Du verger au cosmos : plantes et planètes dans la tradition médiévale
p. 313-327
Texte intégral
1Le point de départ du présent travail est une interrogation suscitée par le célèbre passage du Joli Buisson de Jonece où Froissart, par la bouche de « Joneche », rappelle à son lecteur qu’il a autrefois subi quelques leçons d’astrologie.
Si fui je as escoles jadis,
Il y a des ans plus de dis.
Et la nous lisoit alefie
Uns maistres en philozophie
Lechons d’astrologie grans
Et j’estoie lors moult engrans
Que de retenir et d’aprendre (vv. 1556 - 61)1
2Ce passage en effet peut surprendre dans une allégorie courtoise d’une part et d’autre part chez un auteur qui, d’ordinaire, fait très peu montre de préoccupations « scientifiques ». Si la mode d’un didactisme savant quasi systématique a tendance à s’établir chez les poètes du xive siècle, Froissart échappe en général à celle-ci. On peut donc penser que l’introduction d’une dimension astrologique dans le Joli Buisson de Jonece joue un rôle dans l’économie de ce texte et qu’elle doit être intégrée dans la construction de l’allégorie. Le discours de « Jonece » fait ici pendant à celui de Genius dans le Roman de la Rose, avec une fonction toutefois très différente et d’une ambition plus limitée. Il s’agit en fait de préciser le cadre de l’allégorie et d’en donner une dimension supérieure.
3Au niveau du récit, outre son pouvoir d’affirmer implicitement la propre science de l’auteur, le discours de « Jonece » permet d’établir une transition ; le poète va révéler un des aspects essentiels de son buisson allégorique. Jeunesse en effet établit une correspondance entre le buisson et les étoiles, entre le végétal et le supralunaire : il rappelle que son maître « figuroit tout par raison/Les foellettes de ce buisson/As estoilles qui sont sans nombre » (vv. 1570 sq.). Froissart se lance ensuite dans une description plus détaillée dans laquelle intervient sa connaissance de la symbolique des astres. Nous y reviendrons.
4En fait, cette « élucidation » est amenée dans le texte de Froissart par une série de remarques qui, à l’analyse, révèlent l’intention de faire aussi du buisson une allégorie de l’espace, au sens cosmographique et cosmologique du terme. La nature du buisson de Froissart est le fruit d’une stratification du sens et des images et la relation verger/cosmos occupe une place importante dans ce feuilletage.
5La première mention au buisson, au vers 9, est faite dans le cadre traditionnel du prologue mélancolique, où le poète vieillissant se retourne vers son passé. On peut ici comprendre « jonece » dans un sens qui n’est pas forcément allégorique. Ce qui compte est la notion de temps et de regret du temps passé. Le buisson, végéta] délimitant un espace, est donc d’entrée de jeu investi d’une dimension spatio-temporelle : sous les yeux du lecteur, il est la marque d’un espace ; dans le fil du texte, l’image est rejetée dans le passé.
6Le « Buisson de Jonece » réapparaît ensuite dans le cours du songe, lorsque Vénus invite le dormeur à se rendre « en l’adrece/Dou joli Buisson de Jonece » (vv. 1184-5). Cette fois-ci, le buisson est clairement marqué du sceau de l’allégorie, toute traditionnelle d’ailleurs, le cadre étant défini comme un songe, devenu véritable procédé après le Roman de la Rose ; de plus, la scène elle-même précise ce champ : c’est Vénus qui fait l’invite, l’accès au buisson est donné par la déesse de l’amour. Même si l’on peut enregistrer un léger décalage par rapport au Roman de la Rose, l’appel à se rendre dans le buisson est un implicite donnant à penser au traditionnel verger d’Amour. Toutefois, il s’agit bien du buisson de « jonece ». Le monde courtois ne saurait être ici considéré hors du temps. « Jeunesse » en effet signifie de façon double. En tant qu’attribut se référant au narrateur, il va dans le sens des caractères obligés de l’univers courtois. En tant que rappel d’un âge de l’homme, décalé du présent depuis le prologue de l’ouvrage, il projette le poète hors du cadre qu’il dessine, c’est-à-dire l’oblige à parler du passé. Le présent du texte est donc un faux, c’est un présent translaté. Le jeu sur le temps a de plus pour conséquence de rappeler une dimension supplémentaire du buisson, présente dès le début du poème. En tant que lieu allégorisé, il est atemporel ; en tant que buisson de jeunesse, il devient calendaire, marqueur du temps qui a passé.
7Froissart va ensuite se pencher sur la forme du buisson. Après avoir établi le végétai par rapport au temps et à la nature, allégorique, de l’oeuvre, le poète en examine l’aspect spatial, la géométrie.
Et me fu adont grans esbas
De regarder et haut et bas
Pour ymaginer de quel fourme
Li Buissons, dont je vous enfourme
Estoit. (...)
Bien me sambloit, c’est fin de somme,
Tout aussi reons q’une pomme,... (vv. 1370..77)
8L’accent est mis sur la sphéricité du buisson. Pour ce faire, le poète engage son lecteur à « ymaginer » la forme de ce buisson. Après la célèbre étude de Lucien Foulet2, on connaît l’importance que revêt ce terme dans les Chroniques de Froissart. Ici, le poète invite son lecteur à abstraire, quasiment au sens mathématique du terme, et à construire une forme géométrique. On sait que le terme « imaginer » prend au xivème siècle un sens particulier dans les écrits scientifiques, en particulier chez Nicole Oresme3. Suite aux écrits sur la logique d’Ockam et surtout de Buridan4, on assiste à un débat chez les savants sur l’application du raisonnement secundum imaginationem aux questions de physique. Sans prétendre à voir là une contamination directe sur la poésie de Froissart, - notre poète, on l’a dit, étant en général fort éloigné des questions scientifiques -, on peut toutefois penser que le terme « ymaginer », dans ce contexte précis, renvoie à une configuration plus générale, à l’ébauche d’un raisonnement qui conduit à l’élaboration d’une image savante, ici cosmologique. Froissart ne ferait que rendre compte dans son vocabulaire, sans véritable conscience du débat sous-jacent, d’une utilisation plus répandue du terme dans les milieux cultivés. L’association de l’imago avec la dimension cosmologique du buisson se précise encore lorsque l’auteur note que son buisson est « reons » comme une pomme. La comparaison avec la pomme est fréquente dans la littérature pour marquer la forme circulaire, mais elle est aussi très utilisée par les encyclopédistes comme image didactique visant à montrer la sphéricité de l’univers ou du globe terrestre. On trouve par exemple la comparaison dans le De naturis rerum d’Alexandre Neckam5 et, plus proche de Froissart, dans l’Image du monde de Gossouin de Metz6. Ce n’est sans doute pas un hasard si Froissart a pris le soin de noter la forme de son buisson. Pour en marquer d’une part la perfection, mais aussi pour affirmer le lien qui l’unit avec le monde. On se souvienda à ce sujet de ce que précise Jean de Meun lorsqu’il reprend Guillaume de Lorris, justement à propos de la forme de son verger :
Au rcgart de ceste closture,
qui n’est pas fete en quarreüre,
ainz est si ronde et si sou tille
c’onques ne fu berill ne bille
de forme si bien arondie (éd. Lecoy, vv. 20263- 67)
9Pour Jean en effet, la forme arrondie est plus adaptée au message universel qu’il entend donner et dans lequel par ailleurs l’astronomie occupe une place importante. Il ne voit dans le jardin de Guillaume, tout en « quarreure » qu’un monde trop terrestre, se glissant derrière le symbolisme numérique de la parité. Il entend pour sa part situer son univers textuel dans une métaphore de l’Univers lui-même et Jean, bien au courant des théories cosmographiques de son temps, ne peut dès lors concevoir son verger que d’une forme sphérique. Compte tenu de l’indéniable influence du Roman de ta Rose sur Froissart et les écrivains de son temps, influence qui se mesure aussi bien dans le détail que dans la tonalité de multiples oeuvres7, il paraît légitime de penser que l’intention de Froissart, quant au cadre de son allégorie, va dans un sens proche de celle de Jean de Meun8 ; la forme de son buisson s’apparente aussi à celle du verger cosmique de Jean.
10Pour marquer davantage cet aspect, le buisson de Froissart défie les lois de la physique sublunaire. Comme le rêveur prend la peine de le préciser, le buisson n’est soutenu par aucun « tuyel ne bus » (v. 1380). « Qui le portoit ? » interroge-t-il ; « Riens n’en savoie ». N’est-ce pas là précisément un des attributs du monde, compris comme globe terrestre ou bien comme univers ? Pour appuyer encore cette dimension cosmologique, l’auteur va alors montrer l’immensité de son univers allégorique :
Car il estoit plus haut C. paumes
Que nuls qu’on peuïst trouver.
Et encores, pour csprouver
Le grandeur, se je le peuïsse
Ou se faire je le sceuïsse,
Volentiers y fuisse avenus.
Mes je ne sçai mie se nuls
Le poroit justement comprendre.
Non pourquant pour le compas prendre
Dou milieu, selonc tout mon sens,
Au cheminer avant m’assens.
Mes tant ne me sçai eslongier
Que j’en puisse riens voir jugier
Pour faire question ne proeve,
Car toutdis ou milieu me troeve,
Par semblance, non par raison, (vv. 1387-1402)
11Après la forme générale, c’est au tour de la couleur d’être précisée. C’est encore une occasion pour le poète de montrer qu’il ne s’agit pas de rester au sens littéral, ni non plus à un sens allégorique trop immédiat qui identifierait son buisson avec un traditionnel verger. Le buisson de « Jonece » en effet possède tous les attributs colorés de la partie visible du firmament :
Chils Buissons dont je vous pourpos
Avoit une couleur tres propre
Qui n’estoit mie de sinopre,
D’or ne d’argent ne de noir pur,
Anchois se traoit sus l’azur
Cler et fin et resplendissant.
Riens ne l’aloit amatissant.
Mes a chief de fois il s’ondoie
Sus le blanc... (vv. 1405-13)
12Point n’est besoin d’un long commentaire pour voir qu’il y a dans ces vers une mise en perspective, à propos de couleur, du buisson et du ciel.
13La passage auquel je faisais allusion au début de ce travail est la partie du poème où vont se confirmer el s’amplifier les correspondances esquissées jusqu’alors. Tout d’abord, la relation est explicitée par l’intermédiaire des paroles du maître :
Plusieurs fois li oÿ comprendre
Le firmament, qui est reons
Que coustumièrement veons,
A .I. buisson vert en tous tamps. (vv. 1563-66)
14Si Froissart ne reprend pas ici le précédent rapport avec la couleur, il introduit clairement la relation buisson/firmament avec, notons-le, un buisson qui n’est pas forcément celui du poème. Le fait que le comparant utilisé soit vert permet un jeu sur plusieurs registres signifiants. Le buisson de jeunesse vient se juxtaposer à ce buisson plus général. Il y a correspondance mais non identification. Ceci permet une écriture ambiguë autorisant la plénitude de l’allégorie. Après cette affirmation, Froissart va dessiner son buisson. Citons ce long passage si riche dans le jeu des correspondances :
Les foellettes de ce buisson
As cstoilles qui sont sans nombre
Avoec ce, il comprendoit l’ombre 9
Dou buisson qu’il universoit
A Nature, et l’i conversoit,
La quele ordonne et baille et livre
Au monde ce dont il doit vivre
Et aministre nuit et jour
(...)
Hommes, femmes, oisiaus et bestes
Et donne a cascun et cascune
Sa propriété si commune
Que cascuns a se qualité.
Revenans a moralité
De la figure dessus fette
A fin qu’elle soit plus parfette,
En ce buisson jusqu’à .VII. branches
Mettoit, selonc les remcmbranches
Que j’ai del astrologiien
(...)
Et ces branches cleres et nettes
Figuroit il as VII. pianettes ;
A cascune un nom arestoit ;
La Lune la premiere estoit,
La seconde Mercurius,
Et la tierce appelloit Venus ;
Le Soleil nommoit le quatrisme
Et Mars prendoit pour le chiunquisme ;
Le .VI. me. qui bien le nombre,
Jupiter le mettoit en nombre ;
La septisme, selonc son us,
Appellee estoit Saturnus.
15Il y a deux registres de comparaison dans ce passage. L’un que l’on pourrait qualifier de « local », l’autre de « global ». D’une part, Froissart établit des équivalences entre les feuilles cl les étoiles, puis entre les branches et les planètes. D’autre part, le buisson de notre poète s’apparente à l’univers. Froissart nous dit que le maître « universoit » son buisson et qu’il le met sur un rang analogue à Nature. Dans ce simple verbe « universer » se joue une des problématiques de l’oeuvre. Il s’agit en effet de comprendre le buisson allégorique dans une dimension totalisante, le poète étant alors porteur d’un message universel. Sa parole s’inscrit en effet naturellement dans le contour tracé par la géographie du texte. Du vers 9 à la prière finale à la Vierge, où le buisson ardent s’est juxtaposé, pour l’occulter, au buisson allégorique10 s’est dessiné un cheminement, un parcours dont à la fois le centre et le pourtour se constituent en la figure du buisson, figure comprise justement comme une totalité. C’est dans ce cadre que le poète propose à la fois l’aventure de la réminiscence, le parcours initiatique, mais rétrospectif, que doit conduire un amant, le message pessimiste issu de l’expérience amoureuse aboutissant à la transformation, d’ailleurs essentiellement rhétorique, de la nature de l’amour. Du point de vue donc de ce que j’appelle la géographie du texte, comme de celui de l’ornatio, enfin comme vecteur sémantique, le buisson se révèle le représentant d’un universel, dont l’archétype n’est autre que l’univers lui-même.
16Cet aspect est renforcé par la comparaison avec Nature qui nuit et jour travaille au renouvellement des espèces. De ce point de vue, le buisson paraît assez proche de la célèbre forge de Jean de Meun, lieu où la nature oeuvre sans cesse. Cette comparaison s’établit sur un mode que le poète rend explicite, qui est celui de la figura. Froissart dévoile une nouvelle dimension de l’image qui, en retour, révèle l’intîme nature du buisson : ce dernier est bien une figura. Jeunesse nous dit en effet que le sage astrologue « figuroit » les feuilles aux étoiles et, plus loin, le discours annonce le retour à la « moralité de la figure dessus fette ». On retrouve ici un discours classique sur la nature, dont l’origine remonte à l’engouement naturaliste du xiie siècle, chez des hommes comme Bernard Sylvestre, Alain de Lille ou Guillaume de Conches. Il est alors courant d’exprimer sa pensée sous un mode caché, sous le voile de la fabula11, de la figura. Les auteurs du xiie siècle, dans leur exploitation des poètes païens et des oeuvres philosophiques et scientifiques de l’Antiquité tardive, utilisent des méthodes issues de leur pratique de l’exégèse biblique. Il s’agit pour eux de retrouver, derrière les integumenta des auteurs classiques12, les vérités d’une nature conforme toutefois aux enseignements des Ecritures. Cette attitude perdurera au long du Moyen Age ; au xiiie par exemple, Jean de Garlande écrit ses Integumenta Ovidii qui seront suivis du célèbre Ovide moralisé. La moralisation n’est en fait que la prolongation de la méthode d’interprétation des integumenta. Pour Froissart, il s’agit ici d’une explication de la correspondance branches/planètes. L’emploie des termes « figure » et « moralité » introduit un discours dans lequel une « senefiance » sera proposée. En effet, Froissart, après avoir donné les planètes dans l’ordre du système aristotélicien et ptoléméien, révèle les propriétés de chacune et leur relation aux âges de l’homme. Nouvelle Intrusion du temps qui vient confirmer, d’une autre manière, la dimension spatio-temporelle du buisson et, au travers de cette allégorie, du poème lui-même.
17On voit donc se dessiner la complexité de la « figure » imaginée par Froissart. Le buisson de « Jonece » embrasse une totalité, à la fois dans le temps et l’espace. Il est le lieu du temps qui passe et qui a passé tout en allégorisant une certaine fixité de l’éternité : par le jeu de la réminiscence, le buisson est aussi un espace où le temps s’est arrêté. Il représente en outre un espace infini quant à la dimension d’une part, quant à la représentation d’autre part. Sphère dont on ne peut mesurer le rayon ni vraiment définir le centre, il représente à la fois le globe terrestre, le ciel et la totalité de l’univers, tout en pouvant rester un véritable buisson, lieu privilégié du jeu des jeunes gens, lieu où l’on « carole », où l’on chante et où l’on se taquine. Son évasement final vers le buisson biblique n’est finalement que le témoignage et l’aboutissement du surdimensionnement qu’il possède dans la totalité de l’oeuvre. Ce sur dimensionnemnt s’est opéré selon deux directions. D’une part, en considérant le buisson dans sa totalité, comme associé à l’univers ou au monde. La problématique est ici assez générale. Le domaine du récit courtois est une projection de l’univers, lieu privilégié dans lequel est proposé un art d’aimer ou de penser sur l’amour. Lieu de fermeture, ici sphérique, dans lequel, comme dans le monde aristotélicien, le vide n’existe pas ; où le texte occupe de son message tout l’espace tracé par l’allégorie. Dans un tel contexte, l’association du jardin et du cosmos appartient à une logique de l’écriture d’une part, mais aussi d’une résurgence mythique d’autre part - alliant ordre cosmique et ordre végétal, y compris par le truchement éventuel des grands mythes fondateurs, tel ceux construits autour de l’arbre13.
18Par ailleurs, il y a construction d’une correspondance dans le particulier qui est l’un des moyens employés par Froissart, et qu’il détaille en plus de deux cents vers ; il s’agit de la mise en relation d’éléments du buisson avec des étoiles et des planètes. Si l’on peut mettre la « méthode » au rang de l’invention froissardienne, il faut toutefois prendre en compte l’utilisation par notre poète d’éléments traditionnels qui se sont propagés au cours du Moyen Age dans de nombreux ouvrages, savants ou encyclopédiques.
19La tradition de la mise en relation de plantes et de planètes remonte très loin, probablement aux plus anciennes civilisations14. On note par exemple que le mot târa qui signifie « étoile » en indien apparaît dans la désignation de plusieurs plantes : târa est aussi le camphre, târaka une espèce de concombre, târapushka le jasmin. Dans les hymnes védiques, les herbes possèdent un roi, qui est un dieu lunaire, Oshadhîpati. C’est ainsi de la lune qu’elles reçoivent leur force vitale ; c’est la lune qui, dans les Vedas, tue les monstres. Les plantes mises en relation plus particulière avec cet astre protège donc des serpents et des dragons ; ainsi par exemple l’armoise, la pivoine dite aussi lunaire. On en trouve également de très nombreuses traces dans l’Antiquité qui va les transmettre au Moyen Age. Cette tradition se construit de façon essentielle selon trois composantes. La première est en relation directe avec la pratique des cultures et la cueillette des plantes. Au départ, il s’agit, conformément à l’observation et à l’expérience, de déterminer les moments propices pour tel ou tel travail agricole. Ceci n’empêche pas que viennent se greffer des éléments de superstition, de magie ou de croyances religieuses et populaires. La seconde, issue de courants plus mystiques, est liée à la fois à une philosophie de l’univers, à une morale et sans doute à des pratiques rituelles, au moins parcellaires. La composante essentielle de cette tradition est l’hermétisme, dont il sera surtout question ici. La troisième enfin, que nous n’aborderons pas, vue son ampleur, est la médecine astrologique. Utilisant à la fois les propriétés des simples et les caractéristiques du ciel, une telle pratique conduit aussi à établir des relations entre certaines plantes, le cosmos et les maladies. Il est clair que ce découpage est par trop strict et qu’il y a mélange des « genres ». Partant par exemple d’un problème de récolte, on passe à une guérison et à une recette magique, entourant finalement la plante d’une dimension cosmologique.
20C’est une astronomie pratique qui est à l’origine, chez les peuples anciens, de l’établissement, du point de vue pragmatique, de relations entre plantes et planètes. Les paysans, de tous temps, ont eu besoin de repères pour effectuer leurs travaux. Or les calendriers civils anciens présentaient de graves défauts. A Rome par exemple, en dépit de la réforme de 450 qui établissait un cycle de quatre ans, subsistait un décalage15. Le problème était Lié à un accord souhaité entre phases de la lune et mouvement du soleil. Il y a en effet onze jours de décalage entre 365 jours et 12 lunaisons. En négligeant la précession des équinoxes, connue au moins depuis Hipparque, de bons repères naturels étaient offerts par les levers et couchers héliaques ou vespéraux de certaines étoiles remarquables. C’est pourquoi, en Grèce antique, s’était développée une astronomie pratique, basée sur l’établissement de parapegma, calendriers de couchers et levers astraux16, donnant en outre des indications d’ordre météorologique. On trouve une des premières indications à ce type de calendrier chez Plaute, dans le prologue du Rudens. Varron rassemble un grand nombre de ces données, dans une oeuvre perdue qui se serait intitulée Ephemeris navalis17. C’est en tout cas cette information qui sert de base au célèbre De Rustica de Columelle, fond de tout un savoir agricole dans l’Antiquité et au Moyen Age. Il faut ajouter aussi les Fastes d’Ovide et l’oeuvre de Cornelius Celsius qui contiennent des informations du même type. Ce sont ces auteurs qui seront les principales sources d’Isidore de Séville pour son livre des Etymologies consacré à l’agriculture18. Ces divers savoirs vont être réunis par Pline l’Ancien, tout particulièrement dans le livre XVIII de son Histoire naturelle. C’est essentiellement à partir de cette oeuvre que certaines croyances astrologico-agricoles se transmettront au Moyen Age. Pline demeure une autorité majeure pour un homme comme Pietro Crescenzi, auteur au xiiie siècle du célèbre Opus ruralium commodorum, traduit au xive siècle par ordre de Charles V sous le titre le plus fréquent de Livre des prouffits champetres.
21Ce qui s’établit dans ce cadre, à partir d’une technique agricole, est une habitude de considérer certaines espèces végétales comme liées à un ordre cosmique, en fonction de leur plantation, de leur croissance, de leur récolte ou de leurs maladies. Pline prétend par exemple que le charbon de la vigne est lié aux phases de la lune (Hist. nat., XVIII, 275), et il développe une théorie de la stérilité liée à l’influence néfaste de certaines constellations (ibid., 278 sq.). Dans ce contexte, la lune joue un rôle fondamental, qui d’ailleurs persiste de nos jours encore (on ne plante pas de salade à la lune montante) et correspond parfois à une réalité observable. C’est ainsi par exemple que la pivoine est considérée comme une plante lunaire. Elle est donc souvent associée à la femme et aux phénomènes menstruels. Toute une littérature se développe dans l’Antiquité et au Moyen Age sur la cueillette des plantes liées au cosmos. Nous n’entrerons pas ici dans ces considérations et nous renvoyons à l’ouvrage fondamental d’A. Delatte, Herbarius (Paris, B.L., 1936).
22Se développe en outre, d’ailleurs de manière non totalement indépendante de cette première tradition19, une série d’écrits hermétiques liant plantes et cosmos. De façon générale, la tradition hermétique joue un rôle non négligeable au Moyen Age. Guillaume d’Auvergne, par exemple, cite un Liber de hellera (De Deo deorum) pour critiquer les folies hermétiques dans son De legibus et dans son De Universo20. Roger Bacon présente Hermès comme le pater philosophorum21. Quant à Albert le Grand, il se réfère dans le De animalibus (XX, 1, 5) au livre sacré de Hermès à Asclépius. On trouve également dans le Speculum astronomie, attribué à Albert, une mise à l’index de certains livres d’images nécromantiques d’origine hermétique. L. Thorndike cite de très nombreux manuscrits contenant des références à la tradition hermétique22. Outre ces références multiples à l’hermétisme, on trouve de nombreux ouvrages exposant des éléments de la philosophie du Trismégiste. Ainsi, dès le xiie siècle (1144), Robert de Chester traduit d’arabe en latin un traité d’alchimie d’un certain Morienus, dont l’origine est attribuée à Hermès, Enoch et Noah23. Hugues de Santalla, un spécialiste de la géomancie24, traduit aussi à la même époque (1143) un Liber Apolloni (Hermetis) de secrelis nature. Au xiiie siècle, un Liber Hermetis Mercurii Triplicis de .VI. rerum principiis expose les principes de l’astrologie hermétique25. Et bien entendu, le célèbre Liber aggregationis du PseudoAlbert contient toutes sortes de recettes de magie hermétique. Il n’est pas question ici de retracer l’histoire el les doctrines de l’hermétisme. Nous renvoyons à l’ouvrage fondamental du R. P. Festugière, La Révélation d’Hermès Trismégiste26.Mais le foisonnement de textes médiévaux ayant trait de plus ou moins loin à l’hermétisme prouve à quel point cette tradition était vivante au Moyen Age.
23Or l’un des éléments de base des diverses doctrines hermétiques est constitué par la mise en relation existant entre le monde sublunaire et le cosmos et, en particulier pour le sujet qui nous intéresse ici, entre les plantes et le monde supralunaire. On peut distinguer en ce domaine quatre catégories de textes, en fonctions des relations établies : avec les décans, les planètes, le zodiaque et les étoiles. Comme tout ce qui concerne la littérature hermétique, il est assez complexe de préciser une chronologie, comme de fournir une classification des textes, vue la confusion régnant en ce domaine.
24La théorie des décans, division astrologique de chaque signe zodiacal en trois parties, semble remonter au iiie siècle, dans les fameux Salmeschoiniaca, que Jamblique (De Myst., VIII, 3 & 4) cite parmi les Hermaïca. Au iie siècle, apparaît un livre, dit manuel de Nechepso et Pétosiris, qui utilise les décans et qui influencera la Mathesis de Firmicus Maternus. Galien quant à lui critique les affirmations du médecin Pamphile, utilisant des relations plantes/décans27. Pline l’Ancien (Hist. nat., XXV, 13) connaissait des textes sur la magie des plantes, qu’il attribue à Pythagore, Démocrite ainsi qu’aux célèbres mages Ostanès et Zoroastre28. C’est dans un ouvrage fondamental en ce domaine, le Livre des décans ou Livre sacré d’Hermès à Asklépios, que la correspondance est clairement établie29. Le texte propose une série de recettes magiques qui associent à chaque décan une plante, une partie du corps et une pierre. De telles associations peuvent aboutir à la confection de talismans protecteurs. Par exemple, aux trois décans du Capricorne sont liés le delphinium, l’anémone, le chardon, aux Poissons la verveine, le romarin et la camomille etc.
25En ce qui concerne les plantes planétaires, on peut reprendre la classification de Festugière en trois catégories de textes, selon l’ordre des planètes. Le type Soleil-Lune, comportant deux sous-catégories, le type Soleil-Mercure et le type Jupiter-Lune30. Citons l’exemple de la pivoine, plante lunaire pour laquelle on retrouve la fuite des démons, comme dans la tradition védique :
Plante de la Lune : pivoine. Cette plante, qui pousse surtout en Arabie, subit les mêmes changements que la Lune. En effet, quand la Lune croît, elle croît aussi, quand la Lune décroît, elle diminue. C’est alors aussi qu’elle est le plus utile. (...)Si un homme est possédé d’un démon quelconque, et qu’on lui fasse une fumigation de la racine, le démon fuira aussitôt.
(Festugière, op. cit., pp. 152-3)
26Pour les plantes zodiacales, il y a deux traditions de textes, les uns attribués à Thessalos ou à Hermès, les autres à Salomon. Ces ouvrages donnent à chaque signe du zodiaque une plante privilégiée. Il n’y a pas de véritable unité en ce domaine, les plantes variant d’un texte à l’autre. Je n’entrerai pas dans le détail et je renvoie ici encore à l’ouvrage du R. P. Festugière. Je reviendrai un peu plus loin sur les plantes associées aux étoiles.
27Dans cet amas de textes, écrits pour la plupart entre le iie siècle av. J.C. et le iiie ap. J.C, il faut faire une place à part à la tradition des Cyranides31. Il s’agit au départ d’un ouvrage grec contenant des recettes de médecine et de magie. Il est composé de quatre parties ; le premier livre nous intéresse ici plus particulièrement car il regroupe, selon un ordre alphabétique, une plante, une pierre, un poisson et un oiseau. S’il n’y a pas, comme dans le Livre sacré d’Hermès, un classement suivant les correspondances végétal/cosmique, cette tradition est très vivante dans le texte. Le prologue en porte témoignage :
Volo tamcn te scire quod est apud Graecos quidam liber Alexandri Magni de VII herbis VII planetarum et alter, qui dicitur Thessali mysterium ad Hermem id est Mercunum, de XII herbis XII signis attributis et de VII aiiis herbis et VII alias Stellas. Qui si forte pervenerint ad manus meas vel tuas, quia caelestatem dignitatem imitantur, recte huic operi praeponentur.32
28La traduction latine fut faite en 1169 par un auteur inconnu se baptisant infimus clericus. L’un des intérêts des Cyranides est que la tradition de ces textes est très vivace aussi bien dans le monde byzantin qu’arabe et latin33. On possède ainsi dans six manuscrits de la fin du Moyen Age un Compendium aureum attribué à Flaccus Africus, et traitant de sept plantes et sept planètes, comme il est annoncé dans le prologue :
Flaccus Africus discipulus Belbenis Claudio Atheniensi epilogistico studium continuare et finem <invenire> cum laude. Post antiquarum Kyranidarum volumina tibi nota et Arpocrationi consolidali tuo relata, inveni in civitate Troiana in monumento reclusum praesentem libellum cum ossibus primi regis Kyrani qui Compendium aureum intitulatur, eo quod per distinctionem factam a maiore Kyranidarum volumine cum diligentia compilatum est. Studio vehementi tractat de septem herbis septem planetis attributis ...34
29Il faut y ajouter un important texte, mettant en correspondance quinze plantes et quinze étoiles, le Liber de .XV. stellis, .XV. lapidibus, .XV. herbis et .XV. imaginibus. L’original grec de ce texte est aujourd’hui perdu, mais il est connu grâce au très célèbre astrologue arabe, Mash’alah, dont le texte est traduit en latin au xiie siècle. Le texte existe en deux recensions, la première attribuée à Hermès, la deuxième étant un remaniement attribué à Enoch que les médiévaux identifiaient au Trismégiste. La méthode est toujours identique, proposant des associations et des recettes plus ou moins magiques. Il faut citer enfin le Livre des secrez de nature, connu par un manuscrit de la fin du xive siècle, annonçant qu’il s’agit d’une traduction faite à la demande du « Noble Roy Alfonce d’Espaigne ». Pour plus de détails sur tous ces textes, nous renvoyons à l’ouvrage de L. Delatte. Citons enfin la célèbre lettre d’Hippocrate à Alexandre qui traite des propriétés des herbes, que l’on trouve dans un manuscrit du xiie siècle, souvent cité par de nombreux auteurs. Dès le début du texte, il est question des influences de la lune35.
30Il apparaît donc, à travers un ensemble assez confus de textes, remontant pour la plupart à la période hellénistique, qu’une tradition de botanique astrologique d’origine hermétique s’est perpétuée dans l’Antiquité tardive et au Moyen Age. Associée à une tradition plus pratique en rapport avec l’agriculture et un comput lié aux travaux de la terre, le courant hermétique implante ainsi dans les consciences un certain nombre de concepts, plus ou moins développés, de parallélisme entre plantes et planètes. Dans une mentalité où microcosme et macrocosme se répondent dans le miroir de Nature, ce type d’association ne saurait paraître incongru. C’est pourquoi, on trouve la trace de ces idées dans de nombreux textes médiévaux, même s’ils ne se rattachent pas directement à une tradition en rapport avec la magie ou l’hermétisme. Dans les encyclopédies par exemple, vecteurs privilégiés d’un savoir moyen mis à la portée des lettrés, on va trouver, souvent implicitement, ce type de correspondances. Alexandre Neckam consacre un paragraphe à la sponsa solis, confondant l’héliotrope avec d’autres espèces comme la chicorée, identification que l’on retrouve chez Albert le Grand ; il associe de même la mauve au soleil36. La version italienne du Sydrach propose une herbe, dont les feuilles sont « a guisa di lupini » et qui permet de voir les étoiles de jour, à condition de s’en couvrir la tête et de s’en remplir la bouche. Dans son Liber de natura rerum, Thomas de Cantimpré consacre un paragraphe à l’arbre de Lune et à l’arbre solaire (10, 3, 1) ; il renvoie à la fois au Deutéronome37 et à une lettre d’Alexandre à Aristote38. Ces arbres ont une propriété prophétique. Thomas cite ainsi le fait qu’Alexandre pouvait, grâce à eux, connaître le futur de sa famille, savoir s’il pourrait conquérir Babylone et avoir des informations sur sa propre mort. Gossouin de Metz reprend cette légende dans son Image du Monde39. On pourrait multiplier les exemples.
31Dans une tradition plus savante, les correspondances plantes/cosmos sont également souvent affirmées. Dans le Libellus de virtutibus herbarum on parle d’herbe de lune :
Herba tenia lune dicitur. Succus eius purgat exacerbationes stomachi, thoracis et castorem, qui ostendit se esse herbam lune. Flos autem huius herbac purgat splenes magnos et curat ipsos, qui ipse crescit et decresoit sicut luna.40
32Dans son recueil de textes grecs inédits relatifs aux plantes41, M. Thomson relève un manuscrit traitant des rapports du soleil de la lune et de Saturne avec certaines plantes. L’héliotrope est la plante du soleil, on retrouve la pivoine comme plante lunaire et la joubarbe est celle de Saturne. Albert le Grand quant à lui reprend à son compte ce type de théorie. Parmi les cinq vertus qu’il reconnaît aux plantes, la quatrième est l’influence des étoiles. Au deuxième traité, chap. XXII du De vegetalibus, il expose une théorie mettant en parallèle les plantes, les mouvements du ciel et des pyramides de lumière : « celestes autem sunt operationes plantarum a formis suis specifitatis que dantur eis per motum celestatem et maxime motum planetarum in orbe declivi ». Albert imagine en fait des faisceaux de lumière descendant du ciel dont la forme géométrique dépend des configurations célestes. Ces faisceaux frappent le sol et les plantes, suivant des angles et des amplitudes multiples qui influent ainsi sur la configuration de ces mêmes plantes. Il s’inspire d’un mode de raisonnement astrologique pour expliquer que les phénomènes célestes influent sur l’âme des plantes : « super formas celestates infiuit anima vegetabilis ».
33On voit donc que s’il n’est pas question de parler ici d’emprunt direct de Froissart à l’un quelconque des ouvrages dont il a été question, on peut raisonnablement supposer que l’idée du buisson aux sept branches figurant les sept planètes est inspirée de notions qui avaient cours chez les lettrés. Je donnerai un dernier exemple qui vient confirmer mon hypothèse d’influence des écrits pseudo-scientifiques ou de vulgarisation chez les écrivains du Moyen Age, en en prenant un, si j’ose dire, « la main dans le sac ». Il s’agit de John Gower qui, dans sa Confessio amantis, réserve un paragraphe entier aux relations entre plantes et étoiles42. Le poète en référe lui aussi à Alexandre tenant son savoir d’un certain Nectanabus qui « was an astronomien/And ek a gret magicien » (vv. 1297-8)43. Gower reprend ensuite exactement la suite du Liber de .XV. stellis, qu’il se contente de paraphraser et de résumer. Citons un exemple :
The first sterre Aldeboran
The cliereste and the moste of alle,
Be rihtc name men it calle ;
Wich lich is of condicion
To Mars, and of complexion
To Venus, and hath thempon
Carbunculum his propre Ston
His herbe is Anabulla named
Which is of gret vertu proclamed. (vv. 1310-18)
Dixit Hermes : cum aspicerem Aldebaran, vidi eam in 151/2 gradu Arietis et 27 minutis et cum eodem capiebat medium caelum. Et dixit : haec Stella est fixa et est de natura Martis et complexione Veneris (...) primus ex lapidibus quindecim dicitur rubinus quem quidam carbunculum vocant (...). Prima quidem herba dicitur anabulla sive titimallus. (éd. Delatte, p. 246-7 sq.)
34Gower a lu le traité hermétique et l’a synthétisé en réunissant les propriétés de l’étoile, de sa plante et de sa pierre associées qui, dans le Liber de .XCV. stellis, sont séparées, un chapitre étant consacré à chaque espèce. A moins que le poète anglais ait eu connaissance d’un abrégé que nous ne possédons pas. Dans tous les cas, on voit qu’un poète pouvait connaître ce genre de traité el avoir envie d’en inclure des éléments significatifs dans son écriture.
35Cel exemple montre, j’ose le croire, l’intérêt qu’il y a de se pencher sur des textes de type savant ou encyclopédique et de rechercher les liens qui les unissent à l’ensemble de la littérature du Moyen Age. L’interrogation simultanée de tous ces textes peut permettre de mieux comprendre comment se constitue le savoir du lettré médiéval et de mieux pénétrer sur quelles bases se construit son imaginaire et comment se constitue son mode de penser et d’écrire.
Notes de bas de page
1 Le Joli Buisson de Jonece, éd. A. Fourrier, Genève, Droz, 1975
2 « Etudes sur le vocabulaire abstrait de Froissart ; “imaginer” », Romania, LXVIII, 1944/45, pp. 257-72
3 voir l’excellent article de H. Hugonnard-Roche, « Analyse sémantique et analyse secundum imaginationem dans la physique parisienne au xixe siècle », Studies in medieval natural philosophy, éd. S. Caroti, Firenze, 1989
4 voir l’ouvrage de .J. Biard, Logique et Théorie du signe au xive siècle, Paris, Vrin, 1989
5 éd. Th. Wright, London. 1863. II, 48
6 éd O.H. Prior, Lausanne, 1903, p. 93
7 voir à ce sujet, P.Y. Badel, Le Roman de la Rose au xive siècle, Genève, Droz, 1980
8 il va de soit qu’il s’agit ici d’une intention portant sur un procédé d’écriture. Froissart est en effet très loin de vouloir délivrer un message à caractère universel portant sur diverses matières comme c’était le cas pour Jean de Meun. Toutefois, le Joli Buisson est son dernier grand ouvrage lyrique et il propose un cheminement aboutissant sur la gravité de l’abandon d’un certain type d’écriture. Bien que limité dans son intention, il n’en est donc pas moins porteur d’une réflexion à laquelle on peut attribuer quelque teneur sinon d’universalité, du moins de généralité.
9 je supprime la virgule de l’éditeur et en rajoute une après « Nature ». Le sens me paraît en effet être pour Froissart de comprendre la totalité du buisson et de son ombre ; la relation se fait alors avec Nature (« et l’i conversoit »), créatrice de toute chose. Le buisson, compris avec son ombre est à la fois une représentation du sublunaire, monde du poète, soumis à l’ombre et à la lumière, et une projection privilègiée du supralunaire qui autorise le dialogue avec la nature.
10 voir l’article d’A. Planche. « Du Joli Buisson de Jonece au buisson ardent », Senefiance, 13, pp. 397413
11 voir l’ouvrage de P. Dronke, Fabula, Leiden, Köln, 1974. Voir aussi B. Stock, Myth and Science in the xiith century, Princeton Univ. press, 1972
12 voir les articles fondamentaux de E Jeauneau, tout particulièrement « L’Usage de la notion d’integumentum à travers les Gloses de Guillaume de Conches », dans Lectio phiiosophorum, Amsterdam, 1973, pp. 127-191 (article repris des AHDLMA, 24, 1958). Voir aussi M. D. Chenu, « Involucrum. Le mythe selon les théologiens médiévaux », AHDLMA, 22, 1956, pp. 75-9
13 cette question ne sera pas traitée ici. Nous renvoyons au bel ouvrage d’A. Labbé, L’Architecture des palais et des jardins, Genève, Slatkine, 1987
14 on pourra consulter l’ouvrage de A. de Gubernatis, La Mythologie des plantes ou les légendes du règne végétal. Paris, 1878-1882. Pour des informations multiples, voir Ch. Joret, Les Plantes dans l’Antiquité et au Moyen Age, Paris. 1904
15 on avait tenté d’aligner le calendrier sur l’année sidérale en faisant alterner des années de 355 jours et de 377 ou 378 jours. Pour cela une insertion d’un mois de 22 ou 23 jours était opérée après le 23 du douzième mois. Il y avait alors 1465 jours par cycle au lieu de 1461 en réalité. Pour des raisons d’ordre politique, cette méthode était suivie de manière très aléatoire. En 48 av. J.C. l’année civile comptait 3 mois d’avance sur l’année solaire !
16 voir à ce sujet l’étude de A. Rehm, Parapegmastudien, München, 1941
17 Nonnius Marcellus attribue cette oeuvre à Varron (71,15 M) et Vegèce (Mil., 4, 41) parle de Libri navales au sujet du même auteur.
18 au début du livre XVII, De rebus rusticis, Isidore cite les auctores rerum rusticarum : Caton, Virgile, Celse et Columelle en sont les principaux, (éd. Lindsay, t. II, XVII, 1)
19 voir A. Delatte, op. cit., pp. 239-55
20 De legibus, cap. XXIII, BN lat. 15755 ; De Universo (II, 3, 22), in Opera, éd. Traianus, Venise. 1591
21 Opus minus, éd. Brewer, Rom. Stud., 1859, p. 313
22 Hist. of. Exp. and Mag. Sciences, II, p.221
23 voir L. Thorndike, op. cit, II, IV, p. 218
24 voir l’ouvrage de Th. Charmasson, Recherches sur une technique divinatoire : la géomancie dans l’Occident médiéval, Genève/Paris, Champion, 1980, p .96 sq.
25 éd. Th. Silverstein. ADHLMA, 1955, Paris, 1956, pp. 217-301
26 Paris, Gabalda, 1950, réed. Paris, B.L., 4 vol. On pourra consulter également l’ouvrage de W. Scott, A. S. Ferguson, Hermetica. The Ancient Greek and Latin Writings which contain Religious or Philosophic Teachings ascribed to Hermes Trismegistus. 4 vol., Oxford, 1924-1936
27 De simplic. med., VI, prologue, éd. Kuhn, XI, 792)
28 sur la magie des plantes dans la Grèce antique, on se reportera à l’ouvrage fondamental de Bidez, Cumont, Les Mages hellénisés, Paris, 1938
29 éd. Ch. Ruelle, Rev. de Philologie, 32, 1908, p. 217 sq. Voir aussi R.P. Festugière, op. cit, p. 139 sq.
30 R. P. Festugière, op. cit., pp. 146-60
31 sur ces textes, voir E. Meyer, Geschichte der Botanik, t. II, 1855, p. 348 sq. Le texte grec est édité par Ch. Ruelle, dans F. de Mély, Les Lapidaires de l’Antiquité et du Moyen Age, t. II, Paris, 1898. Traduction au t.III (1902). P. Tannery, « Les Cyranides », Mémoires scientifiques, IX, 1929, p. 311 sq. L Thomdike, op. cit., II, p. 229 sq.
32 éd. L. Delatte, Textes latins et vieux français relatifs aux Cyranides, Liège, Paris, 1942
33 voir la recension des manuscrits dans L Delatte, op. cit.
34 Ibid, pp. 213-4
35 éd. E. Wickersheimer, Janus, 41, 1937, pp. 145-52. Memento cavere ad herbas coligendas et conficiendas in lune diminucione, per quam minus cas valere te scire oportet. Crescente enim luna, mare, cerebella et medulle animalium crescunt ; ipsa descescente, omnia ista decrescunt (p. 145)
36 De Naturis rerum, éd. cit., pp. 165-6
37 De benedictione, domini terra eius, de pomis celi et rore atque abysso subiacente, de pomis fructuum solis et lune, de vertice antiquorum montium, éd. De Gruyter, Berlin, New York, 1973, p.316 (Deut., 33, c 14)
38 dans Pseudo-Callistène, éd. Budge, Alexander the Great, Cambridge, 1889, p. 104 sq.
39 éd. O. H. Prior, Lausanne, 1913, p. 111
40 cité par A. de Gubernatis, op. cit., p. 214-5
41 Paris, B.L., 1955, pp. 66-73
42 L. Thorndike. op. cit., avait signalé, sans s’y attarder, ce curieux passage.
43 éd. G. C. Mac caulay, Complete work, Oxford, Clarendon, 1901, vol. III
Auteur
Université d’Orléans
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