L’architecture religieuse dans l’Occident de l’An Mil : rupture ou continuité ?
p. 71-104
Texte intégral
1Il n’est, en tête de ce réexamen, guère possible de faire l’économie de la fameuse déclaration de Raoul Glaber : « à l’approche de la troisième année suivant [le millénaire de la naissance du Christ], sur presque toute la surface de la terre, et surtout en Italie et dans les Gaules, on vit se rénover les bâtiments des églises ; la plupart, en bon état, n’en avaient nul besoin, mais tous les peuples chrétiens rivalisaient entre eux à qui posséderait le plus beau. C’était comme si le monde se secouait, pour rejeter la vieillesse, et revêtait partout une blanche robe d’églises. Alors presque toutes les églises des sièges épiscopaux, et toutes celles des monastères consacrés à divers saints, furent embellies par les fidèles »1. Nous n’avons évidemment pas à nous attarder ici sur ce qui, dans une perspective eschatologique globale, incitait le moine clunisien à présenter de telle sorte le panorama monumental de son temps2. Notre attention se focalisant sur la réalité architecturale elle-même, il faut en revanche préciser dans quelle exacte mesure ces propos peuvent être, sinon rejetés, du moins assez fortement nuancés.
2Notons d’emblée que Raoul ne manque pas de poser certaines bornes : outre l’aveu implicite de ce qu’une majorité des anciens sanctuaires se trouvaient toujours aptes au bon déroulement des offices, il insiste en effet sur l’importance des reconstructions en deux pays. Cela correspond vraisemblablement à l’aire pour laquelle on disposait d’informations dans les centres monastiques où se déroula la vie de Raoul (soit à Auxerre, Dijon, Cluny, ainsi que, secondairement, à Champeaux et à Réôme). Il n’empêche que l’historiographie moderne a réétendu le champ du phénomène ; cela avec notamment les propositions de J. Puig i Cadafalch dans l’Entre-Deux-Guerres : la Catalogne s’est vue alors durablement érigée en l’un des principaux foyers du « premier art roman » qui, considéré issu d’Italie du Nord, développait également ses ramifications jusqu’en Bourgogne et en Rhénanie ainsi qu’au littoral dalmate3. Nous reviendrons d’ailleurs, plus loin, sur le problème de cette délimitation. Mais rappelons dès à présent que l’essor architectural n’est pas moindre dans des contrées apparemment plus extérieures à l’horizon de Raoul : ainsi pour le reste du monde germanique, et pour le milieu anglo-saxon. C’est donc bien au total – et comme on le conçoit aujourd’hui le plus couramment – l’ensemble de l’Occident chrétien qu’il faut prendre en compte.
3La première opération qui s’impose revient à esquisser un bilan quantitatif ; les décennies voisines de l’An Mil – soit en élargissant cette phase de 970/80 à 1030/40, suivant les points de vue actuels –, ont-elles connu une vague de constructions d’importance exceptionnelle ? Il ne saurait naturellement être question de se livrer à un décompte exhaustif : indépendamment même de l’ampleur de l’entreprise, la relative incertitude dans laquelle on se trouve pour la datation de bien des églises secondaires ne permettrait pas d’y parvenir. On peut, néanmoins, se satisfaire sans doute du constat dressable à partir de certains sanctuaires de rang éminent, dont l’implantation ou la réédification semble a priori avoir conféré une physionomie sensiblement différente au paysage bâti.
4Raoul ne mentionne nommément, pour les Gaules, que l’exemple de Saint-Martin de Tours, reconstruit « en une merveilleuse architecture » par l’archiclave Hervé ; il est désormais malheureusement difficile d’en juger, les quelques vestiges dégagés lors des fouilles ne fournissant pas de donnée chronologique décisive pour la grande église détruite pendant la Révolution4. En revanche, c’est bien dans les décennies qui nous occupent que, pour des composantes substantielles au moins de leur parti général, s’inscrivent des réalisations majeures que nous regrouperons ci-après par unités géographiques. En Normandie, Saint-Pierre puis Notre-Dame de Jumièges, ainsi que Notre-Dame de Bernay, ou la cathédrale de Rouen5 ; en Angleterre, l’Old et le New Minster à Winchester6 ; en France « moyenne », Saint-Germain-des-Prés à Paris, la cathédrale et Saint-Père à Chartres, la cathédrale et Saint-Aignan à Orléans, ou Fleury/Saint-Benoît-sur-Loire7 ; en Bourgogne, l’abbatiale Cluny-II, Saint-Bénigne de Dijon, Saint-Philibert de Tournus, ou les cathédrales de Mâcon et d’Auxerre8 ; en Palatinat-Rhénanie, Saint-Pantaléon de Cologne, la cathédrale de Mayence, ou l’abbatiale de Limbourg-sur-la-Haardt9 ; en Saxe, Saint-Michel de Hildesheim10 ; sur le lac de Constance, Reichenau-Mittelzell11 ; en Catalogne, Saint-Michel de Cuxa, Sainte-Marie de Ripoll, Saint-Martin du Canigou, Saint-Père de Roda ou Saint-Vincent de Cardona12 en Italie du Nord, Saint-Pierre et Sainte-Marie d’Acqui, les cathédrales de Bobbio, d’Aoste et d’Ivrée…13 Nous interromprons là cette liste plutôt fastidieuse : insistons bien sur le fait qu’il ne s’agit que de mentionner quelques-uns des monuments les plus immédiatement évocateurs de la richesse de la phase en question.
5Mais on doit aussitôt porter les yeux vers la période immédiatement antérieure : car c’est, en effet, par l’issue d’une phase de stagnation que se vérifierait en premier lieu la réalité d’un « renouveau » au tournant du millénaire. Or, à cet égard, la reconstruction ultérieure de nombreux édifices ne doit pas faire oublier leur établissement premier en des temps plus obscurs ; nous mentionnerons, ci-après, plusieurs églises de la fin du IXe et du Xe siècle qui subsistent encore en certaines régions ; et même pour un milieu comme la France, où ces témoignages concrets font aujourd’hui cruellement défaut, l’enquête dans les textes peut amener à prendre connaissance d’une activité édilitaire plus soutenue qu’on ne l’aurait cru14. Mais sinon, il reste que les opinions actuelles divergent assez nettement ; cela en partie dans la mesure, d’ailleurs, où les historiens de l’art ont parfois calqué leurs vues sur les évolutions politiques en très sensibles décalages qu’avaient connus alors leurs pays respectifs. Ainsi en France, et en coïncidence évidemment non fortuite avec l’amorce d’un redressement lié à l’affirmation de la dynastie capétienne, Henri Focillon a ardemment défendu l’idée d’un véritable réveil monumental à l’orée du XIe siècle15. Tenant davantage compte de certaines réalisations de l’architecture germanique dès la seconde moitié du Xe siècle, Louis Grodecki a ensuite tendu à remonter aux environs de 950 les débuts de la résurgence16 ; mais c’est bien encore de résurgence qu’il s’agit, puisque l’auteur la place après « l’une des plus graves crises qu’ait subi le monde occidental, pendant la seconde moitié du IXe siècle et la première du Xe […], la grande coupure du siècle de 900 ». Plus près de nous, et sans méconnaître la richesse des acquis hauts-médiévaux auxquels il devait consacrer un volume entier17, Marcel Durliat a cependant lui aussi présenté l’entrée dans la période romane comme « un véritable renouveau », traduit artistiquement par « l’émergence d’un style »18. Enfin, en ramenant le propos au cadre évidemment plus resserré du royaume franc et de ses marges, Eliane Vergnolle perçoit aussi une mutation décisive : « premiers frémissements », « préfiguration », pour la génération des édifices des années 980-1020, amenant une « pleine affirmation du style roman » dans le second quart du XIe siècle, en certaines régions du moins19.
6L’érudition germanique a quant à elle privilégié une tout autre vision. Des contingences historiques postérieures n’y sont pas non plus étrangères ; il s’agit essentiellement de l’ancrage du Saint-Empire dans la glorieuse lignée de Charlemagne. Quant à la présentation des réalités monumentales, en tout cas, cela a conduit à minimiser un éventuel hiatus entre les créations des époques carolingienne et ottonienne ; on aurait ainsi affaire à un essor continûment déployé du IXe siècle au début du XIIIe siècle : soit un très long Hochmittelalter encadré par un Früh- et un Spätmittelalter. C’est somme toute encore, à certaines nuances près, la conception que respecte, pour en rester ici à un grand ouvrage de synthèse moderne, Hans Erich Kubach20.
7Telles sont donc les deux positions les plus résolument tranchées. Mais on ne saurait oublier, par ailleurs, les points de vue spécifiques exprimés sous d’autres cieux. Nous avons ainsi déjà fait référence aux travaux de José Puig i Cadafalch quant à l’extension du « premier art roman »21 ; pour l’érudit catalan, qui valorisait surtout l’adoption de nouveaux procédés ornementaux réputés « lombards », une indéniable coupure intervenait aux approches de l’An Mil à l’égard d’édifices – en nombre assez considérable, justement, dans le Nord de l’Espagne – toujours tributaires des traditions haut-médiévales ; tout récemment encore, Éduard Carbonell i Esteller a refait valoir ces idées de césure : insistant sur les effets du ferme établissement d’un pouvoir comtal soutenu par l’épiscopat et le monachisme, il place quant à lui vers 950 les débuts d’une architecture catalane de réelle envergure débouchant ensuite directement sur la phase romane22. Évoquons d’autre part les propositions auxquelles, après discussion de ce qu’avaient envisagé ses prédécesseurs, est parvenu Richard Gem pour le milieu anglo-saxon : du VIIIe siècle jusqu’à la première moitié du XIe siècle, et tout en se montrant assez réceptive aux innovations continentales carolingiennes, puis ottoniennes et du « premier roman », l’Angleterre serait pour l’essentiel demeurée fidèle à ses propres schémas antérieurs ; cela avant un basculement progressif vers les formes vraiment romanes, à partir des environs de 1050 seulement23. Pour l’Italie, il s’avère assez difficile de faire état d’un panorama comparable, car les divers spécialistes ont surtout développé leurs réflexions relativement à des cadres régionaux (voire micro-régionaux) ; on peut cependant renvoyer à la présentation plus globale dernièrement produite par Anna Segagni Malacart qui, tout en rappelant le poids des antécédents paléochrétiens et hauts-médiévaux et le rôle de la Lombardie dans l’essor de la plastique architecturale, fait la part de l’influence des foyers transalpins – de l’Empire et de la Bourgogne - dans le renouvellement survenant au XIe siècle24. Enfin, pour la Croatie, dont le faciès original a profité d’un riche passé paléochrétien pré-slave puis de la pénétration de schémas byzantins aux Xe-XIe siècles, le jeu des relations avec les autres entités de l’Occident a également suscité le plus vif intérêt ; Tomislav Marasovic et Miljenko Jurkovic ont ainsi souligné une certaine continuité à partir de l’importation de formules carolingiennes et de leur évolution du IXe au XIe siècle25 ; mais le second nommé, plus particulièrement, s’est par ailleurs attaché à mettre en évidence une nouvelle impulsion dans la première moitié du XIe siècle, en relation alors avec une expansion bénédictine depuis l’Italie26.
8Après ce rapide exposé des visions particulières, peut-on dégager une sorte de « résultante » en revenant aux réalités monumentales elles-mêmes ? La tentative n’est sans doute pas déplacée puisque, bien que les spécialistes aient à peu près unanimement reconnu que les schémas et leur évolution différaient sensiblement d’un milieu à l’autre, ils ont bien tous admis aussi que l’on quittait – plus ou moins tard, et plus ou moins brusquement – une phase pour entrer dans une autre (cela valant également pour l’érudition allemande d’ailleurs, puisque, tout en privilégiant l’idée de la continuité, H.E. Kubach distingue tout de même encore un « pré-roman » d’un « premier roman »). Nous reprendrons le parcours en raisonnant cette fois d’après les principales composantes du parti de l’édifice.
9Le problème du massif occidental, sous ses divers aspects, s’offre en premier lieu. Là, consécutivement à une genèse dans le Nord du royaume franc vers la fin du IXe siècle (Centula/Saint-Riquier27) avec une formule complexe – vaste plate-forme à l’étage, elle-même surmontée par des galeries de trois côtés, et articulation extérieure avec tour maîtresse encadrée de deux tourelles (fig. 1) – on envisage volontiers une tendance à la simplification vers la fin du Xe ou dans la première moitié du XIe siècle : soit l’évidement du volume interne par élimination de la grande plate-forme et maintien des seules galeries latérales (comme à Saint-Pantaléon de Cologne28) (fig. 2) ; soit le système des « galilées » bourguignonnes (comme Saint-Philibert de Tournus29) (fig. 3) maintenant l’extension en façade et sur plusieurs travées ouest-est, mais faisant l’économie des galeries au-dessus de la tribune ; soit le type du clocher-porche (Notre-Dame d’Hastière en pays mosan, par exemple30) (fig. 4), avec également réduction à deux niveaux mais largeur et profondeur alors bien moindres ; soit encore certains partis intermédiaires (notamment Fleury/Saint-Benoît-sur-Loire31) où, avec vaste tribune unique, on conserve à la tour – sans tourelles adjacentes32 – un important développement (fig. 5). En fait, cette transition d’une forme « complexe » à telle ou telle forme « simple » n’est pas si évidente. Prenons ainsi le cas du Westwerk de Saint-Sauveur de Werden, consacré en 943 mais probablement bâti dès la fin du IXe siècle : il présente déjà la disposition des galeries en U autour d’un volume évidé, comme à Cologne un siècle plus tard33 Quant à la formule volontiers réputée tardive du clocher-porche à deux niveaux et de largeur réduite par rapport au corps principal, elle se trouve déjà attestée vers 800 à la chapelle palatine d’Aix34 (fig. 6). Ajoutons qu’à l’inverse, certains édifices du début du XIe siècle (Saint-Germain-des-Prés à Paris, Saint-Père à Chartres35) (fig. 7) sont pourvus de clochers-porches gardant une réelle complexité, avec subdivision interne en plusieurs étages ; et à Notre-Dame de Jumièges également, une galerie surmonte encore, à l’Ouest du moins, la tribune principale36 (fig. 8). On ne doit d’ailleurs pas non plus manquer d’évoquer les solutions contraires que présentaient les cathédrales de Reims et de Metz : dès 976, on supprimait l’arcuatum opus – très certainement la vaste tribune principale – de la première37, tandis que la superposition de galeries de chantres à une première tribune devait être maintenue jusqu’au XIe siècle dans la seconde38. Quant à la silhouette extérieure, et tandis que certains édifices de l’Ouest de la France privilégient assez vite le développement des tours latérales au détriment de celle dans l’axe (Saint-Pierre et Notre-Dame de Jumièges39) (fig. 9), C. Heitz a justement souligné la fidélité de monuments alsaciens du milieu du XIIe siècle (Marmoutier, Lautenbach, Sainte-Foy de Sélestat) (fig. 10) au parti du triturrium carolingien de Saint-Riquier40. Enfin, l’atrophie de la structure dans le sens ouest-est, parfois considérée comme acquise à la pleine époque romane, n’est pas aussi uniforme : renvoyons à l’exemple de l’abbatiale de Saint-Denis où, vers 1140, Suger fait encore ériger un massif avec triple chapelle à l’étage couvrant non moins de deux travées sur les trois vaisseau41 (fig.11).
10À peine est-il besoin de revenir, par ailleurs, sur la longue permanence du système des contre-absides, autre accentuation possible du pôle occidental de l’église. Les modèles des premières décennies du IXe siècle (Fulda, plan de Saint-Gall42) (fig. 12) ont une descendance bien avérée dans la première moitié du XIe siècle (Sainte-Marie de Reichenau-Mittelzell, Saint-Michel de Hildesheim, cathédrale de Trèves43) (fig. 13). Cela se poursuivra jusqu’au XIIe et même au XIIIe siècle, avec notamment les cathédrales de Worms et de Mayence44.
11L’examen des chevets donne lieu à des témoignages de perdurance du même ordre. Plusieurs traits sont ici également à prendre en compte. D’abord, la surélévation du chœur au-dessus d’une crypte, dispositif des plus courants aux XIe-XIIe siècles. Mais on peut remonter sans hésitation au IXe siècle pour assister à son développement déjà notable : ainsi avec ce dont fait état le Liber pontificalis pour un réaménagement opéré à Sainte-Marie-du-Transtévère de Rome sous Grégoire IV45 ; et l’abbatiale de Fulda ou le plan de Saint-Gall montrent que ce parti était également mis à profit en milieu germanique46. D’autre part, et sans atteindre encore ce qui sera de règle dans les grandes cathédrales ou collégiales gothiques, un relatif allongement marque aussi le chœur de beaucoup d’églises romanes ; il s’y accompagne d’absidioles latérales en retrait par rapport à l’abside médiane (et avec échelonnement progressif de ces absidioles, lorsqu’elles sont en nombre supérieur à deux). L’abbatiale Cluny-II puis celles de Déols en Berry et Bernay en Normandie, ainsi que la priorale bourguignonne de Perrecy-les-Forges (fig. 14), passent pour avoir innové à cet égard, dans la seconde moitié du Xe siècle ou juste après l’An Mil47. Mais dès avant 819 semble-t-il, le chevet initial de Saint-Philbert de Grandlieu offre quelque chose de ce type48 (fig. 15) ; et, vers le milieu ou le troisième quart du IXe siècle, les témoignages bourguignons de Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Pothières ( ?), Saint-Germain d’Auxerre et Saint-Pierre de Flavigny offrent d’autres jalons de cette formule avec, à nouveau, un longue travée droite cantonnée d’absidioles latérales de bien moindre avancée vers l’Est49 (fig. 16). Ce sont là, manifestement, des dérivations d’un schéma mis au point au monastère d’Inden (près d’Aix-la-Chapelle), dont l’église avait été consacrée en 81750 (fig. 17). On sait que dans les cas d’Auxerre et de Flavigny cependant, le système se compliquait par l’interposition entre absidioles et chœur, de chaque côté de ce dernier, d’un couloir de circulation à deux niveaux contournant l’abside pour aller desservir une vaste chapelle axiale. Mais précisément, nous en venons avec cela à l’origine des circulations périphériques qui constituent un autre aspect majeur des chevets romans. Parmi les monuments conservés, Saint-Philibert de Tournus au début du XIe siècle est volontiers considéré comme une étape décisive entre les expériences carolingiennes et le « classique » déambulatoire roman à chapelles rayonnantes51 (fig. 18) ; on n’a pourtant pas manqué de relever à Tournus quelques traits encore étroitement tributaires du modèle auxerrois (ainsi le corps central à trois vaisseaux de la crypte)52. Mais il nous semble que l’inventaire des analogies peut être sensiblement étoffé : comme Auxerre (ou Flavigny), Tournus adopte le parti d’une circulation à deux niveaux autour du chœur et de l’abside ; et si, à Tournus, les chapelles desservies ont une configuration et une distribution plus homogène et régulière, on n’en avait pas moins déjà adopté le principe – avec évidemment forte prévalence de la rotonde axiale par rapport aux oratoires latéraux – dans les deux édifices du IXe siècle. En outre, plusieurs autres témoignages sont invocables afin d’établir que la formule demeurait bien à l’ordre du jour dans la phase immédiatement post-carolingienne : on renvoie souvent, naturellement, à la cathédrale de Clermont-Ferrand pour le milieu du Xe siècle53 ; de fort peu postérieure sans doute, Saint-Étienne de Vérone est également considérée comme engageant dans les mêmes voies54 ; mais n’oublions pas non plus, dans le Nord de la France, la cathédrale de Thérouanne, dont les fouilles ont révélé un véritable déambulatoire à trois chapelles saillantes en disposition rayonnante caractérisée, éventuellement attribuable au premier quart du Xe siècle55 (fig. 19).
12L’émergence– supposée– du déambulatoire à chapelles rayonnantes au XIe siècle a également joué sous un autre angle dans l’idée d’instauration d’une esthétique architecturale nouvelle ; cela dans la mesure où l’association de ce système à une tour surmontant la croisée du transept (ou du moins à l’articulation nef-chœur, en l’absence de transept56) entraînait un effet d’étagement particulièrement harmonieux des volumes au chevet. Là aussi, pourtant, la formule semble plus qu’en gestation aux siècles antérieurs. Revenons ainsi aux exemples de Saint-Germain d’Auxerre et de Saint-Pierre de Flavigny pour le IXe siècle. On raisonne habituellement à partir de ce qui est encore conservé, c’est-à-dire le niveau bas des structures ; mais la restitution de ces chevets dans leur élévation intégrale n’exclurait pas – et amènerait même éventuellement à préférer – un parti suivant lequel la toiture des couloirs de circulation périphérique viendrait s’appuyer aux parois d’un chœur et d’une abside de hauteur plus importante57 (fig. 20) : de la sorte, l’étagement des masses se trouverait bien d’ores et déjà induit. Pour Auxerre et Flavigny, on ignore évidemment si l’effet en question était à l’origine renforcé par une tour de croisée au surplomb de l’ensemble. Mais on peut d’autant moins en écarter l’éventualité que des tours de ce genre n’étaient pas inconnues, à très haute époque : sans même s’attarder à de possibles antécédents plus lointains58, le dessin de Centula/Saint-Riquier nous confirme cette réalité pour l’extrême fin du VIIIe siècle59. Et Saint-Michel de Hildesheim60, au tout début du XIe siècle en offre un reflet direct (fig. 21) ; là, d’ailleurs, la présence d’un déambulatoire autour du chevet occidental dominé par la tour-lanterne la plus proche engendre absolument une composition « pyramidante ».
13Après la combinaison des volumes aux deux extrémités de l’édifice, reconsidérons ce qu’il advient pour la partie intermédiaire, c’est-à-dire la nef. Là, le « progrès » communément envisagé pour l’entrée dans l’âge roman consiste en l’essor de la plastique des murs et supports, ainsi qu’en la généralisation des voûtements. Les deux aspects sont il est vrai assez étroitement liés, dans la mesure où une configuration plus ou moins complexe des piles (jusqu’au développement cruciforme, avec pilastres ou dosserets associés à des demi-colonnes engagées) répond souvent à l’articulation du couvrement (arêtes, ou doubleaux scandantun berceau à intervalles réguliers). À cet égard non plus – et sans contester que l’évolution générale s’effectue bien dans ce sens –, les décennies proches de l’An Mil ne constituent pas un tournant aussi décisif. Rappelons d’une part les expériences de la première moitié du IXe siècle dans la salle haute du Naranco, tout près d’Oviedo61 ; certes, les doubleaux n’y retombent pas directement sur les supports sous-jacents, comme la « logique » romane l’exigera plus tard ; d’où le caractère réputé imparfait, ici, de la subdivision du volume principal en travées. En revanche, cette « logique » s’avère d’ores et déjà sans défaut dans le portique méridional, vraisemblablement non postérieur au début du Xe siècle, de Saint-Sauveur de Valdedios également en Asturies62 (fig. 22). En outre, le corps principal de cette église est intégralement voûté ; il en va de même pour d’autres sanctuaires du Xe siècle dans le Nord de la Péninsule ibérique – ainsi Sainte-Marie de Lebena en Cantabrie, Saint-Jacques de Penalba en Leon (fig. 23), ou Saint-Julien de Boada vers Gérone63 –, qui nous mènent donc sans hiatus majeur aux plus amples réalisations des décennies 1000/1040. Parallèlement, à l’autre versant de la chrétienté latine méridionale, la Croatie offre toute une série d’églises couvrant la période du IXe au début du XIe siècle, elles aussi intégralement voûtées, et caractérisées par des murs latéraux à forts pilastres aux retombées des doubleaux : ainsi Saint-André de Vrgada (à vaisseau unique) ou Sainte-Cécile de Biskupija (à trois vaisseaux, et piles de plan cruciforme) (fig. 24), qui semblent parmi les plus précoces64 ; dans cette région également, donc, une indéniable continuité se vérifie jusqu’aux édifices plus tardifs qui, comme par exemple Saint-Pierre d’Omis vers le milieu du XIe siècle, incorporent en outre une coupole au centre de la nef65. En contrepartie de ces considérations sur les voûtements, il ne faut d’ailleurs pas oublier que de très nombreux édifices du XIe et même du XIIe siècle restent fidèles au couvrement en charpente de tradition paléochrétienne et haut-médiévale : c’est notamment le cas en Italie (contentons-nous d’évoquer ici des exemples aussi fameux que Saint-Donat de Murano près de Venise, ou la cathédrale de Pise66), mais encore dans une région aussi volontiers perçue comme foyer d’art roman que la Normandie (avec entre autres les grandes nefs de Notre-Dame de Jumièges ou de Saint-Georges de Boscherville67) ; dans ce milieu d’ailleurs, comme dans tout le Nord de la France, on tendra à passer directement du couvrement charpenté à la voûte d’ogives lors de l’avènement du « gothique ».
14Dans un tout autre registre – celui de la structure même –, on a aussi souvent signalé le recours à une maçonnerie de petits moëllons irréguliers noyés dans un abondant mortier comme caractéristique du « premier art roman méridional ». Mais aujourd’hui, les observations plus attentives révèlent que le « petit appareil » en question se présente sous de très nombreuses variantes : cela dans l’insertion (ou non) de galets parmi les pierres éclatées au marteau, dans l’éventuelle disposition de plusieurs assises en « arête de poisson » (opus spicatum), ou dans la masse plus ou moins importante du mortier de liaison…68 En fait, il s’agit de la même diversité de matériaux et de mise en œuvre qu’il était d’usage aux temps haut-médiévaux, et qui se maintiendra parfois beaucoup plus tard en certaines régions : ainsi en Brabant, le parement externe de la nef de Saint-Martin-Sainte-Adèle d’Orp-le-Grand s’avère encore très fruste (fig. 25), bien que l’on ne puisse guère en envisager la datation avant 110069. D’ailleurs, cet exemple septentrional nous amène en outre à minimiser l’importance de la délimitation du « premier art roman » telle que l’avait maintenue, notamment, L. Grodecki70 ; et l’examen de la structure de grands monuments germaniques – comme l’abbatiale de Limbourg-sur-la-Haardt71, dont le parement est aujourd’hui bien à nu – nous induit à la même relativisation ; mais nous reviendrons encore là-dessus un peu plus loin… Bien entendu, les premières décennies du XIe siècle voient incontestablement se manifester une nouvelle prédilection pour la construction en pierre de taille de moyen appareil : c’est ce que l’on constate notamment pour la tour-porche de l’abbé Gauzlin à Fleury/Saint-Benoît-sur-Loire, ou pour la crypte – seule conservée – de la cathédrale de l’évêque Hugues de Chalon à Auxerre (pour laquelle les sources textuelles insistent même sur une mise en œuvre ex quadris lapidibus)72. Mais si l’évolution en ce sens s’amorce donc bien dès cette période, les attestations n’en sont pas encore – loin s’en faut – majoritaires.
15L’animation extérieure de la paroi au moyen de niches (surtout sous les corniches sommitales des chevets), ou de petites arcatures jumelles (parfois multipliées en frise, dites « bandes lombardes ») retombant sur des pilastres, sont également retenues comme de véritables signatures du « premier art roman méridional » ; d’abord exclusivement observables dans le domaine de celui-ci aux environs de l’An Mil, elles se seraient ensuite – au second quart du XIe siècle – diffusées plus largement. Mais distinguons bien, ici, les deux procédés en question. Quant aux niches, elles pourraient bien être d’assez haute origine : en tout cas, la proposition émise par C. Bertelli pour Saint-Ambroise de Milan dès le IXe siècle (fig. 26) – possible adoption d’un système élaboré aux fins d’alléger les parties hautes de l’abside à Sainte-Irène de Constantinople lors de sa reconstruction du VIIIe siècle – mérite du moins toute l’attention73. Quant au système des arcatures jumelles et « bandes lombardes » associées aux pilastres, que l’on considère dériver de ce que montraient dès le Ve siècle les monuments d’Italie du Nord – on évoque d’ordinaire Saint-Simplicien de Milan ou le soi-disant « mausolée de Galla Placidia » à Ravenne –, l’application ancienne en était manifestement beaucoup plus répandue : rappelons que c’est ce que montrent à l’heure actuelle encore en pays mosellan les murs de la basilique civile romaine de Trèves, puis en Croatie ceux de Saint-Martin de Pridraga pour le VIe siècle (fig. 27), et dans la Péninsule ibérique ceux de Saint-Fructueux de Montelios (près de Braga) pour le VIIe siècle74. En 1007, en Lombardie, l’abside de Saint-Vincent de Galliano/Cantù n’innove guère par rapport à ce schéma initial75. Il n’en va pas autrement, toujours en ces années, à la façade occidentale de Sainte-Marie de Torcello en Vénétie ; en revanche, le pignon oriental de la nef du même édifice adopte la subdivision de chaque arc en deux arcatures jumelles : c’en serait peut-être l’attestation datée la plus ancienne, si l’on doit bien rapporter cela aux modifications opérées à partir de 1008 à l’initiative du doge Pietro II Orseolo76 ; mais même dans l’affirmative, il ne serait pas exclu que cette partie ait été réalisée plutôt vers la fin de la campagne : soit dans la seconde – voire troisième ? – décennie du siècle… En ce cas, nous ne disposerions pas de témoignage indiscutable de l’introduction de cette formule en Italie pour les environs les plus immédiats de l’An Mil. Certes, nous jouons ici sur une « fourchette » chronologique extrêmement resserrée ; cela n’est pourtant pas indifférent, car il faudrait alors envisager une émergence simultanée de ce type de décor en Italie du Nord, en Catalogne, en Bourgogne, sans doute aussi en Croatie, et peut-être même encore dans l’Empire (puisqu’on l’observe également à l’abbatiale de Limbourg-sur-la-Haardt, en chantier dès 1025 et fort avancée dix ans plus tard). Ce serait là, pour rebondir sur ce que nous annoncions plus haut, un autre facteur de relativisation du démarquage entre « art roman méridional » et architecture ottonienne-salienne.
16Avec ces remarques sur un système ornemental qui, dans cette formulation précise, peut effectivement apparaître comme un véritable idiome, il faut bien au demeurant admettre que nous avons affaire à un procédé nouveau. L’irruption assez généralisée de ce décor correspond-elle alors à une mutation essentielle, propre en elle-même à induire le passage à un autre art de bâtir ? Tout en ménageant la part d’autres aspects (notamment les recherches sur le voûtement, et la diversité des solutions dans les différents milieux), J. Puig i Cadafalch en avait assez résolument défendu l’idée. Après lui cependant, les spécialistes les plus convaincus de la réalité d’une transition ont plutôt reporté l’accent sur ce qui touchait aux articulations majeures des volumes, et aux caractères vraiment structurels de l’édifice. Mais c’est à cet égard, justement, que nous avons voulu souligner qu’il n’y avait aucune rupture avec le Haut Moyen Âge – les partis en question y ayant déjà dépassé le stade embryonnaire, bien plus qu’on ne veut souvent l’admettre. Nous n’entendons pas contester, cependant, que l’architecture chrétienne des environs de 1100 ait évolué par rapport à celle des temps carolingiens. Mais pas plus que celle-ci, elle n’offre de faciès homogène à l’échelle de l’Occident ; et les « avancées » qu’elle a successivement opérées – si tant est que cette notion de « progrès » ait droit de cité en histoire de l’art ! – se situent dans la très longue durée : nous ne nous sommes d’ailleurs attaché ici qu’aux jalons des IXe-Xe siècles, mais il serait parfaitement possible de remonter à l’époque paléochrétienne, aujourd’hui heureusement moins méconnue et beaucoup plus créatrice qu’on ne le concevait…77 Insérons d’autre part une considération sur la sculpture monumentale, dont le lien avec l’architecture est évidemment des plus étroits, et qui passe aussi pour connaître un réveil au début du XIe siècle dans de grands monuments du Val de Loire ou de Bourgogne ; là aussi, pourtant, la floraison se déploie de façon assez mesurée (en relation logique avec l’essor de la pierre taillée, dont nous avons rappelé que seules les prémices relevaient des lendemains de l’An Mil) : et les programmes de chapiteaux ou de portails n’atteindront leur apogée qu’entre les alentours de 1100 et le milieu du XIIe siècle.
17Certes, tout demeure question d’appréciation. Nous sommes personnellement assez réservé quant à cette notion de « style roman », que d’éminents spécialistes continuent pour leur part à avaliser. Du moins, en ramenant délibérément l’attention sur des témoignages plus épars – ou souvent perçus de manière approximative parce que très détruits –, avons-nous voulu réaffirmer la profondeur de ses racines. Et si l’écriture la plus actuelle de l’histoire de cette période peut, à bon droit sans doute, remettre en cause la réalité d’un bouleversement78, qu’il nous soit donc permis de postuler qu’en termes d’art monumental aussi, l’An Mil ne correspondit pas tant au renouveau que le suggérait le moine Raoul.
Notes de bas de page
1 RAOUL GLABER, Histoires, III, 13-14. Pour une traduction française de l’ensemble de l’œuvre, cf. notamment E. POGNON, L’an mille, Paris, 1947, p. 39-144.
2 Cf. en dernier lieu les considérations développées, avec citation de cet extrait et de plusieurs autres, dans l’ouvrage de C. CAROZZI et H. TAVIANI-CAROZZI, La fin des temps. Terreurs et prophéties au Moyen Âge, 2e éd., Paris, 1999, p. 44-74 et 165-176.
3 J. PUIG I CADAFALCH, Le premier art roman. L’architecture en Catalogne et dans l’Occident méditerranéen aux Xe et XIe siècle, Paris, 1928 ; Id., La geografia i els origens del primer art romànic, Barcelone, 1930 (et traduction française, Paris, 1935).
4 Cf. les récentes remarques d’E. VERGNOLLE, L’art roman en France. Architecture, sculpture, peinture, Paris, 1994, p. 158-159 et n. 165, p. 358-359. Pour cet édifice, comme pour tous ceux qui seront mentionnés ci-après, nous limitons les renvois aux incontournables monographies et/ou aux études de synthèse les plus à jour ; on y trouvera naturellement la bibliographie antérieure.
5 M. BAYLE (dir.), L’architecture normande au Moyen Âge, 2, Les étapes de la création, Caen, 1997, p. 14-15, 27-36, et bibliographie p. 349-351 ; E. VERGNOLLE, op. cit., p. 55, 69-70, 81, 86, 93-94.
6 R. GEM, L’architecture pré-romane et romane en Angleterre. Problèmes d’origine et de chronologie, dans Bulletin monumental, 142-III, 1984, p. 246 ; Id., La façade préromane en Angleterre, dans La façade romane. Actes du colloque de Poitiers, 1990 ( = Cahiers de civilisation médiévale, XXXIV-3/4), 1991, p. 324-325.
7 E. VERGNOLLE, op. cit., p. 60, 68, 71, 72, 88-90, 108.
8 Ibid., p. 56-62, 78-81, 90-92.
9 D. von WINTERFELD, Palatinat roman, La Pierre-qui-vire, 1993, p. 121-148, 209-217. Aussi, F. OSWALD, L. SCHAEFER et H. R. SENNHAUSER, Vorromanische Kirchenbauten. Katalog der Denkmäler bis zum Ausgang der Ottonen, 3 vol. , Munich, 1968-71, p. 151-153, 191-193, 414, puis W. JACOBSEN, L. SCHAEFER et H. R. SENNHAUSER (avec la collab. De M. EXNER, J. MERTENS et H. STOEPKER), Nachtragsband, Munich, 1991, p. 261-262, 224-227.
10 W. WULF, Saxe romane, La Pierre-qui-vire, 1996, p. 279-287 (et bibliographie p. 36-39, passim). Aussi, Vorromanische Kirchenbauten, p. 119-121, et Nachtragsband, p. 183-184.
11 Vorromanische Kirchenbauten, p. 278-282, et Nachtragsband, p. 342-343.
12 E. VERGNOLLE, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 4), p. 53-55, 58, 62, 71-73, ainsi que notamment M. DURLIAT, La Catalogne et le « premier art roman », dans Bulletin monumental, 147-III, 1989, p. 209-238, passim.
13 A. SEGAGNI MALACART, Incidenze transalpine nell’architettura padana della prima metà del secolo XI, dans Hortus Artium Medievalium, 3, 1997, p. 141-147, passim.
14 Cf. notamment les précieuses observations de M. Th. CAMUS, Sculpture romane du Poitou. Les grands chantiers du XIe siècle, Paris, p. 36-38.
15 Cf. surtout, indépendamment de l’essai de publication posthume sur L’An Mil, Paris, 1952, la grande synthèse d’H. FOCILLON, Art d’Occident. Le Moyen Âge roman et gothique, Paris, 1938, p. 13-54.
16 L. GRODECKI, [F. MÜTHERICH, J. TARALON, F. WORMALD], Le siècle de l’An Mil, Paris, 1973, particulièrement les considérations de la préface p. IX-XII.
17 M. DURLIAT, Des Barbares à l’An Mil, Paris, 1985 ; mais cf. aussi déjà sa déclaration dans L’art roman, Paris, 1982, p. 55 : « …l’art roman représente, par rapport à ce qui l’a précédé, non pas une rupture, mais une continuité et même un achèvement : le couronnement d’un processus engagé depuis l’époque paléochrétienne ».
18 Id., L’art roman, p. 37 et 51-66.
19 E. VERGNOLLE, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 4), p. 49-52. Et, pour une présentation détaillée de cette historiographie « nationale », cf. M. DURLIAT, Réflexions sur l’art roman en France, dans Cahiers de civilisation médiévale, 39, 1996, p. 41-65.
20 H. E. KUBACH, Architettura romanica, Milan, 1973, pour la publication initiale en italien ; versions allemande et française, respectivement Stuttgart-Milan, 1974, et Paris, 1981. Notons d’ailleurs au passage que l’érudition anglo-américaine avait adopté un découpage analogue : cf. l’ouvrage de K. J. CONANT, Carolingian and Romanesque Architecture. 800 to 1200, Harmondsworth, 1959.
21 Cf. ci-dessus, n. 3.
22 E. CARBONELL I ESTELLER, La arquitectura religiosa en la Cataluna del siglo IX al X, dans J. CAMPS (dir.), Cataluna en la época carolingia. Arte y cultura antes del romanico, catalogue d’exposition, Barcelone (Museu Nacional d’Art de Catalunya), 1999-2000, p. 207-213.
23 R. GEM, L’architecture pré-romane… (cf. ci-dessus, n. 6), p. 233-272.
24 A. SEGAGNI MALACART, cf. ci-dessus, n. 13.
25 Cf. notamment M. JURKOVIC, L’Église et l’État au IXe siècle - Le problème du massif occidental carolingien, dans Hortus Artium Medievalium, 3, 1997, p. 23-39, et la dernière synthèse de T. MARASOVIC, L’architecture préromane, dans I. Supicic (dir.), La Croatie et l’Europe, I, Trésors de la Croatie ancienne des origines à la fin du XIIe siècle, Zagreb-Paris, 1999, p. 445-472.
26 M. JURKOVIC, Pojava romanicke arhitekture u Hrvatskoj, dans M. JURKOVIC et T. LUKSIC (dir.), Radanje prvog hrvatskog kulturnog pejzaza, Zagreb, 1996, p. 325-338 (avec bref résumé anglais).
27 C. HEITZ, L’architecture religieuse carolingienne. Les formes et leurs fonctions, Paris, 1980, p. 51-62.
28 Vorromanische Kirchenbauten (cit. ci-dessus n. 9), p. 151-153, et Nachtragsband, p. 224-227.
29 J. HENRIET, Saint-Philibert de Tournus. L’œuvre du second maître : la galilée et la nef, dans Bulletin monumental, 150-II, 1992, p. 101-164.
30 X. BARRAL I ALTET, Belgique romane, La Pierre-qui-vire, p. 331-334.
31 E. VERGNOLLE, Saint-Benoït-sur-Loire et la sculpture du XIe siècle, Paris, 1985, p. 5-199.
32 Les escaliers d’accès à la tribune se trouvent incorporés dans l’épaisseur de la maçonnerie aux angles (suivant un procédé également appliqué dans certains clochers-porches, d’ailleurs).
33 C. HEITZ, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 27), p. 142-145. Aussi, Vorromanische Kirchenbauten (cf. ci-dessus, n. 9), p. 368-371, et Nachtragsband, p. 453-454.
34 C. HEITZ, op. cit., p. 64-79. Aussi, Vorromanische Kirchenbauten, p. 14-18, et Nachtragsband, p. 15-16. Le fait que le corps principal soit ici à plan centré - et non longitudinal - ne change rien à cette constatation.
35 Notices de E. YVERNAT et de J. OTTAWAY dans X. BARRAL I ALTET (dir.), Le paysage monumental de la France autour de l’An Mil, Paris, 1987, respectivement p. 374-376 et 273.
36 M. BAYLE, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 5), p. 32-36 (et bibliogr. p. 350-351).
37 Cf. notamment la notice de P. DEMOUY dans X. BARRAL I ALTET (dir.), op. cit., p. 305-307.
38 F. HÉBER-SUFFRIN, Dossier sur la cathédrale de Metz aux Xe et XIe siècle, dans C. HEITZ et F. HÉBER-SUFFRIN, (éd.), Églises de Metz dans le Haut Moyen Âge ( =Université de Paris X-Nanterre. Centre de recherches sur l’Antiquité tardive et le Haut Moyen Âge, cahier n° IV), 1982, p. 17-18.
39 M. BAYLE, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 5), p. 14-15, 32-36 (et biblogr. p. 349, 350-351).
40 C. HEITZ, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 27), p. 62.
41 S. MCKNIGHT CROSBY et P. Z. BLUM, The Royal Abbey of Saint-Denis from its Beginnings to the Death of Suger, 475-1151, Yale, 1987, p. 174-175.
42 C. HEITZ, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 27), p. 99-117. Cf. aussi W. JACOBSEN, Der Klosterplan von St. Gallen und die karolingische Architektur, Berlin, 1992, passim.
43 Vorromanische Kirchenbauten (cf. ci-dessus, n. 9), p. 119-121, 278-282, et Nachtragsband, p. 183-184, 342-343 (Hildesheim et Reichenau-Mittelzell) ; pour Trèves, cf. notamment la récente étude de F. RONIG, Was der Liber ordinarius des Trierer Domes über die Einbeziehung der Kunstwerke in die Liturgie aussagt, dans F. KOHLSCHEIN et P. WÜNSCHE (éd.), Heiliger Raum. Architektur, Kunst und Liturgie in mittelalterlichen Kathedralen und Stiftskirchen, Münster, 1998, p. 100-116.
44 D. von WINTERFELD, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 9), p. 121-205.
45 Cf. R. KRAUTHEIMER, S. CORBETT, R. FRANKL, Corpus Basilicarum Christianarum Romae, III, Rome, 1971, p. 65-71 (dont p. 66 pour mention de la source textuelle en question).
46 Cf. ci-dessus, n. 42.
47 E. VERGNOLLE, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 4), p. 55-56.
48 C. HEITZ, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 27), p. 161-165.
49 Chr. SAPIN, La Bourgogne préromane, Paris, 1986, p. 41-60, 81-112, 118-121.
50 C. HEITZ, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 27)., p. 131-133.
51 J. HENRIET, Saint-Philibert de Tournus. Histoire – Critique d’authenticité – Étude archéologique du chevet (1009-1019), dans Bulletin monumental, 148-III, 1990, p. 229-316.
52 E. VERGNOLLE, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 4)., p. 56-59.
53 Ibid., p. 60.
54 Cf. notamment M. DURLIAT, Des Barbares à l’An Mil (cf. ci-dessus, n. 17), p. 520.
55 C. HEITZ, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 27), p. 184-186.
56 Cas, par exemple, de Saint-Martin de Chapaize ; cf. en dernier lieu, pour la datation de cette tour au second quart du XIe siècle par analyse dendrochronologique de ses éléments ligneux, Chr. SAPIN (dir.), Les prémices de l’art roman en Bourgogne, catalogue d’exposition, Auxerre, 1999, p. 92.
57 Ce que suggère parfaitement, d’ailleurs, le schéma récemment publié dans l’ouvrage coordonné par Chr. SAPIN (note précédente), p. 65, et reproduit ici.
58 Cf. N. DUVAL, L’architecture culturelle, dans Naissance des arts chrétiens (ouvrage collectif), Paris, 1991, p. 204, avec mention des diverses sources textuelles. On renverra d’ailleurs aussi à l’éloquent témoignage, toujours visible, du chevet de Saint-Vital de Ravenne en date du VIe siècle.
59 Cf. ci-dessus, n. 27.
60 Vorromanische Kirchenbauten (cf. ci-dessus, n. 9), p. 119-121, et Nachtragsband, p. 183-184.
61 A. ARBEITER et S. NOACK-HALEY, Hispania antiqua. Die christlichen Denkmäler des frühen Mittelalters vom 8. bis ins 11. Jahrhundert, Mayence, 1999, p. 158-163.
62 Ibid., p. 192-201. Ce trait a d’ailleurs été reconnu par M. DURLIAT lui-même, Des Barbares à l’An Mil (cf. ci-dessus, n. 17), p. 500.
63 A. ARBEITER et S. NOACK-HALEY, op. cit., p. 295-300, 307-313, 402-403.
64 Cf. ci-dessus, n. 25.
65 P. VEZIC, Elementi di architettura bizantina nelle costruzioni alto medievali di Zara, dans Hortus Artium Medievalium, 4, 1998, p. 55-70 (et particulièrement p. 66-68 pour l’église ici en question).
66 G. BRUCHER, Die sakrale Baukunst Italiens im 11. und 12. Jahrhundert, Cologne, 1987, p. 89-90 et 129-142.
67 M. BAYLE, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 5), p. 32-36, 126-129 (et bibliogr. p. 350-351, 356-357).
68 Cf. notamment E. VERGNOLLE, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 4), p. 74-75.
69 Cela pour l’aspect déjà plus élaboré du décor mural ; cf. X. BARRAL I ALTET, op.cit. (cf. ci-dessus, n. 30), p. 123-126.
70 Rappelons que l’« inventeur » de cette notion de « premier art roman », J. PUIG I CADAFALCH, en envisageait volontiers l’extension en milieu rhénan. Pour L. GRODECKI (op. cit. ci-dessus n. 16, p. 5-6), qui ne méconnaissait pas pour autant certaines interpénétrations des courants, le milieu germanique correspondait malgré tout en bloc à un autre monde ; c’est le point de vue qui a le plus largement primé.
71 D. von WINTERFELD, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 9), p. 209-217.
72 E. VERGNOLLE, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 4), p. 78-80 et 88-90, ainsi que p. 75 pour quelques autres antécédents.
73 C. BERTELLI, Sant’Ambrogio da Angilbert II a Gotofredo, dans C. BERTELLI (dir.), Il millenio ambrosiano, II, La città del vescovo dai Carolingi al Barbarossa, Milan, 1988, p. 16. Relevons d’ailleurs que J. PUIG I CADAFALCH n’avait pas non plus manqué de songer à des modèles haut-médiévaux de l’Orient méditerranéen ou de Grèce.
74 Respectivement, cf. K. P. GOETHERT, Die Basilika, dans Trier. Führer zu vor- und frühgeschichtlichen Denkmälern (ouvrage collectif), I, Mayence, 1977, p. 141-153 ; P. CHEVALIER, Salona II. Ecclesiae Dalmatiae, I, Rome-Split, 1995, I, p. 91-93 ; H. SCHLUNK et Th. HAUSCHILD, Hispania antiqua. Die Denkmäler der frühchristlichen und westgotishen Zeit, Mayence, 1978, p. 209-211 (avec dans ce dernier cas une alternance d’arcs en plein cintre et d’arcs en mitre, mais procédant bien toujours du même principe).
75 Cf. notamment S. CHIERICI, Lombardie romane, La Pierre-qui-vire, 1978, p. 269-293 (et bibliographie p. 58) ; G. BRUCHER, op. cit. (cf. ci-dessus, n. 66), p. 24-27.
76 Cf. notamment G. BRUCHER, op. cit., p. 19-22 ; G. SUITNER NICOLINI, Vénétie romane, La Pierre-qui-vire, 1991, p. 67-71 (et bibliographie p. 39-41, passim).
77 Cf., dans cette perspective, notre article Le mythe du renouveau architectural roman, dans Cahiers de civilisation médiévale, 43, oct.-déc. 2000, p. 341-369.
78 Cf. D. BARTHÉLEMY, La mutation de l’An Mil a-t-elle eu lieu ? Servage et chevalerie dans la France des Xe et XIe siècles, Paris, 1997.
Auteur
Université de Paris X – Nanterre
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