Les gestes de l'autre
p. 237-253
Texte intégral
1Pour illustrer le thème de notre colloque, nous avons choisi d'étudier la relation de voyage du franciscain Guillaume de Rubrouck qui séjourna en Mongolie, à la cour du Grand Khan, de janvier à juillet 12541. Certes, on ne peut s'attendre à trouver dans ce texte une réflexion sur le geste telle que cherche par exemple à la saisir l'historien J.-Cl. Schmitt, dans sa récente étude, en interrogeant les écrits des théologiens ou les ouvrages destinés à enseigner la discipline des gestes2. Pourtant, deux facteurs font de cette relation un précieux document sur le sujet qui nous occupe : d'abord, pour communiquer avec les Autres, le voyageur doit fréquemment recourir aux signes non verbaux car ses interprètes sont le plus souvent défaillants ; ensuite, la diversité à laquelle il se trouve confronté l'amène à signaler ses propres habitudes, à noter dans quelle mesure elles diffèrent des comportements qu'il observe. Ses réactions sont particulièrement dignes d'intérêt en ce qu'elles nous renseignent, médiatement pour ainsi dire, sur l'observateur lui-même, sur cette composante du comportement humain si intimement liée à la vie quotidienne qu'hormis les ouvrages théoriques, on a peu de chance de pouvoir l'atteindre à travers l'épaisseur des siècles. Les gestes de l'Autre seront donc aussi bien ceux que l'observateur enregistre dans ce milieu humain si étranger au sien, que ses propres gestes destinés à affirmer son identité chrétienne, présentée à la fois comme radicalement "autre" et source d'exemplarité.
2Plantons le décor, essentiel pour comprendre la situation très particulière de Rubrouck. En 1253, les Mongols ont quasiment achevé vers l'Ouest l'expansion de leur empire, commencée une cinquantaine d'années plus tôt par Gengis Khan, leurs incursions en Europe orientale qui avaient atteint leur paroxysme avec la campagne de 1236-42 dirigée contre la Russie, la Pologne et la Hongrie semblent suspendues3, mais dans les diverses cours occidentales, on continue à craindre le pire, d'où les missions d'information, envoyées en particulier par le Pape, et qui mettent principalement à contribution les ordres mendiants : franciscains et dominicains. Ainsi, Jean de Plan Carpin est chargé en 1245 d'une ambassade chez les Mongols par le Pape Innocent IV à l'issue du concile de Lyon4. Rubrouck a beau ne partir que huit ans après Plan Carpin, sa situation n'en est pas moins très différente, comme il le souligne à maintes reprises dans sa relation : en effet, quoiqu'envoyé par Louis IX, il récuse avec insistance le statut d'ambassadeur. La raison en est simple : pour les Mongols, la situation des autres pays à leur égard n'offre qu'une alternative, la paix ou la guerre, et la paix elle-même n'est comprise que comme soumission à leur pouvoir. Comme les missions précédentes l'avaient amplement démontré par le discours tenu aux envoyés par les chefs mongols et surtout par les messages qu'ils en avaient rapporté, ceux qui prirent l'initiative de telles ambassades n'avaient pas manqué de s'attirer les foudres des destinataires, excitant leur appétit de puissance au lieu de l'apaiser. C'est donc pour éviter de se trouver confronté à un tel dilemme que Rubrouck invoque un tout autre motif à sa venue en terre mongole : le bruit a circulé en Europe que certains chefs mongols s'étaient convertis au christianisme et lui-même accomplit cet extraordinaire voyage pour « prêcher la foi à ces Infidèles, selon la règle de <son> Ordre »5. Même si le motif prend parfois des allures de prétexte, c'est là un élément essentiel pour saisir la façon dont, par ses gestes mêmes, il va s'efforcer de se présenter à ses interlocuteurs6.
3Trois aspects nous paraissent particulièrement intéressants à étudier dans la relation de Rubrouck en ce qui concerne son rapport aux gestes : d'abord l'attitude d'observation et d'extrême attention qu'il porte aux gestes des Mongols dans leur vie quotidienne ; ensuite, les scènes où l'envoyé de Louis IX se trouve confronté avec le pouvoir mongol, scènes lourdes d'enjeux, où le geste est aussi important que la parole ; enfin, les rapports de Guillaume avec les représentants des autres religions, qui l'amènent à enregistrer les différences touchant aux rites mais surtout l'obligent à se situer par rapport à eux, essentiellement par le geste.
1. L'OBSERVATION
4Considérons d'abord les qualités de celui que J.-P. Roux qualifie à juste titre de "maître observateur"7. Malgré un séjour relativement bref et qui se déroule dans des conditions matérielles extrêmement difficiles (fatigue du voyage accompli au pas de charge, nourriture très frugale, froid intense), il prend soin de noter les activités quotidiennes accomplies par les hommes et femmes mongols pour satisfaire leurs besoins vitaux : se loger, manger, se vêtir. Prenons l'exemple du passage qu'il consacre aux fameuses yourtes des Mongols :
« La maison où ils dorment, ils l'édifient sur une base circulaire de baguettes tressées ; la charpente de la maison est faite de baguettes qui convergent au sommet en un orifice circulaire d'où sort un conduit analogue à une cheminée ; ils la couvrent de feutre blanc qu'ils enduisent assez fréquemment de chaux ou de terre blanche ou de poudre d'os afin d'aviver l'éclat de sa blancheur. Parfois ils usent de feutre noir. Le feutre qui entoure l'orifice supérieur est décoré de dessins d'une belle variété. Devant la porte, ils suspendent de même une pièce de feutre ouvré, historié avec art. Ils cousent feutre sur feutre, des motifs colorés qui représentent vignes, arbres, oiseaux et bêtes »8.
5Ce qui nous paraît tout à fait remarquable ici, c'est le type même de description que Rubrouck choisit de faire, non pas celle du produit fini, achevé, mais celle des diverses opérations successivement effectuées pour y arriver : édifier, tresser, couvrir, enduire, décorer, suspendre, coudre..., autant de gestes précisément saisis par l'oeil de l'observateur. Ce faisant, il rend compte à la fois de l'habileté technique, de l'efficacité du geste, mais aussi des qualités esthétiques de l'ouvrage, auxquelles il se montre sensible malgré l'étrangeté de ces "maisons mobiles" pour un Occidental.
6Dans la partie qu'il consacre au mode de vie des Mongols, c'est toujours cette même technique descriptive qu'il adopte, relevant minutieusement les divers gestes accomplis pour préparer la viande séchée, pour fabriquer le comos ou le caracomos à partir du lait de jument diversement traité, pour assembler les peaux afin de confectionner les vêtements, ou même pour obtenir la curieuse coiffure caractéristique des hommes mongols avec sa tonsure sur le haut du crâne, sa longue frange sur le front et ses tresses par derrière, nouées et relevées jusqu'aux oreilles9. L'attitude de Rubrouck nous semble ici tout à fait caractéristique de l'évolution qu'on peut relever tant dans l'iconographie que dans les textes contemporains et qui témoigne de la curiosité nouvelle pour la diversité des techniques en relation avec la revalorisation du travail10.
7A l'instar de J. Cl. Schmitt, nous regroupons dans la catégorie du "faire" aussi bien les gestes du travail que les gestes rituels relevant de la croyance, tous deux déterminés par l'efficacité, les premiers par l'efficacité matérielle, les seconds par l'efficacité symbolique ; il est d'ailleurs significatif que Rubrouck les considère conjointement. Ainsi, la description des repas, après la mention détaillée d'une série de gestes techniques concernant le découpage de la viande et sa préparation, évoque la distribution des morceaux, régie par un code en rapport étroit avec la hiérarchie et par des règles contraignantes fixant les gestes obligatoires ou au contraire interdits :
« Avant qu'on serve la viande du mouton, le maître choisit ce qui lui plaît, et s'il donne à quelqu'un un morceau de choix, il faut que celui-ci seul le mange : il n'a pas le droit de l'offrir à quelqu'un d'autre ; s'il ne peut le manger entièrement, il doit l'emporter ou le donner à son page qui le lui gardera - si son page est présent-, sinon, il peut le mettre dans son captargac, une bourse carrée qu'ils portent pour de tels usages ; ils y déposent même les os, quand ils n'ont pas le temps, afin de pouvoir les ronger par la suite et pour que rien ne se perde »11.
8Grâce à l'acuité de son regard, Rubrouck a su très bien dégager ici l'un des principes fondamentaux de la société mongole telle que l'avait étroitement codifiée Gengis Khan dans le yasak promulgué en 121912 : le principe d'économie, selon lequel chacun devait au mieux utiliser les seules ressources alimentaires dont ils disposaient, tirées de leurs troupeaux.
9D'autres gestes rituels échappent toutefois à la rationalisation et relèvent purement de la croyance. Or il est tout à fait significatif de voir ici Rubrouck sensible au symbolisme dont ils sont chargés, même si, comme on le verra, il juge sévèrement ce type de croyance qu'il assimile à la superstition. Voici sa description des libations :
« Lorsqu'ils se rassemblent pour boire, ils commencent par asperger la figurine qui est au-dessus de la tête du maître, puis toutes les autres figurines dans l'ordre. Ensuite, un serviteur sort de la maison avec une coupe et de la boisson pour en répandre trois fois vers le sud, en pliant chaque fois le genou, pour honorer le feu ; puis vers l'orient, pour honorer l'air, puis vers l'occident pour honorer l'eau ; ils en jettent aussi vers le nord pour honorer les morts »13.
10Sans doute ces gestes sont-ils pour Rubrouck éminemment païens puisqu'ils servent à rendre hommage à des idoles de feutre, mais la façon dont ils circonscrivent un espace et l'orientent, donnant à chacun des points cardinaux une signification symbolique, ne pouvait manquer de lui rappeler les principes auxquels obéissaient la construction et la décoration des églises et le déroulement du service divin, opposant le choeur et l'autel à l'est, lieu de Jérusalem et du Christ, à l'entrée située à l'ouest, tournée vers le siècle, tandis que le nord, assimilé aux païens, côté réservé aux femmes, s'oppose au sud, assimilé aux Juifs, côté réservé aux hommes14.
2. L'AFFRONTEMENT
11Si l'attention aux gestes des Autres ressortissant aux techniques et aux croyances révèle chez Rubrouck aussi bien la curiosité que l'aptitude à la lecture symbolique qui se développent à cette époque chez les clercs, il serait erroné de considérer notre franciscain comme un moderne ethnographe, observant d'un œil neutre les mœurs exotiques des Mongols. Ce qui se joue en effet dans cette rencontre, c'est l'affrontement des pouvoirs car, même si Rubrouck récuse le rôle d'ambassadeur, il est bien conscient malgré tout de représenter, face à la puissance mongole, un des chefs de l'Occident chrétien, à savoir Louis IX. Les scènes qui retracent sa rencontre avec Batou tout d'abord puis avec le Grand Khan constituent des moments forts de sa relation, écrite pour le roi de France pour lui rendre compte de sa mission : il doit donc lui rapporter dans le détail ses paroles et ses gestes en ces deux moments cruciaux, mais, comme on va le voir en privilégiant le récit de la rencontre avec Batou15, il excelle à restituer la forte tension dramatique de l'événement et peint l'affrontement de façon à faire ressortir sa résistance active face à celui qui incarne l'une des deux têtes de l'Empire mongol :
« Nous fûmes alors introduits jusqu'au milieu de la tente ; ils ne nous demandèrent pas de faire une révérence en pliant le genou comme le font selon l'usage les ambassadeurs. Nous restâmes donc debout devant lui le temps qu'il faut pour dire le Miserere mei Deus ; tous étaient dans le plus profond silence »16.
12Première victoire : la possibilité de rester debout sans avoir à s'incliner, comme sont contraints à le faire les ambassadeurs, mais - la suite va le montrer - il s'agit seulement d'un court sursis qu'obtient ici le franciscain. Il est intéressant de noter en outre l'unité de mesure qui lui sert à évaluer la durée de ce premier moment : celle de la récitation d'un psaume, et pas n'importe lequel, le psaume 51, qui commence par ces mots : « O Dieu, aie pitié de moi dans ta bonté... » et qui, après la demande du pardon des fautes, contient la promesse suivante : « Alors j'enseignerai tes voies à ceux qui sont dans l'iniquité »17. C'est bien ce que va tenter de faire Rubrouck par ses paroles, mais c'est d'abord dans le silence qu'a lieu la confrontation :
13« Il nous regarda avec attention et nous l'observâmes de même. » Déjà perce le défi de la part de l'envoyé du roi de France, en même temps que transparaît la curiosité mutuelle. Après ce long silence habilement rendu dans la relation par une pause descriptive, où Rubrouck s'est efforcé de maintenir autant que faire se pouvait un rapport d'égalité avec son interlocuteur, la hiérarchie est restaurée, mais on va voir par quelle "ruse" le franciscain réussit à effectuer le geste de soumission qu'on lui impose sans pour autant se soumettre :
« Enfin il m'ordonna de parler. Notre guide nous enjoignit de fléchir les genoux et de parler. Je fléchis un seul genou comme on le fait devant un homme, mais il me fit signe de plier les deux, ce que je fis, ne voulant point contester sur ce point »18.
14Rubrouck distingue ici très clairement les deux types de génuflexion du clerc, la première pour le pouvoir temporel, la seconde réservée à Dieu. Déjà, au vième s., Césaire, évêque d'Arles, avait contribué à définir l'attitude physique du chrétien face à Dieu en la dérivant du rituel du pouvoir laïque et le synode de Mâcon (585) tenta de codifier la distinction clerc/laïc en énumérant les divers gestes de respect dont devait témoigner le second envers le premier19. Mais la distinction que fait Rubrouck résulte aussi du privilège tardivement accordé à la position agenouillée pour la prière20. Lors de sa première entrevue avec Mongka, il sera conduit à expliciter cette distinction pour les prêtres nestoriens qui règlent le protocole des visites au Grand Khan, tout en renouvelant son choix du compromis :
« Nous sommes des prêtres consacrés au service de Dieu. Dans nos régions, les grands seigneurs ne souffrent pas que les prêtres fléchissent devant eux le genou, par égard pour l'honneur de Dieu. Cependant, nous consentons à nous humilier devant tout homme, pour l'amour de Dieu »21.
15Cette seconde distinction entre « l'honneur de Dieu » et « l'amour de Dieu » nous semble très caractéristique de l'attitude missionnaire franciscaine, différente de l'attitude nettement plus rigide des dominicains, comme le suggère l'échec de la mission conduite quelques années plus tôt par Ascelin de Crémone et dont le compte rendu fut fait par Simon de Saint-Quentin, échec dû au refus des moines de se prosterner devant le chef mongol Baiju et qui faillit leur coûter la vie22. Pour Rubrouck, le geste d'humiliation que signifie le fait de plier les deux genoux devant une autorité laïque se fait « pour l'amour de Dieu » : il exprime le sacrifice de son orgueil et n'est consenti que pour permettre le succès de l'entreprise de prédication de la foi chrétienne en terre mongole, entreprise qu'il va d'ailleurs entamer dès sa rencontre avec Batou, avec un succès très relatif, comme on va le voir...
« Alors il m'ordonna de parler. Et moi, pensant que je priais Dieu, puisque j'avais fléchi les deux genoux, je commençai mon discours par une prière, disant : "Seigneur, nous prions Dieu de qui procèdent tous biens, qui vous a donné ces biens terrestres, de vous donner après eux les biens célestes, sans lesquels les premiers sont vains." Il écouta avec attention et je poursuivis... »23.
16Certes, la façon dont le franciscain conte ici sa "ruse" n'est pas dénuée d'humour : il s'agit de préserver sa liberté intérieure contre la tyrannie extérieure du geste imposé, de respecter apparemment l'étiquette mongole tout en sauvegardant ses propres règles de conduite, mais l'enchaînement de la parole au geste, bien mis en évidence ici, est aussi exemplaire du rôle des gestes dans la prière, tel que l'avait déjà défini saint Augustin. Ils doivent entraîner l'âme dans leur mouvement, favoriser le passage du matériel au spirituel24 et constituent une véritable "technique du corps" qui engendre une sorte de mécanisme, invoqué ici par Rubrouck pour innocenter quelque peu le détournement qu'il opère quant au sens du geste qui est exigé de lui et qui l'amène à provoquer un renversement hiérarchique : au lieu de se soumettre à l'autorité de Batou, il va lui opposer l'autorité de Dieu, d'abord sous forme de promesses - Batou est jusqu'ici attentif -, puis sous forme de menaces :
«...je poursuivis : "Vous saurez pour certain que vous n'aurez pas les biens célestes si vous n'êtes chrétien. Car Dieu dit : Celui qui aura cru et aura reçu le baptême sera sauvé. Qui n'aura pas cru sera condamné." A ces mots, il sourit légèrement, les autres Moals se mirent à frapper dans leurs mains et à se moquer de nous. Mon interprète fut frappé de stupeur : il me fallut le réconforter pour le rassurer »25.
17On voit que le compromis concernant les gestes est ici compensé par la hardiesse, voire la charge provocatrice, de la parole. Revanche et défi qui ne favorisent guère l'adhésion des interlocuteurs, comme le note Rubrouck lui-même par les gestes de réaction qu'il enregistre et où il lit l'expression du mépris. Mais ne nous y trompons pas : ils ne font que conforter notre franciscain dans son projet. Comme les autres relations de missionnaires le confirment, ceux qui partent sont conscients que leur entreprise de prosélytisme peut les conduire au martyre ou, pour le moins, à souffrir les quolibets de la foule pour faire triompher la parole du Christ : il s'agit de se donner à voir, de se représenter en disciple du Christ, attaché à revivre ce qu'il a vécu. Rubrouck prouve ici sa parfaite sérénité en montrant par contraste la frayeur de l'interprète, rétif à transmettre ses paroles de défi. Toutefois, la première rencontre avec Mongka qui aura lieu cinq mois plus tard montre chez notre voyageur une plus grande souplesse : certes, la génuflexion devant le chef mongol continue de lui coûter26 et, ici encore, le stratagème de la prière à Dieu lui permet de conformer geste et paroles à son propre code de conduite ; mais au lieu d'aboutir à des menaces comme dans le discours adressé à Batou, la prière à Dieu est habilement mêlée à la prière qu'il adresse au Grand Khan pour obtenir de lui la permission de demeurer dans son pays afin, dit-il, d' « y faire le service de Dieu envers <lui>-même, <ses> épouses et <ses> enfants »27.
18Ainsi, l'étude des gestes de Rubrouck face au pouvoir nous a permis de mettre en évidence sa volonté de déplacer le terrain de l'affrontement, qui perd son caractère strictement politique pour devenir essentiellement religieux. Certes, il est encore question de pouvoir, d'abord parce que les puissances temporelles sont à cette époque intimement liées au pouvoir religieux, en partie définies par la religion qu'elles prônent, mais aussi et surtout parce que le franciscain, en quittant le terrain politique pour le terrain religieux, se trouve confronté à une pluralité d'adversaires vis-à-vis desquels il lui incombe de démontrer la supériorité du christianisme romain afin de favoriser son adoption par les chefs mongols et, ici encore, les gestes vont jouer un rôle décisif.
3. LA DISTINCTION
19La cour du Grand Khan regroupe en effet une grande diversité religieuse : les "tuins" ou "idolâtres" (=les bouddhistes), les "sarrasins", les représentants des églises orientales - essentiellement les nestoriens, mais aussi les arméniens, tel le moine Sergius chez qui Rubrouck logera -, sans compter les devins mongols qui s'adonnent à des pratiques relevant du chamanisme. Chaque communauté jouit de la liberté de culte et en outre leurs prêtres sont régulièrement conviés à la cour afin de protéger le Khan et son entourage par leurs prières.
20Les gestes rituels de même que l'apparence extérieure permettent sans doute à chaque communauté de se distinguer et de se reconnaître mais n'en sont pas moins source de confusion, comme Rubrouck en fera très rapidement l'expérience. Ainsi, il trouve de nombreux points communs entre le comportement religieux des premiers "tuins" qu'il rencontre et celui des chrétiens, alors qu'il découvrira que leur doctrine est la plus aberrante puisqu'ils ne croient pas en l'existence d'un seul Dieu. En revanche, il constate que les nestoriens, dont il se sent évidemment proche sur le plan de la doctrine, ont emprunté bon nombre de rites à ceux qui restent pour Rubrouck les pires ennemis des chrétiens, les sarrasins :
« Quand ils entrent dans une église, ils lavent leurs membres inférieurs, comme les sarrasins. Ils mangent de la viande le vendredi et festoient, ce jour-là, à la manière des sarrasins »28.
21Attentif aux gestes religieux comme il l'a été aux gestes du travail, il s'applique à noter les différences dans la façon de prier des "tuins" et des nestoriens, tout en ayant conscience du caractère conventionnel de ces différences :
« Tous (s.e. les idolâtres) prient tournés vers le nord, les mains jointes, et en se prosternant à terre, genoux fléchis, le front posé sur les mains. De là vient que les nestoriens, dans ces régions, ne joignent aucunement les mains en priant, mais prient les paumes ouvertes devant la poitrine »29.
22C'est toutefois par le trait commun de la prière en direction de l'Orient que les nestoriens reconnaissent en Rubrouck un chrétien, alors qu'ils l'avaient pris pour un "tuin" à cause de sa barbe rasée, eux-mêmes se caractérisant par le port de la barbe30. Et le franciscain accordera au moine Sergius le mérite de l'« audace » lorsque celui-ci amènera la deuxième épouse du Khan, qui est idolâtre, à « se prosterner encore par trois fois en adorant la croix, tournée vers l'Orient, à la manière des chrétiens », alors qu'elle l'avait d'abord adorée en se tournant vers l'Occident à la manière des idolâtres31. Ainsi, ces gestes tels que se tourner vers l'Orient pour prier, honorer la croix constituent d'abord un langage commun et le voyageur, frappé dans un premier temps par la nouveauté du monde où il est entré, note avec la même joie sa rencontre avec un Coman qui le salue en latin32 et sa découverte d'un édifice surmonté d'une croix au beau milieu du campement de Mongka :
« Sur le chemin du retour, devant l'extrémité orientale de la cour, et à une distance de la cour égale à deux fois la portée d'une baliste, je vis une maison surmontée d'une croix. J'éprouvai alors une grande joie, supposant qu'il y avait là quelque chose de chrétien. J'entrai avec confiance et je trouvai un autel bien paré... »33.
23C'est ainsi qu'il rencontre le moine arménien Sergius, dont les pratiques coupables ne vont pas tarder à susciter en lui suspicion puis horreur, mais auquel il restera pourtant attaché « pour l'honneur de la croix »34. En effet, puisqu'il ne peut prêcher la foi chrétienne aux Mongols par la parole, faute de connaître la langue et de disposer d'un interprète compétent35, il est contraint de recourir aux signes non verbaux ; en particulier toute une gestuelle se développe autour de la précieuse croix que possède Sergius et qu'il promène de tente en tente, accompagné par le franciscain, jusqu'au jour où tous deux "inventent" un geste plus emblématique encore :
« ... le moine fit un étendard rempli de croix et se procura un bambou de la longueur d'une lance, qui nous servit à porter la croix en l'air (...). Nous portions (...) la croix, dressée en l'air à travers tout le camp, en chantant "Vexilla regis prodeunt", ce qui frappait les sarrasins de stupeur »36.
24L'exaltation de la croix, figurée telle quelle par cette croix dressée, est un geste immédiatement lisible, transparent, mais quelle efficacité, quel sens a-t-il sinon celui d'affirmer haut et fort l'existence du christianisme, face aux autres religions, comme le suggère d'ailleurs Rubrouck par la référence aux sarrasins stupéfaits, contre lesquels il part ici à sa manière en croisade ?
25En outre, la façon dont le culte de la croix est pratiqué par les nestoriens et le moine arménien auprès de l'entourage du Grand Khan ne tarde pas à susciter l'embarras puis la nette réprobation chez notre franciscain, pour deux raisons. Comme le récit détaillé de ces scènes le met en évidence, le geste tel qu'il est accompli et enseigné par les prêtres nestoriens et le moine perd sa fonction sacrée, son sens est détourné par les profits matériels que ceux-ci ne manquent jamais d'en tirer. Ainsi, la croix promenée par Sergius de tente en tente est placée par l'hôte mongol sur une pièce de tissu précieux qui revient chaque fois au moine37. Quant aux services religieux que tiennent les prêtres nestoriens dans leur chapelle pour le Khan et sa famille, ils se terminent immanquablement par des distributions de nourriture, d'argent et surtout par d'abondantes libations qui s'achèvent dans l'ivresse générale38. La seconde raison qui amène Rubrouck à condamner ces pratiques, c'est qu'elles s'apparentent purement et simplement à la magie. Ainsi, il critique sévèrement Sergius qui prétend guérir les malades avec une potion de rhubarbe dans laquelle a trempé une petite croix. Au faux miracle provoquée par l'extrême amertume de la rhubarbe, Rubrouck oppose le vrai, celui de l'eau bénite capable d'expulser les démons du corps qu'ils ont envahi. Si la différence avec la magie et les sortilèges est sentie comme évidente par Rubrouck, reste la difficile tâche de la communiquer. Un passage de sa relation est à cet égard très intéressant, celui où il assiste en compagnie de Sergius aux libations que l'on fait en présence du Grand Khan en aspergeant de comos les idoles de feutre disposées à l'intérieur des tentes :
« Je dis alors au moine : "Qu'y a-t-il de commun entre le Christ et Bélial ? Quel rapport de notre croix à ces idoles ?" »39
26Comme souvent, la parole de Rubrouck reprend le texte scripturaire : il transpose ici un passage de la deuxième épître de saint Paul aux Corinthiens40. Mais il semble aussi emprunter à l'apôtre sa conclusion quant à la conduite à adopter face aux incroyants :
« N'allez pas former avec les incroyants un attelage disparate (...) C'est pourquoi, dit le Seigneur, sortez du milieu de ces gens et séparez-vous d'eux. »41
27Les efforts de Rubrouck, tels du moins qu'il nous les donne à lire dans sa relation, tendent en effet tous vers un même but : apparaître différent, surtout par rapport aux autres chrétiens, le moine Sergius et les nestoriens, qui représentent pour lui le plus grand danger, tant leurs moeurs et leurs pratiques sont corrompues alors qu'ils prétendent prêcher la foi chrétienne. Pour redresser l'image du chrétien aux yeux des Mongols, il adopte un comportement qui l'amène à se distinguer, non pas en tant qu'individu mais en tant que membre de l'ordre des franciscains, comme le montre bien son insistance sur l'étonnement que lui et son compagnon suscitent, d'abord chez Batou puis à la cour de Mongka, en raison de leur tenue franciscaine qu'ils ont voulu conserver - « pieds nus, dans notre habit, tête nue »42. Tandis que Sergius et les prêtres nestoriens s'empressent d'accepter les dons du Khan et de sa famille, lui les refuse ou ne les accepte que pour les redonner aussitôt à ceux qui l'entourent. Tandis qu'ils s'enivrent, lui reste sobre. Tandis que Sergius ne cesse de promettre monts et merveilles au Grand Khan, lui se tait. Mais c'est surtout par un geste qu'il aime à se représenter lorsqu'il est en présence du Khan : la Bible sur la poitrine43. Geste emblématique : le corps se fait signifiant là où le langage est impuissant ; par cette parole de Dieu posée sur le coeur, Rubrouck illustre la ferveur de sa vocation apostolique mais cherche aussi à renvoyer celui qui le contemple à ce dont il n'est que le messager, la vérité contenue dans le Livre. Or ce signe semble bien compris par son éminent destinataire puisqu'à chaque fois le Khan se fait apporter la Bible et l'examine longuement, même si les enluminures qu'elle contenait le renseignaient bien peu sur le contenu du message chrétien. En fait, ce geste, comme tous ceux que Rubrouck s'efforce de faire pour se distinguer de ceux avec lesquels il refuse d'être confondu, semble avoir peu d'impact sur les destinataires. Ses pieds nus gèlent, et ce comportement, loin d'être compris comme une marque d'humilité, avait été perçu comme de la pure inconscience. Son refus des cadeaux suscite le mépris de ses hôtes mongols et passe pour de la sottise aux yeux des autres44. Ici encore, on peut toutefois se demander si cet échec n'est pas donné à voir comme exemplaire, rappelant la difficulté qu'eut le Christ lui-même à répandre autour de lui son message et à le faire comprendre.
28Nous terminerons en évoquant la dernière entrevue entre le Grand Khan et Rubrouck, qui est aussi l'occasion du plus long entretien qu'ont les deux hommes et celui où Mongka livre sa profession de foi. Or, au début de cette scène, le franciscain mentionne un geste quelque peu étonnant de la part du Grand Khan :
« Il tendit vers moi le bâton sur lequel il s'appuyait, en disant : "Ne craignez pas". Et moi, en souriant, je dis tout bas : "Si j'avais peur, je ne serais pas venu venu ici" »45.
29Etrange scène, telle que nous la présente Rubrouck, qui a sûrement en tête un souvenir biblique précis. Lequel ? Peut-être les paroles par lesquelles il conclut cette scène peuvent-elles nous guider :
« Alors, je sortis de devant sa face, et je ne suis pas revenu. Si j'avais eu le pouvoir de faire des miracles comme Moïse, peut-être se serait-il humilié »46
30Sa situation devant Mongka lui rappelle celle de Moïse devant Pharaon, mais alors que Moïse reçut de Yahvé le bâton qui lui permit de faire des miracles et de vaincre l'obstination de Pharaon contre le peuple juif, lui n'a pas reçu de Dieu une telle grâce47.
31En conclusion, nous avons vu d'abord l'attention manifestée par Rubrouck aux gestes techniques des Mongols, attention teintée d'admiration devant les prouesses accomplies par ce peuple pour utiliser au mieux leurs maigres ressources. Cette attitude nous semble révélatrice tant de la nouvelle curiosité des clercs pour le travail et ses techniques que de la mentalité franciscaine capable de s'ouvrir à la diversité des autres. Cette neutralité bienveillante s'efface toutefois lorsqu'il s'agit des croyances : face à la tolérance des Mongols, le franciscain cherche à affirmer la vérité du message du Christ. Contraint pour atteindre ce but à exploiter les ressources du langage des gestes, il ne cesse pourtant de faire l'expérience de ses limites : ainsi, les nestoriens prétendent soumettre certains chefs mongols aux rites chrétiens, mais que sont ces gestes, privés de leur signification, c'est-à-dire privés de la croyance, sinon de simples caricatures ? C'est donc lui-même qui s'offre en exemple, convertissant les autres au sens littéral, c'est-à dire amenant sur lui la conversion de leurs regards. Sans doute est-il bien conscient de n'avoir au bout du compte obtenu que des résultats bien dérisoires, mais si le "spectacle" qu'il a ainsi offert par son corps, par ses gestes, par son comportement, pour témoigner de la vérité chrétienne, s'adresse directement aux Mongols et aux étrangers qui peuplent leurs cours, Rubrouck sait aussi qu'il se fait d'abord et essentiellement sous le regard de Dieu.
Notes de bas de page
1 La relation a été éditée par A. Van den Wyngaert, Sinica Franciscana, vol. I, "Itinera et relationes fratrum Minorum saeculi xiii et xiv", pp. 164-332, Florence, Quaracchi, 1929. Nous suivons la traduction de Cl. et R. Kappler : Guillaume de Rubrouck, Voyage dans l'Empire mongol, Paris, Payot, 1985.
2 La raison des gestes dans l'Occident médiéval, Paris, Gallimard, 1990. J.-Cl. Schmitt examine entre autres le De institutione novitiorum de Hugues de Saint-Victor pour la formation des novices, les Miroirs des Princes pour l'éducation des futurs rois, les Artes predicandi pour les gestes recommandés aux prédicateurs, et les manuels des gestes de la prière à destination d'un public clérical ou laïque.
3 Pour ces données historiques, voir R. GROUSSET, L'empire des steppes. Attila, Gengis-Khan, Tamerlan, Paris, Payot, 1939 (rééd. 1993) ; J.-P. ROUX, Histoire de l'Empire mongol, Paris, Fayard, 1993.
4 Sur l'histoire de ces missions, voir J. Richard, La Papauté et les missions d'Orient au Moyen Age (xiiie-xve siècles), Ecole Française de Rome, 1977. Pour l'étude des relations de voyage dont nous disposons pour cette période, je me permets de renvoyer à mon ouvrage, Sur les routes de l'Empire mongol. Ordre et rhétorique des relations de voyage aux xiiie et xive siècles, Paris, Champion, 1994.
5 Voyage dans l'Empire mongol, p. 86.
6 En revanche, Plan Carpin dans son prologue présente clairement sa mission comme une mission d'information : « Nous avions, en effet, ordre du Souverain Pontife d'examiner toutes choses et de tout voir avec soin » (Histoire des Mongols, trad. J. Becquet et L. Hambis, Paris, Maisonneuve, 1965, p. 24).
7 Histoire de l'Empire mongol, p. 54.
8 Voyage dans l'Empire mongol, pp. 89-90.
9 La description fournie sur ce même sujet par Plan Carpin est beaucoup plus embrouillée (Histoire des Mongols, p. 32).
10 J.-Cl. Schmitt mentionne en particulier le Dictionarius de Jean de Garlande (vers 1220) qui, dans le but de fournir aux écoliers tous les mots nécessaires à la vie courante, en vient à énumérer les diverses parties du corps, puis les vêtements, puis les métiers nécessaires à la fabrication des vêtements (op. cit., p. 245). L'entreprise de Rubrouck est similaire en ce que c'est par le biais des gestes de la vie pratique qu'il entend d'abord saisir cet "autre monde" que constitue la société mongole.
11 Voyage dans l'Empire mongol, p. 95.
12 « Comme il couvrait la totalité de la vie des hommes, dont il fixait l'éthique, le comportement dans la vie privée, familiale et sociale, en temps de guerre et en temps de paix, pour le sacré et pour le profane, on peut dire que chaque action que l'on accomplissait ou dont on s'abstenait dépendait de lui » (J.-P. ROUX, Histoire de l'Empire mongol, p. 144).
13 Voyage dans l'Empire mongol, p. 92. Les "figurines" désignent les idoles de feutre qui assument pour les Mongols la fonction d'esprits tutélaires.
14 Voir J.-Cl. SCHMITT, op. cit., p. 333. De même, l'interdit du seuil - le seuil de la demeure d'un grand est intouchable -, ne semble pas surprendre outre mesure notre voyageur. Ce qu'il relève en revanche comme étrange dans cette coutume, c'est la transposition de la maison à la tente : « <Notre guide> nous mena devant le pavillon et nous recommanda de ne pas toucher les cordes de la tente parce qu'ils les considèrent comme le seuil de la maison » (Voyage dans l'Empire mongol, p. 130).
15 Batou, cousin du Grand Khan Mongka, avait été l'un des chefs de la campagne d'Europe : il avait participé à l'invasion de la Pologne et de la Hongrie, franchi le Danube en 1241 et pris Zagreb, puis s'était installé l'année suivante au nord de la mer Noire, où il régnait sur un vaste territoire. On imagine aisément les sentiments que la rencontre de ce redoutable chef de guerre pouvait susciter chez notre voyageur...
16 Voyage dans l'Empire mongol, p. 130.
17 Verset 15.
18 Voyage dans l'Empire mongol, p. 131 (c'est nous qui soulignons).
19 SCHMITT, op. cit., pp. 58-59.
20 « Aux xie-xiie siècles, deux gestes de prière s'imposent et deviennent caractéristiques de la prière occidentale : les mains jointes à hauteur de la poitrine, les doigts étant allongés, et la génuflexion (les deux genoux au sol) » (SCHMITT, ibid., p. 295).
21 Voyage dans l'Empire mongol, p. 162 (c'est nous qui soulignons).
22 Voir le pittoresque récit de cette entrevue par SIMON DE SAINT-QUENTIN, Historia Tartarorum, éd. J. Richard, Paris, Geuthner, 1965.
23 Voyage dans l'Empire mongol, p. 131 (c'est nous qui soulignons).
24 Cf. SCHMITT, op. cit., pp. 291-92.
25 Voyage dans l'Empire mongol, p. 131.
26 « ...il nous ordonna de parler. Il fallut alors nous agenouiller » (ibid., p. 164).
27 Ibid., p. 164.
28 Ibid., p. 154.
29 Ibid., p. 143.
30 « Des prêtres nestoriens arrivèrent, dont j'ignorais qu'ils fussent chrétiens, et qui nous demandèrent dans quelle direction nous priions. Je répondis : "Vers l'Orient". Ils nous demandaient cela parce que nous avions fait raser nos barbes, sur le conseil de notre guide, pour comparaître en présence du Chan selon les usages de notre patrie. De là vint qu'ils nous prirent pour des tuins, c'est-à-dire des idolâtres. » (p. 162)
31 Ibid., p. 178.
32 Ibid., p. 133.
33 Ibid., p. 159.
34 Ibid., p. 183.
35 Voir le résultat peu concluant de sa première tentative de prédication auprès du chef mongol Scatatay : « Je lui exposai, autant que je pus le faire par le moyen de mon interprète qui était sans aucune intelligence et sans aucune éloquence, le symbole de notre foi. L'ayant entendu, il resta silencieux et hocha la tête » (p. 109).
36 Ibid., pp. 182-83.
37 « Le moine portait cette croix partout, et les prêtres, voyant ce qu'il y gagnait, se mirent à le jalouser » (p. 179).
38 « Les prêtres chantaient en poussant de grands hurlements dans leur ivresse » (p. 179).
39 Ibid., p. 201.
40 6, 15-16.
41 6, 14 et 6, 17.
42 Cour de Batou : « Nous nous tînmes là, pieds nus, tête nue, et nous étions un grand spectacle à leurs yeux » (p. 130). Cour de Mongka : «... un valet hongrois se trouva là, qui nous reconnut, je veux dire qui reconnut notre Ordre. Et comme nous étions entourés de gens qui nous regardaient comme des monstres, surtout parce que nous étions pieds nus, et nous demandaient si nous n'avions pas besoin de nos pieds, car ils pensaient que nous les perdrions sur-le-champ, ce Hongrois leur en dit la raison, et leur expliqua les règles de notre Ordre » (p. 159).
43 « J'entrai dans l'oratoire, la Bible et le bréviaire sur la poitrine, et m'inclinai d'abord devant l'autel puis devant le Chan... » (p. 174) ; « Quand je m'étais la première fois trouvé devant lui, j'avais la Bible sur la poitrine, il se l'était fait apporter et l'avait longuement examinée » (ibid.) ; « Comme il voyait que nous tenions des Bibles sur notre poitrine, il les fit apporter pour les voir, et les examina avec beaucoup de soin » (p. 177).
44 Ainsi au moment du départ de Rubrouck, le Khan lui fait donner quelques vêtements par l'intermédiaire de ses secrétaires : « Nous dûmes les accepter, par respect envers lui, car ils prennent en très mauvaise part que l'on méprise leurs présents ». Et quand il invoque l'attitude chrétienne condamnant ceux qui recherchent les présents pour justifier son comportement au regard des secrétaires, « ils répondaient que nous étions des sots car si le Chan voulait leur donner toute sa cour, ils l'accepteraient volontiers et agiraient sagement » (p. 226).
45 Voyage dans l'Empire mongol, p. 213.
46 Ibid., p. 215.
47 Voir les belles pages consacrées à ce passage par Cl. Kappler dans t'intro. à son édition du texte de Rubrouck, pp. 28-30.
Auteur
Université de Rouen
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