La réciprocité de l’échange matrimonial : enjeux économiques et politiques (Venise, XVe-XVIIe siècles)
p. 99-115
Texte intégral
Introduction
1En critiquant la théorie de Claude Lévi-Strauss sur l’échange comme fondement unique de la société, Maurice Godelier insiste sur le fait que « au-delà de la sphère des échanges, existent d’autres domaines, une autre sphère constituée de tout ce que les humains s’imaginent devoir soustraire à l’échange, à la réciprocité, à la rivalité, devoir conserver, préserver, voire enrichir », et affirme que « la société humaine a tiré son existence de deux sources, l’échange, le contrat, d’une part, le non contractuel, la transmission, de l’autre »1. Godelier ajoute que « la place du don ne peut être définie que si l’on prend une vue plus précise des rapports qui existent entre la sphère des choses sacrées qu’on n’échange pas et celle des objets précieux ou des monnaies qui entrent dans les échanges de dons ou les échanges marchands »2. Il existe en même temps interdépendance et autonomie relative entre la sphère de l’aliénable et celle de l’inaliénable, mais aussi une limite infranchissable entre ce qui peut être objet de don (et de contre-don) et ce qui, au contraire, doit être préservé pour être transmis. Transmettre signifie aussi donner, mais selon des modalités différentes de celles qui règlent la sphère de ce qui peut être échangé. En situant notre problématique dans le cadre des études d’histoire de la famille à l’époque moderne, nous pourrions remplacer le mot « société » par le mot « famille », le mot « échange » par « contrat matrimonial » et le mot « transmission » par « transfert de biens d’une génération à l’autre, organisé par les normes successorales et les pratiques testamentaires ». Dans les familles, la sphère des « choses » qu’on n’échange pas ne concerne pas le domaine du sacré, mais plutôt le domaine du lignage : ce sont les biens lignagers qui sont soustraits aux mécanismes de l’échange.
2Les biens lignagers sont les biens destinés à la descendance masculine, alors que les femmes, en quittant leur nom et leur maison d’origine, sortent du lignage et les biens immeubles qui caractérisent l’identité lignagère (les palais de famille) ne leur sont pas destinés. Ces règles de dévolution des héritages définissent les sociétés des villes italiennes d’Ancien Régime comme « lignagères », car « les biens garantissant l’aisance et la stabilité sociale sont transmis de manière privilégiée, sinon exclusive, par les hommes »3. Mais, « à la différence des sociétés lignagères africaines, les sociétés européennes, même lignagères, n’excluent jamais tout à fait les femmes des mécanismes dévolutifs »4. Cette distinction nous renvoie au débat sur la « diverging devolution », c’est-à-dire, selon la formule de l’anthropologue Jack Goody, la bilatéralité de la succession qui assure aux garçons comme aux filles une part de l’héritage des parents5. En réalité, le fait que dans les systèmes lignagers européens les femmes soient dotées ne veut pas dire qu’elles reçoivent des biens de la même qualité et quantité que les hommes, au contraire.
3Selon la typologie décrite pour la Grèce ancienne, le sexe détermine une exclusion absolue de la maison, qui revient toujours à des mâles issus de mariage légitime, alors que les filles sont dotées et vont « jouer les mères dans d’autres maisons de la cité »6. En revanche, à Athènes, comme à Venise, les relations patrimoniales entre les frères, par rapport aux biens du père, sont totalement égalitaires : « masculinité, légitimité et égalité fraternelle sont des principes absolus »7. Notons que cette égalité entre frères légitimes est le fondement de la structure républicaine de la cité grecque, comme elle l’est de la république aristocratique de Venise.
Succession et dot en droit vénitien
4En droit vénitien aussi, toute l’organisation de la succession est fondée sur le principe que les biens immeubles se transmettent par voie masculine8 : quand il s’agit de l’héritage paternel, les fils héritent à égalité des immeubles et les filles des meubles, et les filles déjà mariées, et donc dotées, ne reçoivent plus d’héritage de leurs pères. Toutefois, une fille qui considère que sa dot n’est pas « convenable » a la possibilité de demander un complément, à prendre sur les biens immeubles du père. En revanche, le partage des biens, meubles et immeubles, de la mère est totalement égalitaire, entre tous les fils et toutes les filles, célibataires, mariées, ou veuves. En faisant circuler les immeubles entre les femmes, les Statuts de 1242 admettent à l’évidence la possibilité que des femmes en possèdent, alors qu’on vient de montrer que les normes de ces mêmes Statuts sur la transmission des héritages paternels tendent à exclure cette éventualité. En réalité, à Venise les femmes ont plus de droits à recevoir et à transmettre des héritages que dans beaucoup d’autres villes italiennes. Par exemple, selon les Statuts de Gênes, Florence, Pise, Sienne, Arezzo, les filles sont exclues de la succession maternelle au profit de leurs frères ou de leurs descendants, sans qu’il ne soit fait aucune obligation à la mère de contribuer à leurs dots. À Arezzo, Pistoia et Florence, les filles sont en plus exclues de la succession de leurs grand-mères et arrière-grand-mères9.
5Dans le cas de Venise, on peut parler de bilatéralité du système successoral : une « bilatéralité imparfaite », comme je l’ai définie ailleurs10, mais réelle. Par exemple, le fait qu’une fille déjà dotée puisse rentrer dans la succession du père si la dot ne provient pas des biens paternels, ou, encore, le fait que la fille qui juge sa dot insuffisante puisse en exiger un complément, sont des corrections importantes au système de l’« exclusio propter dotem ». Même la distinction entre meubles et immeubles doit être questionnée, car à Venise, comme dans d’autres traditions juridiques, certains biens apparemment immobiliers (terres et édifices) peuvent être considérés des biens meubles et vice-versa. D’autre part, dans une économie marchande, telle celle de Venise à l’époque de la promulgation des Statuts, admettre les femmes à la succession des biens meubles signifie les admettre à la succession des biens les plus importants.
6Dans les sociétés marquées par le droit romain, l’épouse reçoit, au moment du mariage, une dot qui représente sa part de l’héritage paternel, alors que l’époux reçoit l’héritage du père à la mort de ce dernier. Des donations « inter vivos », des participations aux revenus : il peut y avoir évidemment plusieurs formules pour échapper à cette attente et recevoir son héritage, ou une partie de celui-ci, du vivant du père11. En revanche, il est certain que l’héritage que la fille peut espérer recevoir de son père lui parvient sous forme de dot, promise au moment du mariage et, normalement, payée dans les années qui le suivent.
7Il y a donc, en principe, un décalage temporel dans l’accès des deux époux à l’héritage paternel12, mais à Venise, au XVIe siècle, dans environ la moitié des mariages, le père de l’époux est déjà mort au moment des noces et dans environ un tiers des cas le père de l’épouse l’est aussi13. À Venise aussi, comme dans d’autres régions d’Europe à la même époque14, le mariage ne se réalise que quand les questions d’héritage sont déjà réglées aussi bien pour les hommes que pour les femmes. On peut y voir simplement de banales raisons démographiques, mais on peut aussi rappeler que, selon le modèle dit « de Hajnal », le mariage retardé, pour attendre l’héritage des parents, est l’une des caractéristiques du système familial d’Europe occidentale15.
8La dot, propriété de la femme, est payée au mari, qui en a la gestion et l’usufruit ; en revanche, pendant toute la durée du mariage, la femme ne peut pas y toucher, mais, en droit vénitien, elle peut la léguer. La femme est considérée comme la première créancière hypothécaire du mari, dès son établissement dans sa maison. Non seulement la famille du mari est obligée de rendre la dot à la veuve, mais le mari qui vend des biens dotaux doit aussi faire un dépôt équivalent à l’État et, dès le moment du mariage, des biens, généralement immobiliers, de la famille du mari sont hypothéqués à garantie de sa restitution.
9Le premier paradoxe du système est qu’il s’agit d’un bien dont la « proprietas » passe du père à la fille, sans que cette dernière en ait jamais la « possessio », qui est transférée au mari. Mais c’est en même temps un bien qui doit revenir en possession de sa propriétaire, car, tout en étant « donné », il reste toujours la propriété du donateur, suivant un modèle qui s’apparente à celui du « keeping while giving » formulé par Annette Weiner16. Toutefois, à la différence des biens « lignagers », les biens des femmes ne sont pas inaliénables, puisqu’il suffit de « rendre » à la propriétaire des biens équivalents à ceux qu’elle avait « donnés ». On a donc des biens qui changent de possesseurs sans changer de propriétaire et qui, ensuite, sont en principe rendus, sous une forme qui peut être identique, ou équivalente, mais aussi augmentée, si le contrat de mariage prévoit le versement d’une « contredot » du mari à la femme, en cas de veuvage, mais qui peut aussi être diminuée d’un « tiers », selon les normes somptuaires vénitiennes.
10Il faut alors introduire, également pour l’héritage féminin, la dimension temps. La récupération de l’héritage paternel n’est pas subordonnée, pour les filles mariées, à la mort du père, mais à celle du mari. Il est évident que si le fait de survivre à ses parents fait partie de l’ordre du probable, survivre à son mari rentre seulement dans l’ordre du possible. L’âge des époux joue alors un rôle fondamental. Au XVe siècle, dans son traité sur le mariage, Francesco Barbaro incite les jeunes patriciens à choisir des épouses à peine pubères, afin de les éduquer et de façonner leur caractère selon leurs bons désirs. En réalité, au début du XVe siècle, les garçons se mariaient vers vingt-six, vingt-sept ans et, à la fin du siècle, vers trente-trois, trente-quatre. Pour les filles, faute de données, il faut s’en remettre aux souhaits, voire aux consignes, exprimés dans les testaments des parents. Une grande variété d’âges au mariage pour les filles est prévue par les testaments patriciens, allant de douze à vingt ans, mais, au début du XVe siècle, la plupart s’arrêtent à quatorze ans, alors que, vers la fin du siècle, on remarque la tendance à reculer le mariage des filles, vers leurs dix-huit ans17. Dans les testaments des marchands du XVIe siècle, il est souvent prévu que les garçons restent à la maison, « sous leur mère » jusqu’à vingt-cinq, voire trente ans, et que les filles ne soient pas mariées avant l’âge de dix-sept ou dix-huit ans18. À la même époque, les garçons vénitiens sortent de leur période d’apprentissage entre dix-neuf et vingt ans et les filles entre seize et vingt-et-un ans19. Le statut d’apprenti étant, par définition, incompatible avec une vie de famille20, l’âge à la fin de l’apprentissage est à considérer aussi comme l’âge à partir duquel il devient envisageable, pour des jeunes gens, de s’établir à leur propre compte et de fonder une famille. Par rapport aux autres groupes sociaux, il semble donc que les âges au mariage des artisans soient plus élevés pour les filles et moins élevés pour les garçons. En conclusion, puisqu’il semble bien que l’écart d’âge entre mari et femme soit strictement lié au groupe social, on peut dire que plus la dot est importante, plus cet écart est élevé et plus il y a de chances qu’il y ait, tôt ou tard, une veuve à rembourser.
Des biens qui circulent
11Les Statuts spécifient que, pour la restitution de la dot à la veuve, il faut choisir les « propriétés attenantes et les plus utiles », et qu’il faut commencer par les biens de foris. En fait, si la dot, en tant que « part patrimoniale des enfants mis en circulation »21 est presque inévitablement composée de biens meubles, elle est souvent rendue en biens immeubles, du moins à Venise. Il s’agit des biens, appartenant à la famille du mari, sur lesquels elle avait été « assurée ». Si l’on assume que la dot implique la circulation des biens, on peut trouver normal que l’on fasse circuler les « meubles » (mobiles). En réalité, la définition de ce qui était « meuble » ou « immeuble » est objet de débat parmi les juristes à l’époque moderne et, au XVIIIe siècle, il est certain que les biens immobiliers, quand ils sont en dehors de Venise, sont considérés des biens meubles22.
12Cette évolution, à vrai dire assez paradoxale, qui fait des terres ou des maisons en « Terre ferme » des biens meubles et des maisons bâties sur les eaux de la lagune, des biens immobiliers, se réalise dans le contexte des débats sur la restitution de la dot à la veuve. On peut supposer qu’il s’agit de répondre à des conflits d’interprétation qui trouveraient leur origine dans les Statuts qui, tout en déclarant que les immeubles étaient destinés aux fils et les meubles aux filles, prévoyaient de rendre aux veuves, en remboursement de leurs dots, des propriétés « utiles et attenantes » en commençant par les biens « de foris ».
13Selon une glose du XIVe siècle aux Statuts, les biens « de foris » sont ceux « in quibus vir vel socer non habitat ». Si on s’en tient à une traduction littérale de la phrase, la veuve n’a pas le droit de chasser son beau-père et, dans les cas où la femme décède avant son mari, sa famille n’a pas le droit de chasser le veuf de la maison « dans laquelle il habite », c’est-à-dire, en fait, les immeubles qui ne rentrent pas directement dans la ligne de succession masculine, les biens lignagers.
14On peut voir, dans cette hiérarchie des biens, qui n’est d’ailleurs pas propre à Venise, un exemple de ces biens qui sont, en principe, exclus des circuits d’échange et de réciprocité et que l’auteur de l’Essai sur le don avait volontairement écartés de son analyse, en précisant que « nous parlons surtout des meubles », car la « propriété foncière […], intransmissible, liée à la famille, au clan, à la tribu, beaucoup plus qu’à l’individu, ne peut pas sortir de la famille pour être cédée à un étranger »23. En droit normand, l’ambiguïté de la définition des biens meubles et immeubles ne réside pas dans leur emplacement, mais dans le fait qu’il s’agit, ou pas, de biens appartenant au lignage du mari : si elle est considérée comme un bien lignager, même une somme d’argent devient « immeuble »24. Les biens lignagers revêtent donc un caractère quasi-sacré.
15Comme on l’a vu, dans la transmission ab intestat des biens immeubles du père, les Statuts privilégient les fils, mais, dans le cas présent, il ne s’agit plus de transmission intra-familiale, mais de transmission des biens de la belle-famille à la veuve du fils. Puisque la dot, payée préférablement en argent et meubles, est assurée sur des biens immeubles, la réciprocité du système fait qu’un paiement en meubles soit rendu en immeubles.
16La question est de savoir de quels « immeubles » il s’agit. En étudiant la circulation des biens immobiliers entre les familles patriciennes aux XVIIe et XVIIIe siècles, Jean-François Chauvard est arrivé à la conclusion que les biens « dont l’ancrage est faible au sein du patrimoine – biens des femmes, biens achetés ou périphériques » sont utilisés pour payer les dots, alors que « ce sont les biens lignagers qui sont le plus souvent convoqués pour rembourser la veuve, parce qu’ils ne sont pas irrémédiablement perdus pour la famille du mari. Dès lors que le couple a engendré une descendance, les biens cédés à la mère ont toute chance de réintégrer, après sa mort, le lignage du mari »25. L’héritage du père (la dot) devient alors l’héritage du mari (les biens lignagers utilisés pour sa restitution), les biens féminins deviennent des biens lignagers. Toutefois, une veuve qui demande sa dot doit quitter la maison du mari et a probablement l’intention de se remarier : comment la famille du défunt mari peut-elle être certaine que les biens lui reviendront ?
17Stanley Chojnacki, à partir de l’étude des sentences de restitution de dots à des veuves patriciennes aux XIVe et XVe siècles, constate que
« in nearly 3/5 ot the claims involving dead wives, the husbands also were deceased. In an indeterminate but undoubtedly large number of those cases, the widow had chosen not to claim her dowry but instead to live in her late husband’s house »26.
18Ces veuves patriciennes qui, aux XIVe et XVe siècles, ne demandent pas la restitution de leurs dots, ne représentent en fait aucun danger pour le patrimoine lignager, mais quand une veuve demande la restitution de sa dot elle n’a plus le droit de vivre dans la maison de son mari. Elle va probablement se remarier, ce qui comporte des risques encore majeurs de dispersion du patrimoine qu’elle récupère de sa belle-famille. S’il y a des filles, la question de la dot se pose à nouveau et, puisqu’il y a transmission préférentielle des biens de la mère à la fille, ces biens lignagers éventuellement reçus par la veuve du fils risquent d’être « remis en circulation » pour la dot de la fille.
19Une veuve qui demande à la famille de son mari la restitution de sa dot doit suivre une procédure complexe, expliquée par les Statuts27. Dans un délai d’un an et un jour après la mort du mari, les veuves ou leurs représentants peuvent manifester leur intention de lancer la procédure en présentant aux Juges du Proprio son contrat de mariage ou des témoins qui confirment le montant de sa dot. Une fois cette démarche effectuée, la veuve doit encore prouver que la dot, ou des biens équivalents, sont en possession du mari. Elle dispose alors de trente ans pour le faire28. Ce n’est qu’après avoir reçu cette preuve que les Juges rendent une sentence. Toutefois, si la veuve déclare ne pas avoir été au courant de la procédure, ou, comme le dit une glose aux Statuts, si la femme est décédée avant et que ce sont ses héritiers qui font la démarche, le délai d’un an et un jour peut aussi être dépassé. Donc, en fait, la procédure pouvait s’étaler sur des décennies et engager les héritiers du mari et de la femme encore longtemps après leur décès29.
20Une fois qu’elle avait reçu sa sentence, la veuve ne recevait plus rien des biens du mari, mais pouvait encore vivre dans sa maison, jusqu’à restitution complète de la dot30. On comprend que cette norme pouvait déjà poser quelques problèmes à des femmes n’ayant pas de biens propres et, peut-être, en décourager plus d’une. En 1343, une correction aux Statuts précise que si, à la mort du mari, ses héritiers payent à la veuve sa dot et sa robe de deuil, sans qu’elle ait eu à en demander la restitution aux Juges, elle doit quitter la maison du mari dans les deux mois. Si elle refuse, les Juges peuvent l’y obliger31 : en fait, une femme qui vient de perdre son mari peut aussi être chassée de sa maison sous l’œil bienveillant de la République. Plusieurs autres normes du XVIe et du XVIIe siècle introduisent des contrôles plus stricts sur la veuve et ses prétentions, des peines pour celles qui « occultent » des biens du mari au moment d’en faire l’inventaire32, l’ordre à suivre dans la restitution des biens33 et les droits des créanciers du mari défunt34.
21L’examen des actes des Juges du Proprio35 permet de conclure qu’au XVIe siècle, dans les trois-quarts des cas environ, ce sont les veuves qui demandent restitution de leur dot, dans l’année qui suit le décès du mari. Il est tout à fait exceptionnel que ce délai soit dépassé mais si cela arrive c’est toujours par « ignorance de la loi »36. Dans 15 % des cas, le dossier est présenté par les enfants, parfois représentés par un tuteur s’ils sont mineurs et, dans 10 % des cas, il s’agit d’autres parents (frères, sœurs, nièces, neveux ou petits-enfants).
22En 1592-93, les patriciens sont environ 15 % du total (25 sur 153) mais il faut penser qu’ils ne représentent que 2 à 3 % environ de la population vénitienne. Ils sont donc surreprésentés dans cette source et, dans la moitié des cas (13 sur 25), c’est la veuve qui présente sa demande. Ces sources viennent confirmer l’existence d’un problème spécifique au patriciat relativement à la restitution de la dot, pour les raisons déjà évoquées : plus grande différence d’âge entre mari et femme ainsi que, bien évidemment, l’intérêt de récupérer un patrimoine parfois très important. La différence d’âge a aussi comme conséquence que les veuves soient encore en âge de se remarier, ce qui explique pourquoi elles demandent leur dot à la famille du mari.
23Cette source nous montre, donc, des veuves de tous les groupes sociaux prendre en main leur destin et celui de leurs enfants, pour fournir la preuve de leur droit à la restitution de la dot. Par exemple, en 1553, à propos de la dot de Faustina, veuve de Domenico de Alberi, une voisine déclare : « Je ne connais pas la valeur de sa dot, mais tout le monde disait qu’elle avait une belle dot et de très belles robes : une robe en soie écarlate, avec des manches roses en taffetas, et d’autres de toutes sortes ». Une autre affirme : « Quand elle s’est mariée, j’étais chez ma marraine mais, à mon retour, je me suis installée chez elle pour apprendre à tisser et j’ai vu toutes les choses magnifiques qu’elle avait reçues en dot. Un beau lit, des robes, des draps de lin et d’autres choses qui coûtaient beaucoup d’argent, mais je ne saurais pas dire combien, car je ne m’y connais pas assez »37. Dans le cas de Marieta Da Balao, veuve d’un pêcheur, deux témoins présentent deux inventaires presque identiques du trousseau, contenant des robes et des fourrures et aussi « une ceinture en argent, car c’était la mode à l’époque », sans en donner l’évaluation. Les deux femmes appelées à témoigner vivaient comme apprenties chez la mère du mari, où elles avaient vu arriver et s’installer la jeune épouse, quarante ans auparavant38.
24En 1592-93, sur un total de 153 actes, dans la quasi-totalité des cas la dot est composée uniquement de meubles, au sens actuel du terme, c’est-à-dire le trousseau, toujours présent et généralement évalué, et de l’argent. Meubles par définition, les dots, on l’a dit, peuvent être « assurées » sur des immeubles et les Statuts, en contemplant cette éventualité, en définissent la nature et la qualité. L’analyse d’autres séries de registres de cette même source permet de vérifier la théorie dans la pratique39. Il s’agit de l’étape ultérieure de la procédure : une fois que la sentence avait été émise, il fallait détailler les biens à transférer à la veuve ou à ses héritiers.
25Les registres contiennent la description et l’évaluation des biens à rendre, selon leur qualité. Dans les registres Minutarum, se trouvent essentiellement des immeubles urbains, mais aussi quelques terres ou maisons à la campagne, dont la majorité se trouve dans les registres De foris. Les inventaires, très intéressants, contenus dans la série Mobili, ne sont pas des inventaires dotaux, mais des inventaires des biens appartenant au mari et qui doivent servir à rembourser sa veuve de sa dot. Dans l’année 1592, environ 55 000 ducats en immeubles dans Venise, 22 000 ducats en objets et 95 000 ducats en immeubles en dehors de Venise sont transférés à des veuves ou, dans une minorité de cas, à leurs héritiers40. La même année, les dots dont on avait demandé la restitution s’élevaient à 222 300 ducats, dont 4 915 en immeubles dans Venise et 9 680 en immeubles en dehors de la ville41. La proportion des meubles et des immeubles entre les dots déclarées et les dots rendues est donc de un à dix environ.
26Les raisons de cette disparité sont à chercher dans l’obligation d’assurer la dot reçue et il est évident qu’un bien immobilier constitue l’assurance la plus sûre et la plus durable. Si, pour les familles les plus riches, on peut reconstruire des stratégies patrimoniales dans le choix des immeubles transmis aux veuves, dans la plupart des autres cas, le bien immobilier n’est très probablement rien d’autre que ce que les Juges ont trouvé de plus sûr et plus apte à assurer la survie de la veuve. Il faut néanmoins insister sur ce décalage temporel dans la possibilité des femmes d’accéder à l’héritage, ainsi que sur ce jeu de rôles qui fait que l’héritage du père devient en fait l’héritage du mari.
Les enjeux politiques de la réciprocité
27Le décalage temporel entre mari et femme dans l’accès à l’héritage paternel, qui est le fondement du régime dotal, détermine également des circuits de réciprocité entre les familles des époux qui s’étalent dans le temps et parfois sur plusieurs générations. À l’intérieur d’une élite politique fermée, comme le patriciat de Venise, la bonne gestion de ces circuits peut être un élément d’équilibre et une des clés de la stabilité pluriséculaire du système. Une stricte réciprocité dans le régime matrimonial, dans les mécanismes de l’alliance est en fait une composante essentielle du bon fonctionnement interne d’une élite42 : c’est ainsi, du moins, qu’on peut interpréter la législation sur le mariage et la dot, élaborée, dans le droit vénitien, à partir des Statuts médiévaux et jusqu’aux lois somptuaires de l’époque moderne. De ce point de vue, on peut y voir aussi une différence nette avec d’autres villes italiennes et notamment avec Florence, où les normes sur l’héritage de la dot, depuis les Statuts de 1325, prévoyant que celle-ci soit héritée par le veuf, créent des tensions entre les lignages car, en cas de mort de la femme, il n’y a aucun système de compensation de la perte économique subie par sa famille d’origine. Par ailleurs, la restitution de la dot à la veuve est prévue à Florence aussi, comme dans la plupart des villes de l’époque, mais dans la pratique une série d’obstacles compliquent le processus (par exemple, en imposant des délais tellement brefs qu’ils étaient impossibles à respecter) provoquant ainsi des conflits à n’en plus finir43. Le système vénitien est beaucoup plus attentif à créer des compensations et des réciprocités.
28Les Statuts vénitiens du XIIIe siècle ne fixaient pas le montant maximal de la dot, qui devait simplement être « convenable à la qualité de la femme et à la quantité des biens ». Dès le XIVe siècle des normes imposent des limites aux cadeaux de mariage et aux dots, mais c’est seulement à partir du XVe siècle que l’inflation dotale paraît poser problème aux législateurs, du moins à en juger de ce qu’on peut lire dans une loi somptuaire de 1420. « Nos nobles ne peuvent plus marier leurs filles, ou bien ils dépensent toutes leurs richesses, au plus grand préjudice de leurs héritiers », ou, encore, « ils sont obligés d’emprisonner leurs filles dans les monastères en suscitant leurs justes larmes » ou bien de « les laisser célibataires à leurs risques et périls ». Pour « corriger cette corruption », la loi fixe pour les dots un montant maximum de 1 600 ducats, y compris « objets, argent, cadeaux au mari et à sa famille et tout ce qu’on peut évaluer »44. Cette loi s’adresse formellement aux « citoyens de toutes conditions », mais porte une attention particulière aux dots des nobles, en autorisant pour les populares qui épousent un patricien des dots atteignant 2 000 ducats. Lors du débat sur la loi au Grand Conseil, on proposa même de laisser complètement libres les dots des femmes populares qui voudraient épouser des membres du patriciat. L’amendement fut rejeté, parce qu’il risquait de bouleverser complètement le marché matrimonial, en rendant trop intéressantes pour les patriciens les mariages avec les filles du « peuple ». Dans les mêmes années, on essayait d’affirmer la pureté du patriciat par des lois qui en excluaient les fils d’esclaves et imposaient des contrôles plus rigoureux aux fils de domestiques. En excluant les femmes « viles », au sens latin du mot, c’est-à-dire celles qu’on pouvait acheter « bon marché », on était symboliquement en train de parcourir à grande allure le chemin qui, selon la formule de Diane Owen Hughes, avait mené « from bridewealth to dowry »45. Si la dot devenait le symbole de la respectabilité de l’épouse, qui non seulement n’était pas « achetable à bas prix », mais apportait des richesses, l’inflation des dots ne pouvait qu’en être multipliée. Bien évidemment, cet apport de richesses, ce « don », exigeait un « contre-don », en termes de prestige, de nom, d’où le fait que les patres de l’élite tolèrent que des filles du « peuple » apportent des dots (des « dons ») plus importantes à leurs fils. Mais, à l’intérieur de l’élite politique, il fallait, au contraire, que l’échange reste équilibré, en dépit des aspirations à la mobilité sociale à l’intérieur même du patriciat. Dans une élite politique fermée, mais nombreuse, comme celle de la république aristocratique de Venise, il faut en fait prendre en compte les différences de statut, richesse, pouvoir, entre celles qu’on appelait, à l’époque moderne, les « classes » du patriciat vénitien. Dans cette optique, selon Stanley Chojnacki, la loi de 1420 a été voulue par les familles qui avaient plus de poids politique parce que, depuis des générations elles avaient réussi à contrôler les élections du Doge et qu’on appelait pour cette raison « maisons ducales », dans le but de gêner les alliances entre les autres familles patriciennes, et notamment les « maisons neuves », économiquement plus puissantes, et à la recherche d’identité et de prestige, et les « maisons anciennes », les familles dont l’histoire se confondait avec l’histoire même de la ville, mais désormais en déclin économique46. Comme toute loi somptuaire, en somme, cette première loi spécifique sur l’inflation dotale s’appuie sur l’idéal d’une aurea mediocritas, qui réunirait tous les optimi cives de la Commune médiévale47.
29La loi de 1420 introduit aussi une autre innovation importante : un tiers de la dot, correspondant symboliquement au trousseau, n’avait pas à être rendu. On peut interpréter cette nouvelle norme comme une adéquation de la législation vénitienne aux normes des autres villes italiennes, où le principe du lucrum maritale s’était déjà imposé48. On peut aussi considérer qu’en fixant le pourcentage de la dot, correspondant au trousseau qui, traditionnellement, n’était pas rendu à la veuve ou à sa famille et, surtout, en imposant des règles très précises pour protéger les intérêts de la veuve, si la dot, manifeste, vel occulte, directe, vel indirecte, avait dépassé les limites autorisées, on arrivait, de fait, à limiter l’intérêt financier d’une dot élevée au temps du mariage49. Une analyse qui est confirmée par les lois du XVIe siècle.
30En 1505, le montant maximum de la dot est presque redoublé, en fixant la limite à 3 000 ducats et en laissant libres les dots des veuves et des héritières. La loi suivante, de 1535, commence par ces mots :
« L’expérience nous a montré que […] nos jeunes ne se consacrent plus aux négoces dans la ville et sur les mers, ni à aucune autre industrie louable, mais posent tout leur espoir dans des dots excessives, et si la sainte et solennelle loi sur les dots prise par ce Conseil le 4 novembre 1505 avait été bien comprise et bien exécutée par nos magistrats, on n’aurait pas vu autant de pernicieux effets et on n’aurait tant besoin de lois nouvelles. Il est à espérer que les bons patriciens à qui leur exécution sera confiée […] seront vigilants et prêts à les exécuter »50.
31Les magistrats patriciens ne semblent pas faire respecter la loi, ils tirent peut-être profit, eux aussi, des dots surdimensionnées offertes par des familles bourgeoises ou par des familles d’autres « classes » du patriciat.
32La loi de 1 535 hausse la limite à 4 000 ducats, mais fixe en même temps à 1 000 ducats le « tiers » qui ne devait pas être rendu, un chiffre qui fut confirmé par les lois suivantes qui augmentèrent les limites jusqu’à atteindre, en 1575, 6 000 ducats. La frénésie législative en la matière, qui caractérise le XVIe siècle, est le symptôme d’une situation nouvelle, et notamment de la pression sociale et économique de nouveaux riches devenus compétitifs sur le marché matrimonial. Il s’agit de ne pas rentrer dans une compétition avec des outsiders, une compétition qu’il faut situer dans le contexte de la période pendant laquelle l’accès au patriciat resta fermé. De la fin du XIVe siècle à la première moitié du XVIIe, seules les femmes pouvaient entrer, par mariage, dans l’élite et, surtout à partir de la deuxième moitié du XVIe siècle, plusieurs familles bourgeoises investirent des sommes considérables dans les dots de leurs filles pour pouvoir tisser des liens dans le patriciat51. Si la loi de 1420 faisait la différence entre les mariages entre nobles et les mariages entre nobles et populares, les lois du XVIe siècle s’adressent formellement à tous, alors que celles du XVIIe siècle parlent des nobiles nostri. En réalité, on pourrait se demander si cette précision nouvelle, apparue en 1620, n’impliquerait pas que le but est désormais de contrôler uniquement les mariages entre patriciens52.
33Les lois somptuaires sur les dots nous parlent de nobles appauvris, de jeunes filles en larmes et d’un idéal d’égalité entre membres de l’élite difficile à atteindre. Les familles patriciennes ont bâti leur respectabilité sur le montant des dots qu’elles donnaient à leurs filles, ainsi que sur la limitation des mariages des filles et des garçons et sur l’adoption de pratiques fidéicommissaires, comme l’ont montré les études de J C. Davis, de Wolker Hunecke et, plus récemment, de Jutta G. Sperling53. Le problème qui se pose alors est aussi bien celui des patriciens trop « pauvres » pour trouver des épouses dans leur groupe social, que celui des familles de riches marchands ou de nobles de Terre ferme prêtes à payer n’importe quelle somme pour faire entrer une fille dans le patriciat. Ces mêmes familles qui, aux XVIIe et XVIIIe siècles, furent en mesure de payer cent mille ducats pour acheter le titre patricien. Par ailleurs, depuis le XVe siècle, toute la législation somptuaire sur les dots est parcourue par la même crainte de la diminution des mariages. Selon les calculs de Volker Hunecke, aux XVIIe et XVIIIe siècles, parmi les patriciens les plus riches, le véritable danger n’était pas celui des mésalliances, et donc de l’exclusion du Grand Conseil des fils issus de ces mariages, mais celui d’un nombre de mariages par génération insuffisant à la survie de la famille54. Une baisse qui se vérifie, dans le patriciat vénitien comme dans la plupart des noblesses européennes, à l’époque moderne.
34Les historiens, à l’instar des contemporains, ont expliqué cette baisse des mariages par les transformations des activités économiques du patriciat qui délaisse la marchandise pour investir dans la terre. La diffusion du fidéicommis en serait une conséquence mais, pour garder les biens unis, il fallait aussi limiter les mariages des garçons comme des filles. Toutefois, en climat de contre-réforme, les filles célibataires devaient être cloîtrées au couvent. Jutta G. Sperling parle de « potlatch alla veneziana », car plutôt que de les marier à des patriciens de statut inférieur, les familles préféraient sacrifier leur fécondité en les mariant à Dieu55.
35L’inflation des dots du XVIe siècle est l’une des composantes, à la fois cause et effet, de la différenciation sociale croissante à l’intérieur même de l’élite. Il y a, d’un côté, les patriciens pauvres, qui se reproduisent en épousant même des femmes non nobles et qui, selon Hunecke, ne se soucient pas que leurs fils puissent ou ne puissent pas faire partie du Grand Conseil, les « moyens » qui, essayant de garder leur statut, sont en plein dans la contradiction décrite et enfin les « grands », qui se marient entre eux mais en interdisant à une partie de leurs filles et de leurs fils l’accès au mariage56. Le circuit d’échange et de réciprocité idéalement décrit par les Statuts et par la législation dotale doit s’adapter à l’évolution de la composition des patrimoines patriciens : il ne s’agit plus de richesses marchandes qu’il faut faire circuler, mais de biens immeubles qu’il faut conserver dans la ligne masculine.
36C’est donc au moment même où se modifie l’équilibre économique, politique et symbolique entre ce qui doit être transmis et ce qui peut être échangé, entre l’inaliénable et l’aliénable, entre biens lignagers et biens féminins, que le système de réciprocité de l’échange matrimonial, construit entre le XIIIe et le XVIe siècle, montre les signes de crise qui font écrire à Arcangela Tarabotti, nonne et écrivaine « féministe » :
« Si vous estimez que la multiplicité des filles porte préjudice à la Raison d’État (car si elles se mariaient toutes la noblesse se multiplierait et les familles s’appauvriraient à cause des dots qu’il faudrait payer), prenez plutôt les compagnes que Dieu vous donne sans faire montre d’avidité. Quitte à vous acheter des esclaves, puisque c’est ce que vous faites de vos femmes, la décence voudrait que vous payiez vous-même, plutôt que de les forcer à s’acheter un maître. Et puisque vous imitez les Thraces en faisant des sérails de femmes et autres choses barbares, vous devriez les imiter aussi en tuant les garçons dès leur naissance, pour en conserver un seul par famille. C’est un péché bien moins grave que d’enterrer les filles vivantes. Gare à vous qui, par intérêt politique, avez délaissé la justice des sentiments »57.
Notes de bas de page
1 M. Godelier, L’énigme du don, Paris, Flammarion, 1996, p. 53.
2 M. Godelier, op. cit., p. 54.
3 G. Augustins, Comment se perpétuer ? Devenir des lignées et destins des patrimoines dans les paysanneries européennes, Nanterre, Société d’ethnologie, 1989, p. 333.
4 G. Augustins, op. cit.
5 J. Goody, Famille et mariage en Eurasie, Paris, Presses Universitaires de France, 2000.
6 A. Fine, C. Leduc, « La dot, anthropologie et histoire. Cité des Athéniens, VIe-IVe siècle/Pays-de-Sault (Pyrénées Audoises), fin XVIIIe siècle-1940 », A. Groppi, G. Houbre (dir.), Femmes, dots et patrimoines, n° monographique, Clio. Histoire, femmes et sociétés, 7 (1997), p. 19-50.
7 A. Fine, C. Leduc, « La dot, anthropologie et histoire… », p. 28.
8 Pour les normes des Statuts sur la succession « ab intestat », cf. Novissimum Statutorum ac Venetarum Legum Volumen, Venise, ex typographia Ducali Pinelliana, 1729, surtout le Livre IV. Sur les origines de ces normes, cf. O. Diliberto, « Successione legittima, diritto romano », Enciclopedia del diritto, vol. XLV, Milan, Giuffré, 1992, p. 1296 -1317 ; A. Padovani, « Successione legittima, diritto intermedio », op. cit., p. 1317-1322.
9 I. Chabot, « Richesses des femmes et parenté dans l’Italie de la Renaissance. Une relecture », I. Chabot, J. Hayez, D. Lett (dir.), La famille, les femmes et le quotidien (XIVe -XVIIIe siècle). Textes offerts à Christiane Klapisch-Zuber, Paris, Publications de la Sorbonne, 2006, p. 263-290. Voir aussi Ead., « Notes sur le système successoral florentin (XIVe/XVe-XVIIIe siècles) », A. Groppi, G. Houbre (dir.), Femmes, dots et patrimoines, op. cit., p. 51-72 ; R. Ago, « Universel/particulier : femmes et droits de propriété (Rome, XVIIe siècle) », op. cit., p. 101-116 ; Ead., « Ruoli familiari e statuto giuridico », Quaderni Storici, 88, 1 (1995), p. 111-133.
10 A. Bellavitis, Identité, mariage, mobilité sociale. Citoyennes et citoyens à Venise au XVIe siècle, Rome, Collection de l’École Française de Rome, 282, 2001, p. 152-154.
11 Cf. L. Bonfield, « La distribuzione dei beni tra gli eredi negli atti di successione matrimoniale inglesi dell’età moderna », Quaderni storici, 88, 1 (1995), p. 63-83.
12 Cf. B. Derouet, « Dot et héritage : les enjeux chronologiques de la transmission », L’histoire grande ouverte. Hommages à Emmanuel Le Roy Ladurie, Paris, Fayard, 1997, p. 284-292.
13 Cf. A. Bellavitis, Identité, mariage, mobilité sociale, op. cit., p. 171.
14 Cf. par exemple, le cas de l’Italie du Sud étudié par Gérard Delille, Famille et propriété dans le Royaume de Naples (XVe -XXe siècle), Rome-Paris, École Française de Rome, 1985 et celui d’Aix-en-Provence étudié par Claire Dolan, La famille, le notaire et la ville à Aix-en-Provence durant la seconde moitié du XVIe siècle, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 1998.
15 J. Hajnal, « European Marriage Patterns in Perspective », D. V. Glass, D. E. C. Eversley (dir.), Population in History, Londres et Chicago, Arnold et Aldine, 1965. Sur les modèles familiaux européens, cf. les nombreuses synthèses parues ces dernières années, A. Burguière, C. Klapisch-Zuber (dir.), Histoire de la famille, vol. 3, Le choc des modernités, Paris, A. Colin, 1986 ; J. Casey, The History of the Family, Oxford, Basil Blackwell, 1989 ; M. Barbagli, D. I. Kertzer (dir.), Storia della famiglia in Europa. Dal Cinquecento alla Rivoluzione francese, Bari-Rome, Laterza-Yale University Press, 2002 ; sur l’Italie, cf. M. Barbagli, Sotto lo stesso tetto. Mutamenti della famiglia in Italia dal XV al XX secolo, Bologne, Il Mulino, 1988 (1ère éd. 1984) ; D. I. Kertzer, R. P. Saller (dir.), La famiglia in Italia dall’antichità al XX secolo, Florence, Le Lettere, 1995 (Yale 1991) ; F. Mazzonis (dir.), Percorsi e modelli familiari in Italia tra ‘700 e ‘900, Rome, Bulzoni, 1997.
16 A. Weiner, Inalienable possession. The paradox of keeping-while-giving, Berkeley, 1992.
17 S. Chojnacki, Women and Men in Renaissance Venice. Twelve Essays on Patrician Society, Baltimore-Londres, Johns Hopkins University Press, 2000, p. 186 et suivantes.
18 A. Bellavitis, Famille, genre et transmission à Venise au XVIe siècle, Rome, École Française de Rome, 2008.
19 Ead., « Apprentissages masculins, apprentissages féminins à Venise au XVIe siècle », Histoire Urbaine, 15 (2006), p. 49-73.
20 Sur le problème du mariage des « jeunes » de boutique et apprentis, cf. M. E. Wiesner, « Wandervogels and Women : Journeymen’s Concepts of Masculinity in Early Modern Germany », Journal of Social History, 24 (4), 1991, p. 767-782 ; J. Ehmer, « Servi di donne. Matrimonio e costituzione di una propria famiglia da parte dei garzoni come campo di conflitto nel mondo artigiano mitteleuropeo », Quaderni Storici, 80, n° 2, août 1992, p. 475-507.
21 A. Fine, C. Leduc, « La dot, anthropologie et histoire. », p. 28.
22 Cf. A. Bellavitis, Identité, mariage, mobilité sociale, op. cit., p. 150.
23 Cité par M. Godelier, L’énigme du don, op. cit., p. 65-66.
24 G. Augustins, Comment se perpétuer ? op. cit., p. 337. Sur la part des meubles et des immeubles dans la dot et le douaire, cf. F. Bougard, L. Feller, R. Le Jan (dir.), Dots et douaires dans le haut Moyen Age, Rome, Collection de l’École Française de Rome, 295, 2002.
25 J.-F. Chauvard, La circulation des biens à Venise. Stratégies patrimoniales et marché immobilier (1600-1750), Rome, Bibliothèque de l’École Française de Rome et d’Athènes 323, 2005, p. 388.
26 S. Chojnacki, Women and Men, op. cit., p. 98.
27 Sur la procédure, cf. L. Guzzetti, « Dowries in fourteenth-century Venise », Renaissance Studies, vol. 16, n° 4, 2002, p. 430-473.
28 R. Cessi (éd.), Gli Statuti veneziani di Jacopo Tiepolo del 1242 e le loro glosse, Venise, Ferrari, 1938, p. 83-85.
29 Sur les conséquences de la dette des maris à l’égard de leurs épouses, engendrée par le système dotal, cf. M. Martini, « Rapports patrimoniaux et crédit dans les ménages nobles. Dot et apanage des femmes à Bologne au XIXe siècle », A. Groppi, G. Houbre, Femmes, dots et patrimoines, op.cit., p. 139-154 ; A. Arru, « Donare non è perdere. I vantaggi della reciprocità a Roma tra Settecento e Ottocento », Quaderni storici, 98 (1998).
30 R. Cessi (éd.), Gli Statuti veneziani, op. cit., p. 89. Dans d’autres villes italiennes, les veuves pouvaient continuer à vivre sur les biens du mari jusqu’à restitution complète de la dot, cf. M. Bellomo, Ricerche sui rapporti patrimoniali tra coniugi. Contributo alla storia della famiglia medievale, Milan, 1961, p. 219.
31 Novissimum Statutorum ac Venetarum Legum Volumen, op. cit., f° 89-90.
32 Novissimum Statutorum ac Venetarum Legum Volumen, op. cit., f° 184, 1554, 25 février, Corretion del serenissimo Marco Antonio Trevisan, chap. IX-X ; f° 202, 1620, 5 avril, Corretion del serenissimo prencipe Antonio Prioli ; f° 221, 1640, 18 mars, Corretion in tempo del serenissimo prencipe Francesco Erizzo.
33 Novissimum Statutorum ac Venetarum Legum Volumen, op. cit., f° 196-197, 1613, 22 mars, Corretion del serenissimo prencipe Marc’Antonio Memo.
34 Novissimum Statutorum ac Venetarum Legum Volumen, op. cit., f° 198-199 ; f° 219, 1640, 12 mars, Corretion in tempo del serenissimo prencipe Francesco Erizzo.
35 Archivio di Stato de Venise (désormais ASV), Giudici del Proprio, Vadimonia reg. 36, 1553-4 et 86, 1592-3.
36 Cf., entre autres, le cas de la veuve d’un marin de Burano, Angela Costantini, ASV, Giudici del Proprio, Vadimoni, reg. 36, 1553, 9 septembre.
37 ASV, Giudici del Proprio, Vadimoni, reg. 36, 1553, 4 août.
38 ASV, Giudici del Proprio, Vadimoni, reg. 36, 1553, 28 septembre.
39 ASV, Giudici del Proprio, séries De foris, Dejudicatum, Minutarum, Mobili.
40 ASV, Giudici del Proprio, Minutarum, reg. 26 ; De foris, reg. 27-28, Mobili, reg. 86-87.
41 ASV, Giudici del Proprio, Vadimonia, reg. 86.
42 Cf. M. A. Visceglia, Il bisogno di eternità. I comportamenti aristocratici a Napoli in età moderna, Naples, Guida, 1988.
43 I. Chabot, « Widowhood and Poverty in Late Medieval Florence », Continuity and Change, 3 (1988), p. 291-311 ; C. Klapisch-Ztoer, La maison et le nom. Stratégies et rituels dans l’Italie de la Renaissance, Paris, École des Hautes Études en Sciences Sociales, 1990, notamment « Le complexe de Griselda. Dot et dons de mariage », p. 185-209.
44 ASV, Senato Misti, reg. 53, f° 70.
45 D. Owen Hughes, « From Brideprice to Dowry in Mediterranean Europe », Journal of Family History, 7 (1978), p. 7-43.
46 S. Chojnacki, « Nobility, Women and the State : Marriage Regulation in Venice, 1420-1535 », T. Dean, K.J.P. Lowe (dir.), Marriage in Italy, 1300-1650, Cambridge 1998, p. 128-151.
47 M. G. Muzzarelli, A. Campanini (dir.), Disciplinare il lusso. La legislazione suntuaria in Italia e in Europa tra Medioevo ed età moderna, Rome, Carocci, 2003.
48 I. Chabot, « Richesses des femmes et parenté dans l’Italie de la Renaissance », op. cit.
49 A. Bellavitis, Identité, mariage, mobilité sociale, op. cit., p. 157.
50 ASV, Senato Terra, reg. 28, f° 151-152.
51 Cf. sur le sujet, D. Raines, « Strategie d’ascesa sociale e giochi di potere a Venezia nel Seicento : le aggregazioni alla nobiltà », Studi Veneziani, n.s., LI (2006), p. 279-317.
52 Sur les lois somptuaires concernant l’inflation dotale je renvoie à A. Bellavitis, Identité, mariage, mobilité sociale, op. cit., p. 154-158.
53 J. C. Davis, The Decline of the Venetian Nobility as a Ruling Class, Baltimore, The Johns Hopkins University Press, 1962 ; V. Hunecke, Il patriziato veneziano alla fine della Repubblica, 1646-1797. Demografia, famiglia, ménage, Rome, Jouvence, 1997 (éd. allemande, 1995) ; J. G. Sperling, Convents and the Body Politic in late Renaissance Venice, Chicago et Londres, The University of Chicago Press, 1999.
54 V. Hunecke, op. cit., p. 209.
55 J. G. Sperling, op. cit., chap. 1er.
56 V. Hunecke, op. cit., infra.
57 Arcangela Tarabotti, L’inferno monacale (1650 env.), j’ai traduit à partir de l’édition italienne publiée par Francesca Medioli, Turin, Rosenberg & Sellier, 1990, p. 93.
Auteur
Université de Rouen
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