3 – Un membre du conseil général est élu, dans chaque canton, par une assemblée électorale, composée des électeurs et des citoyens portés sur la liste du jury ; si leur nombre est au-dessous de cinquante, le complément sera formé par l’appel des citoyens les plus imposés.
119Dans les départements qui ont plus de trente cantons, des réunions de cantons seront opérées conformément au tableau ci-annexé, de telle sorte que le département soit divisé en trente circonscriptions électorales.
120Les électeurs, les citoyens inscrits sur la liste du jury, et les plus imposés portés sur la liste complémentaire dans chacun des cantons réunis, formeront une seule assemblée électorale. […]
121Art. 4 – Nul ne sera éligible au conseil général de département, s’il ne jouit des droits civils et politiques ; si, au jour de son élection, il n’est âgé de vingt-cinq ans, et s’il ne paie, depuis un an au moins, deux cents francs de contributions directes dans le département.
122Toutefois, si, dans un arrondissement de sous-préfecture, le nombre des éligibles n’est pas sextuple du nombre des conseillers de département qui doivent être élus par les cantons ou circonscriptions électorales de cet arrondissement, le complément sera formé par les plus imposés.
123Art. 5 – Ne pourront être nommés membres des conseils généraux :
- Les préfets, sous-préfets, secrétaires généraux et conseillers de préfecture ;
- Les agents et comptables employés à la recette, à la perception ou au recouvrement des contributions, et au paiement des dépenses publiques de toute nature ;
- Les ingénieurs des ponts et chaussées et les architectes actuellement employés par l’administration dans le département ;
- Les agents forestiers en fonctions dans le département, et les employés des bureaux des préfectures et sous-préfectures.
124Art. 6 – Nul ne peut être membre de plusieurs conseils généraux.
125Art. 7 – Lorsqu’un membre du conseil général aura manqué à deux sessions consécutives sans excuses légitimes ou empêchement admis par le conseil, il sera considéré comme démissionnaire, et il sera procédé à une nouvelle élection, conformément à l’art. 11.
126Art. 8 – Les membres des conseils généraux sont nommés pour neuf ans ; ils sont renouvelés par tiers tous les trois, et sont indéfiniment rééligibles.
127A la session qui suivra la première élection des conseils généraux, le conseil général divisera les cantons ou circonscriptions électorales du département en trois séries, en répartissant, autant qu’il sera possible, dans une proportion égale, les cantons ou circonscriptions électorales de chaque arrondissement dans chacune des séries. Il sera procédé à un tirage au sort pour régler l’ordre de renouvellement entre les séries. Ce tirage se fera par le préfet en conseil de préfecture et en séance publique.
128Art. 9 – La dissolution d’un conseil général peut être prononcée par le roi ; en ce cas, il est procédé à une nouvelle élection avant la session annuelle, et, au plus tard, dans le délai de trois mois, à dater du jour de la dissolution.
129Art. 10 – Le conseiller de département élu dans plusieurs cantons ou circonscriptions électorales sera tenu de déclarer son option au préfet, dans le mois qui suivra les élections entre lesquelles il doit opter. À défaut d’option dans ce délai, le préfet, en conseil de préfecture et en séance publique, décidera par la voie du sort à quel canton ou circonscription électorale le conseiller appartiendra.
130Il sera procédé de la même manière, lorsqu’un citoyen aura été élu à la fois membre du conseil général et membre d’un ou plusieurs conseils d’arrondissement.
131Art. 11 – En cas de vacance par option, décès, démission, perte des droits civils ou politiques, l’assemblée électorale qui doit pourvoir à la vacance sera réunie dans le délai de deux mois. […]
Titre III – Des conseils d’arrondissement
132Art. 20 – Il y aura dans chaque arrondissement de sous-préfecture, un conseil d’arrondissement, composé d’autant de membres que l’arrondissement a de cantons, sans que le nombre de conseillers puisse être au-dessous de neuf.
133Art 21 – Si le nombre des cantons d’un arrondissement est inférieur à neuf, une ordonnance royale répartira entre les cantons les plus peuplés le nombre de conseillers d’arrondissement à élire pour complément.
134Art. 22 – Les conseillers d’arrondissement sont élus dans chaque canton par l’assemblée électorale, composée conformément au premier paragraphe de l’art. 3.
135Dans les cantons où, conformément au deuxième paragraphe du même art. 3, des cantons ont été réunis, les membres de cette assemblée électorale sont convoqués séparément, dans leurs cantons respectifs, pour élire les conseillers d’arrondissement.
136Art. 23 – Les membres des conseils d’arrondissement peuvent être choisis parmi tous les citoyens âgés de vingt-cinq ans accomplis, jouissant des droits civils et politiques, payant dans le département, depuis un an au moins, cent cinquante francs de contributions directes, dont le tiers dans l’arrondissement, et qui ont leur domicile réel ou politique dans le département. Si le nombre des éligibles n’est pas sextuple du nombre des membres du conseil d’arrondissement, le complément sera formé par les plus imposés. Les incompatibilités prononcées par l’article 5 sont applicables aux conseillers d’arrondissement.
137Art 24 – Nul ne peut être membre de plusieurs conseils d’arrondissement, ni d’un conseil d’arrondissement et d’un conseil général.
138Art. 25 – Les membres des conseils d’arrondissement sont élus pour six ans. Ils sont renouvelés par moitié tous les trois ans. A la session qui suivra la première élection, le conseil général divisera en deux séries les cantons de chaque arrondissement. Il sera procédé à un tirage au sort pour régler l’ordre de renouvellement entre les deux séries. Ce tirage se fera par le préfet en conseil de préfecture et en séance publique.
139Art. 26 – Les articles 7, 9, 10, 11 de la présente loi sont applicables aux conseils d’arrondissement. »
140Duvergier Jean-Baptiste, Collection complète des lois, décrets, ordonnances, règlements, et avis du conseil d’État, Paris, 1833, p. 159-164, 168-169.
DOCUMENT 12B. La fixation du mode de scrutin des élections au conseil général et au conseil d’arrondissement : le décret du 3 juillet 1848
141« Art 1er – Il sera procédé au renouvellement intégral des conseils municipaux de toutes les communes de la République et des conseils d’arrondissement et de département.
142Les élections municipales auront lieu avant le 1er août prochain. Les élections des conseils d’arrondissement et de département auront lieu avant le 1er septembre suivant, et, dans tous les cas, avant la session ordinaire de ces conseils.
143Il sera élu un membre du conseil général dans chaque canton.
144La ville de Paris et le département de la Seine seront l’objet d’un décret spécial. Toutefois, une commission provisoire, municipale et départementale, instituée dans le plus bref délai par le pouvoir exécutif, remplacera, jusqu’à la promulgation prochaine de ce décret, le conseil dissout par le gouvernement provisoire.
145Art. 2 – Jusqu’à ce que la constitution de la République ou des lois organiques aient réglé la composition et les formes d’élection des administrations municipales et départementales, les lois des 21 mars 1831 et 22 juin 1833 sont maintenues, sauf les modifications suivantes. […]
146Art. 4 – Sont abrogés les paragraphes 1 et 3 de l’art. 3, et les art. 4, 22, 23, 29 à 33, 36, 39 à 42, 45, 46, paragraphes 1er, 47 et 49 de la loi du 22 juin 1833. […]
147Art. 12 – Les élections des conseillers généraux et des conseillers d’arrondissement seront faites par les citoyens du canton ou de la circonscription appelés à nommer les conseils municipaux, conformément à ce qui a été dit en l’art. 5 ci-dessus ; ils seront réunis en une seule assemblée ou en plusieurs sections. Les sections pourront être convoquées dans des communes différentes. […]
148Art. 14 – Sont éligibles au conseil d’arrondissement les électeurs âgés de vingt-cinq ans au moins, domiciliés dans l’arrondissement, et les citoyens, ayant atteint le même âge, qui, sans y être domiciliés, y paient une contribution directe.
149Sont éligibles aux conseils généraux les électeurs âgés de vingt-cinq ans au moins, domiciliés dans le département, et les citoyens, ayant atteint le même âge, qui, sans y être domiciliés, y paient une contribution directe. Néanmoins, le nombre de ces derniers ne pourra dépasser le quart desdits conseils. Les incompatibilités prononcés par l’art. 5 de la loi du 22 juin 1833 sont applicables aux conseillers d’arrondissement. […] »
150Duvergier Jean-Baptiste, Collection complète…, op. cit., 1848, p. 358-359, 361.
DOCUMENT 13. Le canton et la République : l’élection partielle du 22 août 1886 dans le canton de Breil (Alpes-Maritimes)
Profession de foi de Maurice Rouvier
151« Mes chers concitoyens,
152Dès la fin du mois de juillet, au moment même où devenait vacant le siège de conseiller général de Breil, de nombreux républicains du canton m’ont offert la candidature. Je me suis rendu au milieu de vous, j’ai parcouru les communes de Breil, de Saorge, de Fontan. L’accueil que j’ai reçu partout ne me permettait pas d’hésiter. J’ai accepté la candidature à un moment où, aucune autre n’étant posée, aucune compétition n’était à prévoir. Je l’ai acceptée dans le même esprit qui animait ceux qui me l’ont offerte : avec l’espoir de voir se réaliser l’union de tous les électeurs du canton sous le drapeau de la France et de la République. Depuis, une autre candidature s’est produite ; vous jugerez les titres de mon concurrent, et vous vous prononcerez selon l’inspiration de votre Patriotisme et de votre Conscience, comme il convient à des électeurs d’un Pays libre. Mais que l’on cesse de vous dire que je suis “un étranger”. Un Français se présentant devant les électeurs français ne peut pas être qualifié d’étranger. Et d’ailleurs, ne m’avez-vous pas fait vôtre, au mois d’octobre dernier, en me donnant aux élections législatives plus de 400 voix de majorité dans votre canton ? Je connais vos besoins, je suis venu les étudier sur place. Je m’attacherai à poursuivre avec la même ardeur que j’ai toujours apportée à la défense des intérêts qui m’ont été confiés, la solution des questions qui vous intéressent à si juste titre : amélioration de la législation sur le régime forestier ; simplification des formalités douanières ; achèvement de vos routes ; création de lignes ferrées ; développement de l’instruction populaire. Électeurs du canton de Breil ! Vous m’avez donné votre confiance pour vous représenter à la Chambre des Députés, je vous la demande pour vous représenter à l’Assemblée départementale. Aujourd’hui, comme alors, je me présente à vous, comme un homme de concorde et d’union entre tous les républicains ; répudiant la politique de discordes et de haines, je me présente à vous comme un Républicain et un Patriote. À vous de manifester une fois de plus votre inébranlable attachement à la France et à la République ! Vive la France ! Vive la République ! Vive le canton de Breil !
153Maurice Rouvier, député des Alpes-Maritimes. Breil, le 16 août 1886. »
154Le Petit Niçois, 17 août 1886.
Profession de foi de Jean-Baptiste Rostagni
155« Mes chers concitoyens,
156Sollicité par un grand nombre d’entre vous de poser ma candidature au Conseil général dans le canton de Breil, j’accepte l’honneur que vous voulez bien me faire. Enfant de Breil, ami de vous tous, je connais vos aspirations, je ferai tout mon possible pour les satisfaire. Uniquement préoccupé du canton de Breil, je ne me trouverai pas sollicité par des intérêts contraires. Je resterai le représentant fidèle de vos intérêts. Toutes questions auxquelles est attachée votre prospérité trouveront en moi un défenseur opiniâtre. J’insisterai principalement sur l’exécution des voies ferrées qui doivent, après leur exécution, transfigurer complètement notre pays. Je pousserai de tous mes efforts à l’achèvement du réseau des routes qui desservent notre canton et principalement à celui de la route de Breil. Les questions forestières et de douanes seront l’objet de ma constante sollicitude, ainsi que l’organisation du service médical pour nos indigents si profondément attachés à la France et aux institutions qui nous régissent. Je n’ai pas besoin de faire de grandes et vagues protestations. Vous me connaissez tous, je suis Républicain et patriote sincèrement, sans phrases. En m’envoyant au Conseil général, le canton de Breil prouvera que, parmi ses enfants, il a su en trouver un digne de le représenter. Vive le canton de Breil ! Vive la République ! Vive la France !
157Jean-Baptiste ROSTAGNI, pharmacien, juge au Tribunal de commerce. »
158L’Éclaireur du Littoral, 8 août 1886.
DOCUMENT 14. Le canton dans la publicité électorale (Denain, Nord, 2008)

Collection Emmanuel Cherrier.
V. Le canton comme espace vécu
159Le canton, simple circonscription administrative, s’est-il mué au fil du temps en un « espace vécu », en tant que tel porteur d’une certaine identité ? La question n’est pas simple ; elle n’a d’ailleurs pas été étudiée pour elle-même jusqu’ici. Les traces, les indices d’une telle « identité cantonale » n’en sont pas moins très présents jusqu’aux années 1960, dans une France encore très rurale : on est presque tenté de parler de « civilisation cantonale » lorsqu’on songe à cette époque. Sans doute les choses ont-elles changé au cours de ces dernières décennies ; mais il n’empêche : le canton et son chef-lieu demeurent malgré tout un horizon à la fois proche et commode.
Rythmes de la vie cantonale naguère
160Quelques institutions ont conféré au canton et à son chef-lieu une place à part dans la vie des Français jusqu’aux Trente Glorieuses. C’est au chef-lieu de canton que les conscrits se retrouvaient pour le tirage au sort ou le conseil de révision, c’est au chef-lieu aussi qu’étaient convoqués les élèves de tout le canton pour passer le « certif. » et que les résultats étaient proclamés. Être le premier du canton, ce n’était d’ailleurs pas rien : aux honneurs de la presse locale s’ajoutaient les récompenses des associations de promotion de l’enseignement, laïques mais pas seulement. C’est encore au chef-lieu ou dans un cadre cantonal plus large que certaines manifestations avaient lieu : foires, fêtes, comices agricoles. Enfin, sous la Seconde République, c’est au chef-lieu de section – qui, dans l’immense majorité des cas, est chef-lieu de canton – qu’est fixé l’exercice du nouveau droit de suffrage. De là les processions électorales d’avril 1848, décrites entre autres par Tocqueville dans ses Souvenirs, des processions qui ne sont en rien propres à la Normandie.
DOCUMENT 15. Processions électorales sous la Seconde République (Plogastel-Saint-Germain, Finistère, 1848)
161« Les habitants de la commune de Plozévet ont donné, au sujet des élections des représentants du peuple, un exemple bien beau d’ordre et de patriotisme qui mérite d’être reproduit : nous désirons qu’ils trouvent beaucoup d’imitateurs.
162Dimanche, tous les électeurs, au nombre de près de sept cents, se sont réunis au bourg de Plozévet ; puis, après s’être placés sur deux rangs, ils se sont mis en marche pour le chef-lieu du canton : deux tambours les conduisaient. Douze cultivateurs à cheval formaient l’avant-garde. Les citoyens Lelouet, desservant et Le Guellec, maire de la commune, marchaient à leur tête. Le drapeau tricolore flottait au milieu des rangs, porté par le citoyen Le Douce. Ils ont fait ainsi trois lieues dans le plus grand calme. Arrivés au bourg de Plogastel, ils ont fait trois fois le tour de la place, puis, ils sont allés se ranger devant la mairie pour attendre le moment de déposer leurs votes.
163Le soir, au moment de partir, il y a eu entre eux et les habitants de la commune chef-lieu, une collision fâcheuse qui, cependant, n’a pas eu de suites graves comme cela pouvait être. Ces derniers, jaloux à ce qu’il paraît, de leurs camarades, voulurent enlever leur drapeau ; mais ils furent vigoureusement repoussés, un des assaillants a, dit-on, été assez maltraité. Le desservant et le maire de Plozévet, craignant quelque désordre, font aussitôt battre le rappel ; tous, sans excepter un seul, accourent entourer leur drapeau et se remettent tranquillement en marche pour retourner chez eux ; mais l’arrière-garde, attaquée de nouveau et poursuivie à coups de pierres, se retourne et poursuit les agresseurs jusqu’au bourg ; et sans l’intervention prudente du citoyen Hervieu, maire de Plogastel, qui a réussi, par de sages conseils, à calmer l’irritation de ces braves cultivateurs, on aurait peut-être eu à déplorer quelque malheur.
164Hier lundi, les électeurs des communes de Pouldreuzic et Tréogat réunis, ayant à leur tête les citoyens Pierre Le Gall, maire de la commune de Pouldreuzic et Boucheron, notaire et capitaine de la garde nationale, ont fait aussi leur entrée au bourg de Plogastel avec un tambour et le drapeau tricolore porté par le citoyen Guichaoua ; cette fois tout s’est passé avec tranquillité. À peine eurent-ils fini de voter, que le maire, prenant le drapeau, réunit toute sa commune autour de lui ; un ancien militaire chanta deux couplets de la Marseillaise, et tous se remirent en marche aux cris de vive la République ! !
165Honneur à vous, braves cultivateurs, qui savez respecter et défendre par votre conduite à la fois digne et courageuse le drapeau de la République ! Honneur à vous, maires, à vous prêtres, qui donnez l’exemple du patriotisme ; c’est un moyen bien sûr de faire respecter l’autorité et aimer la religion ! Si vos frères des campagnes et des villes voulaient tous vous imiter, la France serait bientôt aussi confiante, aussi heureuse qu’elle est grande aujourd’hui !
166Vive la République ! !
167H. Le Bail »
168L’Impartial du Finistère, 27 avril 1848.
DOCUMENT 16. Mobilisation pour la défense des comices agricoles cantonaux (Cancale, Ille-et-Vilaine, 1891)
169« 1° Les comices tels qu’ils sont organisés actuellement encouragent tous les cultivateurs même les moindres fermiers ce qui n’aura plus lieu avec le projet en question. Les concours ainsi modifiés ne seront plus accessibles aux petits mais seulement à ceux qui ont une exploitation assez importante, des capitaux suffisants et le loisir pour ne pas reculer devant un déplacement de plusieurs lieues et qui ne craindront pas d’entrer en lutte avec les exploitations perfectionnées.
1702° S’il était question d’établir des concours d’arrondissement sans toucher aux concours cantonnaux, l’assemblée serait d’un avis différent.
1713° Les concours cantonnaux se passent entre gens ayant des relations fréquentes personnelles, une certaine communauté de vues d’intérêts agricoles, des ressources analogues comme voies d’importation ou d’exportation. Il en résulte une certaine sorte de concorde et de bonne entente à la condition d’en exclure toutes les discussions sur les questions étrangères à l’agriculture. En serait-il de même dans les réunions composées de gens plus étrangers les uns aux autres, ayant des intérêts et des vues plus divergentes et recrutées dans un milieu agricole et social différent, dans lequel les petits cultivateurs se trouveraient mal à l’aise ? Non sans doute.
172En résumé, l’assemblée générale reproche au projet d’être contraire à l’idée démocratique, de déshériter les petits cultivateurs au profit des grands ou moyens, d’être moins favorable aux idées d’association que l’on tend à propager et qui sont si utiles au progrès et à la prospérité de l’agriculture, sans offrir de compensation suffisante. Elle demande instamment le maintien des concours cantonnaux tous les 2 ans ».
173Archives départementales d’Ille-et-Vilaine 7 M 58.
174Enquête auprès des associations agricoles du département, 1891.
DOCUMENT 17. La fête cantonale dans Héritages d’André Chamson (1932)
175« A l’entrée de la place du quai, vers l’avenue de la gare, entre les deux hautes maisons blanches bâties en étrave, une banderole avait été tendue, chargée d’une inscription en lettres rouges :
176“Honneurs à nos élus”
177A l’autre bout de la place, au débouché de la nouvelle route par laquelle arrivent les gens de la montagne, une autre banderole lui répondait, avec une autre inscription, œuvre d’Hercule Pons :
178“Saint-André ville libre, bienvenue à tous”
179Depuis trois jours, Saint-André se préparait pour la fête. Elle tombait justement le dimanche qui suivait les élections et, cette année, tout le monde avait senti qu’elle ne serait qu’un prétexte pour célébrer le triomphe de la liste de défense.
180La grande foire du canton avait lieu à cette date, depuis des siècles. Les gens des campagnes envahissaient alors la petite ville d’un mouvement aussi régulier que celui de l’équinoxe, en poussant devant eux leurs bêtes grasses, marquées d’un fil de laine rouge ou d’un blason noir. Mais, depuis une dizaine d’années, la foire était allée en déclinant. Les marchands de bestiaux couraient les fermes en camions et des services d’autobus traversaient chaque jour la montagne. Au lieu d’attendre un an pour régler les affaires, on les poussait au jour le jour, et le foiral de Saint-André, inutile, servait aux joueurs de boules et devenait petit à petit le dépôt des balayures de la ville. Mais la fête elle-même avait survécu à cette décadence de la foire et, chaque année, on dansait sur la place, sous les illuminations, à côté des étalages, des manèges à orgues peints en blanc et des tentes de lutteurs devant lesquelles la parade recommençait toutes les demi-heures, au son du tambour. »
181Chamson André, Héritages, Paris, J. Ferenczi, 1934, p. 171.
DOCUMENT 18. « Le premier du canton… » (Loudéac, Côtes-du-Nord, 1958)

Le Courrier indépendant, 28 juin 1958.
Aujourd’hui, une échelle de vie périmée ?
182Bien des facteurs, au premier rang desquels l’urbanisation continue du territoire, paraissent aujourd’hui frapper le canton d’obsolescence. L’examen des aires de chalandise révèle qu’à proximité des grandes villes, le canton, s’il demeure un territoire économique pertinent pour les dépenses alimentaires, ne peut résister à la concurrence de l’agglomération voisine pour les dépenses moins courantes. L’implantation cantonale des services publics est parallèlement remise en cause : ainsi dans la gendarmerie, qui, en créant des communautés de brigades, en 2002, renonce au dogme de la brigade cantonale, naguère consacré par la loi de 1850. Pourtant, le canton, dont on ne cesse de prophétiser la mort, continue d’exister, et les développements de l’intercommunalité l’ont sans doute revivifié par endroits. En témoigne, entre bien d’autres exemples, la « Maison cantonale » de Modane, en Savoie : mise en place par le Syndicat intercommunal du canton, destinée à revitaliser un espace montagnard durement touché par les reconversions industrielles, celle-ci est présentée comme le « nouveau lieu de la convergence cantonale ».
DOCUMENT 19. Canton et zones de chalandise : l’exemple de Guichen (Ille-et-Vilaine, 2007)

Charte d’urbanisme commercial du pays des vallons de Vilaine, 2008, p. 14-15 (données valables au 31 décembre 2007).
DOCUMENT 20. Débat autour de la « décantonalisation » de la Gendarmerie (2004)
183« M. Jean-Paul Bacquet – Ma question s’adresse à Mme la ministre de la défense et concerne les difficultés posées, notamment en zone rurale, par le fonctionnement de la gendarmerie en communautés de brigades.
184Reposant sur la concentration des unités au sein d’un même secteur et sur une mutualisation des moyens, les communautés de brigades ont été mises en place afin d’optimiser la coordination des actions, d’améliorer la protection des personnes et des biens, et de développer l’efficacité opérationnelle sur des zones géographiques déterminées. Cette réforme devait permettre d’adapter l’organisation de la gendarmerie aux évolutions de la société.
185Aujourd’hui, après plusieurs années de fonctionnement dans le Puy-de-Dôme, force est de constater que cette nouvelle organisation ne répond pas à l’attente des populations et des élus ruraux, attachés aux valeurs de la gendarmerie, qui demeure une des institutions républicaines les plus essentielles.
186En milieu rural, le rôle du gendarme se caractérise par sa dimension relationnelle, par un travail de proximité et de contact avec les populations. De la capacité de la gendarmerie à prendre en compte les préoccupations des populations et à leur apporter une réponse adaptée, dépend sa réussite sur le terrain. Or, le fonctionnement en communauté de brigades, l’augmentation des charges de travail ne permettent plus aux gendarmes d’avoir un tel ancrage.
187De nombreux élus désapprouvent le fonctionnement en communautés de brigades. Des problèmes se posent dans le canton de Champeix, les gendarmes regroupés en communautés de brigades intervenant principalement à Issoire, chef-lieu de plus de 15 000 habitants, au détriment des commune rurales où l’habitat est très dispersé. De plus, la gendarmerie de Champeix, contrairement à ce qui a été indiqué aux élus, reste fermée la plupart du temps. Problème également dans le canton de Sauxillanges où les élus déplorent que les gendarmes soient de moins en moins présents. De plus, il est envisagé de réduire le nombre des journées d’ouverture des bureaux de la brigade, ce qui est inacceptable. Par ailleurs, les relations entretenues avec les élus permettaient souvent de mener à bien des actions de prévention efficaces. Une telle coopération n’est plus envisageable, les gendarmes, faute de temps et de moyens, ne connaissant plus les élus des territoires sur lesquels ils interviennent ! Ce mode de fonctionnement crée un sentiment d’insécurité et pourrait à terme conduire à une montée de la délinquance : lorsque celle-ci baisse en ville, elle augmente en zone rurale.
188En règle générale, ce fonctionnement en communautés de brigades se fait au détriment du milieu rural, les gendarmes intervenant prioritairement dans les zones les plus urbanisées.
189Madame la ministre, la situation en zone rurale est suffisamment grave pour que les élus dénoncent avec force cette réorganisation des services de la gendarmerie, qui remet en cause l’égalité devant le service public. Si l’idée initiale d’une mutualisation des moyens était louable, on s’aperçoit que cette réforme ne fait qu’élargir la fracture qui existe déjà entre les territoires urbains et les territoires ruraux.
190Déposée avant l’été, cette question reste d’actualité, comme l’ont montré les préoccupations des élus ruraux pendant les élections sénatoriales…
191M. Jacques Remiller – La Poste !
192M. Jean-Paul Bacquet – En effet. C’est pourquoi j’ai voulu interroger le Gouvernement.
193M. Laurent Hénart, secrétaire d’État à l’insertion professionnelle des jeunes – C’est en 1850 qu’on a défini les circonscriptions de gendarmerie, en 1941 qu’on a réparti les compétences entre police et gendarmerie. En 2002, rien ou presque n’avait changé depuis, alors que la réalité sur le terrain avait beaucoup évolué et que, ces dernières années, la délinquance s’est accrue, y compris en zone rurale.
194C’est pourquoi il a été décidé en 2002 de réorganiser la gendarmerie en regroupant deux ou trois brigades en une communauté sous un commandement unique, et en mutualisant les taches d’administration et d’appui pour redéployer les moyens humains sur le terrain. En même temps, depuis une décennie, un effort sans précédent a été consenti pour renforcer ces derniers, et 7 000 emplois sont inscrits en loi de programmation, dont 4 800 pour la sécurité de proximité dans les territoires ruraux.
195Les premiers résultats de cette politique sont encourageants. En 2003 la délinquance a baissé de plus de 10 %. En zone de gendarmerie, elle a diminué de 4,24 % et de près de 14 % pour la délinquance de voie publique, la plus sensible.
196Dans le Puy-de-Dôme, 18 communautés à deux brigades territoriales et 3 communautés à 3 brigades ont été mises en place. Les effectifs sont passés de 753 en 2002 à 790 en 2003 et augmenteront encore de 22 postes en 2005. Le Gouvernement est très attentif à la situation des communautés que vous évoquez, de même que la gendarmerie, dont le responsable a reçu récemment les élus de Champeix et a souligné qu’il souhaitait que les points de présence de la gendarmerie ne soient pas supprimés et que le groupement Issoire-Champeix recevrait 13 hommes en plus en 2005 – celle de Brassac-Sauxillanges bénéficiera de trois postes supplémentaires. Notre souci est que la loi d`orientation bénéficie à l’ensemble des unités en secteur rural où la délinquance a fait son apparition. L’augmentation des effectifs devrait vous rassurer, mais il va de soi que les responsables d’unité sont à votre disposition pour discuter des modalités d’intervention. »
197Assemblée nationale, Compte-rendu analytique officiel, Session ordinaire de 2004-2005 – 1re séance du mardi 5 octobre 2004, p. 8-10.
DOCUMENT 21. Le canton revitalisé par l’intercommunalité ? La création de la Maison cantonale de Modane (Savoie)

Site du Syndicat Intercommunal du Canton de Modane (SICM)
http://www.canton-de-modane.com/
(photographie: Bruno Cilio).
Notes de bas de page
1 Gravier J. F., La question régionale, Paris, Flammarion, 1970.
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