La Noël en Provence à l’époque contemporaine
p. 199-212
Texte intégral
1Les traditions de Noël occupent aujourd’hui une place particulière dans les représentations collectives de la Provence et dans l’image de la région que proposent guides touristiques, revues régionales, prospectus des offices de tourisme1. Un tel constat pose en fait un problème plus général : comment, parmi les pratiques collectives largement partagées en une ville, ou en une région, certaines peuvent-elles accéder à un moment donné au statut de tradition2 ? Comment certaines de ces traditions peuvent-elle connaître une promotion hors de l’espace dont elles sont perçues comme une des caractéristiques ? Les traditions provençales posent de plus un problème spécifique, celui du rôle que le Félibrige, ce mouvement identitaire et régionaliste fondé en 1854 par Frédéric Mistral a pu jouer dans leur rayonnement et surtout leur « maintien », pour user du terme qu’emploient ses membres.
2J’examinerai ici quatre traditions qui sont les plus couramment citées et dont la notoriété et la diffusion semblent inégales hors de l’aire de leur pratique3.
- Le santon d’abord, figurine de la crèche provençale. Son artisanat a fait naître au cours du XXe siècle une profession à plein temps, celle de santonnier4. L’essentiel des fabricants de santons répertoriés depuis deux siècles est actuellement en activité. Des artisans, voire de petites entreprises dynamiques, sont parvenus à s’emparer d’un marché qui excède largement les Provençaux et même leurs visiteurs. Les santonniers tiennent aujourd’hui une part du marché international de la crèche de Noël. Ils ont déjà obtenu la création de foires d’été, pendant la saison touristique. Ils demandent un label d’appellation d’origine contrôlée pour lutter contre la concurrence des pays à faibles salaires. C’est dire l’enjeu que constitue désormais le santon.
- Le second cas relève des aspects alimentaires de la fête. Le « repas de Noël », c’est-à-dire, le plus souvent, celui de la veille de Noël, dit le « gros souper », est marqué dans nombre de familles et désormais dans les restaurants par la recherche d’un menu « provençal », fait de mets et de préparations considérés comme « traditionnels ». Ce « gros souper » est surtout caractérisé par sa terminaison, les « treize desserts ». Il est intéressant d’observer que ces pratiques alimentaires soulèvent à travers la Provence d’amples débats sur leur impossible codification : de nombreuses listes de mets et de desserts ont été publiées ou circulent.
- Certaines messes de minuit ont acquis une réputation qui excède la région, à cause de la présence de tambourinaires, jouant d’un instrument perçu comme typiquement provençal5, et de chorales qui interprètent des cantiques en provençal. Ces cérémonies comprennent souvent une séquence d’offrandes, dite couramment « pastrage », au cours de laquelle des bergers, des pêcheurs ou des cultivateurs, en costumes anciens ou réputés traditionnels, apportent en procession le produit de leur travail6.
- Une autre tradition n’a apparemment obtenu en revanche qu’une célébrité assez restreinte hors de Provence, à cause de l’obstacle que constitue la langue vernaculaire. Le théâtre de Noël, la pastorale, est ordinairement joué devant des salles combles entre le 25 décembre et le 2 février à travers la Basse-Provence et une partie du Comtat. Il trouve donc un public fidèle qui n’a d’ailleurs plus guère d’autre occasion d’entendre une pièce en provençal.
3Le point commun de ces traditions, aux yeux de l’historien, est de ne guère remonter dans leur forme actuelle en-deçà de l’époque contemporaine, en dépit d’un légendaire d’origine qui s’efforce de leur conférer une forte ancienneté7.
4Un héritage d’Ancien Régime n’est qu’assez peu perceptible dans les pratiques actuelles. Un rôle essentiel a été tenu par les pères de l’Oratoire de Provence qui sont parvenus à implanter en Basse-Provence urbaine la « quarantaine de Noël », un long cycle s’étalant du 25 décembre au 2 février, jusqu’à la Chandeleur, alors qu’ailleurs, la Noël correspond ordinairement aux « douze jours » (du 25 décembre au 6 janvier)8. Que la fête dure plus d’un mois a sans doute permis au XIXe siècle de rentabiliser les pastorales, les crèches monumentales ou mécaniques, et même de retenir plus facilement les noëls en provençal, plus souvent chantés devant la crèche. Les Oratoriens semblent avoir aussi introduit la crèche à Aix et Marseille vers 1644-1650, dans le cadre de leurs efforts pour encourager la dévotion à l’Enfant Jésus du Carmel de Beaune9. Les représentations de la Nativité constituées de figurines sculptées ou de mannequins de cire habillés ont commencé alors de se propager lentement dans les églises et dans quelques foyers aisés, ainsi que de petites « niches » (boîtes vitrées) renfermant une scène de la Nativité en pâte de verre ou en mastic modelé dans un paysage de rocailles en papier froissé. À la veille de la Révolution, des spectacles de marionnettes ou d’automates commençaient aussi à mettre en scène la Nativité. Mais c’est à la fin de la Révolution, vers 1797, que Jean-Louis Lagnel (1764-1822), un Marseillais obscur, qui était sans doute mouleur dans une faïencerie, a mis au point les santons. Ces figurines en argile moulée et peinte sont destinées à partir du Concordat de 1801 à des crèches publiques ou familiales. J.-L. Lagnel et ses suiveurs ont créé un très grand nombre de personnages, inspirés par les passants des rues et les petits métiers de l’époque. Ils ont eu un tel succès qu’à Marseille, la foire de Noël où ils étaient vendus est devenue au milieu du XIXe siècle la « foire des santons »10.
5L’on sait également désormais11 que Marseille et Avignon sont, avec Toulouse, les principales villes de création et d’édition de cantiques de noëls de la France du Sud du XVIIe siècle jusqu’au milieu du XIXe. L’œuvre du chanoine Nicolas Saboly d’Avignon a été sans cesse rééditée de la fin du XVIIe siècle à nos jours, fait sans équivalent dans les pays de « langue d’oil » où l’on a pourtant composé aussi beaucoup de noëls. Trait plus original, ces cantiques étaient chantés en Provence devant les crèches des églises pendant la quarantaine de Noël.
6La pastorale de Noël a pour origine une courte pièce rédigée vers 1770 par l’abbé Thobert, directeur de l’Œuvre de la jeunesse des prêtres du Sacré-Cœur de Marseille. Son livret, édité au XIXe siècle, consiste en une série de cantiques de Noël reliés par de courts dialogues. De plus, des « crèches parlantes », petits théâtres de marionnettes, se sont développées dans la première moitié du XIXe siècle à Marseille, Aix et Toulon. Leur succès était dû à la mise en scène de types sociaux variés dans une série de saynètes dialoguées, entrecoupées de chants de noëls12. Certains de leurs personnages, tels le chasseur ou le pêcheur à la ligne, ont été transformés en santons. Le miroitier marseillais Antoine Maurel (1815-1897) a enfin eu l’idée d’écrire une véritable pièce, en s’inspirant de la « pastorale Thobert » et des livrets des crèches parlantes. Sa pastorale a été créée à Marseille pour la Noël de 1842-1843 dans une salle associative de la rue Nau où elle est toujours jouée, un siècle et demi plus tard, par une troupe d’amateurs. De très nombreuses pastorales ont été ensuite écrites sur son modèle au cours du XIXe siècle, « la Maurel » restant cependant la plus jouée, surtout de nos jours13. Certains villages en ont une qui leur est propre14.
7Le pastrage correspond au vieux rite de l’offrande solennelle à l’Église, par un corps de métier, du produit de son travail. Sous l’Ancien Régime et au début du XIXe siècle, l’offrande de Noël, encore très localisée, était le fait des confréries d’éleveurs du pays d’Arles, des Alpilles et de la Montagnette15. Il s’agit du seul rite essentiellement rural qui ait été promu au titre de tradition provençale de Noël16.
8En revanche, l’étude des pratiques anciennes des repas de Noël révèle l’existence d’un rituel qui fut perçu entre le XVIe et le XIXe siècle comme caractéristique de la France méditerranéenne17, le cacho-fio, la bénédiction par le plus âgé de la famille, au moyen d’un verre de vin, d’une grosse bûche qui doit ensuite brûler pendant deux jours dans l’âtre18. Cette pratique domestique est très difficile à suivre, mais elle semble avoir décliné au cours de la seconde moitié du XIXe siècle dans la Provence urbaine avant même que l’on cesse d’utiliser les cheminées à foyer ouvert, la population ne comprenant plus apparemment sa signification propitiatoire. La formule qui était alors prononcée, réduite à l’essentiel, « si sian pas maï, que fuguen pa men » (si nous ne sommes pas plus nombreux, que nous ne soyons pas moins), est néanmoins couramment utilisée encore, mais comme vœu pour le nouvel an.
9Il résulte de ce rapide historique que les actuelles traditions de Noël correspondent à des innovations nées principalement à Marseille au cours du XIXe siècle alors que la tradition par excellence d’Ancien Régime, le cacho-fio, a disparu en dépit des efforts des félibres, et en premier lieu de ceux de Frédéric Mistral.
10Le poète a en effet décrit la veille de Noël dans un excursus de Mireio, publié en 1859 en annexe du poème, dont la raison d’être est de fournir la description du cacho-fio. Mistral y reviendra longuement à la fin de sa vie dans son récit autobiographique, Mémoires et récits (1906), pour évoquer la Noël de son enfance19. Entre temps, il a fait reconstituer la scène du cacho-fio au Museon arlaten d’Arles, dans un diorama peuplé de mannequins qui met en scène la soirée de Noël. Un autre félibre, Baptiste Bonnet, avait peu auparavant décrit le cacho-fio dans sa Vido d’enfant, récit également autobiographique, auquel une traduction et une préface d’Alphonse Daudet donnèrent quelque retentissement (1894)20. Ce combat d’arrière-saison des premières générations du Félibrige restera vain, ce que traduit d’ailleurs de façon sans doute involontaire et pathétique le diorama du Museon arlaten, où le geste de l’ancêtre n’a pour spectateur attentif que le chien de la maison, les autres personnages ne lui prêtant qu’une attention distraite.
11En fait, l’idéal passéiste du Félibrige s’inscrit à contre-courant de l’évolution générale de la fête en France, sinon en Europe occidentale21. F. Mistral et et B. Bonnet exaltent dans la veillée de Noël la fête des anciens et même des morts de la famille22. Dans sa naïveté, le récit de Baptiste Bonnet trahit l’idéalisation d’une conception ancienne de la Noël sans doute déjà battue en brèche lorsqu’il écrit : l’événement est constitué par la venue des grands-parents paternels au foyer de ses parents ; il n’est guère question que de ces « bons vieillards », centre de toutes les attentions, dans son récit. Lui-même, alors adolescent, s’éclipse après le repas pour rejoindre le cabaret où l’on joue au loto et où il parvient à gagner la dinde du lendemain. C’est donc l’enfant qui apporte un cadeau de Noël à sa famille23.
12Il est loisible de suivre, au contraire, à travers les articles de l’abondante et prolixe presse marseillaise du XIXe siècle, le succès croissant des crèches, des santons et des pastorales. Dès la Monarchie de juillet, la génération qui prend la plume connaît la crèche domestique depuis son enfance et la considère comme une évidente tradition. Sous le Second Empire, la presse parisienne découvre à son tour la crèche marseillaise ; les écrivains locaux prennent alors conscience qu’il s’agit d’une originalité marseillaise ou aixoise – les santons se sont alors déjà diffusés depuis Marseille dans les villes proches. Par un paradoxe qui n’est qu’apparent, la ville qui est le symbole de la modernité en Provence sécrète alors des traditions et les propage. Les pratiques domestiques qu’elle promeut avec le plus d’efficacité sont, sans surprise, conformes à l’évolution de la Noël que connaissent alors les grandes villes du XIXe.
13Pour qui fait-on en effet la crèche à Marseille, à qui offre-t-on des santons, et pour qui va-t-on aller en famille assister à la crèche parlante ou à la pastorale ? La réponse est évidente sous la plume des journalistes marseillais : pour les enfants, qui sont progressivement devenus les rois de la fête à l’époque contemporaine. Là réside vraisemblablement une première explication du succès croissant que remportent crèche et pastorales tout au cours du XIXe siècle et surtout vers sa fin.
14Néanmoins ce succès est mû par une raison plus profonde sans doute : entre la Monarchie de juillet et les débuts de la Troisième république, la Noël devient une occasion privilégiée pour transmettre aux générations montantes deux héritages menacés, du moins à Marseille : la culture religieuse et surtout la culture provençale24. La messe de minuit et celle du jour de Noël attirent à l’église certains pratiquants désormais très irréguliers alors que l’usage du provençal commence à être perçu par certains prêtres comme celui de « la langue du cœur », d’autant plus susceptible de toucher le fidèle qu’il fait référence à son enfance. La visite des crèches des églises commence de même à drainer des foules qui en ont parfois déserté le chemin – certaines de ces crèches deviennent fort spectaculaires à la fin du siècle par le nombre de leurs figurines ou leur mécanisation. Dans un processus de francisation et d’alignement progressif des usages sur un modèle français, les célébrations calendales (ce provençalisme est déjà significatif25) tendent à constituer un élément de résistance identitaire. Le santon fige des costumes surannés qui vont devenir les costumes traditionnels des groupes de maintenance folklorique de la Basse-Provence. La pastorale devient un conservatoire linguistique ; elle va jouer un rôle capital dans la transmission d’un répertoire de cantiques de noëls à travers les générations.
15Le Félibrige s’était très tôt soucié d’encourager la publication des recueils de noëls d’Avignon pourvu qu’ils adoptassent les normes orthographiques édictées par F. Mistral. Lorsque l’éditeur-félibre marseillais Paul Ruat acquiert les droits de la « pastorale Maurel », l’orthographe mistralienne achève de conquérir le foyer marseillais, très partagé à l’égard du Félibrige. En revanche, les félibres découvrent tardivement à la fin du XIXe siècle que la Noël est devenue la principale des fêtes identitaires des trois principales villes de Provence, Marseille, Aix et Toulon. Le souci des félibres va être, dès lors, de faire passer certaines de ses pratiques d’une originalité de fait progressivement perçue à une provençalité volontariste, en particulier par une normalisation des rites et une tentative d’épuration de tout ce qui ne leur paraît pas conforme à la tradition. Cette action qui consiste à vouloir réformer des pratiques collectives au nom d’une plus grande authenticité, est sous-tendue par la volonté de faire reconnaître aux groupements félibréens une autorité d’expertise quasi exclusive en matière de culture provençale. Les moyens d’action des félibres ont été avant tout l’impression : non seulement grâce à une presse spécialisée et à des articles en « lango nostro » dans la grande presse régionale, mais surtout par la diffusion d’almanachs, de petits livres et de brochures, telles les diverses éditions de la Petite histoire des santons de Marcel Provence26. Une modeste plaquette distribuée gratuitement par l’imprimeur-félibre A. Roquebrun vers 1930, significativement intitulée La Noël en Provence, traditions, coutumes et cérémonies mises à la portée de tous, portait même au revers de la couverture cet « avis important : la période de Noël terminée, le 2 février, au moment de renfermer votre crèche et ses santons, n’oubliez pas d’y joindre aussi cette brochure que vous retrouverez, avec plaisir certainement, l’an prochain ». Elle est à l’origine de l’Art de faire la crèche, dont les versions successives ont été publiées jusqu’à nos jours par les félibres de l’Escolo de la Mar27.
16La codification félibréenne des traditions calendales repose sur quelques principes sous-jacents à ces textes multiples. Sont particulièrement valorisées celles qui paraissent spécifiques à la Provence, ou du moins à une de ses parties – car elles peuvent implicitement dans ce cas être élargies à l’ensemble de la région, au prix de menues variantes locales. Le fait qu’elles ne semblent pas attestées ailleurs en France ne suffit pas cependant à les rendre typiques de l’aire provençale. Il convient de surcroît qu’elles interfèrent de façon constitutive avec des éléments de la « maintenance » félibréenne, soit avant tout la langue, le costume, les aliments et pratiques culinaires. Il convient aussi qu’elles soient susceptibles d’évoquer de façon suggestive la permanence dans cette célébration annuelle d’un héritage de paroles, gestes, objets venus du passé régional et cycliquement repris dans le présent. Outre quelques pratiques jugées malséantes28, les aspects qui semblent communs aux autres régions de France, tendent à être passés sous silence, voire dévalorisés. Mistral avait écrit en 1879 dans le Trésor du Félibrige qu’« à la Noël, dans toutes les familles provençales, il est d’usage de manger une dinde », ce que nombre d’articles de la presse marseillaise confirment à travers tout le XIXe siècle. Mais ce volatile n’a rien de spécifiquement provençal. Dans les Mémoires et récits, rédigés trente ans plus tard, le poète ne l’évoque plus dans sa description de la Noël ; à vrai dire, il ne parle guère que du « gros souper », le repas maigre de la veillée du 24 décembre29, pour lequel il fournit un menu qu’il déclare composé de « plats sacramentels ». Suit une courte énumération de mets que le poète va rendre très partiellement canoniques30. Il ajoute que le repas s’achevait par « un tas de friandises réservées pour ce jour-là ».
17Les félibres des deux premières décennies de ce siècle vont soulever la question, apparemment inusitée jusqu’alors, du nombre exact de ces desserts. Ce petit débat à travers les publications félibréennes conduira, dans des conditions qui restent d’ailleurs un peu obscures, au choix du nombre symbolique de treize, qui correspond au Christ et aux douze apôtres31 et qui sera progressivement adopté par toute la Provence au cours du XXe siècle32. En revanche, aucune « liste officielle » ne pourra évidemment en être établie ou plus exactement imposée, car cette norme quantifiée est susceptible de multiples variations locales ou familiales.
18L’action des félibres sera très pragmatique en matière de santons. Les éditions successives de l’ouvrage de l’Escolo dei félibres de la mar comportent deux listes : « ce qui doit figurer à la crèche » et « ce qu’il ne faut pas mettre à la crèche ». Les exclusions sont de quatre types : les sujet d’un autre matériau que l’argile (plâtre et celluloïd)33, les animaux exotiques (« les poissons rouges, les crocodiles, les fauves »), les constructions apparemment jugées « anachroniques » (« les églises, châteaux forts, gratte-ciels, gares et voies ferrées ») et enfin « les sujets tels que prêtres, pénitents, frères des écoles chrétiennes, religieuses, poupons, petits lutins, pères noël, pompiers, crieurs de journaux ». Les premiers étant « anachroniques » par rapport à la Nativité, les suivants étrangers à la culture provençale et les derniers trop « modernes ». Ces refus excluent aussi tout apport de jouets d’enfants (château fort, gares, animaux de celluloid, poupons, lutins…) : la représentation de l’ancienne Provence tend vers le diorama lilliputien. Le dépôt de quelque offrande enfantine à l’Enfant Jésus, encouragé par des familles pieuses, est dès lors perçu comme une incongruité. Il n’en est pas de même de tel santon représentant Frédéric Mistral et même, entre 1940 et 1942, le Maréchal Pétain. Les jurys des concours de crèches d’église et de foyers organisés jusqu’à nos jours par les associations félibréennes se prononcent selon des règles très précises, qui ne sont point toujours connues des candidats, où la recherche esthétisante fait parfois mauvais ménage avec ce que l’on pourrait croire être la tradition34.
19En revanche, les félibres ont avalisé – ne serait-ce que par leur silence discret – de considérables transformations de l’art « santonnier ». Au début du XXe siècle, Thérèse Neveu (1862-1946) a mis au point à Aubagne, près de Marseille, le santon actuel en façonnant d’harmonieuses figurines qu’elle faisait cuire dans le four de la fabrique de poterie de sa famille. La cuisson, rendant imperméable la surface du santon, faisait perdre à sa coloration son aspect doux et satiné ; elle allait imposer le passage de la détrempe à la gouache. Mais le santon, plus solide, pouvait ainsi être expédié au loin, alors que les figurines simplement séchées au soleil étaient très fragiles. Un prêtre marseillais, l’abbé César Sumien (1858-1934), a réalisé vers 1916 la synthèse des santons et des figurines habillées des crèches d’église en créant le « santon habillé », un mannequin à la tête et aux extrémités des membres moulées en argile cuite, auquel une armature en fil de fer permet de donner des attitudes expressives. Sa postérité a été considérable.
20Le Félibrige a enfin joué un rôle dans le maintien du caractère provençal de la « messe de minuit » grâce à ses groupes de « maintenance » folklorique, en costumes « traditionnels » et à ses tambourinaires. Il n’est sans doute pas étranger à la diffusion des « offrandes en costume » qui se sont multipliées au cours des dernières décennies à travers des régions qui ne les connaissaient pas, tel le département du Var.
21L’élévation au rang de traditions identitaires de la Provence de certaines pratiques a connu cependant des refus et des limites. Parmi les refus opposés par les félibres, l’on citera sans surprise le sapin de Noël, qui a été introduit avec un rapide succès vers 1860 à Marseille par les membres de l’Église réformée, et très vite adopté (sous la forme d’un pin) par des patronages catholiques et qui est donc presque aussi ancien dans la ville que la pastorale mais est, évidemment, exogène. Je citerai enfin deux cas de traditions qui ne sont guère connues hors de l’espace provençal ou même des zones d’influence des villes de Basse-Provence et qui présentent le handicap de se situer durant le temps de Noël mais non au moment de la Nativité.
22Un petit rite d’ouverture du cycle de l’Avent, le 4 décembre, est constitué par la plantation dans une soucoupe où l’on a étalé un peu d’ouate humide des grains de blé dits de la Sainte-Barbe. Cette pratique est bien attestée par les auteurs du XIXe siècle car ils ont cru y lire une réminiscence des « jardins d’Adonis » antiques. Elle est aussi mentionnée par Mistral dans Mireio35. Elle reste très vivace dans l’aire marseillaise et aixoise où des commerçants exposent leurs plantations dans leurs vitrines et où, depuis quelques années, ses sachets de grains sont vendus par les santonniers des foires et aussi par la Fondation Maguy-Roubaud qui œuvre au profit des enfants hospitalisés. Mais la signification de ce blé verdoyant au cœur de l’hiver est ignorée ; l’on sait seulement que sa bonne poussée est un présage de fécondité, jugé ordinairement un rien puéril sinon « superstitieux » et il sert à orner la crèche ou bien la table de Noël. Voici l’exemple même d’une tradition qui semble survivre en tant que telle en dépit d’un déficit de sens, sous forme de geste ancestral qu’il s’agit de perpétuer en tant que tel.
23La terminaison du cycle de Noël, le 2 février, à la Chandeleur, est désormais la plus importante fête mariale de Marseille, dans la basilique de Saint-Victor. Elle est marquée par la vente du cierge vert et d’un biscuit de marine au façonnage particulier, les navettes. Mais les cérémonies de l’octave, organisées autour de la statue de la Vierge noire des cryptes, ne sauraient être imitées ni même transférées ailleurs, bien que la basilique s’avère alors trop étroite pour abriter les fidèles. Le conseil paroissial de Saint-Victor a de plus le monopole de la vente des cierges verts et une entreprise voisine de la basilique détient l’exclusivité de la fabrication des navettes, qui sont une marque déposée. La chandeleur « victorine » a tendu à devenir au cours des dernières années la cérémonie identitaire des catholiques marseillais, promotion qui semble en exclure tout marqueur explicite de provençalité, tels que costumes ou cantiques ; la crèche paroissiale elle-même est peu provençale36. La chandeleur marseillaise semble illustrer un cas de figure intéressant où le maintien de traditions fortement liées à la croyance (le cierge béni que chaque fidèle emporte chez lui après l’avoir fait brûler pendant la cérémonie et qui servait naguère à « signer » les agonisants) semble incompatible avec ce qui pourrait être perçu comme une « folklorisation ». Elle vient opportunément rappeler que la « provençalité » de la crèche et surtout de certains aspects de la messe de minuit ne font nullement l’unanimité parmi des prêtres et des paroissiens pratiquants, ces derniers se sentant parfois évincés de leur église par une population qui ignore les répons et les rites.
24Le bilan que l’on vient de tracer peut heurter quelques idées reçues. La tradition s’y révèle pour l’essentiel relativement récente et d’origine urbaine, ce qui ne saurait d’ailleurs étonner outre mesure l’historien. L’on observera cependant que nombre de traditions de Noël tendent actuellement à glisser des villes vers les villages et bourgs du « triangle sacré » compris entre Aix, Arles et Avignon, bastion de la provençalité revendiquée. Autre trait, la tradition est partiellement élaborée avec un succès variable de façon volontariste par un groupe qui estime avoir légitimité à le faire et dont la force réside dans l’autorité que confère l’écrit pour diffuser ou relancer une tradition. On peut enfin ajouter que la tradition est aussi maintenue grâce au jeu de la demande et de l’offre et donc en partie perpétuée par des commercants.
25La Noël, revenant à date fixe de façon cyclique tout en étant proche du « bout de l’an » qui marque au contraire l’écoulement irréversible du temps, était sans doute par définition un moment privilégié pour la reprise d’année en année de gestes et de pratiques qui marquent la perpétuation en un lieu d’une communauté ou d’une famille, d’autant qu’elle est aussi temps de réunions et regroupements, donc de la transmission d’une mémoire. Il n’est pas surprenant qu’elle soit devenue un conservatoire de traditions, en particulier linguistiques ou culinaires, au moment où était fortement ressentie dans une ville telle que Marseille l’accélération des mutations économiques et l’uniformisation nationaliste des cultures. Ces traditions donnent l’illusion de la permanence d’un art de vivre provençal idéalisé.
26Aucune des traditions provençales de Noël ne semble dans l’immédiat menacée. Des problèmes risquent néanmoins de se poser à terme. La raréfaction des provençalisants est déjà manifeste et la survie de la pastorale ou des chants de Noël ne pourra sans doute être assurée que par d’habiles traductions versifiées en français régional qui permettront de sauvegarder les airs, comme le suggère d’ailleurs l’adaptation en français qu’Yvan Audouard en a proposée, qui jouit d’une nette diffusion hors de la Provence sous forme de disque37. L’imbrication des aspects religieux et identitaires pourrait aussi poser problème. Il y a un siècle, les fidèles reprenaient en chœur le refrain des noëls et les figurines de la crèche de l’église sortaient du même atelier que les statues de carton ou de plâtre qui surmontaient ses autels. Les santons actuels sont esthétiquement bien éloignés pour la plupart des icônes qu’affectionne la catholicité actuelle. L’intrusion soudaine à la messe de minuit d’une culture orale autochtone qui n’est pas compréhensible à tous peut aussi être perçue comme contradictoire avec l’unanimisme de la fête par des fidèles originaires d’autres régions. La poursuite de l’évolution des traditions, voire l’intégration de nouvelles, est ainsi fort vraisemblable.
Notes de bas de page
1 L’on peut se reporter pour un très bref tableau des usages actuels à R. BERTRAND, « Noël en Provence », Pays de Provence (Marseille), n° 20, novembre-décembre2000, p. 54-69. À signaler aussi, parmi une surabondante bibliographie très répétitive, l’ouvrage de P. GALLOCHER, Noël provençal, Paris-Marseille, 1986.
2 Cette problématique fait directement référence à É. HOBSBAWM et T. RANGER éd., The Invention of Tradition, Cambridge, 1983 et rééd. Cf. en particulier, p. 4: « Inventing tradition (…) is essentially a process of formalization and ritualization, characterized by reference to the past, if only by imposing repetition ».
3 M. BAKER, Discovering Christmas Customs and Folklore, Guide to Seasonnal Rites, Princes Risborough, 3e éd., 1994, petit ouvrage anglais aux multiples rééditions depuis 1968, ne retient p. 88-89 que le pastrage des Baux, la foire aux santons et la crèche. W. WHEELER, Noël, Turin, 1995 (adaptation française d’un texte américain), mentionne p. 13-17 la crèche provençale et les santons et p. 62-64 le « gros souper ». Fr. LEBRUN, Le livre de Noël, Paris, 1983, signale le cacho fio, p. 43-44, les pastorales et crèches parlantes, p. 47, le pastrage, p. 49 ; elle consacre un développement à « la crèche provençale », p. 108-111, au gros souper, p. 161-163, à la « galette (sic) provençale » des rois, p. 184. Les navettes de la Chandeleur y sont mentionnées p. 180, mais comme biscuit de Noël. N. CRETIN, Le livre de Noël, fêtes et traditions de l’Avent à la Chandeleur, Paris, 1997, mentionne p. 20 le blé de la Sainte Barbe, p. 59, la pastorale, p. 62 et 125, les santons, p. 97, les treize desserts, p. 136, les cierges de la purification et les cérémonies de Saint-Victor de Marseille.
4 Les fabricants de santons du XIXe siècle étaient soit des « figuristes », mouleurs de statuettes dont le santon ne constituait qu’un aspect de la production, soit des personnes exerçant des métiers fort variés pour qui cette fabrication était une ressource d’appoint. R. BERTRAND, « Naissance du métier de santonnier à Marseille », Marseille, n° 161, 1991, p. 60-65 et Crèches et santons de Provence, Avignon, 1992.
5 M. GUIS, T. LEFRANÇOIS et R. VENTURE, Le galoubet-tambourin, instrument traditionnel de Provence, Aix, 1993.
6 Description récente : « La messe de minuit aux Baux de Provence. Cérémonial de la veillée de Noël et de l’offrande des bergers », Prouvenco 2000, 1987/4 et tirés à part, Nîmes, 1987.
7 Les représentations de scènes de la Nativité sur les sarcophages paléochrétiens d’Arles ne préfigurent en rien les santons, contrairement aux affirmations rapides de nombre d’auteurs. La solution de continuité est nette entre les mystères médiévaux et la pastorale et cette dernière ne saurait en dériver.
8 A. VAN GENNEP, Manuel de folklore français contemporain, t. I, vol. VII, Cycle des douze jours, Paris, 1958, se borne aux p. 2855-2858 à signaler le fait sans lui porter une attention particulière.
9 Cf. la communication de Bernard Hours.
10 R. BERTRAND, Crèches et santons, op. cit., et « Ce petit peuple d’argile. La foire aux santons au XIXe siècle », Marseille, n° 179, 1997, p. 95-102.
11 Grâce à la thèse de J. EYGUN, Au risque de Babel. Le texte religieux occitan de 1600 à 1850, Béziers, 2002.
12 Sur les marionnettes, N. LASCAR, « La crèche parlante et mécanisée du Musée du Vieil-Aix », Provence Historique, t. XXXI, fasc. 125, 1981, p. 195-212. Sur les livrets et la chronologie des spectacles, M. JEAN, « Les crèches parlantes et mécanisées en Provence », Bulletin des Amis du Vieux-Toulon, n° 107, 1985, p. 49-69 et surtout C. SANMARTIN, « La crèche parlante. Un théâtre de marionnettes en Provence au XIXe siècle », mémoire de maîtrise d’Histoire dactyl., Aix, 2000.
13 A. GIRAUD, Un théâtre populaire du temps de Noël. Inventaire bibliographique des pastorales théâtrales en Provence, Paris, 1984 ; du même auteur : « Antoine Maurel et Marseille », La France latine, N° 110, 1990, p. 87-101.
14 Eyguière (Bouches-du-Rhône) a la « Riboun », œuvre des frères Perret, auteurs locaux ; Séguret (Vaucluse) et Fours (Alpes-de-Haute-Provence) ont de très courtes pastorales proches par leur principe de celle de l’abbé Thobert.
15 C’est ce que permettent de conclure les réponses des maires à l’enquête préparatoire à Ch. de VILLENEUVE dir., Statistique des Bouches-du-Rhône, Marseille, 1826, t. III (Archives départementales des Bouches-du-Rhône, 12 M).
16 L’offrande du poisson par les pêcheurs et les poissonnières dans l’église Saint-Laurent de Marseille (aujourd’hui dans l’église Saint-Ferréol) a débuté le 25 décembre 1919, au moment où cette paroisse du quartier des pêcheurs tendait à devenir un conservatoire des traditions par des prédications en langue vernaculaire. Ce rite a été alors transposé de l’offrande des bergers des Baux.
17 Le cacho fio était en fait pratiqué avec des variantes en d’autres aires : les attestations rassemblées par A. VAN GENNEP, Manuel, op. cit., p. 3063 et sq. le prouvent. Signalons une illusion analogue à propos du caleu, la lampe à huile à bec en fer découpé, souvent considérée comme caractéristique de la Provence alors qu’elle était répandue à travers l’Europe. Contrairement aussi à une idée reçue, le fait d’appeler les fruits secs « les quatre mendiants » par analogie de couleur avec la robe de ces ordres religieux, n’est nullement propre à la Provence.
18 La plus ancienne attestation, très précise, est celle du Bâlois Thomas Platter qui en fut témoin le 24 décembre 1597 chez son logeur à Uzès. En dernier lieu : E. LE ROY LADURIE éd. et trad., Le voyage de Thomas Platter, 1595-1599, Paris, 2000, p. 299-300. À signaler, sa mention dans le rapide récit de la veillée du 24 décembre 1646 à bord d’un vaisseau provençal qu’en donne B. de MONTCONYS, Journal des voyages de Monsieur de Montconys, Lyon, 1665 et rééd, passée inaperçue jusqu’ici : « Le soir, l’on fit bonne collation de ce qu’il y avait de meilleur au vaisseau ; selon la coutume des Provençaux, ils mirent la nappe dans la chambre de poupe où étaient 13 couverts, 13 pains et un plat de figues, raisins et amandes, qu’ils y laissèrent toute la nuit et aussi la bûche au feu, après l’avoir auparavant liée d’une corde que tous tenaient et avoir dit trois fois Au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit ; puis ils la mirent au feu et y jetèrent un peu de vin dessus ».
19 F. MISTRAL, Mireille (Mireio), éd. de Charles Rostaing, Paris, 1978, p. 485-489 ; Mémoires et récits. Mes origines (Moun espelido. Memori e raconte), Paris, 1906 et rééd., chapitre II, « Mon père », et chapitre III, « Les rois mages », p. 19-41.
20 B. BONNET, Vido d’enfant, traduction et présentation par Alphonse Daudet, rééd., Nîmes, 1968, « La veille de Noël », p. 120-137.
21 Sur l’idéologie du Félibrige, P. PASQUINI, « Le Félibrige et les traditions », Ethnologie française, 1988/3, p. 257-266 et Ph. MARTEL, « Le Félibrige » dans Pierre Nora éd., Les lieux de mémoire, t. III, Les France, vol. 2, Traditions, Paris, 1992, p. 566-611. Sur l’évolution de la fête à l’époque contemporaine, M. PERROT, Ethnologie de Noël. Une fête paradoxale, Paris, 2000.
22 « Et longuement, autour du feu, on y parlait des ancêtres et on louait leurs actions », F. MISTRAL, op. cit., p. 25-26.
23 De même il n’est nullement question de cadeaux aux enfants chez F. Mistral. Cf. les descriptions des mutations de la fête dans M. PERROT, Ethnologie de Noël, op. cit.
24 Cf. parmi bien d’autres, cette remarque d’un érudit marseillais : « Faire la crèche en Provence, est un acte de foi double : foi en l’Enfant-Dieu mais aussi foi dans le pays où l’on est né ». P. RIPERT, Les origines de la crèche provençale et des santons populaires à Marseille, Marseille, 1956.
25 F. MISTRAL précise bien dans Lou tresor dou Felibrige ou dictionnaire provençal-français, Paris, 1979, t. I, p. 426 à l’article « Calèndo » que ce mot signifie « les fêtes de la Noël en Provence » (adjectif, « calendau, alo », qui appartient à la Noël) et renvoie aussi à « Nouvé », qui signifie de façon plus étroite Noël (et les noëls), t. II, p. 419. On sait qu’il a choisi de nommer Calendau le héros de l’un de ses poèmes.
26 M. PROVENCE, Petite histoire familière de la crèche et du santon, Aix, 1926, L’histoire du santon, Aix, 1926, 1928, Nouvelle édition, 1934, 1937, 1942, Nouvelle histoire du santon, Marseille, 1949 et également : L’ami du santon, Aix, 1936 et Noël au pays de Provence, Aix, 1936. Sur ce félibre (1892-1951) qui obtint l’installation d’une baraque de santons à Paris, sur le boulevard des Capucines, pendant l’Entre-deux-guerres : Collectif, Un fou de patrimoine, Marcel Provence, Barcelonnette, 1995.
27 L’art de faire la crèche, publié par l’Escolo dei felibre de la Mar, Marseille, 1942 (31 p.), 1954. Autour de la crèche, vers 1967 (127 p.), L’art de faire la crèche, 1979, 1987 (156 p.). La modification du titre est significative de l’importance croissante prise par la crèche parmi les « traditions de Noël ».
28 Les rares auteurs félibréens qui signalent incidemment les inversions et mascarades des fêtes des fous qui ont pu avoir lieu plusieurs siècles auparavant au cours du « cycle des douze jours », en particulier lors de la « Fête des innocents » ne proposent nullement leur rétablissement. Cf. F. BENOÎT, La Provence et le Comtat venaissin, Paris, 1949 et plus généralement, J. HEERS, Fêtes des fous et carnavals, Paris, 1983.
29 « Fidèle aux anciens usages, pour mon père, la grande fête, c’était la veillée de Noël », F. MISTRAL, Mémoires et récits, op. cit., p. 24.
30 Voir les enquêtes documentaires de J. RICARD, Le gros souper à Marseille, Marseille, 1955 et d’A. BOUVEROT-ROTHACKER, Le Gros souper, Marseille, 1982.
31 Un auteur marseillais du XVIIe siècle, Fr. MARCHETTI, Explication des usages et coutumes des Marseillois, Marseille, 1683, explique ainsi la présence de treize pains sur la table de Noël de son temps. Il est souvent invoqué par les félibres, parfois de façon très déformée pour justifier ce nombre. Je signalerai une autre source éventuelle : L.-P. BÉRENGER, Les soirées provençales ou lettres sur la Provence, Paris, 1787, t. I, p. 169, qui énumère au sujet du repas de la veillée de Noël treize « mets exquis de cette collation tout à la fois splendide et champêtre » ; à noter aussi qu’il est le premier à signaler sur la table le vin cuit, avec la malvoisie et le muscat.
32 Je suis ici les analyses de B. BRÉGEON-POLI, « Va pour treize ! La tradition des desserts de Noël en Provence », Terrain, n° 24, 1995, p. 145-152 et « Les 13 desserts de Noël : genèse d’une tradition », Marseille, n° 179, 1997, p. 107-111.
33 Cf. R. BERTRAND, « Argile fine ou plâtre vil, quel matériau de tradition pour le santon provençal ? », dans J.-P. BRUN et Ph. JOCKEY éd., Techniques et sociétés en Méditerranée, Hommage à Marie-Claire Amouretti, Paris, 2001, p. 399-408.
34 Selon une lauréate de l’Escolo de Lar d’Aix, devenue membre du jury, cette association exigerait que la représentation des rochers soit obtenue au moyen de pierres soigneusement choisies et elle porterait sa réprobation sur le papier d’emballage froissé, qui est le matériau par excellence de la crèche depuis deux siècles.
35 « E dins tres blànquis escudello / Greio lou blad nouvèu, premicio di meissoun » (et dans trois blanches écuelles, germe le blé nouveau, prémices des moissons), F.MISTRAL, Mireille, op. cit., p. 487.
36 Cl. LAURENT, « La chandeleur à Saint-Victor de Marseille, pluralité des pratiques », dans N. BELMONT et Fr. LAUTMAN éd., Ethnologie des faits religieux en Europe, Paris, 1993, p. 43-52.
37 Y. AUDOUARD, La pastorale des santons de Provence, Paris, 1962 et rééd. 1986. La traduction par Ch. GALTIER du livret le plus souvent mis en scène, La pastorale Maurel ou le Mystère de la Naissance de N.-S. Jésus-Christ, Marseille, 1978, permet déjà à nombre de spectateurs comprenant mal le provençal de suivre la pièce.
Auteur
Professeur à l’Université de Provence – Aix-en-Provence
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Les sans-culottes marseillais
Le mouvement sectionnaire du jacobinisme au fédéralisme 1791-1793
Michel Vovelle
2009
Le don et le contre-don
Usages et ambiguités d'un paradigme anthropologique aux époques médiévale et moderne
Lucien Faggion et Laure Verdon (dir.)
2010
Identités juives et chrétiennes
France méridionale XIVe-XIXe siècle
Gabriel Audisio, Régis Bertrand, Madeleine Ferrières et al. (dir.)
2003
Des hommes à l'origine de l’Europe
Biographies des membres de la Haute Autorité de la CECA
Mauve Carbonell
2008