Gerbert d’Aurillac et la politique impériale ottonienne en 983 : une affaire de chiffres censurée par les moines ?
p. 235-273
Texte intégral
1Des circonstances ont conduit Gerbert à créer l’événement en 983 : chiffres indo-arabes et orgue hydraulique ont été adressés à l’empereur-disciple Otton II et à son épouse, la byzantine Théophano, afin de renverser la situation gravement problématique dans laquelle l’abbé de Bobbio se retrouvait. La réaction monastique fut celle de se libérer d’un abbé impérial, étranger, dangereux « réformateur », et par surplus poète, mathématicien et musicien, et d’étouffer l’affaire. Le résultat constaté fut l’éjection de l’abbé et l’amputation de son Liber, rendu anonyme et renvoyé enfin aux fonctions de feuillets de garde d’un Graduel monastique.
Les études sur le Carmen figuratum attribué à Gerbert d’Aurillac
2En 1999 s’est tenu à Bobbio un deuxième congrès sur Gerbert d’Aurillac pour le millénaire de son élection papale1. À cette occasion M. Michel Huglo a fait référence à un article de M. Clyde Brockett, professeur et éditeur de musicologie aux États-Unis, à la Christopher Newport University de Virginie : une publication inconnue des autres conférenciers présents à Bobbio et qui avait paru en 19952. D’autre part le Carmen « explicite » avait déjà été imprimé comme œuvre anonyme par Bernhard Bischoff et Gabriel Silagi en 1979 dans les Monumenta Germaniae Historica3.
3M. Brockett avait eu l’opportunité de reprendre le texte, le lire dans la bonne direction, y retrouver des versus intexti dont la dédicace de Gerbert à Otton (II) et Théophano, et identifier en même temps les figurae du Carmen, c’est à dire les chiffres « arabes » de 1 à 9 et deux signes additionnels4.
4Intéressé par certains détails, nous nous sommes appliqué à retraduire en 2001 le texte qui avait été édité. L’épigramme en particulier, renfermé dans les calligrammes, nous apparut incompréhensible tant en latin qu’en anglais. Le contexte historique était aussi mal identifié.
5Cette même année paraissait une édition phototypique du MS, avec une étude introductive de notre collègue Marie-Noël Colette de Paris IV5. Elle publiait une analyse du Graduel d’Albi, dénommé de Gaillac (Paris, BnF, Lat. 776), qui contient justement au début le dessin avec le Carmen inscrit6. Notre excellente collègue a fait une analyse minutieuse, mais non sans quelques imprécisions (et fluctuations) concernant : la datation et la décoration du manuscrit et son influence sur plusieurs mss du XIe et XIIe siècles ; l’absence de ligaturae, de cédilles et de la réglure dans le Carmen et son support ; enfin, quant au fait que le poème aurait été copié « au XIIe siècle ou encore plus tard » en dernier sur un feuillet laissé vide, et afin de profiter de l’ouvrage du savant (et pape) dans une perspective de propagande. Il s’agit en fait bel et bien d’un bifolium d’un codex plus grand, qui a été coupé et adapté au Graduel en récupérant du même coup son dessin. De plus, comme pour les manuscrits de Raban Maur, le dessin est sur la page de gauche alors qu’en face à droite il devait y avoir transcriptions, paraphrases et commentaires de même que dans son prototype plus ancien. Nous avons donc affaire au reliquat – le bifolium extérieur – d’un codex antérieur, d’un Liber ainsi que l’indique l’épigramme, à épaisseur modeste, peut-être 16 feuillets, récupéré en ce qui pouvait être ornemental pour le Graduel, en éliminant malheureusement tout le reste de la composition, y compris le nom de l’auteur. Il s’agit d’autre part, même dans cet état, d’une copie, et pas du tout de l’original, malgré un essai de M. Brockett de vieillir le codex d’un siècle, et donc de le ramener vers Gerbert7.
6En 2003 paraissait notre première recherche qui réétudiait et replaçait la pièce en apportant plusieurs corrections, et qui obtenait un bon accueil8. Une conférence assez étoffée à mi-décembre 2003, dans le cadre d’un colloque de médiévistes, conçue comme état de la question, se transforma en une nouvelle étape de la recherche (découverte de la quantité des lettres du Carmen, 800, et d’un « distique » dans l’épigramme final) dont les résultats furent publiés en 2004 ; ainsi « naissaient » les douze niveaux cryptés9.
7La même année vit aussi se réunir le 11 septembre à Bobbio un colloque sur Gerbert d’Aurillac : une relation du collègue Emmanuel Poulle s’attaqua au travail de Clyde Brockett de 1995 et aussi à notre publication de 2003 dans Archivum Bobiense 24. Cette critique ne tenait pas suffisamment compte de ce que nous avions écrit et fut publiée avec les Actes en 200510. Une réponse de notre part aux divers points soulevés parut aussi en 2005 dans la revue elle-même, Archivum Bobiense 2611. Plusieurs collègues nous ont donné leur accord, parfois même enthousiaste, et nous ont fait remarquer ne pas vouloir revenir sur ce qu’ils avaient déjà affirmé après notre premier article de 2003.
8Voilà donc des mises au point essentielles et nous renvoyons, pour les détails aux études déjà publiées.
Le poème « explicite »
9Les quatre strophes sont ainsi inscrites dans le dessin12 :
101. le long de l’orbite du soleil sur le cercle ; 2. le long du premier carré ; 3. le long du deuxième carré ; 4. le long des rayons de la grande roue ou Chrismon depuis l’extérieur vers le noyau central : le 5e élément, crypté, correspond aux versus intexti, isolés dans le texte explicite grâce à des calligrammes.
11La lecture doit débuter en bas du dessin, là où est aussi indiqué l’orgue qui, dans une perspective liturgique, élève son son vers le haut où est nommé le Père, dont les bénédictions sont invoquées sur le centre du graphique : une seule ouverture vers le noyau, où aboutissent aussi les noms des empereurs et où se développent les mentions de Otton III, ainsi qu’une perspective « éternelle » pour la dynastie. La sens de la lecture est « horaire ».
12Gerbert place son intervention et ses dons dans une perspective unitaire du cosmos, de la création et de la providence divines ; il y rattache les arts (la musique), la fonction impériale et sa propre relation avec l’empereur. Le moment est crucial : il s’agit de l’association au pouvoir en tant que roi du « petit » Otton III pour laquelle Gerbert exprime ses bons vœux, alors que lui-même est accusé de trahison, en relation à la défaite subie par son souverain.
Contexte de la composition
13Dans le texte du Carmen, grâce au jeu des grandes lettres « O » et « T », apparaît une situation dans laquelle nous retrouvons déjà superposés les noms des empereurs au texte des vers. En isolant les lettres apparaissent : Otton I, avec un « T », sur les bras de la croix, structure de base ; Otton II, avec deux « T » sur la « X », actuel « oint de Dieu », et Otton III avec 3 « T », le long des carrés centraux13, sortes de orbis quadratus. Si l’on considère la présence de Gerbert, comme abbé, et celle de Théophano avec Otton II, la période à retenir est très réduite. Elle va de mai 981 au 7 décembre 983, jour du décès d’Otton II à Rome. De plus la mention d’Otton III, né en 980, se réfère au moment où il est associé au pouvoir comme roi, à Vérone à la Pentecôte du 22 mai 983, ce qui est exprimé aussi par le texte.
14La décision du couronnement conclut une période de crise, commencée avec la lourde défaite du Cap Colonne en Calabre, le 13 juillet 982, essuyée par Otton II et son armée face aux musulmans. Mais la défaite met aussi en lumière une crise entre le pouvoir impérial et les « Italiens », en particulier les grands feudataires, qui ne l’ont pas aidé et sont les probables coupables désignés.
15Voilà que, parmi ceux-ci, à Bobbio depuis probablement mai 981, se trouve Gerbert d’Aurillac, qui a une des plus riches abbayes et aussi la plus importante bibliothèque de l’occident latin. Mais il connaît de gros problèmes de gestion et des relations conflictuelles avec l’aristocratie régionale, en particulier les Obertenghi, comtes palatins, et les comtes de Plaisance. Les premiers occupaient une grande partie des biens abbatiaux, en particulier ceux qui étaient consacrés à l’entretien de l’armée (le beneficium virile), et en paralysaient ainsi le fonctionnement. Une situation causée par la gestion du royaume post-carolingien d’Italie, depuis Pavie, et aggravée par la politique d’allégeances d’Otton Ier14. En résumé probablement (cf. reum dans l’épigramme) Gerbert n’est pas intervenu avec ses soldats aux côtés de l’empereur, et il ne se présente pas non plus à la diète de Vérone, où sont nommés les autres grands feudataires. Il profite du séjour de la cour à Mantoue, autour du 20 juin, pour s’y rendre, s’y expliquer et parler des affaires de France selon la volonté de son archevêque de Reims, Adalbéron15. C’est aussi probablement pour cette occasion que sont préparés le Liber et l’objet qui l’accompagne, en tant que dons pour l’empereur et son épouse. L’entretien a été, semble-t-il, une réussite.
Le contenu ainsi que quelques éléments du Liber
16Il est alors important de s’attarder sur le Liber et sur l’objet. Le Liber est réduit à la copie d’un seul feuillet. L’analyse se fonde donc sur cette relique, et nous manquons du reste du texte et des explications de Gerbert qui ne devaient pas être de moindre importance : au vu de sa situation, il se devait de réaliser une opération de communication la plus claire et efficace possible. D’autre part sa fonction de compagnon / maître de l’empereur, qui était ancienne (déjà en 970-972 à Rome, puis de Noël et Pâques 980-981 à Pavie, Ravenne et Rome), le poussait à interpréter la situation aussi comme un enseignement par rapport au moment historique et à la situation de crise.
17Prenons acte enfin d’un procédé de style rédactionnel : Gerbert fait constamment évoluer les images et les suggestions, il n’est donc pas étonnant de retrouver d’autres actes communicatifs, tels une suite de « matrioske » ou poupées russes et des relectures appliquées à plusieurs niveaux.
La redistribution des vers
18M. Clyde Brokett, lors d’un très long travail, est parvenu à la redistribution des vers du poème16 qui reprennent 8 fois (chiffre important) le nom de Otton II en oméoarcton et oméoteleuton, et qui, placés en grille malgré la quantité inégale des lettres17, révèlent des versus intexti, correspondant à un épigramme ; les figurae contenant les vers dévoilent la série des chiffres arabes et de deux signes additionnels18 une « triquetra », ou triple zéro, qui soude le nom de Gerbert à celui d’Otton dans la perspective de la Trinité19 ; et un oméga, embrassant dans l’espace le nom de « OTTO », mais renfermant celui de l’impératrice « THEOPHANO » et correspondant significativement à la valeur numérique 800, cent fois celle de son époux20. Précisons que les chiffres arabes correspondent, selon ce que conjecturaient déjà Guy Beaujouan et Menso Folkerts, à la pratique attestée en ces années là en Catalogne (Codex Vigilanus)21.
Le tracé de quatre « K »
19Le redéploiement des vers, qui les fait passer de 28 (chiffre pythagoricien connu) à 32 (4 x 8), n’est pas fortuit, malgré ce qu’on en a dit. L’auteur le choisit selon un tracé particulier qui dessine quatre K22. Ces lettres rappellent le Codex aureus d’Echternach (Nürnberg, Germ. Nationalmus. 2° 156 142), peu postérieur à ces faits, et voulu par Otton III roi et sa mère Théophano impératrice (989) ; y figurent, disposés sur le tracé d’une croix, les 4 empereurs de la famille impériale constantinienne, écrits en lettres grecques ; COSTANT I (CLORUS), CONSTANTIN I, CONSTANTIN II e COSTANT II ; Gerbert, qui abrège très souvent les noms propres en une seule lettre, pouvait aussi renvoyer à une série d’un autre type et placer, à côté de Constantin, Charlemagne et César père et fils (dénomination habituelle pour indiquer les Ottons chez Gerbert), écrits tous avec des « K ». Il faut dire que le manuscrit d’Echternach en suit un autre, l’Évangéliaire de la Sainte-Chapelle, provenant aussi de St Maximin de Trèves (Paris BN Lat 8851) où figurent les souverains régnants, Otton Ier et II et les deux Henri, disposés de la même façon23. L’archevêque Ecbert de Trèves était un correspondant de Gerbert, déjà depuis Bobbio, quand il signalait à l’abbé l’envoi de fonctionnaires et enseignants de l’empire pour être formés à son école24. Notons comment le 4e « K », selon nous Otton II, pour être achevé doit se compléter avec le point de départ, une autre façon d’indiquer l’enracinement de l’empire chrétien dans ses origines, et l’étroite intrication graphique de la série. Enfin la mention du chiffre 800, total intentionnel des lettres du Carmen, outre à faire référence à l’impératrice évoque aussi le couronnement impérial de Charlemagne bien présent dans l’idéologie impériale ottonienne, en particulier dans celle de la Renovatio Imperii Romani25.
Le Chrismon et les sources de Gerbert
20Une telle interprétation est confirmée par les citations graphiques et textuelles de Gerbert : pour le dessin26 et dans un passage, il se réfère à Publilius Optatianus Porphyrius, poète (lui aussi en disgrâce) de Constantin le Grand, qui rédige toute une série de Carmina figurata où il utilise avec abondance le chrismon, ou symbole christologique, insigne victorieux de Constantin même, lié à la création de l’empire chrétien après les persécutions païennes ; l’inspiration – citation principale graphique, et par là idéologique – est tirée toutefois de deux poèmes figurés de l’année 888, au moment du couronnement de Eudes/Odo27 et de son épouse Théotrade28 comme souverains de France, après leur victoire contre les envahisseurs normands, premiers souverains non-Carolingiens (début des Capétiens). Il faut noter comment Odo = Otto se bat contre des soi-disant infidèles, de même que déjà Constantin est censé agir contre des païens et, bien avant, David contre les Philistins et les Moabites : et donc Otton II, qui s’était battu contre l’armée des musulmans envahisseurs depuis la Sicile la Calabre. Il faut souligner aussi que : Eudes a son poème inséré dans un chrismon simplifié, et il est indiqué comme celui qui utilise le signum de la croix, probablement porte-drapeau du symbole chrétien, donc à la suite de Constantin ; enfin que le chrismon simplifié revient dans le dessin de Gerbert, qui l’a rencontré aussi à Bobbio et à Ravenne29.
Le Chrismon et la lettre 28 au nom de Jérusalem
21Le chrismon de Gerbert est renforcé par la possibilité de la présence du Rhô, et par celle de la lecture dans la structure centrale, à miroir, des paroles qui accompagnent le chrismon de Constantin, « (en) touto nika », « que dans ce signe tu gagnes »30 ; et aussi les lettres apocalyptiques (alpha et oméga) qui figurent souvent dans les représentations du chrismon31. L’image reproduite comme en miroir semble renvoyer surtout à un drapeau présenté en tête d’une armée, qu’on montre tel un signe efficace et face à un ennemi qu’on affronte lors d’une marche.
22Un rapprochement intéressant (plusieurs sont les traits communs de langage et de style du Carmen avec les lettres et quelques écrits de Gerbert) peut être fait entre l’utilisation du chrisme et une lettre de Gerbert, la 28e, écrite au nom de l’Église de Jérusalem et adressée à l’Église universelle32. Il s’agit d’un appel qui vise en définitive le miles Christi, appelé signifer et compugnator, pour qu’il apporte son aide dans une perspective féodale (consilio et auxilio), avec ses biens, là où il n’est pas en mesure de se battre, comme dans le moment actuel. La lettre est datée de 984, quelques mois après que Gerbert ait laissé Bobbio, donc l’année qui suit le Carmen alors qu’Otton II est décédé et que Otton III est âgé de 4 ans.
L’acte de dotation de l’impératrice Théophano de 972
23Encore quelques éléments : les huit sphères, la structure semblable du dessin, la disposition monogrammatique des noms d’Otton Ier et Otton II, pouvaient renvoyer en tant que citation significative à l’acte de dotation matrimoniale de l’impératrice Théophano du 14 avril 97233. Gerbert se trouvait à l’époque à Rome, depuis un peu moins que deux ans, en qualité de probable maître en cour ; il était présent aux festivités des noces et pour certains (qui ignoraient tout de notre Carmen) il contribua à la préparation du document qui relève de soins très particuliers34.
L’orgue hydraulique et Gn 1,2
24L’une des citations érudites, reprend la description du fonctionnement de l’orgue hydraulique dans le Carmen figuratum à partir de celle de l’orgue de Publilius Optatianus Porphyrius35. La mécanique allie souffle et élément liquide ce qui réglemente, renforce, et maintient constante la pression de l’air36. Notre poème accompagne le don royal de l’instrument adressé à l’empereur. Il le décrit au début en tant que réglé et joué par le Créateur et il invite en conclusion l’empereur à l’utiliser dans la prière pour son propre fils. La IIe image est assez chargée de problématique et a été assez mal comprise par le premier traducteur : nous-mêmes nous l’avons perçue seulement en relisant le modèle de départ. En fait, Gerbert a modifié le modèle par deux références savantes : une locution tirée de Virgile et une alliance de termes qui font penser au début de la Genèse. De cette façon les vents d’Optatianus deviennent l’Esprit sacré et la vague (= l’eau) du même les abîmes de la mer. La combinaison des deux transformations évoque Genèse 1,2, l’Esprit divin (ici le « Pneuma sacré ») qui planait, au dessus des abîmes des eaux (ici il est poussé par la mer avec ses vagues profondes). Ce qui peut convenir à une disposition de la musique et de l’instrument aux débuts de la Création et rappelle la description initiale du poème, où Dieu est dit accorder et faire résonner l’instrument dans le contexte de l’ordonnance de la création. Un orgue à Bobbio nous est connu grâce à plusieurs lettres de Gerbert et ces informations ont été commentées de façon disparate37. Ce passage est donc une sorte de tesselle essentielle qui confirme et précise l’information ; en plus il offre un élément de culture locale pas du tout négligeable. Ce fut bien un modèle et des professionnels locaux qui permirent à Gerbert la réalisation de son don étant donné que, de loin, il est incapable de reconstruire l’instrument. Son enseignement acquiert un élément de taille. Bibliothèque exceptionnelle, spécialistes, orgue et perspectives politiques accroissent l’attrait de l’enseignement de Gerbert.
La numérologie
25La numérologie assume un rôle herméneutique confirmé aussi dans ce texte : qu’on pense au passage de 28 vers (nombre parfait sacré des Pythagoriciens, récupéré par les 28 parties du De Laudibus Sanctae Crucis de Raban Maur mais aussi utilisé chez le panégyriste de Eudes / Odo), à 32, suite à la redistribution des vers, à 37 après les premiers versus intexti. La figure de David pour le souverain chrétien est essentielle : la totalité des vers jusque là (37) correspond au corps d’élite idéal des preux guerriers de David en 2 Rois 23, 8-39 dans ses guerres avec Philistins et Moabites38. C’est sur ce plan que Gerbert fournit des troupes en aide à son propre souverain, donc par une réinsertion dans le plan de la Création et de son ordre, manifesté dans l’histoire sacrée, qui va nourrir l’idéologie politique, à un moment où l’on doute de la solidarité entre Dieu et son oint, le « Christ du Seigneur » qui a été battu par les « infidèles ».
26Toujours pour indiquer la solidarité entre ordre de la Création, monde divin et rôle impérial, qu’on réfléchisse à l’addition totale – qui aurait pu être exploitée par Gerbert – des équivalences numériques présentes dans le Carmen : les chiffres arabes de 1 à 9, font 45 ; plus triquetra (3), oméga (800), la totalité des vers redistribués (32), la personne de l’enfant Otto III (8, il aura 8 ans en 988 !) : cela fait 888, l’année du couronnement de Eudes / Odo, le premier des Capétiens, événement capital dans la perspective politique d’Adalbéron et de Gerbert ; les deux et Hugues Capet ont déjà parlé d’une telle perspective à Otton II en 981 et Gerbert va en reparler, à la demande d’Adalbéron, avec la livraison de son don en 983 ; dans le Liber qui l’accompagne se retrouve la structure du poème aulique dédicacé pour le fameux couronnement. Cela fait une jolie convergence de faits. Non seulement 888 est aussi l’équivalence numérique grecque du nom IHSOUS (n’oublions pas que nous sommes dans un contexte où le chrismon christologique englobe tout le message : 10 + 8 + 200 + 70 + 400 + 200) mais le nombre 8 y joue un rôle capital, celui du ressuscité – sauveur, en même temps que celui d’OTTO, dans la succession à trois temps 8 + 80 + 800. La perspective des correspondances est évidente, ainsi que celle de la progression qui a déjà été représentée par les noms des trois empereurs grâce au nombre croissant des T. L’on comprend à nouveau les concepts de restitution, et de omen qui sont évoqués par le poème39. Une restitution qui passe par le fils, Otton III. Nous ne savons pas si Gerbert, utilisant la numération arabe, a redonné avec 88840 la traduction symbolique et graphique d’OTTON III. Qu’on se rappelle l’écriture figurée des monogrammes d’Otton Ier et II dans l’acte de Théophano, où les « O » sont présents en haut et en bas d’une barre reliant les deux « T ». Il ne faut pas beaucoup de fantaisie pour imaginer un monogramme « prophétique » sur cette base, en multipliant par trois l’élément central41. Fait supplémentaire, à cent ans de ce couronnement, en 988, comme déjà indiqué, Otton III aura 8 ans. D’un tel symbole éventuel nous ne gardons aucune trace, les monogrammes d’Otton III étant « classiques ».
Les mètres et épigramme (« coupable » !)
27Quant aux mètres de ce poème42 Gerbert utilise des mètres quantitatifs variés, selon un principe qui apparaît chez Optatianus Porphyrius : imiter la musique avec la variété de formes et couleurs43. La première strophe utilise le mètre alcmanique sur des vers en principe décasyllabes ; la deuxième un hexamètre dactylique, à caractère épique, qui est morcelé en deux vers pour les besoins de la redistribution des vers ; la troisième utilise un dimètre anapestique catalectique appelé parémiaque bien connu par exemple chez Prudence et Boèce ; la quatrième revient au mètre de la deuxième, l’hexamètre dactylique, avec une double progression syllabique interne vers l’image de Dieu dans son temple de lumière et vers celle cosmique du Pneuma sacré précédé par le mouvement des eaux abyssales de l’océan. Le mètre de l’épigramme final laisse reconnaître cinq pieds par vers, mais il subit de telles constrictions multiples, qu’il se transforme dans un latin morcelant souvent la logique de la construction, poursuivant toutefois la recherche d’effets stylistiques. Dans ce sens il ressemble à certaines compositions du premier Moyen Âge dans des milieux érudits.
28Ce final nécessite quelques explications : Gerbert abandonne en partie le discours aulique et il demande d’être dispensé du respect des « bornes », donc de l’étiquette. Il s’agit d’un « épigramme », il ne manque pas pour cela de mordant.
29Gerbert se qualifie de « coupable » (premier terme !) et simple sujet (dernier terme de la deuxième phrase) et avance deux arguments pour sa défense : il a préparé (renfermé) une palissade défensive (eia = haie, fortification) avec la rédaction de son propre livre ; il en appelle d’autre part, et surtout, à la protection des autels, de même que celui qui en saisit les cornes ou trouve refuge sous ses courtines : il est en effet abbé d’un monastère et appartient à un contexte différent, sacré. Il se pose en conséquence la question : sur ces prémisses est-ce que je suis absout ?
30D’où l’invitation plutôt libre, même si elle est hermétique : qu’Otton dans son courroux ne se prenne pas pour Dieu et qu’il enlève une unité au neuf de son indignation (et du dessin), qu’il soit à nouveau lui-même44 !
31Le message, en partie exprimé par un poème assez hermétique, mais que nous avons imaginé faute de lire tout ce qui l’accompagnait et d’avoir écouté les explications directes de Gerbert (les cas politiquement délicats étaient expliqués, selon ses habitudes, de vive voix), a eu un résultat apparemment positif.
32Malheureusement la situation italienne de Gerbert s’aggravera toujours plus jusqu’au décès d’Otton II le 7 décembre, tombé malade alors qu’il avait bel et bien repris sa lutte en Italie du Sud. À Bobbio resteront plusieurs choses de Gerbert, dont une copie d’orgue qui lui appartenait et qu’il essaiera pendant plusieurs années de récupérer. Chose étonnante : s’il l’avait fabriqué tout seul il aurait pu le refaire à Reims. Mais comme souvent dans des cas analogues, la réalisation du don impérial avait utilisé comme modèle un orgue et profité du personnel déjà présent sur place, donc à Bobbio. Et ainsi que cela se produit souvent, après avoir réalisé un instrument de telle valeur, on en refait une copie pour soi-même, d’autant plus que Gerbert devait l’utiliser pour son école. Le départ en catastrophe fin 983 / début 984 avait rendu impossibles le démontage et le transport d’un objet relativement délicat comme l’est un orgue hydraulique. Privé de modèle et de personnel formé, Gerbert s’était retrouvé piégé et dans la nécessité d’obtenir l’orgue laissé à Bobbio, ou encore d’envoyer un moine qui en fasse l’apprentissage45.
Relancer la communication
33À l’occasion d’une nouvelle analyse, il est aussi apparu qu’une certaine portion du Liber contenant le Carmen figuratum, adressé à Otton II et Théophano, serait récupérable46.
34La nouvelle analyse a découlé d’une vérification : le calcul des lettres utilisées et le repérage d’éventuelles figurae intextae dans l’épigramme. Cela a conduit à deux constatations étonnantes47.
35La première, d’évidence lapalissienne, a dû aussi impressionner à l’époque : en effet l’ensemble des lettres du poème explicite, donc des quatre strophes, donne le total de 800 : I = 169, II = 157, III = 192, IV = 282. Afin d’obtenir cela l’auteur a aussi utilisé une petite « cachotterie » : l’introduction d’une cédille en IV, 2, seul cas à l’heure actuelle dans l’ensemble de la pièce. De nouveau un nombre à « base 8 », mais aussi une date comme dans le cas supposé de 888. Fait à rapprocher de la relecture sur la base de 4 K, avec une chaîne significative : K(onstantinus), K(arolus), K(aesar I), K(aesar II). Se rapporter à 800 pour celui qui promeut la Renovatio imperii romani est fait essentiel et courant qui s’insère bien dans la perspective impériale reliée à Aix-la-Chapelle, au tombeau impérial et à la liturgie royale qui lui est associée.
36La question quant à la présence d’éventuels calligrammes supplémentaires dans l’épigramme, qui était déjà tiré des lettres isolées dans les calligrammes des symboles numériques, nous a conduit à une constatation étonnante quant à la forme et au contenu : elle offre à son tour une clef de lecture pour l’opération antérieure qui a fait apparaître les 11 symboles. C’est-à-dire la possibilité de lire deux vers à partir de la ligne centrale et à distance régulière dans quatre images et ensuite en exploitant la plupart des lettres suivantes.
Sort commun et fonction « prédestinée » (II)48
37À la lecture des deux vers une perspective saute aux yeux qui lie la situation de Gerbert à celle d’Otton II, selon une habitude rédactionnelle et rhétorique49 ; si cela arrive ici par juxtaposition des deux images, il faut aussi penser aux deux noms soudés dans la « triquetra ». Le terme de « chien » rappelle des parallèles faits avec les courtisans, mais le fait qu’ici il qualifie le Cerbère représente une radicalisation de l’image dans un contexte analogue de calomnie : mea ... rara peut définir les intérêts et les objectifs chers à l’abbé, donc ce qui lui est le plus précieux, plutôt que les membres de sa « famille ».
38Le vers consacré à l’empereur fait référence au rapport entre l’Ode et la connaissance que Gerbert a acquis de l’empereur et de son arcane. « Arcane » fait référence au nom et à la fonction dans le cadre d’un projet divin, préfiguré non seulement par le texte, mais aussi par les deux modèles graphiques de Gerbert, d’Odo / Eudes et de Théotrade, les premiers Capétiens couronnés en 888. Le nom, comme déjà indiqué, peut être aussi suggéré par « Ode », tel un jeu de mot avec Eudes / Odo. Point politiquement délicat et qui devait figurer surtout dans des explications orales50.
39Les premiers calligrammes utilisés51 correspondent fondamentalement à des croix, le deuxième et le troisième parfaitement, le premier et le quatrième avec l’ajout de deux éléments supplémentaires. Nous les avons interprétés tels des symboles musicaux, c’est-à-dire les indications de demi-ton, ton, ton, demi-ton, suivies de mélismes, simplement symboliques. Ce qui représenterait une bonne introduction musicale
Nika ! (III)52
40Un des faits qui nous avaient frappés dans nos premières réflexions sur le Carmen et son graphique en chrismon, correspondait à la possibilité d’inscrire assez bien en miroir les lettres de « NIKA », donc dans ce cas écrit avec un « K »53 ; alors que dans le texte le « C » ne posait aucun problème, comme cela est le cas dans l’iconographie du monde latin depuis des siècles54. Le petit poème, qualifié aussi par l’auteur de « troisième Ode », représente un vœu et un encouragement, ceux qu’on adressait aux armées, aux combattants, même aux joueurs d’orgue : « que tu gagnes ! ». Déjà le poème explicite parlait d’un omen exprimé à l’empereur par le don de l’orgue. Également un renvoi marqué au chrismon et aux mots qui l’accompagnaient dans la tradition, ici adressé à Otton empereur de l’empire chrétien, et confronté à des circonstances dramatiques dans le sud de l’Italie. Donc, non seulement un vœu, mais une garantie exprimée par trois fois, ainsi que l’ovation faite par une armée. La perspective peut être renforcée dans un sens théologique et poétique : la guématrie d’Adam (dont la valeur est 46, autant que les lettres composant chacune des trois unités II, III et IV) est utilisée dans le XIIe poème sur la croix de Raban Maur, là où le nom qualifie le second Adam, le Christ rédempteur, véritable seigneur de l’univers grâce au triomphe de la croix55. Ce qui nous reconduit aux coordonnées du chrismon dans le poème de Gerbert, mais aussi au rôle remarqué chez son modèle Optatianus Porphyrius, là où le symbole du Christ joue un rôle essentiel, donnant « lumière » à l’ensemble de la composition56, ou aussi l’encadrant57 alors qu’il célèbre Constantin le Grand.
Trois Troyen (IV)58
41Il s’agit de la troisième et dernière unité à employer les mêmes lettres, qui répercute ainsi la perspective universelle, cosmologique et christologique déjà constatée. Elle est nettement de circonstance, faisant référence probable à Otton III associé au pouvoir comme roi d’Italie en mai 983 et ici qualifié de « Trois Troyen » d’après son ascendance maternelle byzantine et les perspectives de la Renovatio Imperii Romani, qui en hérite aussi les origines mythiques. C’est le même Gerbert qui qualifie parmi les royaumes composant l’empire « la Gaule et la Germanie fécondes en guerriers »59, ce qui est rendu ici par cateruae, en général armées barbares, mais authentiques si confrontées au forces infidèles d’ailleurs. Ce qui dans le cas d’Otton III est affirmé sur le plan militaire, en perspective d’avenir : Gerbert le souligne ailleurs sur le plan culturel pour celui qui est, par droit pratiquement naturel, héritier de la culture grecque et romaine (Ep. 187)60. Le troisième emploi des mêmes lettres correspond de façon significative à la mise en perspective d’Otton III.
Théophano, la mère (V)61
42Cette unité, la première, utilise des abréviations et abandonne la forme strictement « poétique ». Après Otton II et Otton III voici la mère, Théophano, dont sont spécifiés surtout les titres, véritable membre de la famille ottonienne et égale, quant à sa souveraineté, aux Augustes de l’empire ottonien. Notons l’emploi de 23 lettres supplémentaires, correspondant à l’alphabet latin : jointe au fait du rapport dans le Carmen entre 8 et 800, cette revalorisation de la maison de Saxe et de l’occident, se traduit aussi par celle du monde latin dans lequel Théophano entre politiquement et culturellement de plein droit62.
Adélaïde (1) (VI)63
43Gerbert paiera au prix fort le fait d’avoir donné sa faveur à Théophano, d’avoir ironisé et critiqué l’aïeule et il lui sera difficile de remonter la pente. Cela ne manque pas de se produire ici aussi et dans l’unité suivante malgré les apparences très auliques. Gerbert insère Adélaïde dans la famille troyenne, alors que son attitude vis-à-vis des Grecs et de sa belle-fille n’était pas favorable. La comparaison des propos du poète avec le vol désastreux d’Icare pouvait aussi résonner comme de l’ironie, particulièrement malvenue du fait que Gerbert était bel et bien placé dans une situation compromise.
Adélaïde (2) et l’association du fils de Théophano (VII)64
44Les tournures flatteuses de Gerbert ne pouvaient pas épuiser le sujet qui est développé dans le même sens dans une lettre, la 20e à la même Adélaïde65. En effet, là comme ici, Gerbert suggère que l’Impératrice – mère en s’occupant d’aristocrates « pauvres » épuisait les ressources monastiques ; celles-ci sont décrites comme du « bois de taillis », donc exploitées systématiquement. Gerbert l’invite à agir en faveur du monastère et de ses biens. Reflet d’une situation compromise connue, que Gerbert comme abbé réformateur essaie de renverser, ce qu’il va poursuivre jusqu’à la fin du siècle, étant en charge jusqu’en 999.
45Connaissant l’emprise d’Adélaïde sur les affaires publiques, Gerbert associe aussi à la requête monastique celle du respect de l’association au pouvoir d’Otton III et donc d’un gouvernement conjoint de père et fils ; ce dernier est qualifié de « grand roi ». Moyennant une tournure qui renvoie à la naissance du Messie on souligne sa naissance de l’impératrice romano-byzantine. Les lettres rajoutées, 50, font penser à l’inauguration du jubilé, un temps messianique. Il est connu que Gerbert pense que le souverain, Otton III en particulier, est un « oint de Dieu »66. Ces éléments vont dans le même sens.
Théophano, couronnement, restauration d’Otton II (VIII)67
46En reliant étroitement le sujet à l’impératrice romaine, il apparaît que Gerbert songe à un rôle actif et prépondérant de Théophano dans la suite des événements, sous la conduite de Dieu : une perspective envisagée du vivant d’Otton II. Comme dans le poème explicite, Otton III est destiné, avec sa mère, à restaurer ou restituer sa dignité à Otton II, ce qui correspond aux faits et à leurs motivations. Noter l’adjectif qui qualifie dans la ligne de la Renovatio la mère d’Otton III : elle est l’équivalent de la mère de Rémus et Romulus, Rhéa Sylvia. Notons la valeur symbolique de la VIIIe unité cryptée : elle correspond à la restauration de la souveraineté de Otton II.
Descendance, chiffres, orgue et royauté universelle (IX)68
47En étroite liaison avec la requête adressée à la Divinité en faveur d’Otton II, voici l’expression d’un vœu : celui qui concerne sa descendance, en premier Otton III mais certainement aussi une perspective totale et théoriquement ouverte sur un avenir sans limite69. Conséquence concrète de cette perspective, le rôle de l’empereur dans la protection des côtes, problème réél suite aux faits de l’année précédente. Gerbert invite ensuite l’empereur à cultiver la science indienne des nombres sous son propre magistère presque exclusif et à adresser des prières à Dieu, grâce à l’orgue, en faveur de la royauté universelle du fils. Deux composantes, nombre et orgue, qu’il développera dans les unités suivantes. La souveraineté universelle exprime probablement l’union de l’orient et de l’occident dans la personne d’Otton III et dans la perspective du renouvellement de l’ancien empire romain, finalité poursuivie jusqu’au décès d’Otton III.
Géométrie et noms des chiffres indiens (X)70
48Nous retrouvons ici le premier thème évoqué plus haut, dans une lecture qui procédant toujours, selon le style, des unités précédentes n’a pas manqué de nous « bloquer » après une colonne et demie. Une réflexion à partir de l’introduction identifiée nous a fait comprendre que les noms des chiffres indiens devaient suivre. Cela était le cas, dans un ordre respecté pour les débuts des noms : ils se suivent du 1 au 9 puis le 0. Gerbert respecte toujours un ordre, même dans ce type d’utilisation libre des données. Naturellement des contraintes découlent de la disposition des lettres et, à notre avis, on peut s’étonner du résultat remarquable et unitaire dans cette dixième unité qui traite aussi des 10 numéros. Correspondance intentionnelle comme l’utilisation du seul X pour traduire DECEM. Des petites conséquences découlent du manque de 3 lettres dans son texte de Q et de Z, ce qui lui fait écrire Guimas et TSENIS ; idem pour L rendu par R dans CERENTIS71.
49Gerbert s’adresse aux souverains, en commençant par le petit, et garde la forme d’une révélation faite par un oracle, mais il réalise une communication scientifique conçue comme une transition : les nombres sont indiqués comme 10, on parle de digitation, on emploie le terme technique de NOTAE pour indiquer les symboles mathématiques à « traduire » dans le système de la digitation, et on fait référence à la Géométrie de Gerbert. Concernant sa propre intelligence et celle de l’empereur il parle de GENIUS, connu aussi comme divinité tutélaire de chaque personne. Notons, en particulier, la jonction entre connaissance des chiffres, précepte classique de la connaissance de soi-même et principe philosophique de la redécouverte de l’essence numérique des choses, dans une ligne philosophique pythagoricienne. Fait intéressant aussi : cette connaissance est livrée PALAM, ouvertement et officiellement72, établissant un lien ainsi entre sagesse philosophique et connaissance courante des fonctions et des réalités dans la vie quotidienne. Probablement en liaison avec cet enseignement-révélation la quantité globale des lettres de l’unité, 273, qui correspond à la durée d’une grossesse ; et celle des lettres rajoutées : 8 X 8 = 64, la connaissance de soi, de l’essence des choses, des nombres, perfectionne « au carré » aussi le souverain, dont l’intelligence est qualifiée, auliquement, de « divine ».
Dons, fidélité : Gerbert, Otton II et Théophano (XI)73
50Cette onzième unité reprend à nouveau des données mathématiques en les reliant à des discours de circonstance. Il est probable que d’autres éléments figuraient parmi les dons : de l’or, des objets scientifiques comme un abaque, à moins que le premier ne fût que symbolique et que le deuxième figurât seulement représenté dans le Liber. Le premier dépendait de l’état financier de l’abbaye, le second était envisageable. Gerbert signale la fécondité de l’impératrice et le fait qu’elle avait été richement dotée par les deux Ottons, ce qui est attesté. La remarque permet à Gerbert d’affirmer sa fidélité à la personne de la souveraine, l’impératrice, ensuite à celle d’Otton II, jusqu’au point de dire qu’il accepterait d’être tel un coupable (mais : temps de l’irréel) pourvu qu’il soit compté parmi ceux qui appartiennent au dit empereur. Et voilà des images à chiasme : d’un côté l’abaque et ses jetons avec, superposés, les symboles numériques créés par Gerbert recrue de l’empereur, de l’autre l’OMEGA symbole de l’impératrice et correspondance numérique globale du poème, en fonction de l’onction (sacre) de l’empereur (par référence au couronnement de l’an 800). Notons que pour la relation particulière de Gerbert avec Théophano74, et son rôle de soldat auprès d’Otton II, subsiste plus d’un parallèle parmi les Lettres. Avec FORMA et CHARACTER nous avons aussi deux termes techniques de l’enseignement mathématique de Gerbert et l’adjectif LEMNIAS renvoie aux origines de Vulcain, forgeron ainsi que celui qui avait déjà fabriqué ces éléments pour l’abaque de Gerbert, selon Richer75.
Circonstances, orgue et Constantinople : l’arrivée du Roi et le retour du Christ (XII)76
51Nous en sommes à la dernière unité, la douzième, correspondant au nombre musical par excellence pour Gerbert, dans son traité sur les tuyaux de l’orgue77. Clef herméneutique pertinente dans notre cas, qui ne manque pas d’évoquer, en chiasme avec le début du Carmen explicite, l’instrument, d’en donner le sens impérial dans cette situation particulière et d’en forger un titre christologique qui rejoint aussi le début de la composition, s’harmonisant, ce qui plus est, au don offert par Gerbert et à son activité spécifique de théoricien et fuseur de tuyaux. La décision de Vérone honore particulièrement l’impératrice, avec l’association du fils et la restauration de la dignité de l’époux. Mention qui conduit aussi aux causes de l’intervention d’Otton II en Italie du sud : ainsi que lors de la fondation de Rome, Rémus, le frère d’orient avait dépassé ses limites ; mais il est naturel que l’empereur soit profondément blessé par la débâcle qui a suivi l’intervention justifiée.
52Gerbert revient à son don en le mettant en relation à la musique : ici elle est indiquée dans ses trois genres, réglée par l’Ourse (près du monde divin), grâce au son puissant de l’orgue de Gerbert. Celui-ci, dans son rôle prophétique vis-à-vis de l’empereur, souligne aussi sa dignité accrue par le mariage et le document correspondant : déjà graphiquement Théophano réévaluait au centuple Otton, ici est dite la richesse de la maison ottonienne grâce à ses origines. L’empereur est invité à : embrasser le bouclier de Thésée, héros et politicien ; réunir ses troupes troyennes et venir dans la terre de Rhéa, à Rome, de nuit comme le Messie ; s’installer dans toute sa dignité d’oint de Dieu dans la maison d’Ennius, le premier poète à avoir chanté avant Virgile l’histoire d’Enée ; tisser à nouveau avec habileté les relations avec les hommes de valeur des diverses contrées impériales face à une situation autrement instable. Soulignons la densité des renvois aux attaches orientales et énéennes.
53Une coupure s’introduit dans cet enchaînement d’images impériales. Le char du triomphe d’Otton II est invité à freiner, bloquer ses roues. Pour cela on passe de SATOR à ROTAS, comme dans le fameux carré anagrammatique classique78, hommage discret à la tradition que Gerbert a adoptée et développée d’une façon accrue en raison de son action symbolique, de motifs philosophiques et de l’urgence du moment. L’abbé-mathématicien, attentif aux symboles et aux valeurs guématriques, ne pouvait ne pas l’être au retour du Christ dans la perspective classique de l’eschatologie chrétienne. D’où cette mise en relation du pouvoir impérial avec la souveraineté totale et universelle du Christ. Ce qui est confirmé par les titres significatifs qui suivent, mais qui ne manquent pas d’innover en offrant une image du Christ « fuseur de la musique » : finale qui rejoint en chiasme l’image du début du Carmen.
54N’oublions pas que nous sommes avant la rencontre avec la famille impériale, donc dans une situation d’accusation de lèse-majesté, et une telle image finale peut aussi jouer le rôle d’une mise en garde bien ecclésiastique79, rappelant à l’interlocuteur la différence des états et sa subordination à l’autorité du Juge suprême. Que Gerbert vive l’époque et son expérience de Bobbio d’une façon aussi dramatique, qu’il soit au contact de l’influence de certaines communautés monastiques et d’écrivains tels que Adson, cela peut en partie expliquer l’accent qui apparaît à la fin de ce Liber80.
Acte symbolique et méthode rédactionnelle : réduction – confirmation – augmentation mathématiques
55Dans une vue d’ensemble il faut souligner de quelle façon on passe progressivement d’une étape à l’autre : de 800 (lettres du poème) on transite à 123 (lettres de l’épigramme) et ensuite à 46 : lettres de la deuxième unité cryptée qui sont utilisées 3 fois dans trois unités différentes (II, III, IV), pour être enfin augmentées grâce aux abréviations dans les unités suivantes. Ce qui souligne l’importance des nombres dans la composition et une valeur symbolique, étroitement liées à la musique, mais aussi à une vision de l’univers et de son ordonnance créatrice et politique. Vraisemblablement le passage à 123, compte tenu des symboles mathématiques, signifie une mise en évidence, par juxtaposition, de 1/2/3, les trois numéros primordiaux de la série. À cette réduction à l’essentiel succède une deuxième, créatrice. En effet 46 est la guématrie des lettres grecques de ADAM, (1 + 4 + 1 + 40), mais renvoie aussi aux quatre points cardinaux indiqués par les mêmes lettres en grec et repris en latin81, enfin au fait que sur ce schéma, dans l’enseignement, on greffait tout un patrimoine de connaissances cosmologiques, chronologiques, anthropologiques et théologiques82.
56Nous avons donc l’impression d’un acte symbolique se déroulant à plusieurs niveaux. L’élément fondamental naît de la redistribution des vers sur le schéma des quatre « K », évolution grâce à un principe d’organisation qui conduit à un apparent chaos « communicationnel » : mais celui-ci garde toujours un principe d’ordre qui tient le tout, c’est le nom impérial, « renforçant » le texte qu’il tient aux extrémités, 8 fois à gauche et 8 fois à droite, où au nombre correspond le nom83. C’est ici que action créatrice divine et action impériale se rejoignent. La première est montrée ordonnant l’univers grâce au son puissant de l’orgue, dont le fonctionnement est comparé à l’interaction primordiale entre l’Esprit sacré et les eaux des abîmes. La seconde lui est soumise et participe à sa sacralité, mais est appelée à refaire le chemin en se comprenant dans son propre arcane et en comprenant à nouveau l’essence des choses, qui est numérique.
57Ce n’est pas un hasard si, à propos de l’enseignement du De Arithmetica de Boèce, Gerbert déclare au même Otton III en 997 :
En effet, si vous ne teniez pour solidement établi que le pouvoir (la force) des nombres contient en lui les éléments premiers de toute chose – ou bien les fait jaillir de lui-même – vous ne parviendriez pas, avec autant d’ardeur et si rapidement, à une pleine et parfaite connaissance de ceux-ci84.
58Doctrine pythagoricienne qui fait du nombre l’essence des choses et qui avait été reprise tant dans la Qabbalah que chez Boèce ou Isidore, de telle façon que – rappelons que nous sommes dans une mise en scène de la Création – en soustrayant le nombre aux choses elles retombent dans la condition de chaos, de même qu’en appliquant le nombre au chaos, on en réalise la transformation en cosmos. Ce qu’Isidore dans la section sur la Géométrie des Étymologies rend par : « Soustrais le nombre à toutes les réalités et tout périt »85. Autre trace de cette conception dans la dixième unité cryptée, dans laquelle Gerbert invite le petit Otton III et son père Otton II de la sorte : « Gerbert t’instruit ouvertement pour que tu connaisses “tes choses”, à partir des dix numéros, à filer à nouveau par l’essence des choses »86. Connaissance de soi-même, de sa fonction et connaissance de l’essence des choses se correspondent dans une seule harmonie et un seule ordonnance globale.
59Dans son entreprise rédactionnelle, Gerbert construit tout un discours qui, loin d’être parfait – rappelons les circonstances de la composition et la méthode assez complexe – dans ses différents éléments, reste cohérent et a une valeur discursive efficace.
60Nous avons vu que, d’après les indications de l’auteur, la numérotation de ces unités commence avec l’épigramme et que la méthode de relecture va se heurter à plusieurs obstacles : avec 123 lettres il était difficile d’isoler par réduction calligrammée un nouveau message, et avec 46 cela allait atteindre l’invraisemblable. Le discours toutefois présentait une logique communicative qui exigeait d’être poursuivie. D’où un changement dans la relecture des données, grâce à l’anagramme, genre moins noble, mais qui correspondait bien à l’image d’un façonnement créateur grâce à une sorte de magma, ou argile tirée des lettres contenues dans les chiffres, qu’elles soient utilisées comme telles, ou qu’elles acquièrent progressivement le rôle de racines verbales à développer grâce à des abréviations.
Réactions
61Tel que nous avons essayé – et en partie probablement réussi – de retrouver des éléments de ce Liber, dont l’architecture fondamentale correspond bien aussi matériellement à un cahier de 16 feuillets, donc 32 pages, il nous paraît, malgré les lacunes, le manque des introductions, des paraphrases, commentaires et transitions, rédigé d’une façon particulière et attentive :
- à une philosophie pythagoricienne;
- à une image du pouvoir dans les Gaules, lourde en conséquences internes ;
- au rôle du pouvoir impérial pour l’ensemble des deux empires d’occident et d’orient : la Renovatio imperii romani, chargée de conséquences pour l’Europe, elle-même dans ses divers royaumes.
62Le Liber exprime ces visions politiques comme fruit d’un plan divin inscrit dans les personnes et leurs fonctions. Il s’inspire d’images venant d’une mythologie poétique, il opére un étroite osmose entre langage christologique et impérial, il utilise une symbolique numérologique et guématrique, il ramène la musique aux origines de la Création, il relie étroitement nombres et essences des choses.
63Enfin le tout est exprimé pour se justifier dans une situation de crise personnelle et relationnelle, tant avec la communauté monastique qu’avec les feudataires et la cour elle-même.
64Quelles furent les conséquences de cette opération ?
À Bobbio
65Gerbert réussit à renverser apparemment la situation avec l’empereur, il parvint aussi à attirer l’intérêt des grands de l’empire pour son école : autrement dit au regard du pouvoir de l’empereur il réussit. L’éloignement de celui-ci vers le sud de l’Italie – où peut-être l’avait aussi poussé l’écrit de Gerbert – puis sa mort le 7 décembre 983 mettent à nu la situation et favorisent une « révolte » monastique : Gerbert est contraint à s’éloigner de Bobbio et de l’Italie et à rentrer en France au début 984. La réaction s’est produite probablement à deux niveaux, l’un s’imbriquant dans l’autre. Gerbert était un abbé étranger résident, se mêlant des affaires de gestion des biens, bouleversant les autorités en place dans la communauté, s’impliquant dans les relations, combines et compromis entretenus avec l’aristocratie, les potentats, la cour, et il a ligué ainsi les puissants contre sa personne. Intéressé d’autre part à l’école et à la bibliothèque, il avait remis en l’honneur les études et, qui plus est, l’intérêt pour la philosophie, les poètes, les sciences en s’engageant profondément dans l’entreprise. La même invasion « étrangère » était en train de se produire aussi dans l’école du monastère, grâce à l’abbate Gerberto philosophante, qui emmenait par dessus tout des scholastici d’Allemagne, de quoi créer une grave fissure dans la communauté elle-même et déclencher des réactions mélangeant probablement raisons ethniques, politiques et culturelles. Que l’abbé soit pris comme le responsable de tout, à tort ou raison, nous paraît extrêmement probable ; d’où aussi le désir de son éloignement.
66C’était bien lui qui percevait que son entourage était clairement opposé, et même ligué contre sa personne :
Que fais-je donc ici, moi pécheur ? Si cela pouvait se faire avec l’accord de Monseigneur, il vaudrait mieux que seul je sois pauvre en Gaule, au lieu de mendier en Italie parmi tant de pauvres87 ;
De nous voir en possession de l’abbaye de Saint-Colomban, nous n’avons aucun Italien à remercier (...). Volez, pillez, soulevez contre nous les forces de l’Italie88 ;
Je ne parle de moi que dans un langage d’un nouveau genre, ils traitent à voix basse d’étalon avec femelle et petits parce que j’ai réuni, en les faisant venir de France, un partie de mon entourage (ou famille). Les vaincus sont sans pudeur ! Ô temps ! Ô moeurs ! auprès de quel peuple est-ce que je vis ?89
À proportion de la grandeur de mon dévouement (la Fortune) m’a en effet accablé des ennemis les plus grands. Car quelle est la région d’Italie qui ne possède aucun de mes ennemis ? Mes propres forces ne sont pas égales aux forces de l’Italie (...). J’aime mieux être soldat dans le camp de César que roi dans celui de l’étranger90.
Mais est-il une espérance sans un guide pour la patrie, quand nous ne connaissons que trop bien la fidélité, le comportement, les intentions de certains Italiens ?91
67Difficile d’autre part de juger s’il s’agit à proprement parler d’une expulsion, ce qui est affirmé en 988 mais rapporté (ainsi que dans certains des passages cités) à l’Italie92. De fait, la perspective décrite par Gerbert et celle provenant de lui dans cette lettre se rejoignent si l’on s’en réfère au pouvoir politique qui, il est vrai, conditionnait la gestion et donc la direction de l’abbaye. Et si les moines de Bobbio ont réagi à son opération, c’était plutôt par une opposition de principe ethnico-politique, probablement provoquée en partie par l’abbé lui-même. Le Liber impliquait profondément les arts du trivium et du quadrivium (sciences, philosophie, théologie) et la politique, il était ainsi le témoin gênant de l’activité de celui dont on ne voulait plus. En plus, un texte dépassé par les événements, c’était une raison pour ne pas le conserver.
En Allemagne
68Le contenu de l’écrit a dû frapper mais aussi engendrer jalousies et critiques. Probablement Uffing de Werden, dont nous avons deux Carmina figurata sous Otton III93, a dû connaître Gerbert. Il paraît rectifier du point de vue monastique le contenu, en récupérant graphique, symbologie (alpha et oméga ; soumission, éléments naturels) et langage du discours aulique impérial dans une optique « orthodoxe », c’est-à-dire en éliminant l’osmose entre monde impérial et monde divin. L’auteur, hagiographe et poète dans un monastère de Cologne, rédige une pièce qui s’adresse à Dieu, régissant l’univers, et au patron du monastère, telle une prière en faveur de l’ensemble de l’ordre social, ecclésiastique et monastique, depuis l’empereur jusqu’à l’écrivain. Quelques renvois verbaux font penser qu’il puisse s’agir aussi d’une réutilisation malgré tout du chrismon (signiferos comites). L’auteur s’identifie nommément dans le premier texte. Il n’est pas exclu encore que l’essai de réaliser un opus, ce qui est dit dans la composition, renvoie à un ouvrage (cf. notre Liber) qui aurait contenu les deux figurae : actuellement, en copie, elles sont jointes à un commentaire de Servius sur Virgile, donc à un livre scolaire. La réalisation remonterait à la fin des années 80 du Xe siècle94.
À Reims et à Aurillac ?
69Que Gerbert ait transmis une copie de son Liber à Aurillac, nous l’avons affirmé. C’est probablement la voie par laquelle on a effectué une copie du Liber qui a été par la suite mutilée et intégrée dans le Graduel d’une fondation dépendant de ce monastère. On sait que Gerbert donna de ses manuscrits et documents à son abbaye : elle dut en être fière, au point de recopier un de ces textes qui nous transmit donc ce qu’on connaît. L’intégration des pages de garde se fit au XIIe siècle, l’époque était suffisamment « empoisonnée » culturellement pour qu’on vide le cahier de tout le reste, qui est tout simplement éliminé. En effet, celui qui effectua l’opération aurait pu reporter le nom de l’auteur de la pièce, surtout s’il s’agissait d’une opération de « promotion ». Cela se pratiquait, par exemple, dans le report de pièces liturgiques musicales. D’autre part, ce n’était pas le nom d’un inconnu et son élimination ne pouvait pas relever de la simple indifférence.
70Cela se passait presque deux siècles plus tard : y eut-il, à part Bobbio dont la complexité de la réaction peut englober plusieurs données, des réactions au niveau ecclésiastique ?
71Les affirmations du genre :
(...) vicarii Petri et ejus discipuli nolunt habere magistrum Platonem, neque Virgilium, neque Terentium, neque ceteros pecudes philosophorum (...) Et ab initio mundi non elegit Deus oratores et philosophos, sed illitteratos et rusticos95,
72visent certainement Gerbert et sa culture, outre son accès au siège de Reims et la critique qui a été menée par le Synode contre les pontifes indignes, mais il s’agit aussi de la réaction facile de quelques religieux envers toute personne qui les dépasse ou les critique, et les culpabilise : autrement dit, l’expression du privilège et des mérites de l’aurea mediocritas, la confusion entre paresse et humilité, entre ignorance et simplicité d’esprit.
73Enfin, les relations problématiques entre Abbon et Gerbert (nous considérons comme hautement significatif que deux contemporains, confrontés qui plus est à des questions idéologiques sur les relations évêque-abbé et sur l’exemption des monastères, pratiquant un enseignement semblable, dans le cadre de réels échanges scientifiques entre les deux milieux, continuent pratiquement à s’ignorer) ont aussi dû influencer une politique de démolition, de jalousie et de destruction sourde, aggravée par l’emprise de Gerbert sur l’archevêché de Reims et ses relations conflictuelles avec des fondations religieuses dépendant d’Abbon de Fleury. Or, Abbon soutenait l’opinion que les moines représentaient le premier ordre de la société chrétienne et il agit à notre avis en « sabotant » les relations de son adversaire et en essayant de le remplacer ou de le faire remplacer. Le carmen Otto Valens Caesar qu’Abbon adresse à Otton III96 est placé historiquement en hiver 997. Beaucoup de thèmes sont toutefois repris par rapport au Carmen de Gerbert : renvoi à Otton Ier97 et à la défaite arabe pour Otton II, la croix, image de l’orbis quadratus, nom impérial repris avec son même vers six fois sur le périmètre et sur les intersections, rôle ordinateur conféré à la lettre « O », insertion de la dédicace avec les noms d’Abbo et d’Otton intexta dans chacun des quatre quarts. Les changements formels sont le type de vers dans un carmen quadratum, hexamètre, 35, les chiffres utilisés ainsi que le 6 (aussi symbole du Christ), l’absence de tout élément immédiat et d’enseignement, l’exclusion (qui se comprend chez un ami de divers rois) de tout rapport graphique et de contenu entre les descendants d’Eudes et les Ottoniens, pas d’osmose entre langage impérial et symboles divins, et enfin pas de relation dans la dédicace entre les deux. Même l’essai, connu grâce au biographe Aymoinus, de s’en référer explicitement à Optatianus Porphyrius, et de se proposer comme poète de l’empereur de la Renovatio Imperiii, dans le rôle d’Optatianus auprès de Constantin, confirment parenté et perspective communes. Rien d’étonnant de la part de celui qui s’était fait reconnaître par le moine-pape Grégoire V comme « le premier des abbés de la Gaule » et accorder grâce à un faux l’exemption de Fleury par rapport à l’évêque d’Orléans. Moine bénédictin lui-même, Gerbert dut, malgré un engagement parallèle dans le cas de l’abbaye de Bobbio, se battre avec le pouvoir des moines, et rien d’étonnant que l’emprise d’Abbon sur le monde politique, monastique et intellectuel gaulois lui ait réservé le sort qu’on vient de constater avec le Carmen figuratum, conservé par sa seule abbaye d’Aurillac mais camouflé dès sa mise au contact avec un contexte monastique élargi qui ne l’avait déjà pas retenu, mais par contre l’avait probablement connu et parfois utilisé.
Entre Angoulême et Limoges98
74Réfléchissons au moment de la confection du Graduel de Gaillac comme moment ante quem : nous sommes vers la fin du XIe siècle. La critique explicite de Gerbert, comme scientifique, politicien et pape a fait de gros progrès.
75Déjà peu d’années après la mort du pontife, sur l’arrière-plan d’une rédaction « stylée » mais pas du tout innocente, Adhémar de Chabannes, dans les élaborations successives de ses Historiae, insinue toutefois l’idée que Gerbert a obtenu sa science grâce aux arabes et ses charges ecclésiastiques grâce à la fraude. Il emploie en effet dans la dernière rédaction, la plus répandue, un terme dont la seule occurrence intervient ici et qui renvoie à un prétexte. Enfin l’abandon du siège de Reims comporte aussi une nuance négative et critique99.
76C’est à son rôle de pape qu’Adhémar rapporte un fait divers et une pièce refondue assortie d’une pseudonymie. Le premier voit un puissant laïc, qui s’empare d’un évêque, son seigneur, pour lui extorquer un bénéfice, être cité devant le pape et en être condamné à l’écartèlement100. Le deuxième assume une allure de discours synodal, où le pape s’adresse aux évêques et aux abbés pour en condamner les charges et les procédés simoniaques. L’argumentation scripturaire et les tons canoniques confèrent à la scène une solennité particulière101. Les deux éléments livrent un enseignement, en faits et paroles, s’adressant aux puissants laïcs et ecclésiastiques, découlant du plus savant ou « philosophe » des papes, juge salomonien tant au domaine temporel qu’ecclésiastique. Un procédé rédactionnel habile, utilisant le vraisemblable et l’invraisemblable, mais livrant aussi une image contrastée, équivoque et critique par un alignement en apparence anodin de termes et d’éléments savamment modifiés.
De « magouilleur » à magicien démoniaque
77Plus tranché dans son jugement qu’Adhémar, Thietmar de Mersebourg souligne le procédé injuste, selon lui, de la promotion de Gerbert à l’archevêché de Reims et son expulsion du siège, enfin son élection comme pape moyennant l’appui de l’empereur qu’il avait fait profiter d’un nocturlabe fabriqué à Mersebourg102.
78À l’image de celui qui obtient des faveurs et a des connaissances exceptionnelles, se superpose celle du littéraire et du scientifique. La prévention contre Gerbert passe en effet par les préjugés monastiques à l’encontre des disciplines enseignées dans les écoles cathédrales ou abbatiales103. C’est le cas de l’enseignement, la lecture, l’étude des poètes classiques. Raoul Glaber104 nous dit que les démons ont pris la forme de Virgile, d’Horace et de Juvénal, et les contemporains de Gerbert voient dans la dialectique non pas l’outil de recherche de la vérité mais celui qui conduit à l’hérésie. Les mathématiques aussi sont suspectes et mises en relation avec les démons : celui qui s’adonne à ces sciences ne fait que se livrer toujours plus au diable. Il s’en suit que les connaissances exceptionnelles de Gerbert devaient être douteuses voire diaboliques, que ses actions politiques et son ascendant sur les princes, les rois et les empereurs devaient provenir de sortilèges et magies.
79Ainsi Ascelin (Adalbéron) de Laon105, dont Sylvestre Il avait crûment blâmé la déloyauté, suggère avec malice que celui-ci peut bien avoir utilisé la magie, en l’indiquant comme Neptanabus ille magister, référence au roi Nectanabis égyptien qui favorisa les sciences mathématiques et astrologiques.
80Ces insinuations ainsi que les préjugés vis à vis de la culture classique et scientifique, préparent le terrain à des attaques frontales. Elles arrivent directement des adversaires des réformes de Grégoire VII, tel Bennon de Osnabrück106, dans la 2e moitié du XIe siècle, qui montre ce dernier dans la lignée des maléfices et sacrilèges de Gerbert. Il le décrit ayant un démon personnel, qui lui avait promis le siège pontifical (« passer de R à R et parvenir à R ») contre la livraison de son âme. À la question de Gerbert sur le moment de sa mort il lui avait répondu : « Ce ne sera pas avant d’avoir célébré la messe à Jérusalem » : Gerbert croyait échapper longtemps à cette échéance, quand un jour à l’église Sainte-Croix-de-Jérusalem, alors qu’il célébrait, il eut un malaise et il s’aperçut de l’approche de cette échéance. Désespéré, il avoua à l’assemblée ses fautes et commanda qu’on lui coupât les mains et la langue avec lesquels il avait servi les démons.
81Il faut souligner que, tout comme cette dernière application de la loi du talion107, ou comme la description de l’orgue par Guillaume de Malmesbury108, récupérations progressives plausibles ou évidentes de faits « biographiques », de même le sourire « positif » prêté à Gerbert sur lui-même109 nous a renvoyés à la succession des 4 « K ». À partir du moment où la succession des 3 « R » nous est rapportée comme étant de sa bouche – et de là probablement elle s’est transformée plus tard en oracle d’un automate et / ou d’un démon – nous croyons que chez lui, avant même que chez les critiques qui l’ont détournée et renversée, elle avait une relation imagée avec ce qu’il avait fait dans le Carmen : il n’est pas difficile de remplacer trois des « K » par des « R » ; avec quelque chose de surprenant que le rapporteur de Gerbert, Helgaud, ne nous aurait pas suggéré : la présence d’un « K » à la fin. Ce qui ferait penser à un aboutissement sur « K »/« C » le pouvoir impérial étant au début, et à la fin, dans une sorte de gouvernement commun (donc en y superposant un « S »), tel qu’il est envisagé par Otton III et Sylvestre II110.
82Vient ensuite Hugues, moine à Verdun, puis abbé de Flavigny111, à cheval entre le XIe et le XIIe siècle. Bien qu’il dispose de données semblables à celles de Richer, il nous dit que Gerbert s’est fait chasser d’Aurillac, suite à « l’insolence de ses mœurs », et que sa charge d’archevêque de Ravenne, provient de « quelques prestiges », ce qui peut renvoyer autant aux manœuvres de politique « religieuse » qu’à des sortilèges. La prédisposition à ces opérations est mise en évidence par l’étrangeté des mœurs du jeune moine qui provoquent son expulsion de l’abbaye. Le cercle est ainsi refermé et une étiquette est créée.
83Nous en déduisons, en conclusion, que l’opération symbolique poursuivie par Gerbert a été la suivante : utiliser 800 lettres, faire ressortir les chiffres indo-arabes, continuer un discours par confirmation de 46 lettres réutilisées dans trois unités différentes, puis par augmentation grâce aux abréviations créer les autres unités, faire apparaître les noms « indiens » des chiffres dans la dixième unité, utiliser avec abondance d’autres correspondances de symbolique numérique, autant d’opérations qui étaient perçues comme une succession de magies, qui plus est en bonne partie apprises chez les « Ismahélites »112, des éléments jugés dangereux voire démoniaques, qui devaient « expliquer » ses connaissances et ses pouvoirs exceptionnels.
84En définitive autant de raisons pour amputer l’ouvrage dès le début, en effacer les traces et biffer l’identité de son auteur. De ce point de vue, seule l’idée philosophico-théologique fondamentale, et la méthode rédactionnelle particulière qui en est issue ont permis à l’auteur de « berner » royalement ses confrères censeurs et détracteurs, et de nous permettre un essai de reconstitution partielle.
Conclusion
85Dans l’immédiat, Théophano et Otton III se souviendront des perspectives de Gerbert : ils le rappelleront et l’honoreront. Ainsi son discours des 4 « K » est apparemment récupéré, même si dans une perspective globalement constantinienne, certainement grâce à Ecbert et à Théophano, étant donné l’âge d’Otton III.
86Le sort ultérieur du Liber a été semblable à celui de l’historiographie et parfois de la « critique », de son auteur : réduit à un seul verso, pour ce qu’il pouvait offrir de décoratif, rendu anonyme, allégé de toute transcription, explication, information scientifique (mathématique ou musicale), de toute perspective politique, ou tout simplement personnelle, pour être exploité à d’autres fins liturgiques, comme il en est de certains palimpsestes. Ce n’est pas Gerbert qui a créé un ouvrage crypté et magique, ainsi que M. Brockett le croyait encore récemment pour résoudre le problème : sa situation assez dangereuse lui conseillait de jouer de tout son poids, scientifique et doctrinal, afin d’informer, éblouir et convaincre le pouvoir impérial.
87Comme conclut Pierre Riché dans sa monographie sur le Pape de l’année mil, chaque fois qu’on touche à la personnalité113 et aux activités de Gerbert « mille ans après il continue à étonner ceux qui s’intéressent à lui »114. Il ne nous reste que de nous émerveiller face à cette réalisation, malgré tout probablement assez hâtive, et du caractère conséquent de Gerbert : certainement une intelligence supérieure qui a su comprendre et percevoir rapidement l’intérêt des informations scientifiques et autres, et dépasser la myopie et la petitesse d’esprit de plusieurs de ses contemporains, et non pas des moindres115.
Bibliographie
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Annexe
Texte du Carmen figuratum
Partie explicite
I,1 ORGANA QUAE DEDIT IPSE SUO
2 OMINE QUO MODERANTE BONO
3 ORBE TONAS PATER AMPLIFICO
4 OMNIGENUM PATER A SOLIO
5 OMNIA PROVIDUS ETHEREO
6 ORDINE TEMPERAT EXIMIO
7 OPERE CONDITA QUAEQUE SUO
8 OBLIGAT [AC] REGIT IMPERIO
II,1 TE PIUS ABBA COLIT
2 TUA PSALLERE MUNERA POSSIT
3 TE RECOLENS VIGEAT
4 TUA QUEM PIA GRATIA DITAT
5 TE REX TERRA TREMIT
6 TIBI LAUDES PANGERE GLISCIT
7 TE FRETA CUNCTA PAVENT
8 TIBI TARTARA GENUA CURVANT
III,1 TIBI FORMULA LAUDE RESULTAT
2 TUA GLORIA LAUSQUE CREBRESCAT
3 TUA FILIUS ECCE REFUDIT
4 TOLERANS MALA QUI BONA NOVIT
5 TIBI CONDITOR OMNIA SUBDAT
6 TUA QUODQUE BENIGNITAS OPTAT
7 TITULUS REPROBANTIS [T]ABESCAT
8 THALAMUS PIETATIS ADHISCAT
IV,1 ORBITA QUOD TANTO REPLICAT PER TEMPORA GYRO
2 OCCASUM CERTO PRAEFIGIT LIMITE PH™BO
3 ORDINE TAM VARIO DISPONIT SIDERA CAELO
4 OMNIPOTENS NITIDO SUPER EXTANS ETHERA [PH]ANO
5 OFFERAT HIS SERVO PATREM CUM CORDE SERENO
6 OBICE DISRUPTO MENTISQUE TUMORE FUGATO
7 OMNIA QUAE NATO ROGITET CUM PNEUMATE SACRO
8 OCCUPATATQUE SUO MARE QUOD TAM GURGITE VASTO
Partie Cryptée
I,1 REUM A QUAE AEQUA DEDOCE META.
2 AN UERE LIBRI APTA EIA PIATUR,
3 ARARUM ALAAT DUCTA MINOR. ECCE,
4 ATUMORE UERTAS UNA NOUEM. DOS
5 A GERBERTO OTTONI AC THEOPHANO.
II,1 MEA RUMOR RARAATRO DAT CANI.
2 EIA ! NOREM E ODE TE TUO ARCANO ?
III,1 MEAATREA ITERUM ODA NOUO
2 RARO TER ARRA NICA TE MODE CANO
IV,1 MEA ODA RARO TER MODE ATERNO
2 CATERUA TROIANO E RUMANICA
V,1 ERUCTAMATER NAM UERE DOM(INA)
ODA ISATRONA TE A(UGUSTORUM)
R(OMANO)R(UM) RE(GNO) O(T)O(N)IANO
VI,1 ERUMNAM ICARO MOTO TACUERE DOMI TROIANA
NONNAAUGUSTORUM, DEO NATA
R(EGINA) A(DELAIDE) TEORUM REGNO
VII,1 TE ADEO DE NON TACUERO :
MANU RERUM LATA INANI,
CȨDUO AGE.
REGAMUR, DE MIRA S(E)N(TENTIA) OTO(NIS) G(LORIOSI)
I(MPERATORIS), M(AGNO) R(EGE) O(T)O(NE),
NO(BIS) NATO RUMANA I(MPERATRICE)
VIII,1 TEA MANU DUCE, DE MIRA NORMARUM
GLORIOSI MAGNI A(UGUSTI) ODE,
R(EGEM) O(TONEM) REGAT, SEN(ATU) PETENTE,
UNGENDI IN REGEM NATALE.
PRECAMUR UERO : M(AIESTATEM)
A(UGUSTI) (SECUNDI) OTONIS
RISTORA NOBIS OTONE NATO
AC T(EOFANO) REIA
IX,1 TEA NORMA REGNET GENUS N(OSTRI) A(UGUSTI).
TUERE AUG(USTE) OTO NOBIS ACTES MARIA MANU TUA.
G(ERBERTO) M(A)G(ISTR)O NUM(ER)O UNO PENE
ALE INDICAM MATESIN.
PRECIS IUSTI N(OSTER) REX OTO FANO
DULCI DEO E ORGANIS
MIRAARTE REIA ROGET NATO ODE.
INSTET EUM REGEM MUNDI STATUERE.
X,1 NATE NOSC(ER)E TUA, TE
G(ERBERTUS) E NUMERO (DECEM)
INSTRUIT PALAM RENERE RORE RERUM.
ASTE B(ONE) R(EX)
ORE INDO O(T)O FATU :
IGIN
ANDRAS
ORMIS
ARBAS
GUIMAS
CALCTIS
TSENIS
TEMENIAS
CERENTIS
SIPOS
E G(E)N(IO) G(ERBERTI) U(ESTRI)
UT TEIO G(ENIO) U(ESTRO)
OTO N(OSTE)R A(UGUSTE)
UT NOTȨ A DIGITO U(ER)TANTUR.
UERO NOMINA MEȨ GEOMETRIȨ
A(UGUSTE) R(EX) ODE
DE MEA UERUM TUA
XI,1 NATE R(EX) G(RATIA) SINE ASTRO
REGINA(M) BRATEIS TEGI
CEU UERE OTONA(M) TE(OFANO) AUG(USTAM)
MUNERE DEBERE NOSTRO.
UERE BENIGNA D(OMI)N(A) SIS
NONNI OTO(NIS)
TE NOUO STATUTO CESARE.
P(RO) RORE NEREO O(TO) SATOR DITE GESSIT.
UESTER G(ERBERTUS) MIRANDA I(MPERATRIX)
E(SS)E REUM E TUIS.
ATE MALUERIM ODE R(EX) UNC ME REUM
(CRISTI) AT U(ESTRI) SIM.
FORMAS CARACTERIS LEMNIAS
PO(SUIT) B(ENE) TIRO UESTRI.
UENI O(TO):
EST AUGUSTȨ I(MPERATRICIS) T(EOFANO) OMEGA
UT NOTȨ U(ERSUS) GEMETRIȨ
R(OMANO)R(UM) (CRISTE) ODȨ TUȨ.
XII,1 NATE SAT TEGI AUG(USTAM) DONO
NOUO REOR DITE MIRȨ
S(ENATUS) S(ENTENTIȨ).
MALUM FERO REMO L(IBERTATIS) C(AUSA)
– M(ALIS) M(ALE)! –
TERMINA PERTRANS(IR)I
UTPOTE GEM(ER)ET REX
RORE CEU UITA.
URSA TREA GENERA TESPIA DE(A) MUSICȨ
AUGURI SONITU REGAT
G(ERBERTI) ORGANI.
E TETE MUNERE EROIS,
– B(ONIS) B(ENE) ! –
NOSTI OTO GENUS I(MPERATRICIS) T(EOFANO)
TU(OR)UM OPEM E(SS)E,
M(E)M(ORIA) RITUS TUI CARTȨ.
SUO SCUDO TESEO ASTA U(ER)O!
REE TERRAM, ENNII EDE(M) NOCTU UENI
O(T)O TROIANIS CAT(ER)UIS
ET TE E FANO M(AIESTATI)S ERIGE TUȨ ISOTEIS.
B(ENE) RENE A(UGUSTORUM) TERRAR(UM) BONOS:
AN BRASTȨ INMENSI? !
SERA ROTAS:
RITE NORIS (CRISTUM) RED(IR)E,
(CRISTUM) R(EGIS) M(AGNI),
S(ALUATOREM) ET I(ESUM),
R(EGEM) O(MNIS) ȨTATIS,
A(LFA) (E)N O(MEGA),
MUSICȨ FUSORE(M).
Notes de bas de page
1 Cf. Gerberto d’Aurillac da Abate di Bobbio a Papa dell’Anno 1000, Atti del Congresso internazionale Bobbio, Auditorium di S. Chiara, 28-30 settembre 2000 (Archivum Bobiense, Studia 4), (éd.) F. G. Nuvolone, Bobbio, 2001. Le premier congrès datait de 1983 : cf. Gerberto. Scienza, storia e mito. Atti del Gerberti Symposium (Bobbio, 25-27 luglio 1983) (Archivum Bobiense, Studia 2), (éd.) M. Tosi, Bobbio, 1985.
2 C. W. BROCKETT, « The Frontispiece of Paris, Bibliothèque nationale, Ms. Lat. 776. Gerbert’s Acrostic Pattern Poems », Manuscripta 39, 1995, p. 3-25.
3 Die lateinischen Dichter des deutschen Mittelalters. Fünfter Band, Die Ottonenzeit, dritter Teil (MGH, Poetae latini Medii Aevi, Tomus 5, Fasciculus 3), (éds) G. Silagi, B. Bischoff, München, 1979, p. 666-667.
4 Voir la table dans BROCKETT, op. cit., p. 13 et HUGLO, 2001, table 4.
5 M.-N. COLETTE, « Il manoscritto Paris, Bibliothèque nationale de France, lat. 776, Colbert 873, Regius 3661 », dans (éds) N. Albarosa, H. Rumphorst et A. Turco, Il cod, Paris Bibliothèque Nationale de France lat. 776 sec. XI Graduale di Gaillac (Codices Gregoriani 3), Padova, 2001, p. VII-XXIV.
6 Voir la reproduction dans F. G. NUVOLONE, 2003b, fig. 3 et du folio complet dans E. POULLE, 2005, fig. 1, ainsi que sur la couverture du présent volume. Ces références renvoient à notre Bibliographie, infra.
7 Cf. BROCKETT, op. cit., p. 3-4.
8 F. G. NUVOLONE, « Il Carmen figurato attribuito a Gerberto nel Ms Paris, BnF, lat. 776, f. 1v : una composizione redatta nell’Abbazia di San Colombano di Bobbio ? », dans Gerbertus qui et Silvester : minima gerbertiana da Piacenza a Lovanio e altri studi (Archivum Bobiense 24, 2002), Bobbio, 2003, p. 123-260.
9 F. G. NUVOLONE, « Appunti sul Carmen figurato di Gerberto d’Aurillac e la sua attività a Bobbio », dans Liber de arca domni Athalani : a trent’anni dalla fondazione degli Archivi Storici Bobiensi, 1973-2003 (Archivum Bobiense 25, 2003), Bobbio, 2004, p. 227-345.
10 Gerberto d’Aurillac – Silvestro II : linee per una sintesi, Atti del Convegno Internazionale Bobbio, Auditorium di S. Chiara 11 settembre 2004, sotto la Presidenza del Prof. Pierre Racine, organizzato dalla rivista Archivum Bobiense nel XXV° della sua fondazione col patrocinio dall’Università Cattolica di Milano (Archivum Bobiense -Studia 5), (éd.) F. G. Nuvolone, Bobbio, 2005. Le texte de E. POULLE : « Gerbert homme de science », aux p. 95-123.
11 F. G. NUVOLONE, « La presenza delle cifre indo-arabe nel Carmen figurato di Gerberto : una discussione », dans « Vidi et gauisus sum », visione politica e pratica scientifica in Gerberto, e altri studi dal Tardo Impero alla Liberazione (Archivum Bobiense 26), Bobbio, 2005, p. 321-372.
12 Voir la séquence des strophes inscrite dans le schéma original, dans F. G. NUVOLONE, 2003b, fig. 5, ainsi qu’une synthèse des relations de Gerbert avec les Ottoniens aux p. 160-164 et dans F. G. NUVOLONE, 2004, p. 257-273.
13 Voir le schéma isolé dans F. G. NUVOLONE, 2003b, fig. 20.
14 Sur le sujet voir sous TOSI, 1985b, p. 80-97 et RACINE, 2001, 2003, 2005a, 2005b.
15 Voir la lettre 8 dans RICHÉ et CALLU, 1993, p. 16-19, dont les réelles circonstances restent hermétiques, mais qui révèle une approche optimiste.
16 Voir les reproductions déjà signalées à propos de BROCKETT, op. cit., 1995, p. 15. Il va de soi qu’en ayant 16 vers commençant par la lettre « O » et 16 par la lettre « T », les possibilités de combinaisons de vers sont nombreuses (cf. BROCKETT, 1995, p. 11-12), mais il faut les évaluer au niveau du chemin de lecture choisi et du contenu transmis. La solution ne naît pas de n’importe quelle façon : la valeur communicative est à apprécier à partir de plusieurs paramètres, dont le résultat nous paraît hautement adhérent au personnage, à son contexte, ses idéaux, son langage.
17 Voir les exemples très proches d’Optatianus Porphyrius, toujours avec le nom de l’empereur en téléstiche : cf. F. G. NUVOLONE, 2005d, p. 336-338 et fig. 2-3.
18 Voir le résultat, après corrections, dans NUVOLONE, 2003b, fig. 7 et NUVOLONE, 2004, fig. 1. Sur les rectifications, la façon de tracer les images, les modèles « indiens », la discussion qui en est née NUVOLONE, 2003b, p. 179-181, fig. 14-19 ; NUVOLONE, 2004, p. 264-273 ; POULLE, 2005, p. 95-114 ; NUVOLONE, 2005d et fig. 8-9, 12-16.
19 Cf. NUVOLONE, 2003b, p. 173-176, fig. 33-39 et NUVOLONE, 2005c, fig. 10-11 ; sort commun, fidélité et amitiés dans un engagement global (cf. FELD, 1985 et NUVOLONE, 2005c, p. 208-212).
20 Cf. NUVOLONE, 2003b, p. 176-178, fig. 29-32.
21 Cf. BEAUJOUAN, 1996, p. 325-326 et FOLKERTS, 2001, p. 247-248 et passim.
22 Voir le schéma isolé dans NUVOLONE, 2003b, p. 165,168, fig. 20. Ainsi que précisé à cet endroit, dans le schéma nous avons omis, pour des questions de clarté, les contours du cercle et du premier carré, retenus, ainsi que dans les figurations du chrismon, une double couronne qui met en relief le symbole lui-même. Pour une représentation simple voir l’exemple donné dans NUVOLONE, 2004, fig. 4, qui n’est toutefois pas isolé et peut utiliser aussi une double couronne.
23 Cf. nos explications en NUVOLONE, 2003b, p. 165-168 et l’analyse de W. BERSCHIN, « Drei griechische Majestastituli in der Trier-Echternacher Buchmalerei », dans W. Nyssen (éd.), Begegnung zwischen Rom und Byzanz um das Jahr 1000. Zum tausendsten Todestag der Kaiserin Theophanu, Köln, 1991, p. 39-52.
24 Cf. lettre 13, dans RICHÉ et CALLU, 1993, p. 26-27.
25 Cf. lors des dernières rencontres gerbertiennes l’exposé de B. FAUVARQUE, 2005.
26 Cf. le graphique du Carmen 18, repris dans NUVOLONE, 2003b, fig. 24. ; dans POLARA, 1973. I, p. 69-71 ; cf. II, p. 103-116.
27 Cf. Berlin, Deutsche Staatsbibliothek, Fragment 89, f. 8v ; ERNST, 1991, p. 366-371, et image en couleur NUVOLONE, 2003b, fig. 15.
28 Cf. Berlin, Deutsche Staatsbibliothek, Fragment 89, f. 8r, ERNST, 1991, p. 361-366 ; NUVOLONE, 2003b, p. 189-190 et image en couleur ibid., fig. 14.
29 Cf. NUVOLONE, 2003b, p. 155-158 ; NUVOLONE, 2004, p. 246-251 et fig. 3-4.
30 Cf. NUVOLONE, 2003b, p. 246-251 et fig. 9-13.
31 Cf. NUVOLONE, 2004, fig. 9-10, et y comparer le Carmen 14 d’Optatianus Porphyriu, image dans NUVOLONE, 2003b, fig. 21.
32 Cf. RICHÉ et CALLU, 1993, p. 58-61 et l’analyse intéressante de G. LIGATO, « L’appello di Silvestro II per Gerusalemme (Ep. 28) », dans NUVOLONE, 2001a, p. 127-172.
33 En voir remarques et reproductions dans NUVOLONE, 2003b, p. 151, fig. 25-26 et NUVOLONE, 2004, fig. 31.
34 En voir une analyse très fouillée dans W. GEORGI, « Ottonianum und Heiratskunde 962 / 972 », dans A. VON EUW et P. SCHREINER, Kaiserin Theophanu. Begegnungen des Ostens und Westens um die Wende des ersten Jahrtausends. Gedenkschrift des Kölner Schnütgen Museums zum 1000. Todesjahr der Kaiserin, Köln, 1991, II, p. 135-160 ; N. GUSSONE, « Trauung und Krönung. Zur Hochzeit der byzantinischen Prinzessin Theophanu mit Kaiser Otto II. », ibid., II, p. 161-173 ; A. VON EUW, « Ikonologie der Heiratskunde der Kaiserin Theophanu », ibid., II, p. 175-191.
35 Voir l’image du Carmen XX, d’après POLARA, 1973, I, p. 76 reprise en couleur dans Nuvolone 2005d, fig. 6 et l’analyse de l’évolution de la description dans NUVOLONE, 2004, p. 315-322.
36 Cf. une schématisation du fonctionnement dans NUVOLONE, 2004, fig. 40-42.
37 Cf. NUVOLONE, 2003, p. 199-205. Une perspective critique et autre dans F. HENTSCHEL, « Gerbert, Organa, and historical thinking », Archivum Bobiense 24, 2002, p. 53-77 ; il avait été précédé dans une direction analogue par A. M. FLUSCHE, Organa doctorum : Gerbert of Aurillac, organbuilder ?, Ph. D. diss. Rice Univ., 1994, Ann Arbor, University Microfilm International, 1995. Sur le contexte et les aspects de l’activité musicale de Gerbert voirencore SACHS, 1970 et 1972, Chr. MEYER, 1997, HUGLO, 2001, GÜMPEL, 2003, NUVOLONE, 2005b.
38 Pour l’emploi du chiffre 37 à la base des lettres de chaque vers, voir un des exemples de Milo de Saint Amand (cf. ERNST, 1991, p. 336-340), qui dépend aussi de Optatianus Porphyrius et utilise croix et « X ».
39 Cf. Carmen I, 1-2 et III, 1-4.
40 Sur ces interprétations, ici légèrement retouchées, voir dans NUVOLONE, 2004, p. 264-268. Sur une symbolique numérique, ses méthodes et les différents aspects qui intéressent aussi le Carmen, voir en général H. MEYER, 1975 et MEYER et SUNTRUP, 1987.
41 Cf. l’image dans NUVOLONE, 2004, fig. 8. Voir ibid., fig. 6-7 les symboles relevables pour la famille impériale.
42 Cf. NUVOLONE, 2004, p. 194-199 et voir aussi ibid., p. 325 (avec une coquille : « sacra » pour « sacro »). Sur les poèmes de Gerbert, outre BROCKETT, 1995, p. 9-11, voir MOEHS, 1985 et J. CLOSA FARRÉS, « Entorn les poesies llatines de Gerbert d’Orlhac », dans OLLICH I CASTANYER, 1999, p. 713-723.
43 POLARA, 1973, II, p. 12, 34 : Picta elementorum uario per musica textu…
44 L’enchaînement des idées, avec une sorte de coup de queue final, fait penser à ce qui se passe dans l’unité cryptée XII : dans les deux cas, il s’agit d’une dialectique entre monde sacré et milieu impérial.
45 Un apprentissage certainement au sens plus large que celui de son utilisation ou son jeu. Voir d’autre part les conclusions que nous avions condensées au terme de cette première recherche dans NUVOLONE, 2003b, p. 216-218.
46 Cf. le détails des analyses en NUVOLONE, 2004, p. 274-315.
47 Ces vérifications sont intervenues lors de la rédaction d’un article destiné à clarifier quelques points relevés dans les discussions, en même temps qu’à synthétiser les résultats atteints.
48 Cf. NUVOLONE, 2004, p. 274-276. Voir la grille à partir de laquelle la pièce est tirée ibid., fig. 30, unité V, 2.
49 Voir dans le cas de Bobbio par ex. l’Ep. 11 où Gerbert se dit qualifié d’étalon de reproduction à cause des membres de sa famille, et rapporte que l’empereur est défini tel un âne (cf. RICHÉ et CALLU, 1993, p. 22-23).
50 C’est une mesure de prudence que Gerbert connaît (cf. par ex. Ep. 2, RICHÉ et CALLU, 1993, p. 6), mais qu’il n’a pas toujours appliquée, surtout en ce qui concernait sa fidélité ottonienne, et qu’il lui valut des conseils spécifiques, par ex. de la part de Willigise de Mayence en 989 (cf. Ep. 158, RICHÉ et CALLU, 1993, p. 392-395). Notre Liber témoigne d’une telle attitude.
51 Voir dans NUVOLONE, 2004, fig. 30, unité V, 2.
52 Cf. NUVOLONE, 2004, p. 276-279. Voir la grille à partir de laquelle la pièce est tirée ibid., fig. 30, unité V, 3.
53 Cf. NUVOLONE, 2003b, fig. 9.
54 Cf. par ex. NUVOLONE, 2004, fig. 16.
55 Cf. PERRIN, 1988, p. 70-71.
56 Cf. NUVOLONE, 2005d, fig. 1.
57 Cf. NUVOLONE, 2003b, fig. 21.
58 Cf. NUVOLONE, 2004, p. 279-280. Voir la grille à partir de laquelle la pièce est tirée ibid., fig. 30, unité V, 4.
59 Cf. Préf. De rationali et ratione uti, HAVET, 1889, p. 237.
60 Cf. RICHÉ et CALLU, 1993, p. 484-487.
61 Cf. NUVOLONE, 2004, p. 280-282. Voir la grille à partir de laquelle la pièce est tirée ibid., fig. 30, unité V, 5.
62 La personne, le rôle et l’image de Théophano ont été l’objet de plusieurs études, aussi collectives, voir par ex. : M. UHLIRZ, « Zu dem Mitkaisertum der Ottonen : Theophano coimperatrix », Byzantinische Zeitschrift 50, 1957, p. 383-389 ; Begegnung zwischen Rom und Byzanz um das Jahr 1000. Zum tausendsten Todestag der Kaiserin Theophanu, (éd.) W. Nyssen, Köln, 1991 ; A. VON EUW et P. SCHREINER, Kaiserin Theophanu. Begegnungen des Ostens und Westens um die Wende des ersten Jahrtausends. Gedenkschrift des Kölner Schnütgen Museums zum 1000. Todesjahr der Kaiserin, Köln, 1991, I-II ; Die Begegnung des Westens mit dem Osten. Kongressakten des 4. Symposions des Mediävistenverbandes in Köln, 1991 aus Anlass des 1000. Todesjahres der Kaiserin Theophanu, Sigmaringen, (éds) O. Engels et P. Schreiner, 1993 ; H. KLEIN, « Theophanu Coimperatrix », Der Staat 32, 2, 1993, p. 219-244 ; The Empress Theophano : Byzantium and the West at the turn of the first millennium, (éd.) A. Davids, Cambridge, 1995; E. EICKHOFF, Theophanu und der König: Otto III. und seine Welt, Stuttgart 1996; R. GRÉGOIRE, Theofano una Bizantina sul trono del Sacro Romano Impero (Donne d’Oriente e d’Occidente), Milano, 2000.
63 Cf. NUVOLONE, 2004, p. 282-284.
64 Cf. NUVOLONE, 2004, p. 284-286.
65 Cf. RICHÉ et CALLU, 1993, p. 40-43.
66 Cf. par ex. Ep. 39 : Consule, mi Pater, modis omnibus resistendum, ne conveniant adversus Dominum, et adversus Christum tuum (RICHÉ et CALLU, 1993, p. 96, début 985 ?).
67 Cf. NUVOLONE, 2004, p. 286-288.
68 Cf. NUVOLONE, 2004, p. 289-292.
69 Voir la lecture des « T », par mouvement horaire, dans l’optique du plus haut nombre de l’abaque appelé à définir celui de l’empereur Otton III dans l’Ep. 183, le chiffre 9 dans les 27 colonnes (cf. RICHÉ et CALLU, 1993, p. 472-473).
70 Cf. NUVOLONE, 2004, p. 293-297. Noter dans le texte et la version ici en appendice pour les unités X-XII quelques corrections qui améliorent en général la teneur et éliminent des irrégularités et des défauts, mais qui, étant la nature du procédé rédactionnel, interviennent en cascade ; nous y reviendrons ailleurs.
71 Voir à cet égard Cité du Vatican, BAV, Vat. Lat. 644, f. 77v-78r, peut être du XIe s. : table ajoutée pour compléter un Ms du Xe s. À souligner la présence de l’hexamètre : GERBERTVS LATIO NVMEROS ABACIQVE FIGVRAS, qui succède dans l’ordre aux noms et aux symboles des chiffres indiens (cf. reproduction dans NUVOLONE, 2005c, fig. 6-7). Sur le sujet voir surtout Folkerts, 1970, 2001 et la bibliographie citée ibid., p. 263-265.
72 Détail qui s’oppose à une prétendue volonté de Gerbert de reléguer ces sciences à un milieu ésotérique et occulte, ce qui est le propre d’une perspective postérieure.
73 Cf. NUVOLONE, 2004, p. 297-303.
74 Cf. NUVOLONE, 2004, p. 300, note 204.
75 Cf. le texte et les renvois ibid., p. 301 ainsi que la fig. 45.
76 Cf. NUVOLONE, 2004, p. 304-315.
77 En voir texte, références et explications dans NUVOLONE, 2004, p. 319-322.
78 Cf. « Das Sator-Quadrat in Antike und Mittelalter », dans ERNST, 1991, p. 429-459. Y remarquer en particulier l’alliance de la croix et des lettres apocalyptiques. Fondamental reste M. FOLKERTS, « Zur Frühgeschichte der magischen Quadrate in Westeuropa », Sudhoffs Archiv 65, 1981, p. 313-338.
79 Voir le cas de la lettre anonyme 165 (RICHÉ et CALLU, 1993, p. 412-415), attribuée par les éditeurs à Arnoul, mais écrite en son nom par Gerbert, qui face au sac de Reims dit : sed propter impia tempora, propter perditissimorum iniqua commenta, clam agimus, quod palam non possumus. Veniet, veniet, inquam, dies, et prope est, in qua uniuscujusque nostrum probentur et cogitata, et dicta et facta. Passage rendu par « mais à cause de ces temps d’impiété, à cause des desseins iniques d’hommes voués à la damnation, nous menons en secret ce qu’il nous est impossible de faire au grand jours. Il viendra, oui, je le dis, il viendra, et déjà il s’approche, le jour où, de chacun de nous, les pensées, les paroles, les actes seront mis à l’épreuve ». Le passage de Joël 2, 1, ainsi que la révélation-mise à l’épreuve de l’ensemble des éléments humains, normalement relevant de la venue du Jour du Jugement sont utilisés appliqués à la situation concrète. L’occasion de 990 et la perspective des victricia signia carolingiens cache-t-elle une autre tension ? Un peu plus tard, en juin 991, se tenait le concile de Saint Basle, avec l’intervention remarquée de Arnoul d’Orléans qui employait un langage assez chargé. Il relisait les faits récents comme un isolement et des dissensions, fruit des suppôts de l’Antéchrist, et signes de l’approche de ce-dernier, s’élevant et s’installant dans le Temple de Dieu, selon l’annonce de Paul (II Thess. 2 ; cf. OLLERIS, 1867, p. 206, 213-214).
80 Sur le thème eschatologique chez Gerbert et dans ses relations avec Otton III voir aussi FAUVARQUE, 2000 et 2001 ; LIGATO, 2001 ; FAUVARQUE, 2005. La scène est ici privée de la doxologie présente dans notre première étude, qu’il faudrait donc écarter, et nous nous en excusons. D’un point de vue numérologique l’accent à préférer serait aussi celui des relations entre les neuf chiffres (dont l’addition donne 45, fait déjà considéré) et le chiffre musical par excellence, le 12 : en effet le total des lettres de l’unité fait 540 (= 45 x 12). Ce qui serait en harmonie avec l’ensemble de la perspective de la composition, outre en particulier avec cette douzième unité. Nous soulignons le fait d’une équivoque réelle gérée entre les nombres 9 et 10, soit dans le cadre des chiffres que de la numérotation des unités, ce qui correspond bien à la conscience d’effectuer une transition, outre qu’à la récupération d’une donnée scientifique « arabe » (cf. NUVOLONE, 2005d, p. 350-352).
81 Les voir employés dans le XIIe poème sur la croix de Raban Maur, où il fait correspondre à la qualification du deuxième Adam, le Christ, rédempteur et véritable seigneur de l’univers grâce à son propre triomphe sur la croix (cf. PERRIN, 1988, p. 70-71, 120, 196-197).
82 Cf. NUVOLONE, 2005d, fig. 11 : à comparer aussi la fig. 10.
83 Voir Raban Maur dans sa IIe composition des Louanges de la Sainte Croix, la précision : « Il faut noter que nous avons placé la lettre O, qui ressemble à un cercle, dans les quatre angles du carré et dans les quatre coins de la croix ainsi qu’au milieu de la croix, afin de montrer que la puissance de la sainte croix tient tout lié ensemble, et qu’elle unit dans l’adoration du Christ ce qui est en haut et ce qui est en bas » (PERRIN, 1988, p. 107, l’image et le texte poétique aux p. 50-51). Comme notre Carmen, mais ici en clef proprement christologique, est faite référence à Phil. 2, 10. Ce qui expliquerait une osmose entre milieu christologique et impérial aussi quant à la symbolique graphique.
84 Ep. 187, dans RICHÉ et CALLU, 1993, p. 484-485.
85 Tolle numerum in rebus omnibus, et omnia pereunt. dans ISIDORE, Etymologiarum libri XX (PL 82, Paris, 1850), III, IV, 3.
86 Nate nosc(er)e tua, te G(erbertus) e numero (decem) instruit palam renere rore rerum, dans NUVOLONE, 2004, p. 293-297.
87 Ep. 2 à Otton II, dans RICHÉ et CALLU, 1993, p. 4-5.
88 Ep. 5 à Pierre év. de Pavie, archichancelier du royaume puis Pape Jean XIV, dans RICHÉ et CALLU, 1993, p. 10-11.
89 Ep. 11 à Otton II, dans RICHÉ et CALLU, 1993, p. 22-23.
90 Ep. 12 à Hugues, dans RICHÉ et CALLU, 1993, p. 24-25.
91 Ep. 16, à l’abbé Géraud d’Aurillac, dans RICHÉ et CALLU, 1993, p. 32-33.
92 Cf. Ep. 117, dans RICHÉ et CALLU, 1993, p. 282-283. La Ep. 18 semble, sous les apparences d’un rejet récent de Pétroald, souligner surtout l’abandon de l’abbé légitime, Gerbert (cf. non causa retinendi honoris scribo). D’autre part l’abandon est en parallèle souligné d’une façon énergique : regulam sancti Benedicti (...) pastorem deserendo abjecistis. Un ensemble d’indices qui conseillent de comprendre au sens propre le renvoi de Gerbert, ce qui a impliqué par la suite aussi celui de son remplaçant.
93 Cf. une reproduction du premier dans NUVOLONE, 2003, fig. 28 ; pour les deux et une analyse dans N. EICKERMANN, « Zu den Carmina figurata Uffings von Werden », Beiträge zur Geschichte von Stadt und Stift Essen 101, 1987, p. 2-13 et ERNST, 1991, p. 495-502.
94 Cf. NUVOLONE, 2003, p. 190-192.
95 OLLERIS, 1867, p. 237-238.
96 Cf. ERNST, 1991, p. 460-474 pour les carmina figurata d’Abbon ; noter à la p. 467 un intéressant Ms Vatican, Reg. lat., 1874, privé de disposition en grille et de la mise en relief du texte de l’encadrement, ainsi que de la dédicace insérée dans chacun des quarts. Significatif pour considérer en partie la situation actuelle du Carmen de Gerbert, fruit des aléas et de caprices de la transmission manuscrite.
97 Le fait qu’il invite Otton III à embrasser le bouclier (victorieux) de son grand-père, n’est sans rappeler (d’une façon polémique ?) l’image offerte dans la XIIe unité par Gerbert, présentant Otton II avec le bouclier de Thésée.
98 Cf. NUVOLONE, 2001b, p. 599-657.
99 Cf. ibid., p. 601-614.
100 Cf. ibid., p. 614-634.
101 Cf. ibid., p. 634-638 et NUVOLONE, 1985, p. 370-565.
102 Cf. Chronicon, (éd.) E. Holtzmann (MGH.SRG 9), Hannover, 1935, p. 348.
103 Voir par exemple RICHÉ, 1999a, p. 114-117. Au-delà des témoignages explicites écrits, Plutôt occasionnels, il faut souligner l’impact constant sur les milieux monastiques des lectures de la littérature patristique, pour des raisons variées assez globalement négatives sur le sujet : voirpas ex. H. JÜRGENS, Pompa diaboli : die lateinische Kirchenväter und das antike Theater (Tübinger Beiträge zur Altertumswissenschaft 46), Stuttgart, 1972.
104 Cf. le récit ponctuel mais symbolique et éloquent de Raoul Glaber, Histoires II, XII (M. ARNOUX, Turnhout, 1995, p. 136) à propos de Vilgard à Ravenne : quadam nocte adsumpsere demones poetarum species Virgilii et Oratii atque Iuvenalis, apparentesque illi fallaces retulerunt grates quoniam suorum dicta voluminum carius amplectens exerceret, seque illorum posteritatis felicem esse preconem ; promiserunt ei insuper sue glorie postmodum fore participem. Hisque demonum fallaciis depravatus cepit multa turgide docere fidei sacre contraria, dictaque poetarum per omnia credenda esse asserebat.
105 Cf. Adalbéron de Laon, Poème au roi Robert (Les classiques de l’histoire de France au Moyen Âge 32), (éd.) C. Carozzi, Paris, 1979, p. 12 : Crede mihi, non me tua uerba minantia terrent ! Plurima me docuit Neptanabus ille magister. Il faut affirmer, à part l’aspect proprement magique, que les connaissances astrologiques de Gerbert sont probablement à confirmer à partir de ses lectures et de son écriture, cf. JUSTE, 2000 et JUSTE, 2007. Réflexion analogue est à formuler, mutatis mutandis, pour la figure d’Abbon de Fleury, cf. toujours D. JUSTE, « Comput et divination chez Abbon de Fleury », dans Abbon de Fleury : philosophie, science et comput autour de l’an mil, (éd.) B. Obrist (Oriens-Occidens. Sciences, mathématiques et philosophie de l’Antiquité à l’Âge classique, 6), Paris-Villejuif, 2004. p. 95-127. Le même Abbon se défendant d’être « Dieu qui change les esprits, qui change les royaumes et les temps », rajoute « J’avoue en vérité que j’ignore la magie et que je n’ai appris aucun des arts maléfiques » ; ce qui est dit en 993, paraîtrait convenir à l’archevêque de Reims, qui, alors qu’il n’était pas encore en telle charge, disait à fin 989 : « leurs doigts me désignaient comme celui qui déposait les rois, comme celui qui faisait les rois. Et moi, qui étais si mêlé aux affaires de l’État, avec l’État j’étais en péril (...) » (Ep. 163, dans RICHÉ et CALLU, 1993, p. 404-405).
106 Cf. Bennon de Osnabrück, Gesta Romanae Ecclesiae contra Hildebrandum, (éd.) K. Francke (MGH, Libelli de Lite 2), Hannover, 1892, p. 377 : l’écrivain suit le dessein historiographique de faire remonter toute une série de papes au magistère néfaste et démoniaque de Gerbert et de les dater d’après le même ; une nuance fondamentale : la disqualification du savoir scientifique.
107 Cf. l’épisode réécrit par Adhémar et signalé plus haut.
108 Cf. NUVOLONE, 2003b, p. 140-141 et NUVOLONE, 2004, p. 315-322.
109 Cf. Helgaud de Fleury, Vita Roberti Regis Francorum, (éds) R. H. Bautier et G. Labory, Paris, 1965, p. 60-62 : Inter cetera, de se letus et hilaris ita in R littera lusit : “Scandit ab R Girbertus in R, post papa vigens R”, hoc aperte demonstrans quod hii tres episcopatus honores, quos professione regularis vit patris Benedicti monachus factus suscepit, rexit et tenuit, huius R litter signo in capite sunt declarati. Cet élément, défini illud eius monosticum, est aussi rapporté par Sigebert de Gembloux dans ses Chronica, (éd.) L. C. Bethmann, (MGH SS 6), Hannover, 1844, p. 353 et se retrouve aussi introduit par Gerbertus ille, de quo dictum est… chez Bennon déjà cité, avec la variante du verbe du début (ibid., p. 376). Un dicton autobiographique apparemment transmis d’une façon autonome et dégagé à l’origine de tout contexte magique ou démoniaque.
110 Voir les conclusions synthétisées par FAUVARQUE, 2005, p. 265-281.
111 Hugues de Flavigny, Chronicon Virdunense seu Flaviniacense, (éd.) G. H. Pertz (MGH SS 8), Hannover, 1848, p. 367. Noter le fait que l’écrivain tout en connaissant et exploitant Richer, glose et incrine l’image de Gerbert. Fruit d’une herméneutique historique négative qui s’était imposée et qu’il fallait rendre plausible ou évidente.
112 C’est le cas de plusieurs éléments des connaissances scientifiques de Gerbert. Outre le cas des chiffres indiens, voir encore l’exposé de D. JUSTE déjà cité et VOGEL, 1985, LINDGREN, 1976 et 1991, KUNITZSCH, 1997, ZUCCATO, 2005a, ZUCCATO, 2005b, ZUCCATO, 2005c, NUVOLONE, 2005e.
113 Nous ne sommes pas entrés ici dans le mérite de l’autoconscience que Gerbert avait de sa personne et de sa fonction, voir à ce sujet par ex. « Qui est Gerbert ? », dans RICHÉ, 1987, p. 239-255 ; J.-P. CALLU, « Les mots de Gerbert », dans CHARBONNEL-IUNG, 1997, p. 152-167 ; Ph. DUPUY, « L’âme de Gerbert », dans Gerbert Moine, 2000, p. 117-137 ; NUVOLONE, 2005c.
114 RICHÉ, 1987, p. 255.
115 Aussi au terme de cet article de synthèse, dont nous sommes particulièrement redevables aux collègues et amis du SICMA d’Aix-en-Provence, Huguette Taviani-Carozzi et Claude Carozzi, ainsi qu’aux relectures de Heinrich Marti et Katiuscia Nuvolone, nous répétons ce que nous avons déjà affirmé ailleurs : la solution que nous avons élaborée pour le Carmen de Gerbert – que nous n’avons pas cherchée, mais qui s'est graduellement imposée à nos recherches comme plausible et logique –, reste, en raison de la considérable complexité de la matière, un chantier ouvert, toujours perfectible et donc nécessitant échanges, suggestions, compléments et corrections.
116 Pour une bibliographie gerbertienne plus complète, mais portant aussi sur les thèmes apparentés ou s’intersécant avec personnage et sujets politiques et aspects littéraires, voir nos articles NUVOLONE, 1985 ; NUVOLONE, 2001a, p. 640-657 ; NUVOLONE, 2003b, p. 219-260 ; NUVOLONE, 2004, p. 326-345 ; NUVOLONE, 2005c, p. 214-237 et NUVOLONE, 2005d, p. 356-372. Pour un aperçu global voir RICHÉ, 1999b.
Auteur
Université de Fribourg, Suisse
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