Figures du temps, projections de l’avenir Récits et images
p. 11-24
Texte intégral
Espoir et mémoire ou, d’une manière plus générale, attente et expérience – car l’attente embrasse plus que le seul espoir tout comme l’expérience va plus profond que la simple mémoire – sont constitutifs à la fois de l’histoire et de sa connaissance et la constituent en montrant et en construisant jadis, aujourd’hui ou demain le rapport interne existant entre le passé et l’avenir.
R. Koselleck1
1Le Trésor de la langue française propose d’avenir comme de futur la même définition générale de « temps à venir ». L’article avenir donne ensuite le sens par métonymie, par rapport à un individu ou à un groupe, de : « Ce qui sera plus tard : les événements futurs » et de : « Ceux qui vivront plus tard, les générations futures ». L’article futur propose : « Ce que deviendra la société, la vie des hommes au-delà d’une certaine période historique2 ». Ce sont là trois acceptions assez différentes.
Deviner, prophétiser : prédire l’événement
2« Ce qui sera plus tard : les événements futurs » correspond à ce qui adviendra et pose depuis des siècles, sinon des millénaires, le problème de la possibilité d’annoncer pertinemment à l’avance à un moment présent ce qui va ou peut se produire, que cela concerne un individu ou la collectivité, que cet avenir soit objet d’espoirs ou surtout de craintes. Soit des événements dont l’issue est a priori incertaine (décider d’entrer en guerre), ou bien dont la survenue est certaine, mais non la date (la mort d’un individu ou la fin du monde). Et des événements qui ne sont pas certains mais peuvent soudain survenir, comme la guerre, l’épidémie, les catastrophes naturelles telles que l’éruption du Vésuve ou le tremblement de terre de Lisbonne.
3Ce premier sens, le plus ancien, n’a guère été pris en compte dans les contributions réunies ici. On en trouvera un survol historique dans l’Histoire de l’avenir de Georges Minois3, qui pose en principe que « prédire est le propre de l’homme. C’est une dimension fondamentale de son existence » et qui retrace l’histoire de « la prédiction à travers les âges » en quelques grandes étapes.
4On a pu dire l’avenir par la divination inductive4 fondée sur l’observation et l’interprétation - par ceux qui sont initiés à leur lecture – de signes jugés annonciateurs de ce qui peut ou va se produire. Ainsi les prodiges, ou bien le cri ou le vol des oiseaux, ou le tirage au sort ou encore l’haruspicine, observation des organes internes d’animaux sacrifiés. Ajoutons la cartomancie ou la chiromancie, lecture des lignes et signes de la main d’un individu.
5L’astrologie repose sur le principe que des lois peuvent être déterminées à partir de la position des planètes, du soleil et de la lune, et donc que les astres ont des effets sur le cours de la vie humaine. Elle s’efforce ainsi de déterminer les périodes les plus propices à une action et d’annoncer aussi les grandes catastrophes. Sa particularité est de dépendre d’un savoir mathématique, rationnel et rigoureux. Elle a été introduite et développée en Grèce par des savants et des philosophes et a rencontré un succès grandissant dans le monde hellénistique. L’Alexandrin Hipparque a élaboré la charte de nativité, dite horoscope : l’image de l’état du ciel au moment d’une naissance est riche de présages sur la destinée du nouveau-né. Claude Ptolémée distingue l’astronomie, qui est à ses yeux un préalable, et l’astrologie qui permet la connaissance du futur à partir des données astronomiques. On lui attribue l’adage « Les astres inclinent, ils ne forcent pas ». Notre caractère et nos penchants sont déterminés et conduisent à réagir face à des événements qui sont eux-mêmes déterminés par les planètes. L’astrologie joue un rôle qui peut être préventif : nous pouvons, en connaissance de l’avenir, prendre à l’avance nos dispositions pour déterminer notre action en fonction de nos objectifs. Les calculs astronomiques permettent de connaître à l’avance avec précision depuis l’Antiquité la position des planètes et la date des éclipses. Ils constituent la plus ancienne des prévisions scientifiques, d’où le long intérêt qu’a pu susciter l’astrologie auprès des élites, en particulier entre les xve et xviie siècles5, et son interférence avec d’autres savoirs, comme la médecine ou la physiognomonie.
6La « divination intuitive ou naturelle », encore dite mantique, est due à l’inspiration divine et se manifeste sous diverses formes dans les révélations d’êtres qui, sous l’effet des forces supranaturelles, acquièrent des capacités de prémonition. Ainsi, dans la Bible, à travers l’oniromancie : Joseph interprète les rêves du pharaon et des grands dignitaires, Daniel ceux de Nabuchodonosor et de Balthazar. En Grèce les malades viennent dormir à cette fin dans certains sanctuaires du dieu Esculape.
7Les peuples de l’Antiquité ont connu oracles, sibylles ou prophètes. Dans la Bible, le prophète inspiré par la divinité (sa prophétie commence souvent par « ainsi parle le Seigneur… ») s’en fait le porte-parole auprès de son peuple. Il annonce souvent un malheur et, de manière explicite ou implicite, les moyens d’empêcher qu’il n’arrive. On a alors deux possibilités : soit on remédie au mauvais présage en conjurant le sort, selon une conception magique où l’homme peut intervenir, en bien ou en mal, par des rituels qui lui donnent accès aux mécanismes de l’univers, les rites réparateurs restaurant alors les liens et rapports harmonieux entre les dieux et les hommes ; soit on modifie les données de la prophétie qui relèvent du présent immédiat et on rend caduc l’avenir annoncé en agissant sur les causes qui avaient suscité la prophétie. Ainsi lorsque Jonas prophétise la ruine de Ninive : « Encore quarante jours et Ninive sera détruite. » Les habitants se convertissent, leur repentir calme la colère divine et rien ne se passe, ce qui surprend Jonas6. On peut aussi décider de ne pas commencer ou de poursuivre une entreprise qui semble placée sous de mauvais augures. Comme l’observe Cicéron, les mauvais présages « ne sont pas cause qu’une chose arrive, mais annoncent seulement qu’elle arrivera, si on n’y pourvoit7 ». Ils peuvent donc jouer un rôle dans la prise de décision.
8Les signes éventuels du futur impliquent des analogies ou des correspondances étroites et complexes entre le cosmos ou du moins le macrocosme et le microcosme animal ou humain, ainsi qu’une forte porosité entre un monde divin qui les inspirerait et celui des hommes. La loi mosaïque interdit déjà de « consulter les oracles, pratiquer l’incantation, la divination, les enchantements et les charmes, interroger les revenants ou consulter les morts » (2 Rois, 23-24) et privilégie le prophétisme. La divination est déjà l’objet d’un débat chez les philosophes grecs. À l’époque romaine le De divinatione de Cicéron oppose dans un dialogue son frère Quintus, partisan de la divination et l’auteur qui a cessé d’y croire. Les chrétiens vont utiliser ce texte pour ruiner la divination païenne et promouvoir la prophétie judéo-chrétienne. Théodose interdit en 385 la consultation des entrailles d’animaux8.
9Le rationalisme occidental va progressivement rejeter l’ensemble de la divination inductive sans en faire cependant disparaître la plupart des pratiques, qui persistent mais relèvent d’attitudes individuelles jugées irrationnelles et parfois qualifiées péjorativement de « populaires9 ». La forme de divination qui a été la plus laborieusement évacuée des cultures élitaires au cours des xviie et xviiie siècles, l’astrologie, continue d’avoir des praticiens qui disposent de pages pour leurs horoscopes dans les médias et sont cités par des journalistes lors des changements d’année – à noter que leurs prédictions sont en général si prudentes qu’elles s’apparentent à des prévisions. La divination intuitive sous-entend l’existence d’un monde divin communiquant avec celui des hommes. Le prophétisme a été cantonné à la croyance religieuse comme tous les autres types de révélation au terme d’un processus de laïcisation.
10La prédiction de ce qui est certain à terme, par exemple la disparition d’un individu, a nourri la prédication eschatologique, fondée sur l’adage Mors certa est, sed hora incerta, et sur la nécessité – chez les catholiques du moins –, d’œuvrer à son salut dans l’espoir d’obtenir dans l’au-delà le meilleur des avenirs possible, celui des justifiés10. Marcel Bernos analyse un des très rares sermons des xviie et xviiie siècles qui porte explicitement sur « l’avenir » au sens du devenir de l’âme immortelle après la mort, dans la « vie du monde à venir » selon l’expression de l’époque. Il cite cet exemple d’usage du mot, dans le Dictionnaire de Furetière, qui correspond à un lieu commun de son temps : « Il faut qu’un chrétien songe toujours à l’advenir, pense toujours à la mort. » Un aussi faible usage du mot lui-même dans ce qui est alors une forme de communication et un genre littéraire majeur est d’ailleurs intéressant à observer et mériterait d’être approfondi. Marcel Bernos souligne qu’il n’a pas encore la connotation progressiste qui sera la sienne à l’époque contemporaine. Peut-être est-il encore trop connoté, aux yeux des gens d’Église, aux tentatives jugées par eux « superstitieuses » de percer l’avenir que l’on vient d’énumérer.
La prévision
11La prévision s’efforce d’organiser par avance le futur ou d’offrir les moyens de se prévenir de certaines de ses potentialités, en général négatives, à partir de l’expérience du passé et de l’analyse rationnelle des données du présent. Ainsi un des sens de prévoir est-il d’envisager des possibilités, voire toutes les éventualités. Dès l’époque grecque, la démarche hippocratique associe au diagnostic, établissement précis de l’état du malade et de l’origine de ses maux, un pronostic, projection dans l’avenir immédiat du devenir potentiel du patient en liaison avec un traitement thérapeutique. Thalès aurait prédit une bonne récolte d’olives en fonction de ses observations météorologiques11. Au Moyen Âge, l’universitaire dominicain Albert le Grand appelle la prévision « prophétie naturelle » pour la distinguer de la prophétie inspirée par Dieu et considère qu’elle est un raisonnement intellectuel, dont la capacité est limitée par les forces humaines, alors que la prophétie surnaturelle est un charisme, une grâce donnée par Dieu pour le service d’une communauté à laquelle il envoie le prophète12. Saint Thomas d’Aquin précisera que « les hommes n’ont pas la connaissance de ces événements futurs mais ils peuvent l’acquérir par voie expérimentale ; ils sont alors aidés par leurs dispositions naturelles, suivant que leur puissance imaginative est plus parfaite, et leur intelligence plus lucide ». Cette connaissance ne peut porter que sur les « effets qui sont du ressort de l’expérience humaine » et elle peut être sujette à l’erreur13. Jean-Paul Boyer souligne ici, à travers l’analyse d’un sermon du roi Robert de Sicile, comte de Provence, un aspect de l’utilisation politique de la pensée du Docteur angélique : pour Robert la prévoyance d’un souverain est « la part principale » de sa prudence. Il la définit selon Cicéron comme « l’intelligence du présent, la mémoire du passé, la prévoyance du futur ». Les exemples de « saints rois » que cite Robert, empruntés à la Bible, ajoutent néanmoins à ces qualités intellectuelles une dimension prophétique, qui reste encore liée à la dignité royale et se portera sur la personne même du souverain avec la montée de l’absolutisme.
12Connaître à l’avance ce que peut être le futur immédiat à partir du présent est un enjeu. Essentielle est ainsi dans nos sociétés la prévision météorologique, depuis que la probabilité de ses prévisions à court terme est devenue suffisamment forte. Les sondages d’opinion tentent de même d’anticiper les résultats électoraux. Les « tendanciers » des métiers de la mode s’efforcent de dégager les tendances telles que formes, couleurs, matières, susceptibles de nourrir la mode de la saison prochaine. Parmi les définitions d’anticiper, une de celles du Tlf est « action de se représenter une chose future considérée comme plus probable que le rêve et plus proche de sa réalisation que le simple projet ». L’incertitude inhérente à l’anticipation se manifeste dans l’annonce prématurée, lorsque la réalisation d’un fait en cours est imprudemment considérée comme assurée. Est restée célèbre la fausse annonce de ce quotidien du soir, La Presse, dont les rédacteurs, voulant avoir la primeur d’une nouvelle, prirent le risque le 10 mai 1927 d’annoncer à la une que Nungesser et Coli, qui avaient décollé le 8 mai du Bourget pour tenter de rallier l’Amérique, étaient « à 5 heures arrivés à New York », ce qui ne se produisit pas. Régis Bertrand en donne ici un exemple avec ces tableaux du xviie siècle qui représentent des monastères dans un état d’achèvement qui ne fut jamais atteint. Mais ces toiles destinées à la maison-mère ne pouvaient être mises à jour au fur et à mesure de la progression des travaux. Leurs commanditaires pensaient que ces derniers seraient un jour menés à leur terme mais ne pouvaient préciser ce calendrier, lié à des dons. Et surtout ils ne pouvaient pas prévoir la Révolution, qui fermerait leurs maisons encore inachevées.
Se prémunir
13Prévoir le risque et s’en prémunir par l’assurance s’observe depuis le Moyen Âge dans des milieux professionnels aux risques élevés – moins pour la personne que pour les capitaux engagés. Au xviiie siècle des tables de mortalité commencent à être élaborées afin de prévoir l’amortissement des rentes viagères, des tontines, qui sont des formes d’emprunts publics. Plusieurs colloques organisés ces derniers temps par la Casa de Velázquez de Madrid, les Écoles françaises d’Athènes et de Rome et l’Institut français d’archéologie orientale du Caire ont exploré les problèmes de la prévisibilité de certains risques, liée à un grand effort de connaissance scientifique des êtres et des choses14.
14La capacité à appréhender, décrire et quantifier avec précision un aspect de la réalité à un moment et en un espace donnés s’est progressivement imposée pour de multiples phénomènes ou activités humaines, à titre de précaution et pour obtenir, en cas de risque subi, un dédommagement des assurances ou par voie de justice. D’où à un niveau ponctuel la consignation par écrit minutieuse de toutes sortes de détails et de faits, dont témoignent les journaux et récits de navigation, des procès-verbaux, des inventaires et des expertises, des enquêtes, des dossiers divers. L’étude de Gilbert Buti offre ici un bel exemple de cette volonté de dresser constat afin d’obtenir dédommagement : en 1805 des corsaires barbaresques s’emparent par surprise d’un navire et de sa cargaison en rade de Toulon. L’événement donne lieu à l’élaboration d’un ensemble documentaire nourri mais dont l’exactitude sera pourtant contestée.
Évolutions et mutations collectives
15Avenir au sens de « Ce que deviendra la société, la vie des hommes au-delà d’une certaine période historique » prend en compte non pas les accidents conjoncturels et conjecturels, mais les grandes évolutions structurelles. Ce thème a d’abord été étudié par les historiens de la littérature à travers des aspects qui récusent le réel immédiat et qui relèvent souvent d’un imaginaire en rupture avec ce dernier, qu’il soit utopique ou millénariste ou qu’il relève du genre littéraire de la science-fiction15. Cette direction n’a pas été retenue dans cet ouvrage.
16À travers l’œuvre de Reinhart Koselleck (1923-2006), Jacques Guilhaumou souligne ici combien le tournant du xviiie siècle est marqué par une expérience particulière de la temporalité, liée au progrès de l’élaboration de l’histoire, laquelle devient dès lors « une catégorie ouverte sur un avenir à planifier ». Condorcet observait : « Pourquoi regarderait-on comme entreprise chimérique celle de tracer avec quelque vraisemblance le tableau des destinés futures de l’espèce humaine d’après les résultats de son histoire16 ? ». Les générations de la Révolution et de la Restauration ont eu « conscience de vivre une époque de transition », marquée par ce que R. Koselleck a défini comme des « horizons d’attente » et par la notion de progrès, qui fait espérer que « le futur sera autre que le passé, c’est-à-dire meilleur17 ». Le travail de l’historien en est transformé : afin d’expliquer le présent et d’éclairer l’avenir18, il va tendre à mettre en évidence rétrospectivement des évolutions, d’abord politiques, puis économiques, sociétales et culturelles, à mesurer l’ampleur et les rythmes de leurs étapes chronologiquement différenciées selon les lieux. Ce qui impliquera souvent le détournement de sources qui n’ont pas été initialement confectionnées dans un but historiographique. Jean-Pierre Lethuillier a choisi d’en donner ici un exemple original, à partir d’un élément de la culture matérielle, l’évolution des coiffes féminines au xviie siècle, en hommage aux recherches pionnières de Bernard Cousin sur le costume.
17Le passé étant potentiellement gros de l’avenir, la description d’un phénomène présent va être le moyen de mesurer ensuite avec le recul du temps les changements apportés par un avenir devenu présent et bientôt même passé, voire de prévoir et peut-être d’orienter ces évolutions. Ce préalable d’une meilleure maîtrise intellectuelle et politique du monde et de la société par les autorités a en particulier consisté à passer de l’inventaire achronique de la variété des phénomènes observables à leur description puis à leur analyse et à leur mise en perspective historique. Brigitte Marin étudie ainsi l’imaginaire des villes du futur entre xvie et xviiie siècle, une conception de l’urbain des contemporains qui montre avec force que la ville est toujours conçue comme un laboratoire de la modernité.
18Mais il est des sociétés figées (en apparence) où il semble « impossible de prédire l’avenir parce que le temps n’existe plus ». C’est une situation paradoxale de ce type que décrivent les fables politiques analysées par Paul Aubert. Les institutions espagnoles sont paralysées depuis le xviiie siècle, la monarchie est endormie et la République libérale incapable de proposer des réformes et donc un avenir, situation unique dans une Europe occidentale emportée par des visions progressistes du monde qui, les unes et les autres, entendent reposer sur une meilleure connaissance du présent.
19L’élaboration des statistiques départementales sous la Révolution et pendant les premières décennies du xixe siècle est significative de l’importance qu’a pu revêtir la connaissance de tous les aspects du présent mais aussi du passé de la nouvelle circonscription territoriale pour des administrations préfectorale et centrale confrontées à la solution de continuité spatiale et institutionnelle des archives du contrôle des espaces et des populations19. Jean-Claude Bouvier donne ci-après l’exemple des représentations de la langue d’oc que fournit l’un des plus remarquables ouvrages issus de ce mouvement statisticien, la Statistique des Bouches-du-Rhône dirigée par le préfet Christophe de Villeneuve-Bargemont. Le « discours sur la langue », bien que polarisé par le problème des origines de l’occitan, s’avère indissociable de la perspective d’un futur proche, qui devrait voir s’atténuer l’accent local et disparaître les idiotismes grâce à une action volontariste : les auteurs déclarent qu’un « recueil de provençalismes […] serait un ouvrage fort utile pour le pays ».
20La collecte et le traitement des données, au prix d’une élaboration croissante des instruments d’appréhension et d’analyse, en particulier numériques, constituent une telle tâche qu’elle exige, pour les sujets les plus importants aux yeux des dirigeants, soit en matière économique, sociale ou démographique, l’aide et le support d’équipes spécialisées20. Le changement peut sembler en effet continu ou tendanciel. Son anticipation se fonde dès lors sur l’extrapolation des variables des données numériques passées et présentes pour proposer une projection volontariste de l’avenir, en particulier économique (avec le Commissariat général au Plan) ou démographique (1945, fondation de l’Ined), ensuite environnemental (Club de Rome) voire géopolitique. Dans les années postérieures à la Seconde Guerre mondiale, dans la période d’optimisme économique qui suivit la Reconstruction et que Jean Fourastié appela « les trente glorieuses », la « prospective », néologisme dû en 1957, comme le rappelle ici Philippe Mioche, à Gaston Berger (1896- 1960), professeur de l’université d’Aix-Marseille, ou les « futuribles », autre néologisme créé en 1960 par Bertrand de Jouvenel (1903-1987), paraissent selon ce principe à des auteurs, tel Jean Fourastié (1907-1990)21, un nouveau champ tendant vers la scientificité grâce à la conjonction d’experts, à la condition de prendre en charge une longue durée statistique allant du passé à l’avenir22. Elle tend même à définir ses méthodes (l’extrapolation « raisonnée », les « scénarios ») et à se risquer à poser ses premières règles : par exemple que la consommation d’électricité dans les pays industrialisés doublerait tous les dix ans…
21À travers l’exemple de la prospective sidérurgique, Philippe Mioche montre que « la prospective [est un] révélateur des représentations plus ou moins cachées », soit dans ce cas précis, « l’extraordinaire confiance dans l’avenir » des fabricants d’acier européens persuadés, que « la demande d’acier augmentera fatalement » (c’est nous qui soulignons) et surtout que « le monde de demain ressemblera à celui d’aujourd’hui ». Philippe Mioche ne se contente pas de rappeler que cela n’a guère été le cas. Il souligne combien des prévisions qui pouvaient sembler optimistes au sujet de la « forte progression » de la Chine s’avèrent nettement en-dessous de la réalité advenue depuis. C’est dire combien la prévision qui ne s’est pas réalisée peut être riche a posteriori de représentations sous-jacentes pour l’historien.
22Bernard Morel précise ici l’attitude des économistes à l’égard de la prévision. Relisant les travaux publiés naguère au temps de la « prospective », il souligne que certains « mettaient en avant le temps et l’analyse historique comme élément essentiel de l’analyse du futur ». Il montre que la prévision n’a guère été un objectif de l’économie classique. C’est en fait l’intervention de la puissance publique dans la vie économique, afin de prévenir ou combattre les crises, qui a conduit à l’élaboration de modèles et de théories de prévisions. Ils sont mis à mal par la crise de 1974 qui impose des anticipations plus modestes et sectorielles. B. Morel souligne que « si la science économique ignore la prévision, l’économie politique ne peut ignorer l’avenir ».
23L’anticipation et la prévision sont de fait devenues à partir du xviiie siècle un aspect de la prise de décision du pouvoir politique et, dans les démocraties, une forme de sa responsabilité à l’égard de la population. D’où d’ailleurs l’apparition récente de ce « principe de précaution » qui serait typique de la France actuelle, lié au risque pour le gouvernant élu d’être considéré comme responsable d’un fait survenu dont la vox populi pourrait estimer qu’il aurait pu et donc dû l’éviter. Il en est de même depuis des siècles pour les dirigeants économiques, en ce qui concerne les données susceptibles de fournir des prévisions pour les réserves de produits alimentaires ou de matières premières ou les sources d’énergie. Daniel Faget en fournit ici un exemple avec les prévisions alarmistes qui concernent la ressource halieutique en Méditerranée. Il s’agit bien d’une inquiétude ancienne, puisqu’elle est formulée dès le xviiie siècle et d’emblée liée à l’action humaine et plus précisément à l’usage de nouveaux engins de pêche. On ne peut qu’être frappé de l’écho qu’elle rencontre auprès de l’intelligentsia marseillaise du siècle suivant, y compris dans la création poétique23.
Novation et modernité
24L’effet de seuil de certaines innovations peut être perçu a posteriori comme anticipation novatrice, si son principe s’est ensuite imposé, au terme d’une évolution tendancielle, voire comme une forme sinon de progrès du moins de modernité. Gérard Monnier donne ici l’exemple d’une de ces « ruptures fondamentales, qui ont alimenté une culture de la modernité architecturale rapidement mondialisée », l’affranchissement par les architectes contemporains des contraintes du parcellaire, en particulier grâce à l’immeuble sur pilotis. L’histoire des arts connaît nombre de cas de telles relectures à travers les notions de l’« avant-garde », des « précurseurs de l’art moderne », en rupture avec l’art académique de leur temps. Ils ne sont pas propres aux domaines artistiques. La contribution de Jean Doménichino montre combien l’entrepreneur Paul Ricard a été un « précurseur », voire un « visionnaire », autant parce qu’il a su très tôt tirer parti de l’image de la Provence pour promouvoir ses boissons anisées que par sa politique sociale à l’égard de son personnel. Inattendues sont les sources d’inspiration de ce patron longtemps atypique, le mouvement occitaniste marseillais de l’entre-deux-guerres, associant l’exaltation du pais et un idéal de « socialisme du Midi » marqué par le courant personnaliste. Preuve d’ailleurs de la diversité et la richesse de mouvements régionalistes trop vite considérés comme passéistes.
25Le rapport entre présent et futur pose cependant la question de la représentation d’un avenir déjà passé dans l’écriture de l’historien. La tendance à se faire prophète de ce qui est advenu, au risque d’un déterminisme implicite, est la marque d’un discours historique peu maîtrisé. Une vision progressiste imprègne souvent encore l’histoire des sciences et des techniques. Non sans raison, car les progrès de la vie matérielle, des sciences et de l’espérance de vie ont été globalement continus dans le monde au xxe siècle. Mais les avances réelles que l’avenir a confirmées sont souvent les seules retenues par la postérité, qui rejette dans l’oubli nombre d’échecs, d’essais sans suite, de fausses découvertes ou d’erreurs. C’est une de ces voies sans issue fondée sur le principe sommaire d’une « parenté biologique entre l’espèce simiesque et l’homme » qu’a choisi d’étudier Isabelle Renaudet, les tentatives des docteurs Serge Voronoff et Louis Dartigues de lutter contre le vieillissement à partir de greffes de revitalisation prélevées sur l’animal dans les parties génitales de l’homme. Par-delà l’aspect réduit de l’expérimentation, faute de sujets disponibles, Isabelle Renaudet souligne à la fois combien elle traduit une vision traditionnelle encore très réductrice de la vieillesse en contraste avec celle que va développer la gérontologie moderne, mais aussi comme elle conduit ses promoteurs à avancer la proposition que la loi puisse autoriser dans l’avenir les prélèvements d’organes sur les corps des morts par accident.
L’imprévu révolutionnaire
26Le changement peut aussi être discontinu, soudain et inattendu, si survient un événement majeur. Alain Cabantous montre ici que certaines de ces journées décisives qui changèrent l’histoire eurent lieu en réalité la nuit, qui est trop souvent perçue comme un moment de latence alors que « le nocturne en accentue la particularité dans la mesure où il souligne et accroît l’opposition brutale entre passé et présent ». Même si la mémoire de l’événement est avant tout attentive à ses conséquences et souligne assez peu ce trait important.
27La solution de continuité temporelle qu’induit une révolution qui triomphe impose une accélération considérable des changements, de véritables ruptures, ce que Bernard Cazes appelle « le discontinuisme radical ». La pensée révolutionnaire occidentale ambitionne d’emblée de modifier radicalement l’état présent, rejeté très tôt dans le passé par la création du terme d’Ancien Régime. Mais Michel Vovelle souligne que dans cette « aventure collective impréparée » qu’est la Révolution française, les promesses d’avenir s’entremêlent aux destins collectifs et individuels à travers « le dilemme du terminer ou poursuivre ». C’est que, si l’on reprend la notion avancée par R. Koselleck, la Révolution s’efforce de satisfaire des « horizons d’attente » mais en fait naître d’autres. Elle se projette dès lors dans un avenir de rupture dans l’espoir d’assurer « l’émancipation », voire d’instaurer des « lendemains qui chantent », une organisation économique et sociale voire une humanité nouvelle, même si, observe M. Vovelle, il convient « de relever avec quelle sobriété pour ne pas dire plus, les maîtres penseurs de la période révolutionnaire se sont gardés de s’engager sur ce terrain ». Patricia Payn-Echalier étudie ici la revendication de la « loi agraire » pendant la Révolution à Arles, ville au territoire immense dont la majorité des terres de l’immense terroir appartenait sous l’Ancien Régime à de grands propriétaires et où les affrontements entre partisans et adversaires de la Révolution ont été particulièrement âpres. Le temps révolutionnaire est tout entier tourné vers « l’idée d’un avenir à construire en ce monde » (M. Vovelle). Rien d’étonnant à ce que l’on trouve les mêmes attentes à la Libération en France au point de voir resurgir des « cahiers de doléances » qui sont en fait bien davantage puisqu’ils se projettent dans « les lendemains qui chantent ». Mais, tout en reprenant à leur compte les propositions du Conseil national de la Résistance et le rêve d’une société pure, juste et morale, ce qui fait l’originalité relative de ces cahiers surtout issus de communes semi-rurales, c’est les aspirations à une modernité et à un confort qui, vu d’aujourd’hui, peuvent paraître bien banals. L’inspiration est pourtant révolutionnaire et illustre, s’il en était besoin, combien, dans l’histoire de l’Europe occidentale et avant tout en France, la mémoire de ces années de mutations radicales est étroitement liée par les « forces de mouvement » politiques et intellectuelles à la vision optimiste d’un progrès de l’humanité, vision qui reste sensible dans nombre de discours politiques actuels. Même des idéologies fondées sur une vision pessimiste de l’avenir de la planète ou du système capitaliste posent néanmoins en principe que l’homme aura les capacités de les modifier.
28Dans son étude des visions de l’avenir que propose l’opéra romantique italien, Martine Lapied observe l’espoir mis dans le combat révolutionnaire pour libérer, unifier, régénérer l’Italie, au moins au bénéfice des générations futures, car les acteurs du Risorgimento rencontrent souvent dans une mort tragique ceux de la Révolution française. Mais M. Lapied note aussi l’hésitation des librettistes devant la Révolution perçue à travers le destin tragique d’André Chénier pendant la Terreur. Étudiant une autre forme de création, la gravure satirique anglaise – dont on soulignera qu’elle est propice aux audaces –, Marina Bujoli-Minetti examine l’anticipation, dès le début de la Révolution, par certains artistes britanniques de la chute et de la condamnation de Louis XVI. Ces annonces de ce qui risque d’arriver et qui va effectivement se produire sont évidemment nourries par la mémoire collective d’un peuple qui a détrôné des monarques et en a même décapité un au siècle précédent. M. Vovelle souligne que « tiennent une place de premier rang » dans ces temps d’exception « la mort et l’au-delà » – que ce dernier soit religieux ou laïc, au sens de la postérité, ce futur alternatif ou parfois ce double futur des justes comme des réprouvés.
29C’est un autre type d’anticipation qu’analyse Jean Queniart à travers des libelles, pamphlets voire une estampe des débuts de la Révolution dont le point commun est d’évoquer sur le mode de la charge ou de la satire le Paradis soumis aux transformations profondes qui affectent alors l’organisation de l’Église et le statut du clergé. Si certains se bornent à transposer la situation récente pour en souligner les risques, d’autres condamnent durement la situation antérieure, devenue celle de l’Ancien Régime, en opposition avec celle de l’avenir constitutionnel. Jean Queniart est surtout frappé, à juste titre, par « ce puissant anticléricalisme […] qui annonce les menées déchristianisatrices ultérieures. Ces pamphlets préparent le terrain, et d’une certaine manière l’expliquent par avance ».
Un autre futur : postérité et mémoire
30L’autre sens du mot futur, « Ceux qui vivront plus tard, les générations futures », correspond plutôt à une projection dans l’avenir depuis le présent et soulève en particulier la question du jugement que les générations à venir pourront porter sur la génération présente, ou du souvenir qu’elles en auront ou qu’elles garderont d’un individu remarqué de son vivant. Soit assurer plus largement une forme de présence du disparu dans la société des vivants. « Laisser un nom » dans la mémoire des hommes grâce à une œuvre a été l’espoir par excellence des créateurs au temps du Romantisme. Claude Langlois livre ici un exemple extrême de la construction volontariste de cette image de soi à travers la présentation et le commentaire de la phrase qu’aurait prononcée peu avant sa mort Thérèse de l’Enfant-Jésus, « Après ma mort, je ferai tomber une pluie de roses », dans les éditions successives de l’Histoire d’une âme procurées par le carmel de Lisieux. Elle est mise en rapport avec cette autre phrase, quasiment testamentaire : « Je veux passer mon ciel à faire du bien sur la terre », qu’elle explicite et qui lui donne le sens d’une pluie de grâces. Elle va orienter fortement l’iconographie de la nouvelle sainte.
31Une dimension importante des sociétés occidentales, en particulier contemporaines, est le souci de la mémoire à transmettre à la postérité et de la volonté de perpétuer des aspects du passé dans l’avenir par diverses formes de commémoration et par des politiques mémorielles, en général liées à un pouvoir politique. C’est en particulier la fonction étymologique du monument, qu’il soit « historique » ou « commémoratif » que d’assurer cette permanence du passé dans l’avenir. La sanction positive de la postérité à l’égard du grand homme s’est traduite un temps par une « statuomanie » (Maurice Agulhon) européenne et atlantique dont des formes persistent encore. Les grands événements ayant entraîné mort d’hommes, en particulier les guerres, font naître de tels mémoriaux24. Claude Massu montre cependant à travers le Vietnam Veterans Memorial, « monument controversé » de Maya Lin élevé en 1982 dans la capitale fédérale des États-Unis, Washington, la « crise du monument intentionnel contemporain » : des groupes de statues de combattants et combattantes vont venir compléter – « amélior (er) s’il faut en croire l’auteur de l’un d’eux – ce qui était initialement « presque un anti-monument ».
32Les enjeux mémoriels sont, aujourd’hui comme hier, considérables dans l’opinion publique dont ils orientent la vision de l’histoire. Ils mêlent, non sans idéologies sous-jacentes parfois, des condamnations qui peuvent être sommaires et des réhabilitations souvent difficiles. Ils reposent souvent sur des jugements de valeur portés en appel sur des faits et des êtres du passé. Manon Rolland rédige son Appel à l’impartiale postérité alors qu’elle est incarcérée et s’attend à être condamnée à mort, dans l’espoir d’un recours à « la postérité » contre l’injustice du présent, ce qui effectivement se produira. C’est que le jugement de l’humanité à venir est susceptible de renverser celui des contemporains ou de la postérité immédiate. En témoignent a contrario les grands hommes déchus, dont Adolphe Thiers est un des exemples les plus évidents. Sitôt passée l’émotion soulevée par la mort du « libérateur du territoire » qui vaut au premier président de la IIIe République un spectaculaire enterrement au Père-Lachaise et un des plus imposants tombeaux du cimetière, le renversement de son image, liée à la conjoncture politique, fait de lui le « fusilleur des communards ».
33Annie Duprat montre ici la fragilité de la construction par les monarques des temps modernes (et contemporains) de leur propre image pour la postérité. La caricature Ludovicus rex de William Thackeray (1840) met à nu le « plus grand roi du monde », Louis XIV, dans la posture de son célèbre portrait peint par H. Rigaud où tout fait sens pour dire la gloire hautaine du monarque. Dépouillé de sa haute perruque, ses talons hauts, ses somptueux habits et son sceptre, Louis XIV se révèle un petit vieillard prétentieux et ridicule. Cette dérision par un Anglais du monarque qui, à en croire Voltaire, aurait dominé son siècle, s’avère annonciatrice du retournement d’image que va connaître dans la seconde moitié du xxe siècle le Roi-Soleil autoproclamé.
34Anne Carol étudie pour sa part un souci bien différent, celui de prolonger, dans un futur très immédiat aujourd’hui mais plus lointain naguère, les apparences de vie et la ressemblance des cadavres par divers procédés d’embaumement – de thanatopraxie, dit-on de nos jours. Elle montre en particulier les liens de l’embaumement du xixe siècle avec cette ambitieuse et vaine projection dans un futur indéfini qu’a pu constituer la concession dite « perpétuelle » des cimetières, qui aurait dû marquer la pérennité des familles à travers les générations.
35Une constante se dégage de cette gerbe de contributions. Depuis des siècles, nonobstant les destructions volontaires ou non, l’écriture ou l’iconographie, qu’elles soient diffusées par l’imprimé ou même restées manuscrites, transmettent à l’avenir témoignages et interprétations du passé, au cours des Temps modernes, quand des « antiquaires » procèdent à des relevés de plus en plus précis de monuments antiques puis simplement anciens et surtout lorsque commencent les campagnes photographiques de ce qui va disparaître ou risque d’être rapidement transformé25. Elles sont contemporaines du clichage des célébrités puis très vite de la photographie de personnalités obscures, seules connues de leurs proches, à qui leur portrait est destiné. « On ne prend jamais tant de photos ou de films que de cela qu’on sait menacé de disparition […]. Avec l’anxiété du sursitaire grandit la fureur documentaire », observe Régis Debray26. Comme l’écriture, l’image fixe ou fige le temps : l’instantané photographique et celui du film incorporent dès qu’ils sont enregistrés un instant passé. Leur médiatisation, leur diffusion et leurs usages sociaux les projettent dans le futur, de même que les livres d’une bibliothèque attendent potentiellement le lecteur à venir et les ex-voto d’une église le croyant ou le curieux. C’est ce futur du passé que nous souhaitions commencer à explorer à travers l’hommage rendu à Bernard Cousin27. Nous espérons que cette enquête sera poursuivie. Selon l’expression d’un Aixois illustre, « l’Histoire continue28 ».
Notes de bas de page
1 Reinhard Koselleck, Le futur passé. Contribution à la sémantique des temps historiques, trad. de Jochen et Marie-Claire Hoock, Paris, éd. de l’EHESS, 1990, p. 310 (écrit en 1975).
2 Trésor de la langue française, dictionnaire de la langue du xixe et xxe siècle (1789-1960), Paris, éd. du CNRS, t. III, 1964, p. 1075-1078 et t. VIII, 1980, p. 1351-1352.
3 Georges Minois, Histoire de l’avenir, des Prophètes à la prospective, Paris, Fayard, 1996.
4 Notion avancée par Bernard Cazes, Histoire des futurs. Les figures de l’avenir de saint Augustin au xxie siècle, Seghers, col. Les visages de l’avenir, 1986, rééd augmentée, L’Harmattan, col. Prospective, 2008 (citée ici).
5 Wilhem Knappich, Histoire de l’astrologie, traduction d’Henri Latou, Paris, Oxus, 2008 (éd. or., 1967). G. Minois, op. cit., chap. VIII à XI.
6 Cette prophétie est du type que saint Thomas d’Aquin appellera prophéties de menace, susceptibles de ne pas s’accomplir à la suite de modifications de conduite.
7 Cité par Cazes, op. cit., p. 31.
8 Minois, op. cit., p. 51-127.
9 En voir des exemples dans Lise Andries et Geneviève Bollème, La bibliothèque bleue. Littérature de colportage, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2003, en particulier p. 815-828. Également Lise Andries, Le grand livre des secrets. Le colportage en France aux xviie et xviiie siècles, Paris, Imago, 1994, Troisième partie, « Magie et divination », p. 141-205.
10 L’étude de Jean Delumeau, Le péché et la peur. La culpabilisation en Occident, xiiie-xviiie siècles, Paris, Fayard, 1983, doit être lue en écho avec ses travaux ultérieurs, en particulier Une histoire du paradis [1], Le Jardin des délices, [II], Mille ans de bonheur, [III], Que reste-t-il du paradis ?, Paris, Fayard, 1992, 1995 et 2000.
11 Minois, op. cit., p. 73.
12 Minois, op. cit., p. 212.
13 Thomas d’Aquin, Somme théologique, second volume de la seconde partie, question 172 art. 1, traduction d’Aimon-Marie Roguet, t. III, éd. du Cerf, 1985, p. 974.
14 Nous avons déjà cité celui que B. Cousin a dirigé à Aix.
15 Voir l’ouvrage classique d’Alexandre Ciorănescu, L’Avenir du passé, utopie et littérature, Paris, Gallimard, 1972.
16 Condorcet, Esquisse d’un tableau des progrès de l’esprit humain, 1793, cigé par Minois, op. cit., p. 422.
17 « Nous vivons une époque de transition » déclare de son côté Paul Veyne dans L’inventaire des différences, leçon inaugurale au Collège de France, Paris, Seuil, 1976, p. 25.
18 Souci manifeste dans les essais d’un historien tel que Jean Delumeau, Le Christianisme va-t-il mourir ?, Paris, Hachette, 1977, et Guetter l’aurore, Paris, Grasset et Fasquelle, 2003, significativement repris sous le titre Un christianisme pour demain, Paris Hachette, coll. « Pluriel », 2005.
19 Études essentielles : Jean-Claude Perrot, L’âge d’or de la statistique régionale française (an IV- 1804), Paris, 1977. J.-C. Perrot and Stuart J. Woolf, State and statistics in France, 1789-1815, Chur et al. loc., 1984 (J.-C. Perrot y reprend la première partie de l’ouvrage précédent). Marie-Noëlle Bourguet, Déchiffrer la France. La statistique départementale à l’époque napoléonienne, Paris, 1989 et réed., 2007.
20 Exemplaire est l’étude de l’histoire de la quantification de la population française conduite par Éric Brian, La mesure de l’État. Administrateurs et géomètres au xviiie siècle, Paris, A. Michel, col. Évolution de l’Humanité, 1994.
21 Nommé en 1944 par Jean Monnet au Commissariat au Plan, d’abord chef du service économique, puis conseiller économique. Choisi en 1961 comme membre du « groupe de travail 1985 » du Commissariat général au Plan. Auteur du « Que sais-je ? » no 279 qui fut longtemps célèbre, La Civilisation de 1960, Paris, Presses universitaires de France, 1947, devenu La Civilisation de 1975 dans l’édition de 1953, puis La Civilisation de 1995 dans celle de 1974 et enfin La Civilisation de 2001 en 1982 (« 11e édition »).
22 Cazes op. cit., 3e partie, « L’aide à la décision », p. 365 et sq., d’autant plus intéressant que l’auteur fut chargé des études à long terme au Commissariat au Plan. À noter que l’ouvrage a initialement paru dans la collection des éd. Seghers Les visages de l’avenir. Prospective sociale.
23 Le changement peut aussi atteindre un seuil à partir duquel il entraîne des modifications profondes de la société qui posent par exemple la question de leur reconnaissance par la législation. Certains auteurs, depuis Hésiode jusqu’à nos jours en passant en particulier par Karl Marx, ont inféré que l’humanité entière passerait par une série d’étapes où l’Occident la précéderait, dont chacune serait jugée supérieure à la précédente. Cette direction, historiquement bien balisée déjà au temps où l’on s’interrogeait sur le « sens de l’histoire », n’a pas été explorée ici
24 C’est l’occasion de signaler une étude pionnière et peu connue de Bernard Cousin, publiée en collaboration avec Geneviève Richier, « Statuaire, histoire et mentalités, les monuments aux Morts de la guerre 1914-1918 à Marseille et dans les Bouches-du-Rhône », Marseille, no 108, 1er trimestre 1977, p. 18-26.
25 Anne de Mondenard, Le fonds de photographies du Musée des monuments français : les épreuves révélées de la Mission héliographique, Paris, École du Louvre, 1996. Autre exemple de ces premières campagnes dans Atget : une rétrospective, Paris, Bibliothèque nationale de France et Hazan, 2007.
26 Régis Debray, Vie et mort de l’image. Une histoire du regard en Occident, Paris, Gallimard, 1992 et rééd.
27 Nous tenons à remercier Frédérique Bertrand pour son aide graphique, Anne Carol pour la relecture de cette introduction et ses suggestions, Christine Dotto pour sa patiente et efficace mise au point de cet ouvrage.
28 Georges Duby, L’Histoire continue, Paris, Odile Jacob, 1991.
Auteurs
Aix Marseille Université, UMR Telemme - CNRS
Aix Marseille Université, UMR Telemme - CNRS
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