Un documentaire géographique et maritime
p. 93-111
Texte intégral
L’art de voyager en mer
1Cook est avant tout un marin aux commandes d’un navire en expédition. Son journal comporte donc naturellement un certain nombre d’informations techniques, relatives à la progression de son navire sur les océans, telles que longitude, latitude, distance parcourue, force des vents, etc., dont nous avons vu qu’elles se trouvaient généralement condensées au début de chaque entrée. Mais l’expédition est également l’occasion de livrer sur la navigation certaines remarques plus générales, disséminées dans le texte au gré des événements particuliers qui les déclenchent, ou lorsque, plus rarement, la monotonie de la traversée laisse le champ libre aux analyses et réflexions sur l’art de la navigation. En mars 1769, par exemple, après avoir pénétré dans le Pacifique, Cook s’intéresse au régime des courants qui y sévit et, constatant leur absence, en conclut qu’aucune terre ne saurait se trouver dans les parages :
Aucun courant n’est venu affecter la direction du navire depuis que nous sommes dans ces mers. Ceci est le signe que nous n’avons été dans les parages d’aucune terre de quelque étendue que ce soit, car c’est près de la terre que l’on trouve généralement les courants. Ceci est le cas sur la côte est de ce continent, où plus au nord, on rencontre des courants à plus de cent lieues de la terre, de même qu’il y en a toujours au milieu de l’océan atlantique, entre l’Afrique et l’Amérique. Je ne vois donc pas pourquoi il n’y en aurait pas ici, si un continent, ou quelque terre que ce soit, se trouve quelque part à l’ouest de notre position, comme certains l’imaginent. Si une telle terre existe, nous ne pouvons en être éloignés, car nous voici maintenant à 560 lieues de la côte ouest du Chili1.
Dans cet univers sans repère objectif qu’est l’océan, tout changement soudain, tout élément qui vient perturber le paysage marin, est analysé avec soin, car il s’agit bien de ne pas manquer l’île où le navire pourra relâcher et l’équipage se reposer. La présence de houle est ainsi interprétée comme le signe évident de l’absence de terre à proximité du navire : « la houle du sud-ouest continue de souffler, d’où je conclus qu’aucune terre ne se trouve à proximité, dans cette direction2 », mais l’observation du ciel ne saurait non plus être toujours prometteuse : « des nuages suspendus à un horizon encombré ne sont certainement pas les signes habituels de la présence d’un continent3 ». Si les algues de roches ou les troncs d’arbres que le navire croise semblent indiquer qu’une île est proche, la présence d’animaux, phoques, pingouins ou oiseaux, n’est pas, quant à elle, toujours déterminante. Certaines espèces sont cependant réputées pour ne jamais trop s’éloigner de la terre ferme : « Il existe toutefois certains oiseaux de mer dont la présence indique que la terre est proche, notamment les cormorans qui la perdent rarement de vue, de même que les fous, les nigauds et les frégates ne s’aventurent jamais très loin en mer4 ».
2Au second voyage, alors que l’expédition se dirige vers le cap de Bonne-Espérance, c’est le régime des vents et marées atlantiques que Cook étudie, avec en arrière-plan, la remise en question de ce que ses prédécesseurs avaient avancé sur le sujet :
Certains gentilshommes au fait de la navigation entre l’Angleterre et le Cap de Bonne-Espérance, me dirent que je partais à la mauvaise saison car le temps serait très calme autour de la ligne d’équateur. Ceci est sans doute vrai certaines années, mais n’est pas systématique. En effet, nous ne rencontrâmes dans ces latitudes aucun calme, mais au contraire un vent vif de secteur sud-ouest, et nous n’eûmes pas droit aux tornades si souvent mentionnées par les navigateurs précédents […] ce qu’ils ont écrit au sujet des courants en direction de la Guinée, lorsqu’on approche de cette côte, s’est cependant avéré juste5.
Force des marées, navigation au milieu des glaces de l’Antarctique, gestion des hommes à bord, analyse des cartes, détail des manœuvres techniques, etc., au fil du texte, ce sont tous les aspects du voyage en mer qui sont abordés dans ce qu’Adrien Pasquali appelle les « arts de voyager6 », et qui constituent une série de conseils et d’indications, adressés en premier lieu aux marins appelés à naviguer dans cette partie du globe. Souvent discrètes et indirectes, les allusions que fait Cook à ses éventuels successeurs se font parfois plus franches et officielles. En août 1770, par exemple, alors que le navire vient de passer plusieurs semaines à remonter la Grande Barrière de Corail et se trouve à l’abri à Endeavour Strait, Cook prévient : « En ce qui concerne les écueils que l’on trouve le long de cette côte, je me dois d’observer, à l’attention de ceux qui peut-être me succèderont, que je ne pense pas avoir positionné la moitié d’entre eux sur ma carte, car il serait absurde de croire que nous les avons tous découverts7 ».
3Dans le même esprit, Cook offre, au second voyage, ses conseils de navigation aux abords de Dusky Bay en Nouvelle-Zélande. Il interpelle alors directement le lecteur :
À l’entrée de la baie, gardez la rive sud le long du bord jusqu’à ce que vous approchiez l’extrémité occidentale de l’île des Indiens, que vous distinguerez aisément par sa grande proximité de cette côte. Cette île semble diviser ici la baie en deux bras. Laissez l’ile à tribord et remontez la baie selon une direction est-nord ½ nord sans jamais virer ni à droite, ni à gauche8.
Si ces indications précises ont pour objectif premier de permettre la reconnaissance immédiate du lieu et de s’y rendre facilement, elles couvrent parfois un domaine plus large pour indiquer le meilleur moyen de pénétrer dans le Pacifique. Ainsi le délicat passage du Cap Horn est préféré au détroit de Magellan, à condition de prendre certaines précautions que ne saurait oublier le navigateur consciencieux : « la prudence dictera à chaque homme qui se trouve dans ces latitudes de s’assurer qu’il s’est suffisamment porté à l’ouest et qu’il a donc doublé toutes les terres existantes avant de songer à remonter vers le nord9 ». Les adresses au navigateur sont ainsi le moyen de signaler certains dangers de la mer et les moyens d’y faire face. C’est le cas lors de la remontée de la Grande Barrière de Corail à l’été 1770, où Cook indique avec précision l’itinéraire à suivre dans le dédale de récifs australiens, mais aussi lorsque le navire se trouve aux milieux des glaces du cercle polaire sud lors du second voyage. Lorsque le danger est jugé négligeable, les indications ne s’imposent pas. Ainsi, au Cap, « il y a si peu de danger à entrer et sortir de cette baie qu’il n’est pas nécessaire que je fasse quelques recommandations que ce soit10 », et Cook s’excuse presque parfois du peu de renseignements qu’il communique à ses lecteurs : « Depuis que nous avons quitté la pointe Java, nous avons fait peu de remarques qui puissent être utiles aux navigateurs ou à quiconque aurait ce journal en sa possession11 ». Mais quand à l’inverse, c’est le danger qui l’oblige à s’éloigner de la côte qu’il explore, c’est à l’opinion publique qu’il s’en prend, prévenant ainsi le futur navigateur de ce qui l’attend :
Le public excusera difficilement celui qui laisse une côte inexplorée après l’avoir découverte. S’il allègue les dangers, on l’accuse d’être pusillanime et de manquer de persévérance et on déclare immédiatement qu’il est l’homme au monde le moins propre à être explorateur. Si au contraire il affronte hardiment tous les dangers et tous les obstacles, et a la mauvaise fortune de ne pas réussir, on l’accuse d’être téméraire et de manquer de jugement12.
C’est ainsi, de manière très naturelle, qu’à la fin de son journal du premier voyage, Cook livre son opinion sur la poursuite de l’exploration du Pacifique :
J’espère que l’on ne trouvera pas déplacé que je donne mon opinion sur le moyen le plus efficace de faire de nouvelles découvertes dans la Mer du Sud : c’est d’y entrer par la Nouvelle-Zélande après avoir touché le cap de Bonne-Espérance pour s’y procurer des vivres, puis de là, continuer jusqu’au sud de la Nouvelle-Hollande vers le canal de la Reine Charlotte, où l’on renouvellera les réserves de bois et d’eau, en prenant soin d’être en mesure de quitter cet endroit à la fin du mois de septembre ou au début du mois d’octobre au plus tard, afin d’avoir tout l’été devant soi. Après avoir passé le canal, on pourrait, à l’aide des vents d’ouest dominants, courir à l’est dans une latitude aussi haute qu’on voudra et, si on ne rencontre aucune terre, on aura le temps de faire le tour du Cap Horn avant que l’été ne soit trop avancé. Mais si, n’ayant pas rencontré de continent, on a d’autres objectifs en vue, il faut porter au nord et, après avoir visité quelques unes des îles découvertes précédemment, continuer vers l’ouest avec les vents alizés à l’arrière, à la recherche des lieux que nous avons mentionnés : ainsi, on aurait complété les découvertes dans la Mer du Sud13.
Les conseils que prodigue Cook à ses successeurs ne sauraient cependant se confiner aux remarques que nous venons de faire. Car, à bord du navire, c’est un équipage tout entier qu’il faut savoir mener et gérer pendant les longues années que dure l’expédition. Il semble par exemple primordial d’observer un sens du partage équitable entre matelots et officiers, capitaine inclus : « Quelque denrée fraiche que nous eussions à partager, je la faisais répartir équitablement entre tous les membres de l’équipage sans exception, en général par poids égaux, et le dernier mousse en obtenait autant que moi, ou que quiconque à bord. C’est une règle que chaque commandant devrait observer lors d’un voyage comme celui-ci14 ».
4Le régime alimentaire imposé aux marins a lui aussi son importance, même si celui-ci a parfois du mal à être accepté par l’équipage. Cook indique alors ce qui selon lui est la meilleure manière de procéder avec les marins récalcitrants :
Au début, les hommes ne voulaient pas manger de choucroute. Cela dura jusqu’à ce que j’utilise une pratique que je n’ai jamais vue échouer avec les marins et qui consiste à en faire apprêter tous les jours pour la table de la cabine, en invitant tous les officiers sans exception à en faire usage et laissant les hommes libres d’en user à discrétion. En moins d’une semaine, il fallut en servir une ration à chaque homme du bord ; car tels sont le tempérament et les dispositions des marins en général, que quoi que vous leur donniez qui sort de leurs habitudes, quand bien même ce serait pour leur plus grand bien, ça ne passe pas, et vous n’entendrez que récriminations contre l’homme qui a inventé cela. Mais, dès qu’ils voient leurs supérieurs attacher de la valeur à cette nourriture, elle devient la meilleure du monde et l’inventeur un brave gars15.
Parfois, le conseil se déguise en critique à peine voilée des instances responsables des provisions de bouche au sein de la Royal Navy. Dans le journal de son second voyage, Cook se plaint ainsi des habitudes qui privilégient certaines denrées à d’autres :
La coutume veut, dans la Marine Royale, qu’aucun navire ne soit approvisionné en farine, raisin ou graisse animale pour une durée supérieure à trois mois, étant supposé qu’au delà de cette période ces denrées sont périmées. Mais si telle est la raison, elle est infondée, car nous avons trouvé que les dites denrées tenaient aussi bien que les autres, sinon mieux. Il suffit, après s’être assuré de leur qualité, de les conditionner correctement dans des barils étanches. J’ai toujours remarqué que les marins préféraient la farine et les fruits au bœuf salé, et je suis convaincu que les premiers sont plus sains et nourrissants. Je n’insinue pas qu’il ne faut pas servir de bœuf salé à bord des navires, mais simplement que le manque de farine, etc., est préjudiciable. Je suis pleinement convaincu que certaines améliorations dans l’équipement en vivres contribueraient grandement à la bonne santé des marins et au final seraient autant d’économies pour la Couronne, mais l’endroit est mal choisi pour discuter longuement de cette question16.
Conscient de la portée d’une telle remarque, Cook ajoutera cette note dans la marge de son journal : « Omit ». Ce passage sera de fait absent de la relation publiée par John Douglas en 1777, mais a survécu dans le manuscrit d’origine.
5Enfin, dernier élément sur lequel Cook met l’accent : l’hygiène. Au fil des entrées, il insiste sur ce point indispensable selon lui, pour assurer la bonne poursuite de l’expédition. Au départ de sa troisième expédition, alors que les navires font face à d’importantes intempéries au large des îles du Cap-Vert, Cook rappelle :
Ces pluies et l’air lourd et renfermé qui les accompagne ne sont que trop souvent sources de maladies dans ce type de traversée. On a en tout cas tout à en craindre, et on ne saurait être trop prudent en obligeant les hommes de l’équipage à faire sécher leurs vêtements et à aérer le navire par des feux et des fumées, chaque fois qu’il est nécessaire. Ceci fut constamment pratiqué à bord du Resolution et du Discovery et s’avéra certainement bénéfique car nous eûmes moins de malades que lors de mes précédents voyages17.
James Cook garde donc à l’esprit que d’autres navigateurs suivront dans son sillage et que l’expérience qu’il acquiert au fur et à mesure que ses expéditions se déroulent pourra servir dans le futur. C’est dans cette logique que s’inscrivent les conseils qu’il livre, souvent de manière inattendue et indirecte, sur l’art de voyager au milieu des océans. Il est cependant un autre domaine dans lequel ses observations seront d’une portée et d’une utilité plus officielles : la description des terres qu’il visite.
La description des territoires découverts
6La description des territoires découverts au cours des expéditions est, nous l’avons mentionné plus haut, l’un des volets mis en avant par les instructions que Cook reçoit de l’Amirauté. Chaque île visitée, chaque baie où le navire vient mouiller, qu’il s’agisse d’une escale habituelle ou d’un territoire nouvellement découvert, chaque peuple rencontré, sont l’objet d’une description spécifique plus ou moins détaillée en fonction à la fois de l’importance du lieu, de la durée et des conditions du séjour18. La plupart de ces descriptions concernent les bandes côtières des îles visitées. Lorsque Cook pénètre à l’intérieur des terres, c’est rarement pour explorer les lieux qu’il traverse. S’il gravit une colline de temps à autre, c’est pour mesurer approximativement l’étendue de la terre sur laquelle il se trouve, ou pour vérifier la présence éventuelle d’autres îles au large et définir ainsi son itinéraire. Ses déplacements se limitent aux lieux des réceptions que certains chefs indigènes organisent en son honneur. Tout au plus organise-t-il parfois une expédition pour récupérer un objet dérobé par les indigènes ou un marin déserteur qui n’a pas réintégré ses quartiers. Les bandes côtières représentent en revanche un intérêt certain, et c’est sur celles-ci que Cook concentre ses descriptions. Placées généralement en fin d’escale, elles obéissent à un plan précis et rigoureux, qui, s’il n’est pas toujours respecté à la lettre, constitue néanmoins l’armature d’un texte qui se veut objectif et réfléchi. Il faut souligner cependant, qu’avant même ces descriptions de fin d’escale, le texte est parsemé de courtes mentions des paysages aperçus et parcourus, premières impressions d’un voyageur qui découvre un lieu nouveau.
Premières impressions
7C’est d’abord depuis le mât de vigie que la terre est aperçue, et la première vision qu’en a Cook se fait donc à distance. Souvent très courte et exprimée en termes vagues et prudents, cette première description a pour but de livrer une impression d’ensemble que vient préciser plus tard la description détaillée qui conclut l’escale. En avril 1769, Tahiti apparaît simplement comme « très haute et montagneuse19 », et quelques mois plus tard, c’est la côte néo-zélandaise qui se dévoile ainsi : « La côte est élevée, avec des rochers abrupts et, à l’intérieur des terres, de très hautes montagnes. La figure du pays est formée de collines et paraît verdoyante et recouverte de bois20 ».
8La prudence des termes utilisés tend à souligner la subjectivité de l’observation effectuée. Sur la côte nord-est de l’île, par exemple, « la figure du pays semble verte et plaisante, et le sol paraît très riche et propre à être cultivé21 ». La présence de termes comme « semble » et « paraît » associe à la distance géographique qui sépare le navire de la terre, une distance modale qui se répète à de nombreux endroits du texte, soulignant ainsi l’incertitude des observations. Sur la côte néo-zélandaise, « Tout autour de la baie, le pays, du moins ce que j’ai pu en voir, est formé de collines irrégulières et semble essentiellement recouvert de bois22 ». Cette attitude s’accentue lorsque les conditions météorologiques font obstacle à toute visibilité correcte. À la pointe nord-ouest du continent américain, Cook ne pourra qu’admettre que les observations qu’il couche sur le papier « ont pu prêter à de petites erreurs à cause du temps brumeux23 ». La première impression n’est pas non plus toujours la bonne. L’archipel de Kerguelen, si prometteur en première instance, s’avère étonnement décevant lorsque l’équipage y débarque en décembre 1776 :
Je n’ai pas trouvé le moindre signe d’arbre ou de buisson de quelque sorte que ce soit, et très peu d’herbe. L’aspect verdoyant des nombreuses collines que nous avions observées depuis le large nous avait pourtant donné la flatteuse espérance que nous rencontrerions des choses considérables dans ce domaine24.
À cette occasion, Cook ne pourra s’empêcher de rendre hommage avec humour, à Yves-Joseph de Kerguelen découvreur de l’archipel en février 1772 et rebatisera l’endroit île de la Désolation25. Le séjour à terre, et les différentes excursions dans l’île sont également l’occasion de descriptions spontanées des paysages. À cette occasion, Cook, par ailleurs si neutre et objectif, sait parfois faire preuve d’un certain émerveillement devant la beauté de ce que la nature lui révèle. Ainsi, le pays qui borde la côte néo-calédonienne lui apparait-il comme un cadre romantique idéal26, et en débarquant à Tongatapu, il se sent « transporté dans l’une des plaines les plus fertiles d’Europe27 »). Lors de son second voyage, coincé pendant quelques heures sur un rocher à Dusky Sound (Nouvelle-Zélande), en attendant une marée favorable, Cook se laisse aller à apprécier sa situation :
[…] nous avons fait du feu et fait griller quelques poissons grâce auxquels nous avons dîné chaleureusement sans autre accommodement qu’un bon appétit. Nous nous sommes ensuite endormis, avec la plage de galets pour lit, et le ciel comme couverture28.
Plus rarement, l’admiration qu’il éprouve pour le paysage laisse transparaître un certain lyrisme teinté de sublime. Ainsi, sur la côte de la Géorgie du Sud (South Georgia Island), au large des Falkland, « les rochers élevaient leurs nobles et sauvages sommets jusqu’à se perdre dans les nuages et les vallées gisaient sous les neiges éternelles29 »). Mais c’est face à l’énormité des icebergs croisés dans l’océan Antarctique que cette coloration sublime prend toute sa force. Cook ne peut alors que s’incliner devant la taille gigantesque de ces blocs de glace, et s’avouer impuissant face au danger que ceux-ci représentent pour le navire : « L’esprit est immédiatement rempli d’admiration et d’horreur, par la beauté des lieux tout d’abord, puis par le danger qui y est attaché, car si un navire venait à heurter l’un de ces énormes blocs de glace, il serait réduit en morceaux sur l’instant30 ».
9Admiration et horreur, on reconnaît bien là deux des principaux éléments de l’esthétique du sublime. Si la nature à l’état brut sait émouvoir James Cook, c’est cependant lorsqu’elle porte la marque de l’homme, ou lorsqu’il y entrevoit la marque possible de la civilisation, qu’elle retient toute son attention. Habitations, routes, champs cultivés et bétail sont autant d’éléments qui viennent parfaire la beauté du lieu. À Tonga par exemple : « Le lendemain, je fis un tour dans l’île. Je la trouvai joliment organisée en plantations extrêmement bien cultivées et plantées […] Toutes ces plantations étaient entourées de clôtures et séparées par des voies publiques31 ». Dans ces moments où son imagination est stimulée, Cook se prend parfois à rêver du futur : « En contemplant cette perspective charmante, je me complaisais dans l’idée que quelque futur navigateur, du même endroit, pourrait contempler ces prairies peuplées du bétail apporté dans ces îles par les Anglais32 ».
10Les descriptions initiales que livre James Cook se trouvent donc disséminées ça et là dans le texte, depuis la première vision du lieu, où celui-ci apparait depuis l’océan, jusqu’aux différents déplacements effectués dans l’île. Ici, c’est la spontanéité qui fonctionne comme moteur de la description. Point de rubrique détaillée, point de classement des différentes rubriques abordées. Ces premières descriptions, généralement courtes, apparaissent au détour du compte rendu des événements à terre. Ce que Cook consigne à cette occasion, c’est l’impression que fait sur lui la nature, qu’elle soit à l’état sauvage ou qu’elle porte les marques de la civilisation. Mais c’est en fin d’escale, lorsque le navire appareille pour poursuivre l’expédition que la description détaillée apparaît en bloc dans le corps du texte.
Les descriptions de fin d’escale
11Les descriptions que livre Cook concernent essentiellement les lieux nouvellement découverts ou redécouverts. Lorsque, par exemple, l’Endeavour fait escale au Cap de Bonne-Espérance en avril 1771, Cook signale qu’aucune description de l’endroit ne sera à première vue utile (« Le cap de Bonne-Espérance a été si souvent décrit par les auteurs et il est si bien connu des Européens qu’il pourrait paraître superflu d’en donner une description33 »), mais il lui semble nécessaire de rétablir certaines vérités :
Je ne peux éviter cependant de faire remarquer que la plupart des auteurs […] en ont fait un portrait si embelli qu’il est très au-dessus de ce qu’il mérite ; de sorte qu’un étranger qui y arrive est à la fois surprise et déçu, car aucun des pays que nous avons vus au cours de ce voyage ne présente un aspect aussi aride, et ce n’est pas seulement une apparence, mais une réalité34.
De la même manière, Batavia, bien connue et fréquentée des Européens, ne mérite pas que l’on s’attarde à la décrire, même si ce qu’en ont dit les prédécesseurs de Cook ne semble pas, selon lui, correspondre à ce qu’il a l’occasion d’observer :
Un endroit si souvent visité par les Européens, et dont il existe tant de descriptions qu’il semble superflu d’en ajouter une. En outre, je n’ai ni le talent ni le matériel nécessaires pour une telle entreprise, car quiconque désire faire un compte rendu fidèle de cet endroit se doit de contredire en de nombreux points tous les auteurs que j’ai pu consulter. Je laisse cette tâche à des gens plus habiles que moi, et me contenterai de noter ce qui me paraît nécessaire aux navigateurs de connaître35.
Lors de son second voyage, Cook ne proposera pas non plus de description de Madère, en dehors des indications habituelles sur la position de l’île, et se contentera de renvoyer le lecteur à ce qu’il a pu en dire lors de son précédent séjour en 176836. De la même manière, pour un compte rendu détaillé de la production des Açores, c’est vers les Anglais qui y ont séjourné que Cook dirige le lecteur : « Je n’ai nullement l’intention d’entrer dans le détail des productions de ces îles. Je présume qu’on en obtiendra à tout moment un meilleur compte rendu à Londres auprès des négociants anglais qui y ont séjourné37 ».
12Si les lieux déjà connus, fréquentés et habités par les Européens ne semblent pas intéresser Cook au-delà de ce que son devoir d’officier lui impose, il en va tout autrement des îles qu’il découvre ou retrouve dans le Pacifique, et qui vont concentrer l’essentiel de ses descriptions. Espace situé hors du récit du voyage à proprement parler, la description de fin de séjour apparaît comme une véritable escale textuelle pendant laquelle le lecteur est arraché au compte rendu journalier des événements qui animent l’expédition, pour se plonger dans l’analyse des lieux du séjour et de la société des hommes qui y vivent. Ce décrochage est généralement annoncé dans le texte. La description de Tahiti au premier voyage apparaît par exemple sous le titre « Description de l’île du Roi George38 », et se trouve encadrée d’une part par le récit du séjour à Tahiti (« Événements remarquables à l’île de George39 »), et d’autre part par la reprise du récit de l’expédition au moment où le navire appareille pour poursuivre sa route dans le Pacifique le 14 juillet 1769 (« Événements remarquables en mer40 »). Si ce schéma se répète plusieurs fois dans les différents journaux de Cook, il n’est toutefois pas exclusif. Ainsi, toujours pour le premier voyage, la description de la Nouvelle-Zélande est rapidement annoncée à la fin d’une entrée41, et la côte orientale australienne est détaillée sans titre, ni introduction particulière, à l’entrée du 23 août 177042.
13Nous avons mentionné plus haut qu’à l’occasion du premier voyage de Cook, la Royal Society fournit au capitaine un plan rigoureux des éléments qu’il lui fallait faire apparaître dans la description des lieux qu’il découvrirait et visiterait dans le Pacifique. Si ce plan n’est pas toujours respecté à la lettre, en particulier lors des deuxième et troisième voyages, la plupart des rubriques préconisées par la Royal Society sont présentes dans les descriptions de Cook. Nous n’avons pas pour projet d’examiner dans le détail chacune de ces descriptions, mais de faire ressortir une tendance générale dans l’organisation de celles-ci. À cet égard, la description de Tahiti en 1769, première véritable tentative du genre chez Cook43, fournit ici un exemple intéressant, puisqu’elle fonctionne comme le modèle qui sera suivi, plus ou moins fidèlement, par la suite. Cette description commence et se termine par des remarques très générales sur, d’une part, la position de l’île et l’historique de sa découverte par Samuel Wallis en 1767, et, d’autre part, sur les marées, les vents et le climat qu’on trouve sur l’île. Entre ces deux bornes, la description se fait plus détaillée. Cook mentionne d’abord l’apparence générale des côtes ainsi que les baies et ports naturels du lieu. On y trouve ensuite un compte rendu de sa production naturelle, sur laquelle Cook ne tarit pas d’éloge, tant l’abondance de biens est au rendez-vous44. Puis vient un long chapitre sur les indigènes. Y sont décrits leur apparence physique et leur mode de vie. Le lecteur y découvre par exemple quelques remarques intéressantes sur la taille et la couleur de peau des Tahitiens :
En ce qui concerne leur personne physique, les hommes sont généralement grands, fortement membrés et bien faits. Un des plus grands que nous ayons vus mesurait six pieds trois pouces et demi. Les femmes de la classe supérieure sont de la taille des Européennes, mais celles de la classe inférieure sont généralement plus petites. Ceci est peut-être dû à un penchant amoureux qu’elles développent bien plus tôt que leurs supérieures et dont elles sont très dépendantes. La couleur de leur peau n’est pas toujours la même. Les insulaires de la classe inférieure, qui sont obligés de s’exposer beaucoup au soleil, sont d’un brun très foncé, et leur supérieurs, qui passent la plus grande partie de leur temps à l’abri dans leurs maisons ne sont pas plus bruns que les habitants des Indes Occidentales ou les gens qui y ont résidé longtemps. Certaines femmes sont même presqu’aussi blanches que des Européennes45.
L’ethnologue amateur que l’on voit poindre ici et qui avance prudemment ses analyses (« peut-être ») se fera au fil du texte plus présent pour s’affirmer encore aux deuxième et troisième voyages. Si pour l’heure Cook se contente essentiellement de comparer objectivement ce qu’il découvre, les Tahitiens, avec ce qu’il connaît, les Européens, l’hypothèse comportementale de la taille de certains Tahitiens constitue une première tentative d’interprétation empirique, qui, si elle apparaît bien naïve aujourd’hui, a le mérite de proposer une réponse possible à une question en apparence insoluble.
14La description se poursuit avec des remarques sur l’organisation de la société tahitienne et ses croyances religieuses. Ces paramètres, sans doute plus résistants à l’analyse, sont évoqués avec toutes les réserves qu’il convient d’adopter face à un sujet que l’on peine à maîtriser. Aux observations que Cook effectue, il faut ajouter la part prépondérante de ce qui lui est rapporté, ou du moins, de ce qu’il croit comprendre. Des expressions telles que « d’après ce que j’ai pu apprendre » ou « on nous a dit que », sont récurrentes dans le texte, et signalent l’incertitude de Cook face à la nature et la signification des phénomènes qu’il décrit. Parfois, il lui faut bien admettre sa totale incompréhension des événements qu’il voit se dérouler sous ses yeux. Au sujet d’une cérémonie de deuil, suite au décès d’une vieille femme, il écrit par exemple :
L’homme […] accompagné de deux ou trois autres hommes ou femmes dont le visage et le corps étaient enduits de suie, et qui tenaient à la main un gourdin, se mirent, au moment du coucher du soleil, à courir de tous côtés sur un espace d’environ un mille, et dès qu’ils s’approchaient, tout le monde fuyait comme s’ils étaient autant de mauvais génies, et personne n’osa rester sur leur chemin. Je ne connais pas la raison de cette cérémonie, qu’ils appellent Heiva, nom qu’ils donnent à la plupart de leurs divertissements46.
À la difficulté de comprendre exactement ce qui se passe, s’ajoute le fait que le nom tahitien que Cook recueille, et qui désigne tout type de représentations, ne permet pas de différencier cette cérémonie particulière des autres danses ou mises en scène dramatiques auxquels les Anglais assistent lors de leur séjour sur l’île. Mais c’est sur la question de la religion que l’opacité est la plus dense. Si dense, à vrai dire, que seuls un sens aigu du devoir et un penchant naturel pour la transmission des informations recueillies forcent Cook à mentionner le sujet :
[…] un sujet sur lequel j’ai si peu de renseignements que j’ose à peine l’aborder, et que j’aurais passé sous silence si ce n’était mon devoir et mon inclination de mentionner dans ce journal tout ce que j’ai pu apprendre d’un peuple qui a, pendant des siècles, été isolé des autres parties du monde47.
S’il perçoit l’existence d’un dieu suprême dont est issu un grand nombre de déités secondaires, il est incapable d’en saisir le nom et laisse à cet endroit un blanc dans son texte. Seul le peu d’importance que les Tahitiens semblent accorder à leur prêtres, le conduit à penser que : « ces peuples ne sont pas portés à la bigoterie48 »).
15Le modèle fourni par la description de Tahiti au premier voyage ne saurait être répété à l’identique d’une île à l’autre. La spécificité géographique de chaque lieu, et de chaque peuple qui y vit, induit nécessairement des modifications dans le compte rendu qu’en fait Cook (la question du cannibalisme occupe par exemple une place considérable dans la description de la Nouvelle-Zélande, mais est absente de la description de Tahiti), bien que l’on observe un certain nombre de constantes parmi les différentes descriptions. L’une de ces constantes présente dans le cadre de cette étude un attrait tout à fait remarquable : l’intérêt que peut représenter l’endroit visité pour la nation britannique.
Des descriptions orientées
16Les instructions que reçoit Cook de l’Amirauté mettent fortement en avant l’aspect utilitaire de l’entreprise de découverte. La mission qui lui est confiée ne demande pas seulement d’œuvrer pour le progrès de la navigation, de la science ou pour la connaissance au sens large, mais également de mesurer ce que la Grande-Bretagne pourra retirer des différentes découvertes effectuées dans le Pacifique. Aux termes « géographie » et « navigation » vient donc naturellement s’ajouter celui de « commerce », élément qui oriente considérablement les descriptions. Car au-delà de la beauté éventuelle du lieu découvert, c’est l’intérêt que peut susciter celui-ci aux yeux de la nation britannique qui se dessine en arrière-plan.
17De ce point de vue là, Tahiti, pourtant lieu d’escale favori des expéditions de Cook, ne semble tout d’abord pas se présenter sous son meilleur jour : « L’île ne produit rien qui ait une valeur intrinsèque ou qui puisse être utile au commerce. Si bien que l’intérêt de sa découverte ne réside que dans les vivres frais qu’elle peut fournir à tout moment aux navires de passage dans ces mers49 ».
18La côte orientale australienne ne paraît pas non plus présenter grand intérêt pour les futurs colons anglais. Rien de ce que cette terre produit ne saurait en effet s’avérer rentable pour la Grande-Bretagne (« Le pays lui-même ne produit, à notre connaissance, rien qui puisse devenir un objet de commerce et attirer des établissements d’Européens50 »), et parmi les terres visitées au premier voyage, seule la Nouvelle-Zélande semble présenter les critères requis. La richesse de sa production naturelle ne tarderait pas à fournir tout ce qu’il faut pour vivre, à condition d’y implanter des colons industrieux. Quand aux indigènes, leur présence ne saurait présenter un véritable obstacle à l’implantation d’une base permanente. Les divisions et les luttes intestines qui caractérisent les Maoris apparaissent ainsi comme autant d’atouts pour assurer la pérennité de la présence britannique :
Autant que j’aie pu juger du génie de ces peuples, il ne me semble pas du tout difficile pour des étrangers de former des établissements dans ces contrées ; les naturels paraissent être trop divisés entre eux pour s’unir dans la résistance, grâce à quoi, et par des traitements doux et humains, les colons seraient à même de fonder parmi eux des sociétés durables51.
Lors du troisième voyage, la côte nord-ouest américaine offrira quant à elle la perspective d’un négoce florissant de fourrures avec les Indiens Nootka, à condition toutefois de découvrir un moyen de communication rapide et sûr avec l’Europe :
On pourrait sans aucun doute établir un commerce de fourrures très lucratif avec les habitants de cette vaste côte, à condition qu’un passage soit trouvé au nord, sans lequel, l’Angleterre paraît trop éloignée pour tirer quelque profit que ce soit de cette entreprise52.
L’éloignement de la Mère-Patrie, ou des autres zones de présence britannique, rend l’aventure bien périlleuse, tant les convoitises sont grandes. C’est ce même argument qui est évoqué pour l’île de Kauai dans l’archipel hawaïen. Aux yeux de Cook, c’est l’Espagne qui au regard de son implantation sur la côte américaine, pourrait tirer le plus grand intérêt d’une colonisation de cette terre :
L’Espagne pourrait probablement tirer profit de la découverte de ces îles, et les utiliser comme relâche pour les vaisseaux naviguant entre la Nouvelle-Espagne et les Philippines, car elles sont extrêmement bien situées, à mi-chemin entre Acapulco et les îles Larrons53.
On voit intervenir ici en filigrane un élément supplémentaire dans l’entreprise de description de Cook. Car avant même d’envisager la création de relations commerciales, c’est tout un cordon de bases stratégiques qu’il faut établir et maintenir, afin que le commerce puisse se dérouler et prospérer en toute tranquillité, loin de l’influence néfaste des autres puissances européennes, au premier rang desquelles se trouve à l’époque la France. Pour Cook, il s’agit donc de prendre la mesure de l’éligibilité éventuelle du lieu au statut d’escale, et les descriptions qui découlent de sa visite se font l’écho de ce paramètre. Un port en eau profonde, d’accès facile et suffisamment protégé, des indigènes conciliants ou pour le moins en position de faiblesse face aux Anglais et un réservoir naturel de vivres sur place se présentent donc comme des critères de choix qui, pris ensemble, transforment l’île découverte en un lieu de relâche idéal qui viendra s’incorporer au maillage de bases navales anglaises dans le Pacifique. Mais ces différents critères ne sont pas toujours réunis au même endroit et il apparaît bien difficile qu’un seul et même lieu présente toutes les qualités requises. Nootka Sound, sur la côte nord-ouest américaine, est par exemple trop exposée au vent54. Les îles Shumagin, dans le prolongement ouest de l’Alaska, présentent des caractéristiques intéressantes, baies, anses, eau douce, mais ne sont pas suffisamment boisées55. Le bois que l’on trouve dans les forêts et collines qui entourent Queen Charlotte Sound en Nouvelle-Zélande est quant à lui d’excellente qualité, mais n’est pas suffisamment résistant pour servir à la fabrication des mâts dont les navires ont très souvent besoin56. Dans l’archipel des Tonga, l’île de Tongatapu (Amsterdam) possède les meilleurs ports, mais c’est Anamucka (Rotterdam) qui possède l’eau douce la plus convenable57. Au fil des journaux, les exemples sont nombreux qui analysent ainsi la capacité du lieu à recevoir la visite des Anglais. Si certains points d’ancrage sont fortement conseillés, comme à Tahiti par exemple58, d’autres ne sont à accoster qu’en cas de nécessité. À l’extrémité de cet éventail, c’est sans doute l’île de Pâques qui offre le moins d’avantages aux navires dans le besoin :
Aucune nation n’a intérêt à revendiquer l’honneur d’avoir découvert cette île, car peu d’endroits au monde offrent moins de rafraîchissements et de commodités pour la navigation que celui-ci […] seule une nécessité absolue pourrait décider quiconque à toucher cette île où il n’y a que peu de vivres, pas de mouillage sûr, ni de bois, ni d’eau douce que l’on puisse obtenir facilement59 […].
Ainsi, les descriptions que donne Cook des îles qu’il visite lors de ses voyages ont pour fil conducteur l’intérêt commercial et stratégique que ces lieux peuvent représenter pour la nation britannique. Mais si l’argument utilitaire apparaît toujours en arrière-plan, on ne saurait cependant réduire les expéditions de Cook à ce seul aspect, comme en témoigne l’attachement du capitaine à résoudre les énigmes de la mythique Terra Australis Incognita et du passage du nord-ouest.
Terra Australis Incognita et passage du nord-ouest
19Au moment où James Cook s’apprête à naviguer dans le Pacifique, la question du continent austral hante encore bien des esprits. Depuis la Renaissance, son existence semble pour beaucoup une évidence, une nécessité, « une certitude mathématique inévitable », pour reprendre les mots de J.C. Beaglehole, dont la découverte ne saurait tarder60. Au xviiie siècle, un certain nombre de publications, dont celles de John Campbell et du président Charles de Brosses, relancent le débat mais les expéditions de John Byron, de Samuel Wallis et de Philip Carteret dans les années 1760 ne parviennent pas à apporter une réponse définitive à la question. Le passage du nord-ouest, cette icône de la géographie spéculative, selon les termes d’Anne Salmond61, est quant à lui dans l’esprit des Européens depuis les premières tentatives de découvrir le détroit d’Anian au xvie siècle. Au xviiie siècle, une prime de £20.000 offerte par le Parlement anglais à quiconque découvrira le passage, replace ce dernier au devant de la scène, car plus que de proposer un nouvel itinéraire plus rapide et plus sûr entre les océans Pacifique et Atlantique, il apparaît alors comme la promesse d’un commerce florissant dont il faut avoir la maîtrise avant que d’autres nations ne s’en emparent. Les deux premiers voyages de Cook s’attachèrent à prouver l’inexistence de la Terra Australis Incognita et le passage du nord-ouest fut l’objet du troisième et dernier voyage.
Terra Australis Incognita
20Quelle qu’ait été sa conviction avant de se lancer dans sa première expédition, Cook se montre rapidement sceptique au sujet de l’existence du continent austral. Dès les premières semaines de navigation dans le Pacifique, il observe l’absence de courants qui auraient indiqué avec quasi-certitude la présence d’une terre de taille considérable dans les parages62. Cependant, aucune certitude n’est acquise à ce moment-là et la recherche du continent mythique reste dans les pensées de Cook, prête à surgir à tout moment. Ainsi, en quittant les îles de la Société en août 1769, c’est bien cette éventualité qui dicte au navire son itinéraire. En dépit des nombreuses îles dont Tupia, le prêtre tahitien embarqué à bord de l’Endeavour, signale la présence toute proche, Cook décide de ne pas perdre de temps et fait voile vers le sud, espérant croiser l’objet de ses recherches, jusqu’à la Nouvelle-Zélande que l’expédition atteint quelques semaines plus tard. À partir d’octobre 1769, c’est la côte est néo-zélandaise qui est l’objet d’investigation. Sa taille considérable remplit d’espoir les tenants de l’existence du continent, tel Joseph Banks, mais au bout de cinq mois de cabotage, il faut se rendre à l’évidence : cette terre n’est qu’un archipel de deux îles. Dans le texte de Cook, le continent austral n’apparait plus que comme un produit de l’imagination63. Joseph Banks, lui même, ne peut qu’admettre « l’anéantissement total du continent fantôme64 ». Dans un long passage construit avec soin, Cook examine alors l’hypothèse continentale au regard de l’itinéraire qu’il a suivi, qu’il confronte à ce que des navigateurs comme Quiros ou Roggeveen ou des écrivains comme Dalrymple ont pu écrire sur le sujet, et conclut que si un tel continent existe, ce ne peut être que dans des latitudes sud élevées :
[…] pour ce qui est d’un continent méridional, je ne crois pas qu’il en existe un, à moins que ce ne soit à une très haute latitude […] Il y a ici assez de place pour que le cap nord d’un continent puisse s’étendre vers le nord, dans une latitude sud fort avancée. Mais sur quoi ce fonde cette supposition ? Sur rien, à ma connaissance, sinon que ça ne peut qu’être à cet endroit65.
Cook admet donc l’existence d’un espace à l’extrémité sud du globe, suffisamment vaste pour contenir le continent, mais aucune conclusion définitive n’est atteinte à la fin du premier voyage. Une seconde expédition s’avère donc nécessaire, ce que Cook semble avoir à l’esprit bien avant le retour de l’Endeavour en Angleterre :
Je viens de donner mon opinion librement et sans parti pris, et nullement dans l’intention de décourager les tentatives futures de découvrir le continent méridional ; au contraire, car je pense que ce voyage montrera à l’évidence qu’il ne reste qu’un petit espace au nord du quarantième degré où il pourra être situé […] Je tiendrais pour très regrettable qu’une question qui, à diverses époques, a été l’objet de l’attention de tant de nations ne soit pas entièrement tirée au clair ; car on pourrait seulement y arriver au cours d’un seul voyage, sans beaucoup de peines ni de dangers, et sans crainte d’échec, puisque le navigateur saurait où diriger ses recherches66.
Au départ de sa seconde expédition, Cook a clairement à l’esprit l’itinéraire à suivre. C’est très au sud, près du cercle polaire que son navire devra chercher le continent austral, ainsi qu’aux environs du méridien ouest qui traverse les Tuamotu et les Marquises et où une large zone reste à explorer. À plusieurs reprises, l’expédition s’approche du cercle polaire et explore la région, en vain. La découverte de la terre australe reste présente en arrière-plan de tout le voyage. Ainsi, à la date du 2 août 1773, dans les environs de Pitcairn, l’île découverte par le capitaine Carteret en 1767, Cook confie :
Au cours de ce voyage et du précédent, j’ai traversé cet océan à la latitude de 40° et au-dessus, ce qui m’a permis de me forger une opinion sur l’objet de mes recherches, à savoir le continent austral. Tout concourt à me convaincre qu’il n’en existe pas, mais la question est trop importante pour n’être l’objet que de suppositions et doit être tirée au clair par des faits, ce qui ne peut se faire qu’en parcourant la zone encore inexplorée de cette mer, ce qui est notre tâche dans la dernière partie de ce voyage67.
Peu à peu, la zone géographique susceptible d’accueillir le continent austral se réduit, et Cook acquiert rapidement la conviction que cette terre n’existe pas. Le 27 janvier 1775, il se prononce contre le grand spécialiste de l’époque, Alexander Dalrymple : « Je crois pouvoir affirmer que la côte étendue marquée par M. Dalrymple sur sa carte de l’océan, entre l’Afrique, l’Amérique et le golfe de Saint-Sébastien, n’existe pas68 ». Quelques jours plus tôt pourtant, en arrivant à South Georgia Island, l’espoir était encore permis : « Ces réflexions me firent penser que la terre que nous avions vue la veille pouvait appartenir à une côte étendue, et je revins ainsi à l’espoir de découvrir un continent69 ». Peu de temps après, Cook arrive à la conclusion que si le continent existe, il ne peut être qu’au-delà du cercle polaire, entièrement glacé et rendu inaccessible par des conditions météorologiques extrêmes qui empêchent jusqu’à son approche70. Enfin, c’est en ces termes qu’il clôt le débat à la fin de son journal de bord :
J’ai fait le tour de l’hémisphère austral dans une haute latitude, et je l’ai traversé de manière à prouver qu’il n’y a point de continent, à moins qu’il ne soit près du pôle et hors de portée des navigateurs. En parcourant deux fois la mer tropicale, j’ai non seulement déterminé la position de quelques terres anciennement découvertes, mais j’en ai également découvert un grand nombre de nouvelles, et je crois que j’ai laissé peu de choses à faire dans cette partie du globe. Je me flatte ainsi que l’objet de l’expédition a été, à tous égards, parfaitement rempli, l’hémisphère austral assez reconnu, et qu’on ne parlera plus du continent austral, qui a occupé l’attention de quelques-unes des puissances maritimes depuis près de deux cents ans, et exercé les spéculations des géographes de tous les âges. Je ne nierai pas qu’il puisse exister un continent ou une grande étendue de terre près du pôle ; je pense au contraire que tel est le cas, et qu’il est probable que nous en ayons vu une partie. Le froid excessif, le grand nombre d’îles et la grande quantité de glace flottante, tout tend à prouver qu’il y a une terre au sud71 […].
Le passage du nord-ouest
21La découverte du passage du nord-ouest constitue, comme nous l’avons mentionné plus haut, l’objectif majeur du troisième voyage de Cook. Ses instructions lui enjoignent de rejoindre le plus rapidement possible la côte de la Nouvelle-Albion, de remonter ensuite cette côte jusqu’à une latitude de 65° nord, plus haut si les conditions météorologiques et les glaces le permettent, et d’explorer tout ce que cette zone compte de baies, d’embouchures ou de détroits qui pourraient conduire vers l’est aux baies de Hudson ou de Baffin72. C’est en mars 1778, avec près d’un an de retard sur le programme initialement prévu, que l’expédition de James Cook accoste le continent américain au niveau de l’actuel Oregon. En avril de cette année, les navires font relâche à Queen Charlotte Sound, au nord de l’île de Vancouver, puis, en mai, à Prince William Sound, en Alaska. C’est ici que l’on trouve la première référence au passage du nord-ouest : « Nous étions maintenant à plus de 520 lieues à l’ouest des baies de Hudson et de Baffin, et s’il y a un quelconque passage dans les environs, celui-ci doit se situer au nord de la latitude 72°, mais qui s’attendrait à trouver un passage ou un détroit de cette étendue73 ? ».
22Le doute exprimé ici se transforme peu à peu en certitude : aucune voie de communication entre les océans n’existe dans les parages, et si Cook continue d’explorer la zone, ce n’est que pour satisfaire ses officiers :
Le pays était entièrement recouvert de neige, du sommet des collines jusqu’à la plage, et, selon toute apparence, faisait partie du continent, de sorte que je fus persuadé que nous ne trouverions aucun passage dans cette anse, et je continuai mes recherches moins pour confirmer mon opinion que pour satisfaire certains des membres de l’équipage74.
Quelques jours plus tard, l’exploration de Cook Inlet, malgré les quelques espoirs que la découverte de ce bras de mer crée chez les membres d’équipage, ne se révèle pas plus positive. Le 1er juin 1778, le journal conclut de manière laconique : « Nous avions abandonné tout espoir de trouver un passage75 ». L’embouchure d’une rivière découverte à cet endroit est cependant explorée jusqu’à la certitude qu’il ne s’agit pas d’un détroit plus large, et Cook se justifie du temps passé à effectuer cette vérification :
Si la découverte de cette rivière se montrait profitable dans le présent ou dans l’avenir, il y aurait moins de raison de regretter le temps que nous perdîmes à l’explorer. Mais pour nous qui avions un but d’une tout autre envergure, ce fut une perte irréparable. La saison s’avançait à grands pas. Nous ignorions jusqu’où nous serions obligés d’aller vers le sud, et nous étions désormais convaincus que le continent se prolonge à l’ouest bien plus loin que ce que les cartes modernes indiquent. Ceci rendait moins probable l’existence d’un passage dans la baie de Hudson ou dans celle de Baffin, ou au moins montrait qu’il aurait une plus grande étendue. Mais si je n’avais pas reconnu l’endroit, on aurait conclu et tenu pour un fait démontré qu’il communique avec la mer par le nord, ou par l’une des baies par l’est76.
La question du temps à consacrer à l’exploration de tel ou tel endroit, au regard des objectifs de départ et des échéances auxquelles l’expédition est soumise, est récurrente dans le journal. Lors de son premier voyage, Cook avait déjà formulé ce dilemme, alors que l’Endeavour remontait la côte australienne77. Ici, c’est justement ce qu’il veut éviter en explorant ce bras de mer (c’est à dire que l’on conclut de manière hâtive qu’il communique avec les baies de Baffin ou d’Hudson) qui lui sera reproché quelques années plus tard, par George Vancouver lorsque celui-ci naviguera dans la région :
Ainsi se terminait cette ouverture très étendue. Si le grand navigateur qui la reconnut le premier, et dont elle porte le nom, avait consacré un jour de plus à son exploration, il aurait épargné aux navigateurs de salon qui le suivirent depuis leur cabinet, l’effort d’attacher naïvement à ce bras de mer un canal à partir duquel un passage nord-ouest, qui n’existe que dans leurs théories, ne manquerait pas d’être découvert78.
Le 18 août, après avoir passé le détroit de Béring et exploré les côtes de l’Alaska et de la Sibérie, le Resolution et le Discovery atteignent la latitude de 70° 44’ nord. Il est temps alors de mettre à profit la parenthèse hivernale pour aller relâcher plus au sud, car, écrit-il « je ne jugeai pas possible, si je voulais être prudent, de poursuivre mes tentatives pour trouver un passage vers l’Atlantique dans quelque direction que ce fût, tant il y avait peu de chance de succès79 ». En projet toutefois, un retour vers le nord l’été suivant afin de poursuivre les recherches. C’est l’archipel hawaïen, que l’expédition avait découvert quelques mois plus tôt, qui sera choisi comme lieu de la retraite hivernale80, mais Cook n’aura pas l’occasion de poursuivre son exploration de la côte nord-américaine et la question du passage du nord-ouest restera en suspens. C’est en octobre 1778, à l’occasion de la description des habitants de l’île d’Unalaska, qu’il livre ses dernières analyses sur le sujet. Constatant des similitudes de langage entre ceux-ci et les habitants du Groenland, il conclut :
[…] Nous avons de grandes raisons de croire que toutes ces nations ont la même origine. Si tel est le cas, on ne saurait douter de l’existence d’une voie de communication de quelque sorte que ce soit entre cet océan et la baie de Baffin, bien que la glace ou d’autres obstacles puissent en effet y empêcher la navigation. Telle était en tout cas mon opinion à ce moment81.
Si Cook ne put offrir en définitive qu’un bilan provisoire sur l’existence du passage du nord-ouest, ses recherches lui permirent néanmoins d’exclure celui-ci des eaux navigables. Car c’est bien là que résidait l’illusion : moins dans l’existence d’une voie de communication entre Pacifique et Atlantique que dans la possibilité d’emprunter cette voie par bateau. Quant à l’existence de la Terra Australis Incognita, cette autre illusion née de la spéculation géographique, où chaque découverte, quelle que soit son importance, était insérée dans un schéma préétabli, confirmant ainsi l’inéluctable, à savoir, la présence d’un continent dans l’hémisphère sud, les expéditions de James Cook permirent de conclure par la négative. Aucun continent austral ne se trouvait au dessus du cercle polaire.
Notes de bas de page
1 Cook I, p. 62. Entrée du 1er mars 1769.
2 Ibid., p. 158. Entrée du 19 août 1769.
3 Ibid., p. 289. Entrée du 31 mars 1770.
4 Ibid.
5 Ibid., p. 45. Entrée du 29 octobre 1772.
6 A. Pasquali, Le Tour des horizons, op. cit., p. 6-7.
7 Cook I, p. 391-392. Entrée du 23 août 1770.
8 Ibid.
9 Ibid. p. 59.
10 Cook II, p. 59. Entrée du 22 novembre 1772.
11 Cook I, p. 457. Entrée du 15 mars 1771.
12 Ibid., p. 380. Entrée du 17 août 1770.
13 Ibid., p. 479.
14 Ibid., p. 366. Entrée du 4 août 1770.
15 Ibid., p. 74. Entrée du 13 avril 1769. Dans une première version de ce passage, Cook avait d’abord écrit « un sacré brave gars », puis s’est sans doute ravisé.
16 Cook II, p. 649-650. Entrée du 10 mars 1775. L’organe responsable des provisions de bouche est le Bureau des vivres (Victualling Board).
17 Cook III, p. 14. Entrée du 16 août 1776.
18 En préambule de sa description de la Nouvelle-Zélande au premier voyage, Cook prévient par exemple le lecteur du caractère incomplet de son analyse de la société maorie : « Avant de quitter tout à fait ce pays, je vais donner brièvement une description générale de la contrée, de ses habitants, de leurs mœurs et coutumes, etc., au sujet desquels je dois faire observer que beaucoup de choses ne sont fondées que sur des conjectures, car nous n’avons passé nulle part assez longtemps pour bien nous instruire des règles auxquelles obéit leur société, et nous ne pouvons tirer de conclusions que de ce que nous avons eu l’occasion de voir par nous-mêmes » (Cook I, p. 273. Entrée du 31 mars 1770).
19 Cook I, p. 73. Entrée du 11 avril 1769.
20 Cook I, p. 168. Entrée du 8 octobre 1769.
21 Ibid., p. 218. Entrée du 4 décembre 1769.
22 Ibid., p. 272. Entrée du 31 mars 1770. C’est moi qui souligne.
23 Cook III, p. 409. Entrée du 8 août 1778.
24 Ibid., p. 29. Entrée du 25 décembre 1776.
25 « […] il s’agit peut-être de la terre que M. de Kerguelen appelle île du Rendez-vous, mais je ne sais pas qui peut s’y donner rendez-vous hormis les créatures de l’air, car elle n’est certainement pas accessible aux autres animaux » (Ibid., p. 27-28. Entrée du 24 décembre 1776).
26 Cook II, p. 534. Entrée du 7 septembre 1774.
27 Ibid., p. 252. Entrée du 4 octobre 1773. Les paysages n’ont pas toujours un tel impact sur Cook. Au premier voyage par exemple, là où Joseph Banks décrit un village Maori comme « la chose la plus belle et la plus romantique que j’ai vue », Cook ne voit qu’« un petit village de Naturels » (Banks I, p. 432, et Cook I, p. 200. Entrée du 12 novembre 1769).
28 Cook II, p. 120. Entrée du 13 avril 1773.
29 Ibid., p. 622. Entrée du 17 janvier 1775.
30 Ibid., p. 98-99. Entrée du 24 février 1773.
31 Cook III, p. 111. Entrée du 21 mai 1777.
32 Ibid., p. 158. Entrée du 13 juillet 1777.
33 Cook I, p. 463. Entrée du 15 avril 1771.
34 Ibid., p. 463-464.
35 Ibid., p. 442. Entrée du 26 décembre 1770.
36 Il écrit notamment : « Pour une description plus détaillée de cet endroit, je renvoie le lecteur à la relation de mon dernier voyage, à laquelle j’ajouterai seulement que cette île est divisée en deux capitaineries, Funchal et Mexico, la première constituée de vingt-cinq paroisses et la seconde, de dix-sept » (Cook II, p. 22. Entrée du 29 juillet 1772).
37 Cook II, p. 675-676. Entrée du 13 juillet 1775.
38 Cook I, p. 74. Entrée du 13 avril 1769.
39 Ibid., p. 118.
40 Ibid., p. 140.
41 Ibid., p. 273. Entrée du 31 mars 1770.
42 Ibid., p. 392-401.
43 Rappelons qu’avant d’arriver à Tahiti en avril 1769, l’Endeavour de James Cook n’avait fait escale qu’en des lieux déjà bien connus des Européens, tels que Madère (septembre 1768), Rio de Janeiro (novembre 1768) et la Terre de Feu (janvier 1769), lieux pour lesquels une description détaillée ne s’imposait pas. Pour la description de Tahiti, voir Cook I, p. 118-140.
44 Cook I, p. 121. La générosité de la nature soulignée ici sera également mentionnée pour les autres îles du Pacifique, la Nouvelle-Calédonie faisant cependant exception à cette règle : « La nature a été moins généreuse à l’endroit de cette île qu’envers aucune des îles tropicales que nous connaissons dans cette mer […] La stérilité de leur pays excuse les habitants de ne rien fournir aux besoins des navigateurs » (Cook II, p. 543).
45 Cook I, p. 123.
46 Ibid., p. 136.
47 Ibid., p. 135.
48 Ibid.
49 Ibid. p. 136.
50 Ibid., p. 397.
51 Ibid., p. 278. Cook va jusqu’à indiquer les lieux les plus à même de recevoir l’implantation des colons : « Si on avait le projet un jour de s’implanter dans cette contrée, le meilleur endroit serait la rivière Thames ou la Baie des Îles » (Ibid., p. 278).
52 Cook III, p. 371. Entrée du 5 juin 1778. En dépit de ce qu’avance Cook ici, les Anglais ne tardèrent pas à s’impliquer dans le commerce de la fourrure sur la côte nord-ouest américaine. On y retrouve notamment dès la fin des années 1780, Jeremiah Dixon, Nathanael Portlock et James Colnett, tous vétérans du troisième voyage de Cook.
53 Ibid., p. 286.
54 « Les havres et lieux d’ancrage sont nombreux, mais nous n’avons pu les inspecter tous, faute de temps. L’anse où nous avons mouillé […] est à l’abri de la mer mais ne possède par ailleurs pas grand chose d’intéressant, car elle est exposée aux vents de secteur sud-est qui soufflent avec violence. Les dégats qu’ils causent étaient visibles en de nombreux endroits » (Cook III, p. 308-309).
55 Ibid., p. 383. Entrée du 19 juin 1778.
56 Cook I, p. 247. Entrée du 6 février 1770. Dans sa description générale de la Nouvelle-Zélande, Cook reviendra sur cet aspect et modérera quelque peu ses conclusions : « les collines et les vallées contiennent d’excellents bois, propres pour tous les ouvrages, exceptés les mâts, mais à y regarder de plus près, on en trouverait certains convenables à cet effet » (Cook I, p. 277).
57 Cook III, p. 164-165.
58 « Les rivages de cette île sont protégés de la mer par un récif de rochers de corail qui forme plusieurs baies et ports excellents, le mouillage est assez vaste et l’eau assez profonde pour contenir les plus gros vaisseaux » (Cook I, p. 119).
59 Cook II, p. 349-350. Entrée du 17 mars 1774. À l’autre extrémité de cet éventail, on trouve par exemple l’île d’Ulieta (Raiatea), dans l’archipel de la Société : « Ce havre, pris dans sa largeur, peut contenir un nombre important de vaisseaux en toute sécurité […] Il ne manque pas de vivres frais et on peut s’y procurer de l’eau et du bois n’importe où » (Cook I, p. 145. Entrée du 25 juillet 1769).
60 John Cawte Beaglehole, The Exploration of the Pacific, op. cit., p. 9.
61 Anne Salmond, The Trial of the Cannibal Dog. Captain Cook in the South Seas. London : Penguin Books, 2004, p. 302.
62 Cook I, p. 62. Entrée du 1 mars 1769.
63 « Cette contrée, qui jusqu’à present semblait faire partie du continent imaginaire » (Ibid., p. 274).
64 Banks I, p. 472. Entrée du 10 mars 1770.
65 Cook I, p. 288.
66 Ibid., p. 290-291. Les réflexions de Cook sur l’existence de continent austral sont rédigées au départ de la Nouvelle-Zélande, à la fin du mois de mars 1770. L’Endeavour ne rentre en Angleterre qu’en juillet 1771.
67 Cook II, p. 189.
68 Ibid., p. 629.
69 Ibid., p. 625. Entrée du 20 janvier 1775.
70 Ibid., p. 637-638.
71 Ibid., p. 643. Le 28 février 1831, la découverte de la Terre d’Enderby par le capitaine John Biscoe viendra confirmer les prédictions de Cook.
72 Cook III, p. ccxxi-ccxxii.
73 Ibid., p. 353. Entrée du 17 mai 1778.
74 Ibid., p. 361. Entrée du 24 mai 1778.
75 Ibid., p. 366. Entrée du 1er juin 1778.
76 Ibid., p. 368. Entrée du 1er juin 1778.
77 Cook I, p. 380. Entrée du 17 août 1770.
78 George Vancouver, Voyage of Discovery, vol. III, London, 1798, p. 125. Cité dans Cook III, p. 367 n. 4. Ce bras de mer fut nommé Cook River par Lord Sandwich.
79 Cook III, p. 427. Entrée du 29 août 1778.
80 Les premières îles de cet archipel, Oahu, Kauai et Niihau, furent aperçues 18 janvier 1778. Voir Cook III, p. 263.
81 Ibid., p. 468.
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