La maison des deux Chasses (Kélibia, Tunisie). Approche croisée de l’étude des tableaux de vénerie vandalo-byzantins et des ossements animaux (ve-vie siècles)
p. 307-315
Résumés
La figuration de daims sur la mosaïque de la maison des deux Chasses de Kélibia peut être considérée à première vue comme étant du domaine de l’exotique dans la mesure où cette espèce n’est pas considérée comme endémique dans la région. De même la pratique des différentes techniques de chasse figurées (fauconnerie, rabattage camouflé de perdrix, etc.) ne peut être vérifiée par les moyens classiques de l’archéologie. En revanche, l’étude d’un petit assemblage d’ossements issu des fouilles récentes de ce site a permis d’identifier des os de daim, des bois de cervidés et de restes d’oiseaux dont la caille des blés et le faucon pèlerin révélant ainsi un lien étroit entre les thèmes des mosaïques et certains aspects de la vie quotidienne des occupants de la maison. Outre l’appréciation de la signification des représentations animalières, les ossements révèlent également la diversité de la composition de l’alimentation carnée.
The representation of fallow deer on the mosaic of the Vandal domus “des deux chasses” in Kelibia, Tunisia, can be considered at first glance as being in the domain of the exotic insofar as this species is not considered endemic in the region. Likewise, the practice of different figurative hunting techniques, including falconry and camouflaged partridge beating, cannot be verified by classical means of archeology. In contrast, the study on this site of the associated animal bones from recent excavations has enabled to identify deer bones and antlers, and bird remains including the corn quail and the peregrine falcon thus revealing a close link between the cynegetic themes of the mosaics and real hunting activities undertaken by the occupants of the domus. In addition to the appreciation of the link between the hunting activities of the tenant and representations on the mosaics, the zooarchaeological study also reveals the diversity of the composition of the meat diet in this high status house.
Texte intégral
La domus et son programme décoratif
1La somptueuse maison des deux chasses est située au lieu-dit Bir Ennahal, au cœur de l’antique Clupea, à quelques 150 m au nord du forum et à 4 m au sud du rempart de la cité. Cette vaste demeure à péristyle (fig. 1) se distingue par le nombre et l’originalité de ses salles d’apparat, différentes l’une de l’autre, ainsi que par la richesse de son programme décoratif (Ennaïfer 1999, 233-250, pl. XCIV-CVI). Si les résultats des recherches menées sur ce site ne permettent pas actuellement de suivre dans le détail l’évolution architecturale de l’habitation, ils ont néanmoins conduit à déterminer au moins trois états (Ennaïfer 2002, 223-232).
2C’est au cours de la deuxième moitié du ve siècle apr. J.-C., en pleine époque vandale, qu’est mise en place la première domus édifiée à l’emplacement d’une usine de salaison et de garum, datant de la fin du iie siècle ou de la première moitié du iiie siècle apr. J.-C.
3Ce noyau d’habitation conforme à la tradition romano-africaine a reçu un ensemble de pavements remarquable par la récurrence de ses motifs végétaux à valeur particulière. Il s’agit des galeries du péristyle, ainsi que de l’enfilade de trois pièces (XI-XIII) conduisant au local de retraite où le maître de céans recevait ses hôtes intimes.
4Les espaces étaient ornés de tapis de roses, de mosaïques couvertes d’écailles en guirlandes ou offrant alternativement une ligne de roses et une autre d’hederae (feuilles de lierre) ainsi que de roseaux. Les seuils représentant l’un un rinceau de vignes, l’autre deux palmes dessinées de part et d’autre d’une hedera. Cette prédominance des éléments végétalisés ne peut être considérée simplement comme l’expression d’un répertoire. Elle reflète sans doute les préoccupations du premier commanditaire de ce programme. La présence de toutes ces plantes devait, au-delà de leur sens apotropaïque, souligner l’idée de victoire qui assurait à l’habitation protection et bonheur. Par ailleurs, ces motifs végétaux pouvaient également constituer des références à l’une ou à l’autre sodalités africaines qui organisaient les jeux d’amphithéâtre ou même une allusion à l’une des factions du cirque qui s’occupaient des courses de chevaux.
5Au cours de la première moitié du vie siècle, la maison connait sa première phase de transformation : la domus est alors dotée d’un grand œcus X et d’une nouvelle salle d’apparat IV conçue en forme de T avec trois alcôves, sur le modèle de salles tréflées en usage à l’époque tardive. Cette pièce reçoit au sol un pavement central illustrant différentes séquences cynégétiques (fig. 2).
6À la fin du vie siècle, la demeure se développe vers le nord. On installe l’exèdre VII, salon ou salle à manger intime dont le sol est décoré de l’image deux coursiers affrontés à un modius de prix. Les deux chevaux vainqueurs portent les noms AM[OR] et NYNFICVS. Plus au nord encore est créé, à la même époque, un espace privilégié IX auquel on destine une mosaïque illustrant une partie de chasse dominée par l’effigie de Diane (fig. 3).
7Ainsi cette demeure, en se développant, a gagné en somptuosité et son programme décoratif s’est bien enrichi tout en conservant le premier noyau de pavement qui est resté en usage durant environ deux siècles. Il convient de remarquer, par ailleurs, que ce programme a conservé dans son évolution l’harmonie de ses thèmes. Les scènes figurées introduites ultérieurement par les propriétaires successifs de la maison paraissent liées par leur fonction sémantique. Elles évoquent en premier lieu l’idée de victoire, à travers les coursiers vainqueurs comme par le biais des épisodes cynégétiques où le dominus et son équipe sont saisis en pleine action.
8En outre, la présence des chevaux vainqueurs fait allusion au monde du cirque, tandis que les tableaux de chasses commémorent sans doute des exploits cynégétiques réels menés par le propriétaire qui en tire fierté et puissance. Les parties célébrées avec ostentation reflètent le style de vie propre à la classe sociale du commanditaire de ces belles œuvres.
9L’identification par leur nom de la totalité des chasseurs participant aux deux véneries fait de leurs images des portraits, rend les scènes plus réalistes et l’expression des plus émouvantes.
10La richesse et la variété des épisodes de chasse rapportés nous ont incité à aborder cette approche croisée des animaux figurés sur les deux tableaux de vénerie et de la faune recueillie dans la maison, au cours des travaux entrepris sur le terrain entre 1998 et 2000.
Les tableaux de chasse et l’identification du gibier
Le pavement de la salle IV
11Ce tapis occupe une place centrale dans la pièce et son thème constitue un bon sujet de discussion pour les convives banquetant dans les trois alcôves.
12Il décrit une suite de modes cynégétiques répartis sur quatre registres. La première scène montre le cavalier BONIFATIVS, richement vêtu traquant un lièvre, poursuivi par une meute de lévriers. Son co-équipier INVARIVS, portant le même costume, s’apprête à clouer un sanglier avec son javelot. La bête est prise au piège. Le rabatteur MONTIVS, caché derrière le filet contrôle l’opération.
13Ensuite sont présentées deux techniques de chasse, pratiquées à pied. En effet, au troisième registre, on voit EVRIALVS, portant un faucon1 dressé sur son bras gauche (fig. 4). Ses mains sont protégées par des gants. L’oiseau de proie a les pattes attachées à un cordon. Il est séparé, par l’image, d’un lièvre tapi dans les roseaux, d’un oiseleur également richement vêtu mais une lacune au-dessus de la tête nous fait perdre son nom. Au dernier registre CANDVRIVS avance, caché derrière son cheval (fig. 5). Il cherche à pousser des perdrix gambra dans une nasse2. Son valet tient en laisse un chien tout en surveillant l’opération de près.
14Le gibier figuré sur cette mosaïque est, ainsi, un sanglier, deux lièvres et cinq volatiles. Le grand rapace retiendra également notre attention.
15Dans cette partie de chasse plusieurs techniques sont utilisées pour capturer le lièvre ; on a pratiqué la chasse à courre, une des chasses traditionnelles de l’antiquité gréco-latine (Aymard 1951, 363). Elle est la plus populaire pour plusieurs raisons. Il s’agit d’un sport sans danger qui ne demande pas de matériel particulier. Ensuite la chasse de ce lagomorphe était appréciée et ce gibier se trouve en abondance dans la région. En effet, on a, tout récemment, mis au jour un ensemble de squelettes de ce mammifère à une quarantaine de kilomètres du site étudié, qu’on a assigné au vie siècle3. La prise du lièvre à l’aide d’un rapace est, en revanche, un procédé rarement illustré, pourtant sa capture par l’aigle est connue depuis l’époque homérique. Les deux allusions relevées à ce propos dans l’Iliade (Aymard 1951, 364 note 1, Homère Il. XVII, 674, épisode : Antiloque est envoyé à Achille ; Homère Il. XXII, 310, épisode : mort d’Hector) ne concernent cependant pas l’emploi d’oiseau dressé. Cette technique ne semble entrer en usage que tardivement, aux ve-vie siècles, comme l’atteste la datation des exemples recensés à ce sujet4. La séquence figurée sur le pavement de Kélibia précède le lancement du faucon et le lièvre est encore tapi sous les roseaux. Sur un des deux tableaux de Carthage5, l’oiseau de proie lâché par un cavalier au galop s’est abattu sur un lièvre qui se débat sous ses serres.
16Quant à la chasse au sanglier, elle est une des plus classiques de l’antiquité. Les héros homériques l’ont beaucoup pratiquée et en tiraient un légitime orgueil (Aymard 1951, 298-299). La poursuite de cette bête dangereuse était menée soit à pied soit à cheval comme c’est le cas ici. La proie est acculée au filet et le cavalier est sur le point de lui porter le coup de grâce. Le dernier épisode rapporte un mode de chasse inhabituel.
La chasse de l’espace IX
17Cette partie de vénerie se déroule sur deux registres superposés de part et d’autre d’une aedicula renfermant la statue de Diane chasseresse. Devant le petit temple est disposé un autel entre deux cervidés affrontés (fig. 6). À gauche de la divinité un chasseur tenant une longue fourche lui adresse de la main droite un baiser rituel, afin qu’elle lui accorde beaucoup de gibier (Ennaïfer 1999, 244 n. 85).
18À sa droite et au premier registre deux cavaliers, EVLOGIVS et ANFIO, munis chacun du bâton du dominus ont pris d’assaut un lièvre. La proie saigne. Elle a été saisie par un des sloughis de la meute qui le pourchasse. Au registre suivant, le cavalier NINFICVS exhorte son chien qui affronte un canidé6 acculé contre un arbre. À l’angle droit du pavement l’oiseleur EVLOGIVS cherche à l’aide de gluaux à attraper un oiseau perché au sommet d’un arbre. Son chien, assis devant lui, suit l’action de son maître. De l’autre côté de l’arbre est figuré un cerf en train de s’abreuver. À gauche de l’effigie de Diane est représenté le cavalier FORTVNIO dans une réédition de la scène curieuse de rabattage des perdrix du pavement précédent (fig. 7).
19Enfin, au registre du bas, le maître mosaïste a imaginé une scène encore plus singulière que la précédente. On y voit un cavalier, PREIECTVS, les deux bras levés, une jambe au sol, suppliant son compagnon ANASTASVS pour qu’il n’écrase pas un lièvre blotti à ses pieds. Une autre lecture pourrait interpréter la scène comme la parodie d’un chasseur posant le pied sur sa proie qu’il vient de vaincre.
20Les données stylistiques (Ennaïfer 1999, 246-247) et archéologiques (Ennaïfer 2002, 229) autorisent à considérer la réalisation du tapis de l’espace IX postérieure à celle du pavement de la salle IV.
21Au total, les animaux figurés dans ce tableau consistent en trois cervidés, un carnivore, deux lièvres et au moins sept volatiles. Signalons à propos des cervidés que les mâles sont reconnaissables grâce à leurs ramures. Les deux individus affrontés devant le petit temple présentent des différences morphologiques notables. Celui de gauche possède une tête plus allongée, des bois palmés au bout et a le cou plus gracile. La ligne dessinant le dos de cet animal est rectiligne tandis qu’elle décrit un relief sur le cervidé de droite. En nous référant à la représentation du cerf de barbarie et à celle du daim, on se rendra compte que le contour des deux animaux de notre mosaïque et leurs taches claires permettent de distinguer un cerf et un daim. Le troisième cervidé s’abreuvant s’est avéré également un cerf, par la morphologie des bois, le cou massif, ainsi que par la ligne du dos.
22Il s’agit, en fait, du cerf élaphe qui est attesté en Afrique du Nord depuis le pliocène tardif, alors que le daim en est absent7.
Le matériel ostéologique et les espèces attestées
23Les ossements recueillis au cours des travaux menés sur le site de Bir Ennahal comptent 766 restes. Un tiers de l’effectif de mammifères n’a pu être déterminé, essentiellement à cause du mauvais état de conservation. En effet, les os enfouis dans un sédiment sablonneux acide ont été fortement fragmentés et la surface des os parfois érodée. La faune analysée comporte des rejets de consommation de mammifères d’oiseaux, de poissons et de mollusques ainsi que des animaux intrusifs (fig. 8).
Les mammifères
24Au sein du bétail, le porc domine nettement tandis que le bœuf et les caprinés présentent des effectifs proches. Les huit restes de chevaux et les trois d’ânes ne présentent aucune trace de consommation. Nous noterons la présence de restes de chien et un reste de chat, probablement des animaux de compagnie dans la domus.
25Dans ce matériel faunique, les cervidés sont représentés par le daim européen (Dama dama) et le cerf élaphe (Cervus elaphus barbarus). Si le cerf n’est présent que par un seul os, on dispose pour le daim de cinq restes provenant d’au moins trois individus : ont été identifiés un métacarpe, un os coxal et trois métatarses dont un entier.
26Le contexte de découverte de ces restes de daim est un égout situé sous la rue longeant la maison. Le même remplissage a révélé, par ailleurs, des ossements de porc, de bœuf, de caprinés, un fragment de diaphyse de métatarse de cerf (SD : 20,2 mm) et deux andouillers de cervidé sciés à leur extrémité, ce qui renseigne sur le tronçonnage de matière première.
27La faune chassée comprend également du sanglier, du lièvre et du renard.
Les volatiles
28Dans cette catégorie, les restes de coq sont abondants ; on en compte 169 pièces. L’identification d’un ansériforme de la taille d’une oie cendrée (14 restes) n’a pu être établie avec certitude et il peut s’agir aussi bien d’une forme domestique que sauvage. L’avifaune comprend encore un reste de caille des blés (Coturnix coturnix), un élément de faucon pèlerin et un autre de hibou moyen duc.
La faune marine
29Plusieurs spécimens marins ont été récoltés lors de la fouille. Ils témoignent d’une certaine diversité dans l’approvisionnement. Parmi eux, la famille du mérou occupe une place dominante avec 30 restes. Sur la face latérale d’une vertèbre caudale d’un de ces spécimens, on a décelé une incision fine en rapport avec le filetage du poisson.
30Par ailleurs, on a recueilli dans l’égout signalé déjà plus haut un élément crânien et une vertèbre caudale, découpée appartenant à un grand poisson de la même espèce.
31De cette même canalisation, a été aussi retiré un fragment de vertèbre d’un thon. Et deux restes d’un gros thon ont été retrouvés ailleurs dans le site.
Les mollusques marins
32Un ensemble restreint de 24 restes de mollusques marins a été recensé, renvoyant vers cinq taxons parmi lesquels on rencontre des huîtres et des patelles.
Les reptiles et les amphibiens
33Dans ce groupe, un élément de plastron de tortue marine a été remarqué dans des rejets de consommation comprenant surtout des restes de volatiles, de porcelets et d’agneaux. Le contexte de découverte suggère la consommation de la tortue.
34Enfin, on compte parmi les amphibiens un reste attribué au discoglosse peint. En contexte urbain, cette espèce peut être attirée par les citernes, les puits ou les abreuvoirs.
Confrontation des données archéologiques et des scènes cynégétiques
35L’effectif limité des vestiges de la faune étudiée est le résultat de contraintes imposées par l’état du site et les conditions prévues pour le déroulement de nos recherches sur le terrain. En effet, la maison des deux Chasses avait été dégagée en mai 1977 dans le cadre d’une fouille de sauvetage. Nous n’avons pas eu la possibilité de réexaminer le matériel osseux récolté pendant ce dégagement. Les investigations que nous avons menées par la suite, entre 1998 et 2000, se sont limitées à des sondages et à des opérations de nettoyage.
36En outre, la domus étant en grande partie pavée de mosaïques, elle n’offrait que peu de possibilités de piégeage des déchets alimentaires. Toutefois, malgré la maigre moisson, cette faune s’est révélée riche en renseignements sur l’alimentation.
Les particularités de la faune étudiée et les techniques de chasse illustrées
37L’alimentation carnée est caractérisée dans cette demeure par la prédominance du porc, à côté de la présence d’un gibier à poils très diversifié, de volatiles domestiques et sauvages, d’un éventail assez large de poissons, de tortue marine ainsi que de mollusques.
38Cette faune est, au moins en partie, l’apport d’exploits cynégétiques réels. C’est l’aspect documentaire qui a amené les propriétaires de cette domus à se faire éterniser dans des séquences de poursuites de petit et de gros gibier, pratiquées en milieu naturel, vraisemblablement aux abords de leur domaine rural.
39Les techniques de chasse utilisées au cours des différents épisodes relèvent de procédés réels, bien illustrés sur les mosaïques, notamment la chasse à courre, l’oisellerie et la fauconnerie. La découverte d’un os de faucon pèlerin parmi le lot de volatiles vient, en quelque sorte, attester la réalité de la séquence du pavement de la salle IV.
40Par ailleurs, la figuration des deux modes de chasse à pied –aux gluaux et à l’oiseau de proie – en même temps sur le même tableau est à souligner. Ce cas est à notre connaissance unique. Il témoigne de l’usage de ces deux techniques jusqu’à la fin de l’Antiquité, alors qu’on pensait que la chasse aux gluaux était tombée en désuétude aux ive-ve siècles (Trinquier et Vendries 2009, 71), au moment où apparaissait la chasse au faucon.
41Seul le rabattage camouflé des perdrix est un procédé exceptionnel. Mais son originalité semble plaider pour son authenticité d’autant plus que la présence de la caille des blés pourrait témoigner d’une prise issue de ce procédé de piégeage.
42Au total, les deux œuvres cynégétiques de Kélibia attestent, au-delà de leur fonction protectrice de la domus, la pérennité de la passion des Africains pour la chevauchée. Un sport noble que les propriétaires aiment exercer au milieu de la nature avec un certain faste leur donnant l’occasion d’étaler leur richesse et leur puissance. Outre le plaisir et le divertissement, la chasse constituait pour eux une source non négligeable de ravitaillement en viande. Les restes de pièces consommées, tel que le sanglier, le cerf, le lièvre, le renard, les cailles des blés, que nous avons récupérés sur le site faisaient sans doute partie du gibier capturé comme le montrent les scènes illustrées sur les deux mosaïques.
43Enfin, demeure le problème des cinq éléments appartenant à trois individus de daim. Cet animal étranger à la Tunisie pouvait provenir d’un parc à gibier. Sa présence à Kélibia n’est pas exceptionnelle. En effet, sa consommation a été signalée sur d’autres sites, notamment à Carthage (Balmelle, Bourgeois, Broise, Darmon et Ennaïfer 2002, 606, pl. LXXIII) et sur l’île de Zembra8.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 La restauration d’une lacune affectant la tête de l’oiseau exécutée en tesselles noires a donné au rapace l’aspect d’un faucon pèlerin.
2 Les tesselles reproduisent très fidèlement la morphologie et le plumage de la perdrix gambra ; voir à propos de l’usage du camouflage comme technique de chasse, Ennaïfer 1999, 244-281.
3 Cette faune recueillie dans la tombe T7-98 fouillée par M.H. Fantar en 1998 est en cours d’étude par T. Oueslati. Elle comprenait en sus un squelette d’une hyène rayée pour laquelle une datation radiocarbone a été réalisée par J.-F. Saliège, du Laboratoire d’Océanographie et du Climat : expérimentations et Approches numériques (LOCEAN), à qui nous adressons nos vifs remerciements. Rappelons par ailleurs que le lièvre est attesté à Carthage à l’époque romaine (Weinstock 1995, 115), que le lapin ne fait pas partie de la faune endémique de la Tunisie. L’introduction plus ou moins récente en Tunisie ou au Maroc (Kowalski et Rzebika-Kowalska 1991, 295) ne modifie pas notre conclusion.
4 Ces représentations ornent des mosaïques provenant de :
— Carthage : Gauckler 1910, n° 598 p. 200 ; Baratte et Duval 1978, n° 38, p. 76-78, fig. 69 ; Ghalia 1998, 65 ;
— Carthage : Inv. du Musée du Bardo 3576 ; Blanchard-Lemée, Ennaïfer, Slim H. et L. 1995, 132, fig. 131 ; Ghalia 1998, 63 et 65, pl. XVIIIb ;
— Hergla : Ghalia 1998, 58, 60, 65, 143, 159, 163, 191, fig. 21, pl. XVII,b c, XLV et XLVIII, c ;
— Tabarka : De Coudray-La Blanchère et Gauckler 1896-1897, A23, p. 13 ; Ghalia 1998, 65.
— Les deux derniers exemples sont à placer dans un contexte chrétien.
— Argos (Grèce), Akertröm-Hougen 1974, 86-101, fig. 3, pl. III-IV.
— La chasse au faucon est encore un sport très en vigueur actuellement au cap Bon.
5 Voir supra n° 6, Inv. 3576.
6 Cet animal renvoie par sa taille vers le chacal. L’existence du loup en Afrique du Nord a été longtemps contestée. Mais des données génétiques récentes obtenues en Algérie montrent l’extension du loup gris en Afrique du Nord. Les canidés nord africains comprennent cinq espèces avec le lycaon, le chacal doré, deux espèces de renard et le fennec. La taille et la morphologie du canidé figuré permettent d’évacuer les renards et le fennec. Le lycaon est un chien chasseur dont la répartition se limite aux zones désertiques. On doit douter de la connaissance du lycaon par les mosaïstes et nous resterons sur une identification de chacal, voire de loup.
7 Kowalski et Rzebika-Kowalska 1991, 189. Ces auteurs précisent, p. 190, que le daim est absent de cette région. Dans HAAN, t. I, p. 118, S. Gsell écrit : « on trouve quelques daims près de la frontière de l’Algérie et de la Tunisie, dans la région de la Calle. Ces animaux ne sont pas signalés par les Anciens ». En réalité, cette espèce n’a jamais existé à l’état sauvage en Tunisie. Trois représentations de cet animal sont cependant signalées sur des mosaïques de Tunisie :
— Carthage : Poinssot et Quoniam 1951-1952, 130-143 ; Beschaouch 1978, 34.
— Kef : Poinssot et Quoniam 1951-1952, 157-165, fig. 12 et 15.
— Thuburbo Maius : Inv. Musée du Bardo 2816bis ; Ennaïfer 1978, 86 ; Alexander, Ben Abed Ben Khader, Soren et Spiro 1994, n° 415 p. 96-98, fig. 5, pl. XLIX-LII, LXXIX-LXXX ; Ben Khader et al. 2003, 54, fig. 162.
8 J.-D. Vigne, communication personnelle.
Auteurs
CNRS, HALMA - Histoire Archéologie et Littérature des Mondes anciens, UMR 8164, Université Lille, CNRS, Ministère de la Culture, France
Institut national du Patrimoine (INP), Tunisie
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