Les trois expéditions de Cook dans le Pacifique
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Texte intégral
1Avec plus de deux siècles de recul, la décision de l’Amirauté de confier le commandement d’une expédition dans le Pacifique à James Cook paraît couler de source tant le succès fut au rendez-vous. Mais cela n’était pas forcément le cas en 1768. À cette époque, si Cook jouit, comme on l’a vu, d’une excellente réputation dans les cercles de l’Amirauté et de la Royal Society, il n’est ni le seul dans cette position, ni celui qui a le plus d’expérience en matière de navigation. Son grade de premier maître, ne lui permet pas non plus, a priori, de prétendre à un tel commandement, réservé aux officiers pourvus d’une commission, généralement issus de la noblesse. Ses prédécesseurs dans le Pacifique sont d’ailleurs tous des officiers supérieurs : Byron est chef d’escadre, Wallis, capitaine de vaisseau avec alors huit ans d’ancienneté. L’idée même d’envoyer un simple maître de vaisseau à la tête d’une expédition de cette envergure semble alors saugrenue, si l’on considère le nombre important d’officiers en attente d’affectation. De plus, si la Royal Society a pu apprécier le travail scientifique de Cook à Terre-Neuve, si son observation d’une éclipse de soleil a su convaincre au point d’être publiée dans les Philosophical Transactions, personne à l’époque ne le considère comme un génie de l’hydrographie ou de l’astronomie.
2Dès lors, qu’est-ce qui a bien pu pousser les Lords de l’Amirauté à lui confier cette tâche ? On peut avancer, sans trop de risques que si sa naissance, sa fortune, ou son expérience du commandement, n’ont pu lui donner un accès direct au grade d’officier et lui permettre de diriger cette expédition, il a pu en revanche compter sur de solides appuis au sein de l’Amirauté, en la personne notamment de personnages influents, tels Philip Stephens, alors secrétaire de cette administration, et de Sir Hugh Palliser, gouverneur de Terre-Neuve, et commandant de l’Eagle sur lequel Cook avait servi.
Projets et organisation
3Les voyages que Cook effectua entre 1768 et 1779 ont pour point commun de se dérouler tous les trois dans le Pacifique, les océans Atlantique et Indien n’étant que des voies d’accès à la Mer du Sud, et d’avoir comme objectif général de recueillir le plus grand nombre possible d’informations sur les territoires qui y seraient découverts ou redécouverts, ainsi que de prendre possession de ces territoires, avec le consentement des indigènes qui y vivent et à la condition qu’aucune autre nation européenne ne l’ait fait auparavant. En dehors de ces objectifs généraux, chacune des expéditions a ses spécificités. Le but officiel du premier voyage est scientifique. Il s’agit de se rendre dans le Pacifique afin d’y observer un phénomène astronomique rare : le passage de la planète Vénus devant le disque du soleil. Ce phénomène, dont l’observation en divers endroits du globe permet d’établir la distance entre la terre et le soleil, est alors jugé d’importance pour obtenir une amélioration des méthodes de calcul de la longitude, source de problèmes jusqu’à la fin du xviiie siècle.
4C’est en 1639, que le Transit de Vénus fut observé pour la première fois, par Jeremiah Horrocks, jeune vicaire de Hoole dans le Lancashire, qui en établit le caractère cyclique. Au début du xviiie siècle, l’astronome royal Edmund Halley mit en avant la nature capitale pour la science, de l’observation correctement effectuée de ce phénomène, et exhorta les scientifiques à venir à ne pas laisser passer un événement auquel lui-même ne pourrait assister1. Suivant les recommandations de Halley, le retour du phénomène en juin 1761 fut l’occasion de multiples expéditions en divers endroits de la planète : Sibérie, Inde, Turquie, Suède, océan Indien, Cap de Bonne-Espérance, île de Sainte-Hélène, Terre-Neuve, ainsi que de nombreux points d’observations en Europe. Pas moins de cent vingt observateurs2, représentant une dizaine de nationalités, y participèrent, mais l’expérience fut un échec et rendez-vous fut pris pour 1769, date du retour de Vénus devant le disque du soleil3. En 1765, Thomas Hornsby, professeur d’astronomie à Oxford, formule l’idée d’une co-organisation entre Amirauté et Royal Society pour monter l’expédition de 1769, qui servirait à la fois les intérêts de la science et ceux du gouvernement. En novembre 1767, la Royal Society crée une commission sur le Transit de Vénus. La décision est prise d’envoyer des observateurs dans la baie d’Hudson, au Cap Nord en Norvège et dans l’océan Pacifique. Très rapidement, trois questions se posent. Tout d’abord, comment financer cette expédition ? La Royal Society en appelle au roi et à son sens patriotique, soulignant dans un mémoire daté de février 1768 que l’Angleterre ne saurait souffrir de laisser passer une telle occasion de s’imposer dans le domaine de la science4. George III consent à fournir un navire, ainsi que £4000 pour faire face aux dépenses. Puis, où, exactement, envoyer une expédition dans le Pacifique, et enfin, à qui en confier la direction ? L’arrivée du Dolphin de Samuel Wallis en Angleterre le 20 mai 1768 fournit une réponse à la première question. Ce sera Tahiti, qui a l’avantage de se trouver exactement au milieu de la zone d’observation définie par l’astronome royal Nevil Maskelyne. La seconde question est plus délicate. Pendant quelques semaines c’est Alexander Dalrymple qui est pressenti, fort de son expérience de navigateur et de son autorité en ce qui concerne le Pacifique. La commission de la Royal Society chargée d’organiser le voyage le mentionne alors comme : « un homme apte à être envoyé dans les Mers du Sud, bon navigateur, ayant un goût particulier pour l’entreprise de découverte et très compétent en matières d’observation5 ». Mais Dalrymple exige qu’on lui confie le commandement de l’expédition, ce que l’Amirauté ne peut accepter, ayant sans doute en mémoire les expériences peu concluantes lors desquelles un civil avait été nommé à la tête d’une telle expédition6. Dans un souci d’apaisement, Sir Edward Hawke, Premier Lord de l’Amirauté, propose en avril 1768 que Dalrymple soit responsable de l’équipe scientifique, et qu’un officier de la Royal Navy commande l’expédition. Dalrymple refuse, arguant à son tour qu’un commandement divisé ne saurait être compatible avec un éventuel succès de l’expédition. À peu près au même moment, le nom de Cook apparaît dans les débats. Une lettre de Sir Hugh Palliser datée du 12 avril signale que « M. Cook […] occupé à effectuer le relevé des côtes de Terre-Neuve, sera employé ailleurs7 ». Si vague que soit le terme « ailleurs », on peut sans doute y voir une allusion à l’expédition en cours d’organisation, et en déduire que dès le mois d’avril, le choix de l’Amirauté semble s’être porté sur Cook pour la diriger. Le 5 mai, la Royal Society le charge officiellement de l’observation du transit de Vénus. Avec lui, est nommé Charles Green, astronome de profession, assistant des astronomes royaux James Bradley et Nathaniel Bliss à l’Observatoire de Greenwich. Quelques jours plus tard, le 25 mai, James Cook reçoit sa commission et est élevé au rang de lieutenant de vaisseau.
5Pendant ce temps, en avril 1768, l’Amirauté s’est procuré un navire, le Earl of Pembroke, rebaptisé Endeavour. C’est un charbonnier issu des chantiers de Whitby, le type même de navire sur lequel Cook a commencé sa carrière de marin, et qu’il connait très bien. Jusqu’au 18 mai, il est préparé dans les chantiers de Deptford, puis commence l’approvisionnement en matériel, en vivres et en hommes. Au total, ce sont quatre-vingt-cinq hommes d’équipage qui sont recrutés, parmi lesquels douze fusiliers marins. À ceux-ci viennent s’ajouter les surnuméraires civils : Charles Green et son serviteur, mais surtout Joseph Banks, membre de la Royal Society, dont la personnalité enjouée marqua fortement l’esprit de ce premier voyage. Ce « gentilhomme fortuné, versé dans l’histoire naturelle8 » rejoint le projet en juin 1768, à ses frais et accompagné de Carl Daniel Solander, un Suédois, disciple de Linné et membre de la Royal Society depuis 1764. Avec Banks, embarquent également deux artistes, Alexander Buchan et Sydney Parkinson, chargés d’effectuer les croquis des paysages et des espèces animales et végétales que l’on rencontrerait dans le Pacifique. Enfin, un secrétaire, le Suédois Herman Dietrich Spöring, et quatre serviteurs complètent la suite de Joseph Banks. L’arrivée de ce surplus inattendu oblige à de nouvelles modifications du navire, de manière à pouvoir accueillir Banks et les gens qui l’accompagnent, ainsi que tout le matériel que les botanistes emportent à bord. Le 30 juillet, Cook reçoit ses instructions de l’Amirauté. Banks et Solander ne rejoignent le navire que le 26 août. Ce même jour, l’expédition quitte l’Angleterre. En juillet 1771, après presque trois ans d’absence, l’Endeavour est de retour. Le 14 août, Lord Sandwich présente Cook au roi qui le nomme capitaine de frégate.
6Très rapidement, il est question d’un second voyage dans le Pacifique. Dans une lettre à John Walker datée du 13 septembre 1771, Cook mentionne le projet et signale que le commandement pourrait lui en être confié9. Le 25 septembre, l’Amirauté se met en quête de deux nouveaux navires et associe Cook à la recherche. Tout comme pour l’Endeavour, les navires choisis sont des charbonniers de Whitby, dont l’énorme capacité de stockage et le faible tirant d’eau se sont avérés des atouts importants dans l’expédition précédente. Ainsi, en novembre 1771, le Marquis of Granby et le Marquis of Rockingham sont achetés. Rebaptisés respectivement Drake et Raleigh dans un premier temps, les navires changent de nom en janvier 1772 dans un souci de ne pas offenser les Espagnols, encore sensibles à l’évocation de ces deux noms fortement associés aux raids anglais sur les possessions espagnoles d’Amérique du Sud à la fin du xvie siècle.
7Ce nouveau voyage, dont le départ est prévu pour mars 1772, a pour but de mettre un terme à la vieille querelle sur l’existence d’un continent austral dans le Pacifique. Le premier voyage n’avait pas permis de clore définitivement le débat, bien que Cook soit arrivé à la conclusion qu’une telle étendue de terre ne pouvait se trouver que dans des latitudes sud très élevées qu’aucun navire n’avait encore sillonnées10. Dans un mémoire remis en février 1772 au premier Lord de l’Amirauté, Lord Sandwich, Cook propose de traverser le Pacifique dans des latitudes comprises entre 40° et 60° sud, du Cap de Bonne-Espérance au Cap Horn, et d’utiliser la Nouvelle-Zélande et Tahiti comme bases de ravitaillement et de relâche l’hiver, avant de poursuivre toujours vers l’est et de rejoindre le Cap de Bonne-Espérance11. Cet itinéraire sera repris par l’Amirauté dans ses instructions, preuve de la confiance que les dirigeants de cette institution ont alors en Cook. Mais, ce second voyage est également l’occasion pour l’Amirauté de procéder à un certain nombre d’expérimentations scientifiques, notamment dans le domaine de la santé et de la lutte contre le scorbut qui ravage les expéditions au long cours.
8La Royal Society, coorganisatrice du voyage précédent, a cette fois-ci essentiellement un rôle de conseil, en la personne de Nevil Maskelyne qui place William Wales et William Bayley comme astronomes sur les navires afin de tester en conditions extrêmes le chronomètre H4 de John Harrison, mis au point en 1760, et de comparer les résultats obtenus avec ceux produits par la méthode du calcul de la distance lunaire que James Cook avait utilisé lors de son premier voyage, et dont Maskelyne était le plus fervent défenseur et promoteur12.
9En début d’année 1772, les deux navires recrutent leur équipage. À bord du Resolution, un total de cent douze hommes, répartis en quatre-vingt-douze marins et dix-huit fusiliers marins, viennent se mettre aux ordres de Cook. Parmi les officiers, Robert Palliser Cooper, un parent de Sir Hugh Palliser, est premier lieutenant. Charles Clerke et Richard Pickersgill, tous deux déjà présents sur l’Endeavour, sont respectivement second et troisième lieutenants. À bord de l’Adventure, quatre-vingt-un membres d’équipage, dont douze fusiliers marins, rejoignent le capitaine Tobias Furneaux, qui avait voyagé précédemment avec Samuel Wallis à bord du Dolphin. Le premier lieutenant est Joseph Shank. De santé fragile, il obtiendra la permission de quitter l’expédition au Cap en octobre 1772, et sera remplacé par Arthur Kempe jusqu’alors second lieutenant. James Burney, fils du musicologue Charles Burney et frère de Fanny Burney, sera promu second lieutenant à sa place.
10Viennent ensuite les surnuméraires. Aux deux astronomes déjà mentionnés, vient s’ajouter William Hodges, peintre paysagiste et élève de Richard Wilson, nommé par l’Amirauté. Du côté des botanistes, Joseph Banks est de nouveau fortement pressenti pour accompagner l’expédition. Véritable célébrité mondaine depuis le retour de l’Endeavour, Banks est très rapidement sollicité par Lord Sandwich pour faire partie du voyage en compagnie de Solander. Il s’y investit totalement et recrute une équipe de quinze personnes pour l’accompagner dans cette nouvelle aventure, dont le peintre John Zoffany, membre fondateur de la Royal Academy en 1768, et le scientifique écossais James Lind, ainsi que des secrétaires, des dessinateurs, et deux joueurs de cornemuse. Tout comme pour le voyage de l’Endeavour, d’importantes modifications du navire sont nécessaires pour qu’il puisse accueillir ce surcroît de personnes et de matériel, dans des conditions dignes du gentilhomme qu’est Banks13. Contre l’avis de James Cook, Lord Sandwich fait procéder aux aménagements proposés. Un nouveau pont et de nouvelles cabines sont construits et la poupe est surélevée, mais lorsque le Resolution fait ses premiers essais le 10 mai 1772, le pilote abandonne le navire, le jugeant trop instable pour naviguer sereinement14. Sur ordre de l’Amirauté, de nouveaux travaux sont entrepris pour que le navire retrouve sa taille et sa capacité initiales. Lorsqu’il vient visiter le navire et constate ce qui a été fait, Banks quitte l’expédition avec sa suite15.
11En remplacement de Joseph Banks, l’Amirauté fait appel à Johann Reinhold Forster, un botaniste d’origine allemande, qui rejoint l’équipage avec son fils George16.
12Vers la fin du mois de juin 1772, le Resolution est prêt à prendre la mer. Le 22 de ce mois, le navire quitte Sheerness pour Plymouth où il arrive le 3 juillet. L’Adventure l’y attend depuis le mois de mai. Cook y reçoit ses instructions et le 13 juillet, les deux navires quittent l’Angleterre pour le Cap de Bonne-Espérance. Le 30 juillet 1775, après trois ans et dix-huit jours de voyage, le Resolution est de retour17. Dès le 9 août, Cook est promu capitaine de vaisseau et nommé comme quatrième capitaine de l’hôpital royal de Greenwich, poste honorifique qu’il n’accepte qu’à la condition de pouvoir repartir en mer si ses services sont requis. Dans une lettre à son ancien employeur John Walker, il formule clairement le dilemme auquel il doit faire face :
[…] le sort me conduit d’un extrême à l’autre. Il y a quelques mois, l’hémisphère sud tout entier me suffisait à peine, et voilà que je vais être confiné entre les murs du Greenwich Hospital, bien trop étroits pour un tempérament aussi actif que le mien. Il me faut toutefois avouer que c’est une belle retraite, accompagnée d’un revenu confortable, mais quant à savoir si je pourrai me satisfaire de cette aisance et de cet isolement, seul le temps pourra le dire18.
La question d’un troisième voyage fait rapidement surface. Le but en est ici aussi double. Il s’agit notamment de ramener Omai chez lui. Le jeune homme originaire de Raiatea et embarqué en octobre 1773, à bord de l’Adventure du capitaine Furneaux, était, depuis son arrivée en Angleterre, la coqueluche du tout-Londres19. Présenté au roi George et à la reine Charlotte, séjournant chez Lord Sandwich, côtoyant Banks, Solander et une grande partie de ce que la capitale anglaise comptait alors d’écrivains, de scientifiques ou d’artistes, il avait fait sensation, comme avait fait sensation quelques années plus tôt, Aotourou, le Tahitien ramené à Paris par Bougainville en 1771.
13Mais ce voyage est aussi l’occasion de résoudre une autre des grandes énigmes qui persistent encore à la fin du xviiie siècle : l’existence d’un canal navigable à travers le continent américain, qui permettrait de joindre les océans Atlantique et Pacifique, de la baie d’Hudson à un point quelque part au nord de la Californie. De nombreuses tentatives avaient été jusque-là menées depuis la côte atlantique, à partir des baies de Baffin et de Hudson mais sans résultat probant. Au xvie siècle, Francis Drake avait recherché le dit passage depuis sa Nouvelle-Albion des côtes californiennes, en vain. Plus récemment, en 1764, cela avait été la mission du commodore Byron à bord du Dolphin, mais celui-ci avait changé ses plans, une fois arrivé dans le Pacifique20. L’énigme restait donc entière, malgré les expéditions de Samuel Hearne ou Constantine Phipps, contemporaines des expéditions de Cook.
14Pour ce voyage, deux navires sont de nouveau prévus. Le Resolution est remis en état et l’Amirauté se met en quête d’un nouveau navire en remplacement de l’Adventure. En janvier 1776, Cook est consulté et très vite le Diligence, un autre charbonnier de Whitby est acheté et rebaptisé Discovery. Le 10 février, Cook demande officiellement à diriger l’expédition, ce que les Lords de l’Amirauté acceptent avec empressement21. Jusqu’à l’été 1776, les navires sont préparés et équipés dans les chantiers navals de Deptford. On procède également au recrutement de l’équipage : cent douze hommes pour le Resolution, soixante-dix pour le Discovery. John Gore, vétéran du Dolphin avec Byron et Wallis, et qui avait également fait partie de l’équipage de l’Endeavour, est nommé premier lieutenant à bord du Resolution. Les second et troisième lieutenants sont respectivement James King et John Williamson. L’équipe scientifique est des plus réduites, puisque les observations astronomiques sont à la charge de Cook et King et la partie botanique est confiée à William Anderson, chirurgien du navire et naturaliste confirmé. Charles Clerke, qui avait pris part aux trois expéditions de Cook, est nommé capitaine du Discovery. Il est secondé par James Burney et John Rickman, respectivement premier et second lieutenants. Parmi les autres membres d’équipage, il faut mentionner la présence de William Bligh, premier maître, et de George Vancouver, qui passeront tous deux à la postérité, le premier lors de l’affaire du Bounty en 1789, et le second pour avoir exploré la côte nord-ouest du continent américain au début des années 1790, côte à laquelle il laissera son nom.
15En comparaison des voyages précédents, les surnuméraires sont en petit nombre. À bord du Resolution se trouvent Omai et John Webber, peintre paysagiste. Sur le Discovery, l’astronome William Bayley du second voyage est de retour et David Nelson, jardinier de Kew, est envoyé par Joseph Banks comme naturaliste chargé de récolter des échantillons des espèces végétales et animales rencontrées dans le Pacifique.
16Cook avait espéré partir au printemps 1776, de manière à commencer la recherche du passage du nord-ouest en été, mais un certain nombre d’imprévus retardèrent le départ. Outre le recrutement de l’équipage, une bonne partie du temps fut employé à régler le conflit qui opposait indirectement Cook et Johann Reinhold Forster au sujet de la publication du récit du voyage. Forster était persuadé d’être le détenteur naturel des droits de publication et avait l’intention de prendre en charge l’intégralité du récit, mais Lord Sandwich, peu satisfait de la qualité de son anglais, proposa, outre une coopération entre Forster et Cook, dans laquelle Forster s’occuperait de tout ce qui concerne l’histoire naturelle et la description des indigènes du Pacifique, que le texte de l’Allemand soit revu et corrigé par le littérateur Richard Owen Cambridge. Vexé de cette offre, Forster refusa de voir ses écrits « considérés comme un thème d’écolier22 », et devant son intransigeance, l’Amirauté lui retira tout droit de publication. Cook s’attela donc à la lourde tâche de préparer le récit de son second voyage pour la publication, ce qu’il fit avec la collaboration de John Douglas, chanoine de Windsor, à qui l’Amirauté confia la responsabilité éditoriale du journal. Ce texte fut publié en mai 1777, alors que Cook se trouvait dans les îles Tonga.
17Le 12 juillet 1776, le Resolution quitta l’Angleterre. Le Discovery ne put partir que le 1er août, son capitaine Charles Clerke se trouvant jusqu’à cette date en prison pour dettes, s’étant porté garant pour son frère John, lui aussi officier de la Royal Navy. Les deux bateaux se retrouvèrent au Cap le 10 novembre et la troisième et dernière expédition du capitaine Cook dans le Pacifique put véritablement commencer. Après la mort de Cook, le 14 février 1779, Charles Clerke prit les commandes de l’expédition. Il mourut quelques mois plus tard de la tuberculose, qu’il avait probablement contractée en prison. John Gore et James King prirent alors sa relève et achevèrent le voyage. Le Resolution et le Discovery arrivèrent en Angleterre le 4 octobre 1780.
Instructions et itinéraires
18Pour chacune de ses expéditions, le capitaine Cook reçoit de l’Amirauté des instructions précises, estampillées « Secret » et, en théorie, connues de lui seul, qui lui sont transmises peu de temps avant le départ du navire23. Pour les trois voyages, les instructions sont rédigées par Sir Philip Stephens, secrétaire de l’Amirauté et signées des personnages les plus importants de cette administration, au premier rang desquels se trouve le premier Lord : Edward Hawke pour le premier voyage et Lord Sandwich pour les second et troisième voyages24.
19Bien qu’elles aient chacune leurs particularités et qu’elles correspondent à des expéditions différentes, ces instructions sont similaires en de nombreux points et sont organisées selon le même plan25. Ainsi, après l’annonce du but de l’expédition (Transit de Vénus pour le premier voyage, exploration de la zone antarctique pour le deuxième et découverte au nord du continent américain d’un passage maritime entre le Pacifique et l’Atlantique pour le troisième), l’Amirauté énonce, de manière plus ou moins rigoureuse, l’itinéraire que le ou les navires doivent suivre, ainsi que les divers renseignements à recueillir dans les lieux visités. Présente également pour chacun des voyages, une liste de précautions à prendre pour assurer le bon déroulement de l’expédition, notamment en cas d’incapacité du capitaine à mener celle-ci à son terme, ainsi que la nécessité de recueillir tous les logs et journaux rédigés par les différents membres d’équipage, qui doivent être remis le plus rapidement possible aux Lords de l’Amirauté. Le capitaine doit également s’assurer que le secret de la destination du navire et des découvertes effectuées sera conservé jusqu’à ce que l’Amirauté décide de divulguer ces informations.
20Pour chacun des voyages, une certaine liberté est accordée à James Cook dans l’itinéraire proposé, ainsi que la capacité de juger le moment venu de la meilleure route à suivre et de ce qu’il convient de faire pour que l’expédition se déroule au mieux. Ainsi, pour son premier voyage, Cook est libre de faire escale au Brésil ou dans les Falkland s’il le juge nécessaire26. De la même manière, le retour en Angleterre est laissé à son entière appréciation : « soit par le Cap de Bonne-Espérance, soit par le Cap Horn, en fonction de ce que vous estimerez, d’après les circonstances, être le meilleur moyen de revenir en Angleterre27 », ainsi que la gestion de situations ou d’événements non prévus par les instructions : « Vous devrez, dans tous les cas, procéder, après avoir consulté vos officiers, de la manière que vous jugerez la plus avantageuse à l’accomplissement de la mission qui vous a été confiée28 ».
21Au deuxième voyage, cette liberté s’étend au choix même des escales et des bases de ravitaillement, qui ne sont pas désignées spécifiquement par les instructions. L’itinéraire que l’Amirauté demande à Cook de suivre entre le Cap de Bonne-Espérance et le Cap Horn, dans des latitudes proches du pôle sud, et donc dans des conditions de voyage très difficiles, nécessitaient de garder la possibilité de se replier plus au nord, afin de ravitailler les navires, d’effectuer d’éventuelles réparations et de faire se reposer l’équipage. Les instructions sont sur ce point très discrètes. Tant le lieu que le moment ou la durée du repli restent indéfinis, et donc à la discrétion du capitaine :
Chaque fois que la saison rendra votre progression dans des latitudes élevées incertaine, vous vous rendrez plus haut nord dans quelque endroit plus connu, afin que vos hommes puissent s’y reposer et que les navires puissent être remis en état. Vous veillerez à retourner plus au sud dès que la saison le permettra29.
Au troisième voyage, un degré supplémentaire est franchi. Les instructions y apparaissent moins comme des injonctions que comme un ensemble de possibilités et de recommandations sur le déroulement du voyage, que le capitaine semble libre de suivre ou non. On trouve dans le texte de multiples formules qui placent James Cook au cœur des décisions : « si vous l’estimez nécessaire et commode », « à moins que vous ne trouviez cela nécessaire », « en suivant l’itinéraire que vous estimerez le plus adéquat30 », etc. L’escale à l’île de Madère, que l’on retrouve à chaque voyage, offre à cet égard un exemple marquant, puisqu’elle ne relève en 1776 plus que de la décision de Cook :
Il vous est, par la présente, ordonné de vous rendre directement au Cap de Bonne-Espérance avec les deux navires mentionnés, à moins que vous ne jugiez nécessaire de faire escale à Madère, aux îles du Cap-Vert, ou aux îles Canaries, afin d’y prendre une cargaison de vin pour l’équipage, auquel cas vous êtes libre de le faire, en veillant à ne pas vous y arrêter plus longtemps qu’il ne sera utile à cet effet31.
En comparaison, le ton apparaît bien plus dirigiste au premier voyage :
Vous appareillerez dès que le vent et le temps vous en donneront l’occasion, et rejoindrez l’île de Madère le plus rapidement possible afin de charger à bord et d’entreposer de manière convenable une quantité de vin pour l’équipage32.
La latitude donnée au capitaine Cook s’exprime ici aussi par une absence de précision sur le temps à passer à sillonner telle ou telle zone à la recherche de telle ou telle terre. Si l’Amirauté demande que soient retrouvées certaines îles découvertes par les Français au sud-est du Cap de Bonne-Espérance, on ne saurait y traîner trop longtemps : « Vous prendrez soin toutefois à ne pas passer trop de temps à rechercher ces îles ou à les explorer33 ». Mais la valeur de ce « trop de temps » est laissée à l’entière appréciation de Cook. Aucune précision n’est apportée quant à la durée de cette recherche. Cette liberté de déplacement permit d’effectuer des découvertes intéressantes, telles que la côte orientale de l’Australie lors du premier voyage, ou encore les îles Sandwich au troisième voyage, que des instructions trop strictes n’auraient sans doute pas permis de découvrir. Mais elle explique aussi en partie le retard que prirent parfois les navires, notamment le Resolution et le Discovery qui n’arrivèrent sur la côte nord-ouest américaine qu’en mars 1778, soit un an environ après la date fixée approximativement par les instructions, et après s’être arrêtés en Tasmanie, en Nouvelle-Zélande, à Tahiti et à Hawaï34.
22En comparaison, la partie des instructions touchant aux territoires éventuellement occupés par des nations européennes apparaît d’une rigueur surprenante. Soucieux de ne pas froisser les Espagnols, présents sur la façade ouest du continent américain depuis le xvie siècle, ou quelque nation que ce soit qui se serait installée dans cette région, les Lords de l’Amirauté exigent de Cook qu’il n’y débarque sous aucun prétexte, sauf en cas de force majeure :
En chemin, il vous est également strictement interdit de toucher quelque partie que ce soit des dominions espagnols de la côte ouest américaine, sauf en cas d’accident inévitable, auquel cas vous ne vous y arrêterez pas plus longtemps que nécessaire, en prenant soin de ne pas froisser les habitants ou les sujets de Sa Majesté Catholique, ni de les offenser de quelque manière que ce soit. Et si, lorsque vous vous rendrez plus au nord comme il vous l’a été demandé, vous rencontrez des sujets de quelque prince européen que ce soit, vous veillerez à ne les déranger ou à ne les offenser en aucune manière, mais au contraire, vous prendrez soin de les traiter avec civilité et amitié35.
Il faut préciser qu’à la veille d’un conflit avec ses colonies américaines, l’Angleterre ne tenait sans doute pas à menacer une paix bien fragile avec ses voisins européens.
23En dehors des considérations concernant l’itinéraire des navires, une grande partie des instructions est dévolue aux renseignements que les membres de l’expédition, sous la direction de leur capitaine, doivent recueillir dans les différentes îles visitées. Ici aussi, on note une certaine similitude dans le libellé des instructions de chaque voyage. Ainsi, il est demandé pour chacune des expéditions de respecter scrupuleusement l’ordre des relevés à effectuer. Qu’il s’agisse du continent austral, d’une île de moindre envergure, ou de la côte ouest nord-américaine, cet ordre reste le même du premier au troisième voyage. Il s’agit tout d’abord d’établir avec précision la localisation géographique du lieu, ainsi que tous les détails techniques ayant trait à la côte : position des caps, direction et force des courants et des marées, sondages des fonds, relevés topographiques des baies et des ports, etc. L’accent est mis ensuite sur la nature du sol et sa production, faune, flore et minerai, dont il faut si possible ramener des échantillons qui seront étudiés par les scientifiques anglais. Enfin, on s’intéressera aux indigènes : leur nombre, leurs caractéristiques ou encore leur disposition à l’égard des Anglais36. L’Amirauté souligne, à cette occasion, l’attitude à avoir envers ceux-ci. Il s’agit avant tout de se montrer amical et chaleureux, de se comporter de manière polie, en prenant soin cependant de ne pas se faire surprendre et de se garder contre tout accident qui pourrait surgir de ce contact37. Enfin, afin d’officialiser la présence anglaise dans ces lieux :
Avec l’accord des Naturels vous prendrez possession de tous lieux commodes au nom du Roi de Grande-Bretagne, ou, si l’endroit est inhabité, vous en prendrez possession au nom de sa Majesté en y apposant les inscriptions et les marques adéquates qui en feront le premier découvreur et le possesseur38.
Coorganisatrice du premier voyage, la Royal Society, par l’entremise de son président Morton39, remet également à James Cook une série de conseils à suivre pendant l’expédition40. Ce texte, au ton général moins officiel et sentencieux que celui des instructions données par l’Amirauté, se présente comme la modeste contribution de la Royal Society à l’expédition : « Les recommandations suivantes, hâtivement établies, et sans doute très incorrectes, sont toutefois humblement soumises à l’attention du Capitaine Cooke et des autres gentilshommes », une modestie somme toute attendue, du fait de la présence à bord du navire des membres éminents de cette institution que sont Banks et Solander41.
24Au premier rang des conseils qu’offre ainsi la Royal Society, on trouve l’attitude à adopter à l’égard des Tahitiens et des autres indigènes du Pacifique. L’accent est mis avant tout sur le respect, la patience et l’amitié qu’il faut développer, et Morton ne manque pas de rappeler la dimension humaine des êtres que les membres de l’expédition vont rencontrer :
Ce sont des êtres humains, œuvre du même Créateur tout-puissant, sous sa protection comme le sont les plus civilisés des Européens, et peut-être davantage dignes de ses faveurs, du fait de leur nature moins offensante42.
Il apparait donc comme primordial de tempérer l’agressivité et l’animosité des marins anglais envers ceux qui restent les possesseurs naturels de la terre qu’ils habitent43. À l’inverse, l’hostilité éventuelle des indigènes envers les Anglais ne se conçoit pas autrement que comme une réaction naturelle et compréhensible, à laquelle on ne saurait réagir violemment. Pour autant, il ne s’agit pas de placer complètement Anglais et indigènes sur un pied d’égalité et la nécessité demeure d’afficher la supériorité des Européens par la démonstration, sur des oiseaux ou des objets par exemple, de la toute-puissance des armes à feu, fusils et canons. Car si des relations amicales sont à entretenir absolument entre Anglais et indigènes, ce n’est pas au nom de l’amitié entre les peuples, ni par pure philanthropie, mais bien par intérêt : « De manière générale, on ne peut douter du fait que les plus brutales et les plus sauvages des nations sont conquises plus facilement par la douceur que par la rudesse de traitement44 », la sérénité des membres de l’expédition et de bonnes relations avec les habitants des lieux qu’ils visitent étant seules garantes du bon déroulement des recherches botaniques et des expériences scientifiques qu’il faut mener. Ainsi, en cas d’échauffourée, voire de conflit ouvert avec certains indigènes, il devient capital de conserver l’amitié construite jusqu’ici, et de rétablir au plus tôt la bonne entente entre les deux parties : « Une fois soumis, les Naturels devraient être traités avec humanité, et il faudrait leur rendre manifeste que l’équipage les considère toujours comme les seigneurs du lieu45 ».
25Autre point développé par Morton dans ce texte : le transit de Vénus, dont on rappellera ici qu’il est le but officiel du voyage. Le président de la Royal Society offre certains détails techniques touchant à l’expérience scientifique proprement dite et recommande notamment de prévoir plusieurs équipes d’observateurs réparties en divers lieux d’observation (en cas d’incapacité d’une équipe à mener l’expérience dans de bonnes conditions), et de procéder à des essais du matériel avant le jour prévu pour l’observation.
26Enfin, la plus grande partie de ces recommandations concerne le continent austral, objet secret de l’expédition. En premier lieu, ce sont les différents indices qui peuvent signaler la présence d’un continent qui sont mis en avant, car il ne s’agirait pas de passer à côté du dit continent mythique sans en comprendre la nature et manquer l’opportunité d’en rapporter de forts utiles renseignements, dans les domaines de l’Histoire Naturelle, ou du commerce par exemple, dont « la Grande-Bretagne pourrait, avec le temps, tirer un bénéfice considérable46 ». Ainsi, de hautes montagnes visibles à l’horizon, de larges rivières et des estuaires de taille considérable, une population nombreuse en bord de mer ayant un degré de civilisation élevé (qui n’apparait selon Morton, que chez les peuples les plus nombreux et vivant sur les continents) indiquent clairement que l’on a affaire à une terre de taille importante, et donc, potentiellement, à un continent47. En cas de découverte de ce continent, Morton préconise une observation minutieuse et disciplinée de sa faune, de sa flore, de ses minerais et de ses habitants. Les conseils offerts ici sont beaucoup plus détaillés que les instructions de l’Amirauté et si l’auteur déclare ne vouloir s’en tenir qu’à quelques remarques générales, étant donné l’étendue du champ d’investigation48, on perçoit bien que la Royal Society est ici sur son terrain de prédilection. Ainsi, là où l’Amirauté demandait simplement de recueillir des graines afin que celles-ci puissent être analysées en Angleterre, Morton conseille d’en noter l’utilisation faite par les indigènes, leur pouvoir de guérison par exemple, mais également, leur exposition, la latitude à laquelle on les trouve, s’il s’agit de l’hémisphère nord ou sud, ou encore la nature du sol sur lequel elles poussent et dont on ne manquera pas de ramener un échantillon. Un même degré de précision est demandé lors de la recherche et de l’observation des animaux et des minéraux.
27Enfin, dernière rubrique, Morton demande aux membres de l’expédition d’établir un lexique des mots utilisés par les indigènes pour désigner les lieux et les choses. Le but en est, bien évidemment, une amélioration des communications qui permettra en retour de recueillir des informations plus nombreuses et plus fiables.
28Toutes ces recommandations viennent en complément des instructions de l’Amirauté, et se concentrent sur ce qui relève pleinement de la compétence de la Royal Society : l’investigation scientifique. Elles offrent une grille de lecture de la nature et de sa production, qui s’avèrera fort utile lors du voyage, si l’on en juge la manière scrupuleuse avec laquelle Cook la respecte. Chacune des rubriques proposées par Morton sera en effet reprise par Cook dans la description des lieux visités lors du voyage, et des indigènes rencontrés à cette occasion. Ce sera également le cas pour les second et troisième voyages. Car même si la Royal Society ne prendra pas part directement à leur organisation et n’y jouera plus le rôle prépondérant qu’elle joue à l’occasion du premier voyage, son esprit et ses méthodes continueront d’avoir une influence importante auprès des membres de l’équipage en charge des observations scientifiques de la faune, de la flore, des minéraux et des indigènes rencontrés.
Notes de bas de page
1 Le transit de Vénus se produit tous les 8 ans puis en alternance tous les 115 ans et demi et tous les 122 ans et demi. Ainsi le phénomène ne se produit tout au plus que deux fois par siècle. Au xxe siècle, il ne se produisit pas, le cycle reprenant le 8 juin 2004. Le dernier passage de Vénus devant le disque solaire eut lieu les 5 et 6 juin 2012. La prochaine occurrence de ce phénomène aura lieu le 11 décembre 2117.
2 Sur les 120 observateurs qui participèrent à l’expérience de 1761, les Français furent les plus nombreux, avec 32 scientifiques, les Anglais n’arrivant qu’en quatrième position avec 18 scientifiques. On note également la présence de Russes, d’Allemands, de Suédois, d’Italiens, de Portugais, de Danois et d’Espagnols.
3 Le fait que le phénomène se produisit en pleine guerre de Sept Ans, les erreurs de positionnement des équipes scientifiques et des conditions météorologiques peu clémentes expliquent en grande partie l’échec de l’expérience.
4 Voir R. Hough, op. cit., p. 44.
5 Cité dans H. T. Fry, « Alexander Dalrymple and Captain Cook : The Creative Interplay of Two Careers », Robin Fisher and Hugh Johnston, op. cit., p. 44.
6 Il s’agit des expéditions d’Edmund Halley sur le Paramour (1698-1700) et de William Dampier sur le Roebuck (1699-1701) Ces deux expéditions furent un désastre du point de vue de la gestion des hommes d’équipage.
7 Cité dans H. T. Fry, op. cit., p. 47, n. 20.
8 C’est ainsi que Banks est décrit dans les minutes de la Royal Society datées du 9 juin 1769. Cook ne semble avoir appris l’arrivée de Banks et de sa suite qu’à partir du 22 juillet. Voir Life, p. 144.
9 Life, p. 277.
10 « En ce qui concerne le continent austral, je ne pense pas qu’il existe ailleurs que dans des latitudes élevées » (Cook I, p. 288).
11 Dans un post-scriptum au journal de son premier voyage, Cook avait déjà formulé son opinion quant à la meilleure façon, selon lui, de régler la question continentale. L’itinéraire alors proposé était moins ample que celui qu’il offre de suivre dans son mémoire de février 1772, puisqu’il se limitait au Pacifique et ne concernait pas l’Atlantique sud. Voir Cook I, p. 479.
12 William Wales (c. 1734-1798) était le beau-frère de Charles Green, astronome du premier voyage. En 1761, il avait été chargé d’observer le transit de Vénus dans la baie d’Hudson. William Bayley (1737-1810) avait participé à l’observation depuis le Cap Nord en Norvège.
13 L’opinion publique dans sa majorité, mais également les membres de la Royal Society ou encore George III, considéraient cette expédition comme l’expédition de Joseph Banks. Ce dernier était donc en position de force au sein de l’Amirauté qui ne pouvait donc pas, dans un premier temps, ne pas lui fournir les conditions les plus favorables pour l’accomplissement de ce voyage.
14 Dans une lettre à Joseph Banks datée du 15 mai 1772, Charles Clerke résume la situation de la manière suivante : « Pardieu, je prendrais la mer dans un tonneau de grog si on me le demandait, ou à bord du Resolution dès qu’il vous plaira, mais je tiens à dire que je pense que c’est le navire le moins sûr que j’aie vu ou dont j’aie un jour entendu parler » (Life, p. 226).
15 L’aspirant John Elliott décrit la réaction de Banks en ces termes : « M. Banks est venu à Sheerness, et lorsqu’il a vu les modifications que nous avons apportées au navire, il s’est mis à jurer et à taper du pied sur le quai, comme pris de folie, et a ordonné que ses serviteurs et ses effets soient débarqués sur le champ » (Ibid., p. 295).
16 En dépit de ses qualités indéniables de scientifique, Forster, dont la personnalité s’accommodait mal de la vie en communauté à bord du navire, posa de nombreux problèmes. Clerke menaça de le mettre aux arrêts et Cook dut l’exclure de sa cabine. Voir Richard Hough, op. cit., p. 233.
17 L’Adventure était arrivé en Angleterre un an plus tôt en juillet 1774. Les deux navires s’étaient une première fois involontairement séparés en février 1773 avant de se retrouver quelques semaines plus tard en Nouvelle-Zélande, selon un plan préétabli. En octobre de la même année, ils se séparèrent à nouveau sans jamais pouvoir se rejoindre.
18 Lettre du 19 août 1775. Citée dans Life, p. 445.
19 Sur Omai, voir E. H. McCormick, Omai, Pacific Envoy. Auckland : Auckland Universty Press, 1977.
20 Avant le troisième voyage de Cook en 1776, une cinquantaine de tentatives avaient été effectuées. Parmi les noms célèbres associés à cette aventure, on peut citer notamment ceux de Francis Drake, Martin Frobisher, William Baffin, John Davis, Henry Hudson, Arthur Dobbs, Samuel Hearne, Daines Barrington ou encore Constantine Phipps.
21 Sur les conditions du recrutement de Cook pour cette troisième expédition, voir Life, p. 472-475. C’est également en février 1776, que Cook fut élu membre de la Royal Society, et qu’on lui décerna la médaille Copley pour ses résultats encourageants concernant le traitement du scorbut en mer. Cook, lors de son second voyage, n’avait en effet perdu qu’un seul homme à cause de cette maladie.
22 Life, p. 467.
23 Les instructions pour le premier voyage sont datées du 30 juillet 1768, celles du second voyage, du 25 juin 1772, et celles du troisième voyage, du 6 juillet 1776.
24 Sir Philip Stephens (1723-1809) fut secrétaire de l’Amirauté de 1763 à 1795. Les autres signataires des instructions données à James Cook étaient : Sir Piercy Brett et Lord Charles Spenser pour le premier voyage ; le vicomte Lisburne, Thomas Bradshaw et Augustus John Hervey, comte de Bristol pour le second voyage ; et Sir Hugh Palliser, lord de l’Amirauté en 1776, et de nouveau Spenser, pour le troisième voyage.
25 Les instructions pour le premier voyage offrent une légère variante, en ce qu’elles sont en fait doubles. Une première série d’instructions concerne l’expédition, du départ d’Angleterre jusqu’à Tahiti, lieu de l’observation du Transit de Vénus. La seconde partie, intitulée « Additional Instructions for Lt James Cook, Appointed to Command His Majesty’s Bark the Endeavour », s’intéresse plus particulièrement à la recherche et l’exploration du continent austral et, le cas échéant, de tout nouveau territoire découvert. (Cook I, p. cclxxxii).
26 L’Endeavour fit escale au Brésil du 14 novembre au 7 décembre 1768.
27 Cook I, p. cclxxxiii.
28 Ibid. Dans son journal, Cook reprend les termes des instructions qu’on lui a données.
29 Cook II, p. clxix.
30 Cook III, p. ccxx-ccxxiv.
31 Ibid., p. ccxx.
32 Cook I, p. cclxxix.
33 Cook III, p. ccxxi.
34 Il faut garder à l’esprit que l’expédition avait déjà pris du retard du fait de l’arrivée tardive du Discovery au Cap, où le Resolution attendait depuis plus d’un mois, et que le mauvais état de son navire, révélé dès les premières semaines du voyage, força Cook à s’arrêter plusieurs fois pour procéder aux réparations nécessaires.
35 Cook III, p. ccxxi.
36 Cook I, p. cclxxxii-cclxxxiii, Cook II, p. clxviii, Cook III, p. ccxxiii.
37 Ibid.
38 Ibid.
39 James Douglas, Comte de Morton (1702-1768), président de la Royal Society de 1764 à 1768.
40 « Hints offered to the considerations of Captain Cooke, Mr Bankes, Doctor Solander, and the other Gentlemen who go upon the Expedition on board the Endeavour » (Cook I, p. 514-519). Ce texte est daté du 10 août 1768.
41 Cook I, p. 519. On peut à ce titre s’étonner de la naïveté de certaines remarques, comme la façon avec laquelle les membres de l’équipage pourraient faire comprendre aux Tahitiens qu’ils ont faim ou soif : « Tenir une cruche à l’envers, pour montrer qu’elle est vide, puis la porter à ses lèvres comme si on allait boire ; le plus idiot d’entre eux devrait immédiatement comprendre par là, que l’on a besoin d’eau. Ouvrir grand la bouche, placer ses doigts devant, et faire mine de mâcher, devraient suffire à faire comprendre que l’on a besoin de nourriture » (Cook I, p. 514-515).
42 Ibid., p. 514.
43 « […] contrôler l’irascibilité des marins, et restreindre l’utilisation aléatoire des armes à feu » (Ibid).
44 Ibid., p. 515.
45 Ibid.
46 Cook I, p. 516.
47 Ibid. Au sujet des populations habitant le dit continent, Morton signale le contre-exemple des Hottentots du Cap de Bonne-Espérance, qui sont très peu nombreux et occupent le rang le plus inférieur dans l’échelle de l’humanité.
48 « Les domaines concernés sont si vastes, que l’on ne saurait ici rentrer trop dans le détail » (Cook I, p. 517).
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