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Quelle maturation de la logistique inversée ?

p. 195-203

Résumés

Depuis une vingtaine d’années, la logistique inversée apparaît dans la littérature académique comme un processus permettant de retourner des produits refusés par le consommateur, des produits invendus, des produits défaillants à échanger ou à réparer, mais aussi, des produits en fin de vie. Ce chapitre expose la maturation de ce concept de la logistique inversée ces vingt dernières années. Il traite ainsi des spécificités de gestion des processus de logistique inversée, par rapport au schéma traditionnel de la logistique, en démontrant l’implication de nombreuses parties prenantes dans ces processus.

In the last twenty years, the reverse logistics appears in the academic literature as a process of being able to return products rejected by the consumer, unsold products, and faulty products for exchange or repair, but also products reaching their end of life, in other words, the waste. Therefore, the purpose of this chapter is to expose the maturation of the concept of reverse logistics during the last twenty years, and also to deal with management specificities of reverse logistics relative to the traditional scheme of logistics, also demonstrating enlargement of stakeholders present in this process.


Texte intégral

1Le développement durable rappelle constamment à la logistique qu’elle doit être innovante pour initier des schémas logistiques durables et efficaces. La logistique inversée a déjà montré sa légitimité dans les pratiques durables de SCM. En tant que démarche transversale de gestion de flux physiques et d’informations associées, elle prend en compte le cycle de vie total de ces flux. Cette logistique, qui combine plusieurs activités (collecte, tri, entreposage, transport, traitement intermédiaire, retraitement et stockage final), et nécessite de nombreuses ressources et compétences (capacités de collecte, transports adaptés, centres de tri et de regroupement, centres de traitement et de valorisation), est aujourd’hui en phase de maturation. L’objectif de la contribution est de montrer quelle est l’évolution de la logistique inversée depuis une vingtaine d’années. Dans cette optique, le chapitre commence par redécouvrir les origines de l’émergence de la logistique inversée en présentant les différentes facettes de cette logistique. Il synthétise, ensuite, les spécificités de gestion de ces processus de logistique inversée et présente, enfin, ses multiples parties prenantes.

L’émergence d’un concept

2Ces vingt dernières années, plusieurs expressions faisant référence à la logistique inversée ont été utilisées : la logistique à rebours, la logistique des retours, la rétro-logistique, ou encore, la logistique inverse. Ce concept de « logistique inversée » est également exprimé par sa traduction anglo-saxonne « reverse logistics » ou encore par les termes « reverse logistique ». Le foisonnement des termes relatif à la logistique inversée témoigne d’une conceptualisation progressive. Ce n’est qu’au début des années 1990 aux États-Unis, puis en 1992 en Europe avec l’ASLOG que l’expression « reverse logistics » est apparue, alors que Zikmund et Stanton (1971) s’intéressaient déjà à la chaîne inversée au début des années 1970. Lambert et Stock (1981) mettent en lumière la notion d’inversion du processus logistique en caractérisant le concept de logistique inversée comme une exception face au sens de circulation coutumier de la grande majorité des produits. Par la suite, de nombreux auteurs ont proposé leurs propres définitions de la logistique inversée. La diversité de ces définitions révèle notamment un phénomène de fragmentation de la logistique inversée que l’on peut également observer au niveau de la mise en place des processus de logistique inversée.

3Parmi les différentes réalisations en logistique inversée, deux grands types de spécialisation se dégagent. Le premier est la logistique des produits en fin de vie, qui gère l’ensemble des filières d’élimination et de valorisation résultant de la consommation ou de la production. Dans cette spécialisation, les flux entrants dans la chaîne sont considérés comme des produits en fin de vie : des déchets. Ces derniers doivent être traités, afin de retrouver une certaine valeur sur un marché secondaire. Les formes de ce traitement peuvent être très variables (physique, chimique, thermique, etc.). La transformation des matériaux peut se révéler importante, comme lorsqu’un déchet est transformé en énergie dans un centre d’incinération. Le second type de spécialisation est la logistique des retours. Dans ce cas, les flux remontent plus ou moins directement d’un ou de plusieurs maillons de la chaîne logistique. Ce sont les produits refusés par le consommateur, les invendus, les produits défaillants à échanger ou à réparer ou, encore, les produits défectueux rappelés par les producteurs. Dans ce type de logistique inversée, les flux entrants sont considérés comme des produits « en cours de vie » pour lesquels il convient de réaliser à nouveau des opérations logistiques et/ou industrielles afin d’optimiser leurs valeurs.

4La fragmentation de la logistique inversée s’explique par le fait que les facteurs d’émergence sont très différents dans le deux cas. En ce qui concerne la logistique des produits en fin de vie, le facteur d’émergence prédominant est lié au rôle de l’État dans la société. Traditionnellement en France, l’élimination des déchets correspond à une logique de service public. À l’origine de l’organisation d’un service d’enlèvement des ordures ménagères n’étaient récupérés que les résidus d’artisanat (métaux refondus, vieux chiffons, papiers pour la pâte à papier, etc.). Le reste des déchets était organique, c’est-à-dire, composé de matière naturelle et rapidement biodégradable. En campagne, les déchets organiques venaient compléter les engrais ou la nourriture des animaux, tandis qu’en ville, les caniveaux ou autre terrain vague récoltaient les détritus peu polluants. L’utilisation de nouvelles matières industrielles au cours du xxe siècle a multiplié le nombre et la taille des décharges. Ces dernières, bien que couplées avec d’autres technologies, notamment l’incinération, sont devenues très problématiques. Leurs nombreuses nuisances se sont manifestées au grand public : pollution visuelle et olfactive, fuites de produits chimiques dans les sols, etc.

5L’État est alors amené à agir afin de limiter les impacts de la gestion des déchets sur l’environnement et les populations. Il prend plusieurs séries de décisions réglementaires qui ont pour conséquences l’émergence de problématiques de logistique des produits en fin de vie. Diverses réglementations émergent ainsi dans le monde entier. Citons par exemple, en France, le décret n° 2005-829 du 20 juillet 2005 relatif à la composition et à l’élimination des équipements électriques et électroniques, ou la loi n° 2005-1319 du 26 octobre 2005 portant sur la mise en décharge des déchets ; en Allemagne, le décret Verpack V de 1991, donnant naissance aux systèmes de reprise, de tri et de recyclage des emballages ; aux États Unis, le Nuclear Waste Policy Act de 1982, exigeant le stockage des déchets de haute activité dans un site géologique. Ces réglementations, pas toujours homogènes, ont pour conséquence le développement de filières et de processus très différents en fonction des pays. La mise en place des processus de gestion correspond ici à une nécessaire conformité réglementaire face à des directives européennes, à des obligations légales et donc, à une prise de conscience environnementale et sociale du problème de la consommation de masse. C’est ici la dimension environnementale qui insuffle un besoin de gérer ces produits en fin de vie. Carter et Ellram (1998) se positionnent par exemple sur cette spécialisation environnementale en la définissant comme « un processus par lequel les entreprises peuvent devenir plus respectueuses de l’environnement grâce au recyclage, à la réutilisation et à la réduction de la quantité des matériaux utilisés ».

6En ce qui concerne la logistique des retours, le principal facteur d’émergence est représenté par la pression concurrentielle que subissent les entreprises. Depuis le début des années 1980, cette forte pression concurrentielle pousse les entreprises à améliorer leurs processus de retour afin de toujours mieux contenter les clients. Le meilleur contrôle du service après vente et de la prise en charge des réparations devient alors un enjeu important. Dans de nombreux secteurs d’activité, les rappels des produits défectueux se multiplient. Par exemple, en 2009, Philips rappelle ses cafetières Senseo ; en 2010, la Renault Scenic rappelle 251288 modèles pour dysfonctionnement des freins ; en 2011, SEB-CERF rappelle des steaks surgelés. Dans les années 1990 et 2000, l’avènement de la vente à distance puis du e-commerce renforce l’intérêt de gérer les retours des marchandises des organisations publiques ou privées. Ainsi, l’entreprise de vente de chaussures en ligne Spatoo affiche 12 % de retour. Cette prise en charge des retours concerne les aspects physiques et financiers des flux et fait aujourd’hui partie d’une véritable stratégie commerciale et logistique de l’entreprise. La recherche de meilleures performances logistiques en termes de collecte, de tri, de transport, de stockage, de redistribution de ces produits devient essentielle.

7L’amélioration de l’organisation et de la flexibilité de l’entreprise est indispensable pour une hausse de l’efficience et de l’efficacité du processus de retour ainsi que pour la création de nouveaux marchés intéressés par ces produits de seconde main. L’émergence de cette logistique des retours est liée à la prise de conscience qu’une bonne démarche de logistique inversée ne réduit pas seulement les coûts mais augmente aussi les revenus. Dowlatshahi (2000) ou encore Rogers et Tibben-Lembke (2001) se rejoignent davantage sur cette spécialisation de logistique des retours en soutenant l’idée que l’activité de collecte et la planification en amont des processus sont déterminantes pour créer de la valeur dans cette chaîne logistique. La logistique des retours est alors

un processus de planification, de mise en œuvre et de contrôle, de manière rationnelle et avantageuse, des flux de matières premières, de produits semi-finis, depuis le point de consommation jusqu’au point d’origine, dans les buts de récupérer, de créer de la valeur ou d’améliorer l’élimination (Rogers et Tibben-Lembke, 2001).

8Comme Leite (2003) l’a remarqué, l’existence de plusieurs définitions et citations en logistique inversée témoigne du fait que la conceptualisation est encore en évolution, particulièrement face à l’augmentation de l’intérêt des entreprises et de celui des chercheurs. De plus, ces diverses définitions ne sont pas vraiment différentes les unes des autres. Chacune propose une particularité mais le fondement principal reste toujours le même. Ainsi, Dowlatshahi (2000), qui expose une définition similaire à celle de Rogers et Tibben-Lembke (2001), restreint simplement la logistique inversée aux retours des clients. Ce fondement commun aux définitions atteste du renforcement progressif mais certain des compétences et des processus en logistique inversée.

9Dans ce chapitre, nous proposons d’utiliser une extension de la définition de la logistique traditionnelle donnée par Colin (2005) pour définir la logistique inversée. La logistique inversée a, en effet, la particularité d’un objectif plus global que celui de la logistique et d’une prise en compte de dimensions multiples avec un nombre plus élevé de flux, d’activités et d’acteurs. Son but consiste à rechercher l’efficacité et l’efficience de la gestion des retours de produits tout au long de leurs cycles de vie. Ces derniers partent du point de consommation pour retrouver une seconde vie. L’objectif élargi consiste donc à obtenir un profit maximal, au vu de la multiplicité des options envisageables en ce qui concerne la « seconde » vie des produits (redistribution, réparation, recyclage, valorisation matière, valorisation énergétique, etc.). Ainsi, la logistique inversée constitue une démarche de pilotage et de gestion des flux physiques de marchandises par des flux virtuels d’informations associées, du point de consommation au point d’approvisionnement, dans le but de récupérer, de créer de la valeur ou d’améliorer l’élimination pour satisfaire les exigences des parties prenantes. La figure 1 présente le système de logistique inversée.

Figure 1 : Le système de logistique inversée

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Les spécificités de gestion

10L’une des premières spécificités de gestion de la logistique inversée par rapport au schéma traditionnel d’approvisionnement est l’inversion des rôles du producteur et du consommateur. Le premier lien de la distribution est représenté par le détenteur des produits en fin de vie. Dans un système de logistique inversée, le consommateur devient producteur du flux entrant. Il symbolise le point de départ du flux physique, mais également du flux monétaire. Alors qu’il réintroduit son produit en fin de vie dans la chaîne, le consommateur participe aussi financièrement à la valorisation ou à l’élimination de ce dernier. Lorsqu’il ne contribue pas directement à ce coût, il y contribue généralement indirectement (éco-taxe à l’achat du produit, prix lié au SAV, etc.).

11Une deuxième spécificité est liée à l’entrée du déchet dans le système de logistique inversée. Alors qu’en logistique industrielle traditionnelle, les prévisions d’approvisionnement sont relativement fiabilisées, en logistique inversée l’incertitude domine encore. L’approvisionnement des flux dans la chaîne n’est possible que lorsque ces derniers sont considérés comme étant inadaptés, défectueux ou en fin de vie. Il est très difficile de savoir à quel moment précis cette situation va intervenir. L’incertitude concerne également l’état du produit en fin de vie au moment de son entrée dans la chaîne : va-t-il être entier ? Partiellement démantelé ? Très usé ? Pourra-t-on réutiliser les matériaux ? Lesquels ? Dans quelles conditions ?, etc. La planification des flux en logistique inversée dépend ainsi des lieux et des dates des retours ainsi que des caractéristiques de ces flux en termes de volume, de qualité, de mixité ou de composition.

12Une troisième spécificité est relative à l’activité de collecte et de récupération des flux. Le choix du mode de collecte revient à distinguer le transport effectué par le producteur de déchets (vers des points de collecte), du transport réalisé par un prestataire spécialisé. Le recours au prestataire suppose un passage en porte-à-porte qui multiplie les points de collecte et complexifie ainsi la gestion des flux. En matière de valorisation des produits en fin de vie, le niveau de tri et de sélection est également à prendre en compte dans ce transport initial. Le tri à la source, c’est-à-dire le tri effectué directement par le producteur de déchets, simplifie la gestion des flux en éliminant des tris intermédiaires. Cependant, ce tri complexifie également la collecte en augmentant le nombre et le coût des transports. La problématique de la collecte passe ainsi par un arbitrage entre la complexité de la gestion des flux (en termes de tri) et la complexité du transport, ces deux éléments étant inversement proportionnels.

13Même si la logistique inversée revêt des spécificités de gestion importantes, certains aspects sont fortement liés à la logistique traditionnelle. Comme dans tout processus de production, la qualité et la coordination des différentes activités ainsi que la coopération entre les parties prenantes du système sont essentielles afin de concourir à un objectif commun de création de valeur finale (voir le chapitre p. 179). L’efficacité et l’efficience des activités de collecte et de récupération déterminent ainsi la qualité de l’approvisionnement, l’état des flux entrants, la bonne réalisation des activités de tri et de sélection puis des activités de traitement et de valorisation ou de stockage en décharge. Le système de logistique inversée recherche également la flexibilité des capacités en termes de processus, de transport et d’entreposage, etc. Les systèmes d’information et de traçabilité sont de plus en plus critiques dans les réseaux de valorisation des produits en fin de vie pour faciliter le suivi et le contrôle des flux (exigences de reporting jusqu’au traitement final). Au-delà du suivi des palettes, des containers, des étapes du recyclage, du stockage des matières, etc., ils permettent de donner une information fiable aux clients lors de retour de produits défectueux.

14En conclusion, le développement de processus de plus en plus efficaces et efficients en logistique inversée est relié à la prise en compte des spécificités de gestion afin de prétendre à une approche stratégique du système. La logistique inversée est ainsi fortement dépendante du maillon d’approvisionnement dans la chaîne. Ce point est à la fois caractérisé par des incertitudes et de la complexité. Par conséquent, les gestionnaires de logistique inversée doivent avoir une parfaite maîtrise du système dans son ensemble afin de gérer les flux de manière efficace. Et ceci d’autant plus que les produits entrants dans le système évoluent technologiquement. Le processus de sélection des activités (de valorisation) et des ressources (moyens de collecte, d’entreposage et de transport, centres de tri et de traitement) adaptés à la gestion des différents flux doit être rigoureux et de plus en plus rapide. Or, en fonction de l’état du produit, de sa durée de vie et du lieu d’entrée dans la chaîne, se posent les questions suivantes : est-il réparable ? Revendable ? Peut-il être valorisé ? De quelle manière ? Dans quels types d’industries ? À quel coût ? La réponse à ces questions dépend de la connaissance des produits, des technologies existantes en matière de logistique inversée mais aussi de celle des différents coûts liés à ses activités afin d’optimiser le gain de valeur dans la chaîne. De plus, pour ne pas subir la logistique inversée en gérant de façon précipitée l’organisation des activités et en combinant les ressources les plus facilement accessibles, il convient d’identifier clairement les parties prenantes du réseau de logistique inversée ainsi que leurs rôles et leurs compétences.

Les parties prenantes

15Les spécificités de gestion en logistique inversée sont intrinsèquement liées à l’élargissement des parties prenantes par rapport à la logistique traditionnelle. De plus en plus nombreuses, les parties prenantes interagissent d’autant plus (Noireaux et Poirel, 2010 ; Monnet, 2011). Suivant l’évolution du canal de distribution, les acteurs historiques du canal tels que les producteurs et les distributeurs ne sont plus les seuls concernés par les objectifs organisationnels ou leur réalisation. Les parties prenantes représentent l’ensemble des acteurs qui effectuent des transactions économiques ainsi que ceux qui interagissent à un niveau socio-économique. Si les acteurs économiques et financiers tels que les fournisseurs, les clients, les actionnaires, les employés, les sous-traitants, les banques et assurances restent des acteurs usuellement étudiés dans toute logique transactionnelle, les acteurs institutionnels, le gouvernement, l’opinion publique, les groupes de pression, les syndicats, les médias, les associations de protection deviennent des acteurs incontournables dans cette logique interactionnelle.

16La pluralité des activités de la logistique inversée, qui s’étendent de la collecte à la redistribution, légitime un nombre d’intermédiaires non présents dans les réseaux traditionnels. De la même façon que les intermédiaires de distribution se sont naturellement imposés dans les canaux traditionnels, des spécialistes de la collecte, de la gestion des flux inversés ou de la valorisation apparaissent comme des acteurs clés dans les réseaux de logistique inversée. Ce sont les prestataires spécialisés dans la collecte, l’industrie du recyclage ou encore les PSL. C’est sur eux que repose la gestion de l’ensemble de la chaîne logistique. Leurs organisations et leurs connaissances des différentes activités de la chaîne sont donc des éléments prédominants à la bonne exécution de la logistique inversée. Dans un réseau de logistique inversée, il convient de catégoriser les cinq groupes de parties prenantes suivants (voir le tableau 1) :

  • Les metteurs sur le marché des produits concernent les producteurs, les importateurs, les revendeurs, les distributeurs de produits finis. Ils peuvent être, dans certains cas (logistique des retours, ou encore pour certains types de déchets tels que les DEEE, les véhicules hors d’usage, etc.), les garants du bon déroulement du système du fait de leur responsabilité élargie et de leur engagement financier dans la chaîne logistique.
  • Les consommateurs de produits sont aussi les détenteurs de produits en fin de vie. Il s’agit des ménages et de toutes les organisations privées et publiques. Selon leur objectif sur le produit, ils sont la clé d’entrée de la logistique des retours ou de la logistique des produits en fin de vie. Concernant la logistique des retours, les produits sont restitués au distributeur ou au producteur dans le but d’une réparation ou d’une restitution monétaire. En ce qui concerne la logistique des produits en fin de vie, leurs connaissances des modes de collecte et des différentes filières de valorisation déterminent le volume et la qualité de l’approvisionnement de ce maillon d’entrée du réseau.
  • Les récupérateurs sont représentés par les points de collecte, les transporteurs et les centres de regroupement et de tri comme les municipalités ou de leurs regroupements, les entreprises de réinsertion sociale, les associations, les PSL, les industriels du recyclage, etc. Notons que ces récupérateurs sont des PSL « traditionnels » dans la logistique des retours, alors que dans la logistique des produits en fin de vie, ils sont davantage spécialisés du fait des obligations réglementaires liées au transport des déchets (autorisation préfectorale).
  • Les opérateurs sont les centres de traitement et de valorisation. Ce sont également des organisations publiques et privées. Dans le contexte particulier de la logistique des retours, ce sont les entreprises qui effectuent les réparations ou les opérations industrielles sur les produits. Ces entreprises peuvent être des sous-traitants des producteurs, ou les producteurs eux-mêmes. Les récupérateurs et les opérateurs mobilisent des ressources et compétences spécifiques pour réaliser leurs prestations. Certains PSL développent des savoir-faire organisationnels, relationnels et cognitifs pour assembler les compétences de plusieurs prestataires.
  • Les tiers intervenants symbolisent le gouvernement, les institutions, les associations, les fédérations, les groupes de pression. Ils jouent un rôle important dans la codification, la construction des outils réglementaires et d’évaluation, l’accompagnement dans le dialogue, l’information et la sensibilisation des différentes parties prenantes.

Tableau 1 : Les parties prenantes de la logistique inversée

Type de PPActeursRôle dans la logistique inversée
Metteurs sur le marchéProducteurs Importateurs Revendeurs Distributeurs– Général : vente aux consommateurs de produits qui se retrouveront dans la logistique inversée sous forme de produits en cours et en fin de vie
 – Logistique des retours : opérations industrielles et/ou commerciales
 – Logistique des produits en fin de vie : pour certains types de produits, responsabilité élargie qui implique notamment une contribution financière « du berceau au tombeau »
ConsommateursMénages Organisations privées Organisations publiques– Général : premier maillon de la logistique inversée, ils apportent leurs produits en cours ou fin de vie dans la chaîne
 – Logistique des retours : leurs niveaux de connaissance des modalités de retour et l’accès aux informations facilitent l’accès et le retour des flux
 – Logistique des produits en fin de vie : leurs niveaux de connaissance de la filière déterminent la qualité et la quantité des flux entrants
RécupérateursCollectivités/ regroupements Entreprises de réinsertion Associations PSL Industriels du recyclage– Général : reprise pour réintroduire les flux de matériaux dans une filière de logistique des retours ou de logistique des déchets
 – Logistiques des retours : ce sont souvent les PSL qui acheminent les flux jusqu’aux metteurs sur le marché
 – Logistique des produits en fin de vie : choix de la filière d’élimination/valorisation en fonction de leur réseau et de leurs compétences
OpérateursCentre de traitement Centre de valorisation Producteurs– Général : traitement industriel des flux de matériaux
 – Logistique des retours : remplacement de pièces défectueuses et réparation
 – Logistique des produits en fin de vie : choix de la technique de traitement/valorisation
Tiers intervenantsGouvernement Institutions Associations Fédérations Groupes de pressions Médias– Général : prévention et contrôle des risques, normalisation des activités de logistique inversée, construction d’outils réglementaires
 – Logistique des retours : prévention des risques de l’utilisation d’un produit par le consommateur
 – Logistique des produits en fin de vie : prévention des risques sanitaires, environnementaux et techniques de la gestion des déchets et des impacts de l’activité

Conclusion

17Le concept et les processus de logistique inversée sont encore en cours d’évolution. Tandis que la littérature maîtrise la conceptualisation de la logistique traditionnelle depuis le milieu du siècle dernier, le concept de logistique inversée a commencé à être exploré au début des années 1990. Il existe ainsi un écart de conceptualisation entre les deux disciplines d’au moins trente ans. C’est peut-être pour cette raison que Marchal (2006) désigne la logistique inversée comme « l’enfant oublié de la chaîne logistique globale ». Au-delà de sa jeunesse conceptuelle, les processus de logistique inversée ont des spécificités de gestion qui peuvent encore freiner leur pilotage. Le pilotage et la gestion des flux en logistique inversée se distinguent, en effet, de ceux généralement effectués en logistique traditionnelle où les activités et les rôles de chaque partie prenante sont bien connus et où la recherche d’efficience et d’efficacité est devenue une priorité.

18La maturation du concept et des processus de logistique inversée dépend fortement des différentes réponses aux problématiques émergeant au sein des différents maillons du système de logistique inversée ainsi que dans sa globalité, ce qui suppose de parfaire sa connaissance des parties prenantes et de leurs rôles dans chaque activité de la logistique inversée. Cette évolution s’inscrit totalement en continuité de la maturation des supply chains durables. Comme le soulignent Linton et al. (2007), il convient, en effet, d’étudier l’interaction entre les principes du développement durable et la supply chain durable dans son ensemble.

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