Contemporanéité et anonymat des consciences dans deux romans de Mauvignier, Dans la foule et Autour du monde
p. 63-74
Texte intégral
1« Mon simple contemporain, écrit Alfred Schutz dans The Phenomenology of the Social World, est quelqu’un dont je sais qu’il existe avec moi dans le temps, mais dont je n’ai aucune expérience immédiate1. » Les contemporains ne sont pas seulement, pour A. Schutz, ceux avec qui j’entretiens des relations interpersonnelles pour former un « nous », ou bien même ceux qui appartiennent à la même « génération » que moi c’est-à-dire, au sens sociologique, à « l’ensemble des individus ayant à peu près le même âge2 », qui ont été « exposés aux mêmes influences, marqués par les mêmes événements et les mêmes changements3 ». Ils sont aussi les anonymes que je ne rencontrerai jamais mais dont les flux de conscience sont simultanés au mien4. Schutz distingue ainsi les « Mitmenschen » (« fellow men »), compagnons identifiés que je rencontre dans un face-à-face, des « Nebenmenschen », contemporains anonymes, dont je ne peux avoir qu’une connaissance médiatisée5.
2 Comment la fiction romanesque peut-elle représenter ces contemporains anonymes qui vivent en même temps que nous, vieillissent avec nous6, sont frappés avec plus ou moins de force par les mêmes événements, et auxquels nous ne disons ni « tu » ni « vous » ? C’est l’une des questions que Laurent Mauvignier aborde dans deux romans, Dans la foule et Autour du monde. Des millions de personnes ont réellement vécu, en direct ou par écran interposé, l’avant-match de la finale de la Coupe d’Europe des Clubs Champions à Bruxelles le 29 mai 1985 et le tsunami du 11 mars 2011 au nord du Japon. Mauvignier met en place un dispositif narratif particulier qui permet au lecteur d’une part d’entrer dans la conscience d’un personnage à l’identité bien définie en revivant de l’intérieur l’événement ou ses résonances, et d’autre part de saisir ce qui se passe ou ne se passe pas entre « tous ces gens qui se frôlent et ne se rencontreront jamais7 » : c’est sur cette pensée d’un jeune homme anonyme que se clôt, sans vraiment s’achever, le tour du monde fictif du 11 mars 2011. Ces deux romans sont constitués par la juxtaposition d’histoires individuelles fictives et simultanées captées à un moment précis et réel, plus ou moins traumatisant. Ils relatent les effets d’une vague dévastatrice, de la foule ou de la mer, sur des personnages pris plus ou moins intensément dans ses remous. Malgré leur ressemblance, ces deux dispositifs narratifs se distinguent sensiblement par leur traitement du temps, de l’espace et de l’action : de 1985 à 2011, la circulation de l’information est devenue quasiment instantanée et mondialisée. Le champ d’action de l’événement raconté a changé d’échelle, passant de l’Europe au monde tout entier. Le nœud de l’action lui-même est placé différemment : la charge meurtrière menée par les hooligans de Liverpool contre les supporters italiens est retardée à la fin du quatrième chapitre de Dans la foule. En revanche, le tsunami est vécu dès la première séquence, à Fukushima, par le jeune Mexicain Guillermo et la jeune Japonaise Yûko, emportés par le déferlement de la vague noire ; il résonne dans le monde entier jusqu’à la séquence finale où une petite Japonaise envoie la version moderne de la bouteille à la mer à ses grands-parents disparus dans le tsunami. Entre ces deux séquences qui bouclent le roman sur Fukushima se déroulent des histoires simultanées, dans des espaces divers plus ou moins lointains où la vague gigantesque se répercute avec une intensité très variable.
3Dans ces romans qui captent la vie intérieure des personnages8 juste avant, pendant et après un événement traumatisant à l’échelle européenne et mondiale9, Mauvignier choisit d’identifier ces simples contemporains en leur donnant un nom, un caractère, un passé et un futur. C’est cette tension entre l’anonymat des contemporains tel que le définit A. Schutz, et le maintien voire l’approfondissement des identités des personnages qu’il s’agit d’examiner avant de dégager certaines conséquences problématiques concernant le traitement du temps et de la simultanéité.
Identité et anonymat du simple contemporain (ou « Nebenmensch »)
4Les titres de ces deux romans se présentent comme des compléments circonstanciels de lieu sans mention de personnages : ceux-ci semblent dissous dans un lieu à la fois vaste et général, la foule ou le monde. Le titre Dans la foule laisse entendre une immersion centripète dans un ensemble d’individus formant une totalité alors qu’Autour du monde suggère un mouvement de surface centrifuge présentant une double unité : celle du vaste monde saisi comme un tout et celle d’un cycle possible. Le dispositif narratif mis en place dans chacun de ces deux romans semble pourtant contredire l’anonymat suggéré par les titres. La foule et le monde sont actualisés par le choix d’une date précise : la foule de l’avant-match au Heysel le 29 mai 1985 et le monde au moment du tsunami le 11 mars 2011. L’intrigue du premier roman s’organise en trois mouvements centrés sur la foule : d’abord, la formation de la foule à partir d’un rassemblement de personnages venus de toute l’Europe et dont le lecteur suit le parcours individuel dans des monologues à la première personne ; ensuite, le moment du match qui emporte les personnages vers la violence ou la mort (à la fin du chapitre 4) ; enfin, les répercussions de ce mouvement de foule, la nuit et le jour suivants (deuxième partie) puis trois ans plus tard (troisième partie) avec une analepse relatant le procès. Contrairement à ce que semblait annoncer le titre, les consciences individuelles ne se dissolvent pas dans la foule : les personnages sont caractérisés et leurs monologues sont séparés typographiquement, constituant des séquences narratives ou des chapitres distincts qui configurent le temps de l’histoire racontée, de l’arrivée des supporters à la reconstruction des victimes. Mais si Mauvignier place ses appareils d’enregistrement dans les consciences individuelles des personnages dont ils captent la voix intérieure, la construction de son roman ne se réduit pas à une juxtaposition de monologues séparés les uns des autres. Le problème de l’anonymat des individus dans nos sociétés contemporaines est en réalité posé à plusieurs niveaux par une palette de relations interpersonnelles, du « je » au « nous », du « nous » au « on », du « on » aux « ils ». Le quatuor des narrateurs, Jeff, Gabriel, Geoff puis Tana, est certes reconnaissable grâce à des caractéristiques individuelles qui en font des « moi », mais chacun est d’emblée lié à un autre personnage, ami (Tonino), frère (les frères Anderson), compagne (Virginie), mari (Francesco) avec lequel il forme un « nous ». Très vite, les rencontres dessinent une nouvelle configuration séparant les personnages en deux groupes : Jeff et Tonino, Tana et Francesco, Gabriel et Virginie font connaissance la veille du match alors que Geoffrey, ses frères et ses amis se confondent dans un « on » collectif soudé par le chant, l’alcool et la violence. La voix de Geoff est traitée dans la première partie comme les trois autres voix narratives, alternant notamment avec celle de Jeff, le supporter nordiste, alors que dans la deuxième partie (chapitres 6 à 11), les monologues de Geoff constituent des chapitres à part (7, 9, 11) marquant la séparation définitive entre les hooligans et leurs victimes puis disparaissent complètement dans la troisième partie (chapitres 12 à 16). Les contemporains anonymes (Nebenmenschen) sont ainsi distingués des « compagnons » (Mitmenschen). Ressort principal de l’action, l’anonymat explique sans le justifier le drame du Heysel. C’est parce que son individualité est fondue dans la foule que Geoffrey participe à ce massacre collectif et qu’aucune responsabilité n’est reconnue lors du procès. La question lancinante que Geoff se répète dans son monologue : « Est-ce que j’ai couru avec eux ? Est-ce moi qui cours avec eux10 ? » peut être interprétée à la fois comme la dénonciation ironique11 de l’anonymat de la foule contemporaine et comme une question au premier degré sur la nature de l’identité individuelle humaine.
5Composé de quatorze séquences narratives indépendantes, le dispositif narratif d’Autour du monde semble également remplir le contrat du titre : du Japon à Paris, en passant par la mer du Nord, les Bahamas, Israël, Moscou, Dubaï, les chutes du Niagara, le Kilimandjaro en Tanzanie, Rome, le golfe d’Aden, l’Italie, l’Oregon et la Floride, sont présentés de « simples contemporains » (« Nebenmenschen ») au sens où les définit Schutz. Mais, à la différence de Dans la foule, les histoires relatées à la troisième personne ne sont pas séparées typographiquement, comme si une liaison fluide entre ces personnages et ces lieux divers se dessinait. Ces récits sont en effet liés thématiquement, non seulement par la mention plus ou moins explicite de Fukushima mais surtout par des motifs tels que le ciel ou l’eau qui assure une continuité naturelle entre certaines séquences (1, 2, 3, 10, 12, 13). Contrairement aux montages variés des monologues du premier roman, le fondu enchaîné entre les quatorze séquences donne au lecteur l’impression physique que ces personnages anonymes se frôlent : un flux de conscience circule entre les êtres comme la secousse tellurique se propage à l’ensemble de la planète.
6Par exemple, la transition entre les douzième et treizième séquences12 fait se croiser les deux personnages principaux des deux histoires racontées : Alec, livré à ses pensées dans sa minuscule voiture japonaise à Des Moines dans l’Iowa, sous une pluie battante, aperçoit un jeune autostoppeur qui empruntera des identités diverses pour se rendre chez son frère aîné Mitch, en Floride. Les personnages pourraient se rencontrer et devenir ce que Schutz appelle des « compagnons » (« Mitmenschen »). Mais comme Geoff vis-à-vis de Jeff, Tana ou Gabriel, ils restent des contemporains anonymes (Nebenmenschen) dont les flux de vie coexistent sans se mêler13, ainsi que le figurent métaphoriquement le flux des voitures et la fluidité de la pluie.
7Autour du monde est constitué par la juxtaposition de quatorze séquences narratives vécues par de « simples contemporains » qui ne se connaissent pas et resteront anonymes les uns pour les autres ; mais chacune de ces séquences décline toute la palette des relations à autrui du « eux » au « vous », de l’observation du simple contemporain (Nebenmensch) à la compréhension du « compagnon » (Mitmensch) et inversement. Chaque séquence raconte en effet une expérience de l’autre, que l’on observe, que l’on va connaître et comprendre, ou bien qu’on connaissait et qu’on ne comprend plus, au sein d’un couple d’amants ou d’amis, d’une fratrie, ou d’une relation intergénérationnelle (père-fils, père-fille, etc.).
8Une des questions soulevées par ce dispositif peut être formulée ainsi : mon contemporain est-il un simple sujet d’observation ou bien puis-je interagir avec lui ? La réponse de Schutz est claire : qu’autrui soit orienté vers « vous » ou vers « eux », qu’il soit un compagnon (Mitmensch) ou un contemporain anonyme (Nebenmensch), je ne l’observe pas seulement, je peux agir sur lui et avec lui ; le comportement et l’expérience subjective de mes contemporains sont les moteurs de mon action14. Dans Autour du monde, les réactions indignées de certains personnages face à des discours indifférents voire cyniques envers les victimes anonymes du tsunami peuvent être interprétées au premier degré comme la critique morale de l’irresponsabilité et du manque de solidarité ou bien, au second degré, comme la dénonciation ironique d’une attitude empathique facile et convenue. Par exemple, une des passagères du bateau, Birgit, s’indigne de la description jubilatoire du phénomène du tsunami par le sismologue Khrenov : « Et ça a l’air de vous faire plaisir ! » alors même qu’une voix narrative renchérit : « Et, en effet, il est impossible de ne pas voir comment le visage de Dimitri Khrenov est exalté, épanoui, comment quelque chose en lui rayonne d’une joie qu’il ne peut pas dissimuler15. » De même, Mitch se met en colère quand son jeune frère Vince exprime cyniquement son indifférence envers les Japonais emportés par le tsunami ou les Américains touchés par un ouragan : « Attends, Vince, ici, tu es chez moi. Je t’interdis de parler comme ça chez moi, tu entends16 ? » Si, contrairement à Khrenov ou à Vince, Syafiq manifeste envers les victimes une empathie certaine, celle-ci se dissout dans une forme d’aboulie :
Mais, tout de même, il voudrait faire quelque chose, donner de l’argent pour aider, faire un don à une organisation internationale, c’est ça, puisque c’est un pays qu’il connaît bien et qu’il aime. Il lâche un soupir de compassion, de lassitude, il se souvient du tsunami en Thaïlande et, maintenant, c’est comme s’il se disait je préfère ne pas savoir, il prend la télécommande de la télévision et dans le même mouvement il éteint la télévision et d’un bond se lève et décide de se préparer17.
9Même si l’indifférence cynique ou la compassion aboulique de ces personnages remettent en question l’action possible des contemporains, quelque chose circule entre eux, laissant penser qu’ils peuvent toujours agir sur le monde auquel ils appartiennent et sur les personnes qui vieillissent avec eux alors qu’ils ne peuvent agir sur leurs prédécesseurs. Mais cette action en reste souvent au stade du discours.
10Inclus dans ces deux dispositifs, le lecteur occupe une position ambiguë et souvent inconfortable : il est en effet placé à égale distance de tous les personnages, qu’ils soient simples contemporains (Nebenmenschen) ou compagnons (Mitmenschen) : il entend les voix des trois personnages victimes et témoins (Gabriel, Tana et Jeff) comme celle du personnage du hooligan, Geoff ; mais il reste extérieur aux autres personnages (Virginie, Francesco, Tonino, les frères Anderson et leurs amis). Dans Autour du monde, le lecteur plonge dans les consciences individualisées des personnages grâce au monologue narrativisé à la troisième personne ou au psycho-récit. Il ne perçoit donc pas les personnages comme de simples contemporains anonymes. Cette connaissance est d’autant plus profonde qu’elle est complétée, comme nous le verrons ci-après, par des récits proleptiques et analeptiques, assumés par un narrateur en surplomb. Alors que le personnage de la deuxième séquence, Franz, voit à la télévision, sans la connaître, la jeune Japonaise sauvée par son blouson matelassé, le lecteur sait qu’elle s’appelle Yûko et connaît partiellement son histoire. Cette reconnaissance se traduit parfois par un changement de pronom. D’abord désignée par le pronom « elle » par son mari Alec, Jaycee est interpellée à la deuxième personne à la fin de la séquence narrative : si Alec voit Jaycee s’éloigner de lui de toute la distance de sa folie, le narrateur la tutoie comme s’il entretenait avec elle une relation de familiarité voire d’empathie :
Il sait qu’elle est cassable comme la poupée de porcelaine que sa mère avait voulu voir en elle. Mais est-ce que ça va suffire pour expliquer toute son existence fracassée – Jaycee, est-ce que ça va suffire pour qu’Alec comprenne comment les policiers t’avaient trouvée deux jours après votre retour dans les rues de Des Moines, à moitié nue et enroulée dans une couverture avec ton bébé pelotonné dans tes bras18 ?
11Le lecteur saura également que le jeune homme autostoppeur aperçu par Alec s’appelle Vince et emprunte diverses identités au gré de ses rencontres, alors qu’il reste pour les personnages croisés sur sa route un autre définitivement autre, jamais compréhensible, toujours insaisissable. Mais le lecteur ne connaît pas l’identité du jeune hooligan qui fait sa déposition au procès du Heysel : « le beau costume et les airs d’adolescents endimanchés parés pour une noce de village19 » ne permettent pas de reconnaître, de différencier et d’identifier les hooligans qui restent anonymes pour le lecteur comme pour Tonino relatant le procès à Jeff. Le lecteur peut ainsi évaluer tous les degrés de la contemporanéité et réfléchir, à partir de l’expérience de pensée fournie par ces deux dispositifs romanesques complexes, à la manière dont il construit sa représentation du contemporain.
Contemporanéité : simultanéité de deux flux distincts de conscience
12Cette palette des « contemporains », du simple anonyme (Nebenmensch) au compagnon connu (Mitmensch) amène à définir la contemporanéité comme « la simultanéité de deux flux distincts de conscience20 ». Pour qu’on puisse parler d’un monde des contemporains, il faut que se développent simultanément plusieurs flux temporels21. La simultanéité n’est pas synonyme d’instantanéité comme le montre A. Schutz : elle déploie « deux flux temporels aussi longtemps qu’ils durent ensemble22 ».
13Le premier problème posé est celui des médiations. Quand deux consciences entretiennent une relation de compagnonnage, elles forment un « nous » et vieillissent ensemble : la contemporanéité signifie alors partage immédiat d’expérience. En revanche, quand deux consciences ne se connaissent ni ne se reconnaissent, elles ont besoin de médiations pour s’appréhender mutuellement. Comme le souligne Ricœur, « le passage à la contemporanéité anonyme marque une croissance des médiations symboliques, en rapport inverse avec la décroissance de l’immédiateté23 ». En d’autres termes, plus autrui est anonyme, moins je le perçois immédiatement, et plus j’ai besoin de recourir à des rôles typifiés pour l’appréhender. Quand je suis orienté vers « eux », j’ai des types de partenaires, je construis mes représentations de mes contemporains anonymes à partir de l’expérience des autres que j’ai puisée dans mon passé. Voici l’exemple que donne A. Schutz :
Supposez, par exemple, que je regarde un groupe d’hommes jouant aux cartes, je peux prêter une attention particulière à l’un d’eux. Quand je fais cela, je prends conscience de lui comme d’un « tu ». Je ne le vois plus comme un « homme jouant aux cartes » ce qui serait simplement une interprétation de ma propre perception. Je suis maintenant conscient de la manière dont il joue aux cartes24.
14Sans entrer dans le détail des types dégagés par Schutz et empruntés à Max Weber, il est facile de constater que plus le personnage est anonyme, plus il est décrit et caractérisé avec force détails : le blouson matelassé bleu est ainsi une médiation symbolique qui permet à de simples contemporains tout autour du monde d’appréhender Yûko comme celle qui a survécu grâce à son vêtement, cette « miraculée sauvée par cette doudoune qui lui aurait servi de bouée25 ». Dans la foule multiplie également les médiations symboliques qui permettent aux personnages de saisir l’autre anonyme : le blouson noir, la queue de cheval, la jupe rouge à pois blancs, la blondeur vénitienne de Tana, repérés par les autres personnages, constituent des motifs récurrents de la première partie du roman. Ces médiations laissent entrevoir certains problèmes narratifs soulevés par la représentation de la contemporanéité. Comment raconter ce que les contemporains vivent en même temps sans se connaître ? Comment figurer ces flux de conscience anonymes qui durent ensemble ? Les dispositifs mis en place par Mauvignier dans les deux romans ne suffisent pas à régler les questions complexes posées par la représentation de flux de conscience simultanés.
15Le deuxième problème posé par ces deux romans tient à l’impossibilité de se tenir dans le présent de la conscience. Mauvignier ne se contente pas de placer, face à face ou côte à côte dans l’espace, des personnages qui se connaissent bien ou ne se rencontreront jamais avec toutes les nuances entre ces deux extrêmes : il double ce mouvement spatial horizontal de surface d’un mouvement de creusement temporel26. En effet, le narrateur ouvre le temps présent (celui du 29 mai 1985 et du 11 mars 2011) sur des temps antérieurs et postérieurs qui vont approfondir les identités, développer les histoires, définir les caractères, compléter les intrigues. La circulation entre les êtres, figurée thématiquement par les mouvements liquides de la mer et de la foule, est pour ainsi dire contrariée par un mouvement vertical et temporel qui sort du présent pour plonger dans le passé et s’élever vers l’avenir. Le présent des personnages déborde sans cesse vers le passé et le futur. La formule réitérée dans Autour du monde « mais pour l’instant » et ses variantes (« mais ce soir ») ramènent le lecteur à ce jour particulier vécu par un personnage et souligne le yoyo temporel vertigineux.
16Plongé dans la conscience du personnage dont il épouse le point de vue restreint, le lecteur est brutalement arraché à l’ici et maintenant de son histoire pour se retrouver à un niveau supérieur de connaissance. Afin d’évoquer le passé du personnage, le narrateur peut utiliser l’artifice classique de la réminiscence qui lui sert à justifier l’analepse ; mais quand il raconte le futur du personnage, il sort de la conscience de ce personnage au prix de sa crédibilité auprès du lecteur. Par exemple, l’instant vécu par Stuart le 11 mars 2011 et immobilisé par une photographie est dépassé par une intervention proleptique du narrateur qui raconte le destin du personnage en 2050 (alors que sa femme et ses compagnons de safari sont morts depuis longtemps) et le devenir de cette photographie qui, contrairement à ce qu’on en dit, n’immortalise pas cet instant27.
17L’amplitude temporelle donnée à cet instantané photographique, qui finira pourtant un siècle plus tard dans une déchetterie de Sydney, permet de situer le monde des contemporains par rapport au monde des successeurs (Folgewelt28), ces hommes qui nous suivront et dont les vies futures ne chevaucheront pas les nôtres, que nous ne pouvons qu’imaginer29 en supposant que leur monde sera semblable à notre monde de disques durs et de clouds numériques. Quant aux réminiscences et enquêtes qui ouvrent le présent des personnages sur le passé personnel et historique, elles situent le monde des contemporains par rapport au monde des prédécesseurs (Vorwelt30). Une sorte de tuilage temporel s’effectue alors du monde des prédécesseurs au passé personnel des personnages, de ce passé personnel à la pointe du présent de ce 11 mars ou de ce 29 mai, de ce présent à l’avenir personnel des personnages, puis au monde des successeurs.
18Le troisième problème est celui de la synchronisation des expériences vécues : même si les personnages se tiennent dans le présent de leur conscience et si le narrateur parvient à s’y fixer, comment présenter en même temps les flux simultanés de leur conscience alors que le récit est forcément successif ? Pour Leibniz, les deux ordres s’opposent parce l’ordre des successions est temporel alors que l’ordre des coexistences est spatial31. Dans la foule semble proposer quelques séquences narratives synchronisées : celles du déplacement en train de Jeff et de Geoff, celle du vol des billets raconté par Jeff puis par Gabriel. Mais elles ne sont pas relatées au présent : le vol des billets est remémoré par Jeff le soir même et par Gabriel le lendemain. Les flux de conscience des différents personnages sont toujours rapportés en léger différé même quand ces personnages évoluent dans le même espace. A fortiori, quand les personnages sont à des milliers de kilomètres les uns des autres, s’ajoute le problème du décalage horaire qui ouvre symboliquement la première séquence d’Autour du monde et qui constitue le leitmotiv des premières pages : « Quelle heure il peut bien être chez moi ? se demande Guillermo32. » Au moment même où le tsunami dévaste la côte nord du Japon, un peu avant quinze heures, le jour se lève neuf heures plus tôt sur la mer du Nord33 que contemple un simple contemporain, anonyme pour les Japonais.
19Le récit est toujours décalé par rapport à l’action qui est située dans le passé de la voix narrative. Le premier monologue de Dans la foule s’ouvre sur une phrase ambiguë, « Nous deux, Tonino et moi, on n’aurait jamais imaginé ce qui allait arriver », qui peut être interprétée comme le signe du récit rétrospectif et l’annonce du drame, même si elle est désamorcée par la phrase suivante : « – Paris au-dessus de nos têtes et cette fois on ne s’y arrêterait pas34. » La voix narrative joue sans cesse avec les informations qu’elle peut délivrer au lecteur puisque les faits réels ont déjà eu lieu dans le passé. Elle joue par exemple avec la rétrospection en passant sans transition du psycho-récit (transcrit au discours indirect libre puis au discours indirect) à la voix d’un narrateur omniscient (qui semble prolonger le discours indirect de Yûko) :
Peut-être que Guillermo l’amuse pour l’instant ? Il pourrait l’amuser encore deux ou trois jours, peut-être plus, tous les jours et les heures nécessaires jusqu’à ce que Yûko décide qu’il est temps d’en finir. Sauf qu’elle n’aura pas le temps d’en finir. Ce temps viendra tout seul, très vite ; bientôt il se dressera entre elle et ses désirs et les dévastera comme rien dans sa vie ne l’aura jamais fait auparavant35.
20Au décalage entre le récit et la vie souligné par la signification vieillie du verbe « amuser » (occuper quelqu’un ou l’esprit de quelqu’un en le détournant des choses importantes) s’ajoute une différence de vitesse : l’écriture est toujours plus lente que la vie. Même si le monologue cherche à rattraper l’histoire en courant, comme celui de Tana qui semble simultané à l’histoire racontée, il reste définitivement en retard par rapport à la vie même. Quand Syafiq, à Moscou, se demande s’il a déjà croisé Yûko au Japon, il souligne le décalage entre ces deux vies contemporaines qui resteront anonymes l’une à l’autre :
Syafiq se demande qui est cette fille. Il se dit qu’il l’a peut-être croisée un jour à Tokyo, et soudain il pense à tous les gens qu’il a rencontrés au Japon, par hasard, dans la rue, des gens avec qui il a échangé un regard ou seulement un peu d’espace et d’air dans le flot de la circulation ou dans un bar, un restaurant36.
21Pourtant, malgré ce décalage constitutif du récit, la voix narrative est parfois synchronisée avec la voix du personnage en pleine action : la fin du quatrième chapitre de Dans la foule plonge le lecteur dans le monologue au présent de Tana emportée par le déferlement de violence37. Mais pour rendre sensible la simultanéité des flux de conscience, la voix de Tana alterne avec la voix de la radio (perçue par Gabriel, à l’extérieur du stade), la voix d’un témoin voyant sortir les premiers blessés et la voix de Geoff. Ce concert de voix juxtaposées et enchevêtrées reste dissonant à cause des décalages divers entre l’action et sa compréhension : certaines voix, comme celle du témoin (Gabriel sans doute), ont déjà pris conscience de l’ampleur du drame et mettent déjà des mots sur ce qui se passe, tandis que d’autres sont en train de vivre l’événement et semblent en retard sur leur propre voix.
Et dès qu’ils arrivent dans la lumière du dehors c’est comme s’ils couraient après leurs voix, leurs cris, loin devant eux, devant leurs corps tuméfiés, je me dis, moi, tremblotant, les jambes molles, les oreilles bourdonnent quand j’entends ces mots dans ma tête disant qu’ils sont devenus fous38 […].
22À ces décalages propres au récit – et même à toute mise en voix d’une expérience immédiate – s’ajoute donc la difficulté, voire l’impossibilité, de synchroniser les rythmes des personnages : chaque contemporain anonyme a son rythme propre plus ou moins accordé au rythme que le monde lui impose. Même si les fondus enchaînés entre les séquences narratives semblent harmoniser les rythmes du monde et des flux de conscience dans Autour du monde, les différences de rythme sont sans cesse soulignées : le calme de la mer du Nord s’oppose au déchaînement du tsunami39, comme la course éperdue du petit chien blanc Geronimo dans un espace immense contraste avec la réflexion statique et rétrospective d’Alec coincé dans sa petite voiture japonaise40. Le mouvement de synchronisation des flux de conscience contemporains qui pourrait être facilité par la mondialisation et la circulation instantanée des informations est contrarié par un mouvement inverse et chaotique de dispersion. Mitch et sa famille à Orlando parcourent le même espace de contes de fées que la jeune Japonaise à Disneyland-Paris. Pourtant très ironiquement, le narrateur souligne le décalage entre ce « monde lisse et sans aspérité41 » et le monde réel, en entrant dans la conscience naïve de la jeune Fumi : celle-ci pense à ces « êtres et ces gens heureux qui viennent de partout autour de la Terre42 », sans savoir que le tsunami vient de dévaster le nord du Japon où habitent ses grands-parents. Le récit qu’elle destine à sa grand-mère (« Je veux parler à Mamie, je veux lui raconter Cendrillon, le parc, la Belle et la Bête, je veux tout lui raconter, il le faut43 ») est tragiquement en retard par rapport à la vie même.
23Dans les deux romans étudiés, Laurent Mauvignier met en œuvre dans toute sa complexité le « monde des contemporains », phénomène social déjà finement étudié et analysé par le philosophe phénoménologue Alfred Schutz. Il déploie toute une palette de relations entre les consciences qui vivent en même temps à la même époque, du face-à-face à l’anonymat et inversement. Les deux romans fournissent des représentations multiples du « simple contemporain » (Nebenmensch), défini par Alfred Schutz comme une personne qui vit en même temps que moi mais que je ne rencontrerai jamais, qui restera un « lui » anonyme. Le simple contemporain est un flux de conscience anonyme qui vieillit en même temps que les autres flux, partage le même monde, vit les mêmes événements en direct ou à distance. Pour le figurer, il ne suffit pas de pénétrer dans une seule conscience individuelle et d’en restituer la voix : il faut aussi en représenter plusieurs, car le contemporain ne se définit que par rapport aux autres contemporains. La représentation de ces flux de conscience pluriels, simultanés et anonymes les uns pour les autres pose un certain nombre de problèmes qui semblent insurmontables dans un récit forcément successif et rétrospectif et auxquels se sont confrontés des romanciers du flux de conscience, tels que Virginia Woolf, Nathalie Sarraute ou Claude Mauriac. À ces difficultés s’ajoute la nécessité de placer un point de vue narratif décalé, souvent surplombant, sans lequel le contemporain ne pourra pas être perçu comme tel par le lecteur. En effet, comme le résumait Barthes, « le contemporain est l’inactuel » ; pour Agamben, qui reprend ce paradoxe, « qui peut dire “mon temps” divise le temps, inscrit en lui une césure et une discontinuité44 ». C’est peut-être dans cette césure que réside l’originalité de Mauvignier par rapport aux romanciers du flux de conscience : certes, il cherche à capter le présent au moment où il est vécu par les consciences, mais ne renonce pas à une voix narrative qui scinde le temps pour saisir le moment présent de l’extérieur.
Notes de bas de page
1 Alfred Schutz, The Phenomenology of the Social World [Der sinnhafte Aufbau der sozialen Welt, Vienna, Julius Springer, 1932], trad. G. Walsh et F. Lehnert, Northern University Press, 1967, p. 181. « My mere contemporary (or “contemporary”), then, is one whom I know coexists with me in time but whom I do not experience immediately. » Je reprends la traduction anglaise utilisée par Paul Ricœur dans Temps et récit, t. III [1985], Paris, Seuil, coll. « Points », 1991, p. 198.
2 Le Petit Robert de la langue française, 2006.
3 P. Ricœur, Temps et récit, op. cit., p. 201.
4 Ibid., p. 205. A. Schutz les appelle « eux » (op. cit., p. 183).
5 A. Schutz, The Phenomenology of the Social World, op. cit., p. 142. « Let us call the other selves of the world of directly experienced social reality my “fellow men” (Mitmenschen) and the others selves of the world of contemporaries my “contemporaries” (Nebensmenschen). » Les premiers sont orientés vers « vous » (« thou-orientation ») et les seconds vers « eux » (« they-orientation » ou « Ihreinstellung » dans la version originale) ; ibid., p. 183.
6 À propos de ce contemporain anonyme, A. Schutz écrit : « He shares a community of time with me when his experience is flowing side by side with mine, when I can at any moment look over and grasp his thoughts as they come into being, in other words, when we are growing older together » (op. cit., p. 163).
7 Laurent Mauvignier, Autour du monde, Paris, Minuit, 2014, p. 372.
8 Cette vie intérieure est transcrite soit à la première personne dans des monologues intérieurs autonomes (Dans la foule), soit à la troisième personne dans des monologues rapportés ou parfois des psycho-récits (Autour du monde). Cf. Dorrit Cohn, La Transparence intérieure. Modes de représentation de la vie psychique dans le roman [1978], Princeton University Press, trad. Alain Bony, Paris, Éditions du Seuil, 1981.
9 L. Mauvignier reprend un procédé subtil qui permet, selon David Daiches, de « tisser ensemble les modes de l’action et de l’introspection » (David Daiches, The Novel and the Modern World, University of Chicago Press, 1939, éd. revue en 1960, chap. x, p. 189). Car selon lui, « ou bien nous nous tenons immobiles dans le temps et embrassons du regard des événements divers, mais survenant simultanément dans l’espace, ou bien nous nous tenons sans bouger dans l’espace, ou mieux dans un caractère érigé en “lieu” fixe, et nous descendons ou remontons le temps de la conscience du même personnage. La technique narrative consiste à faire alterner la dispersion des caractères en un même point du temps et la dispersion des souvenirs à l’intérieur d’un même caractère » (ibid., p. 204-205).
10 Laurent Mauvignier, Dans la foule [2006], Paris, Minuit, coll. « Double », 2009, p. 144. Voir aussi p. 142 : « Est-ce que j’ai couru avec eux ? Est-ce moi ? Est-ce le troisième fils de Susan et Ray Andrewson ? » et p. 124 : « Est-ce que c’est ma voix qui chante avec eux ? Est-ce que c’est moi que j’entends avec mes frères, qui cours et gueule Here we go ! Here we go ! Est-ce que je suis vraiment en train de faire ça ? »
11 Karine Germoni, L’ironie façon Mauvignier, dans Michel Bertrand, Karine Germoni, Annick Jauer (dir.), Existe-t-il un style Minuit ?, PUP, coll. « Textuelles », 2014, p. 189-200. Karine Germoni montre comment la répétition ou la variation d’une même parole laissent transparaître l’ironie. Si les premières occurrences n’alertent pas le lecteur, la reprise insistante peut être interprétée soit comme un ressassement obsessionnel, soit comme une antiphrase.
12 Autour du monde, op. cit., p. 310-311.
13 A. Schutz, op. cit., p. 142 (note 5).
14 Ibid., p. 143. A. Schutz explique que le monde des contemporains (soziale Mitwelt) diffère d’une part du monde des prédécesseurs (Vorwelt) dont la vie ne chevauche pas la mienne et que je peux seulement observer, et d’autre part du monde des successeurs (Folgewelt) qui existera quand je n’y serai plus.
15 Autour du monde, op. cit., p. 77.
16 Ibid., p. 351.
17 Ibid., p. 147-148.
18 Ibid., p. 308 sq.
19 Dans la foule, p. 310.
20 P. Ricœur, Temps et récit, III, op. cit., p. 205.
21 Ibid. Cf. aussi A. Schutz, op. cit., p. 165. A. Schutz prend pour exemple le vol d’un oiseau vu par deux consciences, celle d’un moi et celle d’un toi. « Nevertheless, during the flight of the bird you and I have “grown older together” ; our experiences have been simultaneous. »
22 P. Ricœur, Temps et récit, loc. cit.
23 Ibid., p. 205-206.
24 A. Schutz, op. cit., p. 185. « Suppose, for instance, that I am watching a group of men playing cards. I can pay special attention to any one of them. As I do so, I am aware of him as a Thou. No longer, now, am I seeing him as “man playing cards” which would merely be an interpretation of my own perceptions. Rather, I am now aware of the way he plays the game. »
25 Autour du monde, op. cit., p. 147.
26 Bien d’autres interprétations de ces déplacements sur l’axe du temps sont possibles : ils traduisent d’abord anthropologiquement l’impossibilité pour la conscience humaine de se tenir ici et maintenant : celle-ci ne cesse de se projeter dans l’avenir et de retourner dans le passé alors que le présent est son seul mode d’être au monde. Ils servent également tout simplement à constituer une intrigue avec un début, un milieu et une fin.
27 Autour du monde, op. cit., p. 200. « En 2050, Stuart sera le seul survivant de cette équipée partie en voyage en mars 2011, au nord de la Tanzanie, et il s’assurera, grâce à cette photographie et à des petits-enfants enthousiastes, une renommée de baroudeur, de grand reporter animalier. Une admiration qui dépassera de loin sa vie puisqu’elle durera jusqu’à la mort de ses petits-enfants, près d’un siècle plus tard, alors que la photographie elle-même aura disparu de tous les disques durs des ordinateurs […]. »
28 A. Schutz, op. cit., p. 143.
29 En fait, pour P. Ricœur, ce monde des successeurs n’est pas le pur fruit de l’imagination : il est déjà déterminé par les choix des contemporains ; P. Ricœur, op. cit., p. 207, note 3.
30 A. Schutz, loc. cit.
31 Gottfried Wilhelm Leibniz, Correspondance avec Clarke (1715-1716), présentée d’après les manuscrits originaux de Hanovre et de Londres par André Robinet, Paris, PUF, coll. « Bibliothèque de philosophie contemporaine », 1957, 3e écrit, § 4.
32 Autour du monde, op. cit., p. 11, incipit. C’est l’auteur qui souligne.
33 Ibid., p. 41.
34 Dans la foule, op. cit., incipit.
35 Autour du monde, op. cit., p. 25.
36 Ibid., p. 147.
37 Dans la foule, op. cit., p. 117-120.
38 Ibid., p. 120.
39 Autour du monde, op. cit., p. 40.
40 Ibid., p. 292.
41 Ibid., p. 359.
42 Ibid.
43 Ibid.
44 Giorgio Agamben, Qu’est-ce que le contemporain ?, leçon inaugurale du cours de philosophie théorétique en 2005-2006 à l’université IUAV de Venise, trad. Maxime Rovere, Rivages poche / Petite bibliothèque, 2008, p. 37.
Auteur
Université d’Artois, EA 4028 « Textes & Cultures », F-62030 Arras
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