Santimamiñe, grotte
Kortezubi, Biscaye
p. 226-231
Texte intégral
Le site
1La grotte de Santimamiñe est située dans la faille sud-est du mont Ereñusarre, dans la marge droite du bassin moyen de la rivière Oka, dans la municipalité de Kortezubi.
2La grotte s’élève à 140 m au-dessus du niveau de la mer, au sein des calcaires urgoniens du Crétacé inférieur. Le porche est actuellement d’environ 6 m par 3,25 et s’ouvre sur une salle d’environ 40 m de développement, formant une courbe à mi-chemin. Plus loin, un passage étroit donne accès à la première salle intérieure dans laquelle s’ouvrent, à gauche, la chambre et l’antichambre des Peintures. La galerie principale s’étend de manière plus ou moins sinueuse sur 400 m, sans bifurcations latérales. Malgré cela, les motifs pariétaux sont connus uniquement dans les 120 premiers mètres de la cavité.
3Le vestibule de la grotte de Santimamiñe a connu une occupation sensiblement constante et ininterrompue au cours du Paléolithique récent et de la Préhistoire tardive, d’après la révision de J.M. Barandiarán (1976) sur les deux premières phases de la fouille. Toutefois, certaines propositions de ce dernier sont à considérer avec prudence, compte tenu des révisions ultérieures (Straus 1974, Utrilla 1976).
4Les fouilles actuelles, dirigées par J.C. López Quintana, montrent une séquence légèrement différente. D’une part, l’étendue limitée de l’intervention peut ne pas refléter la complexité stratigraphique du vestibule et certains niveaux détectés lors des premières fouilles, par exemple le plus ancien, peuvent être absents. D’autre part, les caractéristiques sédimentologiques seraient en correspondance avec certains des niveaux profonds des séquences « ancienne » et « moderne » (López Quintana & Guenaga Lisazo 2006-2007, López Quintana 2011), ce qui impliquerait une contradiction dans la caractérisation culturelle des mêmes niveaux. Si tel est le cas, la redéfinition des industries paléolithiques de la cavité donnerait une vision différente de son occupation.
5À la base de la séquence, deux niveaux paléontologiques ont été distingués respectivement avec des dates comprises entre 26 890 et 20 530 BP. D’autre part, les plus anciennes phases d’occupation paléolithique (attribuées à l’Aurignacien dans les anciennes fouilles) appartiendraient au Magdalénien inférieur ancien, suivies des niveaux du Magdalénien moyen et supérieur (attribués autrefois au Gravettien – avec réserves – et au Magdalénien, inférieur et supérieur). Enfin, il y a aussi des niveaux aziliens et différents moments de la Préhistoire récente.
L’art préhistorique de Santimamiñe
6L’ensemble paléolithique pariétal de Santimamiñe est réparti sur les 120 premiers mètres de la grotte, et principalement concentré dans une galerie latérale s’ouvrant à 60 m de l’entrée.
7Le bison est l’animal le plus représenté (n = 29 soit 56,8 %) du bestiaire (n = 51 figures au total). Le cheval arrive loin derrière (n = 6), suivi des caprinés (n = 7 dont quatre très hypothétiques), puis de l’ours (n = 1), du cerf (n = 1) et de quadrupèdes indéterminés (n = 3). On peut encore signaler une tête de biche, près de l’entrée, configurée par des reliefs naturels. En dépit des opinions de plusieurs chercheurs (Aranzadi et al. 1925 : 66-67 ; Gorrotxategi 2000 : 289), C. González Sainz et R. Ruiz Idarraga (2010 : 20) l’admettent comme œuvre préhistorique.
8Le panneau principal de la salle des Peintures représente un cheval central entouré d’une « ronde » de bisons. Tout autour de ce groupe, d’autres panneaux complètent l’ensemble avec, à nouveau, des bisons, mais aussi un ours, un cerf, deux bouquetins. Avant de parvenir à la salle des Peintures, on passe par une antichambre, où sont encore rassemblés sur les parois et le plafond au moins six bisons et trois chevaux. Ces différents ensembles dominés par le bison sont bien représentatifs des choix des Magdaléniens cantabrique et pyrénéen (Niaux, Le Portel, Altamira, etc.).
9Loin du groupe de la salle des Peintures si lourd de symboles, à environ 120 m de l’entrée, après un parcours tortueux semé d’obstacles (passages étroits, descentes abruptes), on trouve, très isolées, les dernières représentations de la cavité : sur les deux parois, presque en vis-à-vis, un bison et cheval.
Les représentations de bouquetins de Santimamiñe
10La grotte de Santimamiñe compte trois représentations certaines de bouquetin. La première est située à environ 50 m de l’entrée, dans la galerie principale, juste en face de l’entrée de l’antichambre qui mène à la salle des Peintures, tandis que les deux autres sont situées dans la chambre principale des Peintures. Quatre autres représentations, parfois évoquées comme possibles bouquetins (González Sainz & Ruiz Idarraga 2010 : 132), sont trop douteuses pour être retenues ici. Une dernière figure, située tout au fond de la grotte, a longtemps été considérée comme une tête possible de bouquetin. Cependant, C. González Sainz et R. Ruiz Idarraga (2010) reconnaissent que l’animal est « parfaitement indéfinissable », bien que sa tête rappelle celle d’un lièvre.
11Tous les bouquetins de Santimamiñe ont été dessinés en noir au charbon, mais sont de conceptions très différentes. Le bouquetin de la galerie principale est assez naturaliste. Il possède deux longues cornes et semble figuré en mouvement (Santimamiñe f.1). Les deux autres sont représentés verticalement. L’un est très schématique, figuré à l’aide de quatre traits (Santimamiñe f.2). L’autre, sur la paroi d’en face, est traité de façon plus naturaliste avec les modulations de la tête et du contour et la probable utilisation d’une concrétion pour figurer la corne (Santimamiñe f.3). Malgré leurs différences stylistiques, ces bouquetins présentent des caractéristiques communes avec les animaux environnants (bisons, chevaux, ours, cerf), qui sont tous de conception artistique typique du Magdalénien des Cantabres et des Pyrénées.
Le bouquetin emblématique de Santimamiñe
12Le bouquetin de la galerie principale est celui qui présente l’aspect le plus naturaliste (fig. 2). Il a un gabarit qui s’apparente à ceux de Niaux ou d’El Bosque et qui répond le mieux aux critères de forme magdaléniens. Avec son cou mince et dressé et ses longues cornes très arquées qui reviennent au milieu du dos, il semble en alerte et sur le point de s’élancer. Malheureusement, les membres sont perdus, ainsi que les détails du museau. Il semble que ce soit un bouquetin alpin, car on ne décèle aucune évocation d’une double inflexion des cornes.
Inventaire
Santimamiñe 1
auteurs : I.I.A., D.G.M.
art pariétal
Culture : Magdalénien
Identifiant : Figure 1 (Gorrotxategi 2000), figure 2.0.4. (González Sainz & Ruiz Idarraga 2010)
Localisation : Galerie principale, salon
Support : Calcite sur calcaire, paroi
Technique : Dessin, charbon de bois
Dimensions (figure) : L. 210 mm x h. 190 mm
Bouquetin représenté : Complet
Profil ou vue : Profil droit
Genre : Mâle
Description cornes : Deux cornes, longues, sans anneaux, simple courbure.
Style : Naturaliste
Compo./association : Semble isolé, même si, quelques mètres plus loin, on trouve la représentation d’un animal indéterminé.
Description : En raison d’un mauvais état de conservation, on ne voit plus de cette figure de bouquetin que son encornure, une oreille, le départ du front, une partie de la ganache, le cou (large), le ventre, peut-être une queue et la ligne cervico-dorsale qui s’achève en une croupe bien marquée. Le museau a été effacé, comme les extrémités des pattes avant et arrière.
Gorrotxategi 2000, González Sainz & Ruiz Idarraga 2010
Santimamiñe 2
auteurs : I.I.A., D.G.M.
art pariétal
Culture : Magdalénien
Identifiant : Figure VIII.4 (Aranzadi et al. 1925), figure 36 (Gorrotxategi 2000), figure 4.4.4 (González Sainz & Ruiz Idarraga 2010)
Localisation : Galerie latérale, chambre
Support : Massif stalagmitique, paroi
Technique : Dessin, charbon de bois
Dimensions (figure) : L. 170 mm x h. 130 mm
Bouquetin représenté : Complet
Profil ou vue : Profil droit
Genre : Indéterminé
Description cornes : Deux cornes, longues, sans anneaux, double courbure
Style : Schématique
Compo./association : Associé à l’arrière-train d’un cheval (très effacé), à un ours et à une tête de cerf, tous dessinés en noir.
Description : Ce bouquetin, présenté à la verticale, est réduit à trois lignes de contour : une pour dessiner la ligne cervico-dorsale et une corne ; une autre pour indiquer la seconde corne et la ligne fronto-nasale ; une dernière pour tracer le poitrail et la patte antérieure. Le dessin, réalisé à sec avec un charbon de bois, est extrêmement schématique et contraste avec l’ours et le cerf du même panneau, de représentation très naturaliste.
Aranzadi et al. 1925, Gorrotxategi 2000, González Sainz & Ruiz Idarraga 2010
Santimamiñe 3
auteurs : I.I.A., D.G.M.
art pariétal
Culture : Magdalénien
Identifiant : Figure VIII.4 (Aranzadi et al. 1925), figure 46 (Gorrotxategi 2000), figure 4.8.3 (González Sainz & Ruiz Idarraga 2010)
Localisation : Galerie latérale, chambre
Support : Massif stalagmitique, paroi
Technique : Dessin, charbon de bois
Dimensions (figure) : L. 185 mm x h. 62 mm
Bouquetin représenté : Complet
Profil ou vue : Profil droit
Genre : Indéterminé
Description cornes : Une corne, courte, annelure et courbure indéterminées
Style : Naturaliste
Compo./association : Ce bouquetin appartient à un petit panneau également composé d’un animal indéterminé vertical et d’un boviné hypothétique.
Description : Ce bouquetin, représenté à la verticale, tête en haut, serait presque complet si les pattes étaient bien conservées. Plusieurs détails sont figurés : l’oeil, le chanfrein concave et le museau arrondi. La concrétion dans le prolongement de la ligne frontale pourrait représenter une courte corne et elle a pu déterminer l’orientation de l’animal : elle crée un creux derrière la nuque et donne du volume au corps. Ce bouquetin est remarquablement intégré dans son support, comme de nombreux exemples de l’art magdalénien.
Aranzadi et al. 1925, Gorrotxategi 2000, González Sainz & Ruiz Idarraga 2010
Bibliographie
Aranzadi et al. 1925, Straus 1974, Utrilla 1976, Barandiarán Ayerbe (de) 1976, Gorrotxategi 2000, López Quintana & Guenaga Lizaso 2006-2007, González Sainz & Ruiz Idarraga 2010, López Quintana 2011.
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