Si li a coupee la trece, dont el a au cuer grant destrece1. De Part du tressage à la science du piège dans le fabliau Des Tresses
p. 239-254
Texte intégral
1Des Tresses s’est signalé très tot à l’attention de la critique littéraire. Dans sa thèse anti-orientaliste, Joseph Bédier a montré que ce fabliau anonyme dérive de formes occidentales anciennes et que le motif de la femme innocente substituée à une autre est bien représenté dans la littérature européenne2. Les « contes à rire du Moyen Age » en offrent en français une autre version, composée par un certain Garin et connue sous le titre De la Dame qui fist son Mari entendant qu’il sonjoit3, dont Des Tresses ne serait, d’après Jean Rychner, qu’un remaniement4. Les deux récits reprennent le même argument: une épouse infidèle se joue à trois reprises de son mari et détourne sa colère grâce à la complaisance d’une voisine qui dans l’histoire y laisse ses tresses. Malgré de nombreuses rencontres textuelles, des différences notables, sur des points relatifs non tant au contenu de la narration qu’à son cadre, leur confèrent toutefois une spécificité : les personnages mis en scène par Garin sont des bourgeois, alors que l’action du texte anonyme se déroule dans un milieu exclusivement courtois. Les deux contes s’opposeraient sociologique-ment, selon J. Rychner qui préfère le texte de Garin à sa variante à laquelle il reproche son manque de cohérence5.
2En dépit de ce jugement sévère, le récit présente un intérêt qui tient précisément à son caractère composite6. Si les tresses, en jeu dans l’affaire comme emblème de la féminité, sont au cœur de l’action dans le fabliau anonyme comme dans celui de Garin, seule la version « aristocratique », pour reprendre le qualificatif de J. Rychner, porte ce titre dans l’incipit et l’explicit de l’unique manuscrit conservé7. L’intitulé, qui fait des tresses un élément constitutif de la narration, invite à interroger l’écriture même du fabliau, à envisager le concept au plan esthétique et à en suivre, au fil du texte, les modulations. Mais du tressage d’un récit bien bouclé à l’art de la manipulation et au tramage du piège, des tresses de la dame à la détresse du mari, le conte pose aussi la question des relations de l’homme et de la femme pour dévoiler les pouvoirs d’une féminité inquiétante.
Les tresses et l’art du récit
3Les tresses – terme issu de la forme du latin populaire trichia signifiant proprement « corde de cheveux tressés » – désignent un type de coiffure qui implique l’art de réunir, de rassembler et d’entrecroiser. Or c’est sur le mode précis du tressage que se construit le récit où, en une savante combinatoire du deux et du trois, le motif informe le jeu des personnages et des actions et, au-delà, celui des registres narratifs et des codes culturels.
4Le trois s’impose d’emblée dans la mise en place d’un triangle érotique qui reprend non pas, comme dans le récit de Garin, la situation conventionnelle des fabliaux8, mais celle des récits courtois dont le texte répercute le style et le système de valeurs. L’influence est manifeste. Le texte s’ouvre sur une présentation du mari dont les qualités chevaleresques et sociales décalquent les mérites des héros romanesques :
Jadis avint qu’uns chevaliers
Preuz et cortois et beaus parliers
Ert saiges et bien entechiez, (v. 1-3)
5et l’intérêt qu’il porte à deux de ses montures le pousse à leur construire, près de sa propre chambre, une écurie. Centre de l’aventure, la nature du rapport qui lie le couple adultère est lui aussi conventionnelle, voire topique. Respectant l’impératif du senhal, familier à la poésie lyrique, l’amant craint les losengiers et préfère au service d’une Richeut la complicité de sa propre sœur afin que « nus ne saiche lor estre » (v. 36). La dame, elle, accepte d’honorer la requête qu’il sollicite sans en connaître l’objet, suivant le code du don contraignant et le principe, au cœur de l’idéologie courtoise, d’une jouissance qui se donne comme transgression de la loi :
Lors dit qu’il se voloit couchier
Od son seignor et ovuec lui. (v. 52-53)
6Mais le scénario romanesque et courtois bascule brutalement dans le burlesque : l’amant se trompe de côté quand il pénètre dans le lit et saisit le coude du mari endormi qui se réveille et l’attrape. Sur fond d’obscurité, la dissimulation le dispute aux coups, et la mécanique de la ruse s’enclenche dans le plus pur style des contes à rire. Profitant de l’absence de son mari parti chercher de la lumière pour couper la tête de l’homme qu’il prend pour un voleur, la dame délivre son amant et le remplace par une mule9. Ce premier stratagème autorise les deux suivants : chassée de la maison, l’épouse demande à une voisine, une bourgeoise de sa connaissance10, de se faire passer pour elle auprès du mari qui, la prenant pour sa femme, la roue de coups et lui coupe les tresses avant de la renvoyer à son tour ; revenue chez elle, la dame récupère les tresses sous l’oreiller du chevalier endormi et les échange contre la queue de son cheval préféré qu’elle a elle-même « escorté ». La duplicité de la dame génère un jeu de doubles et de dédoublements décliné en une structure ternaire, où l’humain se mêle à l’animal selon une relation de contiguïté qui n’est pas uniquement, nous y reviendrons, d’ordre spatial et matériel. Trois doublures s’immiscent dans le trio courtois pour seconder les amants, les relayer et se substituer à eux, et chacune des permutations ponctue l’action d’un récit bien mené formé de trois séquences étroitement entrelacées. Dans le huis clos de la chambre conjugale, le chassé-croisé des personnages reproduit le principe même du tressage, entendu comme coiffure, mais aussi comme danse. Dans la langue médiévale, « tresser » signifie en effet « danser la farandole », et la « tresse » y désigne une sarabande ou une ronde à laquelle les participants s’agrègent ou dont ils sortent successivement. De ce divertissement quelque peu pervers qu’est le récit, la bourgeoise aux tresses sacrifiées sera exclue, elle sera littéralement « hors de tresce », c’est-à-dire « hors de jeu » ; quant à la dame, qui mène la danse, c’est elle qui, en escourtant le cheval de son mari, va, suivant le sens médiéval de l’expression « couper queue », y mettre un terme.
7Le texte se trame donc sur des registres composites, et à ce stade de l’analyse, on pourrait voir dans la juxtaposition du milieu aristocratique et l’exploitation de situations propres à susciter le rire une volonté de l’auteur de parodier le modèle narratif courtois sous forme de plaisante comédie domestique11. Mais dans la construction en triptyque du récit, le panneau central dérange par la cruauté morale et physique qui s’expose et qui révèle, pour reprendre les termes de Dominique Boutet, « une dégradation des relations interpersonnelles » :
La dame n’hésite pas à utiliser l’une de ses amies alors qu’elle sait parfaitement à quels mauvais traitements elle l’expose ; le chevalier, initialement si courtois et équilibré, se livre à des débordements de cruauté insoupçonnés12 [...].
8Le mari met en effet ses éperons, prend la femme par les cheveux, la renverse à terre13
Et fiert des esperons granz cox
Qu’il en fait en plus de cent leus
Le sanc saillir parmi la cengle. (v. 199-201)
9La nature de la punition contraste violemment avec l’atmosphère courtoise et comique de la séquence précédente, et ce changement de manière serait, pour D. Boutet, imputable à la volonté de démonstration d’un auteur désabusé qui ne croit pas « à la solidité de la courtoisie14 ». La scène peut être commentée ainsi ; toutefois, l’interprétation ne prend pas en compte le fait qu’elle procède essentiellement d’un déplacement – la femme est traitée comme un cheval – et qu’elle participe d’une série de dédoublements que dessine encore la structure symétrique du récit.
10Dans la logique narrative, la séquence intermédiaire est une transition nécessaire : elle s’inscrit dans une action nouée par un cortège de ruses et des substitutions qui, ourlées par le motif équin, s’engendrent les unes les autres ; mais elle est aussi un pivot autour duquel s’organisent les deux autres panneaux. Le premier, clos sur la scène de la mule substituée à l’amant, repose sur une dégradation de la situation de la dame, chassée de sa demeure, le dernier, où les tresses sont remplacées par la queue, sur une reconquête de son pouvoir et sur son retour triomphal : c’est alors au mari, qui croit avoir rêvé et mutilé lui-même, dans un accès de folie, son cheval, de quitter le domicile pour partir en pèlerinage. La première et la dernière séquence entrent donc dans une relation de parfaite symétrie -reflet de la coiffure tressée qui encadre le visage de la dame – où les éléments se réfléchissent en s’inversant comme dans un miroir, et participent du système de duplication qui gouverne les relations des personnages15. Occupant une position structurante dans le conte, le panneau central est aussi le lieu exact de la réfraction où la réversibilité s’assortit de similitudes qui justifient l’interversion des deux femmes.
11Contrairement à la version de Garin où elles n’ont en commun que leur chevelure tressée16, la bourgeoise de Des Tresses est à la fois la doublure et le double parfait de la dame courtoise à laquelle « en beauté resan-bloit » (v. 164). La modification est d’importance, la similarité absolue des deux femmes, inscrite au cœur du récit, postulant, par rebond, l’équivalence de l’amant et de la mule, des tresses et de la queue, c’est-à-dire l’analogie de l’humain et de l’animal, équation favorisée par l’anonymat des personnages et le caractère anthropomorphe de bêtes unies à l’homme par une relation de familiarité17.
12Comme dans les bestiaires, l’animal est le miroir de l’homme, et leurs échanges qui rythment et tressent le récit, ainsi que le double quiproquo d’un châtiment frappant des victimes innocentes18 (la bourgeoise et le cheval) peuvent être lus comme l’expression emblématique d’un déplacement sémantique reposant sur un décalage entre le dire ou le vouloir dire et sur un dédoublement du sens. « Double sens, métaphore continuée et transposition analogique », tels sont, selon Armand Strubel, les aspects essentiels de l’allégorie dans les traités latins et dont on peut suivre les traces dans les textes rhétoriques du Moyen Age, même si « ces représentations n’y connaissent pas une égale faveur19 ». Par-delà leur rôle supplétif qui contribue au comique de situation, la mule et le cheval de Des Tresses interviennent comme instruments de sens pour doter le conte d’une dimension allégorique et parfaire le tressage de l’écriture. Les tresses constituent bien l’axe d’inflexion du texte tout entier, dans sa structure tripartite comme dans sa texture essentiellement mixte : aux tonalités romanesque et comique vient ainsi s’adjoindre un troisième registre narratif, nourri de la riche symbolique attachée aux chevaux20.
13Dans ses études sur les rapports entre l’homme et l’animal dans la culture médiévale, Jacques Voisenet a dégagé un portrait du cheval extrêmement contrasté21. Signe d’élévation et de pouvoir dans la société laïque où il est la monture des chevaliers, il s’impose aux yeux des clercs comme une image de puissance, d’orgueil et de concupiscence effrénée. Comme dans la figure du centaure où la monture représente les composantes animales de l’homme22, le cheval est une expression de l’impétuosité du désir et incarne, selon J. Voisenet, « les pécheurs et les hommes aimant la luxure et la toute-puissance de la chair23 ». Quant à la mule, son caractère hybride, sa conception « coupable » – elle est issue de l’accouplement d’un âne et d’une jument –, voire sa stérilité, jettent sur elle la suspicion :
Animal « contre-nature », né dans le désert – lieu de péché –, au temps d’Ana, arrière-petit-fils d’Esau, il reflète la lubricité et les désirs charnels qu’évoquaient tout particulièrement ses géniteurs et cela d’autant plus qu’il est lui-même le fruit d’un coït adultérin24.
14On peut reconsidérer Des Tresses à la lumière de cet éclairage symbolique et faire appel à l’allégorie pour rendre raison du troublant panneau central où la bourgeoise subit la terrible colère du chevalier qui la chevauche et lui donne des éperons. Fonctionnant comme des doubles l’un de l’autre, l’humain et l’animal se glosent parallèlement l’un l’autre, plaçant ainsi le récit sous le signe d’un déplacement continu de la signification. Soumettre la femme comme on dompte un cheval rétif, c’est dominer en elle la part animale de sa nature, tenter de tenir les rênes de sa lubricité. Lui couper les tresses, c’est appliquer la punition réservée aux femmes adultères telle qu’elle est évoquée par Tacite dans Germanie (XIX): abscisis crinibus nudatam uxorem coram propinquis expellit domo maritus ; mais c’est aussi, selon une tradition bien ancrée, mettre un frein à son appétit sexuel en la traitant comme une monture. L’opinion d’Aristote selon laquelle, « les juments, quand on leur tond le poil, prennent un air abattu et cessent de désirer le mâle25 », est reprise par Brunet Latin: « Et lor luxure, écrit-il, puet on refraindre se l’en lor roegne les crins26 », allégation plus explicite encore pour notre propos puisque la crinière tondue atteste la lubricité de la femme aux tresses et justifie la violence du chevalier.
15Le recours à la comparaison animalière, qui, dans les textes de mora-lisation ou d’exégèse, sert à valoriser ou stigmatiser un comportement dans le dessein d’apporter un enseignement, suscite un nouveau code de lecture du texte. S’il y a, selon D. Boutet, « une démonstration a fortiori », celle-ci porte moins, me semble-t-il, sur la remise en cause de « la solidité de la courtoisie » que sur une critique de la fin’amor elle-même, dénoncée per integumentum. Poser l’équivalence entre l’amant et la mule27, la dame et le cheval, c’est rabaisser l’homme au rang d’animaux esclaves de leurs désirs, c’est aussi saper les valeurs de l’amour courtois en les ravalant au niveau des simples pulsions animales, qui sont, si l’on en juge par le chapitre du Traité de l’Amour courtois d’André le Chapelain traitant de « l’amour chez les paysans », incompatibles avec le service d’Amour :
Nous disons en effet qu’il est parfaitement impossible de trouver des paysans qui servent dans la cour d’Amour ; mais ils sont tout naturellement conduits à accomplir les œuvres de Vénus comme le cheval et le mulet ainsi que le leur enseigne l’instinct de la nature28.
16Jugement spécieux sans doute pour l’auteur du fabliau qui a installé un imaginaire romanesque pour mieux décaper la courtoisie de son aura positive et en court-circuiter les lieux communs. Pour lui, derrière l’adultère des romans et des lais domine, impérieuse, la seule sensualitas, et la passion amoureuse ne recouvre que la régression de l’homme à l’état de bête. La condamnation d’une sexualité affranchie de toute contrainte et dirigée vers la seule jouissance – la recherche du plaisir pour le plaisir est d’ailleurs encore suggérée dans l’assimilation de l’amant et de la mule, animal stérile – est soutenue par la parfaite coïncidence des actions, où le vueil, le désir, rime avec le duel (v. 177-178) : c’est au moment même où le mari fait « le sanc saillir parmi la cengle », où la bourgeoise « prise est as laz » que la dame « molt pot ore [...] atendre de son ami graignor sou-laz » (v. 201-204).
17Cette conception de la fin’amor, où s’affirme une morale cléricale qui ne transige pas avec les valeurs religieuses du mariage, trouve un écho dans le tableau qu’offre le fabliau des relations conjugales, et le choix « des tresses », comme caractérisation de la dame courtoise, est à cet égard fondamental.
De la magie factice des tresses
18Dès l’Epître de Timothée (I, 2, 9), Paul condamne l’indécence des femmes et critique leur impudeur, dont les tresses sont la marque infamante :
Quant aux femmes, qu’elles aient une tenue décente, qu’elles se parent avec pudeur et modestie: ni tresses ni bijoux d’or ou perles ou toilettes somptueuses, mais qu’elles se parent de bonnes œuvres, comme il convient à des femmes qui font profession de piété.
19Et dans sa première Epître (3, 3), Pierre adresse aux femmes une invective du même ordre :
Que votre parure ne soit pas extérieure: cheveux tressés, bijoux d’or, toilettes élégantes, mais qu’elle soit la disposition cachée du cœur.
20Les Pères de l’Eglise, avec à leur tête Tertullien, souscriront à la condamnation des tresses. Dans son De cultu feminarum (De la toilette des femmes) adressé aux belles de Carthage dont il prétendait limiter l’excessive coquetterie, le tressage des cheveux, au même titre que les fards, les bijoux et les toilettes voyantes, relève de l’immundus qui s’oppose à la castitas et conduit à la prostitutio :
Nous appelons « parure » ce qu’on nomme les atours de la femme, « soins de beauté » ce qu’il faudrait appeler leur souillure. Nous inculpons l’une d’orgueil, les autres de luxure29.
21Les tresses ne sont qu’une vaniteuse auréole (ambitu capitis30) et, selon Tertullien, la manière la plus décente pour la femme de se coiffer est de ramener ses cheveux au sommet du crâne afin qu’ils recouvrent totalement, à la manière d’un voile, « cette citadelle qu’est la tête31 ».
22Au Moyen Age, le même discrédit frappe la femme aux cheveux tressés, que le tressage soit lié à l’artifice, comme dans le Roman de la Rose, où Jean de Meun se moque des dames qui portent de grosses nattes de cheveux factices qui leur font des cornes sur les oreilles :
Sus ses oreilles port teus cornes
Que cers ne bous ne unicornes,
S’il se devoient touz effronter,
Ne puist ses cornes sormonter32, (v. 13301 -13304)
23ou qu’il soit plus nettement encore diabolisé dans les recueils d’exemples moraux, comme le Ci nous dit, livre d’instruction chrétienne dont on situe la composition dans les années 1313-1330, et où il est dit en substance que les femmes qui portent des tresses « ne plaisent a nostre Segneur, et si plaisent aus anemis33 ». Les saynètes de trois chapitres illustrent ce jugement. Saint Bernard refuse d’accueillir sa propre sœur dont les tresses sont « un trebucheit au deable et une raiz pour prendre musars34 » ; saint Jérôme sauve du péché « une cointe fame qui avoit .II deables sus ses traices35 » ; la Vierge interdit à une femme de pénétrer dans l’église de Rocamadour tant qu’elle ne se décide pas à « oster ses traices », car « s’en sont plus laides et plus ordes que traices a fames36. »
24C’est à l’aune de ces considérations concordantes, expression d’un pessimisme clérical puisé chez les Pères de l’Eglise, que doit être jaugée l’héroïne du fabliau, dont les tresses dénoncent la vraie nature en signalant ses penchants lubriques et sa duplicité. A l’instar de sa coiffure où l’art s’unit à l’artifice, la dame appartient à la lignée des filles d’Eve, cause de la chute et instrument du Mal. Et la frontière étant mince entre l’operose, qui ressortit pour Tertullien au diabolique37, et la magie, son image se confond à bien des égards avec celle des magiciennes dont les traits sont fixés en la figure de la déesse de la lune noire et des ténèbres, Hécate. Bien qu’elle ne possède pas de légende proprement dite, Hécate est caractérisée par ses fonctions et ses attributs. Des traditions tardives font d’elle la divinité présidant à la magie et aux enchantements, la mère de la sorcellerie – elle aurait pour fille Circé –, et Hésiode voit en elle la patronne des cavaliers, la maîtresse de la folie, du somnambulisme et des rêves38.
25Hécate n’est pas, à ma connaissance, représentée ou citée dans les textes vernaculaires médiévaux, mais il est incontestable que bien des traits du récit sont polarisés en la déesse, depuis le motif équin jusqu’aux angoisses nocturnes liées à l’apparition de fantômes et au pouvoir quasi magique de la dame. Telle Circé aux beaux cheveux, la meretrix qui métamorphose en porcs ou en ânes les compagnons d’Ulysse et mue, suivant la conception cléricale médiévale, l’homme en animal39, elle a assurément la puissance de transformer son amant en mule ; et à la bourgeoise qui déplore la perte de ses tresses, elle promet de réparer le préjudice grâce à un savoir-faire surnaturel40 :
Mais la dame jure et afiche
Qu’a toz jorz mais la fera riche,
Ne ja douter ne li estuet
Des tresces, se trover les puet,
Que si bien ne li mete el chief
Que ja n’en savra le meschief
N’ome ne feme qui la voie. (v. 237-243)
26Enfin, déployant les armes d’une féminité ensorcelante, elle réussit à changer les tresses de la bourgeoise en queue de cheval41 et, surtout, sous couvert d’une compassion feinte, à faire croire à son mari qu’il a rêvé et a été la victime d’un mauvais sort :
Tant est dolenz et abosmez
Que il cuide estre enfantomez ;
Et si est il, n’en doutez mie. (v. 395-397)
27Le terme enfantomez, dont l’auteur souligne lui-même la pertinence d’emploi, donne au motif des tresses son ultime cohérence, lors de la scène de la découverte de la queue qui rassemble, sous forme de synthèse, les fils entrelacés de l’adultère, des interversions et de la ruse pour les nouer définitivement. Contrairement à la spirale, motif ouvert et optimiste, la tresse est un symbole d’involution, car l’art du tressage s’oriente nécessairement vers une finalité inquiétante, celle du nœud, du lien, qui fait tenir ensemble les trois composantes rassemblées. Or enfan-tomer, c’est-à-dire ensorceler, c’est précisément lier, et nombreux sont les exemples de magiciennes qui tressent et nouent des fils, des cheveux ou encore des crins de cheval pour s’approprier l’autre, capter sa force et le réduire à l’impuissance et à la mort42.
Les tresses et la détresse
28Dans le fabliau, l’union à la rime de trece et de destrece, déverbal de destreindre, issu de distringere signifiant étymologiquement « serrer, étrangler », confirme les propriétés mortifères du tressage :
Si li a coupee la treces,
Dont el a au cuer grant destrece (v. 227-228)
29Ce qui s’applique ici à la bourgeoise, affligée par la perte de sa toison et « pris as laz » de la dame dont elle a accepté d’être la doublure, vaut aussi pour le mari. Victime du réseau étroit des relations familiales qui protègent les amants, paralysé par les trois lacets du piège tramé autour de lui, le chevalier doit se soumettre à la loi de la dame aux tresses, et sa capitulation est metaphorisée par la queue coupée qu’il découvre, à la place des cheveux, sous l’oreiller. L’environnement anatomique, ainsi que le transfert de sens argotique qui confond en de nombreuses langues la queue et le pénis, confère au verbe « escorter » un tout autre sens, étayé par le lien de compagnonnage, voire la relation amoureuse, qui unit le chevalier à sa monture43. La queue du cheval répond aux tresses de la bourgeoise – couple soudé par un statut de victime –, la protubérance d’arrière à la protubérance d’avant, la virilité à la féminité, pour dire, suivant Henri Rey-Flaud qui a étudié ce fabliau dans une perspective psychanalytique, « l’ineffable de la castration en des termes qui excèdent toutes les références d’école44. »
30En frappant celle qu’il prend pour sa femme comme un cheval, le mari pense l’avoir « à sa main », en lui coupant les tresses, il croit la posséder ; en les plaçant sous son oreiller, il espère pouvoir « dormir sur ses deux oreilles ». Pourtant, s’il a pour lui la force, s’il sait user de l’épée et de la lame, quand il coupe – et il coupe court –, il coupe à tort, et toutes ses qualités viriles, sur lesquelles s’appesantissait l’auteur, ne sont rien face aux subtiles manigances de la dame. Pour la dominer à son tour et combattre le sortilège, il lui faudrait user lui-même des armes de la féminité, lui opposer, par exemple, un autre lien, celui de ce don contraignant, ce lacs d’amour – nœud de toute l’intrigue – qui unit les amants45 ; il lui faudrait surtout enfermer sa femme, car « quant el est hors de sa maison, lors a ele droite achoison qu’ele face son mari honte » (v. 431-433). Telle est la morale du fabliau, toute résonnante des conseils de saint Pierre, pour qui l’épouse doit rester chez elle, « manus lanis occupate, pedes domi figite » (Epître I, 3, 1). Mais, quelle que soit sa forme, la « castration » de la dame, prix à payer par le mari pour connaître la tranquillité, n’est qu’une illusion. En un geste spectaculaire, elle offre à son époux, une fois ses vêtements et sa coiffe retirés, un corps et une chevelure intacts, où les tresses, impossibles à trancher, « témoignent, écrit H. Rey-Flaud, qu’une femme n’est jamais coupable46 » :
Maintenant la coiffe deslace,
Si a les tresces avant traites
Qu’il i cuidoit avoir forstraites.
« Sire, fait la dame, veez ! »
[...]
Son seignor de ce se merveille
Et si s’esbahist et vermeille,
Lor lieve sa mein, si se saigne.
[...]
Maintenant le coissin sozlieve,
Mais a poi li cuers ne li crieve,
Quant il a trovee la queue. (v. 352-385)
31Les tresses ont accompli leur œuvre funeste ; le chevalier « de grant renom » qui « ot sen et proesce » n’est plus qu’un être « dolenz et abos-mez », réduit aux larmes : « Lors li véîssiez contreval,/ Les lermes couler sor la face » (v. 392-393). Ce portrait du mari abîmé dans la douleur rappelle les paroles du Psaume CXVI (3-4) :
Les liens de la mort m’ont enserré, les entraves des enfers m’ont saisi ; j’étais saisi par la détresse et la douleur47.
32Pour conjurer les fantômes, le chevalier devra partir à Vendôme – les deux mots entrent en séquence à la rime –, pour renaître, il n’aura d’autre recours que de prier la Sainte-Larme que le Christ versa pour la résurrection de Lazare. La dame a reconquis sa place et gagné en autorité sur un mari captif des apparences et définitivement abusé par un univers où le vrai et le faux sont intervertis. Elle reste la seule garante du voir, au sens médiéval du terme, c’est-à-dire de la vue, qu’elle engage son mari à recouvrer, et de la vérité.
33Une femme toute-puissante, qui excelle dans l’art de la manipulation et l’herméneutique des signes, face à un époux aveuglé par les faux-semblants, ce schéma sur lequel se ferme le récit réactualise le triangle courtois installé dès l’ouverture, suivant une boucle parfaitement nouée qui ferait de l’histoire des tresses le miroir grossissant de nombreuses situations romanesques où le mari ignore, au prix de la plus totale invraisemblance, la liaison de son épouse avec un chevalier. Même s’il n’est pas question de faire de ce fabliau la parodie d’un roman courtois, le texte est, à bien des égards, irrigué par la veine tris-tanienne. Iseut la blonde, Iseut la guivre, fille d’une reine magicienne, pourrait être le modèle de la femme aux tresses, quand, trompant le roi « aux oreilles de cheval », elle se fait remplacer par sa servante dans le lit nuptial et qu’elle accueille Tristan dans la couche royale. Ou encore, quand après avoir transformé son amant en monture lors de l’épisode du Mal Pas,
« Ne vuel mes dras enpalüer :
Asne seras de moi porter
Tot souavet par sus la planche48. » (v. 3917-3919)
34elle manipule les signes pour échapper au châtiment et s’offrir pure et innocente aux regards de Marc et de la cour arthurienne.
35Des Tresses reprend bien les motifs essentiels des fabliaux que sont la ruse et l’adultère49, mais ils sont travaillés par un arrière-plan romanesque qui, loin d’être artificiel ou incohérent, réoriente et approfondit la portée d’un récit corrélé à l’idéologie de la fin’amor dont il mine les valeurs. L’art de la coiffure recoupe ainsi celui du conte où l’entrecroisement des écritures contribue à sa cohérence et où les strates de sens et de lectures se superposent et se croisent pour lui faire acquérir une réelle profondeur. Romaine Wolf-Bonvin a montré qu’écrire est une activité de tisserand, de couturier et de teinturier50 ; le fabliau nous prouve que c’est aussi tresser des fils différents, et la femme aux tresses, principe et nœud du récit, sous-tend la relation de l’écrivain à la création et permet précisément à l’écriture de se déployer. Mais derrière un mode de composition, qu’alimentent les concepts de tressage, d’artifice et de ruse, affleurent l’inquiétude et les fantasmes de l’auteur, vraisemblablement un clerc, devant les pouvoirs d’une féminité impossible à maîtriser. Qu’elle soit héroïne de roman ou de fabliau, la femme est toujours une sorcière qui sait changer l’homme en bête, conversion où s’opère la chute des âmes attirées par la séduction factice de la chevelure, arme de la femme et instrument de mort.
Notes de bas de page
1 La citation-titre est tirée de Des Tresses (v. 227-228), dont l’édition de référence est celle de Willem Noomen et Nico Van Den Boogaard, Nouveau recueil complet des Fabliaux (NRCF), 1988, Van Gorcum, Assen, Maastricht, Pays-Bas. Le fabliau y porte le numéro 69, dans le volume VI, p. 207-258. Le texte a été édité et traduit par Jean Dufournet dans Fabliaux du Moyen Age, Paris, GF Flammarion, 1998, p. 288-311. Comme le fait remarquer J. Dufournet, le ms., qui fait rimer treces (au pluriel) et destrece, présente une rime imparfaite, voir note 227. Le pluriel les treces a été corrigé en la trece dans le NRCF.
2 Joseph Bédier, Les Fabliaux, Etude de littérature populaire et d’histoire littéraire du Moyen Age, Paris, Champion, 1969, sixième édition, ch. VI, « Monographie des fabliaux qui se retrouvent sous forme orientale. Les formes orientales sont-elles les formes-mères ?», p. 164-199.
3 Il existe deux mss de cette version, mais seul le manuscrit B est attribué à Garin, le manuscrit X est anonyme. Voir l’introduction du NRCF, op. cit., p. 209-214. Elle est éditée dans le NRCF avec le fabliau Des Tresses. Pour une étude du texte de Garin, voir Yasmina Foehr-Janssens, « » Contes et songes de bonnes femmes ». Les fabliaux et l’insignifiance des rêves », « Ce est li puis selonc la letre », Mélanges offerts à Charles Méla, Paris, Champion, 2002, p. 305-322.
4 Jean Rychner, Contribution à l’étude des fabliaux. Variantes, remaniements, dégradations, Neuchâtel-Genève, Droz, 1960, t. 1, p. 96-98.
5 Ibid., t. 1, p. 96-98 et t. 2, p. 136-148 ; et J. Du Val, « « Les Tresces »: Semi-Tragical Fabliau, Critique and Translation », Publications of the Missouri Philological Association 3, 1979, p. 7-16.
6 L’appréciation de Jean Rychner est nuancée par Philippe Ménard. Voir Ph. Ménard, Fabliaux français du Moyen Age, I, Genève, Droz, 1979, p. 95-108.
7 Il s’agit du ms. D : Paris, BnF, fr. 19152, f° 122b-123f. La leçon du ms. X donne : « Explicit des vilains et commence le fabliau des treces ».
8 Sur la mise en scène de situations triangulaires dans les fabliaux, voir Philippe Ménard, Les fabliaux, contes à rire du Moyen Age, Paris, PUF, 1983, p. 14-27.
9 Il s’agit d’une génisse dans le fabliau de Garin, voir De la Dame qui fist..., NRCF, op. cit., v. 83.
10 Ibid., v. 126. Dans le récit de Garin, la bourgeoise est une amie de l’épouse infidèle.
11 Sur le style parodique des fabliaux, voir la mise au point de Dominique Boutet, Les Fabliaux, Paris, PUT, Etudes littéraires, 1985, p. 45-63.
12 Ibid., p. 53.
13 La violence du bourgeois dans la version de Garin est plus mesurée: le mari utilise pour battre l’amie de sa femme un bâton. Voir De la Dame qui fist..., NRCF, op. cit., v. 151-167.
14 D. Boutet, Les Fabliaux, op. cit., p. 53.
15 Pour Gilbert Durand, « la chevelure est liée au miroir dans toute l’iconographie des « toilettes » de déesses ou de simples mortelles. » Gilbert Durand, Structures anthropologiques de l’imaginaire, Paris, Bordas, 1969, p. 109.
16 Voir De la Dame qui fist..., NRCF, op. cit.: « Lors la saisi par les cheveus/Que ele avoit luisanz et sors/Tout autresi comme fins ors :/ Le chief sa fame resambloit. » (v. 159-162).
17 L’équation reste pertinente pour la tresse et la queue : « Les crins des queues de cheval, trouve-t-on sous la plume de Jamblique, sont entrelacés comme les tresses des femmes, tissés et fortement noués sur toute la longueur de rubans pourpres et multicolores ». Jamblique, Fragment 5.
18 L’auteur insiste sur ce point en citant à l’appui un proverbe: « Que tel ne pesche qui encort », v. 268.
19 Armand Strubel, Allégorie et littérature au Moyen Age, Paris, Champion, 2002, p. 20-23. Sur la conception de l’écriture allégorique, voir en particulier le chapitre 1.
20 Selon Armand Strubel, « l’opposition entre « symbole » et « allégorie » est inconnue du Moyen Age ». Ibid., p. 19.
21 Outre les travaux de Jacques Voisenet, voir le volume des communications présentées au dix-septième colloque du cuer ma, Le Cheval dans le monde médiéval, Senefiance n° 32, 1992, en particulier l’article de Denis Hue, « L’orgueil du cheval », p. 257-275.
22 Sur la figure du centaure, voir l’article de Sébastien Douchet, « La peau du Centaure : à la frontière de l’humanité et de l’animalité », Colloque International sur la peau humaine, le corps et ses représentations de l’Antiquité aux temps modernes, Lausanne, novembre 2002, à paraître dans Micrologus.
23 Jacques Voisenet, Bêtes et hommes dans le monde médiéval. Le bestiaire des clercs du ve au xiie siècle, Turnhout, Brepols, 2000, p. 42.
24 Ibid., p. 48.
25 Aristote, Histoire des animaux, nouvelle traduction avec introduction, notes et index par Jules Tricot, Paris, Vrin, 1987, VI, 18 (572 b).
26 Brunetto Latini, Li Livres dou Tresor, édition critique par Francis J. Carmody, University of California Press, Berkeley and Los Angeles, 1948, 1. 1, ch. CLXXXVI, p. 163-164, ici, p. 163.
27 Dans un évangile apocryphe qui a subi l’influence des Métamorphoses d’Apulée, la Vierge rend sa dignité à un jeune homme transformé en mulet. Voir J. Voisenet, Bestiaire chrétien : l’imagerie animale des auteurs du Haut Moyen Age (ve-xie siècles), préface de Pierre Bonnassie, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail, 1994, p. 96.
28 André le Chapelain, Traité de l’Amour courtois, introduction, traduction et notes par Claude Buridant, Paris, Klincksieck, 1974, p. 148. Peut-être y a-t-il ici, comme le rappelle J. J. Parry, un souvenir de Tobie (VI, 16) : note n° 130 de Cl. Buridant, p. 247. « Et l’ange Gabriel lui dit : « Ecoute-moi, et je t’apprendrai qui sont ceux sur lesquels le démon a du pouvoir. Ce sont ceux qui entrent dans le mariage en bannissant Dieu de leur cœur et de leur pensée pour se livrer à leur passion, comme le cheval et le mulet qui n’ont point de raison. »
29 Tertullien, De cultu feminarum, introduction, texte critique, traduction et commentaires de Marie Turcan, Paris, Cerf (Sources chrétiennes), 1971, I, 4, 2 ; ici p. 63. Les soins de beauté sont du domaine de l’ornatus, plus dangereux que le cultus: « Alteri ambitionis crimen intendimus, alteri prostitutionibus ». Tertullien se rappelle peut-être le conseil d’Ovide dans l’Art d’aimer, pour qui l’art de se coiffer est plus efficace pour séduire les hommes que la richesse des vêtements et le poids des bijoux. « C’est la simple élégance qui nous charme. Que votre coiffure ne soit pas en désordre. Les mains [de la coiffeuse] augmentent la beauté ou la retirent ». Ovide, Artis amatoriœ, texte établi et traduit par Henri Bornecque, Paris, Les Belles Lettres, 1951, III, v. 129-157.
30 Tertullien, De virginibus velandis (Le voile des vierges), introduction et commentaire par Eva Schulz-Flügel, traduction de Paul Mattei, Paris, Cerf (Sources chrétiennes), 1997, II, 7, 3.
31 Ibid., VII, 8-9.
32 Le Roman de la Rose, édition d’après les manuscrits BN 12786 et BN 378, traduction, présentation et notes par Armand Strubel, Paris, Lettres Gothiques, 1992. A la fin du xiiie siècle, les femmes portaient leurs nattes très haut de chaque côté de leur tête et y ajoutaient des postiches. Sur le regard ironique porté par Jean de Meun sur les coiffures extravagantes de son temps, voir la note 1, p. 781.
33 Ci nous dit. Recueil d’exemples moraux, publié par Gérard Blangez, Paris, SATF, 1979 (t. 1) et 1986 (t. 2).
34 Ibid., chapitre 232, t. 1, p. 204-205.
35 Ibid., chapitre 236, p. 208.
36 Ibid., chapitre 238, p. 209.
37 Quod nascitur opus Dei est. Ergo quod infingitur diaboli negotium est. (« Ce qui est naturel est l’œuvre de Dieu, ce qui est factice est donc l’affaire du diable »). Tertullien, De cultu feminarum, op. cit., II, 5, 4, p. 113.
38 Hécate est la femme à trois corps, qui présente deux aspects opposés : l’un bienveillant et bienfaisant ; l’autre redoutable et infernal. Le double se combine avec le trio, établissant une fois encore un lien entre le récit et son thème et les schèmes imaginaires qui en élaborent le sens profond. Figure fortement hippomorphe, elle est souvent représentée sous l’apparence d’une jument. Voir Pierre Grimai, Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Paris, PUF, 1986, article « Hécate », p. 176 ; voir aussi G. Durand, Structures anthropologiques..., op. cit., p. 80-81.
39 Sur la figure de Circé au Moyen Age, voir Romaine Wolf-Bonvin, Textus. De la tradition latine à l’esthétique du roman médiéval. « Le Bel Inconnu, Amadas et Ydoine », Paris, Champion, 1998, p. 85, note 62.
40 Rien de tel dans le fabliau de Garin où la bourgeoise a accepté de remplacer l’épouse pour de l’argent. Voir De la Dame qui fist..., NRCF, op. cit., v. 127-140.
41 L’expression « queue de cheval » ne désigne pas, me semble-t-il, une coiffure dans la langue médiévale. C’est pourtant, selon Ovide, les cheveux « noués par-derrière » que la déesse Diane, « poursuit le gibier effrayé ». Ovide, Ars amatoriœ, op. cit., v. 143-144.
42 Sur le symbolisme des nœuds, voir Georges Dumézil, Mythes et Dieux des Germains, Paris, 1939, p. 21-30, et Mircea Eliade, Images et symboles. Essais sur le symbolisme magico-religieux, avant-propos de Georges Dumézil, Paris, Gallimard, 1980, en particulier le chapitre III, « Le « Dieu lieur » et le symbolisme des nœuds », p. 120-163.
43 Voir Georges Dumézil, Fêtes romaines d’été et d’automne, Paris, NRF Gallimard, 1975, p. 181.
44 Le paragraphe suivant doit beaucoup à l’étude d’Henri Rey-Flaud, « De celle qui voua son mari à Vendôme », Figures du féminin, Dires, Revue du Centre freudien de Montpellier, n° 2, janvier 84, p. 1-11 ; ici, p. 1.
45 Sur le don contraignant, voir Jean Frappier, « Le motif du don contraignant dans la littérature du Moyen Age, Amour courtois et Table ronde, Genève, Droz, 1973, p. 225-264.
46 « Le champ de la partie c’est le corps de la femme. Or, nous dit le texte, ce corps n’existe pas, il est toujours l’échappée belle et, dans l’amour, la prise des corps n’est que méprise de la femme. » Ibid., p. 6.
47 Voir aussi le Psaume XVIII, 6 ; Samuel, 2, XXII, 6 ; Osée, VII, 12 ; Ezéchiel: XII, 13 ; XVII, 26 ; XXIII, 3 ; Luc : XIII, 16.
48 Béroul, Le Roman de Tristan. Poème du xiie siècle, édité par Ernest Muret, 4e édition revue par L. M. Defourques, Paris, Champion, 1982.
49 Dans La dame qui fist trois tors entor le moustier de Rutebeuf, le proverbe cité en exergue pourrait s’appliquer à l’histoire de Des Tresses : « Cil qui fame veut justicier/Chascun jor la puet combrisier,/ Et l’endemain rest toute saine/Por resoufrir autretel paine ». NRCF, op. cit., n° 54, vol. V.
50 Romaine Wolf-Bonvin, Textus..., op. cit.
Auteur
Université Paul-Valéry – Montpellier III
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