Les villes flamandes et la guerre (1379-1385) dans la Chronique dite des Cordeliers
p. 137-159
Texte intégral
1La chronique dite des Cordeliers1, qui tire son nom de ce qui a été longtemps son lieu de conservation, est une chronique universelle, qui commence à la création du monde et s’arrête le 25 juillet 1431. Elle est surtout développée à partir du règne de Philippe VI de Valois. L’auteur, originaire de Wallonie et probourguignon, écrit vers 1432. Son récit a la réputation d’après Gilette Tyl Labory2 de donner des détails inédits sur la Flandre et le Hainaut pour l’histoire du XVe siècle. Est-ce déjà le cas, pour la présentation des troubles de 1379-1385, qui précèdent la formation l’état bourguignon ? Les faits sont connus et ont donné lieu de longue date à de belles études3 : ces villes sont les plus riches de l’Europe du Nord-Ouest et leurs milices sont redoutées. Pour le récit des événements, les principales sources littéraires sont la Chronique des quatre premiers Valois, les Grandes chroniques de France4, Istore et croniques de Flandres, Jean Meyer : les Annales rerum Flandricarum, Anvers 1561, la Chronographia regum francorum, les Antiquités de Flandre de Wielant, la Chronique rimée, la Chronique du Religieux de Saint-Denis, le Memorie Boek de Gand. Le Valenciennois Jean Froissart les évoque en 57 folios dans son deuxième livre5. L’auteur de la Chronique dite des Cordeliers dans ses 24 folios s’en inspire pour partie. La guerre, qui oppose les villes à leur seigneur le comte de Flandre et au roi de France, est dans son récit un moment fort. Malgré des lacunes dans la suite des événements, ils sont présentés du côté du comte et les révoltés figurent en contre point. Les villes sont l’enjeu et le théâtre des opérations. Les tensions sociales, le cours des activités économiques et les difficultés de la vie quotidienne font l’objet de rares notations (I). La puissance militaire des villes et leur organisation sont privilégiées (II). Cette présentation très politique néglige les revendications des villes, montre leur importance et leur originalité dans la vie internationale et met en valeur leurs relations avec le duc Philippe de Bourgogne, qui succède à Louis de Male le 9 janvier 1384 (III).
Les villes enjeu et théâtre des opérations
2Les villes sont l’objet de 307 références. Le terme de ville au singulier, au pluriel ou dans des expressions plusieurs villes, bonnes villes de Flandres, plusieurs bonnes villes, apparaît 66 fois. Trente-six villes sont citées. Sur 241 mentions, plus de 72 % concerne la Flandre6 : les cinq sixièmes pour sa partie occidentale, le reste pour la Flandre orientale. En moyenne chaque ville est citée plus de six fois, neuf le sont plus souvent : Gand (50), Bruges (36), Audenarde (29), Ypres (19), Lille (14), Courtrai (13), Tenremonde (9), Bourbourg (8), Arras (7)7. Deux sont évoquées six fois en Flandre occidentale, Gravelines et Cassel. Les 25 autres le sont moins.
3Les Gantois sont nommés 38 fois sous ce vocable, 25 fois par ceux de Gand et deux fois par plusieurs gens de Gand, grand nombre de gens de Gand. Flamands apparaît 43 fois, avec le nom de la ville accolé trois fois : les flamands de Gand, Ypres, Courtrai. À partir du folio 300, dès 1380, les deux côtés sont désignés par le terme de flamands8. La formule ceux de reste la plus fréquente9. D’autres sont plus rares : les communes de Bruges, Ypres, Courtrai, Audenarde, plusieurs de la communauté, les gens d’Aire, grand nombre de gens de Bruges, gens de plusieurs villes de Flandres, certain nombre de gens de chaque ville.
4Le statut des habitants est précisé quand les circonstances l’exigent. Lorsque les Gantois se rebellent en 1379, certains grands bourgeois d’Ypres demandent au comte des gens d’armes10. Pour l’auteur, les clivages sont plus verticaux qu’horizontaux. En 1382, les Gantois qui souffrent de la disette se portent sur Bruges, le comte qui sort à leur rencontre trouve l’aide de certains membres des quatre métiers de la ville, bouchers, poissonniers, boulangers, tisserands de laine. Quand défait et poursuivi dans Bruges même, il organise sa défense sur le marché, l’autre partie des métiers fraternise avec les révoltés11. La seule autre mention concerne le nouveau capitaine des Gantois Philippe d’Artevelde, présenté comme un brasseur12. L’auteur préfère d’autres oppositions, ainsi quand l’armée royale arrive en novembre 1382 près du pont de Commynes, celle des Français et des Flamands de Courtrai et Ypres. Il rapporte, seul d’ailleurs, lors de l’abandon de nuit de Bergues par les Anglais, le murmure contre eux des femmes et des enfants, qui donne l’alerte13. L’attitude des hommes n’est pas indiquée. L’auteur accorde peu de places aux tensions à l’intérieur des villes. Il ne donne pas l’origine de la révolte de Gand en 1379 et ne décrit pas l’échec d’une tentative de ralliement, il montre dès l’abord les Gantois se portant contre les villes, les forts et les belles maisons des partisans du comte. Il écrit que le comte, en 1381 au siège de Gand, s’en prend à tous les haineux et au pays tenant leur parti, puis cite les blancs chaperons à propos de la sortie d’une soixantaine d’entre eux. L’exemple de dissensions le plus longuement évoqué concerne Philippe d’Artevelde et Bruges. En 1382, il se méfie des Brugeois au point de faire prêter serment à ceux qui lui sont favorables en l’église Sainte-Catherine en dehors de la ville tandis que ses troupes éliminent ses adversaires à l’intérieur14. L’auteur est surtout frappé par la force des solidarités urbaines15 qui se manifestent dans des circonstances dramatiques. Après Pâques 1380, la délégation brugeoise, qui demande à Arras au comte de venir protéger la ville, est composée de plusieurs bourgeois et échevins agissant au nom de tous. À Gramont, lorsque le seigneur d’Enghien fait exécuter sur ordre du comte16 deux ou trois bourgeois de la ville qu’il veut châtier, le commun se trouble contre lui, crie à la trahison17 et l’attaque avec les autres représentants du comte.
5Pour les fortifications, emblématiques des villes et de leurs solidarités, les notations concernent surtout les portes18, qui restent des points vulnérables19. Le premier réflexe du commun de Gramont insurgé20 est de les fermer. La prise d’une porte d’Ypres par les révoltés rappelle qu’elle ne suffit pas toujours pour venir à bout d’une ville. L’auteur relève le démantèlement des portes et des murs qui les encadrent par le vainqueur, en 1380 à Audenarde21 et en 1382 à Bruges22. La notation la plus originale concerne les fossés d’Audenarde en 1383. Les Gantois trouvent peu d’eau dans les fossés car les trous du passage (sic) de la rivière de l’Escaut ont été ouverts pour recevoir plusieurs nefs de Tournai. Ils utilisent le pont des navires pour les traverser23.
6Le reste du paysage et le tissu urbain font l’objet de brèves notations. Les ports de l’Écluse24 et Dunkerque sont signalés pour leurs activités maritimes stratégiques. Le marché d’Ypres25, celui de Bruges et la Halle des échevins de Courtrai (2) sont mentionnés quand ils sont indispensables au récit. L’auteur suggère l’étendue des villes, leur densité en précisant que les chevaliers et gens d’armes en 1379 à Ypres se cachent en plusieurs lieux26. En dehors de Saint-Pierre de Lille pour la sépulture du comte de Flandre, les seuls bâtiments ecclésiastiques évoqués sont en périphérie des villes, quatre abbayes, pour le logement du comte ou du roi de France et de leurs armées, et l’église Sainte-Catherine de Bruges, où Philippe d’Artevelde fait prêter serment à ses partisans27. Les maisons sont citées sept fois, lors des dommages qu’elles subissent28. Deux fois, il est précisé que ce sont de belles maisons29.
7La richesse des villes est évaluée par leurs activités, quand elles sont perturbées par les opérations30. L’auteur observe que le poids de la fiscalité est la principale cause de la rébellion des Flamands. Sans entrer comme Froissart dans le détail, il note que de nouvelles coutumes ont été établies à Gand contre les privilèges de la ville. La première action collective des rebelles en 1379 est d’aller à l’Écluse détruire les maisons sur le port où sont vendues plusieurs marchandises sans taxe – eswerd – au préjudice des marchands de Gand. La guerre et la fiscalité d’exception grèvent l’économie. Les communes de Bruges, Ypres, Courtrai et Audenarde31 se plaignent que la marchandise a perdu toute valeur en Flandres et des grandes aides levées en 1381, pour la guerre du comte contre les Gantois32. Les Brugeois offrent en 1382 l’énorme somme de 120 000 francs, pour éviter le pillage, et les Gantois de grandes sommes d’or33. Les notations les plus nombreuses concernent la pénurie liée aux sièges et aux dévastations34. Audenarde assiégée commence à avoir grande souffrance de vivres, quand ensuite le comte tient la place, il fait souffrir moult de maux à Gand et maintes disettes. Lorsque les Gantois ne les supportent plus, ils décident d’attaquer Bruges et se battent comme gens affamez et hors de sens35.
8Le fonctionnement de la justice dans les villes de Flandres n’est pas évoqué, l’auteur note cependant que Bruges reconnaît être du ressort du Parlement (de Paris) et promet de faire tous ses devoirs envers le roi et sa justice36. Il rapporte surtout les mesures expéditives prises dans le cadre des opérations militaires ou en liaison avec elles37. En 1379 Jean Peireel, capitaine des Flamands devant Audenarde est banni par les Gantois38. À Ypres, le comte fait décoller 300 de ses ennemis, et à Gramont, le seigneur d’Enghien commence à faire justice des rebelles, mais ne peut aller au-delà de deux ou trois exécutions39.
9Les dirigeants des municipalités, les institutions urbaines ne font pas l’objet de mention systématique40. Les chefs des révoltés sont bien moins souvent cités que par Froissart. Certains ne le sont qu’une fois au moment de leur décès : Jean Peirel et Ernoul le Clerc41, Raffe de Heizelle42. Philippe d’Artevelde, nouveau capitaine des Gantois en 1382, fait seul exception. Ce brasseur est à la tête d’une route de 23 000 Gantois avec de l’artillerie, puis de 60 000 hommes. Il peut passer alliance avec les Brugeois, faire prêter serment à ses partisans dans Bruges, mettre tout le pays en l’obéissance de ceux de Gand.
10Plus souvent l’auteur évoque une collectivité, comme le commun de Gramont43. Il s’attache surtout aux relations entre le comte44, son administration45 et les villes. Pour les Flamands révoltés, la responsabilité des troubles revient aux mauvais conseillers du comte dont ils demandent le bannissement. Ils obtiennent du comte en 1380, d’être remis en toutes leurs franchises, libertés : le comte doit les sceller, les approuver avec toutes leurs anciennes chartes. En 138246, Philippe tient la ville de Bruges en grant sugection et en obéissance tout le pays de Flandre. De son côté, le comte, à la mort de sa mère, reçoit l’obéissance du pays d’Artois, d’Hesdin et des autres villes. Ces relations sont troublées par l’intervention du roi de France47. Après le folio 305, la direction des opérations militaires passe du comte et de ses seigneurs, au roi, aux princes, aux seigneurs, aux connétables et aux maréchaux, dont l’auteur en 1383 donne la liste48.
11Les relations avec le comte sont mauvaises49. Il fait l’unanimité des villes en demandant à chacune de livrer ceux qui lui sont contraires pour les corriger à sa volonté50. Aussitôt les Gantois, profitant du voyage du comte en France, se révoltent. L’auteur précise qu’ils se lèvent contre leur seigneur51 et condamne ainsi implicitement leur action. Ils tentent d’établir leur autorité : aucune ville ne peut ni ne doit servir le comte sans leur volonté et consentement. Le comte réplique en jouant des divisions dans le camp des rebelles : il pardonne52, mais ne renonce pas durablement à son premier propos et avec maladresse53 envoie le seigneur d’Enghien à Gramont tenter de faire justice de ceux dont il lui donne la liste. L’auteur prépare ainsi les événements de 1382. Parmi les Brugeois, quand les Gantois arrivent, seuls quelques membres des quatre métiers acceptent d’accompagner le comte, puis la nuit Brugeois et Gantois massacrent dans la ville ses partisans et pillent les maisons des quatre métiers qui l’ont aidé. L’auteur montre enfin le comte, à Lille, dolant des ravages subis par son pays et des morts, même si l’intervention française l’a été à sa demande et pour se défendre.
Une puissance militaire inquiétante
12L’auteur décrit les réseaux dans lesquels les villes s’insèrent, une fois les tensions entre elles surmontées, en évoquant les mouvements de l’armée du comte et du roi. Il énumère au fil du récit un premier groupe de 17 villes54 qui ne quittent pas le parti du comte, en distinguant les villes qui ne sont pas prises de celles qui le sont55. Le second ensemble est constitué de 11 villes56, alliées de Gand57 plus celles de la vallée de la Lys. Cinq changent de camp58, Ypres, Bruges avec le Franc de Bruges, Courtrai, Poperinghe et Gramont. L’aide apportée par une partie des habitants à l’ennemi provoque leur chute. Ainsi alors que les Gantois contrôlent à certains moments presque tout le pays de Flandre, le nombre de villes citées de leur côté est inférieur à celui des villes du côté du comte et du roi59. Le recrutement social des deux partis apparaît net. Parmi les bienveillans du comte sont cités la chevalerie et les chevaliers, les gens d’armes cinq fois et aussi les seigneurs, la gentillesse, les grands bourgeois d’Ypres, plusieurs bourgeois et échevins de Bruges, les bannis60. Du côté de Gand, figurent grand nombre de gens des villes, qualifiés de complices des Gantois, de haineux61. Les métiers jouent un rôle décisif avec le doyen des métiers de Gand Jean Pruneel, vieswarier, le brasseur Philippe d’Artevelde, les quatre mestiers de Bruges62.
13Les opérations de siège sont les plus nombreuses. L’investissement complet est rare, en particulier pour les grandes villes. L’auteur note que les assiégés peuvent mener plusieurs sorties63 pour faire des razzias64, ou lancer des expéditions punitives contre d’autres villes, ravager leurs abords ou le plat pays65. Des lieux-dits à proximité des villes, comme près de Deuse, de Roosebeke66, permettent des affrontements à grande échelle67, comme les carrefours68 ou les ponts (pont de Commynes) sur les routes principales. Le ravage du plat pays69, pourvoyeur d’hommes et de vivres pour les villes et présentant des cibles faciles, commence dès le début de la révolte, l’auteur le signale, mais n’en évoque les effets que pour le retrait de l’armée de Flandre. Certains points sont particulièrement visés les Gantois s’attaquent aux résidences comtales70. Les châteaux accolés aux enceintes urbaines ou inclus dans les villes sont peu mentionnés71, même à l’occasion des opérations de siège. Les places fortes, les forteresses et les forts, qui assurent à distance la défense des villes, font l’objet de combats acharnés72.
14Le récit est riche de notations concernant les gens d’armes, les garnisons, les défenseurs des villes, le poids respectif des partisans du comte, du roi73, des Anglais, des Gantois et des Flamands. Les troupes des rebelles sont évoquées quarante fois, entre 1379 et 1383. Les notations chiffrées apparaissent à partir de 1380. La première concerne les 9 000 Flamands qui assiègent Audenarde74. Pour 1381, l’auteur signale parmi les sorties des Gantois, assiégés par le Comte celle de 60 compagnons à blancs chaperons. En 1382, le jour de la Sainte-Croix, 24 000 hommes armés et embastonnés merveilleusement, mais souffrant de disettes, partent de Bruges chercher l’aventure. Les pertes sont lourdes. Au pont de Commynes, où les Flamands de Courtrai, d’Ypres sont 8 00075, elles sont de 3 000 hommes. Sur les 60 000 hommes du pays de Flandre et d’ailleurs rassemblés par Philippe d’Artevelde, à Roosebeke, 26 000 sont tués76, contre seulement trois chevaliers français77. Les évaluations vagues sont aussi nombreuses78. Les troupes du comte, du roi de France, des Anglais sont dites de gens d’armes, ce qui n’est pas le cas de celles des Gantois79. Les garnisons sont mentionnées au moment où elles sont installées ou attaquées80. Plus souvent le statut des troupes, qui défendent les villes, n’est pas précisé. L’auteur note avec soin les villes sans défense81 et la dureté des combats : ainsi en Flandre maritime à Bergues, Anglais et Flamands se défendent raddement82. L’équipement des troupes retient peu l’attention de l’auteur83. Les notations les plus intéressantes concernent Roosebeke. Les Flamands mal armés ont peur des coups de lances et d’épées, la plus grande partie de leurs bâtons n’est que planchons et picques84. Ils ont su se ranger et mettre au front de leur bataille grant plenté de trebus85 et de canons et les faire tirer quand ils avancent, mais leur tir mal ajusté passe au-dessus des Français.
15La responsabilité de la conduite de la guerre est présentée comme collective à une exception notable près celle de Philippe d’Artevelde. Les techniques de combat sont décrites avec intelligence. L’auteur rend compte de leur efficacité sans souligner leur spécificité. Les milices des différentes villes combattant ensemble sous le commandement d’un état-major gantois86. La stratégie utilisée montre une bonne connaissance de l’art de la guerre contemporain87. L’auteur relève à plusieurs reprises la mise en œuvre simultanée de plusieurs opérations de siège, souligne la mobilité des rebelles88 capables d’intercepter une armée de métier en rase campagne89. Les capitaines savent prendre des initiatives, inscrire leur action dans la longue durée90. Ils maîtrisent la guerre psychologique alternant fraternisation autour de la pratique d’une langue commune, prestation de serment, terreur avec prise d’otages, dommages aux biens et aux personnes sur leurs adversaires politiques. L’auteur reconnaît aux rebelles une réelle détermination et de la ténacité91.
L’échec d’un adversaire politique de premier plan
16L’auteur sait donner aux événements leur portée en donnant les grandes lignes du contexte politique. Les précédentes affaires de Flandre ne sont mentionnées que par les éperons d’or sans référence à Jacques d’Artevelde : le roi trouve dans la halle des échevins plus de cinq cents paires d’éperons dorés que les Flamands ont gardé depuis la bataille de Courtrai de 1302 et les escuroient souvent pour les tenir cler et net et en faisans leurs moqueries en despitans les seigneurs de France car ils ont été pris sur les Français.
17Contre les villes révoltées et grâce à l’appui de celles qui lui sont fidèles, le comte met en œuvre de très gros moyens, ainsi à Lille, en 1382, il fait charger plusieurs bateaux sur des charrettes pour les mener sur la Lys. Les trois armées royales, qui se succèdent en Flandre, sont considérables.
18Sur l’efficacité des troupes rebelles, l’auteur fournit des renseignements indirects92. Il ne donne pas de durée à l’exception du siège de Bergues, de vêpres à la nuit, et de celui de Bourbourg, qui dure une journée93. Plus qu’à la durée du siège, il se montre attentif au renoncement94, les Flamands ont une défense qui moult peu dure face aux Français : bien hastivement ils lèvent le siège d’Audenarde, au point de laisser leurs bagages. L’assaut n’est pas toujours nécessaire. Quand il est donné, trois situations se présentent : seul, il est moult grant et moult pesant ou moult grant et cruel, il faut parfois un petit nombre d’attaques95 ou beaucoup plus comme à Audenarde en 137996. Malgré l’importance des sièges, l’auteur laisse l’impression de campagnes de Flandre97 toute de mouvement98. La vitesse relative des déplacements99 tient au champ d’évolution qui est limité avec une densité de villes conséquente, elle explique l’enchaînement sans solution de continuité des opérations en 1380 et en 1381. L’auteur en une phrase rappelle la difficulté que représente le climat, le terrain inhospitalier mais ne montre pas les Flamands exploitant cet avantage. La tactique des Gantois n’est pas décrite100. Malgré un équipement individuel parfois insuffisant, ils marquent des avantages décisifs. Ainsi en 1383, avec la prise d’Audenarde, Gand se trouve protégée et le roi de France faute de vivres doit regagner la France101.
19De nombreuses et brèves notations éclairent la fin des combats, les modalités de reddition et le sort des populations. Chaque année102 voit dans le cours des opérations des trahisons. Certaines sont ouvertes. La première intervient en 1379, à Ypres. Elle se fait en trois étapes : les habitants d’abord n’opposent aucune défense à l’attaque de Gand et Courtrai, puis ils laissent sans secours les chevaliers et les gens d’armes du comte qui s’enfuient. Enfin un grand nombre de ceux d’Ypres accompagnent les Gantois et se portent sur Bruges. L’auteur montre que la trahison n’épargne pas le camp des rebelles. Après la prise d’Audenarde, le 22 février 1380, les Gantois bannissent un vieswarier, Jean Peirel103, le doyen des métiers qui avait été leur capitaine lors du siège, pour aucun soupechon qu’ils ont de lui104. Désertions, absences de résistance, changements de camp105 ont les mêmes effets. En 1382, la défection intervient au moment du combat. À Bruges, le comte, défait en rase campagne, revient poursuivi par les Gantois. Il se met en ordre de bataille sur le marché, alors quand les Gantois crient dans leur langue : « tout un, tout un », le comte s’enfuit, les Brugeois et les Gantois ensemble massacrent ses partisans dans la ville. L’auteur n’emploie toujours pas le terme de trahison106 quand Gravelines, Bourbourg, Bergues, Cassel et les villes jusqu’à la Lys passent aux Anglais et aux Gantois, et en 1383, quand, à plusieurs reprises, les Anglais se désolidarisent de leurs alliés Flamands et les abandonnent107.
20L’issue des combats et les derniers engagements sont scrutés par l’auteur. En 1379 à Ypres, les chevaliers et les gens d’armes du comte doivent se cacher dans la ville pour sauver leur vie, puis quitter la place sans cheval ni armure et en bien pauvre état, formidable et humiliant revers108. À Roosebeke, l’auteur relève que les Flamands, pris en tenailles, reculent puis fuient si serrés qu’ils tombent les uns sur les autres. La fuite et la poursuite peuvent durer et s’étendre : après Roosebeke, les fuyards vont à Audenarde qu’ils doivent quitter pour Gand109. L’auteur évoque plus souvent des retraites en bon ordre et des replis stratégiques110, certains associés à une contre-attaque. Sur dix de ces dernières111, la moitié concerne les Flamands112. Plus que d’autres, l’auteur porte attention dans trente et un cas aux modalités de diffusion de l’information. Elle circule bien en raison de la taille du champ des opérations113 : chaque partie, chaque armée peut réagir aux entreprises de l’autre en un temps record, ainsi les villes sont informées de tous les déplacements du comte114. Le texte renseigne peu sur la personnalité des informateurs115, messagers, espions et population locale. Philippe d’Artevelde fait crier l’alliance avec les Brugeois qui le veulent116. L’auteur souligne le rôle des fuyards après la victoire des Français à Roosebeke : ils informent Audenarde et Bruges. Il montre les seigneurs de France informés des moqueries des habitants de Courtrai concernant les éperons d’or117. L’impact psychologique de la diffusion des nouvelles et du déroulement des opérations est relevé. Les Gantois ayant gagné à Ypres une porte de la ville sur les chevaliers et gens d’armes du comte, ces hommes renoncent à se battre118. L’auteur, par contre, ne donne pas la mesure de l’impact des prises d’otages, qui sont mentionnées trois fois119, même si à Lille le comte fait décapiter ceux de Courtrai et d’Ypres. Le problème des vivres et des autres approvisionnements fait l’objet de neuf mentions, il affecte les villes assiégées, l’armée de Flandre, il est question de souffrance de vivres, de disettes120, pas de la réaction de la population. L’auteur est tout aussi discret sur le souci des habitants de se protéger, d’être gardés121.
21Les dommages aux biens et les atteintes aux personnes sont recensés sans être décrits. Le pillage est mentionné une quinzaine de fois. Certaines notations sont originales et significatives. Le comte de Flandre abandonne en 1380, le pays au pillage des bannis qui prennent tout ce qu’ils trouvent sans rien épargner122. L’année suivante, l’auteur désigne les haineux et ceux du parti de Gand comme responsables des exactions lors du siège de la ville. Le pillage est alors ciblé, il vise seulement les maisons des partisans du comte123, ailleurs ce sont les bagages abandonnés124. Le sac est accompagné ou suivi d’incendie dix fois125. Le début de la révolte s’ouvre en 1379 par des feux en séries qui affectent les villes, les forts et les belles maisons des partisans du comte126. La destruction consiste à démolir les bâtiments d’intérêt stratégique ou symbolique, elle est une sanction, une manière de préparer la guerre127 En 1381, le comte fait démolir toutes les maisons de Gramont128. À côté des pertes au combat, l’auteur signale une série de meurtres ou de tueries. Les fuyards qui quittent Audenarde pour Gand sont tués, noyés129. En 1382, à Bruges, de nuit les Gantois assassinent les partisans du comte, ensuite Philippe d’Artevelde fait tuer ceux qui refusent de lui prêter serment130. Les villes, qui ne sont pas prises de force, peuvent se rendre sans combat131 en négociant pendant l’affrontement une issue plus favorable. L’auteur donne huit exemples précis de prises de villes par force132. Les redditions négociées sont les plus nombreuses133. L’auteur distingue le sort de la garnison de celui des habitants134, quatorze fois chacun, mais le rappel des deux destins n’est pas systématique pour chaque ville. Les garnisons sont tuées lors de la prise de la place135 ou exécutées, une fois les combats terminés. Lorsque l’armée royale intervient et que les Anglais combattent aux côtés des rebelles, leur sort est plus favorable : ils négocient séparément leur reddition et souvent sauvent leur vie et leurs biens, comme en Flandre Maritime. La prise de la ville au contraire s’accompagne de pillage, de massacre, d’incendie. Parfois les habitants obtiennent leur pardon136.
22Pendant les combats, les négociations ne sont pas forcément interrompues137. Elles interviennent grâce au service d’intermédiaires et de princes138 du côté du comte ou du roi. Les Brugeois envoient une délégation au roi et les Gantois des ambassadeurs, à Courtrai, avec des sauf-conduits. Les tractations portent sur les alliances, les trêves et la paix139. En 1380, un seur etat est accordé entre les belligérants, puis après la prise de Tenremonde et de Poperinghe, la paix est criée par toute la Flandre en juin, pourtant l’hiver se passe sans paix ni trêves entre Gand et le comte140. À la mort du comte de Flandre, des trêves d’un an sont négociées entre Français, Anglais et Gantois, qui leur permettent de marchander entre eux paisiblement141. Les relations des villes avec le roi sont complexes, un contentieux existant entre le comte et le roi142. Lorsque les ambassadeurs du roi de France viennent traiter les Flamands leurs font réponses dures et de diverses manières. Le roi n’attend pas cette réponse pour assembler des seigneurs qui veulent abattre l’orgueil des rebelles. Surtout le fait que les bonnes villes de France et Paris prennent exemple des Flamands et se plaignent des impositions et subsides poussent le roi et son conseil à intervenir143. Les Gantois envoient des ambassadeurs auprès du roi : ils se disent prêts à mourir jusqu’au dernier plutôt que d’obéir au comte. Le roi, généreux avec Ypres qui s’est rendue, est implacable avec Poperinghe, les villes voisines et le pays qui sont ravagés. Le rôle du duc de Bourgogne est présenté de manière flatteuse. Bon négociateur, il s’entremet entre le comte et les villes d’une part et entre le comte et le roi d’autre part. Les critiques portent sur le comportement cruel de ses troupes, qui, sous la direction du maréchal de Bourgogne, participent aux opérations144. Lorsque le duc prend possession du comté de Flandre, il obtient l’obéissance de tous sauf de Gand, mais seules Lille et Douai acceptent de quitter le parti du pape Urbain145. Toutefois l’auteur n’emploie jamais l’expression leur seigneur pour désigner le nouveau comte.
Conclusion
23L’auteur moins prolixe que Froissart fait un résumé qui privilégie les aspects militaires et la grande politique par rapport au récit des troubles et des tensions à l’intérieur des villes et entre villes. Précisément ce qui fait son originalité tient aux longues listes de combattants surtout du côté français. La construction de sa narration est intéressante, alors qu’il donne peu d’informations nouvelles pour les villes. Il ne permet pas en particulier de se faire une idée de leur vie quotidienne en temps de guerre, ni même de saisir la logique des événements dans lesquelles elles sont impliquées. Au moment où il écrit, avant le traité d’Arras, il montre peu de sympathie pour Bourgogne ou les révoltés flamands. L’auteur ne retient que la version profrançaise. Il se montre sensible aux questions religieuses et au respect des engagements. En l’état, il offre un témoignage supplémentaire de la défiance suscitée chez certaines élites par les mouvements urbains et enrichit le récit des événements surtout au point de vue militaire.
Notes de bas de page
1 Sur le manuscrit, conservé aujourd’hui à Paris au cabinet des manuscrits de la Bibliothèque nationale de France, sur l’auteur et pour l’édition : C. Raynaud, La Chronique dite des Cordeliers, à paraître. Il existe une édition partielle pour la période 1400-1422 : L. Douët d’Arcq, La chronique d’Enguerrand de Monstrelet, t. VI, in Société de l’Histoire de France, Paris, 1862, p. 192-327. La plupart des travaux critiques portent sur Jeanne d’Arc et Guillaume de Flavy.
2 G. Hasenohr et M. Zink (édition entièrement revue et mise à jour sous la direction de), Dictionnaire des Lettres françaises, Le Moyen Âge, Paris, Fayard, 1992, p. 291.
3 Pour mémoire et dans une riche bibliographie : M. Mollat et P. Wolff, Ongles bleus, Jacques et Ciompi, Les révolutions populaires en Europe aux XIVe et XVe siècles, Paris, Calman-Lévy, 1970 ; H. Van Werveke, Gand, Esquisse d’histoire sociale, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 1946 (coll. Notre passé, 5e série, n° 3) ; J. Decavelle (sous la dir. de), Gand, apologie d’une ville rebelle : histoire, art, culture, Anvers, Fonds Mercator, 1989 ; A. Duclos, Bruges, histoire et souvenirs, Bruges, 1910 (reprint, 1976) ; M. Ryckaert, Brugge. Historische stedenatlas van België, Bruxelles, 1991; N. David, The van Arteveldes of Ghent. The varieties of vendetta and the hero in History, Leyde, E. J. Brill, 1988 ; M. Boone, « Armes, courses, assemblées et commocions (les gens de métier et l’usage de la violence dans la société urbaine flamande de la fin du Moyen Âge) », Revue du Nord, n° 359, janvier-mars, 2005, p. 7-33.
4 La Chronique dite des Cordeliers donne une version de la guerre de Flandre loin de la Chronique des quatre premiers Valois, plus près des Grandes chroniques de France.
5 Ces 57 folios (sur 98 au total pour la période, 79 chapitres dans l’édition de P. F. Ainsworth et G. T. Diller) et les 24 folios sur 28 (fol. 292-321) de la Chronique dite des Cordeliers montrent l’importance de ces événements.
6 Pour la Flandre : l’Écluse, Courtrai, Lille, Ypres, Poperinghe, Bruges, Hesdin, Commines, Seclin, Denain, Cassel, Dunkerque, Gravelines, Bourbourg, Bergues, Douai, Deuse ; pour la Flandre orientale : Audenarde, Gramont, Alost, Gand, Tenremonde. Sont également citées Calais qui est anglaise, 1 ville pour le Hainaut : Tournai, 2 pour l’Artois : Arras, Aire-sur-la Lys, 2 pour la province d’Anvers : Anvers, Malines, 1 pour la Zélande : Ardembourcq, 3 pour le comté de Boulogne : Lens, Boulogne, Saint-Omer.
7 185 mentions sur 307, soit 99 fois pour les deux villes de Flandre orientale et 86 fois pour les 6 villes de Flandre occidentale. Pour les deux villes de Flandre orientale, plus de 39 fois en moyenne et pour les 6 villes de Flandre occidentale plus de 16 fois.
8 Sans doute parce qu’à partir de 1382, les Français sont là et que le comte et la plupart des villes sont hostiles au pape Clément VII malgré les injonctions d’une ambassade de prélats envoyés par le roi, ils éludent la réponse à ce sujet.
9 Ceux de la ville 8, ceux de dedens (Audenarde, Ypres), ceux de plusieurs villes de la vallée de la Lys, ceux de Gand 25, de Bruges 11, d’Ypres 4, mais aussi de Lens, de Poperinghe, de Courtrai, de Gravelines, de Bourbourg, de Bergues, de Cassel, de Calais, de Lille, de Douai.
10 En 1380, le comte de Flandre abandonne au pillage des bannis le pays de Flandre au-delà de la Lys. En 1383 plusieurs bourgeois de Bourbourg quittent la ville avec les Flamands et les Anglais et vont à Gravelines.
11 Les tisserands et autres manières de gens de Bruges s’approchent des Gantois leur crient à haute voix en leur langage, notation intéressante : « tout un, tout un ». L’auteur les montre ensemble massacrant ensuite les partisans du comte toute la nuit et précise que des maisons des membres des quatre métiers sont pillées.
12 J. Froissart, Chroniques, éd. G. Raynaud, Paris, 1897 (SHF), t. 10, p. 242, un valet, fils d’un brasseur de miel ; la Chronique des règnes de Jean II et de Charles V, publ. par R. Delachenal, Paris, Renouard, H. Laurens, 1910 (SHF), t. II, p. 372, précise que Jacques d’Artevelde a épousé une brasseresse de miel.
13 L’amiral de France fait donner l’assaut, la ville est pillée par les Bourguignons et il y a grande confusion de femmes et d’enfants. Froissart rapporte seulement que les femmes, les enfants, les vieillards sont rassemblés avant les combats dans l’église. Le Religieux de Saint-Denis, Michel Pintoin, ajoute que les Anglais incendient la ville en partant.
14 L’opération ne suffit pas puisqu’il prend aussi cinq cents otages parmi les plus notables et ceux en qui il se fie le moins, pour prévenir toute hostilité de la population et fait abattre trois portes, trente pieds de murs autour de chacune et combler les fossés.
15 La seule autre mention des échevins intervient à propos de la halle de la ville de Courtrai, fol. 309.
16 L’affaire se déroule lors du siège de Gand : le comte de Flandre envoie à Gramont le seigneur d’Enghien avec trois cents lances faire justice de ceux dont il lui a donné une liste écrite.
17 Le commun fait aussi fermer les portes, tuer tous les hommes d’Enghien sauf deux chevaliers, avec qui il est fait prisonnier. L’épisode n’est pas rapporté par Froissart, les Grandes Chroniques de France et la Chronique des quatre premiers Valois.
18 Le cadre urbain n’est mentionné que lorsque le récit l’impose, sans véritable description. L’auteur souligne la valeur défensive des murs, la vulnérabilité et l’importance symbolique des portes. Mais le décor des portes et leur appareil défensif, les dimensions, la réparation, l’entretien des murailles ne sont pas rappelés. Ainsi pour 1383, quelques-uns des six cents Gantois, qui se portent sur Audenarde, de nuit parviennent à escalader les murs, à s’y cacher puis au petit jour, tuent les gardes (fol. 315 verso). Les murs ne sont ensuite cités qu’en association avec les portes pour évoquer leur destruction.
19 En 1384, Audenarde est reprise grâce à un stratagème maintes fois utilisé, le seigneur d’Escornay fait bloquer le pont et la porte par trois charrettes de foin et de bois menées par ses hommes déguisés en charretiers.
20 La fermeture des portes empêche la sortie des représentants du Comte et l’arrivée de renforts éventuels.
21 Ainsi en 1380, il note que les Gantois à Audenarde détruisent la porte orientée vers Gand et abattent de chaque côté seize pieds de murs sanction qu’ils veulent exemplaire pour signifier qu’aucune ville de Flandre ne peut ni ne doit agir contre eux et sans leur accord. D’après Froissart, après la levée du siège, le duc de Bourgogne obtient que les Gantois laissent la ville intacte, alors que d’après les préliminaires du traité il était convenu qu’ils auraient le droit d’abattre les murs, les tours et deux portes du côté de Gand. La clause est également évoquée par la Chronique rimée, p. 50-51. Le siège est levé le samedi 3 décembre 1379, d’après Meyer, op. cit., fol. 173.
22 En 1382, à Bruges Philippe d’Artevelde qui a fait abattre trois portes, trente pieds de murs de chaque côté de chacune et combler en partie les fossés avec les gravats, voit le procédé se retourner contre lui. À l’arrivée de l’armée royale, la ville doit négocier humblement, faute de pouvoir résister à cause des trois portes abattues. D’après Froissart, les Gantois décident d’abattre deux portes et les murs qui sont du côté de Gand, de remplir les fossés pour que ceux de Bruges ne se rebellent jamais contre eux. L’Istore et croniques de Flandres (t. II, p. 295) et Meyer (fol. 184 verso) donnent trois portes détruites le 7 mai.
23 La version de Froissart (éd. P. F. Ainsworth et G. T. Diller, p. 962-966) est sensiblement différente. Apprenant que Gilbert de Leeuwerghem, capitaine d’Audenarde, est venu retrouver le comte de Flandre à l’armée royale et qu’une partie des fossés est mise à sec pour en recueillir le poisson, François Ackerman surprend la ville de nuit et y pénètre avec 400 hommes. Il y entre d’après Meyer (fol. 199), le 17 septembre. Il est à la tête de 400 à 500 hommes d’après l’Istore et croniques de Flandres (t. II, p. 329), qui donne aussi le détail des fossés mis à sec. Walshingham (Historia Anglicana, éd. H.T. Riley. Rolls Series, 2 vols. Londres, 1863-4, t. II, p. 107) montre la complicité des habitants, exaspérés par les cruautés françaises. Pour la version donnée par Froissart une notation concernant le beau temps qui aurait favorisé l’opération est mise en doute par G. Raynaud, il faut peut-être aller au-delà.
24 En 1379 et en 1384.
25 Le comte de Flandre fait justice de trois cents rebelles sur le marché d’Ypres.
26 En 1382, le comte doit à son tour se cacher à Bruges. Après Commines, les Flamands de Courtrai mettent le feu à Lille, là aussi en plusieurs lieux
27 Le comte de Flandre fait hommage au roi de France en l’abbaye Saint-Nicolas darouaise en Vermendois.
28 Les deux seules places qui résistent aux Gantois d’Artevelde sont Tenremonde et Audenarde, les Gantois parviennent toutefois par le feu qu’ils y jettent à brûler plusieurs maisons. En 1384 le seigneur d’Escornay se venge de l’incendie de sa maison en prenant par ruse en pleine trêve Audenarde. Les rebelles n’ont pas l’apanage de ces dévastations, l’auteur rappelle que le comte de Flandre fait détruire en 1381 toutes les maisons de Gramont.
29 En 1379 lors de l’incendie dans plusieurs bonnes villes des demeures des partisans du comte et en 1382 à Lille pour celui de beaucoup de maisons qui ont été préparées pour recevoir les seigneurs de France.
30 Le roi de France accorde aux habitants d’Ypres, qu’il veut se gagner, que les troupes paient tout ce qu’elles prennent en ville. 31 Elles ne se rebellent pas car elles ont livré des otages.
31 Elles ne se rebellent pas car elles ont livré des otages.
32 Ces plaintes ne sont pas sans écho : l’année suivante plusieurs bonnes villes de France se disent grevées des impositions et subsides qui y courent en particulier Paris.
33 Le roi de France refuse de traiter avec les Gantois malgré ce qu’ils offrent.
34 L’approvisionnement est évoqué indirectement quand Audenarde reçoit en 1384 sans s’inquiéter de les contrôler trois charrettes de foin et de bois.
35 En 1383 la prise de Bourbourg est pour les Français le moyen sûr de tenir les Anglais de Calais moult court de vivres et autres nécessités. En 1384, le roi de France doit retourner en France car la grande armée de Flandre, 200 000 hommes, ne trouve pas de fourrages ni de quoi manger pour tous.
36 Les démêlés du comte avec la justice du roi sont l’occasion de mettre en valeur le rôle de son successeur le duc de Bourgogne qui plaide sa cause. La première notation intervient à propos de la convocation du comte de Flandre et de sa mère la comtesse d’Artois en 1379 à Paris, justice que le comte redoute en raison de plusieurs choses qu’il a fait contre la volonté du roi. Le duc de Bourgogne et ses amis intercèdent.
37 En 1382, en campagne, le roi condamne Courtrai à être brûlée à cause des éperons d’or. Par contre, après Roosebeke, l’abandon des corps des Flamands aux chiens et aux oiseaux n’est pas présenté comme résultant d’une sentence explicite. Le rappel de ces mesures est pour l’auteur autant de critiques à l’endroit des Flamands et du Comte de Flandre.
38 Jean Peireel est finalement conduit à Lille, où le comte le fait décapiter. Après la révolte, le ressentiment du comte est tel qu’il refuse d’abord de consentir au pardon des Flamands, promis par ses amis et conseillers. Il veut d’abord obtenir de chaque ville qu’elle livre ceux qui lui ont été contraires pour les corriger à sa volonté, ce qui a pour effet d’unir les villes dans un refus définitif. Par le jeu du pardon, qu’il consent ou refuse, le comte tente pourtant de diviser ses adversaires. En 1380, il pardonne à Bruges, pas aux autres villes. Les Flamands cherchent à obtenir ce pardon : en 1380 Courtrai l’obtient par traité.
39 Le comte n’hésite pas à faire exécuter en 1382, quand il doit fuir Bruges, les otages de Courtrai et d’Ypres qu’il détient.
40 À Arras, en 1380, plusieurs bourgeois sont associés aux échevins pour rencontrer le comte de Flandre. En 1382, les échevins de Courtrai ne sont cités qu’à propos de leur halle. À Ypres, ceux de la ville reçoivent conseil et aide des gens d’armes. À Bruges, ceux de la ville sont associés aux quatre métiers. Le gouvernement de Gand n’est évoqué que par ceux de Gand.
41 En 1380, il est tué contre Audenarde.
42 En 1381 capitaine des Gantois, il trouve la mort près de Deuse.
43 Les Flamands est aussi très courant.
44 Il est reconnu comme leur seigneur par ceux de Bruges mais pas par les Gantois.
45 Plus précisément ses officiers, le bailli de Gand commis par le comte.
46 Les Brugeois prêtent serment à P. d’Artevelde de ne pas aider et secourir leur seigneur.
47 L’auteur relève en 1382 la douleur du comte devant les ravages commis en Flandre. Il insiste sur le rôle du roi, de son conseil et des princes en particulier du duc de Bourgogne, décrit la composition des ambassades envoyées au comte et aux Flamands.
48 7 ducs, 31 comtes, 6 vicomtes, et un très grand nombre de barons et de grands seigneurs. L’auteur ne donne pas de liste pour les Anglais, alliés des Flamands.
49 Le bailli du comte élève de nouvelles coutumes contre les privilèges de Gand en 1379.
50 En 1380.
51 La mention est identique en 1381, lors du siège de Gand, quand les assiégés font des sorties contre l’ost du comte.
52 Il pardonne à Bruges mais pas Ypres et Courtrai qui rejoignent les Gantois. Pourtant après la reddition d’Ypres, il accepte de pardonner à Courtrai pour l’enlever au parti gantois.
53 L’auteur n’approuve pas non plus le comportement du comte lorsqu’il livre aux ravages des bannis le pays de Flandre, ce qui provoque le courroux des Gantois.
54 Lille, Audenarde, Tenremonde, Tournai, Arras, Douai, Gramont, L’Écluse, Hesdin, Aire-sur-la-Lys, Lens, Seclin, Dunkerque, Ardembourcq, Saint-Omer, Boulogne, Anvers.
55 Lille (cinq mentions) et Douai ne sont pas prises à l’inverse d’Audenarde six mentions, Tenremonde quatre, Tournai trois.
56 Gand a donc avec elle : Courtrai, Ypres, Bruges, Poperinghe, Commines, Roosebeke, Denain, Gravelines, Bourbourg, Bergues, Cassel.
57 Elles peuvent tomber aux mains du comte ou du roi de France.
58 Il signale la dispersion rapide des rebelles, pour souligner la fragilité relative de leur entente. En 1380, il observe qu’une fois le traité conclu avec le comte de Flandre, les Flamands quittent Audenarde et retournent chacun chez eux. En 1383, l’auteur souligne que se heurtant à une forte résistance d’Ypres, Anglais et Gantois lèvent le siège, les Gantois rentrent chez eux et les Anglais rejoignent Cassel et les places du littoral flamand. Surtout il évoque, lors de la prise de Bergues, le fait que les femmes et les enfants de la ville murmurent contre les Anglais, qui de nuit s’apprêtent à quitter la ville et à les abandonner. Les Français peuvent alors se saisir de la ville sans défense.
59 L’auteur emploie pour les Gantois des formules générales plutôt que des listes.
60 Quant à la composition de la troisième armée de Flandre, l’auteur énumère 7 ducs, 31 comtes, 6 vicomtes et quelques-uns des très nombreux barons et grands seigneurs.
61 L’auteur se fait parfois plus précis, il évoque le commun de Gramont, les bourgeois de Bourbourg ou de Gramont.
62 Ces derniers étant le fer de lance sont évoqués à plusieurs reprises. La mention du rôle des femmes et des enfants à Bergues est exceptionnelle.
63 Ainsi en 1379 les Brugeois contre Ypres, en 1380, pendant le siège de Gand, l’ost de Flandre contre le pays d’environ d’Alost, en 1381 lors du siège de Gand.
64 En 1382, les Gantois, cherchant aventure envers Bruges, établissent un contact visuel au bout d’une heure trente avec le comte.
65 En 1379 tout le pays de Flandre et le pays d’Alost, en 1381, le pays autour de Gramont, après le pont de Commynes, le pays entour de la ville et tout le pays de Flandre sont pillés.
66 Ypres, Courtrai et Gand et tout le pays se portent contre Bruges. À l’inverse, le Franc de Bruges se porte contre Ypres à la demande du comte.
67 Mont d’Or à Roosebeke.
68 En 1380, Pont-à-Rosne.
69 En dehors du réseau hydrographique, les considérations sur le paysage sont rares, à Roosebeke, une petite montagne, le Mont d’Or et un bosquet où les Flamands se sont retirés.
70 Dès 1379, ils s’en prennent à un petit château, un pavillon près de la ville. Les autres résidences sont à Bruges où le comte dîne quand en 1382 les Gantois attaquent, puis à la mort de Louis de Mâle, Lille, Hesdin et d’autres villes.
71 Le petit châtel du comte à Gand, en 1379, et le château de Gravelines, en 1383.
72 En 1379 les Gantois s’en prennent après le petit château du comte à plusieurs villes et forts des partisans du comte. Pour garder les passages de rivières, à côté des places comme Audenarde et Tenremonde, figurent une forteresse, dont le nom n’est pas donné, abattue en 1380 par les Gantois et un château Druicamp, assiégé par les Français en 1383, près de Cassel.
73 L’auteur évoque les combattants, les armes et les techniques de combat des deux partis, mais privilégie le coté du comte et du roi.
74 L’auteur les désigne sous le terme de gens d’armes. La seconde mention est l’envoi en septembre de 14 000 hommes par Gand pour défendre Ypres contre le comte et les Brugeois. À l’annonce de leur progression, 6 000 Yprois se portent contre leur seigneur. Après la reddition d’Ypres, de Courtrai, le comte vient mettre le siège devant Gand avec une formidable armée de cent mille hommes ou plus (sic). Pour corriger les révoltés de Gramont, il envoie le seigneur d’Enghien et 300 lances. Toujours en 1380, au moment du Carême, l’auteur mentionne une sortie de 3 000 Flamands de Gand contre les Flamands d’Ypres, de Courtrai et d’ailleurs, l’auteur ne donne pas leur effectif, mais chiffre les pertes à 1200 hommes. Le siège d’Audenarde ensuite voit ceulx de la ville, de France et d’ailleurs au nombre de 12 000 faire une sortie et l’emporter sur les Gantois.
75 Plus loin l’auteur précise ou plus.
76 En particulier 500 qui s’étaient retirés dans un bosquet pour une ultime résistance.
77 En 1383, à Bourbourg, plusieurs Français sont tués ou blessés, dont l’amiral Jean de Vienne. La dernière mention est en 1383 plus modeste, elle concerne les 600 Flamands de Gand qui de nuit prennent Audenarde. En 1384 plusieurs gens du roisont tués et pourchassés par les Anglais à L’Écluse. Les gens d’Escornay tuent les gardes d’Audenarde et font surtout grande occision des Gantois dans la ville.
78 En 1379, un grant nombre de gens de la ville de Bruges en sort pour rejoindre les Gantois. En 1380 un grand nombre de gens de Gand se porte vers une forteresse près de Bruges. L’auteur évoque l’armée des Gantois, une bataille des Gantois ou une grosse bataille de Gantois, après la sortie des 60 chaperons, une autre bataille plus grande ensuite intervient. La plus grande partie des défenseurs de Courtrai est morte dans la bataille contre le roi ou fuit. À Dunkerque, le bilan est de 5 000 morts.
79 En 1380 ils envoient leurs gens en garnison à Gramont.
80 En 1379, le comte envoie ses gens au Chastel de Lille, à Ypres où sont nommés chevaliers et gens d’armes de par le comte. Il laisse grande chevalerie à Audenarde, 16 requis sont explicitement nommés. En 1380, il met gens en garnison à Poperinghe. En 1381, après la levée du siège de Gand, le comte fait garnir Audenarde et Tenremonde pour garder les passages de la rivière. En 1382, à Tenremonde et Audenarde, il y a grant garnison de gens d’armes de par le comte. À Courtrai, le comte fait mettre garnison pour garder le pays de la Rivière, afin que les Gantois ne soient pas secourus. Il laisse aussi garnison de gens à Ardembourcq. À Dunkerque, la garnison et les Flamands partisans du comte défendent la ville. En 1383, après la prise de Gravelines, le roi y met une grosse garnison de gens d’armes. Les Gantois en 1381 ont une petite garnison à Gramont. Philippe d’Artevelde laisse à Bruges une grande quantité de ceux qu’il a amenée.
81 Comme en 1379 Ypres.
82 Toujours en 1383 à Bourgbourg, les Anglais face aux assauts des Français se défendirent tres fort et asprement de traits et de pierres car ils estoient grant gens et furent au nombre de 3 000 combattants et archers.
83 En 1379, les gens d’armes qui fuient Ypres le font sans chevaux ni harnois. En 1380, devant Audenarde, les 9 000 Flamands sont armés souffisamment. En 1381 l’auteur souligne la valeur symbolique de la prise de la bannière des Gantois : elle est portée à la comtesse qui la reçoit avec grande feste et grande joie. En 1382, les hommes d’armes des Gantois sont armez et embastonnez merveilleusement c’est-à-dire de façon étonnante. Les Gantois exécutent à l’épée les Brugeois qui fuient. Après la victoire du pont de Commynes, les gens d’armes du roi de France gâtent Poperinghe et plusieurs villes voisines où tous les gens qu’ils trouvent sont mis à l’épée.
84 Les Français sont à l’inverse présentés comme trop bien armés, c’est-à-dire très bien armés. L’armée du roi de France est dite composée de gens d’armes bien montez et armez. En 1383, Jean de Vienne utilise des arbalétriers, à Bourbourg et les Anglais se défendent de pierres et de traits.
85 L’auteur précise qu’en 1382, Philippe d’Artevelde fait amener contre Bruges plusieurs trebus et espringalles.
86 L’auteur ne mentionne pas de problèmes de coordination ou de commandement entre les alliés. Les Anglais gardent leur autonomie.
87 Les Flamands sont capables de mettre en place des embuscades, de faire des escarmouches, de mener l’assaut contre une place forte. L’auteur souligne devant Audenarde, la belle ordonnance de leurs troupes. Ils n’hésitent pas à affronter les armées du comte, du roi de France, s’allient avec les Anglais et combattent à leurs côtés, pas sous leurs ordres.
88 En 1382, pour souligner la rapidité de leur réaction, l’auteur précise que trois jours après la bataille du pont de Commynes, les Flamands contre-attaquent. Pour les Français, il fait remarquer que le roi passe une nuit à Lens mais dès le lendemain se rend à Lille. Il rappelle le long séjour de Philippe d’Artevelde à Audenarde puis la vitesse de son déplacement vers Roosebeke : il loge un jour près de la ville, le lendemain se met en position.
89 L’auteur semble particulièrement frappé par la multiplication des sorties lorsqu’ils sont assiégés, y compris de nuit. Il souligne l’audace de ces combattants qui frappent le camp adverse par surprise. Ils savent choisir le bon moment pour mener une attaque, à Bruges lors de la fête de la Sainte-Croix par exemple, et exploiter l’avantage conquis sur le terrain en poursuivant l’ennemi jusque dans la place où il se réfugie.
90 Ils prévoient le démantèlement des portes, d’une partie des murs, le comblement des fossés des villes prises, placent des garnisons, disposent d’un parc d’artillerie et d’hommes servant les pièces et de spécialistes comme les arbalétriers.
91 Elle se marque par leur résistance en cas de siège, l’audace de leur entreprise par exemple lors de la prise d’Audenarde de nuit par ruse.
92 Ils concernent la durée des combats et des sièges, le nombre d’assaut, la description des dispositifs et des mouvements.
93 Il rappelle cependant qu’interviennent simultanément d’autres opérations au temps de ce siège, Encois que…
94 Denain et Gand ne sont pas assiégées en 1382 car il fait trop froid et trop frais. En 1383, le siège d’Ypres est levé car il y a trop de pertes.
95 Une abbaye près de Bruges est prise au premier assaut. Le comte de Flandre ne livre qu’un assaut contre les Gantois pour leur couper la route de Bruges. À Dunkerque, deux assauts opposent Anglais et Flamands. En 1383, Anglais et Flamands livrent un seul assaut contre Ypres, mais il est moult grand et moult pesant, en Flandre maritime un assaut suffit à décourager les Anglais au château de Druicamp, à Bergues, à Bourbourg, mais il est moult grand et cruel, au point que plus loin l’auteur parle de plusieurs assauts.
96 À Audenarde en 1379, il faut plusieurs grands assauts. De même, en 1382, Tenremonde est prise à force d’assault. Au pont de Commynes, l’auteur évoque quatre assauts deux pour chaque camp, les Français commencent.
97 Deux fois, en 1380 et en 1382, l’auteur évoque la belle ordonnance des Flamands, mais sans plus.
98 Les descriptions de dispositifs concernent principalement l’armée comtale et surtout royale, avec une attention particulière aux points de rassemblement. L’auteur évoque la contagion de la rébellion en 1379 et la dispersion des troupes rebelles après chaque opération majeure.
99 Les mouvements des trois armées qui se succèdent en Flandre et des Anglais sont relevés selon le nombre de combattants impliqués.
100 Si les Français sont à cheval, ils disposent leurs batailles en séparant gens de pied et cavaliers.
101 L’auteur consacre en la matière la plus grande part à l’évocation des armées de Flandre rassemblées par le roi.
102 Seule l’année 1381 fait exception.
103 Selon Froissart, Jean Peirel ou Prunel est capitaine des chaperons blancs, avec trois cinquanteniers des portes, après la mort de Jean Yoens, doyen des navieurs, des bateliers.
104 Le personnage amené ensuite à Lille au comte de Flandre est décapité. En fait le comte reproche aux Gantois d’avoir rompu la paix en abattant les portes et les murs d’Audenarde. Le maire et les jurés désavouent Jean Prunel, tout en justifiant sa conduite. Ils invoquent le témoignage du duc de Bourgogne qui sait que cette démolition était une des clauses du traité, clause qu’à sa prière, ils ont bien voulu abandonner. Après un échange de dépêche, un accord se fait : Audenarde est rendue au comte, Jean Prunel est banni de Flandre pour avoir pris Audenarde à l’insu des Gantois, sans en avertir les jurés de la ville. Jean Prunel se retire à Ath. Le comte fait réparer les murs d’Audenarde et se fait remettre par le duc Aubert, régent de Hainaut, Jean Prunel, qui est décapité en avril à Lille et que le comte fait mettre avec d’autres sur une roue comme traître.
105 Après Pâques, les bourgeois et échevins de Bruges vont jusqu’à Arras supplier le comte de Flandre de se rendre dans leur ville. Ils renouvellent leur démarche cette fois avec succès après la victoire des Brugeois sur les Gantois venus abattre une forteresse près de Bruges. À l’inverse, en septembre 6 000 Flamands d’Ypres et de Gand partent d’Ypres et se portent contre le comte, les Brugeois et les Français.
106 Le terme ne vient pas non plus sous sa plume pour Courtrai qui se dresse contre le roi de France.
107 Au château de Druicamp, ils sauvent leurs vies et leurs biens, alors que les Flamands sont tués ou jetés en prison. Ils quittent Cassel et Bergues malgré l’alarme donnée par les femmes et les enfants. À Bourbourg, ils quittent la ville avec les bourgeois. Les Français, qui entrent dans la ville, massacrent ceux qui sont restés.
108 En 1381, le comte met en fuite les Gantois de Grammont, en 1382, à son tour il doit fuir de manière honteuse de Bruges en petit équipage. La longue description présente sa déchéance comme une sanction.
109 Lorsqu’un groupe de six cents Gantois reprend par surprise la ville, les combats font un grand nombre de morts, il y a des prisonniers, mais beaucoup réussissent à fuir sans doute en raison du faible effectif des vainqueurs. Lorsqu’en 1384 la ville est reprise à l’initiative du sire d’Escornay, beaucoup de Gantois sont tués, les autres s’échappent et rentrent à Gand.
110 En 1383, Anglais et Gantois attaquent Ypres mais abandonnent le siège compte tenu des pertes. En Flandre maritime, les Anglais de Cassel se replient sur Gravelines. À Bergues, les Français, qui ont attaqué en vain, se retirent et les Anglais, dans la nuit, se replient sur Bourbourg, puis sur Gravelines, enfin ils négocient leur reddition. Le repli le plus impressionnant est celui de l’armée de Flandre, le roi estimant que la prise d’Audenarde ferme le passage vers Gand, et que, faute de vivres, il doit quitter le pays et traiter avec les Anglais. En 1384, le roi va en Flandre pour la troisième fois pour prendre la mer contre les Anglais, qui se défendent si vigoureusement qu’il est obligé de se retirer sans rien faire.
111 Ainsi en 1382, à Dunkerque, après l’échec du premier assaut, les Anglais se rassemblent et attaquent à nouveau.
112 Ils interviennent en 1382 au pont de Commynes et contre Ardembourcq, en 1383 sur la Lys et contre Ypres.
113 La circulation des nouvelles va bien au-delà de l’espace flamand puisque les bonnes villes de France, et en particulier Paris, prennent modèle sur les Flamands.
114 Les Brugeois, en 1380, connaissent les déplacements du comte à Lille et ils le rencontrent à Arras. L’auteur mentionne, au siège de Tenremonde, la réaction des Gantois au pillage du pays par les bannis, par l’attaque d’une forteresse près de Bruges. Ils sont informés du mouvement du comte vers Bruges. Ypres et Courtrai apprennent son refus de pardonner. Ayant connaissance d’une opération de grande envergure sur Bruges, le comte accepte de traiter. À la reprise des hostilités, les Gantois avertis du mouvement du comte vers Ypres, envoie 14 000 hommes. À Ypres, 6 000 hommes, dans le même temps, font une sortie, elle échoue car le comte, renseigné sur l’opération, prépare trois embûches. En 1382, lors de la procession de la Sainte-Croix à Bruges, le comte apprend l’arrivée des Gantois. Prévenu des difficultés de Tenremonde et Audenarde, il demande de l’aide à Paris. Philippe d’Artevelde, à l’annonce de l’échec des communes, décide une attaque contre le roi.
115 Les trois notations concernant Roosebeke sont exceptionnelles. L’auteur rappelle que les seigneurs de France témoignent du bon ordre des Flamands, il renvoie au témoignage d’aucuns disant que jamais si grande armée n’est venue de France, en particulier par rapport à la première. Après la bataille, il remarque d’après le témoignage de plusieurs anciens de l’ost royal, que l’on n’a jamais entendu parler de si grande défaite et de si peu de perte du côté du vainqueur
116 Le roi, à Ypres, fait crier l’interdiction du pillage.
117 Enfin en 1384, les Gantois, après la prise d’Audenarde, se plaignant de la violation de leurs franchises, le sire d’Escornay doit se justifier.
118 Compte tenu de la défection de la population, un grand nombre d’habitants d’Ypres suivent les Gantois en Flandre et à Bruges. En 1380, après la victoire des Gantois, Poperignhe se dresse contre la garnison. Le refus du comte de pardonner unit les exclus, mais Ypres et Courtrai se rendent devant sa démonstration de force. En 1382, les Flamands sont stupéfaits au pont de Commynes de trouver des bateaux amenés par terre par le comte. Philippe d’Artevelde est moult dolant de l’échec de Commynes. Si les canons flamands ébahissent les Français, les Flamands encerclés commencent à leur tour à esbahir et desconfire. Après la défaite, les Flamands, qui fuient hâtivement Audenarde, sont annaty et descouffis. En 1383, à Bergues, les femmes et les enfants protestent quand les défenseurs anglais plient bagages de nuit et les abandonnent aux Français. Enfin les Gantois sont très couroucés de la prise d’Audenarde par d’Escornay.
119 En 1380, après la reddition d’Ypres et de Courtrai, le comte prend des otages, les gardent à Lille, Douai et dans d’autres villes au-delà de la Lys. En 1381, l’auteur observe que les communes de Bruges, d’Ypres, de Courtrai et d’Audenarde ne se rebellent pas car le comte a pris des otages chez eux. En 1382, Philippe d’Artevelde prend à Bruges, cinq cents otages des plus notables et de ceux en qui il se fiait le moins et les envoie à Gand.
120 En 1379-80, les assiégés d’Audenarde ont souffrance de vivres. En 1381, le comte fait garder par Audenarde et Tenremonde les passages de la rivière et fait ainsi moult de maux à Gand et souffrir mainte disette. En 1382, les Gantois attaquent Bruges car ils ne supportent plus la disette. Face aux troupes du comte, ils se battent moult hardiment comme gens affamez et hors de sens. Le roi de France pour se gagner les habitants d’Ypres ordonne à ses hommes de payer tout ce qu’ils prennent. En 1383, les Français à Bourbourg tiennent Calais moult court de vivres. Le roi de France doit quitter le pays avec sa grande armée faute de fourrages et de quoi manger pour tous. Audenarde est reprise grâce au déguisement de gens d’armes en charretiers menant trois charrettes de foin et de bois.
121 L’auteur évoque des villes sans garde comme Courtrai en 1382, Cassel en 1383, des villes recevant du comte des gardes comme en 1379 Audenarde et Ypres. Gramont en 1380 est garnie par les Gantois. En 1382, Courtrai reçoit une garnison pour garder le pays de la rivière. Ces gardes qui veillent sur les portes sont les premiers tués en cas de prise de la ville par surprise, comme en 1383 à Audenarde.
122 En 1380 encore, la victime est cette fois l’ost du comte pillé par les Gantois. Les Gantois pillent les environs d’Audenarde et d’Alost, lors d’une sortie.
123 En 1382, Commines et ses environs, ceux d’Ypres, mais pas la ville elle-même sont mis à sac.
124 Bruges paie 120 000 francs or pour l’éviter. Les Français sont alourdis par le butin ramenés des pillages, qui sont si nombreux et si importants que le comte de Flandre s’en lamente. Ardembourcq, Cassel, Bergues, Bourbourg sont pillées. Les Bourguignons à Bergues pillent tout ce qu’ils trouvent, surcroît d’acharnement.
125 Les Gantois en sont les premiers responsables puis les Français.
126 En 1380, le feu qu’ils jettent à l’intérieur de Tenremonde accompagne l’assaut des Gantois. En 1381, il intervient lors du siège de Gand, lorsque le Hainaut et le pays tenant le parti du comte est touché. En 1382, les Gantois incendient plusieurs maisons à Tenremonde et Audenarde. À défaut de prendre Lille, ils parviennent à faire brûler beaucoup de belles maisons. Courtrai, Dunkerque brûlent en 1383. Cassel est brûlée au moment où le roi arrive, de même Bourbourg, Gravelines.
127 Elles concernent en 1379 un chastel près de Gand, des maisons sur le port de l’Écluse où se vendent les marchandises et en 1380, une porte et seize pieds de murs de chaque côté.
128 En 1382, Philippe d’Artevelde fait abattre à Bruges trois portes, trente pieds de murs de chaque côté et combler les fossés. Poperinghe est gâtée, c’est-à-dire dévastée, en 1383 tout le pays de Flandre. Les Bourguignons qui prennent Bergues la dévastent, le sire d’Escornay en1384 venge sa terre gâtée, sa maison brûlée et détruite.
129 En 1379, le bailli de Gand est assassiné et un chevalier qui garde la porte à Ypres. En 1380, les trois cents lances d’Enghien sont massacrées. À Audenarde, Ernoul Le Clerc n’a que 600 hommes, qui sont perdus en raison de l’arrivée d’autres Gantois.
130 Les troupes françaises, les Bretons en particulier, tuent sans merci les gens quand ils traversent le pays de Flandre. À Druicamp, à Bergues, à Bourbourg, le massacre est systématique. En 1384, le sire d’Escornay venge la mort de ses amis sur les Gantois d’Audenarde.
131 En 1382, les Brugeois offrent de se rendre au roi, au comte de Flandre.
132 En 1380 : Tenremonde, Poperinghe ; en 1381 : Gramont ; en 1382 : Dunkerque ; en 1383 : Cassel, le château de Druicamp, Bergues, Audenarde sont pris par force. C’est le cas, même lorsque la ville n’oppose aucune défense, faute de garde, comme à Cassel.
133 En 1380 : Bruges, Ypres, Courtrai, en 1382 : Bruges, en 1383 : Bourbourg,
134 Cette distinction recoupe d’autres clivages entre tenants du comte et opposants, puis entre combattants de l’armée anglaise, Flamands des villes rebelles, autochtones.
135 En 1380, 1381 ils sont tués lors de la prise de la place, d’où l’inquiétude légitime du comte pour les défenseurs d’Audenarde.
136 En 1380, 1382 à Ypres. Quelques exceptions sont notables : Courtrai, où les Français vengent une humiliation de plusieurs lustres, et des villes comme Bourbourg, où la clémence du roi ne s’étend qu’aux troupes anglaises pas à ses sujets révoltés, qui sont exécutés.
137 Les Gantois décident de l’arrêt ou de la reprise des négociations en 1379, 1380, 1382 avec les Brugeois et les Anglais, à l’initiative de Philippe d’Artevelde. En 1383, elle revient aux Français.
138 S’entremettent, en 1380, le duc de Bourgogne, beau-fils du comte, en 1382 le duc et les princes de France. Les ambassadeurs du roi au siège d’Audenarde sont l’évêque de Laon, le seigneur de Raineval, panetier de France, maître Regnault de Corbie, président du Parlement, et Guy d’Harcourt, chevalier du Grand conseil du roi. La même année, le roi envoie plusieurs notables prélats en ambassade en Flandre.
139 Les Gantois passent en 1379 des alliances avec les villes, qui prennent leur parti. En 1380, ils négocient plusieurs journées à Pont-à-Rosne. Le comte, qui au départ ne veut pas faire de concessions, finit par traiter, pour sauver la chevalerie d’Audenarde, et par s’accorder avec les Gantois, pour sauver Bruges.
140 L’auteur montre en 1382 Gand qui fait alliance avec les Anglais et les Brugeois qui passent aux Gantois. Ypres, à l’arrivée du roi de France, se rend par traité et le roi lui épargne le pillage. Bruges négocie sa soumission sans pillage. Mais les Gantois, qui souhaitent des conditions égales, restent sans paix, sans accord, en l’indignation du roi et de tous les seigneurs, faute d’obéir au comte. Les Gantois confirment leur grande alliance avec les Anglais qui tiennent la mer et en 1383, refusent une paix séparée avec le roi de France. En 1383, la paix entre les rois de France et d’Angleterre échoue en raison de cette alliance jurée et scellée à seur.
141 Les Gantois estiment que la prise d’Audenarde par Escornay est une rupture de trêve.
142 L’auteur observe d’abord en 1381, que le comte n’a pas toujours fait son devoir envers le roi et même qu’il a mal fait. En 1382, le roi exige du comte un hommage en préalable à toute aide. Il observe avec finesse que le conseil donne ordre au frère du roi de l’accompagner en Flandre.
143 Les villes rebelles jouent d’une situation qui ne peut leur échapper, puisque les seigneurs de France, favorables au pape Clément, refusent de se mêler aux Flamands, partisans du pape Urbain. Ainsi les Brugeois promettent d’obéir d’abord au roi, puis, dans un second temps seulement, au comte.
144 En 1383, les Bourguignons tuent tous les Flamands de Bergues. En 1384, lorsque Arnould de Gavre, seigneur d’Escornay reprend Audenarde pendant des trêves, les Gantois protestent que les franchises sont enfreintes. Le vainqueur répond qu’il a agi seul, sans l’ordre ni le su du roi ou du duc, pour se venger des dommages qu’il a subis. L’auteur ne précise pas qu’il a été victime lui-même d’exactions lors d’une trêve.
145 L’auteur relève, pour souligner son ancrage familial dans la région, qu’il rentre en France en s’arrêtant chez la tante de sa femme, en Hainaut.
Auteur
Professeur de l’Université de Provence, UFR Civilisations et humanités, département d’Histoire
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