Aimer et être aimé : le chemin de la conversion dans quelques textes du xive et du xve siècle
p. 203-218
Texte intégral
1Eshalcier la crestienté, briser les idoles païennes et convertir les Sarrasins de gré ou de force, tels sont les enjeux des combats qui – dans la plupart des chansons de geste – opposent les chevaliers occidentaux aux Infidèles. Deux univers antagonistes s’affrontent dans les textes épiques : celui de la chrétienté et celui du monde païen. Chacun des deux défend ses croyances et lutte pour sa foi ; chacun pense que le droit est de son côté et que le tort est chez l’adversaire. Cette certitude domine toutes les chansons de geste et justifie pleinement l’alternative qui est proposée aux combattants chrétiens : exterminer ou convertir les Sarrasins après les avoir vaincus militairement.
2Le motif de la conversion des païens apparaît dès les premières chansons de geste – la Chanson de Roland en est une preuve admirable – et ne cesse de se développer ensuite dans les épopées du xiie et xiiie siècle qui entraînent leurs héros tantôt au-delà des Pyrénées, tantôt de l’autre côté de la mer, vers les royaumes sarrasins. Partageant alors l’idéologie qui sous-tend les chroniques et la littérature de croisade qui se multiplie à cette époque, les textes épiques1 consacrent de nombreuses séquences à la façon dont se convertissent les païens et aux motivations qui les poussent à renier leurs dieux pour croire à celui des chrétiens. Le plus souvent c’est par la force que la conversion s’impose à eux : quand la cité qu’ils défendent est prise, quand ils sont défaits au combat et qu’ils risquent la mort2, leur seul recours est d’accepter les exigences de leurs vainqueurs et de se laisser conduire au baptistère. Il est difficile de croire à un mouvement sincère de la part des convertis dans ces conditions. Est-ce par pure stratégie ou par prudence que Marsile se soumet aux volontés de Charlemagne et s’apprête non seulement à lui faire hommage, mais à devenir chrétien ? La conversion n’est plus alors qu’un acte politique et un moyen de survie plutôt qu’une reconnaissance implicite qu’un Dieu plus puissant que ceux des païens existe.
3Dans ces textes épiques les conversions spontanées, nées d’une adhésion sincère à la religion chrétienne, sont rares. Le cas de la reine Bramidoine, l’épouse de Marsile, reste exceptionnel et exemplaire. Charlemagne veut pour elle une conversion venue du cœur, par amur (Chanson de Roland, v. 3674) et non pas obtenue par la menace. Seule parmi tous les païens, elle accède à la conversion par veire conoisance (Chanson de Roland, v. 3987) après avoir entendu sermons et récits édifiants et après avoir été instruite des valeurs et des dogmes de la religion chrétienne. C’est elle qui réclame le baptême et sous le nouveau nom de Julienne elle devient chrétienne et sauve ainsi son âme3. C’est avec ce personnage que le motif de la Sarrasine qui accepte de se convertir entre dans la littérature épique, mais rapidement celui-ci a été associé, de façon presque systématique, à un autre motif, plus léger et d’une tonalité plus romanesque : celui de la jeune Sarrasine qui, amoureuse d’un chevalier chrétien, se convertit pour plaire à celui qu’elle aime et obtenir son amour et ses baisers. La conversion est alors suscitée par un désir charnel et un attachement très humain. Les auteurs ne semblent pas s’offusquer d’un tel amalgame entre la foi envers Dieu et l’amour pour une créature de Dieu. Ils privilégient au contraire ce type de développement, faisant sourire des faiblesses humaines et du pouvoir de l’amour. Le monde violent des guerres que se font les hommes est alors – pendant quelques épisodes du moins – relégué au second plan et la chanson de geste se fait soudain moins grave, se pare de scènes souriantes ou émouvantes.
4L’analyse la plus courante – et qui est sans aucun doute exacte – consiste à souligner qu’au xiie, puis au xiiie siècle les romans se multiplient et que leur influence se fait sentir sur les autres genres littéraires. La femme et l’amour prennent ainsi une place de plus en plus grande dans les épopées et la rencontre entre les deux univers traditionnellement antagonistes dans ces textes est alors renouvelée de façon plaisante lorsque les jeunes païennes posent les yeux sur les chevaliers chrétiens et laissent parler leur cœur. Ces Sarrasines – souvent de naissance noble – plus ou moins touchantes, toujours attachantes et séduisantes sont nombreuses. Sincères ou rusées, rarement timides, parfois audacieuses, voire cyniques elles donnent à ces textes épiques une couleur romanesque indéniable. Jeunes filles sans expérience de l’amour ou jeunes femmes mariées, elles ont en commun d’être attirées par un homme qui devrait être leur adversaire et qu’elles devraient en toute logique repousser et détester puisqu’il appartient au monde ennemi, celui de la chrétienté. Or, victimes de leur cœur, elles ne songent qu’à aimer cet homme et à lui venir en aide ; pour lui elles sont prêtes à trahir leur famille, leur pays, à renoncer à leur religion et à mettre en péril le monde sarrasin. Par voie de conséquence le sort du jeune chrétien qu’elles aiment est bouleversé. Le héros échappe grâce à cet amour aux périls qui sont en général réservés à un chrétien à partir du moment où il tombe au pouvoir des Sarrasins : emprisonnements, tortures, mort infâmante. La jeune femme n’a de cesse d’aider le jeune homme qu’elle aime : Orable aide Guillaume dans La Prise d’Orange, Floripas aide Gui de Bourgogne dans Fierabras, Esclarmonde aide Huon dans Huon de Bordeaux et bien d’autres héroïnes en font autant.
5Mais en acceptant l’aide de la jeune Sarrasine et en répondant à ses avances, parfois même en lui portant en retour un véritable amour, le héros chrétien ne succombe-t-il pas à une tentation terrible, voire diabolique ? Peut-il y échapper ? La femme demeure en effet l’une des séductions, l’un des leurres que la païennie présente au monde occidental. Est-ce à dire aussi que la rencontre amoureuse des chrétiens et des Sarrasines (parfois des chrétiennes et des Sarrasins4) permet de gommer et d’oublier, le temps d’une aventure, la tension qui en principe caractérise dans la littérature épique la confrontation entre ces deux mondes traditionnellement en guerre ?
6En tout cas le motif de la jeune Sarrasine qui se convertit par amour pour un chrétien perdure et s’amplifie alors même que le genre épique au cours des siècles subit une nette évolution : déjà bien représenté dans les épopées du xiie siècle et du début du xiiie comme celles du cycle de Guillaume d’Orange, on le retrouve dans les chansons de geste dites « tardives », en particulier dans celles qui se situent dans un contexte de croisade ou qui ont pour cadre le royaume de Jérusalem. C’est le cas par exemple du Bâtard de Bouillon5, l’une des plus anciennes chansons du Deuxième Cycle de la Croisade qui, dans une trame souvent romancée, développe longuement les différents types de conversion possibles. Le motif de la conversion par amour demeure présent aussi dans les réécritures épiques de la fin du Moyen Age qui tout en se rattachant à la tradition des épopées antérieures ne craignent pas de s’ouvrir à un véritable mélange des genres. Il se retrouve également dans certaines mises en prose – que leur source soit épique ou non. Au cours du xve siècle elles se multiplient et deviennent de véritables romans d’aventure, tout particulièrement lorsque la narration se passe dans les royaumes d’outre-mer, comme par exemple dans La Fille du Comte de Ponthieu6 et dans le roman de Gillion de Trazegnies7.
7Nous nous contenterons ici d’esquisser quelques remarques sur la survie de ce motif épique jusqu’à la fin du xve siècle, mais sans nous attarder sur le portrait de ces jeunes femmes ou sur les sentiments qui les troublent. En effet sur la peinture des mouvements qui bouleversent le cœur des princesses sarrasines, sur la sensualité de ces belles amoureuses8, bien des études ont été menées avec talent ces dernières années. D’Orable dans La Prise d’Orange9 à Floripas dans Fierabras10, d’Esclarmonde dans Huon de Bordeaux11 à Malatrie dans le Siège de Barbastre ou Nubie dans La Prise de Cordres, ces jeunes païennes prêtes à vivre leur amour avec un chevalier chrétien ont été souvent dépeintes12. Les émotions, les souffrances, les hésitations, mais aussi les désirs, les rêves et les audaces de ces héroïnes ont été souvent analysés et décrits. Quant à l’écriture épique, elle a intégré ces épisodes où l’amour prend le devant du récit et marque de romanesque le comportement de ces personnages13.
8Tous les traits évoqués dans ces études se retrouvent dans les chansons de geste tardives. Un exemple nous permettra de mesurer cependant la liberté que certains auteurs pouvaient prendre avec ce motif : Le Bâtard de Bouillon le traite abondamment et de façon originale. Le personnage de Sinamonde, sœur de cinq rois frères et princes sarrasins – Saudoine, Esclamar, Marbrun, Taillefer et Ector – fait partie de ces princesses païennes qui, en entendant l’éloge d’un héros chrétien, ici Baudouin, roi de Jérusalem, en devient immédiatement amoureuse sans jamais l’avoir vu. L’ »amour de loin » nourrit les rêves et les désirs de ces jeunes femmes. Comme les héroïnes des romans, Sinamonde connaît alors tous les symptômes de la maladie d’amour : changeant de couleur, perdant le sommeil, elle frémit et tressaut et fretelle quefoeille au vent de bise (v. 1267) ou tremble confoeille d’aiglentier (v. 1303). Elle cherche sans la trouver une herbe pour obtenir la guérison, en appelle à Mahomet pour qu’il lui vienne en aide, mais en vain. Elle demeure soumise à cette fatalité qui la pousse vers celui que le destin lui a désigné. Que cet homme soit un chrétien c’est une variante proposée par l’épopée, un obstacle de plus à surmonter pour trouver le bonheur et une façon habile, bien que dénuée de tout fondement historique, de rapprocher deux êtres appartenant à deux mondes ennemis.
9Les textes soulignent l’enjeu et le difficile choix qui s’offre à la jeune Sarrasine : trahir la foi dans laquelle elle a été élevée ou renoncer à son amour. La première réponse est d’ordre religieux : le jeune homme qui lui plaît – parce qu’il est de religion chrétienne – reste un amour impossible. Le frère de Sinamonde répète que sa sœur pourrait aimer Baudouin, ce roi chrétien paré de tant de qualités, s’il croyait en Mahomet :
« Pleüst a Mahommet qui fait le rose en may
Que li roys Baudouin eüst le sien cuer vrai
Et amast Mahommet otant que je ferai,
Si vausist espouser vostre corps noble et gay,
Car nous en vaurriens miex, c’est ce que je bien sai. »
(v. 1320-1324)
10La jeune fille convient elle-même du bien-fondé des propos de son frère et fait passer sa fidélité à sa foi avant son amour :
« Sire », dist Sinamonde, « ja ne l’espouserai
S’il ne renoie Dieu, c’onkes jour ne amai ;
Mais se Mahom voeilt croire, volentier l’amerai. »
(v. 1325-1327)
11Quant au jeune chrétien il est de son côté également soumis à un choix : devenir païen ou renoncer à posséder la belle Sinamonde. Là encore c’est le frère de celle-ci qui expose à Baudouin ce qui est mis en balance, d’un côté son amour et l’aboutissement de son désir, de l’autre sa conversion :
« Se renoier volés Jhesuscris et sa crois,
Vous averés son corps qui est et biaus et drois. »
(v. 1590-1591)
12Cependant l’auteur de la chanson multiplie les épisodes où Baudouin et Synamonde, en dépit des divergences religieuses qui les séparent, se rencontrent, se regardent et se plaisent. La trame narrative semble conçue pour démontrer que l’amour est finalement plus fort que tout ce qui les oppose. La jeune Sinamonde, profondément éprise du roi chrétien, oublie ses premières résolutions et sa fidélité envers Mahomet. De nuit elle ose rejoindre Baudouin en cachette dans sa chambre. La scène où elle se glisse dans son lit et le réveille en se blottissant contre lui est plaisante et conforme à une certaine tradition littéraire. En effet, les textes, aussi bien épiques que romanesques, s’amusent souvent à montrer des jeunes filles qui prennent l’initiative des rencontres, des baisers et des caresses14 et qui par amour sont capables de bien des audaces. La mise en scène est joliment conçue ; un jeu subtil sur les comportements des deux personnages est proposé. La tentation est grande alors pour le chrétien. Va-t-il y succomber ? Ses gestes démentent ses paroles. Il attire la dame dans ses bras : « a. ij. bras l’acola, a lui le va tirer » (v. 2564) et la serre tendrement contre lui tout en disant : « Dame, de chi vous faut partir et dessevrer » (v. 2566).
13Baudouin a deux bonnes raisons pour repousser la jeune fille qui s’offre à lui et pour résister à sa séduction : la première c’est qu’il est déjà marié, la seconde, c’est que Sinamonde est sarrasine. C’est cette deuxième raison qui est mise en avant par le récit :
« Je ne puis par. ij. poins ma pensee akiever :
Premiers, par mariage, que je ne doy fausser ;
Après, pour chou, ma dame, que ne doi abiter
A dame sarrasine ; de vous me faut garder,
Si vous prie pour Dieu, ne m’en voeilliés tenter,
Car j’ameroie miex c’on me noiast en mer
Ou c’on fesist mon chef detrenchier et coper,
Qu’a dame sarrasine vaussisse amour monstrer. »
(v. 2568-2574)
14Le texte se réfère là à la réalité : la religion chrétienne interdit aux croyants d’épouser, d’embrasser, à plus forte raison d’avoir des relations sexuelles avec une païenne tant qu’elle ne s’est pas convertie. La narration s’appuie sur cet interdit et si la scène développée dans Le Bâtard de Bouillon fait sourire, elle a aussi le mérite de reprendre le motif de la conversion immédiate par amour et tous les problèmes de vraisemblance qui s’y rattachent15. Les chrétiens n’ont pas le droit d’aimer les sarrasines, mais les auteurs se plaisent à placer leurs héros dans des situations où la tentation est bien forte. Baudouin ne peut aimer Sinamonde parce qu’elle croit en Mahomet. Qu’à cela ne tienne, la jeune Sarrasine, prête à tout pour le séduire, oublie sa détermination de ne jamais avoir une aventure amoureuse avec un chrétien. Elle renonce sans attendre à la religion sarrasine et affirme qu’elle choisit désormais de croire au dieu des chrétiens, assimilant l’amour de Dieu à celui de sa créature :
« Sire, dist la royne, tout che laissiés ester.
Pas ne sui sarrasine, ch’est legier a prouver,
Car je croi en Jhesu, qui se laissa pener
En le saintisme crois, et perchier et cloer,
Et en le douche Vierge ou se volt aombrer.
Je renoie Mahom, je ne le puis amer,
Et croi en che Seignour qui volt mort endurer.
Sus le Mont de Calvaire, pour le poeple sauver,
Si que par che point chi ne poés escuser
Que ma grant maladie ne doies mechiner. »
(v. 2575-2584)
15La conversion est bien provoquée par l’amour. On a parfois parlé de parodie à propos de ces épisodes. La dame est instruite dans la religion chrétienne et l’acte de foi qu’elle prononce est sensé, bien que rapide : elle affirme sa foi en Jésus-Christ et en la Vierge Marie, elle sait ce que signifie l’Incarnation et la Passion du Christ, elle connaît le Mont Calvaire. Ces protestations de foi suffisent-elles ? Baudouin s’en contente car la dame, bien qu’elle ne soit pas encore baptisée, plaide sa cause avec habileté.
16Pour répondre au premier argument invoqué par Baudouin, celui de son mariage, Sinamonde fait preuve d’un certain cynisme à propos des sacrements de la religion qu’elle prétend embrasser : l’épouse n’est pas là et si Baudouin commet ce péché d’adultère, la confession existe pour les chrétiens : il en sera quitte pour demander l’absolution à un prêtre de sa religion et pour dire le soir un pater noster. Ainsi son âme sera sauvée. La dame est bien informée des articles de la foi chrétienne, mais les utilise de façon diabolique. Le texte prend ici une tonalité comique pour justifier le péché d’adultère.
17L’auteur prolongeant la scène joue de la tentation à laquelle est soumis Baudouin et montre comment il fait un dernier effort – mais timide – pour y résister : il est l’hôte des frères de la dame et ne saurait dans leur propre palais avoir une aventure amoureuse avec leur sœur. Celle-ci a réponse à tout, accuse Baudouin de lâcheté, vante d’elle-même ses appâts, la séduction de son corps garni de biauté et blanche qu’aubespin, Coulouree que rose et crasse com pouchin (v. 2631-32) et enfin recourt au chantage en menaçant de se laisser mourir d’ici le mois de juin. Baudouin est à bout d’arguments et ne peut que lui promettre de la guérir… avant la fin de la nuit ! Tout se passe alors comme si la profession de foi chrétienne prononcée par Sinamonde permettait à Baudouin de ne pas attendre le baptême qui aura lieu effectivement, mais un peu plus tard et de s’unir à elle :
Dist li roys Bauduins : « Belle tre douche amie,
Puis que vous creés Dieu et le Vierge Marie,
Vous ne m’eschaperés tant que serés garie. »
Dont l’acole li roys, maintes fois l’a baisie ;
Chelle le consenti, onkes ne fu si lie.
(v. 2637-2641)
18Au-delà du jeu et de la casuistique, de la détermination plaisante de la jeune Sarrasine et du sourire qui apparaît dans ces vers, il y a des scènes où comme l’écrit Jean Subrenat16 : « la foi chrétienne n’est pas traitée avec désinvolture ». En tout cas l’importance donnée au motif de la conversion est telle que celui-ci semble une des clefs permettant de lire ce texte. C’est toute la chanson du Bâtard de Bouillon qui est marquée par la confrontation entre les deux religions. Un certain nombre de scènes qui ne relèvent pas du motif de la jeune Sarrasine amoureuse en donnent d’ailleurs la preuve. Ainsi Baudouin expose-t-il les points essentiels de la religion chrétienne et les articles de la foi devant les rois païens qui, une fois convaincus de la supériorité de ces idées, acceptent d’être baptisés en même temps que Sinamonde, leur sœur17. Par ailleurs au cours de cette chanson apparaît un personnage emblématique qui représente la force de la conversion sincère : il s’agit de Huon Dodequin, lui-même sarrasin converti18, devenu l’un des chevaliers les plus admirables de la chrétienté :
(…) mais chius ot tel vigour
C’on ne porroit penser ne cuidier par nul tour
Le hardement du prinche ne sa grande fierour ;
Quant il se converti, che fu grande luour
En terre de Surie pour nos prinches d’onnour,
Car longement se tint vers le gent paiennour.
Puis qu’il se converti, ne lor pot faire amour,
De fausseté a faire n’ama onques le tour.
(v. 368-375)
19Quant à Sinamonde, elle représente sans aucun doute un superbe exemple de princesse sarrasine prête à tout pour obtenir l’amour de celui qu’elle aime, mais surtout elle joue un rôle essentiel dans cette démonstration de la primauté de la foi chrétienne sur les croyances païennes. L’auteur multiplie les scènes où, grâce à Sinamonde, la religion des Sarrasins est mise en cause et condamnée. L’un des épisodes les plus intéressants est celui où la jeune fille emmène en effet Baudouin dans la mahommerie du palais où devant un candélabre allumé se trouve – comme suspendue en l’air de façon surnaturelle – la statue de Mahomet. C’est Sinamonde elle-même qui explique au chrétien effrayé quel est l’artifice – un aimant – qui permet à la statue de tenir ainsi en l’air ; c’est elle qui explique aussi qu’un païen est dissimulé à l’intérieur et prête sa voix à Mahomet. Baudouin d’un coup de perche frappe et réduit en miettes la statue, et rompt les membres du païen. Le geste symbolique de briser les idoles est là pour annoncer que la chrétienté peut détruire la religion païenne et que le roi Baudouin de Jérusalem est celui qui reprendra possession de la Mecque, la pacifiera et la christianisera.
20Dans la suite du texte tout se passe comme si l’auteur poursuivait cette démonstration, mais cette fois en recourant à un contre-exemple. Il s’attarde sur un autre personnage féminin, celui de Ludie, la fille de l’amulaine d’Orbrie : la jeune Sarrasine refuse quant à elle d’être donnée en mariage à un prince chrétien. Elle ne peut aimer le héros pourtant séduisant qu’est le Bâtard de Bouillon, fils de Sinamonde et de Baudouin, et préfère donner son cœur à un Sarrasin, Corsabrin. Le motif est ici inversé : c’est le jeune chrétien qui, ayant entendu vanter la beauté de la princesse sarrasine, devient amoureux d’elle « de loin » : il rêve à Ludie la bele dont li corps est faitis (v. 4525), qui moult a cler le vis (v. 4501), à celle qui est blanche que flour de lis, la plus belle qui soit jusqu’as pors de Brandis (v. 4519-20). Le désir du jeune homme (l’auteur emploie le terme de convoitier au vers 4535) est tel qu’il ne peut plus ni boire, ni manger et qu’il fait le serment de ne jamais cesser la guerre contre les Sarrasins tant qu’il ne possédera pas la damoiselle.
21C’est donc Ludie qui incarne la fidélité dans le domaine amoureux comme dans le domaine religieux. Déterminée à résister à ce jeune chrétien, elle fait le serment d’une part de ne jamais aimer un homme qui croit au Dieu des Chrétiens (v. 4628), d’autre part de ne jamais trahir Corsabrin en qui elle voit le plus beau païen qui soit en paiennie (v. 4630) et qu’elle rêve d’épouser. Le rôle qui est alors réservé à la jeune fille s’oppose à celui de Sinamonde. C’est malgré elle qu’elle apparaît devant le jeune chrétien pour le tenter. Par la volonté de son père, Ludie se montre, au cœur du palais, dans tout son éclat, revêtue de tissus d’or, tel un appât brillant offert au regard du Bâtard de Bouillon. Le jeune homme refuse néanmoins de se convertir à la religion musulmane, résistant à toutes les menaces. Tout en jouant avec ces motifs littéraires l’auteur semble alors continuer sa réflexion sur les conversions forcées et imagine comment le Bâtard de Bouillon va essayer de posséder quand même la belle païenne. Il s’empare de la ville d’Orbrie, enlève Ludie et la fait baptiser de force. Il la possède alors contre son gré alors que la jeune fille lui lacère le visage, puis après ce viol il l’épouse. Le mariage est possible puisqu’elle est devenue chrétienne.
22A partir de ce moment l’auteur ne parle plus de Ludie qu’en des termes qui montrent qu’elle n’a pas accepté son sort et que pour elle ce baptême imposé n’a aucune valeur : elle reste celle qui mal creoit Jhesus (v. 5544) ou qui fist grant larrechin (v. 5757). Elle s’enfuit, rejoint Corsabrin et l’épouse a le loy de Mahon (v. 5772) faisant la preuve de sa fidélité à la fois à sa religion et à son amour.
23Une dernière péripétie montre le Bâtard de Bouillon pénétrant dans le château de Corsabrin où il retrouve celle qu’il considère comme sa femme Ludie. Il la prend naïvement dans ses bras sans se méfier d’elle tandis qu’elle prépare le piège destiné à sa perte et prévient Corsabrin. La mise en scène imaginée est digne d’une farce ou d’un fabliau. Ludie en effet feint de demander pardon, emmène le Bâtard de Bouillon dans sa chambre où elle fait préparer un bain. Elle lui demande de se dévêtir, se donne à lui et les deux époux profitent ensuite du bain qui a été préparé pour eux. C’est alors que Corsabrin prévenu arrive avec soixante païens pour surprendre le Bâtard de Bouillon alors qu’il est dans l’eau. Lorsque le chrétien est pris, Ludie s’écrie alors avec fierté :
« Sire, che dit Ludie, miex prisier me doit on
Que tous les Sarrasin de vostre region
Quant j’ai pris toute seule le Bâtard de Bouillon. »
(v. 5947-5949)
24La guerre entre Chrétiens et Sarrasins est ici montrée avec une certaine dérision et il y a loin de cette légèreté à la gravité des premières chansons de geste. La ruse s’est substituée à la force ; le héros chrétien devient un mari berné. Justice est faite cependant ensuite car la reine Ludie est brûlée sur l’ordre de Huon Dodequin.
25On ne saurait être insensible au ton qui dans certains de ces épisodes – nous l’avons vu – fait souvent penser à celui des fabliaux et semble bien éloigné des habitudes épiques. Les maximes anti-féministes qui apparaissent çà et là dans le texte font également sourire. Certes au cœur de cet épisode l’auteur prend le temps de rappeler l’exemple d’Aristote pour dire qu’il ne faut jamais faire confiance à une femme et semble quitter les préoccupations propres aux chansons de geste. Cependant en contrepoint dans toute cette partie du Bâtard de Bouillon sont accumulés des éléments qui continuent à nourrir une réflexion sur la conversion et posent des questions essentielles sur la religion. La sincérité des sentiments et une foi véritable ne sont-elles pas indispensables pour que les sacrements soient valables ? Seule une vraie croyance – née de la connaissance de la religion et de ses dogmes – compte et permet de démontrer la supériorité de la religion chrétienne. Un baptême administré par la force a-t-il quelque valeur ? Seule une foi sincère compte.
26C’est ainsi que cette chanson de geste se pare de développements romancés sans cesser d’appartenir à une littérature qui prône l’idéologie de la croisade. Dans le même temps une littérature romanesque se développe, prenant pour cadre les pays sarrasins qui sont autour du bassin méditerranéen, développant les voyages à motivations religieuses comme les pèlerinages pénitentiels ou votifs qui conduisent les héros vers Saint-Jacques-de-Compostelle ou Rome, mais aussi vers les Lieux Saints. L’aventure n’est plus collective, mais individuelle, le héros dans ces récits, une fois parvenu outre-mer, se retrouve confronté aux mêmes épreuves, aux mêmes rencontres que les personnages des épopées. Victime de tempêtes ou de naufrages, d’enlèvements, de pèlerinages qui tournent mal, le héros ou l’héroïne dans ces romans se retrouve par exemple prisonnier ou prisonnière des sarrasins, condamné à mourir ou du moins à rester pendant de longues années loin de l’Occident, séparé des siens, contraint d’adopter la religion païenne.
27Deux schémas narratifs sont alors privilégiés par les auteurs. Le premier est celui qui apparaît dans les deux versions de l’histoire de La Fille du Comte de Ponthieu, aussi bien dans celle du xiiie siècle que dans la mise en prose du xve siècle. Chacun connaît le sort tragique de cette héroïne, violée par des brigands sous les yeux de son mari alors qu’ils se rendaient en pèlerinage vers Saint-Jacques-de-Compostelle. Punie par son père pour le viol qu’elle a subi, elle est enfermée dans un tonneau qu’il fait jeter à la mer. La jeune femme sauvée par des marchands est vendue ensuite au Soudan d’Aumarie et se retrouve en terre sarrasine. Le soudan qui y règne est jeune, célibataire, ardent et est rapidement séduit par la beauté de la dame : il l’épouse après avoir pris soin de la faire renoncer à la religion chrétienne.
Il pensa bien a çou que il veoit en li qe ele estoit haute feme, et le fist reqere se elle estoit crestienne, et ke se ele voloit sa loi laisier, k’il le prenderoit. Ele vit bien que mix li valoit faire par amours que par force, se li manda qu’ele le feroit. Il l’espousa quant ele fu renoie et criut en molt grant amour envers lui.
(La Fille du Comte de Ponthieu, xiiie siècle, p. 23)
28La version du xve siècle insiste sur la conversion forcée et sur les réticences de la dame qui n’accepte pas tout de suite l’offre du soudan. Après avoir réfléchi elle comprend qu’elle doit en passer par là, par amour ou par force, et elle feint de renoncer à la loi de son baptême. Elle doit se résigner à son sort sous peine de mourir et après cette conversion forcée qui ne vient pas du cœur, elle vit une seconde existence, bigame malgré elle et partageant désormais la vie d’un époux musulman avec qui elle a deux enfants, un fils et une fille. La narration ne recule devant aucune invraisemblance pour que la situation ne soit que temporaire : quand la dame peut enfin échapper à son sort, ayant retrouvé par hasard son père, son frère et son premier mari, elle peut s’enfuir avec eux. Son voyage lui permet de passer par Rome où le pape absout les années passées par la dame dans le péché : il baptise Guillaume, le fils né de l’union avec le soudan, puis remet la dame en droite chrestienté, confirmant son premier mariage, le seul valable aux yeux de Dieu et des hommes parce que chrétien.
29Le second schéma est celui que l’on retrouve par exemple dans le roman de Gillion de Trazegnies. Nous ne connaissons ce récit que par une version en prose du xve siècle. L’étude des sources reste difficile à faire et jusqu’à maintenant il n’a pas été possible d’identifier un modèle antérieur. C’est un texte romanesque avant tout, mais qui présente bien des situations semblables à ce que l’on trouve dans certaines épopées. Gillion part outre-mer19 non pas en tant que croisé, mais pour accomplir un pèlerinage qui est le résultat d’un vœu. Fait prisonnier dans le golfe de Sathalye, pendant sa traversée en mer, il se retrouve dans les cachots du Caire. Or le soudan de Babylone a une fille, Gratienne, dont la beauté est extraordinaire. Elle est présente dans le palais de son père, assise à une fenêtre, alors que le prisonnier doit être exécuté : elle le voit, attaché à un poteau, absolument nu, prêt tel un nouveau Sébastien à mourir sous les flèches des archers du soudan. La beauté du jeune chrétien touche le cœur et les sens de Gratienne. Le texte est alors sans équivoque et s’attarde plaisamment sur cette scène de coup de foudre :
Alors la belle Gracyenne, voyant le crestien nud et que on lioit a l’estache, (…) moult piteusement prist a regarder Gillion car advis lui estoit que oncques plus bel homme ne mieulx formé elle n’avoit veu. Et comme il pleut a Dieu que ainsi l’inspira, elle vey sa belle face coulouree, les beaulx yeulx qu’il avoit ou chief pour regarder, la bouche vermeille pour baisier. En son cuer le print a amer et desir de croire en Jhesu Crist afin que de lui peust estre amee.
(Gillion de Trazegnies, p. 23)
30Gratienne obtient la grâce du jeune chrétien et la narration passe alors à la deuxième phase du motif : comment la jeune fille sarrasine peut-elle obtenir du jeune homme ce qu’elle désire ? Elle est pleine d’audace, elle s’approche de nuit tout près de la prison, donnant comme prétexte au gardien qu’elle veut convertir le chrétien et le convaincre de croire en la loy de Mahommet (p. 26). Les rencontres entre les deux jeunes gens sont à partir de là constamment placées par l’auteur sous un double éclairage : l’amour et la religion se mêlent sans cesse dans le texte de façon souvent artificielle, mais symbolique. C’est ainsi qu’une scène les montre assis tous deux sur une couche ou ilz se devisoient de leurs amours (p. 27), mais Gillion ne parle alors à Gratienne que de Jésus-Christ. Les heures passent et la nuit s’avance et le jeune chrétien fait l’éducation chrétienne de Gratienne :
(…) lui racontait de la passion de Jhesu Crist et du ressuscitement et comment il monta es cieulx Tout mot apres autre lui va raconter nostre loy et de la damnapcion des mauvais et de ceulx qui n’ont pas baptesme. Puis lui dit la joye que ont les bons qu’ilz apres leurs trespas recevront en paradis ou ilz sont en gloire sans fin.
(Gillion de Trazegnies, p. 27)
31Sans craindre l’invraisemblance, frôlant le blasphème, l’auteur montre que la dame accepte cet enseignement religieux sans cesser de penser à la beauté de Gillion et à l’amour qu’elle lui porte. Cependant quand plus tard les deux jeunes gens peuvent enfin s’aimer (en effet sur la foi d’un faux témoignage, Gillion croit que sa première épouse qu’il a laissée en Hainaut est morte), ils se contentent d’amours justes et loyalles (p. 56) tant que Gratienne n’a pas reçu le baptême et n’est pas encore chrétienne. Le dénouement ramène les héros vers l’Occident. Le passage à Rome là encore permet de remettre tout en ordre : le pape donne son absolution à Gratienne et à son ami, Hertan ; il les baptise dans une grande cuve remplie d’eau dans l’église Saint Pierre et Hertan, devenu Henri, meurt aussitôt et va au Paradis. Quant à Gratienne et Gillion, ils ne peuvent pas s’aimer puisque de retour dans le comté de Hainaut Gillion retrouve sa première épouse qu’il croyait morte. L’auteur reprend ici le schéma narratif qui apparaît dans le « conte de l’homme aux deux femmes » et en particulier dans le lai d’Eliduc composé par Marie de France au xiie siècle. Le même dénouement persiste dans le texte en prose du xve siècle : les deux femmes, l’épouse et l’amie, animées par une même élévation de l’âme et un même esprit de sacrifice, renoncent à l’amour terrestre et entrent toutes les deux dans une abbaye où elles consacrent la fin de leur vie au service de Dieu.
32Les exemples choisis ici auraient pu être plus nombreux. Cependant il s’agissait de constater et de démontrer la permanence et la vitalité d’un motif d’abord épique qui réunit dans une rencontre amoureuse chrétiens et sarrasines, parfois chrétiennes et sarrasins. Le caractère stéréotypé des situations imaginées par les auteurs traduit sans doute leur penchant pour un certain archaïsme dans ces œuvres tardives, mais n’exclut pas un certain effort de renouvellement. Ce qui apparaît le plus souvent c’est un glissement du motif de la belle Sarrasine amoureuse d’un chrétien à la problématique religieuse et morale qui en découle.
33Curieusement ce motif qui dans les chansons de geste anciennes teintait de romanesque les aventures épiques, lorsqu’il se retrouve dans des réécritures tardives et surtout dans les mises en prose de la fin du Moyen Age, donne à ces textes nourris de romanesque – qu’il soit antique, byzantin ou courtois – une caution épique. Ces œuvres ont été composées à une époque où les enjeux de la croisade ne sont pas totalement oubliés, où les tensions entre la chrétienté et le monde sarrasin ne sont pas apaisées. Les mises en prose, en particulier celles qui ont été composées à la cour de Bourgogne, reflètent une idéologie de la croisade propre à cette fin du Moyen Age. Le décor est de plus en plus souvent planté dans les royaumes d’outre-mer, sur les rivages de la Méditerranée, les combats sur mer remplacent souvent les combats sur terre, les pèlerinages prennent la place des croisades, mais la narration repose toujours sur la confrontation – chantée par les épopées antérieures – entre les deux mondes qui s’opposent depuis des siècles, celui de la chrétienté et celui de la païennie.
34L’écriture épique et l’écriture romanesque se rejoignent alors dans des récits qui sont en général le résultat d’une pluralité d’influences, épique ou romanesque. Un motif comme celui que nous avons étudié ici se prête tout particulièrement à cette rencontre. L’amour et la religion s’y rejoignent de façon parfois artificielle, dans des développements souvent stéréotypés, mais au-delà de la fiction et de l’imaginaire, au-delà du travail de création littéraire, ces textes demeurent le reflet des peurs et des croyances des hommes. A la fin du Moyen-Age, presque cinq siècles après la Chanson de Roland, le rêve de convertir les Sarrasins demeure vivace, mais dans ces textes il passe souvent par l’amour.
Notes de bas de page
1 Il s’agit là d’un motif essentiellement littéraire. La réalité historique est différente et le souci de convertir en masse les païens ne caractérise pas automatiquement l’esprit de croisade.
2 Voir La Chanson de Roland, éd. G. Moignet, Bordas, 1989, en particulier les vers 101-102 : « En la citet nen ad remés païen/ne seit ocis u devient chrestïen. » et les vers 3666-70 : « Li reis creit en Deu, faire voelt sun servise/E si evesque les eves beneïssent/Meinent païen entesqu’al baptisterie :/S’or i ad cel qui Carie cuntredie,/Il le fait prendre o ardeir o ocire. »
3 Ces conversions spontanées sont relativement rares. Cf. Bernard Guidot, Recherches sur la chanson de geste au xiiie siècle d’après certaines œuvres du cycle de « Guillaume d’Orange », Publications de l’Université de Provence, 1986, tome I, p. 104.
4 Cf. par exemple dans Aliscans le personnage d’Aélis, princesse chrétienne, qui s’éprend d’un guerrier d’origine païenne, Rainouart.
5 Nous nous attarderons sur cet exemple en hommage aux très nombreux travaux que Jean Subrenat a consacré aux épopées. C’est à lui que nous devons la traduction de cette chanson de geste dans le volume Croisades et Pèlerinages, récits, chroniques et voyages en Terre Sainte xiie-xvie siècle (dir. D. Régnier-Bohler), collection Bouquins, Laffont, 1997, p. 353-416.
6 La Fille du Comte de Ponthieu. Versions du xiiie et du xve siècles, éd. Clovis Brunei, Champion, Paris, 1923. On peut se référer également à la traduction publiée dans Splendeurs à la cour de Bourgogne (dir. D. Régnier-Bohler), Collection Bouquins, Laffont, 1995, p. 411-464 (trad. D. Quéruel).
7 Cf. Wolff O.L.B. (éd.), Histoire de Gillion de Trazignyes et de Dame Marie sa femme, Paris et Leipzig, 1839. On peut se référer également à la traduction faite par Monique Santucci dans le volume Splendeurs à la cour de Bourgogne, op. cit., p. 251-370.
8 Cf. Philippe Ménard, Le rire et le sourire dans le roman courtois en France au Moyen Age (1150-1250), Genève, Droz, 1969.
9 Cf. Claude Lachet, La Prise d’Orange ou la parodie courtoise d’une épopée, Nouvelle Bibliothèque du Moyen Âge, Champion, Paris, 1986.
10 Cf. Marc Le Person, « La séduction dans Fierabras », dans El Arte de la seduccion en el mundo romanico medieval y renacentista, éd. par Elena Real Ramos, Universidad de Valencia, 1995, p. 163-185.
11 Cf. Marguerite Rossi, Huon de Bordeaux, Nouvelle Bibliothèque du Moyen Âge, Champion, Paris, 1975.
12 Cf. l’étude de Micheline de Combarieu du Grès, « Un personnage épique : la jeune musulmane », dans les Mélanges offerts à Pierre Jonin, Senefiance n° 7, cuer ma, Université de Provence, 1979, p. 183-196.
13 C’est ainsi que le personnage d’Esclarmonde dans Huon de Bordeaux s’offre au prisonnier qui est l’objet de son désir, l’affamant pour obtenir ce qu’elle veut.
14 Cf. Cl. Lachet, op. cit., p. 105-110.
15 Micheline de Combarieu du Grès écrivait à ce propos : « Les auteurs n’ont pas réussi à faire paraître ces conversions autres qu’elles ne sont : artificielles si on veut les faire passer pour des réels changements de foi ; peu significatives si l’amour qu’elles reflètent est plus celui du héros que de Dieu. » dans « Un personnage épique : la jeune musulmane », art. cit., p. 193.
16 Croisades et Pèlerinages, op. cit., Introduction, p. 355.
17 Voir l’exposé long et argumenté de Baudouin (laisse XCI) qui expose à Esclamart l’histoire du monde et de l’humanité selon les croyances chrétiennes. Le baptême des rois païens et de tous ceux qui veulent les imiter a lieu dans La Mecque, en grande pompe, grâce à l’évêque de Mautran (laisses CII-CIV). Un seul roi, Hector de Salorie, résiste dans un premier temps et demeure fidèle à sa foi païenne avant de se laisser convaincre de la supériorité de la religion chrétienne par le roi Saudoine (laisses CXIII-CXIV). On ne peut s’empêcher de penser ici au dénouement du Jeu de saint Nicolas de Jean Bodel.
18 On pourrait aussi rappeler l’épisode à valeur exemplaire du sarrasin, originaire de Tibériade, ami fidèle de Huon Dodequin, qui le rejoint dans le camp chrétien et s’agenouillant devant lui, lui dit qu’il veut être baptisé (laisses XXXVII-XXXVIII).
19 Nous nous permettons de renvoyer ici à notre étude « Pourquoi Partir ? Une typologie des voyages », à paraître dans les Mélanges offerts à J. Cl. Faucon, à paraître chez Champion, 2000.
Auteur
Université de Reims-Champagne-Ardenne
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