Enfance assistée, enfance exploitée ? La colonie agricole de Porquerolles
p. 137-152
Texte intégral
1L’affaire de Porquerolles se situe au cœur des débats des années 1880, au moment où les républicains au pouvoir inventent une politique sociale en général, une politique de l’enfance en particulier. Elle pose la question de l’enfance délinquante ou marginale, de son contrôle, de sa réinsertion et de la place du travail dans ce processus.
2La période concernée est celle des années 1880, c’est-à-dire celle de l’invention de la République en tant que projet de société, en tant que politique concrète, affrontée aux réalités et en particulier à celle de la « question sociale ». Bien évidemment, il ne s’agira pas ici de faire le récit et l’analyse de cette affaire sous toutes ses facettes, mais il faut bien commencer par exposer succinctement les faits, le révélateur, avant de présenter les positions des parties en présence.
La révolte des enfants de l’île
3Le lieu est enchanteur : une île de la Méditerranée provençale, la plus grande des îles d’Hyères, propriété d’un homme d’affaires parisien, Léon de Roussen. Une colonie agricole, à vocation d’ » école de réforme », y a été établie par l’Assistance publique en 1883. Trois ans après, elle est le cadre d’un événement assez banal dans l’histoire de ces établissements : une révolte des jeunes colons, dont la presse et la justice s’emparent et qui défraye donc la chronique, locale et nationale.
4La révolte est à son paroxysme le 25 juillet 1886. D’assez nombreux incidents ont émaillé la vie de la colonie depuis un an. Ils se sont multipliés en juin : deux tentatives d’évasion, accompagnées de vols et de diverses dégradations, le renvoi de l’instituteur faisant fonction de directeur de la colonie et son remplacement par un ancien officier de l’infanterie de marine, un accident qui a causé la mort d’un colon. Ces incidents ont attiré l’attention de la justice et le tribunal correctionnel de Toulon, alerté par le juge de paix d’Hyères, a ouvert une enquête. L’atmosphère est à la révolte depuis plusieurs mois et cette initiative attise les tensions. L’oubli de l’un des colons condamnés dans une cellule du fort – non occupé – du Grand Langoustier provoque la révolte. C’est là que les colons se barricadent, n’acceptant finalement de se rendre qu’en présence du sous-préfet. Dix « meneurs » et deux gardiens inculpés de mauvais traitements sont arrêtés. L’épilogue judiciaire de l’affaire a lieu devant le tribunal correctionnel de Toulon entre le 10 et le 18 février 1887. Trois surveillants, neuf enfants (car l’un des colons arrêtés est mort entre temps) et le couple propriétaire de l’île sont sur le banc des accusés. Des peines de prison – un et deux mois – sont infligées à deux gardiens, une amende de 25 F à un troisième, une autre de 200 F à Madame de Roussen tandis que son mari est condamné aux dépens. Quant aux enfants, ils sont soit acquittés, soit, pour cinq d’entre eux, condamnés à 1 F d’amende.
5Mais, à côté de l’affaire judiciaire, il y a une affaire politique doublée d’une campagne de presse virulente. Elle a été lancée par un quotidien local tout neuf, Le Var républicain, qui s’est emparé du « scandale » de la colonie avant même que la révolte n’éclate. Disposant du rapport du juge de paix d’Hyères, il a commencé cette campagne le 21 juillet en faisant sa « une » sur « L’exploitation des orphelins » et son intervention a contribué à alourdir le climat dans l’île, d’autant que la population résidente est en conflit avec le propriétaire1. Ces informations sont aussitôt relayées par la presse nationale qui, durant plusieurs semaines, revient sur l’affaire, d’abord pour la dénoncer, puis pour se partager au sujet des responsabilités, une fois ses enjeux politiques mieux perçus. Henri Rochefort dans L’Intransigeant pourfend dès le 28 juillet ce « bagne d’enfants » et se fait procureur pour leurs « bourreaux »2. Le Figaro, après un premier mouvement identique, est revenu à plus de compréhension à l’égard des responsables de la colonie, de même d’ailleurs que le principal quotidien toulonnais, Le Petit Var, déstabilisé un moment par l’offensive de son jeune concurrent plus radical que lui.
6En effet, l’arrière-plan politique et idéologique de l’affaire se dégage assez vite. Le propriétaire de l’île et son épouse font partie de l’establishment opportuniste. Leur avocat devant le tribunal de Toulon n’est autre que l’une des principales personnalités politiques du département, Noël Blache, alors président du conseil général du Var. Administrateur de La République française et de La Petite République, de Roussen passe pour avoir été un proche de Gambetta. Il a acheté l’île en 1881 pour la mettre en valeur. Mais la colonie agricole est surtout du ressort de son épouse. Elle est, à l’évidence, sa cause. Jeanne de Roussen dirige le mensuel La Famille et a commencé à écrire des feuilletons sentimentaux qu’elle signe « Pierre Ninous » (ou « Paul d’Aigremont »)3. Tous les adversaires de la République opportuniste se sont mobilisés contre eux, les uns pour dénoncer les méfaits inévitables de la laïcisation de l’assistance, les autres pour stigmatiser les pratiques d’une bourgeoisie sans cœur, exploitant et maltraitant sans vergogne des enfants.
7L’affaire a d’autant plus d’impact que ces enfants et ces adolescents viennent de Paris, qu’ils ont été placés là par l’Assistance publique, c’est-à-dire par une institution qui dépend des élus de la Seine. La plupart d’entre eux, les deux tiers, relèvent du Service des enfants moralement abandonnés, les autres du Service des enfants assistés. Depuis sa création le 23 août 1883, 123 colons sont passés par Porquerolles. Il y en avait 92 au moment de la révolte, âgés de douze à vingt ans. Les inculpés ont entre quinze et dix-neuf ans. Ces garçons sont des « durs », « les pires parmi les mauvais » d’après l’ancien directeur de l’Assistance publique, Quentin, ceux que l’on destine normalement à Cîteaux ou à Mettray. Une partie d’entre eux en vient et quelques-uns, particulièrement récalcitrants, y ont été renvoyés. Mais un nombre non négligeable – 27 – auraient été « remis dans le droit chemin ». L’expérience de Porquerolles est finalement assez récente, car c’est bien d’une expérience qu’il s’agit, d’une sorte de tentative pionnière, destinée à prouver que l’encadrement des jeunes gens et leur réinsertion peuvent échapper sans mal aux congrégations.
8Il ne s’agit pas d’un établissement pénitentiaire. C’est officiellement une « école de réforme » à vocation agricole. En fait, son statut est flou ou, plus exactement, personne ne considère réellement qu’il s’agit d’une école. Les habitants de l’île l’appellent « le pénitencier », par référence à celui que l’île voisine du Levant a connu et qui a été dissous dix ans auparavant4. Dans la presse ou dans les débats, on évoque plus volontiers une colonie agricole, ce qui renvoie aux colonies agricoles publiques et privées créées par la loi du 5 août 1850.
9L’affaire est suffisamment grave pour que le conseil général diligente une enquête, qui sera conduite en août par sa troisième commission (celle de l’Assistance publique), et que les assemblées parisiennes y reviennent longuement dans leurs débats5. C’est ainsi que l’affaire de Porquerolles prend non seulement une allure nationale, mais devient l’une des étapes marquantes dans l’élaboration d’une politique de l’enfance et de l’assistance.
La politique de l’Assistance publique
10L’établissement a été ouvert dans l’été 1883. Il est mis en place par le directeur de l’Assistance publique de l’époque, Quentin, qui le destine d’abord aux enfants de plus de treize ans, indisciplinés, « rebelles à tout travail », « mis en préservation » jusque-là à Cîteaux, Mettray, La Roquette, Loos, etc. Le conseil général de la Seine a voulu créer une école de réforme « ayant à la fois un caractère professionnel et répressif », sur un modèle qui vient des pays anglo-saxons6. Cette création s’inscrit dans ce qui veut être une politique dynamique et exemplaire du traitement de l’enfance en difficulté. La question est régulièrement débattue. Dans ses rapports annuels sur le Service des enfants assistés, le docteur Thulié, secrétaire du conseil général de la Seine et membre du conseil de surveillance de l’Assistance publique, expose avec constance l’état d’avancement des travaux. Faisant le bilan de l’année 1880, il convient de l’échec des colonies agricoles jusqu’ici, « excepté celles qui ont un caractère pénitentiaire ; ce n’est pas là ce que l’on recherche, on veut rendre ces enfants à la vie honnête par la voie du travail libre, et non par la voie de la répression »7. Le dossier est instruit par des réformateurs sociaux de premier plan, en particulier Paul Strauss8. Celui-ci a succédé à Clemenceau comme rapporteur du Service des enfants assistés et il est, avec le docteur Roussel, sénateur de la Lozère, à l’origine du Service des enfants abandonnés, créé en 1880. Il milite pour une loi sur la protection des enfants maltraités et moralement abandonnés, qui est en débat au Parlement à partir de 1881 et qui aboutira en 1889.
11L’île de Porquerolles est apparue comme une opportunité à la direction de l’Assistance publique et à son autorité de tutelle. « Porquerolles était l’idéal complet... Climat merveilleux, fertilité du sol, la multiplicité des cultures que l’on pouvait y faire, tout concordait à la réussite de cet établissement »9. À son site, son climat, sa nature, s’ajoute la confiance que l’on pouvait avoir dans un ami politique, faisant partie, en tant qu’administrateur, de l’équipe gambettiste de La République française, comme Quentin et Strauss. Mais les accords sont toujours restés flous et jamais aucune convention écrite n’a été signée : on est bien là dans l’expérimental, mais c’est une expérience à laquelle les uns et les autres tiennent, car sa réussite est importante pour l’avenir. De ce caractère mal défini, découlent des tractations incessantes entre l’Assistance publique et de Roussen.
12Celui-ci doit entretenir à ses frais pendant un an, puis gager les enfants qui sont aptes au travail, soit la majorité, tandis que les autres seront à la charge de l’Assistance publique pendant trois ans (ou plus pour les « incorrigibles »), soit 0,75 F par jour et par enfant. Elle doit payer aussi 40 F à l’admission, fournir la literie et la moitié du traitement du médecin. L’administration en fait délègue sa responsabilité. Elle se décharge d’autant plus volontiers sur les propriétaires de l’île que ce sont des « amis ». Sa tutelle est assurée par le directeur de l’agence de Moulins. Elle apparaît comme virtuelle, même si la colonie est régulièrement visitée par ce dernier, par des inspecteurs (tous les trois mois en théorie) ou les directeurs de l’Assistance publique, mais aussi par des membres du conseil général. En avril 1885, après l’une de ses visites, le directeur de l’Assistance publique a proposé quelques améliorations (du trousseau, des installations, etc.) et, en décembre de la même année, il a autorisé la création d’une brigade spéciale pour les grands « insoumis » qui seraient confiés aux deux surveillants les plus expérimentés10. Il signale qu’il y a abus de punitions et propose qu’elles soient réglementées.
13Dans la réalité, l’Assistance publique apparaît comme une institution assez lourde, lointaine, souvent en retard dans ses obligations et dans ses interventions. Le trousseau prévu n’est fourni qu’en juin 1885 et l’instituteur réclamé en mars 1884 n’arrive qu’un an après. Chacun tient sans doute à l’expérience, mais encore faut-il qu’elle soit faite au moindre coût.
Rêves et réalités
14Installée sur deux sites, assez éloignés l’un de l’autre, l’exploitation agricole couvre 200 ha. Les colons sont contraints à des déplacements longs :
« Groupés à la fabrique, située à l’extrémité ouest de l’île, ils se levaient l’été à 4 heures du matin, se rendaient à leurs chantiers respectifs. Ceux qui travaillaient à la ferme du bourg de Porquerolles faisaient un trajet de 4 kilomètres environ ; ceux qui allaient à Notre-Dame avaient 7 ou 8 kilomètres à parcourir. Ces derniers rentraient à la fabrique le soir à 7 heures et prenaient leurs repas sur les chantiers. Les autres revenaient à 8 heures du matin à la ferme du bourg pour manger la soupe ; à 9 heures, ils reprenaient le travail jusqu’à midi, revenaient dîner et repartaient pour recommencer à 2 heures ; à 4 heures, ils se reposaient une demi-heure, et à 7 heures reprenaient le chemin de la fabrique pour souper, ce qui constituait pour eux une journée de 11 à 12 heures de travail effectif »11.
15L’hygiène et la nourriture laissent à désirer. Les vêtements sont l’objet de controverses entre ceux qui les estiment insuffisants et ceux qui insistent sur le comportement de garçons qui n’en ont aucun soin. Il est évident que l’écart est considérable entre la représentation que se font les responsables des bienfaits, en quelque sorte, naturels d’un petit paradis et l’attitude de jeunes transplantés dans un milieu qui leur est totalement étranger. Le même écart existe aussi entre les vues philanthropiques des créateurs et la réalité d’un encadrement à tous égards insuffisant. Brutalités, ivrognerie, absence de motivation pédagogique, arbitraire caractérisent l’attitude des gardiens comme celle des autres salariés de la colonie, qu’ils aient ou non des responsabilités. Les punitions n’ont rien d’exceptionnel pour l’époque et dans ce milieu, mais l’enfermement en cellules – des cellules très sommairement aménagées en particulier dans le fort, isolé, du Grand Langoustier, qui se trouve au bout de l’île – n’obéit à aucune règle claire. La menace de la « crapaudine », qui consiste à attacher le sanctionné les membres repliés, et la commande de « barres de marine » – les fers – par le nouveau directeur de la colonie émeuvent aussi bien les colons que, plus tard, la presse ou les conseillers généraux de la Seine qui auront à enquêter sur les événements.
16En fait, le statut des colons est lui aussi mal défini, mais comment pourrait-il l’être alors que sont mélangés des enfants d’âges très différents, venus là après des itinéraires aussi variés que les raisons qui ont conduit à leur placement à Porquerolles ? Il y a des orphelins, mais la plupart ne le sont pas, ils proviennent de milieux jugés incapables de les élever, mais aussi de familles qui n’ont pas eu les moyens de le faire. Certains sont de petits délinquants, mais la plupart sont des gosses de la rue. Tous ne sont pas des « indisciplinés », mais tous doivent être « redressés » ou, pour le moins, « éduqués » par le travail. C’est lui qui est véritablement au centre de ce projet d’ » école de réforme ».
17L’ensemble des responsables de cette implantation partage le même souci : moraliser les jeunes garçons, en faire des ouvriers agricoles aptes à travailler dans les exploitations de la région en tram de reconstituer leur vignoble après le phylloxéra, répondre, éventuellement, aux besoins, militaires ou civils, de la conquête coloniale. Cet objectif n’est pas dissociable des peurs et des représentations typiques des élites de cette époque : peur de la ville corruptrice (d’où la transplantation dans un milieu qui les coupe de toutes leurs racines), idéalisation de la vie au grand air et des bienfaits de la campagne, attrait pour cette nature exotique méditerranéenne que tout le « gratin » européen commence à fréquenter, inquiétude devant l’exode rural et le risque du manque de bras dans l’agriculture. Dans sa préface d’une étude du temps consacrée à l’Assistance publique, Paul Strauss le précise : il s’agit d’en faire de « véritables paysans préservés de toutes les maladies et de tous les vices de la ville dont ils pouvaient avoir le germe en naissant dans le milieu le plus misérable de Paris »12. En témoignant devant la commission d’enquête du conseil général de la Seine, l’ancien directeur Quentin répète ce qu’il a dit dans la presse : il a estimé au moment de la création de l’établissement que « là-bas, au grand air, dans le travail des champs, [les enfants] se perfectionneront au physique et au moral »13.
18Mais, au-delà de ces objectifs généraux et communs, des différences sensibles peuvent séparer les initiateurs du projet.
Œuvre ou main-d’œuvre ?
19Le point de vue du propriétaire de l’île, de l’homme d’affaires de Roussen est sans ambiguïté. Sa conception est tout utilitariste. Le représentant de l’administration lui ayant demandé de fournir du pain à volonté au lieu de 1 kg 100 et trois jours de viande au lieu de deux, il lui écrit, le 10 février 1885, pour faire préciser exactement ce qu’il veut et ce que l’Assistance publique prend à sa charge, et il ajoute les commentaires suivants :
« L’administration a certainement plus d’expérience sur ces sujets que nous-mêmes, et d’ailleurs nous ne sommes à l’égard des enfants que les délégués de l’administration, aussi nos idées devront-elles fléchir toujours devant ses désirs, mais permettez-moi d’attirer votre attention sur un point important.
« Nos enfants depuis un an que nous les avons ont prospéré au physique et au moral. Aussi je suis heureux que vous ayez constaté, et je regarde cela comme un grand progrès, qu’ils ne soient ni meilleurs ni pires que ceux qui composent vos groupes d’industrie. Dans ces conditions ne craignez-vous pas que, s’ils ont un régime qu’à leur sortie, ils ne retrouveront pas dans les campagnes, il n’en résulte un grand inconvénient ?
« Ce qui fait la supériorité des ouvriers étrangers, c’est leur peu de besoins. Je livre cette question à vos méditations.
« En parlant ainsi, je n’ai pas en vue le pain qu’on peut leur donner à discrétion, mais la viande que vous désirez voir donner plus fréquemment. Tenez compte que nos enfants ont 30 centilitres de vin par jour.
« Certes, il est désirable que vin, pain, viande contribuent abondamment à la nourriture de nos ouvriers des campagnes, mais il y aura quelque chose plus fort que nos désirs humanitaires, aux champs comme dans l’industrie, c’est la concurrence étrangère. En habituant les enfants à un bien-être que ni la terre, ni l’industrie ne peuvent payer, nous préparons pour l’avenir les grèves, en même temps que notre infériorité relative »14.
20Il se justifie au sujet des horaires de travail imposés. Il a l’appui du conseiller général Curé, rapporteur du Service des enfants moralement abandonnés et horticulteur au quartier de Javel, qui précise à l’intention de ses collègues : « En agriculture, on ne compte pas les heures de travail. La culture est de toutes les heures, la journée n’est finie que quand l’ouvrage indispensable est terminé, on travaille quelquefois dix-huit heures sur vingt-quatre, quitte à se reposer le lendemain si la récolte le permet ». Et à Vaillant qui lui lance : « Il s’agit d’une école et non d’une exploitation », il répond : « Oui, d’une école d’agriculture, où l’agriculture doit être conduite comme elle l’est dans une exploitation. Si vous voulez limiter les heures de travail, ne faites pas des agriculteurs »15.
21Léon de Roussen a cherché à mettre sur pied un domaine agricole et à participer à la formation et à la fixation d’une main-d’œuvre agricole. Il écrit au directeur de l’Assistance publique le 17 juin 1886 : « J’ai mis à votre disposition dans des conditions déterminées, mes cultures, mes fermes, etc., etc., pour essayer de moraliser et relever par le travail ces malheureux abandonnés ; de plus, pour donner à toute cette région où il y a tant d’ouvriers étrangers, des ouvriers français capables et laborieux ; j’ai montré mon organisation, j’ai fait part de mes projets, votre Administration a tout accepté et a envoyé vos enfants à Porquerolles après plusieurs visites de vos agents »16. Il s’estime trahi par l’Assistance publique. Il se plaint d’ailleurs de n’avoir rien gagné dans l’affaire, bien au contraire, car quelques ouvriers piémontais auraient fait bien plus de travail. La correspondance qu’il a eue avec la direction de l’Assistance publique est révélatrice. Quatre jours avant que la révolte n’éclate, devant la campagne de presse qui s’enclenchait, de Roussen avait décidé de liquider l’établissement.
22Son épouse est un personnage plus complexe et, dans une certaine mesure, pathétique. Cette femme s’est faite seule, elle a créé un atelier de passementerie de 200 employées, elle est parvenu à se faire un nom et la littérature, même populaire, est une manière de consécration. Elle, qui n’a pas d’enfants, promeut les vertus familiales. Comme l’écrit Le Figaro, elle a très certainement voulu « arracher des enfants aux mains si cruelles dans lesquelles ils s’étiolent, les enlever, les transformer, en faire de véritables hommes » et l’article d’ajouter : « Quoi de plus beau, surtout pour une femme qui a vraiment désiré être mère ? »17. C’est elle qui a voulu la création de la colonie et qui la porte depuis le début. Mais, si elle séjourne assez régulièrement sur l’île, elle la délaisse aussi pendant de longs mois. Les jugements sur son attitude sont contradictoires. Certes Rochefort la dépeint comme une « ogresse ». Elle est, à coup sûr, philanthrope au sens le plus traditionnel. Elle aurait voulu faire de Porquerolles un établissement modèle. Dans son mémoire en défense, elle termine en répétant :
« Je me suis dévouée à cette œuvre que j’estimais être une œuvre patriotique et sociale... À la place des rôdeurs de barrière, des assassins précoces, des voleurs incorrigibles dont Paris pullule aujourd’hui, nous voulions, mon mari et moi, rendre à la société des citoyens honnêtes, des ouvriers utiles, de bons pères de famille. C’était une œuvre bonne, nous l’eussions accomplie, malgré les difficultés des débuts, si des passions mauvaises et que je ne veux même pas rechercher, ne fussent venues l’empêcher »18.
23Les colons sont organisés en bataillon scolaire et ils accueillent ainsi formés et en fanfare le ministre Lockroy et les autorités, venus en visiteurs en mars 1886. Mme de Roussen appuie l’effort de scolarisation réclamé par l’administration (deux heures par jour théoriquement), tout en souhaitant, évidemment, qu’il soit pratique : un peu de chimie agricole, du calcul utile (savoir cuber la terre, savoir arpenter), apprendre à tenir une comptabilité et à faire une feuille de journée. Mais elle paraît « découvrir », avec les garçons qui lui ont été confiés, ce que sont de « vrais » enfants, des gosses des milieux populaires de Paris, qui ne rêvent que d’y retourner et qui multiplient les « bêtises » dont elle s’indigne. Elle se plaint assez vite de « la destruction organisée pour le plaisir de faire le mal ». Elle est atterrée par leur attitude, les vêtements qu’ils vendent ou qu’ils abîment, le matériel qu’ils endommagent, le bétail qu’ils maltraitent éventuellement, les mégots qu’ils réclament, etc. Elle leur offre ce qui est probablement pour elle le paradis et doit se résigner, difficilement, à un constat d’échec : il lui faut « tenir compte du caractère et de la nature des jeunes gens » que l’Assistance publique lui a confiés, des garçons qui ont « pour l’agriculture un dégoût absolu » et dont le « travail est à peu près nul ». Elle oscille entre l’indulgence et la répression.
24L’Assistance publique et les réformateurs sociaux qui en sont les inspirateurs partagent les mêmes convictions que les de Roussen. Le Service des enfants assistés existe depuis 1811. Il concerne les enfants abandonnés et les orphelins pauvres – plus de 3 100 en 1885 – à qui l’administration (le directeur de l’Assistance publique pour être précis) sert de tuteur et qu’elle place en particulier dans l’agriculture pour en faire de « véritables paysans », soit à titre individuel, soit dans des colonies agricoles en projet en Algérie (la loi du 27 avril 1886 vient d’affecter trois domaines au département de la Seine)19. Ce sont les « indisciplinés » que Porquerolles permet d’accueillir. Mais c’est le Service des enfants moralement abandonnés qui est principalement concerné par cette colonie. De création récente, se voulant un service modèle, proposé comme exemple au pays tout entier, il compte plus de 3 000 enfants au 31 décembre 1885 (soit âgés de douze à seize ans et considérés comme « enfants assistés », soit âgés de moins de douze ans mais vagabonds, condamnés pour divers délits ou dont les parents ont été condamnés à plus de six mois de prison). Il pose, du fait de la législation et de la condition des enfants qui lui sont confiés, plus de problèmes. C’est bien le flou législatif qui entoure la condition de ces enfants qui préoccupe Ernest Rousselle, président de la troisième commission, qui défend mordicus le Service20. Une telle loi lui paraît d’autant plus nécessaire qu’elle permettrait de l’intégrer au Service des enfants assistés. En effet, l’Assistance publique n’a pas la tutelle de ces enfants qu’elle prend en garde jusqu’à seize ans. Ils doivent un jour retrouver leurs parents. De ce fait et parce qu’ils s’adaptent mal aux travaux des champs, ils sont plutôt orientés vers le travail industriel. Sur 3 093 enfants, 658 sont placés en apprentissage, 887 en groupes dans l’industrie, 813 dont l’âge et la santé ne permettent pas le placement industriel se trouvent chez des particuliers à la campagne, le reste est affecté aux quatre écoles professionnelles de l’Assistance publique21. Deux concernent les garçons, l’école professionnelle de Montévrain (Seine-et-Marne) qui les prépare aux métiers de l’ébénisterie et de la typographie et celle de Villepreux (Seine-et-Oise), tournée vers la vannerie et l’horticulture22. Restait le problème des indisciplinés qui, comme pour les enfants abandonnés, étaient confiés à Cîteaux ou à Mettray car l’Assistance publique n’avait pas d’établissements pour eux.
25C’est pourquoi le conseil général a décidé de créer des établissements laïques et non pénitentiaires, les « écoles de réforme », ayant un caractère professionnel et répressif, et c’est à cette condition – la laïcisation de certains établissements – que le conseil général a voté sa subvention au Service le 30 décembre 1882. C’est dans ce cadre que revient l’idée d’établissements agricoles en Algérie et, pourquoi pas, dans cette marge édénique de Porquerolles. Le cheminement est finalement parallèle à celui de l’administration pénitentiaire, même si l’on cherche à faire échapper les jeunes à son emprise. Rousselle et son collègue Curé qui ont été parmi les défenseurs du projet continuent à soutenir Porquerolles même après la révolte. Pour Rousselle, « Porquerolles enlève aux Bons Pasteurs cette clientèle qu’ils pétrissaient à leur gré » et Curé d’expliquer qu’il avait « été heureux de voir créer Porquerolles. D’abord, parce qu’on laïcisait les indisciplinés et surtout parce [qu’il pensait] que la situation serait beaucoup meilleure. Pour ces malheureux, plus victimes que coupables, déshérités de la famille ou, ce qui est pis encore, en ayant une pour leur montrer de mauvais exemples, Porquerolles était l’idéal complet pour le groupe que l’administration avait créé »23. Pour lui, il n’y a pas de révolte à craindre chez les religieux, « car eux ils ont toute la sélection, ils veulent bien garder les bons avec lesquels ils gagnent de l’argent »24.
26Pour eux, il y a eu cabale et la « main de Basile » n’est pas innocente dans l’affaire. Et chacun de souligner d’ailleurs qu’en fin de compte, chez les frères, on ne sait pas ce qui se passe. Les directeurs de l’Assistance publique, celui d’alors, Peyron, comme Quentin auquel il a succédé en novembre 1884, confirment qu’il s’agissait « de combattre et au besoin de suppléer aux établissements pénitentiaires congréganistes de Cîteaux et Mettray ». Il aurait voulu avoir avec Porquerolles « une maison de convalescence morale »25. Reste que le Service a très vite crû – il est passé de 500 enfants en 1882 à plus de 3 000 en 1886 – et que l’Assistance publique dépense peu pour lui. Paul Strauss est plus critique. Il dit sa préférence pour le placement individuel car le régime disciplinaire de la colonie est vicié, il se différencie trop peu du système pénitentiaire. Le docteur Thulié partage cet avis pour les garçons dans son rapport sur 1886 où il tente de tirer un bilan « des événements imprévus » qui se sont déroulés à Porquerolles et se réfère d’ailleurs à une étude que Strauss vient de faire paraître dans La Nouvelle Revue26.
27Mais ce que chacun considère finalement, c’est que les enfants sont avant tout des victimes et que, comme le dit Rousselle, « la faute retombe sur la société tout entière qui n’a pu faire une loi contre la misère publique ».
Vers une autre conception de l’assistance aux enfants
28Sa tutelle ayant été prise en défaut, le conseil général a envoyé sa troisième commission, celle de l’Assistance publique, enquêter sur place dès le mois d’août. Le rapporteur de la commission est le docteur Auguste Navarre, un autre réformateur connu, encore radical à l’époque27. Le rapport qu’il rédige et qui est publié le 12 novembre suivant est accablant pour les de Roussen. Ils sont accusés d’avoir exploité les enfants et grugé l’Assistance, qui est, elle-même, coupable de complaisance et de négligence. Navarre met en cause le fonctionnement de l’Assistance publique, ses fonctionnaires et les complicités politiques dont ils ont bénéficié. Ce bilan suscite aussitôt la controverse dans les assemblées parisiennes. Mais, au sein du conseil général, Navarre est relayé par l’opposition de gauche, fort bien représentée puisque les conceptions socialistes y sont défendues entre autres par Édouard Vaillant et Charles Longuet. On remarquera là encore l’envergure des intervenants. Ils font de cette assemblée sans doute l’un des lieux les plus importants du débat sur la « question sociale », vue du moins sous l’angle de la politique de l’enfance.
29Parmi les plus critiques, se trouve le docteur Cattiaux. Ce médecin des pauvres, républicain socialiste et franc-maçon, qui a fondé l’Orphelinat maçonnique et le Refuge de nuit, dénonce, en même temps que les amitiés politiques, les conditions de travail auxquelles les enfants étaient soumis. En désaccord avec Curé au sujet de la durée du travail, il considère comme primordial de ne pas épuiser les forces, puisque ce qu’il faut chercher avant toute chose, c’est à former des hommes intelligents, capables d’effectuer du travail bien fait. Dans ces conditions, il convient donc de leur donner une instruction. C’est là, principalement, dans cette nécessité d’une instruction convenable que réside la principale différence entre son point de vue et celui des collègues qu’il attaque. N’ajoute-t-il pas en effet : « Que l’on fasse travailler des enfants 8 à 10 heures par jour, soit, mais il n’est pas besoin de les surmener » ?...28
30Quant au gendre de Karl Marx, Longuet, qui intervient dans le débat du 22 novembre 1886, il se montre assez paradoxal. Il revient sur le choix de l’agriculture en prenant à contre-pied le sentiment ordinaire qui n’y trouve rien à redire. Lui considère que c’est une curieuse idée que « de vouloir faire des viticulteurs à un moment où la vigne manque aux bras et non les bras à la vigne ». Mais ce n’est pas dans cette critique – qui n’a que les apparences de la logique et qui témoigne plutôt de sa méfiance à l’égard du monde rural – qu’il se montre le plus percutant et aussi le plus surprenant. C’est lorsqu’il préconise une conception du travail qu’il veut différente. En effet, il remet en cause la philosophie du travail et de son organisation qui, à ses yeux, sous-tend les conceptions de ses adversaires. Il dénonce le travail conçu comme « un châtiment », « ce travail-peine qui plaît tant à l’esprit de certains collègues de la droite, probablement parce qu’il rappelle le péché originel et le reste ». Pour lui, le modèle se trouve à l’établissement pénitentiaire de Moissel, en Seine-et-Oise, parce que le travail y est organisé selon lui d’après le principe fourriériste de l’attraction, une attraction qui n’est autre que celle que procure l’intérêt pécuniaire. « C’est ce stimulant de l’argent qui a été le plus puissant réformateur de la colonie »...29
31Le leader blanquiste, Édouard Vaillant, qui intervient plus régulièrement, le fait de façon moins déconcertante. C’est lui qui, finalement, se montre, si l’on veut, le plus « moderne », mais il n’est pas si loin de ses collègues philanthropes lorsqu’il dit déclare : « On ne résout pas pénitentiairement un problème d’éducation ». Pour lui, la révolte était inévitable et l’administration est coupable de ne pas l’avoir prévue parce qu’ » on ne comprend pas que, quand héréditairement l’enfant est victime d’un passé social ou accidentellement d’un présent encore détestable, où la société est plus que lui, plus que ses parents, responsable de ces fautes qu’on lui reproche et qu’on punit, on ne comprend pas que plus l’enfant est éloigné de la voie normale parmi les hommes et les citoyens, plus il faut lui venir en aide par tous les efforts possibles, l’élever physiquement et intellectuellement à ce niveau »30. Ce qu’il faut mettre sur pied, ce ne sont pas des écoles d’agriculture, mais des lieux d’éducation physique et intellectuelle « où l’organisme se referait matériellement en même temps qu’une instruction générale serait donnée comme dans les écoles de la Ville, aboutissant là à une instruction professionnelle agricole d’application facile et avantageuse, soit dans les domaines de la Ville ou du département, soit ailleurs ». C’est l’instruction, et elle seule, qui fera de ces enfants des adultes. Et ce n’est pas le travail imposé, surtout s’il profite à des intérêts privés qui deviendraient ainsi « des éléments de concurrence pour leurs frères ouvriers ». C’est donc la question du travail et de sa fonction qui est ainsi posée dans une alternative, travail ou instruction, travail et instruction, qui n’a pas fini de nous interroger31.
32Le 25 mars suivant, Vaillant propose le retrait des enfants de la Seine de tous les établissements pénitentiaires et religieux, et de toutes les colonies agricoles, dans les plus brefs délais. Il invite le Parlement à « supprimer par une loi ces établissements dangereux, restes de la barbarie, et à leur substituer, pour une éducation aussi complète que possible et un traitement hygiénique à la fois physique et mental, des institutions en rapport avec les données de la science et les devoirs de tutelle paternelle de l’État, des départements et des communes envers leurs enfants adoptifs ». Cette proposition est adoptée par 46 voix contre 16.
33Au-delà de Porquerolles, l’épilogue de cette histoire, en tout cas l’un des épilogues, est le vote de la loi de 1889 sur la protection de l’enfance maltraitée et moralement abandonnée, et celle de 1904 sur l’enfance assistée. La première prévoit la déchéance paternelle et la mise sous surveillance des établissements privés. Les deux conduisent à transférer à l’État la responsabilité des uns et des autres, avec la volonté explicite de supprimer l’exploitation économique ou morale de ces enfants.
34Mais on sait que cette avancée n’a pas clos le débat et que, dans le cadre pénitentiaire, les colonies ont perduré et, avec elle, une conception de la mise aux normes donnant une place prépondérante au travail manuel, industriel en particulier. Mais c’est là une autre histoire. On ne peut pas dire qu’elle soit inactuelle.
Notes de bas de page
1 Cette population, qui habite le village, a hérité de baux emphytéotiques concédés à des vétérans de l’armée impériale au début du siècle. Ces baux arrivent à échéance et sont une source de désaccord avec le propriétaire.
2 L’Intransigeant des 28 juillet 1886 (« Un bagne d’enfants ») et 11 février 1887 (« Les bourreaux d’enfants »).
3 L’hebdomadaire La Famille, fondé en 1878, fait partie du groupe de La République française. Son titre complet est « La semaine républicaine de la Famille, hebdomadaire de lectures populaires ».
4 Cet établissement a été fondé par le comte de Pourtalès, philanthrope d’origine suisse, en 1860. Il a été dissous en 1878, avec 144 détenus, après le rachat de l’île par des affairistes belges. Sa longue histoire a été troublée par d’assez nombreux incidents. Le principal fut une révolte qui, en octobre 1866, se solda par 14 morts et 37 arrestations (voir le récit de C. Gritti, Les Enfants de l’île du Levant, Paris, Robert Laffont, 1998).
5 Les renseignements proviennent en particulier du rapport de la troisième commission, dit rapport Navarre, du 12 novembre 1886, des pièces annexes, des réponses imprimées de M. et Mme de Roussen et des registres imprimés des délibérations du conseil général de la Seine et du conseil municipal de Paris, que l’on peut consulter à la Bibliothèque administrative de la Ville de Paris.
6 Déposition du 17 novembre 1886 devant le conseil général.
7 Dr H. Thulié, Les Enfants assistés de la Seine, Paris, Bibliothèque de l’Assistance publique/Bureaux du progrès médical et Delahaye et Lecrosnier, 1887, p. 357.
8 Strauss sera le fondateur de la Revue philanthropique en 1897 et ministre de l’Hygiène et de l’Assistance en 1924. Sur la politique d’assistance des républicains et le rôle de Strauss en particulier, voir V. Antomarchi, Politique et famille sous la IIIe République 1870-1914, Paris, L’Harmattan, 2000 ; C. Bec, Assistance et République, Paris, Éd. de l’Atelier, 1994 ; C. Rollet-Échallier, La Politique à l’égard de la petite enfance sous la IIIe République, Paris, INED, 1990.
9 Intervention de Curé au conseil municipal de Paris, 20 novembre 1886.
10 Rapports du 27 avril annexé à la déposition de Roussen (n° 19, p. 28) et du 26 décembre annexé au rapport Navarre (n° 30, p. 34-35).
11 Rapport Navarre, p. 11. Les journées de travail sont de 9 h en hiver. Certains jeunes sont employés aux cuisines, à la boulangerie et autres travaux domestiques.
12 Paul Strauss, préface à P. Feillet, De l’Assistance publique à Paris, Paris, 1888.
13 Séance du 17 novembre 1886.
14 Lettre adressée de Paris à l’inspecteur de l’Assistance publique Savouré Bonville, annexe n° 16 de la déposition L. de Roussen, p. 26-27.
15 Intervention à la séance du 20 novembre 1886.
16 Cette lettre fait suite à la noyade d'un enfant dans un puits lors d'un chahut. Elle est reproduite en annexe du rapport Navarre, p. 43.
17 Le Figaro, 27 juillet 1886. Le Gaulois du même jour lui fait dire : « Je n’ai pas d’enfants et j’ai cru bien faire en m’occupant des pauvres petits que l’Assistance publique, impuissante à discipliner, s’apprête à jeter dans les milieux de corruption des pénitenciers ».
18 Réponse de Mme de Roussen au rapport Navarre (Conseil général de la Seine) sur les événements de Porquerolles, Paris, Dupont, 1886, p. 22. Nous avons appris, grâce à Jacques Beyriès (que nous remercions), qu’une statue de Mme de Roussen existait à Condom, ville qu’elle a donc marquée par une action philanthropique que son mari a prolongée.
19 En même temps qu’une « école de réforme » en métropole, à Izeure, pour les filles indisciplinées.
20 Commissionnaire en vins, Rousselle est républicain socialiste, très critique vis-à-vis des opportunistes, mais il défend « son » Service et démissionnera de la présidence de la commission lorsque le conseil général décidera de créer une commission d’enquête sur son fonctionnement, le 10 décembre 1886.
21 Au 31 décembre 1885, d’après la discussion budgétaire du 27 décembre 1886.
22 Sont évoqués aussi l’atelier de chapellerie de Villeroy et celui de cordonnerie de Beaufoy.
23 Séance du conseil général du 19 novembre 1886.
24 Ibid., 27 décembre 1886.
25 Peyron, déposition devant le conseil général, 16 novembre 1886.
26 « Les enfants moralement abandonnés » in livraison du 15 mars 1887, tome XLV. En revanche, Thulié estime que le placement groupé est meilleur pour les filles.
27 Très actif dans les débats concernant la santé publique et l’hygiène, ce médecin des pauvres se ralliera plus tard au socialisme et présidera le conseil municipal de Paris en 1898-1899 (voir sa notice in Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, Paris, Éd. de l’Atelier).
28 Débat au conseil général du 20 novembre 1886, p. 646.
29 Ibid., 22 novembre 1886, p. 717-721.
30 Ibid., 19 novembre 1886, p. 616-617.
31 Pour une comparaison, voir J. Lebrun, « Cloîtrer et guérir. La colonie pénitentiaire de La Trappe 1854-1880 », in M. Perrot (dir.), L’impossible prison, Paris, Le Seuil, 1980, p. 236-276 et C. Carlier, La Prison aux champs. Les colonies d’enfants délinquants du nord de la France au XIXe siècle, Paris, Ed. de l’Atelier, 1995.
Auteur
Université de Provence
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