Les narrations de soi et la Mort
p. 73-85
Texte intégral
1La conscience que le sujet a de lui-même se vit dans l’immédiateté de l’instant, dans des réflexes de vie et de survie, des pulsions de mort, dit-on aussi. Mais cette conscience s’élabore également, par des voies beaucoup plus réflexives, dans le cadre de récits que le même sujet tient à propos de lui-même, en dialogue avec les suggestions de tous ordres qu’il reçoit du monde comme de son être propre. L’un de ces récits est des plus singuliers, car il se donne comme totalisant et objectivé, ramassant en une narration unique la représentation de l’être, et d’aucuns l’ont désigné sous la dénomination suggestive d’« illusion biographique »1. Cette illusion, s’il en est, largement contrainte par les réalités et représentations historiques, culturelles, sociales, et bien entendu biographiques, apparaît dans les vécus les plus ordinaires, émergeant çà ou là, par fragment et comme par hasard, lorsque nécessité se fait. Mais elle se couche aussi parfois sur le papier, en une autobiographie, ou bien est collectée, en des circonstances fort singulières puisque le sujet s’y prête, dans le cadre de récits de vie à des fins historienne, ethnographique, ou encore de simple témoignage sur l’exemplarité ou l’exotisme d’un parcours2. Cette représentation biographique se métaphorise encore, à n’en pas douter, dans les méandres d’œuvres plus amples, où l’on raconte en premier lieu une autre histoire, d’autres histoires, celles de cultures ou de peuples, d’événements majeurs, mais au sein desquelles se profile, s’insinue, se projette l’ombre portée, le récit du narrateur.
2Mais il est à toute autobiographie, récit de vie ou sentiment biographique un écueil, duquel en ressort peut-être l’exigence sourde. Cet écueil est celui de l’épisode manquant, inévitablement dérobé à la maîtrise du narrateur, et qui est celui de la mort3. Écueil véritablement, car la prétention autobiographique, pour autant qu’elle entend dérouler la cohérence d’un cheminement, consiste bien à en maîtriser l’ensemble, car seule est porteuse de sens la globalité du récit. Quelle démonstrativité de soi peut avoir une relation inachevée ? Quel sens un récit dont on ne connaît pas la fin, et cela au double sens du terme : achèvement et, en conséquence, finalité ? Mais comment raconter sa vie, lorsqu’on n’a pas été mort ? Ma toute petite fille, âgée à peine de deux ans, a déposé cet été, sur l’herbe d’un gazon, sa première défécation maîtrisée. Elle s’est retournée vers elle – elle-même pourrait-on dire – avec étonnement, et l’a dénommée sans hésiter et avec un sourire : « Mon bébé. » Aucune conscience claire encore d’aucun détachement de l’être à lui-même, d’aucune mort possible à soi. À l’autre bout du parcours ma mère, âgée de 82 ans, livra à ses enfants assemblés autour de son lit de brève agonie son ultime parole : « Je vous montre le chemin. » Aucun écart ici, ou peu s’en faut, entre la factualité de la mort et son récit. Le corps ou la vie, rassasiés de jours, acceptent et se fondent dans leur finitude.
3Mais entre ces deux lisères il y a, par force, une négociation constante entre le sujet et l’inéluctabilité de son terme, afin d’intégrer cette dernière dans une cohérence narrative. Ce dialogue s’opère globalement dans le cadre de l’identité narrative du sujet. C’est-à-dire non seulement dans le cadre de récits simples, lisibles au premier contour, mais aussi dans l’entrelacement, la solidarisation de l’ensemble des récits au sein desquels tout sujet est pris : récits intime, familial, social, historique, Grand Récit, entendant par cette dernière dénomination les récits à l’horizon descriptif le plus large, eschatologiques, universalisants, plus englobants que le récit historique lui-même.
4La mort lorsqu’elle reste présumée lointaine, lorsqu’elle est un motif du récit sans danger pour la vie, est amplement jouée, au sens premier du terme. Pan ! Pan ! Je suis mort ! Quel plaisir que de mourir et remourir cent fois, glorieux d’être tombé et de revivre encore, retourner au combat fort des morts accomplies, et de se relever vivant, cow-boy ou indien selon que l’on sera, qui sait, plus tard, gendarme ou insoumis. Ne faut-il pas mourir pour être un héros ? Cette nécessité, qui apparaît ici comme anodine, traverse pourtant, comme une exigence latente majeure, nombre des représentations intimes du vécu biographique, et cela jusque dans l’âge adulte. Car le fait d’avoir été mort apparaît comme nécessaire à la complétude du récit – un récit certes littéralement déchronologisé – et à la force du vivant. Accompli de sa mort. L’on ne meurt pas deux fois. C’est là une donnée qui, quoique convoquant ici des sources fort menues, se retrouve dans bien des témoignages plus saillants d’ordre anthropologique4.
5Jean-Marie-Gustave Le Clézio, dans Terra Amata, retrace le songe du petit garçon bien nommé Chancelade qui, suivant l’enterrement de son père, s’imagine à la place du mort :
« Il pensa qu’il aimerait bien monter dans la belle voiture noire, et s’allonger sur les coussins rouges, et se laisser doucement emporter ainsi, autour de la place. Il regarderait le cortège le suivre en comptant ses pas, et il ferait des signes aux badauds postés le long des trottoirs. Certains enlèveraient leurs chapeaux en signe de respect, et des femmes feraient le signe de croix furtivement en baissant les yeux.
[...] Chancelade pensa qu’il était à l’intérieur du cercueil. Il avait les deux mains jointes sur son ventre, les yeux fermés, les narines fermées, les oreilles et la bouche fermées. Sur le couvercle du cercueil, on avait mis beaucoup de gerbes, et sur l’une d’elles, il y avait écrit, en lettres dorées : “Pour mon regretté moi-même”. »5
6L’on m’a rapporté un songe semblable. Le témoin s’en va au village, quérir des cigarettes, et s’étonne de vieilles personnes qui s’acheminent, par petits groupes, vers son quartier. Il n’y a plus de cigarettes au bureau de tabac, mais le buraliste en offre une au songeur, lui affirmant en riant que c’est vraiment la dernière, comme celle du condamné. Le songeur la fume sur un banc, assis au soleil, profitant des rayons clairs du matin. En revenant sur ses pas, il constate que l’attroupement a lieu vraiment tout près de chez lui. Pourtant, lui semble-t-il, aucun de ses voisins n’est mort. Que donc se passe-t-il ? Il s’approche et l’attroupement devient compact. Car il s’assemble devant sa maison. Il pénètre en celle-ci où la famille pleure et, entrant dans sa chambre, il se découvre gisant sur le lit, mort. Il n’est qu’un ectoplasme, qui rôde encore à l’entour de son propre cadavre. Il suit non sans plaisir son propre convoi funèbre et découvre, au premier rang, une jeune femme en deuil et en pleurs, belle comme la vie, avec laquelle il se sent immédiatement de profondes affinités. Son prochain amour est arrivé trop tard. À force d’y penser, une chanson dansante se forme dans sa tête :
« Mais pourquoi es-tu venue si tard
et n’es-tu pas venue avant que je ne meure,
Mon amour j’aurais aimé pouvoir t’aimer
avant le jour maudit de mon enterrement »...
7L’on retrouve en ces songes, comme en d’autres récits que j’évoquerai ci-après sans plus le souligner, ce désir assez commun d’intégrer dans son expérience l’expérience concrète d’une mort encore ancrée dans le vivant, d’enrichir la vie de cette pérégrination dernière du corps qui lui est dérobée, jusqu’à l’ensevelissement. Assister à son propre enterrement pour récupérer aussi cette confrontation majeure et narcissique du soi à soi, reflétée dans la compassion d’autruis auxquels on dérobe et desquels on dévoile, par la position de mort, la vérité des sentiments. Qui sera là à suivre mon convoi funèbre, et qui me pleurera ? L’on sait que ce désir d’ultime confrontation à autrui du mort conscient, faisant le bilan de son intégration sociale, perdure longuement dans la vie. Il y a, dans la ténacité partagée d’un tel songe, l’inquiétude d’une vérité qui reste à venir. Car c’est l’étrange épisode dont on est enfin le héros sans pouvoir être le témoin, ni n’en tirer aucune gloire.
8Le désir commun de maîtriser la complétude du récit s’exprime aussi dans des préoccupations concrètes plus ordinaires. Ainsi dans la volonté inquiète de s’assurer du lieu de sa sépulture, de bien choisir sa tombe, pierre, marbre, couleur, forme, inscription, décorations, emplacement précis au cimetière, au soleil ou à l’ombre, fleurs et couronnes, ensevelissement ou crémation. S’il y a à ces soucis bien des raisons invoquées, d’autant qu’on s’approche du terme, ils relèvent aussi d’une préoccupation très précoce, encore lointaine de l’ultime passage, dont on pourrait décliner de nombreuses motivations mais dont maintes sont spécifiquement narratives pour assurer la cohérence, in fine, de son inscription dans un récit familial, social, historique selon le cas, voire l’adéquation, ad vitam aeternam, de l’intime à un Grand Récit. C’est ainsi que le recul de l’ensevelissement face à la crémation se légitime fréquemment du recul confluent d’une croyance religieuse à une vie après la mort – exit la « résurrection des morts »-, la dispersion des cendres étant alors plus adéquate à une redispersion immédiate de l’être dans l’Univers, duquel il se sent issu comme une concrétion éphémère et aléatoire. Outre une multitude de « Citoyens du Monde », dont le récit social, reliant un récit religieux défait au chant d’une République perdue, prend des allures eschatologiques, j’en connais aujourd’hui quelques-uns qui, désireux de se fondre au Grand Tout, rêvent d’être engloutis en mer, afin de rejoindre au plus tôt la « Soupe Primitive », cet instant étendu ou rien encore n’était distinct, où tout encore était à naître, Grand Récit de rétrospection par le moyen duquel la mort se fond à l’origine. Le succès étonnant et durable de quelques astrophysiciens – tels Hubert Reeves ou Trinh Xuan Thuan – comme véritables « conteurs » (le terme est souvent avancé) d’une nouvelle cosmogonie tient à cette prise en charge, par leur récit, du sentiment de la destinée de l’homme comme partie intégrante de l’Univers6.
9L’on connaît aussi cet étrange jeu qui surgit quelquefois, et qui consiste à imaginer son épitaphe, tentant de résumer en un trait, souvent sur un mode facétieux mais non moins significatif, l’exactitude d’une existence. L’épitaphe est lancée à la cantonade, comme une boutade d’autodérision, mais elle secrète un important message. N’oubliez pas ce que je fus ou voulus être. Ci-gît Piron qui ne fut rien – Pas même académicien7. La mort est à nouveau narrativement anticipée, pour être mise en conformité avec le sentiment de l’être, et enrichir la vie d’un épisode de durée, définitif, post-mortem, dans la justesse intimement désirée d’une mémoire à venir. Épitaphe. Récit de ma vie quand j’étais mort.
10Il faut mourir pour naître, dit un adage commun. L’on entend généralement par cela qu’il faut bien accepter de mourir, si l’on veut bien jouir d’avoir vécu. Mais à un autre degré, l’on pourrait y entendre aussi que l’obligation de mourir ne soit pas cet épisode vulgairement subi mais plus justement un acte, dont la teneur décidée soit en harmonie avec le récit de soi. Choisir sa mort procède d’une esthétisation générale de la vie par la conformation de son terme à la teneur du récit. Cette libéralité imaginaire – quoiqu’elle conduise à quelques suicides – envers la mort est naturellement l’apanage de la jeunesse, bien qu’elle ne s’y limite pas. À mourir pour mourir, je choisis l’âge tendre8, chante-t-on à trente ans. La mort est prise, épousée comme un amour sans retour. La force du propos libère de la déchéance d’une mort à venir et qui serait subie, du flétrissement du corps sous les dentelles, et l’on peut mourir bien plus tard, éternellement jeune, ayant acquis comme inaliénable à l’être son envol dans une fleur de l’âge inaltérée sous les rides du temps. Les mythes de Rimbaud, de James Dean ou de Gérard Philippe tiennent pareillement, et parce qu’ils furent, paradoxalement et dramatiquement quant à eux, réellement morts jeunes, à la soustraction d’une mort subie au profit d’une inépuisable jeunesse. Leur mort précoce est consubstantielle au mythe de leur jeunesse.
11Il faut mourir pour naître. La vérité feuilletée de cette assertion s’exprime encore dans des expériences narrées de la mort, données comme nécessaires à la naissance de l’être à lui-même. Il ne s’agit pas, ici, de la mort réelle, totale, dont on serait miraculeusement revenu, mais d’épisodes dramatiques, convulsifs, tentatives de suicide, overdoses, enfermements, dont l’être ressort comme renouvelé. J’ai observé cela au sein de récits de vie recueillis il y a quelques années dans le cadre d’une recherche sur la grande marginalité9. Mais ce qui frappe là n’est pas ce que l’on comprend fort bien, le sentiment d’une renaissance au sortir d’un événement traumatique – que l’on pourrait considérer comme recherché-, mais la constance quasi absolue de l’épisode. Car celui-ci s’affirme aussi, avec la même force du sens énoncé, par le biais d’épreuves moins marquantes : visions enfantines de la mort, hallucinations, récurrence d’un rêve de mort, ou seulement parcours initiatiques ou voyages au lointain, éloignements de soi à soi. Les témoins parlent inévitablement en terme de mort, sans aucune distance à la possible nuance du mot, et apparaît tout aussi inévitablement le leitmotiv de la renaissance.
« Je suis éternel, me dit Yannick, suite à toutes les morts que j’ai vécues. J’ai dit que je vivrai jusqu’à cent cinquante ans. »
« À partir de ce moment-là, me dit Zérro, j’ai considéré que j’étais mort. Donc je n’avais plus aucune peur de la mort. J’avais une espèce de préhension de la vie très facile. »
« Et je me suis éveillée, dit Anne, en ayant la sensation d’avoir assimilé une autre personne que moi-même. »
12L’on peut interpréter cela, dans le cadre de ces récits de parcours chaotiques, en recherche devrais-je dire, comme la narration d’une mort sociale, la mort de l’être à son impossibilité initiale, afin de devenir, par un éloignement momentané mais radical à soi – ce que revendique l’emploi du terme mort -, conforme à soi-même, et recentré au monde. Mais c’est aussi, tous les récits le montrent avec clarté, une mort aux illusions malmenées de l’enfance, afin d’en retrouver la liberté perdue, paradoxe d’un récit toujours construit en boucle, revenant sans cesse à son point inaugural. C’est encore, par le biais du récit, un apprivoisement de la peur de la mort, une mort à ses peurs, une mort à la mort par le fait d’être mort, qui permet de recouvrer le vivant. On ne meurt pas deux fois. Accompli de sa mort, à nouveau.
13S’il s’agit ici de récits produits et recueillis dans un contexte bien déterminé et dont les nécessités sont vives, l’on pourrait proposer une valeur beaucoup plus large à leur tension par le détour des contes merveilleux, quasi universels. L’un des propos fondamentaux des contes merveilleux fut en effet pareillement de narrer et de réaliser métaphoriquement, par la production de scénarios sans cesse répétés, le voyage dans l’Au-delà, une pérégrination du sujet au plus loin de lui-même, « étranger à lui-même » dit Nicole Belmont, afin d’opérer le « déni de l’irréversibilité du temps humain », le « déni de la mort »10. Les contes merveilleux proposent une matrice narrative prospective par l’assimilation intime de laquelle le sujet a vaincu la mort puisqu’il revient de son voyage. La mort est déjà intégrée dans le territoire narratif du sujet comme ayant été accomplie.
14L’on a souvent noté que les autobiographies, récits de soi des plus développés, réflexifs, et bien entendu individualisés, avaient en tant que rétrospections la vocation d’intégrer dans un « récit idyllique », ordonné de consécutions et de conséquences, « ce qui fut par ailleurs déchiré »11. Tirer d’un seul fil le récit de ce qui fut rompu, éclaté, en des temporalités souvent vécues comme hétérogènes, en discontinuité. Qui se souvient vraiment de ce trajet intime par lequel l’enfant qu’il fut s’est échappé de lui-même pour devenir adulte ? Le travail autobiographique tend, entre autres, à réparer le déchirement narratif.
15Mais, plus avant, l’on peut voir aussi en elles un labeur de capitalisation narrative qui tend à démontrer, par l’accumulation chargée des épisodes et motifs, que le sujet a vécu. Il y a comme le dressement face à la mort, et en premier lieu qui sait contre elle, d’un mausolée du vivant dont l’écriture est la matière. Mausolée, en effet, car l’autobiographe travaille à cette étrange et véritable confluence de la vie et du récit, du récit et de l’encre. Épisode par épisode et page à page, ligne à ligne et mot à mot, le récit s’affirme, s’opère irréversiblement et se fige dans l’encre, déjà vécu, déjà narré, absorbé et asséché dans la trame du papier en hiéroglyphes du souvenir. L’autobiographe le contemple comme un portrait post-mortem puisque ce récit est supposé, nolens volens, lui survivre. L’autobiographe, inévitablement, dialogue avec la mort, ne serait-ce que parce qu’il s’écrit, et littéralement s’épanche. Et le rêve secret de tout autobiographe serait de faire « coïncider la fin de sa vie et la fin du récit »12. L’écoulement de l’encre et son assèchement deviennent figure de la mort figeant le récit de la vie, comme une coagulation13. La masse même du récit de vie, l’évidence encore pleine de ce qui doit mourir, se met à dialoguer avec la mort. Georges Fontane, dans Les Quatre Temps ou la vie d’un mineur cévenol (1971), a donné de ce dialogue une fort belle illustration. Ainsi ouvre-t-il son livre :
« Hé ! Hop, terminé. Ne te retourne pas, c’est inutile. La soupape d’admission est étanche. Sans te consulter, on t’a tiré du néant, doté d’une coquille. Te voilà hissé sur la plate-forme des vivants. Tu ne sais où tu vas, encore moins d’où tu viens. Roule maintenant, roule... roule jusqu’au brisement de ta coquille et ceux qui assisteront à ce brisement en pleureront... ne sachant pas en rire.
Les manches retroussées jusqu’aux épaules, je plonge le bras au plus profond d’une mare à l’eau verdie par le temps. Je ramasse tout ce qui est à portée de ma main. Je retire des branches entières qu’aucun élément ne semble avoir altérées. D’autres se sont brisées au moindre contact sans que je puisse reconstituer la plus infime partie des rameaux qui les composaient. Ainsi vont nos souvenirs : d’aucuns restent vivaces malgré les jours et les nuits qui les éloignent de nous alors que certains tombent et s’effritent aussitôt dans la mare opaque de l’oubli. Quel plaisir de pouvoir retirer intactes à la surface certaines images que notre mémoire semblait avoir laissé enliser à jamais. Quelle joie que de restaurer bribe par bribe une figurine qui nous ramène à l’aube de notre jour. »14
16Obsession de la boucle, toujours. L’aube de notre jour.
17Tout au long de l’ouvrage surgit l’interrogation lancinante du sens. Et au bout du livre apparaît cette belle requête : « Seigneur, ouvre ta porte aux braconniers »15, ceux qui, par tous les modes du questionnement, ont quêté fiévreusement la signification d’une destinée.
« J’attends avec émoi la suprême “éjection”.
Quand la coquille se brisera tombant sur la “grand route” vers où partiras-tu, petite “fumée bleue” qu’emportera le vent ?
Serai-je même sûr d’avoir vécu ?
Est-ce un rêve ? Une illusion ? »16
18De nombreux récits autobiographiques se tiennent toutefois au loin de cette interrogation ardente. Ils se présentent comme des mémoires au ton plus léger, retirant, de « la mare opaque de l’oubli », quelques épisodes saillants, pittoresques, savoureux, selon une dynamique qui semblerait vouloir plutôt conférer un ton au récit, une couleur propre à l’auteur. Mais si le dialogue avec la mort ne s’offre pas en premier plan, comme une interrogation majeure, il semble resurgir dans certaines évocations dont la récurrence des motifs, d’un auteur à l’autre, nous fait signe.
19Il en est ainsi de la convocation, à l’orée du récit, d’une connivence précoce avec la mort (quelquefois dotée d’un érotisme latent ou avoué), par la relation de sa première découverte ou le rappel nostalgique d’un monde disparu qui identifie furtivement le narrateur. Monde de fantômes, de revenants, d’êtres fantastiques décrits comme s’évanouissant à jamais devant le grand bruit de l’Histoire. L’on trouve cela chez Mistral, dans Memori e raconte17, chez André Chamson, dans Les quatre éléments et Le chiffre de nos jours18, dans Histoire d’une jeunesse, d’Élias Canetti19, ou dans certains témoignages narratifs et oraux anciens collectés avec soin comme celui du vieux Cazaux recueilli par Jean-François Bladé dans ses Contes populaires de la Gascogne20. Tous relatent, avec plus ou moins de distance quant à la véracité des faits rapportés mais avec la même fascination, une rencontre enfantine initiatrice avec l’Au-delà. Tous de même rapportent, avec un attachement intimement définitoire, avoir été bercés par une langue oubliée – le provençal, le cévenol, le gascon (qui certes sont des dialectes), l’allemand pour Canetti (dont le premier tome de son Histoire est intitulé « La langue sauvée »)-, langue qui est précisément la langue des morts, celle d’êtres disparaissants. Ces auteurs ancrent donc leurs origines, pour reprendre le surtitre attribué par Frédéric Mistral à ses Mémoires et récits, outre une expérience parfois concrète de la mort, dans le monde déjà évanescent des disparus, dans la disparition d’êtres tutélaires, d’une langue éminemment matricielle, ensemble qui préfigure leur propension à disparaître, la naturalité de leur propre disparition. Ils sont nés en connivence avec un monde qui déjà n’est plus. S’il s’agit particulièrement, chez ces auteurs, d’un ensevelissement opéré par les grandes mutations de l’Histoire, au sein d’une acculturation du parcours biographique – l’avènement du Progrès bousculant les mondes anciens -21, il n’y en a pas moins, par la superposition et la solidarisation d’un récit historique et du récit biographique, l’énonciation d’un ensevelissement à soi, l’amorce précoce du deuil biographique.
20Le deuil biographique, la préfiguration de la mort de l’écrivant tendent encore à gîter au sein de toute ample écriture, quand bien même celle-ci n’a pas pour objet son auteur. Cela est vrai, notablement, des grandes œuvres scientifiques à caractère narratif, et donc plus particulièrement historiennes ou ethnographiques. Ici, le récit du sujet sur lui-même n’apparaît que dans les interstices ou aux marges de l’œuvre, à ses confins, dans son prétexte, son paratexte. Les folkloristes des traditions orales du siècle dernier, méridionaux particulièrement, ont singulièrement bien illustré cette tendance discrète. L’objet de leur quête, celle de la parole ancestrale d’un peuple mythifié, s’évanouissant devant la modernité, déjà disparu, s’y prêtait certes, de même que dans les exemples précédents. Mais leur œuvre, engloutissant son auteur avec le peuple lui-même, fut terriblement mortuaire, bien au-delà de ce que réclamait le simple regard du collecteur22.
21Ainsi Jean-François Bladé (1827-1900), folkloriste érudit, en dialogue avec les instances scientifiques de son temps et ayant opéré de vastes et consciencieuses collectes selon les critères de l’époque – quoique l’on en dise23 -, entretint-il avec les contes et chants populaires de la Gascogne, avec le « peuple » gascon, une relation de passeur vers les rives de la mort, d’ensevelisseur24. Cela est explicite dans ses somptueuses et larges préfaces, dont on se doute bien qu’il ne les écrivit pas en un seul jour mais dont deux d’entre elles sont néanmoins significativement datées du « 2 novembre, jour de la Fête des Morts »25. Au terme de son introduction aux Poésies populaires, il convoque, pour parrainer les chants du peuple disparu, le souvenir d’un amour inaccomplie, prématurément défunte, la mort, figure de l’Histoire, ensevelissant le vif26. Et même s’ensevelit-il lui-même, avec le peuple en question, et comme étant le peuple en question. Ainsi dans cette description du Jour de la Fête des Morts, achevant sa préface aux Contes populaires de la Gascogne.
« je me sentais étranger dans ma terre natale. Près de moi, passaient, en habits de deuil, des paysans silencieux et graves. Ils s’en allaient à l’Office des Morts. Les jeunes cheminaient indifférents. Les vieillards me regardaient, et semblaient évoquer, en passant, un souvenir effacé. »27 (je souligne)
22Et encore, clôturant sa préface au tome 3 de ces mêmes Contes, identifiet-il sa mise au tombeau comme étant celle, définitive, de sa race.
« Je chante ce qui ne vit plus que dans mon âme. Je pleure mes Dieux brisés, mon roi vaincu, mon peuple aboli. Passez. Demain, la mort me fera libre. Demain, ma lyre sera muette. Alors, allez dire à votre César que le vieux barde emporte dans la tombe les chansons des ancêtres, et que le nom même de sa race est à jamais effacé de la mémoire des hommes. »28
23Il y a là une métaphorisation quasi démiurgique de son propre destin, dont on ne peut douter en vérité qu’elle le sauve, en tant que Maître du récit, Grand Narrateur. C’est là, je crois, ici particulièrement amplifiée, valable pour les exemples antérieurs, l’une des dimensions essentielles des narrations de soi. Car la puissance du Verbe reste en quelque sorte comme étant toujours celle du Commencement. Et la jovialité attribuée à Bladé par certains témoignages de ses contemporains ne relève pas d’un paradoxe mais au contraire d’une cohérence, la mort étant éloignée de l’être par le récit distancié qu’il en produit. En secrétant un récit sur lui-même, le narrateur s’en extériorise dans le même mouvement, se mettant dans la position omnipotente de créateur du Récit. C’est alors en vérité, par le moyen du leurre salvateur qui identifie le narrateur au Je mis en scène, un personnage qui meurt dans le récit, et non le narrateur. L’identification permet la disjonction. Puisque le personnage est mort, le narrateur est vif. Pan ! Pan ! Je suis mort. On ne meurt pas deux fois. Il faut mourir pour vivre.
24L’on pourrait citer d’autres exemples de cette projection du récit de soi dans l’œuvre. Celui de Jules Michelet est bien connu, à propos duquel Pierre Nora parle d’« hystérie identitaire », « au sens clinique du mot » précise-t-il, et dont il décrit « le rapport étroit entre les péripéties du Moi et le développement organique de l’œuvre », l’« identification organique à la France », au sein d’une « obsession maladive de la mort »29. Jules Michelet lui-même a maintes fois noté cela, en d’autres termes bien sûr mais non moins lucidement : « J’avais une belle maladie qui assombrit ma jeunesse mais bien propre à l’historien, écrivait-il dans sa préface à l’Histoire de France. J’aimais la mort. »30 Les citations pouvant étayer cette conjonction du récit de soi et du récit de l’histoire, notamment dans le sentiment de mort, se trouveraient chez lui à foison31.
25Mais cette profonde incursion narrative de l’auteur au sein de l’œuvre, négociant à travers elle sa destinée et donc sa finitude, s’opère parfois au plus loin, dans les arcanes de l’œuvre. C’est alors comme une anamorphose éminemment secrète, distendue par son déploiement. Dans les contours d’une scientificité qui demeure incontestable, un infra-récit se trame qui reste à resserrer pour apparaître, à deviner, à l’instar de ces personnages cachés que l’on donne à découvrir aux enfants dans le fouillis d’un dessin32. L’œuvre de Claude Lévi-Strauss serait à cet égard à interroger comme l’une des plus remarquables et des plus maîtrisées. Ce n’est pas le lieu ici de le faire, sauf à titre de suggestion. Le pessimisme radical, la quête avouée quoique à peine esquissée de soi (« Si je savais très bien ce que je suis, je n’aurais peut-être pas eu besoin d’aller me chercher dans des aventures exotiques. »33), le caractère stratégique d’une écriture ouvragée presque pour elle-même (« Je regrette beaucoup de ne pas avoir écrit une œuvre littéraire »34) – dont son auteur reconnaît le cryptage, les « citations voilées »35, la production par un « personnage » à « clés », dont l’une nous est offerte : le « don-quichottisme », entendu comme « le désir obsédant de retrouver le passé derrière le présent »36 -, toutes ces choses nous renvoient à nouveau à la métaphorisation du deuil biographique, via l’ample détour de mondes disparaissants. Étrange relation, d’emblée, que Tristes tropiques, s’ouvrant sur la dénégation d’un rêve impossible – « Je hais les voyages et les explorateurs. »-, parce que l’objet de son désir, clairement révélé en clôture du livre, a pour toujours disparu : « Le monde a commencé sans l’homme et s’achèvera sans lui. [...] adieu sauvages ! adieu voyages ! »37. Apparaît alors comme possiblement significative cette très singulière confession, où l’on découvre, certes sans surprise, que Claude Lévi-Strauss, opérant par le récit le détachement de lui-même qui permet de survivre, n’est évidemment pas quant à lui une petite fille de deux ans :
« je ne peux pas dire que j’écrive dans la joie. Ce serait plutôt dans l’angoisse et même le dégoût. [... quand le livre paraît] C’est mort, c’est terminé, devenu un corps étranger. Le livre passe à travers moi, je suis le lieu où pendant quelques mois ou années, des choses s’élaborent et se mettent en place, et puis elles se séparent comme si c’était une excrétion. [...] Ce ne sont pas mes enfants. »38
26Il y aurait lieu ici, pour terminer, de reprendre dans leur détail, à titre d’éclaircissement ou de comparaison, de distinction d’approche, certaines analyses relatives au récit autobiographique. Le parcours effectué m’emmène fort près, en effet et entre autres, de la synthèse que Jean-François Chiantaretto opère dans De l’acte autobiographique, par des voies pourtant indépendantes. Par exemple note-t-il, à propos de Sartre dans Les Mots, que « le narrateur se décrit comme né de l’incorporation d’un mort »39, remarque que nous pourrions appliquer comme une généralité à presque tous nos récits, le mort incorporé étant souvent soi-même. Ou bien résume-t-il l’acte autobiographique de la façon suivante :
« Écrire sa vie du point de vue de sa mort est de ce fait au cœur de l’entreprise autobiographique, qui met en acte d’écriture un double registre fantasmatique : d’auto-engendrement, de détournement de la mort. »40
27Toutefois, il semblerait que, bien en deçà et bien au-delà de l’acte autobiographique authentifié comme tel, cet évitement de la mort – laquelle reste littéralement inconcevable par tout sujet pour lui-même41 – soit un fait inhérent à toute narration de soi, dont il est le principe de nécessité. Il apparaît sous des formes hétéroclites, précocement et sans cesse jouées, ritualisées, concrétisées dans des pratiques d’anticipation tout à fait ordinaires ou par le biais de vastes récits, travail constant d’un détournement narratif observable comme récurrent dans tout trajet de vie. Le sujet survit à l’impératif de sa mort en extériorisant celle-ci par le récit, la rendant, par la rétrospection narrative, toujours antérieure à l’instant de son énonciation. Il l’intègre et la récupère ainsi, par l’omnipotence du Verbe, dans une expérience déjà passée, renaissant sans fin à lui-même, tel un fantôme plus vif que le vivant.
28Les écritures historienne et ethnographique, qui nous intéressent au premier chef, sont probablement, par l’opportunité métaphorique qu’elles offrent de survivre à des disparitions ou des altérités – des altérations-, l’un des lieux les plus puissants et les plus élaborés de ce détournement.
Notes de bas de page
1 Pierre Bourdieu, « L’illusion biographique », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 62/63, juin 1986, p. 69-72.
2 La bibliographie sur les autobiographies est désormais immense. Pour une vue d’ensemble sur cet objet et ses questions, cf. Daniel Fabre, « Vivre, écrire, archiver », Sociétés et représentations, n° 13, avril 2002, p. 19-42.
3 À propos de la vaste entreprise d’« auto-ethnographie » menée par Michel Leiris, Jean Jamin note que, « à l’instar des bons joueurs, Michel Leiris eut certainement horreur de perdre, bien qu’il sût qu’il manquerait sans cesse une carte pour gagner la partie qu’il avait décidé de mener avec lui-même : l’as de pique, signe de la mort, cette ultime maladresse de la vie que l’ethnographe ne pourrait jamais arranger et qui, toujours, se jouerait sans l’autobiographe. » Michel Leiris, L’homme sans honneur. Notes pour Le sacré dans la vie quotidienne, Paris, Jeanmichelplace, 1994, Jean Jamin, « Présentation », p. 26. Cf. également, faisant aussi écho à l’ensemble de la présente contribution, Nathalie Barberger, Michel Leiris. L’écriture du deuil, Villeneuve d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 1998.
4 « Mais quel tigre pourrait mettre en danger – Celui qui aurait su mourir avant de mourir ! – Un mort ne meurt pas deux fois, – Mort, il est immortel », chante, au milieu du XIXe siècle. Lalan Fakir, poète baul du Bengale. Chants bauls de Lalan Fakir, présentés et traduits par France Bhattacharya, S. l., Fata Morgana, 2000, p. 31.
5 J.M.G. Le Clézio, Terra Amata, Paris, Gallimard, 1967, p. 59-61.
6 Cf. les ouvrages à succès d’Hubert Reeves – directeur de recherches au CNRS-, dont les titres suggèrent décidément la rêverie cosmogonique : Patience dans l’azur (Paris, Seuil, 1981), Poussières d’étoiles (Paris, Seuil, 1984), L’heure de s’enivrer (Paris, Seuil, 1986)... Hubert Reeves fut fréquemment convoqué, dans les médias nationaux ou les manifestations locales, comme Grand Narrateur de l’Univers. Un DVD lui a dernièrement été consacré – dont Le journal du CNRS s’est fait l’écho – sous le titre Hubert Reeves. Conteur d’étoiles (Digipack DVD, film réalisé par Iolande Cardin-Rossignol, produit et distribué par l’Office national du film du Canada, 2003. Le journal du CNRS, n° 166-167, novembre-décembre 2003, p. 42). Trinh Xuan Thuan, professeur à l’Université de Virginie, est doté du même profil. Son ouvrage récent, au titre semblablement suggestif – rappelant La nostalgie des origines de Mircea Eliade -, Origines. La nostalgie des commencements (Paris, Fayard, 2003), a joui dans le journal Le Monde du 18 novembre 2003 de la publicité suivante, étalée de haut en bas sur une large colonne et sur fond d’étoiles : « Dans un livre magnifiquement illustré, l’astrophysicien Trinh Xuan Thuan narre, avec un rare talent de conteur, chacun des chapitres de l’histoire de l’Univers... [et à la ligne :] Une véritable bible de la genèse du monde. »
7 Les badinages de Piron, recueillis et illustrés par marix, Paris, Radot, [1927], p. 111.
8 Barbara, 1930-1997, À mourir pour mourir, 1964.
9 Jean-Noël Pelen, « Ethnographie du récit », in Béatrice Mésini, Jean-Noël Pelen, Jacques Guilhaumou, Résistances à l’exclusion. Récits de soi et du monde, Aix-en-Provence, Presses de l’Université de Provence, 2004, p. 207-268.
10 Nicole Belmont, Poétique du conte. Essai sur le conte de tradition orale, Paris, Gallimard, 1999, p. 192 et 213.
11 Claude Burgelin, « Écriture de soi, écriture de l’Histoire : esquisses autour d’un conflit », in Jean-François Chiantaretto (dir.), Écriture de soi, écriture de l’histoire, Paris, In Press, 1997, 97-106, p. 100.
12 Jacques Lecarme, « L’autobiographie dans l’Histoire comme catastrophe », in J.-F. Chiantaretto, op. cit., 23-41, p. 35.
13 Jean-François Chiantaretto parle pareillement d’une « coagulation du sujet (l’auteur en personne) dans son écriture. » De l’acte autobiographique. Le psychanalyste et l’écriture autobiographique, Paris, Champ Vallon, 1995, p. 278.
14 Georges Fontane, Les Quatre Temps ou la vie d’un mineur cévenol, Molières-sur-Cèze, 1971, Chez l’Auteur. Rééd. Carcassonne – Alès, GARAE/Hésiode – Club Cévenol, 1988, p. 13.
15 Id., ibid., p. 300.
16 Id., ibid., p. 301.
17 Frédéric Mistral, Mon espelido. Memori e raconte – Mes origines. Mémoires et récits, Paris, Plon, 1906. Cf. en particulier le chapitre III, « Les rois mages ».
18 André Chamson, Les Quatre éléments, Paris, Grasset, 1935 ; idem, Le chiffre de nos jours, Paris, Gallimard, 1954. Cf. en particulier, dans Le chiffre de nos jours, les paragraphes intitulés « Est-ce déjà la mort et l’amour ? » – d’un érotisme net -, et « Maman parlait-elle avec les morts ? »
19 Élias Canetti, Histoire d’une jeunesse. La langue sauvée, Paris, Albin Michel, 1980 (1ère édition 1977). Cf. entre autres les paragraphes « “Kako la gallinita”. Loups et loups-garous » et « La langue magique ».
20 Jean-François Bladé, Contes populaires de la Gascogne, Paris, Maisonneuve, 1886, 3 vol. Cf. dans le tome I la présentation par Bladé de Cazaux, p. XXXIV-XXXV, et dans le tome II le récit intitulé « L’Homme Vert », p. 287-290. J’ai brièvement commenté le personnage de Cazaux et son rapport à Bladé dans Le récit aux miroirs. Essai sur l’expérience narrative, chapitre « La destruction des Temps », à paraître.
21 Cf. Jean-Noël Pelen, « Du Progrès. Émerveillements, aveuglements, résistances », Le Monde alpin et rhodanien, n° 1-3/2001, p. 7-23.
22 Cf. Jean-Noël Pelen, « La destruction des Temps », Le récit aux miroirs.., op. cit.
23 Cf. Jean-François Bladé (1827-1900), Actes du colloque de Lectoure (20 et 21 octobre 1984) réunis par Jean Arrouye, Béziers, Centre International de Documentation Occitane, 1985.
24 Jean-François Bladé, Contes.., op. cit., et Poésies populaires de la Gascogne, Paris, Maisonneuve, 1881-1882, 3 vol.
25 Contes.., tome 1, Poésies.., tome 2.
26 Poésies.., tome 1, p. XXVIII-XXX. Sur cette dernière évocation cf. J. Salles Loustau, « Le chant des sirènes : la part de Bladé », Jean-François Bladé.., op. cit., 191-201, p. 197-198.
27 Poésies.., tome 2, p. XVII.
28 Poésies.., tome 3, p. XIV.
29 Pierre Nora, « Michelet, ou l’hystérie identitaire », in Jacques Le Goff (président), Patrimoine et passions identitaires. Actes des Entretiens du Patrimoine, Paris, Fayard – éditions du patrimoine, 1998, 87-96, p. 87, 88 et 90.
30 Jules Michelet, Histoire de France, préface de 1869, cité par P. Nora, op. cit., p. 91.
31 « Sous la finalité morale de l’Histoire micheletiste, écrivait Roland Barthes, il y a une finalité intime qui désignait tout le passé comme nourriture de Michelet ; toute l’Histoire se dévoile pour que Michelet en vive, pour qu’il obtienne à l’égard de la Mort une familiarité vitale. [...] comme préfiguration de la Mort, l’Histoire permet à l’Historien de vivre sans cesse sa mort [...]. L’Histoire de Michelet est ce Rêve d’une vie et d’une mort réconciliée. » Barthes, « Michelet, l’Histoire et la Mort », Esprit, 1951, repris dans Œuvres complètes, tome 1,1942- 1965, Paris, Seuil, 1993, 91-102, p. 101-102.
32 Cf., pour un exemple de cette inclusion secrète, Jean-Noël Pelen, « Identité narrative et ethnographie. En amical hommage à Daniel Fabre et Charles Camberoque », Cahiers de littérature orale, n° 50, 2001, p. 261-278.
33 Claude Lévi-Strauss, Didier Éribon, De près de loin, Paris, Odile Jacob, 1988. Édition utilisée : 2001, p. 233.
34 Id. ibid., p. 130.
35 Id. ibid., p. 223.
36 Id. ibid., p. 134.
37 Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, Paris, Plon, 1955. Édition utilisée, Paris, UGE, 1966, p. 5 et 374-375.
38 Claude Lévi-Strauss, Didier Éribon, ibid., p. 129-130.
39 Jean-François Chiantaretto, De l’acte autobiographique.., op. cit., p. 228.
40 Id., ibid., p. 280.
41 J.-F. Chiantaretto, ibid., p. 274-275, renvoie notamment sur ce point au texte de Freud, « Actuelles sur la guerre et la mort », (1915), trad. fr. coll., Œuvres complètes. Psychanalyses, XIII, Paris, PUF, 1988, p. 125-155. Entre autres citations : « C’est que la mort propre est irreprésentable [...] dans l’inconscient chacun de nous est convaincu de son immortalité. »
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Les narrations de la mort
Ce livre est cité par
- (2020) From Clouds to the Brain. DOI: 10.1002/9781119779520.refs
- Coraillon, Cédric. (2008) Les deux morts de Louis XIII. Revue d’histoire moderne et contemporaine, 55-1. DOI: 10.3917/rhmc.551.0050
- Vidor, Gian Marco. (2015) Emotions and writing the history of death. An interview with Michel Vovelle, Régis Bertrand and Anne Carol. Mortality, 20. DOI: 10.1080/13576275.2014.984485
Les narrations de la mort
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