Merlin magicien ?
p. 51-64
Texte intégral
1De nos jours, Merlin l’Enchanteur est sans doute le personnage issu de la légende arthurienne le plus connu, en partie grâce au dessin animé de Walt Disney qui porte ce titre, mais aussi, depuis plus d’un siècle, en raison d’une tradition bien établie qui se manifeste par exemple dans l’ouvrage d’Hersart de la Villemarqué qui porte ce titre. “Merlin l’Enchanteur”, c’est le personnage responsable de tous les prodiges qui ont lieu autour d’Arthur ; c’est le prototype de figures originales comme le Gandalf de J.R.R. Tolkien, c’est, en un mot, le magicien par excellence, qui, par nature ou du fait d’un savoir “pré-scientifique” acquis on ne sait trop comment, triomphe des lois humaines et physiques. Cependant, au milieu de ce consensus qui tend à faire de l’expression “Merlin l’Enchanteur” une formule quasiment lexicalisée1, on oublie qu’à l’origine Merlin n’était pas un magicien, mais un prophète, et accessoirement une figure de l’Antéchrist, puisqu’il était le fils du diable, engendré par le démon pour contre-balancer l’influence désastreuse du Christ incarné.
2En fait, si les références à Merlin dans les textes médiévaux sont nombreuses, y compris dans des œuvres qui n’ont aucun lien avec la légende arthurienne, elles font toutes allusion à sa qualité de prophète, ou à la rigueur de “devin”, ce qui est un aménagement de la première catégorie, dans la mesure où ce terme plus général prend en compte aussi bien la connaissance des secrets du passé, ou du présent, que les prédictions concernant le futur. Jusqu’au xvie siècle, Merlin est tout aussi résolument le modèle du prophète qu’il est maintenant celui du magicien. Pendant le xvie siècle encore, des prophéties ou “apophéties”, selon l’élégante formule d’Agrippa d’Aubigné, à contenu politique circulent sous le nom de Merlin, qui suffit à en garantir l’authenticité. Le conseiller du roi Arthur n’est que tardivement détrôné pour ce rôle par Michel de Nostre-Dame, à savoir Nostradamus.
3Que ce soit dans l’Historia regum Britanniae, noyau de la légende arthurienne, ou dans la Vita Merlini, témoin excentrique d’une tradition totalement différente à propos du personnage de Merlin, les seules activités de celui-ci sont d’ordre prophétique, ou relèvent de la divination : dans la Vita Merlini, Merlin n’hésite pas à mettre ses dons de “voyant” au service de causes mineures, puisqu’il s’en sert pour dévoiler l’adultère de sa sœur ou révéler la cachette d’un trésor. Dans l’Historia, c’est en cette capacité qu’il est employé par Vortigernus pour expliquer la chute de la tour que celui-ci veut construire : l’enfant “sans père”, qui n’est pas dans cette version le fils du diable des chrétiens, mais d’un démon incube qui semble plutôt hérité des conceptions de la physique antique, s’acquitte parfaitement de sa tâche, d’abord en décrivant le bizarre “montage” composé de la nappe d’eau souterraine, des deux pierres, et finalement des deux dragons qui vont combattre à mort, puis en tombant dans une transe prophétique au cours de laquelle il annonce non seulement l’issue de la bataille et sa signification, mais, emporté par son élan pourrait-on dire, enchaîne sur un nombre considérable de prophéties ayant trait à l’histoire de la Grande-Bretagne jusqu’au xiie siècle et au-delà2. Le succès de ce recueil de prophéties, qui contient en effet tous les ingrédients du genre, est tel qu’il connaîtra une belle carrière indépendamment du reste de l’Historia. Merlin réapparaît dans la suite pour venir en aide à Uter Pendragon à l’occasion de la conception d’Arthur, mais c’est sa dernière intervention dans le cours du récit.
4Au contraire, dans les textes en langue vernaculaire consacrés à Merlin, et en priorité dans le Merlin français3 et ses “continuations”, la dimension prophétique du personnage n’est pas la seule, ni même la plus importante. On retrouve dans le Merlin les prédictions canoniques attribuées au “prophete des Englois”, mais ce ne sont que des éléments, parmi d’autres, de l’activité de Merlin. Comme le titre donné à ce texte l’indique, ce qui importe ici ce n’est pas tant l’histoire grandiose du règne d’Arthur, ou même les merveilles du Graal, mais l’histoire de Merlin lui-même, l’Antéchrist manqué, le fils du diable racheté - peut-être - par la sainteté de sa mère. Sa carrière est étroitement liée à celle du roi Arthur, et même Graal, mais il est clair que des dons prophétiques, si remarquables soient-ils, ne suffiraient pas à soutenir l’intérêt dramatique pendant des centaines de pages, et ne seraient pas d’une grande utilité dans le contexte des guerres du jeune roi ou des aventures de ses neveux et de ses alliés. Dans le cours du Merlin propre, toutefois, le personnage principal se distingue encore essentiellement par sa capacité à prédire l’avenir, ou à connaître le passé et le présent caché aux yeux d’autrui ; et ses interventions concrètes sont relativement limitées, à l’exception bien sûr de son rôle dans l’engendrement d’Arthur, qui repose sur un talent qui relève de la magie ou du surnaturel féerique, plutôt que d’un don diabolique : l’aptitude de Merlin à changer à son gré d’apparence, et à modifier aussi celle des autres.
5Dans les manuscrits de la Suite-Vulgate4 qui assurent la transition entre la fin du Merlin propre, c’est-à-dire le couronnement d’Arthur, et le début du Lancelot, quelque quinze ans après, le rôle de Merlin est bien davantage celui d’un conseiller militaire, voire d’une arme secrète : dans la mesure où le fils du diable est très soucieux du salut de son âme, et de ce fait refuse de tuer de ses mains qui que ce soit, il n’est pas question d’exploits guerriers (et de fait, Merlin ne se présente jamais sous les traits d’un chevalier), mais de tours de magie qui entraînent la déconfiture des armées adverses (incendies, inondations, brouillards...), et de prodiges dans le domaine des communications (“divination” des plans ennemis, transmission quasi instantanée des messages entre le royaume de Carmelide et la Petite-Bretagne, par exemple). Merlin reste un “devin” qui connaît le passé, le présent et l’avenir, mais l’accent se situe ailleurs, et ces qualités spécifiques sont juste mentionnées en passant, comme une donnée de base du récit sur laquelle il n’est pas nécessaire de revenir. Le Livre d’Artus, manuscrit unique et fragmentaire qui se greffe sur la version canonique de ce qu’on appelle la Suite-Vulgate, va encore plus loin dans ce sens ; les épisodes dans lesquels s’illustre Merlin n’ont plus rien à voir avec ses fonctions initiales de prophète, ni même de conseiller du roi doté d’une sagesse exceptionnelle : ce sont des aventures fantastiques, ou des réécritures originales de séquences de la littérature antérieure, et d’ailleurs Merlin y semble davantage préoccupé de ses démêlés avec son amie Niniane que du sort du royaume de Logres5.
6Quant au texte que l’on appelle couramment, pour des raisons de tradition manuscrite, le Merlin-Huth, ou de façon plus exacte la Suite-Post-Vulgate6 du Merlin, il présente un cas à part : les interventions proprement magiques de Merlin y sont assez réduites (construction de monuments commémoratifs, d’ailleurs en général enrichis d’inscriptions relevant de la prédiction pure, recours à quelques “charmes” simples pour endormir un chevalier ou en transporter un d’un lieu à l’autre pendant son sommeil) ; en fait, les démonstrations de magie les plus spectaculaires dans le Merlin-Huth ne sont pas le fait de Merlin lui-même, mais de ses élèves, rivales, ou associées : la demoiselle du Lac, qui fait don à Arthur de l’épée Excalibur, Morgue la sœur du roi Arthur, Niviène la demoiselle chasseresse. Cependant, dans la mesure où les pouvoirs prophétiques de Merlin dans cette œuvre sont peu à peu entamés par sa déchéance morale, et d’ailleurs beaucoup plus limités que dans les autres textes7, l’image qui en ressort est plutôt celle d’un enchanteur, enchanteur enchanté et “pourrissant” comme celui d’Apollinaire, mais enchanteur tout de même, avant d’être devin.
7L’évolution se fait insensiblement, au fil des textes : la première manifestation des talents de magicien, et non plus de prophète, de Merlin est introduite en quelque sorte par la bande dans le récit. Il s’agit en effet de son aptitude à la métamorphose, ou, comme on le verra par la suite, de sa capacité de modifier à son gré aussi bien son apparence que celle d’autrui. C’est un élément essentiel, puisque c’est grâce à ce don de son conseiller qu’Uter peut approcher Y gerne et engendrer Arthur, garantie de l’avenir du roman. Mais en fait, le texte rapporte comme en passant les premières occurrences de ce phénomène, qui ne sont pas vraiment justifiées par l’argument du récit. En effet, les premières étapes de la carrière de Merlin ont lieu pendant son enfance, si l’on peut dire : en d’autres termes, l’effet dramatique maximal est alors obtenu par les discours surnaturellement sages de l’“enfant sans père”, réactualisant le topos du puer senex. Cependant, après la solution du conflit avec les clercs de Vertigier et la prophétie des deux dragons, il n’est plus question de l’apparence enfantine de Merlin ; en fait, lorsque par la suite des barons désireux de gagner la faveur de leur nouveau seigneur parlent aux fils de Constant du “conseiller” de l’usurpateur, ils ne mentionnent pas un enfant, mais un homme d’âge respectable, et en effet c’est un tel personnage qu’ils “reconnaissent” un peu plus tard, après que Merlin lui-même s’est présenté à Pandragon et Uter en jouant de son don pour la métamorphose.
8Lors de ses premiers contacts avec les deux princes, Merlin se présente successivement sous les traits d’un bûcheron, d’un homme sauvage, d’un “homme de bien”, d’un jeune messager8, et d’un vieillard respectable, avant de leur apparaître enfin sous sa forme “véritable”, dûment attestée par les barons, mais à propos de laquelle on n’a pas d’autre information, bien qu’il y soit fait allusion à plusieurs reprises dans les différentes Suites du Merlin propre. On peut d’ailleurs compléter cette liste avec les “semblances” qu’affectionne Merlin dans la Suite-Huth ou la Suite-Vulgate : petit enfant de deux ou trois ans (“semblance” peu avantageuse, en définitive, car ceux qui y sont confrontés ont tendance à ne pas ajouter foi aux discours d’une si faible créature, surtout lorsqu’elle prétend leur parler d’événements qui ont eu lieu deux générations plus tôt !9), “vilain” chasseur, gardien de bêtes hirsute et dépenaillé, écuyer porteur de messages, plus rarement “homme sauvage”, voire cerf douze-cors10. Une variante intéressante est celle du “contrait”, paralytique aveugle de surcroît, qui interpelle Uter dans son camp lors de la guerre contre le duc de Cornouaille ; en règle générale, on peut dégager des traits communs à toutes ses “semblances” : à l’exception de la figure du “prud’homme”, respectable et digne de foi, que Merlin adopte lorsqu’il veut parvenir rapidement à ses fins, toutes mettent en scène une humanité déformée, marginale, à la limite de la bestialité11. Il est plus difficile d’en déterminer la fonction : elles paraissent souvent correspondre à un goût gratuit de Merlin pour la mascarade, ou plutôt, dans la mesure où une motivation de ce type n’intervient guère dans un texte médiéval, à un effort de la part du système narratif pour transformer en mascarade inoffensive une caractéristique naturelle, et impossible à éradiquer complètement, du personnage ambigu de Merlin.
9Lui-même en donne une explication qui paraît bien faible à Biaise : c’est afin de mieux séduire Pandragon et Uter, et par là de mieux assurer son pouvoir sur eux, qu’il joue avec eux à ces sortes de jeux, se déguisant successivement sous trois ou quatre apparences pour les remplir de confusion et retenir leur attention. Un épisode pour le moins bizarre du Livre d’Artus, qui réécrit tout bonnement le “prologue” du Chevalier au lion de Chrétien de Troyes en faisant du gardien de bêtes rencontré par Calogrenant un avatar de Merlin, fournit une explication du même genre, mais qui porte cette fois sur l’enchanteur lui-même : c’est pour se distraire qu’il construit de toutes pièces ce scénario, alors qu’il s’ennuie en Petite-Bretagne et veut se venger de son rival auprès de Niniane son “amie”. Au total, ce talent semble plutôt peu catholique, et ressortit assez nettement aux origines diaboliques de Merlin. Peut-on même dire qu’il s’agisse d’un “art” magique ? Il est permis d’en douter : c’est davantage un “état de nature”, dont le “devin” sait faire bon usage ; à l’appui de cette thèse, on remarquera en effet que les changements d’apparence de Merlin sont signalés sans recourir aux formules passe-partout sur lesquelles on reviendra plus loin, et qui signalent une “action” de type magique.
10En revanche, dans la séquence-clé qui va aboutir à la conception d’Arthur, la faculté qu’a Merlin de modifier son apparence est soudainement étendue à autrui ; ce n’est plus cette fois un don de nature, mais le résultat de l’application de certaines méthodes rattachées à la “nigremance”, ou à la clergie. Il s’agit bel et bien de “magie”, dans la mesure où ce terme a une signification très proche de celui de "science" à l’époque moderne : Merlin est à même d’imposer au monde des modifications en contradiction avec les lois naturelles grâce à un savoir ésotérique dont il est le seul à disposer. Cette opération reste un cas isolé, toutefois : si Merlin continue à se métamorphoser pour un oui pour un non jusqu’à la fin de sa carrière (en fait, dans ses relations avec Niniane, il en vient selon la Suite-Vulgate à privilégier une apparence inédite, celle du jeune et beau jongleur qui vient conter fleurette à la demoiselle dans une prairie printanière), il ne fait pas profiter d’autres personnages de ce talent.
11Il en va différemment de la “magie météorologique”, si j’ose dire, que pratique couramment Merlin dans la Suite-Vulgate. D’un certain point de vue, quoique cette famille de textes soit celle où le prophète-enchanteur survit le plus longtemps, sa spécificité tend à se réduire, et ses interventions, qui se situent soit au niveau de la logistique des batailles, soit à celui de ce que l’on pourrait appeler les “renseignements”, restent extrêmement terre-à-terre, et répétitives12. Ayant en effet clairement fait savoir, une fois pour toutes, qu’il ne mettra pas son âme immortelle en danger en courant le risque de tuer, fût-ce des Saxons païens, au combat, Merlin ne peut venir en aide au jeune roi Arthur que par des moyens détournés, qui relèvent un peu du grand spectacle, ou du Grand-Guignol : c’est ainsi qu’à plusieurs reprises il sème la panique dans le camp ennemi13 en déclenchant parmi les tentes et pavillons un incendie qui ne laisse que des cendres derrière lui. Une variante de ce “charme” guerrier est le tourbillon de vent, qui renverse les tentes sur la tête des ennemis qui se reposent à l’intérieur, et cause une confusion dommageable dans l’armée opposée à Arthur et aux siens. Dans le même ordre d’idées, on peut encore mentionner la production d’un brouillard épais où se perdent les ennemis en fuite, de façon que les héros chrétiens puissent les rejoindre et les exterminer, ou encore de telle sorte que des renforts bien nécessaires n’arrivent pas, ou arrivent trop tard, au secours des païens. Dans tous ces cas de figure, Merlin en effet n’a pas besoin de se salir les mains, il ne tue personne, mais il est évident que ces phénomènes apparemment naturels (le vent, le brouillard, même le feu, ne sont pas des choses qui sortent tellement de l’ordinaire ; ils pourraient avoir lieu “par hasard”, sans l’opportune intervention de Merlin !) sont produits par “magie”, et sont le résultat de pratiques surnaturelles.
12C’est là l’aspect le plus spectaculaire de l’action de Merlin dans la Suite-Vulgate ; pour le reste, le prophète-enchanteur se distingue surtout en tant qu’informateur - rôle dans lequel, comme on l’a vu déjà, son don de “métamorphose” lui est particulièrement utile : il ne cesse de signaler à Arthur, à ses alliés Ban et Bohort, à Gauvain, à ses autres protégés, les dangers qui les menacent ou qui pèsent sur leurs plus chers amis, ou les mouvements prévus par l’ennemi. A partir de cette connaissance précise des faits et gestes de tous les combattants sur un champ de bataille, par exemple, ou des décisions prises par le conseil des rois païens, il n’y a rien d’étonnant à ce que Merlin joue aussi le rôle d’un stratège qui détermine la meilleure conduite à tenir et organise les mouvements de l’armée. Son utilité est encore accrue du fait de son don de quasi-ubiquité : lorsqu’il faut transmettre un message urgent au sénéchal de Bénoïc ou de Gaunes, Merlin peut franchir la mer et se retrouver à Trèbes en quelques heures, peut-être même instantanément, alors qu’il faudrait normalement des jours à des messagers normaux. Ce dernier trait, toutefois, comme la capacité de changer d’apparence à son gré, ne paraît pas tant relever d’un savoir acquis par Merlin que d’une nature particulière du personnage.
13Le reste de l’activité de Merlin relève plutôt du symbolique que du domaine des faits concrets. A cette catégorie se rattachent en particulier tous les “monuments” commémoratifs qu’élabore ou contribue à élaborer le prophète-enchanteur, et au premier chef les dragons d’Uter et d’Arthur. A l’origine de l’obessions merlinesque avec les dragons, on a d’une part le combat des deux créatures ailées qui empêchent la tour de Vertigier de tenir, et d’autre part, venu d’une tradition mal comprise, le nom même de l’un des fils de Constant, Pendragon. Lors de la première bataille de Salesbierres, un dragon apparaît dans le ciel au moment crucial, et sert de signal pour déterminer l’intervention d’Uter avec son corps d’armée : la nature exacte de cette apparition reste incertaine ; s’agit-il d’une “simple” comète, un phénomène astronomique prévu par Merlin au moyen de son don (divin) de prophétie, ou de connaissance du futur, et mis à profit pour le déroulement de la bataille décisive ? Ou bien est-ce une "“merveille” créée de toutes pièces par Merlin lui-même, au moyen de sa magie, de ses “arts” ? Il est impossible de le déterminer avec précision ; en revanche, les deux dragons d’or, l’un destiné à être offert en ex-voto à la cathédrale de Canterbury, l’autre à servir de bannière au nouveau roi qui a ajouté le nom de son frère au sien, sont clairement des artefacts produits sinon par Merlin en personne, du moins sous sa direction. Ils ne paraissent pas “magiques” cependant, et ils ne sont pas mentionnés dans la suite du récit. Il en va tout autrement de l’enseigne au dragon dont le magicien fait don à Arthur au début de son règne, et de la Suite-Vulgate, et qu’il porte parfois lui-même à la bataille, usurpant en quelque sorte le rôle de Keu le sénéchal. Ce dragon-là n’est pas un objet naturel, fabriqué de manière artisanale ; il est dit qu’il est en airain, certes, ce qui n’a rien de particulièrement frappant, mais on précise que sa queue se tord au vent -comme s’il s’agissait d’une bannière d’étoffe -, et que, comme tout dragon qui se respecte, il crache feu et flammes par la gueule et par les naseaux : un tel effet requiert un mode de fabrication surnaturel, magique pour tout dire. Cette enseigne peut et doit figurer en bonne place dans une liste des “merveilles” de Merlin qui imiterait ces autres listes de prodiges attribuées à un autre magicien, Virgile...
14De fait, d’ailleurs, un certain nombre de “merveilles” merlinesques semblent copiées des “merveilles” virgiliennes - peut-être parce que l’imagination humaine étant somme toute limitée, on ne saurait inventer un arsenal complet de prodiges à chaque nouvelle figure de magicien qui se manifeste dans les textes, ou encore parce que la filiation avec les “grands ancêtres” contribue au prestige des nouveaux-venus, dans une esthétique fondée sur le respect de l’autorité. Lit magique, permettant d’identifier le meilleur chevalier du monde, pilier magique, qui rend fous ceux qui y attachent leur chevaux sans mériter, une fois de plus, ce titre de “Bon Chevalier”, “île tournoyante” dont on donne une étiologie pour le moins fantaisiste, et d’ailleurs variable selon les textes : tels sont quelques échantillons de la panoplie d’enchantements attribués à Merlin, et dont la fonction essentielle est de rappeler le souvenir du prophète-enchanteur lorsqu’il a disparu du champ de la fiction. Merlin faisant apparemment peu confiance à la mémoire humaine prend d’ailleurs soin, le plus souvent, de fournir lui-même le modus operandi de ces prodiges, en les accompagnant d’une inscription dont la valeur est double : d’une part, elle annonce en général un événement connu de la Vulgate arthurienne, qui se déroulera en ces lieux, et en tant que tel relève de la dimension prophétique de Merlin ; d’autre part, elle insiste sur le fait que ce “monument” a été instauré par Merlin, et constitue donc une signature, une main-mise de l’enchanteur sur le récit, par-delà les limites de son existence terrestre. Car Merlin, à la fin de sa carrière, est obsédé par sa disparition prochaine, contre laquelle ne peut rien son don de prophétie, et il s’efforce de mettre en place des signes compensatoires de sa présence. En ce sens, on peut dire que l’activité magique de Merlin se substitue à son activité prophétique, pour que la trace de ses enchantements remplace métonymiquement sa personne et son discours14.
15A vrai dire, ces analyses s’appliquent essentiellement aux produits de l’activité tardive de Merlin, dans les Suites Vulgate et Post-Vulgate, à un moment où la figure classique du vates a été largement contaminée par celle du magicien, ou du praticien de l’art douteux de “nigremance” ; au demeurant, ce terme à connotations négatives n’est que rarement employé en référence à Merlin, même dans les textes “de seconde génération”. Dans le Merlin propre, le devin n’apparaît que rarement sous les traits d’un magicien : les deux seules occurrences indéniables de pratiques magiques sont l’érection de Stonehenge en mémoire de Pendragon, et la “métamorphose” d’Uter et d’Ulfin pour permettre la conception d’Arthur. L’épisode des pierres d’Irlande, transportées de la Chaussée des Géants à la plaine de Salesbierres, puis dressées en cercle sous le couvert de la nuit, est présenté sans doute possible comme une opération magique effectuée grâce à des moyens surnaturels, une fois que les forces humaines ont dû s’avouer vaincues. Encore faut-il noter, comme on le verra plus précisément plus loin, que le récit ne s’attarde pas sur ces événements extra-ordinaires. On a déjà abordé la question de la visite à Tintagel : à part ces deux séquences, il ne reste dans le Merlin propre que des cas douteux, soit que l’on puisse interpréter les faits autrement que par le recours à la magie, soit que l’intervention de Merlin ne soit pas certaine. Ainsi, l’amour soudain qui unit les chevaliers de la Table Ronde, après que Merlin est passé derrière eux alors qu’ils étaient assis pour la première fois à la Table est-il une manifestation de la grâce divine, ou un “truc” de Merlin pour renforcer la cohésion de ce corps d’élite au service du roi de Logres ? Et la “merveille” complexe de l’épée dans l’enclume dans le roc, qui apparaît miraculeusement sur la place devant la cathédrale de Londres, est-elle envoyée par Dieu pour désigner son roi élu, ou fabriquée par Merlin pour donner un petit “coup de pouce” aux événements, les desseins de Dieu restant, comme on sait, difficiles à pénétrer ? Gesta Dei per Merlinum, en quelque sorte... Mais dans ces conditions, où commence, et où finit, la magie ? Sans compter que pour être complet, il faudrait encore aborder la question du savoir magique de Merlin sous l’angle de ce qu’il apprend à ses élèves. Morgue, Niniane, Niviène, et bien d’autres15...
16De toute façon, quelles que soient les “merveilles” que Merlin accomplit au service des rois de Logres, ou de sa propre gloire, les textes sont remarquablement discrets quant aux méthodes employées pour parvenir à ces résultats - ce qui, bien sûr, est aisément compréhensible : la magie n’est pas exactement une science exacte, et les écrivains dotés de l’imagination la plus délirante seraient bien en peine de décrire avec une apparence de précision les enchantements qui aboutissent à des prodiges comme l’édification de Stonehenge, l’instauration de feux qui brûlent (presque) éternellement, ou la métamorphose du roi Uter en une image parfaite du duc de Cornouaille... A cette impossibilité technique vient s’ajouter une contrainte de nature religieuse, en quelque sorte : le xiiie siècle ne saurait traiter à la légère de “nigremance”, ni inventer comme le feront les époques postérieures des formules magiques et des rituels plus ou moins démoniaques. Merlin est donc un magicien, c’est un fait acquis, mais un magicien sans magie, ou plus exactement, pour ne pas cultiver le paradoxe, un magicien dont les performances magiques sont passées sous silence, ou escamotées au moyen de quelques phrases et expressions leit-motiv, qui ne disent pas grand-chose de concret.
17La plus courante, qui n’est pas d’ailleurs employée seulement à propos de Merlin, est “jeter ses sorts” : formulation générique, qui s’applique aussi bien à une tentative de divination (lorsque les “clercs” de Vertigier cherchent à voir ce qu’il en est de la tour qui tombe) qu’à l’érection de Stonehenge ou au déclenchement d’un incendie meurtrier dans le camp des ennemis d’Arthur. Au reste, Merlin n’est pas un illusionniste au sens moderne du terme : dans la mesure du possible, il accomplit sa magie dans l’ombre, à l’écart des hommes, sans témoins. La plupart des monuments qu’il édifie sont achevés pendant la nuit, ou du moins les inscriptions qui en révèlent le sens et la fonction se gravent pendant la nuit sur le marbre - et au matin, bien souvent, Merlin ou le “prud’homme” sous l’apparence duquel il s’était présenté a disparu. Il en va de même pour les déplacements du magicien : dans la Suite-Vulgate en particulier, l’accent est mis sur la manière dont il disparaît brutalement, au terme d’une conversation, de sorte que “les autres ne surent ce qu’il était devenu”.
18Pas de grand spectacle, pas d’effets pyrotechniques : Merlin est un magicien éminemment discret. Sans doute ses enchantements sont-ils essentiellement de nature verbale, puisque Niniane ou Niviène, son “amie”, prend grand soin de mettre par écrit ce que le prophète-enchanteur lui a appris16, et que Morgue semble faire de même. C’est d’ailleurs très raisonnable, dans la mesure où ce qui définit essentiellement Merlin, c’est sa parole, parole ininterrompue qui relève à la limite de la logorrhée, comme on le voit dans les différentes versions des Prophesies de Merlin17. Mais, alors que les prophéties du devin sont scrupuleusement notées, même lorsqu’elles sont si obscures que personne n’y comprend rien18, personne apparemment ne se trouve en situation d’entendre, et de préserver, les “charmes” ou les “sorts” prononcés par Merlin. Il lui arrive, pourtant, d’attirer l’attention de son public sur la prouesse que constitue l’une de ses réalisations : ainsi, lorsqu’à deux reprises dans l’épisode du tombeau de Pendragon il amène les hommes chargés de transporter les pierres de la carole des géants, puis de les dresser sur le site choisi, à reconnaître leur impuissance. Mais après avoir extorqué d’eux ces aveux, il exécute lui-même la tâche en cause sans que personne sache comment il s’y prend : pas de témoins pour glorifier le magicien, pas de scribes pour tenir le journal détaillé de ses actions. A peine si quelques manuscrits malveillants suggèrent que peut-être l’enchanteur a fait appel pour accomplir cette tâche impossible à de “mauvais esprits”, à des diables comme lui...
19En fait, on met peu en doute l’“orthodoxie” des méthodes de Merlin. Même dans la Suite-Huth, où le personnage est démonisé et noirci comme à plaisir, on n’assimile pas ses pratiques magiques à des “arts” nécessairement diaboliques - à la différence de ce qui se passe avec Morgue, dont il est toujours dit clairement que son grand savoir lui vient du diable, avec les conséquences que l’on sait - perte de sa beauté, “échauffement de luxure”, etc.. Au contraire, dans le cas de Merlin, on laisse parfois entendre que sa science est en fait une science “naturelle”, basée sur la connaissance des “proprietates rerum”, ces “propriétés des choses” auxquelles Barthélémy l’Anglais, par exemple, consacre un traité et qu’il n’est pas interdit d’étudier, même dans une optique strictement chrétienne19. C’est ainsi que, lors de l’épisode crucial qui prélude à l’engendrement d’Arthur, Merlin a recours à des moyens “naturels” pour donner à Uter et Ulfin l’apparence du duc de Cornouaille et de son conseiller Jourdain. Afin d’opérer la transformation, en effet, il donne à ses deux compagnons une herbe dont ils se frottent le visage, et en quittant Tintagel il leur enjoint de se laver mains et visage dans une eau courante20. Mais cela ne va pas plus loin : le texte se garde bien de préciser de quelle herbe il s’agit, et d’ailleurs, le lecteur soupçonne que ces préparatifs concrets ne sont là que pour rassurer les sujets, et garantir le degré de conformité “scientifique” de l’opération. Le reste du temps, Merlin s’en passe avec bonheur.
20Au total, d’ailleurs, qu’il "“jette son sort” ou “fasse son enchantement”, ou encore - et c’est l’indication la plus détaillée que l’on rencontre dans les textes -, qu’il trace avec sa ceinture ou d’un simple geste de sa main un ou plusieurs “cernes”, c’est-à-dire cercles, pour délimiter l’espace où va se manifester la “merveille”, cela revient au même : la magie, l’art de “nigremance” reste du domaine de l’indicible, tout autant que les “merveilles” du Graal. Le lecteur, inévitablement, reste sur sa faim - et c’est peut-être ce qui explique pourquoi la fin du Moyen Age, davantage orientée vers une approche scientifique et disons quantitative des choses, s’est détournée pendant quelque temps d’un Merlin magicien pour en revenir à un Merlin prophète, dans la bouche de qui on pouvait mettre à peu près n’importe quelle prédiction, de préférence politique et “engagée”. Mais le même argument est réversible, et explique pourquoi, de Purcell21 à Tennyson, tous les créateurs en quête d’une figure surnaturelle dotée de talents hors du commun ont repris, et magnifié, celle de Merlin l’enchanteur.
Notes de bas de page
1 Quand on veut parler d’un magicien, on parle facilement d’un "Merlin" ; j’en veux pour preuve l’existence, en Allemagne, d’une liqueur de Noël, à la pomme et à ta cannelle, a laquelle des publicitaires habiles ont donné le nom de "Merlins Zauber". bien qu’on ne voie vraiment pas ce que l’enchanteur breton vient taire dans cette histoire...
2 Pour ce qui est de la période postérieure à lu date où Geoffrey de Monmouth écrit son œuvre, les prophéties prennent une coloration nettement apocalyptique ; cependant, comme de toute façon elles ne sont jamais des plus claires, la différence n’est pas très marquée.
3 Merlin, ed. A. Micha, Droz Genève, 1980.
4 Disponible jusqu’à présent dans l’édition Sommer. Cf. The Suite-Vulgate du Merlin, in the Vulgate Version of the Arthurian Romances, ed. O. Sommer, Carnegie Institute of Washington, Washington, 1907-13. Une nouvelle édition, avec traduction et notes, est en préparation dans le cadre de la publication du cycle complet du Lancelot-Graal tel qu’il apparaît dans le manuscrit de Bonn, dans la Bibliothèque de la Pléiade chez Gallimard (1er volume prévu pour 1998-1999). Cette partie du manuscrit porte le titre spécifique de Premiers faits du roi Arthur.
5 Cf. Le livre d’Artus, vol. VII (Supplement) of the Vulgate Version of the Arthurian Romances, ed. O. Sommer, Carnegie Institute of Washington, Washington, 1913. Sans parler du Graal, qui est très présent dans le Livre d’Artus. mais sans lien avec Merlin.
6 Voir à ce propos la démonstration convaincante de F. Bogdanow qui prépare une édition de ce cycle “Post-Vulgate” reconstruit par ses soins. Gilles Roussineau vient de donner une édition de la “Suite du Merlin”, à partir du manuscrit Huth, d’un manuscrit inédit découvert dans les années 40, et d’un fragment de manuscrit cyclique qui se rattache clairement aux textes précédents (cf. La Suite du Roman de Merlin, éd. G. Roussineau, Genève, Droz, 1996, 2 vol.).
7 A la différence du Merlin propre, par exemple, la vision du futur que présente la Suite Huth fait une large place à l’existence de “mondes possibles” parallèles, qui compliquent la vie de Merlin : ses prédictions adoptent souvent une forme alternative : “Ou bien il se produira tel événement, ou bien il s’en produira un autre...”
8 Connu par ailleurs de l’une de ses deux “victimes”, puisqu’Uter “reconnaît” sans hésitation l’un des jeunes serviteurs de son amie, et n’a par conséquent aucune raison de douter de l’authenticité du message qu’il lui apporte...
9 Voir a ce propos l’une des premières scènes de la Suite-Huth, où Arthur refus carrément de prêter créance à ce que l’entant Merlin lui dit de sa naissance et de son lignage, sous prétexte qu’il ne saurait avoir connu personnellement Uter Pandragon, puisqu’il n’a pas plus de deux ou trois ans ! (cf. La Suite du Roman de Merlin, op. cit., volume I) Cependant, cette “semblance” enfantine, chargée de fortes connotations christiques, est employée avec une valence entièrement positive dans le Perceval du Pseudo-Robert de Boron (cf. Le Roman dou graal, éd. B. Cerquiglini, Pans, UGE 10/18, 1982).
10 Dans l’épisode de Grisandole, en marge des Premiers faits du roi Arthur (voir op. cit.) ; la métamorphose en cerf de Merlin n’est pas sans rappeler ses affinités “de nature” avec les bêles sauvages dans la Vita Merlini ; quant a sa semblance d’“Homme Sauvage”, elle paraît correspondre véritablement à la nature profonde du personnage, tout en rejoignant un motif folklorique bien attesté ; l’Homo silvaticus dont il est question dans cette séquence, et qui est présenté par Merlin comme son père, dans le discours “faux-vrai” qu’il tient à l’empereur, n’est pas un être humain comme un autre, contraint à l’isolement pour des mollis “culturels”, mais l’une de ces créatures qui survivent en marge du monde humain, comme les ondins ou les fées, créatures que certains textes rassemblent d’ailleurs sous le terme générique de “faés”.
11 Y compris celle de l’enfant ; Merlin en effet est un infans qui parle - il ne fait mêm que cela ! -, c’est-à-dire une contradiction dans les termes, un monstre. El d’ailleurs, son apparence à sa naissance, tout couvert de poils noirs, fait on ne pleut plus clairement signe du côté de l’animalité.
12 Pour illustrer mon propos par une comparaison : dans le film Excalibur de John Boorman, Merlin prononce dans la grande séquence fantasmagorique du début, qui va aboutir à la conception d’Arthur, le “Charm of Making”, c’est-à-dire une formule qui contient l’essence même de sa magie et influe sur le “dragon” situé au cœur du monde- Mais nettement plus tard, lorsqu’il s’agit de guérir Lancelot qui a combattu pour la reine et gît mourant dans une banale chambre de Camaalot, Merlin trace sur son corps un vague signe en marmonnant sans la moindre solennité... les paroles de ce même “Charm of Making”, qui est d’ailleurs prononcé deux fois encore, lorsque Merlin blessé à mort veut ranimer le “dragon” en le récitant avec t’aide ( !) de Morgan, et lorsque Merlin devenu fantôme contraint Morgan à le réciter elle-même avant la bataille finale pour produire un brouillard analogue à celui de début. Le résultat de cette banalisation, c’est que le spectateur a l’impression que Merlin connaît en tout et pour tout une formule magique, qu’il peut “meure à toutes les sauces”, employer aussi bien pour guérir que pour tuer que pour produire un phénomène météo, etc.. La crédibilité du personnage de Merlin en souffre quelque peu !
13 Quel que soit l’ennemi, d’ailleurs : dans le premier cas, ce sont les barons révoltés, plus tard les alliés romains et gaulois de Claudas de la Déserte...
14 Il le dit d’ailleurs on ne peut plus clairement dans le cas de la “merveilles” des enchanteurs brûlant (dans la Suite Post-Vulgate), dont la valeur commémorative est explicite, et la signification d’autant plus exemplaire que ces “mauvais” enchanteurs avaient coutume de séduire leurs victimes par leurs chants (cl la musique de leurs harpes), sinon par leurs paroles.
15 Dans les Prophéties de Merlin, en particulier, qui fait état d’une longue série de disciples féminins ce Merlin, qui ne se soucient que d’apprendre la “nigremance”, et non pas l’an de prophétiser (en admettant que celte grâce divine puisse se transmettre...).
16 Dans certaines versions de l’histoire, il est même fait état des deux “mots” que la future Dame du Lac place sur ses aines pour se garantir contre le désir de Merlin, chaque fois que celui-ci croit coucher avec elle.
17 Voir l’édition de L. A. Paton (New York-London, MLA Series-Oxford University Press. 1026. 2 vol.). et la mienne à la fondation Bodmer (Cologny-Genève, 1992.), ainsi que le fac-simile de l’imprimé Vérard de 1498 (London, Scholar Press, 1977, 3 vol).
18 Voir dans le Merlin propre l’épisode du “baron aux trois morts”, et, à la suite de ce triomphe improbable de Merlin, les débuts de la rédaction du “livre des prophéties de Merlin”, différent de celui de Biaise, et composé de toutes les élucubrations d’un prophète facétieux qui dit lui-même qu’à partir de ce moment il “ne parlera si oscurement non”...
19 C’est après tout exactement la définition que le Lancelot donne des ‘‘fées”, et précisément à propos de la Dame du Lac, qui connaît “la force des herbes et des pierres” ; dans le contexte, il est préférable de ne pas rappeler que ces connaissances, elle les doit en fait au fils du diable qu’elle a en définitive “engingnié”.
20 La valeur de l’eau courante, et non stagnante, en magie “naturelle” est bien connue.
21 Son opéra King Arthur, dont l’argument n’a qu’un rapport lointain avec les motifs classiques de la légende arthurienne, présente un Merlin peu actif, qui par sa magie va cependant rendre la vue à Gwendolyn, l’épouse bien-aimée d’Arthur.
Auteur
University of Connecticut, USA
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