La nudité et les habits du « garulf » dans Bisclavret (et dans d’autres récits de loups et de louves)
p. 255-269
Texte intégral
Paraîtra encore
Le loup devant toi […]
Prends-le pour ton frère
Car le loup connaît
L’ordre des forêts […]
Il te conduira
Par la route plane
Vers un fils de Roi
Vers le Paradis
[Chant funèbre roumain]
Prémisse
11. Lors du colloque Magie et Illusion au Moyen-Age, M. Denis Hüe a ouvert sa contribution en parlant de Peire Vidal, troubadour de la fin du xiie siècle, qui fut réputé être l’homme le plus fou du monde1. En outre, il était amoureux d’une dame qui s’appelait la Loba de Pueinautier :
« Peire aimait la Louve de Pennautier […]. La Louve était du Carcasses, et Peire Vidal se faisait appeler Loup pour elle et portait des armes de loup. Et dans la montagne de Cabaret, il se fit chasser par les bergers, avec leurs mâtins et leurs lévriers, comme on chasse un loup. Et il avait revêtu une peau de loup pour faire croire aux bergers et aux chiens qu’il était un loup. Les bergers, avec leurs chiens, le chassèrent et le battirent de telle façon qu’on le porta pour mort à la demeure de la Louve de Pennnautier. Quand elle sut que c’était Peire Vidal, elle commença à être fort joyeuse de la folie qu’il avait faite et à en rire beaucoup, et son mari fit de même. Ils reçurent le poète avec grande joie, et le mari le fit prendre et déposer en un lieu caché, au mieux qu’il put et sut. Il fit mander le médecin et fit soigner Peire jusqu’à ce qu’il fût guéri2. »
21.1. D’ores et déjà, nous pouvons faire remarquer que Peire Vidal « avait revêtu » une peau de loup. Le rapport « nu »/ » vêtu » n’est pas impossible à cerner. Nous allons revenir sur ce point dans nos remarques suivantes.
Bisclavret
31. « Lorsque Marie de France rédige son Bisclavret, il ne fait pas de doute que pour elle le loup-garou existe et représente bien davantage que la mascarade de son presque contemporain Peire Vidal. Cela revient bien à nous dire, à quelques siècles d’écart, qu’il importe de ne pas mélanger les variables. Il n’y a pas un loup-garou médiéval (auquel, faisons bonne mesure, croirait un homme médiéval), mais plusieurs épisodes de métamorphose, ou même, plusieurs niveaux de connaissance à la métamorphose, qu’il importe d’analyser, et dont il importe surtout de faire apparaître les enjeux et les non-dits3 »
42. Dans son livre passionnant, Claude Lecouteux, en étudiant les croyances transparaissant derrière le motif de la métamorphose, nous fait remarquer que James G. Frazer, et d’autres chercheurs dans son sillage, ont développé le concept d’« âme extérieure » (external soul), d’« âme libre4 » (Freiseele), enregistré sous la référence Ε 710 dans le répertoire des motifs des contes populaires d’Anti Aarne et Stith Thompson5.
5Toutefois, le mot « âme » prête à confusion : il vaudrait mieux corriger le terme en « Double », en « autre moi » (alter ego).
63. D’après les traditions germaniques, bien représentatives du stade le plus ancien de ces conceptions, nous savons que le corps est l’hôte d’au moins trois entités : (a) tout homme possède sa fylgja (son Double) animale6 ; (b) ce Double psychique est, en quelque sorte, l’équivalent du daimôn grec et du genius latin ; (c) chacun dispose d’un Double physique (hamr) apte à la métamorphose. Or (de l’Antiquité au Moyen-Age) les récits de changement de forme fourmillent : si nous ne pouvons que rarement envisager un lien génétique entre les narrations, la typologie est pourtant la même. De ce fait, on peut déduire qu’une croyance commune se tient à la source de tous ces témoignages.
74. Dans les métamorphoses animales des sorcières (en chat et en crapaud le plus souvent7), se superposent diverses traditions dans lesquelles est grande la part de l’Antiquité classique. Le Moyen-Age connaissait fort bien Ovide tout comme il connaissait Apulée. Si les textes venus de Rome ont nourri la littérature médiévale, ils n’expliquent qu’une partie de ce que nous rencontrons dans celle-ci, mais ils présentent aussi de stupéfiantes parentés avec les récits qui nous occupent ici. Nous allons le voir maintenant.
85. Tout d’abord, si nous examinons le lai de Bisclavret (que Marie de France composa entre 1160 et 1170 et que l’on considère comme le chef-d’œuvre des histoires médiévales de loup-garou), nous pouvons constater que l’épouse infidèle d’un chevalier cherche à se débarrasser de son mari qui se transforme régulièrement en loup (trois jours par semaine). Elle lui demande s’il se dépouille ou s’il « court8 » vêtu. Le chevalier répond :
« Dame, dit-il, je reste nu. » « Au nom de Dieu, dites-moi où sont vos vêtements ! » « Dame, cela, je ne vous le dirai pas car si je perdais mes vêtements et si l’on découvrait la vérité, je serais loup-garou pour toujours. Je n’aurais plus aucun recours avant qu’ils ne me soient rendus. Voilà pourquoi je ne veux pas qu’on le sache. » […] Elle le tourmente et l’accable tant qu’il ne peut faire autrement que lui révéler le secret. « Dame, dit-il, près de ce bois, près du chemin que j’emprunte, se dresse une vieille chapelle qui depuis longtemps me rend grand service : il s’y trouve, sous un buisson, une grosse pierre creuse, largement évidée. C’est là que je laisse mes vêtements, sous le buisson, jusqu’à ce que je regagne ma maison9. »
95.1. L’attitude de l’épouse du chevalier-lycanthrope face à son aveu nous paraît imbibée de maintes perplexités. Le fait que son mari se rend regulièrement dans la forêt, y vivant, en tant que loup, de preie e de ravine (v. 66), conduit inévitablement la femme à se demander si son amour peut franchir un pareil obstacle. Le passage à la nature animale (même s’il est toujours réversible, au moins au moment où nous en sommes) semble être horripilant pour la dame, par rapport à l’élévation de la moralité humaine, telle qu’elle est décrite dans la poésie amoureuse et dans la théorie courtoise de la Fine Amour10 (que l’on pense au De Amore d’André le Chapelain…).
105.2. Cependant, contre toute attitude « naïve », la femme ne décèle ni crainte ni horreur ni peur. Elle ne manifeste pas non plus une disponibilité « héroïque » à pouvoir tolérer et accepter le sort terrible qui pèse sur l’existence même de son mari. Elle se limite (presque impassible et – apparemment -intéressée à des détails « piquants ») à demander à son époux si, dans sa vie à la forêt, il reste habillé ou s’il se dépouille :
Quant il li aveit tut cunté,
enquis li a e demandé
s’il se despueille u vet vestuz.
(Bisclavret, éd.-trad. citée, v. 67-69)
11Quand il lui a tout raconté, elle lui demande s’il se dépouille de ses vêtements ou s’il les garde.
12Lorsqu’elle arrive à savoir où le bisclavret cache ses habits, elle les lui dérobe : le chevalier reste loup-garou.
136. De cette façon, la dame du bisclavret a touché un élément essentiel dans la structure des récits de lycanthropie.
14En effet, d’après les recherches de Wilhelm Hertz et de Salvatore Battaglia11, le retour à l’aspect humain est en liaison étroite avec la nécessité de retrouver les habits du garou (cachés avant et volés après sa métamorphose).
15Voulant se renseigner à propos de cet aspect (sans exprimer, par ailleurs, une véritable participation aux malheurs du bisclavret), la femme du garou démontre clairement (malgré ses expressions faussement amoureuses) qu’elle est déjà en train de s’éloigner de son mari12 (qui peut-être n’a pas encore de soupçons à l’égard de sa femme).
166.1. Une année après, le roi rencontre le bisclavret à la chasse et, intrigué par son comportement humain, l’adopte et le ramène à sa cour. Là, il devine bien vite la vérité en voyant comment se comporte l’animal à l’égard de la femme adultère et de son complice. La dame est donc contrainte, de par la décision du roi, à restituer les habits.
177. Salvatore Battaglia a déjà essayé de situer d’un point de vue historique et littéraire le lai de Bisclavret. C’est lui le premier qui a cherché à placer le motif du loup-garou (le Werwolfmotiv étudié par Manfred Bambeck) dans la tradition occidentale, en se référant tout spécialement au texte que nous souhaitons analyser ici-même13.
18De toute façon, il n’est pas dans notre intention de vérifier l’intégralité ou l’utilité des « sources » de ce lai dans notre recherche14.
198. Au contraire, il est important que les habits, là-bas, auprès de la chapelle, soient dans une pierre large et évidée, placée sous un buisson, si possible épineux : en effet, Gervais de Tilbury, dans ses Otia Imperialia (« Les Loisirs Impériaux » [± 1210] – cf. ci-dessous), évoque la cachette des vêtements sous un buisson épineux ou même sous un rocher : cela a attiré la curiosité savante de Mauriz Schuster, qui (dans un article consacré au loup-garou et aux sorcières dans le Satyricon de Pétrone) désigne ce détail comme typique (même par la suite) de la situation du loup-garou15.
20Partant, nous pouvons dire que Marie de France se dirige sur les traces traditionnelles du motif, en suivant un ultérieur trait pertinent, caractéristique et essentiel.
219. Encore à propos de notre Bisclavret (et dans l’intention, par la suite, d’essayer une comparaison avec l’ouvrage de Pétrone) : la scène où le lycanthrope réintègre son enveloppe humaine est extrêmement révélatrice. Le retour à l’état d’homme ne peut se faire en présence de témoins, ce qui est expliqué par la honte16.
[Un sage chevalier dit au roi] : « Sire, vous avez tort ! [Le bisclavret] n’accepterait pour rien au monde de remettre ses vêtements et de quitter sa forme animale sous vos yeux. Vous ne comprenez pas qu’il est rempli de honte ! Faites-le mener dans vos appartements avec les vêtements, laissons-le là un bon moment. S’il redevient homme, nous le verrons bien ! » Alors le roi lui-même l’a accompagné et a fermé la porte sur lui. Un peu plus tard, il y est retourné, accompagné de deux barons. Tous trois ont pénétré dans la chambre et découvert, sur le propre lit du roi, le chevalier endormi [et habillé].
(Bisclavret, v. 283-299)
2210. Derrière l’adaptation littéraire, des faits qui nous sont bien connus se dessinent clairement. Le sommeil, motif inexpliqué et inexplicable dans le récit de Marie de France car il semble lié aux habits venant d’être revêtus, est en fait l’état normal de celui qui se dédouble. Les vêtements sont donc de toute évidence le substitut du corps.
2310.1. Ce point a toujours été ignoré jusqu’ici car personne n’a pris en compte la croyance au Double. Pourtant, elle est bien connue des spécialistes des civilisations germaniques, baltes et finnoises. Désormais, il faudra reconsidérer les histoires médiévales de métamorphoses qui (lorsqu’elles ne sont pas une simple réminiscence de l’Antiquité classique) sont vraisemblablement sous-tendues par la croyance que nous souhaitons dévoiler. Elle seule permet une explication satisfaisante d’un trait récurrent de ces narrations : le loup-garou est à la fois homme et animal. Il conserve sa raison humaine sous sa forme lupine17.
2410.2. Chez Marie de France, le bisclavret se met nu et cache ses vêtements : ce n’est qu’en les passant qu’il retrouve sa forme humaine. Comment le loup peut-il donc revêtir les habits d’un homme ? Il est un peu trop facile de dire que le conte fait fi de telles questions et que nous nous mouvons dans la sphère du merveilleux, à savoir dans un univers où sont abolies les lois de causalités, où tout est possible. (Ce serait ignorer la logique interne des traditions populaires qui ont plus de sagesse qu’on ne leur en prête…)
25Mais cela coupe court à toute interprétation ultérieure et témoigne d’une grave méconnaissance de la récupération (ou de la survie) des croyances païennes (populaires, si l’on veut) ; d’ailleurs, si (comme le font les clercs) nous assimilons le peuple illettré et les rustres aux païens, nous devons taxer tout cela de fantasmagorie18.
2610.3. Par contre, si nous admettons que le corps reste inanimé tandis que le Double voyage sous forme de loup, nous découvrons que les vêtements sont en fait le substitut du corps. Voilà pourquoi il ne faut pas y toucher, voilà pourquoi c’est en les revêtant que l’on redevient homme. Acte simple et rationnel s’il en est – « passer ses habits » –, c’est, en réalité, la vision médiévale et chrétienne (la Cité de Dieu de saint Augustin) du retour du Double (phantasticum) dans le corps de l’être dormant. Mais c’est aussi la vision de Pétrone : intellexi illum versipellem esse.
Le Satyricon
271. Pour Pétrone (premier siècle de notre ère) le candidat au changement d’aspect doit se dévêtir, puis uriner en cercle autour de ses vêtements, et tout cela la nuit.
28Qu’en est-il dans le Satyricon ? Nicéros narre à Trimalchion ce qu’il a vu :
« Le soldat se déshabilla et posa ses vêtements le long de la route […] ; lui, il pissa tout autour de ses vêtements et, soudainement, se transforma en loup […]. Je m’approchai pour ramasser ses vêtements, mais ils étaient devenus de pierre19. »
29Le cercle est un talisman dont la puissance est encore accrue par les vertus apotropaïques de l’urine. Le soldat met donc tout en œuvre pour protéger ses habits, mais pourquoi se pétrifient-ils ?
302. Gervais de Tilbury, dans ses Otia Imperialia, nous relate une antique légende à propos d’un loup-garou : il s’agit d’un homme d’une endurance extraordinaire, que l’on appelle Calsavair (Calcevayra nuncupatus). Il avait l’habitude de se déshabiller la nuit, en plein air, à la lumière de la nouvelle lune, de cacher ses habits et, par la suite, de se rouler sur un terrain plein de sable : un moment après, il « courait » sous forme de loup20.
31Cela permet de conclure que, chez Pétrone, le miles se déshabille pour pouvoir se métamorphoser en loup-garou.
322.1. Dans la plupart des histoires de lycanthropie, l’enchantement s’accomplit en endossant (je dis bien endossant, comme pour une armure) une peau de loup (úlf-hamr), ou même en bouclant une ceinture en peau de loup (l’ardillon introduit dans le neuvième trou), ou encore en se mettant au doigt une bague magique21 (par exemple dans le lai anonyme de Melion) ou en enduisant sa peau avec une pommade. Quelques-uns de ces détails sont absents chez Pétrone.
332.2. On peut penser que, très probablement, le changement d’habit (endosser la peau du loup, la « chemise du loup ») appartient à la version la plus ancienne du motif de la métamorphose : on se libère de l’habit humain pour pouvoir endosser celui de la bête. C’est pour ça que nous trouvons chez Pétrone une variante ultérieure de ce détail du récit.
343. Venons-en maintenant à l’interprétation des mots circumminxit vestimenta sua. La position des mots et subito lupus factus est nous fait conclure ainsi : le soldat (après avoir uriné autour des vêtements) nous apprend que ce mot circummingere signifie, pour lui, la métamorphose immédiate en loup-garou. Partant, nous estimons que le cercle tracé par la minctio représente une bague ou un cercle magique.
35Il est indispensable, chez Pétrone, qu’un cercle magique soit tracé ainsi : ce n’est que par ce biais que l’on peut réaliser la métamorphose en loup-garou, car le miles n’endosse ni la peau du loup ni autre chose à sa place.
36Par ailleurs, ce cercle ainsi tracé paraît assumer l’aspect d’une parodie : il s’agit d’un des motifs parodiques que Pétrone insère à dessein dans l’épisode de la cœna Trimalchionis.
374. Pétrone recherche un effet grotesque : cela fait comprendre très bien cette situation et, surtout, cela s’adapte au bas niveau culturel du narrateur et de son auditoire. Au fur et à mesure que cette histoire devient grossière et farfelue, elle devient aussi de plus en plus agréable à cette sorte de public.
384.1. L’hypothèse est donc la suivante : à l’origine, le motif de la pétrification des vêtements n’existait pas. Par contre, c’était celui de la dissimulation et de la récupération des vêtements sous une pierre évidée qui sous-tendait la croyance.
394.2. Même la transformation en pierre des habits avait sa signification spécifique : de cette façon, les vêtements ne pouvaient pas être volés. Cette dernière remarque possède, elle aussi, sa signification. Si le loup-garou perdait ses habits, il ne pourrait plus recouvrer son aspect humain. (Pour cette raison, Gervais cite [avec la cachette sous le rocher] le buisson de roses épineuses, où l’on ne met pas volontiers les mains !)
404.3. Les habits sont donc au centre de l’orbis minctus : de telle manière, le cercle magique les sauvegarde et les protège du vol. Finalement, c’est le cercle magique lui-même qui provoque la pétrification22.
Conclusion
411. Qu’est-ce qu’il reste des antiques « guerriers-fauves » (Berserkír et Ulfhédnar) dans le « nouveau » chevalier du Moyen-Age ? En apparence très peu, ne fût-ce qu’en raison des longs siècles de « christianisation » qui se trouvent entre les deux termes de ce discours. Pourtant, tout compte fait, il y a des choses qui se sont transmises : que l’on songe à la passionnalité sans contrôle et à la quasiment puérile alternance de violence, de sang et de larmes de repentir des protagonistes des chansons de geste.
42On peut penser aussi à certains « anti-chevaliers » (à savoir : chevaliers sur le plan juridique et sur celui du mode de vie, mais dont la conduite exaspérée était en contradiction flagrante avec la dignité de leur status) : des nobles comme Thomas de Marie, Raoul de Cambrai, Robert le Diable, comme l’anonyme Chevalier au barisel
qui mout estoit crueus et fors
et fel et fiers et plus irous
ke cien dervés ne leus warus23.
43qui était très cruel et dur, et félon et féroce et plus enragé qu’un chien furieux et un loup-garou.
441.1. Dans notre cas, la référence à des chiens furieux et à des loups-garous redoutables ne va plus sembler – après ce que nous avons dit – la création d’une fiction poétique. Au contraire, les loups, les ours, les lions des emblèmes héraldiques vont paraître moins innocents, moins décoratifs, plus chargés d’un message antique et redoutable, plus liés à ceux qui les amenaient : par exemple, le lion, noble compagnon d’Yvain24, on ne le verra plus, maintenant, comme une simple invention féerique25.
452. Encore une remarque à propos d’un passage du Satyricon de Pétrone : Haec ubi dicta dedit, talem fabulam exorsus est. Toutes les traductions coïncident : « Après avoir proféré ces mots, il commença avec cette histoire. »
46Il faut signaler qu’il s’agit en ce cas d’une citation parodique de Virgile (Æneis II 790) : elle se propose de projeter de façon ridicule le discours de Nicéros dans l’atmosphère des grandes narrations épiques (à remarquer tout spécialement exorsus est, facile à situer à côté de sic orsus qui introduit le discours d’Enée in Æneis II 2).
472.1. La stratégie compositive fonctionne avec la parodie de l’horizon littéraire de Virgile : il y a toujours (et de façon explicite) des allusions au triangle Didon-Enée-Anne.
48L’image de ce triangle est valable aussi pour l’épisode du loup-garou : ici nous avons l’effrayé Nicéros, le soldat-lycanthrope, « fort comme un ogre », et la magnifique bacciballum (hapax de Pétrone qui fait vraisemblablement allusion aux rondeurs de Melissa, veuve – depuis très peu de temps – de l’aubergiste Térence, et – maintenant – maîtresse du même Nicéros).
492.2. Il y a certainement de la parodie, que nous pouvons définir « sérieuse », bien différente de la parodie « triviale ». On peut se permettre de faire cette distinction car la première forme est animée par l’intention de bouleverser des positions autoritaires qui défendent le plein exercice de toute faculté intellectuelle. Cette parodie est « dialectique » car elle voudrait dépasser certaines règles qui empêchent l’épanouissement de forces nouvelles (cf. infra, note 28).
502.3. Cependant, il y a aussi de l’ironie et du pastiche littéraire : la vivacité ironique et intellectuelle se révèle en tant que véritable architecture du roman26.
51Cette sorte de polyphonie bakhtinienne (symbole de la « lecture plurielle » des visions du monde) représente la force centrifuge de Pétrone, le Maître aux pieds de vent, que Friedrich Nietzsche admirait pour sa « vitesse », en le définissant comme l’inventeur de la force libératrice de l’ironie, qui arrive à tout démystifier. Ceci tout seul suffirait déjà pour définir Pétrone comme « un grand écrivain27 ».
523. Une citation des Theaterprobleme (1955) de Friedrich Dürrenmatt revient maintenant à notre esprit :
« Les tyrans de notre planète ne sont pas du tout touchés par les ouvrages des poètes ; ils bâillent face à leurs élégies ; ils définissent « fables stupides » leurs chants héroïques ; ils s’endorment en écoutant leurs poésies religieuses ; il n’y a qu’une chose qui soit détestable à leurs yeux : la dérision. C’est pour ça que la parodie s’est mêlée dans tous les genres : dans le roman, dans le théâtre, dans la poésie28. »
534. Les « tyrans de notre planète » font penser aux juges et aux démonologues qui, à compter du Moyen-Age finissant (et tout spécialement au cours des xvie et xviie siècles), contribuent à former, entre autres, les concepts des sorcières et des lycanthropes « possédé(e)s et allouvi(e)s ».
544.1. Pour ce qui concerne l’idée de la sorcière, elle se développe à une vitesse vertigineuse, à partir de la moitié du xive siècle, lorsqu’on collecte, depuis plusieurs sources, des renseignements sur la sorcière elle-même29.
55Les sorcières deviennent alors reconnaissables à cause de leurs maleficia. Elles ne sont plus de simples effets de l’imaginaire médiéval, mais représentent un pouvoir, à la fois réel et anarchique. Un « système » prend alors sa forme : voici les procès et l’attention systématique des inquisiteurs, voici les théories aberrantes du Malleus Malleficarum30 (1487).
564.2. Pour ce qui est des loups-garous au xvie siècle : bien que la lycanthropie fût reconnue pendant tout ce siècle-là comme une maladie mentale, certains cas examinés par les juges semblent montrer que les démonologues préféraient y voir une influence diabolique plutôt qu’une maladie et qu’ils regroupaient sous le nom de sorcier(e)s les personnages divers du loup-garou des contes, du sorcier qui se transforme et transforme les autres, de l’assassin mutilateur et anthropophage et du lycanthrope malade mental, personnages dont les points communs sont la métamorphose supposée, illusoire ou imaginaire, et l’appétit du loup.
57Au fond des théories de la métamorphose au xvie siècle se décèle un besoin de la part des démonologues, magistrats et inquisiteurs de trouver une formule explicative qui permettrait de démystifier ce qu’il y a de plus mystérieux dans les histoires de métamorphose et de rendre compréhensible ce qu’il y a de plus irrationnel dans l’homme31.
585. En ultime remarque, je tiens à préciser que je partage tout à fait les conclusions du livre (maintes fois cité) de Claude Lecouteux à propos du concept du Double :
59« En perdant notre Double, nous avons perdu notre âme, notre relation au cosmos et, nouveaux Peter Schlemihl, notre place dans l’univers ne nous est plus connue. Le divertissement remplace tristement les croyances et les rites qui structuraient l’existence humaine : il ne reste que le silence éternel des espaces infinis32. »
UNE DIGRESSION « EN CORPS MINEUR »
60(i) Lors de ma communication, j’ai essayé de donner une analyse (à côté de celle de la Louve occitane) d’un récit contemporain (La Loba), écrit par Clarissa Pinkola Estés33.
61Avant de parler de cette Loba mésoaméricaine, je me limite à faire remarquer que toute femme porte en elle une force naturelle riche en dons créateurs, en bons instincts et en un savoir immémorial. Chaque femme a en elle la femme sauvage (cette Loba – à mi-chemin entre l’Arizona et le Mexique – est une femme qui était une louve qui était une femme).
62(ii) La dialectique nu/vêtu me semble également évidente dans le récit de C. Pinkola Estes. Il suffit de lire quelques passages : pendant que La Loba chante au-dessus des blancs ossements (la femme-chaman se nomme aussi La Huesera [La Femme aux Os] et La Trapera [La Ramasseuse] car elle se charge de ramasser les os des loups exterminés),
« la cage thoracique et les os des pattes du loup se recouvrent de chair et […] sa fourrure pousse. La Loba chante encore et la bête s’incarne un peu plus ; sa queue puissante et recourbée se dresse. […] La Loba chante toujours […] et pendant qu’elle chante, la bête ouvre les yeux, bondit sur ses pattes et détale dans le canyon. Quelque part durant sa course, soit du fait de sa vitesse, soit parce qu’[…]un rayon de lune ou de soleil vient se poser sur elle, elle se transforme soudain en une femme qui court avec de grands éclats de rire, vers l’horizon, libre. » (p. 33)
63(iii) Tout en prenant de grandes précautions vis-à-vis de ce récit (qui n’est pas en rapport – cela va de soi – avec des textes médiévaux), je me limite à souligner la persistance du rapport entre la femme douée de pouvoirs magiques et le loup (on peut aisément le voir dans la série – médiévale celle-ci – Bisclavret-Melion-Biclarel). Indépendamment des liaisons intertextuelles qui recoupent ces narrations, nous pouvons dire que tous ces récits renvoient (quoique de façons différentes) à de lointaines expériences chamaniques, dont on retrouve les traces dans la tradition populaire34.
64(iv) Cette sorte de « Louve chamanique et sauvage » présente des aspects qui nous surprennent. On peut lire (pour une sorte de démonstration qu’il ne faut pas forcémment considérer e contrario) le bel essai de Bruno Roy, « La belle e(s)t la bête. Aspects du bestiaire féminin au moyen âge35 ».
65D’après l’auteur de cet article, « [i]l faut bien admettre […] que la perception que l’homme moderne a de la femme ressemble beaucoup à celle de l’homme médiéval. […] L’idéalisation de la femme a connu au moyen âge un sommet, parallèlement à un sommet de l’antiféminisme. […] Or la femme-ange n’est pas plus réelle que la femme-dragon. Entre les deux, la femme réelle, qui soit à la fois différente de l’homme et semblable à lui, n’était pas perceptible. L’est-elle davantage aujourd’hui ? » (p. 334).
66(v) Quoi qu’il en soit, il convient d’ajouter que la Femme (tout comme la Nature et l’Animal) Sauvage est victime de la civilisation. La société et la culture dominantes la traquent, la capturent, la musellent, afin qu’elle entre dans le moule réducteur des rôles qui lui sont assignés et ne puisse entendre la voix généreuse issue de son âme profonde. Pourtant, si éloignés que nous soyons de la Femme Sauvage (notre nature instinctuelle), nous sentons sa présence. Nous entendons son appel. C’est à nous d’y répondre. Il ne tient qu’à nous d’être comme cette « Loba »-là36.
Notes de bas de page
1 Cf. D. Hüe, « De quelques transformations animales », Actes du Colloque du CUER MA, Université de Provence (Centre d’Aix), Aix-en-Provence, Centre de Publications de l’Université, 1999 (Senefiance n° 42), p. 233-254.
2 Cf. J. Boutière et A.-H. Schutz (avec la collaboration d’I.-M. Cluzel), Biographies des troubadours. Textes provençaux des xiii et xive siècles, Paris, Nizet, 1964, p. 353 et p. 371-372. Pour l’édition critique des poésies de ce troubadour, voir Peire Vidal. Poesie, a cura di d’A.S. Avalle, Milano-Napoli, Ricciardi, 1960, 2 volumes.
3 D. Hüe, art. cit. à la note 1, p. 236.
4 Cf. Claude Lecouteux, Fées, Sorcières et Loups-garous au Moyen-Age. Histoire du double, Préface de Régis Boyer, Paris, Imago, 1992 (1996).
5 The Types of the Folktale, Helsinki (FFC 184), 1961.
6 Cf. Régis Boyer, Le Monde du double. La magie chez, les anciens Scandinaves, Paris, Berg International, 1986. Sagas islandaises, publiées par Régis Boyer, Paris, Gallimard, 1987 (Bibliothèque de la Pléiade). Cf. Cl. Lecouteux, op. cit., p. 121 et passim.
7 Cf. N. Cohn, Démonolâtrie et Sorcellerie au Moyen-Age, trad. fr., Paris, Payot, 1982 ; Jacques Voisenet, « Le baiser à la bête : rite d’humiliation, pratique satanique ou scatologie ? », in Les Animaux dans la littérature. Actes du colloque de Tôkyô de la Société Internationale Renardienne (Université Keio, 22-24 juillet 1996), Tôkyô, Keio University Press, 1997, p. 291-304 (et bibliographie relative) ; Jacques Berlioz, « Le crapaud, animal diabolique : une exemplaire construction médiévale », in L’Animal exemplaire au Moyen Age (ve-xve siècles), p.p. J. Berlioz et M.A. Polo de Beaulieu, Rennes, P. U. Rennes, 1999, p. 267-288 ; G. Ortalli, « Animal exemplaire et culture de l’environnement : permanences et changements », ibid., p. 41-50 (extrait – je remercie Monsieur le Professeur Gherardo Ortalli [Université Ca’Foscari de Venise] pour ses renseignements indispensables et pour sa courtoisie).
8 Je pense à l’expression courir le guilledou (« vagabonder la nuit »), attestée dans l’Etymologisches Wörterbuch der französischen Sprache de Gamillscheg. Cf. Gianna Chiesa Isnardi, « Il lupo mannaro corne superuomo », in AA. VV., Il superuomo e i suoi simboli nelle letterature moderne, vol. III, con una prefazione di E. Zolla, Firenze, La Nuova Italia, 1973, p. 11-37 (p. 29, note 41).
9 Cf. Lais de Marie de France, traduits par L. Harf-Lancner, texte édité par K. Warnke, Paris, Le Livre de Poche, 1990, v. 70-78 et 87-96, p. 120-121 (Lettres Gothiques, 4523).
10 Cf. G. Gros, « Où l’on devient bisclavret. Etude sur le site de la métamorphose (Marie de France, Bisclavret, vers 89-96)”, in Miscellanea Madiaevalia. Mélanges offerts à Philippe Ménard, Paris, Champion, 1998, tome I, p. 573-583 et F. Schlösser, Andreas Capellanus. Seine Minnelehre und das christliche Weltbild um 1200, Bonn, 1960, cit. in M. Bambeck, « Das Werwolfmotiv im Bisclavret », Zeitschrifl für Romanische Philologie, 89 (1973), p. 123-147 (p. 125, note 4).
11 W. Hertz, Der Werwolf. Beitrag zur Sagengeschichte, Stuttgart, Kröner, 1862 ; S. Battaglia, « Il mito del licantropo nel Bisclavret di Maria di Francia », in id., La coscienza letteraria del Medioevo, Napoli, Liguori, 1965, p. 361-389.
12 La femme du bisclavret ne trahit son mari que parce qu’elle a peur et n’a plus alors qu’une idée : En maint endreit se purpensa | Cum ele s’en puïst partir : | Ne voleit mes lez lui gisir. (v. 99-101). « L’angoisse liée à la métamorphose apparaît ici très clairement : le verbe « gisir » indique en effet que la femme redoute des rapports charnels avec une bête. » Cf. C. Bouillot, « Quand l’homme se fait animal. Deux cas de métamorphose chez Marie de France : Yonec et Bisclavret », in Magie et Illusion au Moyen-Age (Senefiance n° 42), Aix-en-Provence, 1999 (voir note 1), p. 65-78 (p. 75-76). L’édition des Lais de Marie de France que C. Bouillot emploie est celle de Jean Rychner, Paris, Champion, 1966 (C.F.M.A., 93).
13 Etrangement, dans la bibliographie de S. Battaglia est absente toute référence au livre (cité ci-dessus) de W. Hertz, qui est encore indispensable de nos jours (au même titre que les ouvrages de M. Sommers, The Werewolf, London, Kegan Paul, Trench, Trubner & C°, 1933 et de R. Eisler, Man into Wolf. An Anthropological Interpretation of Sadism, Masochism and Lycanthropy, London, Routledge & Kegan Paul, 1951).
14 L’exigence d’une nouvelle discussion du problème des sources remonte a Martin de Riquer, « La ‘aventure’, el ‘lai’y el ‘conte’in María di Francia », Filologia Romanza, 2 (1955), p. 1-19 (tout spécialement p. 19). – Que je sache, la rencontre entre le bisclavret et le roi n’a pas encore été évaluée en ce qui concerne à la fois son importance formelle et celle de son contenu. P. ex., Leo Spitzer parle surtout du drame privé de l’infidélité conjugale (« Marie de France, Dichterin von Problem-Märchen », Zeitschrift für romanische Philologie, 50 [1930], p. 34), et H. Schürr se penche sur la circonstance centrale du vol des habits (« Komposition und Symbolik in den Lais der Marie de France », ibid., p. 562). S. Battaglia, op. cit., place tout cela en une perspective ambiguë (cf. M. Bambeck, « Das Werwolfmotiv », p. 137-139).
15 M. Schuster, « Der Werwolf und die Hexen. Zwei Schauermàrchen bei Petronius », Wiener Studien, 48 (1930), p. 149-178. Il vaut la peine de citer ici l’intéressante analyse de Mihaela Bacou, d’après laquelle le miles « fort comme un ogre » du récit de Pétrone est le seul exemple de véritable loup-garou. M. Bacou se rattache ainsi au titre même de l’essai de Mauriz Schuster : « [U]n loup-garou dont l’existence n’est pas soumise à une autre exigence que celle d’illustrer un moment de frayeur [Schauer] vécu par le narrateur Nicéros : gratuité totale du discours, pur ornement sans autre but que de faire frissonner l’auditoire sans prétendre d’ailleurs être véritablement cru, absence de finalité extérieure du récit, mené à son terme sans jugement moral […]. » Cf. M. Bacou, « De quelques loups-garous », in Métamorphose et Bestiaire fantastique au Moyen-Age, Etudes rassemblées par L. Harf-Lancner, Paris, Ecole normale supérieure de jeunes filles, 1985, p. 29-50 (aux p. 45-47).
16 Cf. Cl. Lecouteux, Fées, sorcières et loups-garous, p. 133-138.
17 A propos du Double, il est très intéressant de lire la Postface de Régis Boyer (p. 237-244) à un autre livre de Claude Lecouteux : Fantômes et revenants au Moyen-Age, Paris, Imago, 1986 (1996). Dans la Préface à la deuxième édition, l’auteur ne manque pas de polémiquer contre le livre de Jean-Claude Schmitt, Les Revenants. Les vivants et les morts dans la société médiévale, Paris, Gallimard, 1994. Dans ce dernier ouvrage, M. Schmitt avait donné des appréciations positives (et en tout cas davantage nuancées) des volumes de M. Lecouteux : cf. p. 15 et note 16.
18 Cl. Lecouteux, op. cit., p. 135.
19 Le Satyricon a été traduit par P. Grimal, in Romans grecs et latins, Paris, Gallimard, 1963 (Bibliothèque de la Pléiade, 134).
20 Gervasii Tilburiensis Otia Imperialia éd. G. Leibniz, 2 vol. (I. Scriptores rerum Brusvicensium. II. Emendationes et Supplementa), Hannover, 1707 et 1709 (seule éd. intégrale). Eiusdem, éd. F. Liebrecht, Hannover, Rümpler, 1856. Eiusdem, traduction de la IIIe partie : Le Livre des merveilles, par A. Duchesne, Paris, Les Belles Lettres, 1992.
21 Ed. P.M. O’Hara Tobin, Les Lais anonymes des xiie et xiiie siècles, Genève, Droz, 1976 (le texte de Melion se trouve aux p. 289-318). Cf. Jean-Claude Aubailly, La fée et le chevalier. Essai de mythanalyse de quelques lais féeriques des xiie et xiiie siècles, Paris, Champion, 1986, chap. I, « Melion et Bisclavret : le problème de l’Ombre », p. 13-37 (essai d’interprétation à la lumière de la psychologie analytique de Carl Gustav Jung).
22 M. Schuster, art. cit. à la note 15, spécialement aux p. 160-162.
23 Le Chevalier au barisel, éd. Félix Lecoy, Paris, Champion, 1955, v. 160-162, p. 6.
24 Sur Lycanthropie et Leonina (entre Yvain, Amadas et Ydoine, Partenopeus de Blois et le Malleus Maleficarum), cf. encore Denis Hüe, art. cit., p. 248-251.
25 Cf. F. Cardini, Aile radici della cavalleria medievale, Firenze, La Nuova Italia, 1981, p. 86.
26 Pour une discussion sur l’emploi de ces concepts à l’époque médiévale, cf. Tony Hunt, « La parodie médiévale : le cas d’Aucassin et Nicolette », Romania, 100 (1979), tout spécialement aux p. 347-348.
27 Cf. Gaio Petronio, Satyricon, a cura di M. Scarsi, prefazione di G. Chiarini, con testo a fronte, Firenze, Giunti, 1996 (à lire tout spécialement l’Introduzione de Mariangela Scarsi, p. XXV-LI).
28 Cf. F. Dürrenmatt, Theaterprobleme, Zürich 1955, p. 55 (cit. in W. Freund, Die literarische Parodie, Stuttgart, Metzler, 1981. p. 120). Cf. L. Hutcheon, « Ironie et parodie. Stratégie et structure », Poétique, n° 36, 1978, p. 467 sq., et M. Bonafin, « Un approccio « dialettico » alla parodia letteraria », Nuova Corrente, 30 (1983), p. 399-410, passim.
29 Cf. Julio Caro Baroja, Les sorcières et leur monde, Paris, Gallimard, 1972 (éd. or. Las brujas y su mundo, Madrid, Alianza, 1961). J’ai lu la trad. it. : Le streghe e il loro mondo, Parma, Pratiche, 1994. A ce sujet, il faut lire Margherita Lecco, « Le streghe di Julio Caro Baroja », L’Immagine Riflessa, n.s., 5 (1996), p. 187-192.
30 Cf. Heinrich Institor (Krämer) et Jakob Sprenger, Malleus Maleficarum, Strasbourg, J. Prüss, 1486-1487. Trad. fr. : Le Marteau des Sorcières, par A. Danet, Grenoble, Millon, 1990. Cependant, M. Lecco (art. cit., p. 191) fait remarquer que « même dans les moments les plus sombres (xvie et xviie siècles) il est des théoriciens (théologiens, intellectuels, juges depuis l’Espagne jusqu’à la Suisse) qui se laissent prendre par le doute ou, au moins, par l’incertitude, en contribuant au rayonnement d’une attitude de plus en plus critique (Friedrich von Spee, Gassendi, Malebranche ecc.) ». A lire également : M. Lecco, « Mascherarsi da animait », in Maschere e Corpi. Percorsi e ricerche sul Carnevale, a cura di F. Castelli e P. Grimaldi, Alessandria, Edizioni dell’Orso, p. 247-263 (L’immagine Riflessa/Quaderni, 2).
31 Cf. Caroline Oates, « Démonologues et lycanthropes : les théories de la métamorphose au xvie siècle », in Métamorphose et Bestiaire fantastique au Moyen-Age (cité note 16), p. 71-105 (tout spécialement les pages conclusives).
32 Cl. Lecouteux, Fées, sorcières et loups-garous, « Conclusion », p. 171-175.
33 Femmes qui courent avec les loups. Histoires et mythes de l’archétype de la Femme sauvage, trad. fr., Paris, Grasset, 1996, p. 33-34.
34 Cf. Giosuè Lachin, « Bisclavret, Melion, Gorlagon », L’Immagine Riflessa, n.s., 2 (1993), p. 251-70. Pour ce qui est de Biclarel, cf. au moins C. Beretta, « Una tarda rielaborazione del Lai de Bisclavret : l’episodio di Biclarel nella prima redazione di Renart le Contrefait », Medioevo Romanzo, 14 (1989), p. 363-377. Dans ces deux essais on peut trouver tout autre renseignement bibliographique nécessaire.
35 Etudes françaises [fascicule monographique consacré au Bestiaire perdu], 10/3 (août 1974), p. 319-334.
36 Il me semble que le récit de La Loba mésoaméricaine est d’autant plus important pour la compréhension de certaines histoires de loup-garou, qu’il insiste moins sur l’aspect « merveilleux » du conte, en l’insérant, au contraire, en un contexte décidément chamanique. Cf., par exemple, Mircea Eliade, Le chamanisme et les techniques archaïques de l’extase, Paris, Payot, 1968, et Claire Kappler, « Peut-on parler d’un chamanisme dans l’Europe médiévale ? », article pour Les Cahiers Villard de Honnecourt (2000 – sous presse). Je remercie « avec toute mon amitié » l’auteur de cette importante étude, dont elle a bien voulu m’envoyer en avant-première le texte. Cf. aussi – d’un point de vue qui présente beaucoup d’éléments innovateurs – Carlotta Capacchi, L’Aldilà degli Sciamani. Il mondo dei vivi e il mondo dei morti nello sciamanismo euroasiatico, Parma, Palatina, 1996.
Auteur
Université de Gênes, Italie
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