Le clerc dans la nouvelle allemande du Moyen Age
p. 529-537
Texte intégral
1Au Moyen Age l’église catholique romaine, avec ses ministres, représentait en Allemagne non seulement la puissance intellectuelle et spirituelle prépondérante, mais aussi la puissance matérielle supérieure, puisque l’église était le plus grand propriétaire terrien.
2Les membres du clergé possédaient en outre un statut privilégié. Ils ne ressortissaient pas à la juridiction temporelle (immunité) et étaient libérés des impôts perçus par le roi et les seigneurs féodaux. Des penseurs écclésiastiques comme Adalbert de Laon (xie siècle) s’efforçaient de conférer au clergé la position de classe sociale supérieure et de le mettre au-dessus de la noblesse, de la bourgeoisie et des paysans.
3Le clergé justifiait ces privilèges par son rôle de médiateur entre Dieu et les hommes, cependant que ce rôle les mettait dans l’obligation de mener une vie exemplaire, confirmant qu’ils étaient les successeurs des apôtres. Ils étaient astreints à la chasteté (célibat du prêtre), à la pauvreté, à la modération dans la nourriture et la consommation des boissons alcoolisées. Comme dans l’ensemble du clergé c’étaient le prêtre et le moine qui étaient les plus proches du laïc chrétien (principalement du paysan et du bourgeois), c’est notamment leur comportement qui était jaugé pour savoir dans quelle mesure il correspondait aux idéaux sacerdotaux et monastiques. Tous les mouvements hérétiques tiraient leur origine de l’expérience faite que l’église officielle et ses représentants enfreignaient les idéaux apostoliques.
2 Le personage du "clericus" dans la nouvelle allemande du Moyen Age
2.1 La représentation des différents groupes
4Des clercs appartenant à différents groupes entrent en scène dans quarante-et-une des deux-cent-vingt nouvelles allemandes du Moyen Age enregistrées par Hanns Fischen1. ([Au reste : ces chiffres comprennent Les variantes de motifs de nouvelles déterminés).
5Dans la majorité des pièces - en tout dix-huit - c’est le curé, spécialement le curé de campagne, nommé "pfaffe", qui apparaît. Dans six cas, c’est le moine. Dans trots nouvelles, l’auteur ne précise pas, dans trois autres ce sont des ordres particuliers qui sont nommés : bénédictin (une fois), dominicain (deux fois), franciscain (une fois) et augustinien (une fois). Dans deux nouvelles, ce sont des nonnes, dans deux autres des chanoines (donc des représentants du haut clergé). Avec le curé ce n’est que l’étudiant ou l’écolier qui peut rivaliser quant à la fréquence de leurs apparitions. Il entre en scène comme acteur principal dans treize nouvelles (y compris les variantes).
6On reconnaît là que l’intérêt principal des auteurs de nouvelles se concentre sur les groupes du clergé les plus proches du peuple, ceux dont la vie et les faits et gestes peuvent être le mieux observés dans la vie quotidienne : en premier lieu le curé, qui est à la tête d’une paroisse ; ensuite viennent l’écolier itinérant ou le clerc qui a fait des études. Il était sans aucun doute un personnage favori des auteurs de nouvelles. J’en donnerai plus loin les raisons.
2.2 Motifs et constellations de personnages
7Le motif central est l’adultère, cependant que les rôles des personnages sont clairement définis : épouse - hom!me adultère - mari trompé ou cocu. J’ai déjà parlé ailleurs de ce motif2 et je me limiterai ici - dans le cadre de ce colloque - aux cas où l’homme adultère est un clerc. Dans en tout vingt-six nouvelles de ce type de structure tous les groupes de clercs - à l’exception des nonnes - apparaissent comme hommes adultères, surtout le prêtre, mais aussi le moine, le chanoine et l’étudiant.
8Dans deux nouvelles on attribue aux nonnes une grande lubricité, et ce de façon fort crue. La luxure concerne -en dehors du motif de l’adultère - également le moine (dans un cas). On trouve en outre le motif de la mort d’amour (dans le récit d’un amour se terminant par la mort en tre un étudiant et une jeune fille) et le motif du curé injuste, cupide et vindicatif, dont les machinations cependant échouent dans le conflit avec le paysan intellectuellement supérieur.
9Je présente un peu plus en détail ces groupes de nouvelles qui pour ce qui est des motifs se trouvent en dehors du motif de l’adultère. J’empreinte le titre des nouvelles à mon recueil de nouvelles, "Altdeutsches Decamerone" (dans la mesure où les pièces traitées s’y trouvent).3 Les oeuvres considérées se trouvent également dans trois recueils de nouvelles empruntées à l’Altdeutsches Decamerone.4
10Les nouvelles Das Nonnenturnier (Le tournoi des nonnes) et Die Nonne im Bade (La nonne au bain) traitent de la lubricité des nonnes. Dans le Tournoi des nonnes le membre viril d’un chevalier qui, coupé, naît à une vie autonome, se trouve dans un couvent de religieuses, dans lequel éclate une violente dispute pour savoir quelle nonne aura la permission de prendre dans sa cellule l’objet si convoité. L’abbesse veut trancher le litige au moyen d’un tournoi, cependant à la fin le trophée si demandé disparaît. -Un auteur peu con nu du nom de Peter Schmieher a composé une nouvelle qui a pour titre La nonne au bain. Une nonne est incitée par les récits d’une jeune femme à se faire également "frotter" (c’est-à-dire au double sens de plaisir sexuel que de massage). Quand elle demande un tel massage à un moine, ils en viennent au jeu amoureux, que par la suite même l’abbesse ne laisse pas échapper.
11Ce n’est pas les nonnes qui sont accusées de lubricité, mais aussi les moines, ainsi dans la nouvelle Der Teufel im Kloster (Le diable au couvent) de Hans Rosenplüt. Un moine lubrique invite dans sa cellule une belle consentante, qui contre paiement accède à sa volonté. La fin est macabre : la belle, épuisée par le jeu amoureux veut se rafraîchir avec une essence, mais, par mégarde. elle prend un encrier et se noircit le visage si bien que le moine, qui rentre dans sa cellule après les matines, la prend pour le diable.
12La nouvelle Der Schüler von Paris (L’écolier de Paris), connu en trois versions, raconte l’amour passionné d’un étudiant pour une jeune fille. Dans une nuit d’amour le jeune homme meurt d’hémorragie, car il avait été saigné auparavant. La jeune fille meurt de douleur près de la bière du bien-aimé. (Dans deux versions c’est cependant un noble ou un jeune homme sans plus de précision qui prend la place de l’étudiant).
13Dans la nouvelle Die umgangene Buβe (La pénitence éludée) un paysan avoue au curé du village, qu’il a couché avec sa mère, sa soeur et sa gouvernante. Vindicatif le curé lui donne pour pénitence de se livrer aux jeux amoureux avec un hérisson. Le paysan dupe le curé en couchant avec la femme du juge du village qui a nom Igel (hérisson).
14Hans Kaufringer raconte dans sa nouvelle Der verklagte Bauer (Le paysan accusé) qu avec le juge du village un curé de village persécute un paysan, car celui-ci ne veut pas payer davantage que les impôts officiellement fixés. Devant le tribunal épiscopal le paysan démasque ses deux persécuteurs, en révélant que le curé commet l’adultère avec la femme du juge du village.
15Nous nous tournons par là vers le plus riche groupe de nouvelles : les nouvelles d’adultère.
16Disons d’abord qu’à cet égard les clercs ne sont pas très difficiles. Ils s’adonnent au jeu amoureux aussi bien avec la paysanne qu’avec la femme du bourgeois ou avec l’aristocrate. Ce ne serait pas ennuyeux, mais trop long de présenter les différentes formes que prend ce motif. Il me semble plus important d’examiner les traits de caractère du clerc adultère décrits dans ce contexte.
2.3 Description du clerc adultère
17Le trait dominant est évidemment qu’ils sont tous lubriques et partiellement d’une virilité impressionante. Ainsi cet étudiant de Prague (Der Student von Prag, une nouvelle de peter Schmieher) qui se gagne les faveurs d’une belle bourgeoise de Prague en lui promettant de la satisfaire pleinement huit fois dans la même nuit - un record que l’on peut difficilement égaler.
18A côté de la lubricité, c’est la bêtise qu’on reproche aux moines. C’est ainsi que dans la nouvelle Der Herrgottschnitzer (Le sculpteur du bon Dieu) la femme d’un peintre se défend des assiduités d’un moine bénédictin en lui tendant un piège. Elle lui promet une aventure amoureuse, mais elle est surprise comme convenu par son mari et elle incite le moine a se placer tout nu et barbouillé de peinture sur une croix pour imiter la sculpture du Christ en croix. Cependant quand le mari approche un couteau des plus nobles parties du moine, celui-ci s’enfuit épouvanté et devient la risée de toute la ville.
19Dans les Drei Mönchen von Kolmar (Les trois moines de Colmar) la femme d’un bourgeois de cette ville se défend contre trois moines à la fois, un dominicain, un franciscain et un augustinien, en les attirant (d’une façon analogue à la femme du peintre) dans un piège mortel.
20La bêtise peut être remplacée, avant tout chez de jeunes moines, étrangers au siècle, par une naïveté qui a un effet comique. Donnons pour exemples les nouvelles Das Gänschen (La petite oie) et Der schwangere Mönch (Le moine enceint). Quand un jeune moine, qui se rend avec son abbé pour la première fois dans un village, aperçoit une jeune paysanne, l’abbé lui déclare que cette créature est une "petite oie’. La jeune fille tombe amoureuse du jeune homme, se glisse la nuit dans son lit et le séduit. L’histoire devient notoire quand le jeune moine à l’approche de la fête de Noël souhaite que l’abbé procure à tous les moines des "oies". - Dans Le Moine enceint un jeune moine naïf, après sa première expérience amoureuse (qui s’est terminée de façon macabre, en effet il est roué de coup par la fille de joie déçue par lui), se croit enceint, provoque un avortement" (qui consiste également en une volée de coups") et prend un lièvre qui, effrayé, s’échappe d’un sillon, pour son enfant qui s’est enfui. Ses autoaccusations lui rapportent pour la troisième fois une épouvantable raclée.
21A la différence du moine le curé paraît plusieurs fois plutôt malin, car il peut se sortir avec ruse d’une situation dangereuse (pris en flagrant délit par le mari trompé). Ainsi dans le Vertauschter Müller (Le meunier échangé), dans la nouvelle Des Winzers Frau (La femme du vigneron) ou dans Des Pfaffen Schnur (La ficelle du curé) ; dans une variante de cette dernière nouvelle le rôle de l’homme adultère qui réussit à s’échapper est tenu par un chevalier).
22Ce sont avant tout les studiosi qui se révèlent astucieux et à la hauteur de toutes les situations. Ils en font certes la preuve moins dans le rôle de l’homme adultère pris sur le fait que dans celui du séducteur rusé et couronné de succès, ainsi dans la nouvelle Tumult im Bürgerhaus (Tumulte dans la maison du bourgeois), dans laquelle deux étudiants séduisent aussi bien l’épouse que la fille d’un bourgeois. - Ils savent se venger avec astuce d’avoir été éconduit ou berné, ainsi dans la nouvelle du Fahrender Schüler (L’écolier itinérant) ou des Drei Studenten (Les trois étudiants). L’écolier itinérant est éconduit par une paysanne à laquelle il demande l’hospitalité. Ensuite il observe d’une cachette comment la paysanne reçoit le curé pour des jeux amoureux et cache au retour du mari les mets et boissons qu elle avait préparés. Quand le paysan fait entrer l’étudiant, il joue dabord l’exorciste, par magie il fait sortir les mets et les boissons de leur cachette et incite le curé qui tremble dans sa cache à jouer le diable. En échange, il lui promet de ne pas le trahir.
23En passant : on voit que les auteurs mettent volontiers les curés et les moines dans des situations comiques, qui prêtent à rire. Cela est montré de façon fort saisissante dans la nouvelle Der Pfaffe im Käsekorb (Le curé dans le panier à fromages). Ici le curé surpris doit sur le conseil de la paysanne se réfugier tout nu dans un panier à fromages suspendu au plafond. Son membre qui pend dehors par un trou du panier le trahit presque, cependant la paysanne l’informe de cette situation dangereuse par un chant choral improvise - aux connotations pornographiques.
24La punition du couple adultère prête à rire, mais consiste souvent à porter atteinte au corps et aux biens.
2.4 Les différentes sortes de châtiment du clerc adultère
25Tout d’abord le clerc adultère pris sur le fait est ridiculisé et discrédité, ainsi le moine, dans le Sculpteur du bon Dieu, ou encore le curé dans La femme du vigneron : le curév qui s’est caché dans une nasse suspendue dans la hotte d’une cheminée est tout d’abord rôti par la chaleur, puis conduit nu sur une voiture jusqu’à la cour du château et accablé de sarcasmes. Mais cela est accompagné de la perte douloureuse de tous ses biens et de l’obligation de quitter le lieu de ses infamies pour fuir à l’étranger.
26Mais ce n’est pas tout : l’adultère, qui selon la législation médiévale donnait au mari trompé le droit de tuer l’homme et l’épouse adultères, est dans les nouvelles alles aussi puni ici et là de façon douloureuse. Dans Der Liebeszehnte (La dîme de l’amour) le curé doit boire l’urine de la bien-aimée que le paysan cocu sert dans un petit tonneau lors d’un festin au curé adultère avec la remqrque qu’il s’agit là d’un vin excellent.
27Le châtelain cocu traite moins bien le curé qu’il a capturé avec l’épouse adultère dans une Wolfgrube (La fosse aux loups). II inflige la peine, apparemment en vogue, de la castration et suspend au-dessus du lit conjugal un des testicules comme avertissement permanent.
28La même chose arrive au curé adultère dan s l’histoire de Kaufringer Die Rache des Ehemannes (La vengeance du mari), mais en plus, sous la menace de mort, il doit couper de ses dents la langue de la bien-aimée.
29Ce n’est pas seulement le mari qui se venge, mais également l’amoureux éconduit, ainsi dans la nouvelle du Hasengeier (Le vautour aux lièvres). Pour se venger un aristocrate éconduit envoie à la dame noble (qui lui a préféré un riche curé) un oiseau de proie, qui soi-disant prédit l’avenir. Le messager ajoute qu’on ne doit pas uriner sur l’oiseau, car il mourrait. Naturellement la femme et le cure veulent tuer immédiatement l’oiseau de cette manière, mais tous deux sont cruellement blessés aux organes génitaux si bien que le curé ne peut désormais plus faire l’amour.
3 Réflexions sur le sens et la fonction du motif
30Nous pouvons tout d’abord constater de façon globale que l’image du clerc dans les nouvelles allemandes du Moyen Age est généralement noircie, à part l’étudiant ou le greffier. Apparemment le public de ce genre littéraire (qu’on doit chercher aussi bien dans la noblesse que dans la bourgeoisie cultivée des villes) riait volontiers des représentants du clergé. On a interprété de façon différence la raison pour laquelle les auteurs de nouvelles ont tourné justement cette catégorie sociale en ridicule. Récemment on s’est distancé d’une contradiction qui existe entre un clergé digne de critique et un public laïc qui exerce la critique : cette contradiction qui dévalue l’état ecclésiastique a paru trop simpliste. K.H. Schirmer propose à la place une explication fondée esthétiquement : comme la nouvelle facétieuse a pour but d’obtenir un effet comique le plus fort possible, les auteurs se seraient tournés vers cette catégorie sociale qui, de par leur fonction, est astreinte par l’obligation du célibat à la chasteté : Quelle autre catégorie sociale [...] serait plus appropriée à provoquer le rire dans le rôle d’un amant (qui le plus souvent connaît l’échec) ?"5. Cette argumentation est peu convaincante a un double point de vue. Tout d’abord le prêtre ne se présente pas toujours comme un amoureux qui connaît l’échec, parfois il connaît le succès. Il est la cible du désir féminin chez des femmes de toutes les couches sociales et satisfait ces désirs apparemment avec bien plus de succès que ses adversaires laïcs. D’autre part on ne doit pas envisager seulement la situation comique, bien davantage la punition très dure du clerc adultère et les traits négatifs constatés dans son caractère. Il n’y va donc pas simplement d’un calcul esthétique, mais en même temps également d’une critique sévère.
31K.H. Schirmer trouve bien vite une autre explication pour ce phénomène. Il s’agit là de tensions entre le clergé séculier et le clergé régulier. Le clerc cultivé voulait, affirme le critique, se démarquer par rapport au moine raillé pour sa bêtises.6 Il s’agit somme toute pour ce genre de nouvelles de démêlés internes au clergé, spécialement d’un enseignement qui passe au crible de la critique : la raillerie se dirige justement contre ces représentants du clergé qui, par leur conduite, ’se révèlent indigne de cette charge"7, qui sortent donc de leur ordo.
32De telles motivations pour la composition de nouvelles pourraient être possibles dans certains cas, mais dans sa totalité l’argumentation échoue devant la question, qui reste ouverte, de savoir) a quel état social appartenaient les auteurs (H. Fischer en compte incidemment environ quarante). Ils sont pour la plupart inconnus, et même lorsque l’auteur nomme son nom, une identification sociale est fréquemment impossible. Où range-t-on des auteurs qui se nomment der Freudeleere (Celui qui ne connaît pas la joie) ou Dietrich von Glezze ou encore Niemand (Personne). Là où nous sommes un peu mieux renseignés sur la personna des auteurs, il s’agit dans la plupart des cas d’auteurs urbains (Konrad von Wùrzburg, Heinrich von Kaufringer, Hans Folz, Hans Rosenplüt). Pour un auteur de nouvelles aussi fécond qu’est le Stricker, il n’est certes pas exclu qu’il ait appartenu à l’état ecclésiastique. Il est en tout cas grotesque d’admettre que l’etat ecclésiastique ait loué les services d’auteurs de nouvelles pour corriger des représentants de cet état qui ont mal tourné.
33Et même si P. Nykrog a déjà attiré l’attention sur un parallélisme clairement reconnaissable avec la représentation dévaluante des fabliaux français (qui est généralement encore plus grossière),8 la tentative d’explication par une pure reprise des motifs serait cependant trop simplette.9
34Bref, les efforts qui sont faits partout dans la critique récente pour sauver l’honneur de l’état ecclésiastique, sont creux dans leur argumentation et font un effet zélateur, indigent, voire ridicule. Je pense qu’il est plus vraisemblable que s’articule ici une critique laïque crue du comportement prétentieux superficiel du clergé, qui était bien éloigné de la manière de vivre des ecclésiastiques dans la réalité. Il est possible qu’une jalousie venimeuse suscitée par l’existence assurée, aisée des ecclésiastiques, qui nagent dans les délices de la vie, ait joué un rôle.
35Cela n’est certes pas valable pour le greffier et pour l’étudiant, qui est - comme il a déjà été dit - un des personnages favoris des nouvelles allemandes du Moyen Age.10 Il apparaît généralement comme un séducteur constamment couronné de succès en raison de son intelligence, et les femmes leur offrent volontiers leurs faveurs. Dans quelle mesure on doit trouver dans cette manière de dessiner les personnages une autoreprésentation satisfaite de soi d’étudiants, auteurs de nouvelles, est très certainement une réflexion à prendre au sérieux.
36Pourtant, même si la représentation du clericus est dans la majorité des cas connotée négativement, je ne trouve pas cela intéressant en tant que critique repréhensible - et de nature grossière - exercée contre le clergé, mais parce que les ecclésiastiques sont rangés parmi les hommes tout à fait normaux, qui, hommes de chair et de sang, ne sont pas exempts de tentations sexuelles et ne se laissent pas brider dans ces pulsions très humaines par la contrainte du célibat. Cela fait du bien et chasse l’odeur de l’encens.
Notes de bas de page
1 H. Fischer, Studien zur deutschen Märendichtung. 27me édition, Tübingen 1983, pp. 65-71.
2 W.Spiewok, "Der betrogene Ehemann in der altdeutschen Novellistik". In Der Hahnrei im Mittelalter I Le cocu au Moyen Age. Greifswald, Reineke Verlag, 1994 (WODAN 43), pp. 101-107.
3 Altdeutsches Decamerone. Publié et traduit par W. Spiewok. 1ère édition. Berlin 1982.
4 Deutsche Novellen des Mittelalters. I. Der Hahnrei. Traduit et publié par W.S. Greifswald 1994. - Deutsche Novellen des Mittelalters. II. Sexuelle Derbheiten. Traduit et publié par W.S. Greifswald 1994. Novellen des Mittelalters. III. Von Frauentreue und wahrer Liebe. Traduit et publié par W.S. Greifswald 1994.
5 Karl-Heinz Schirmer, Stil- und Motivuntersuchungen zur mittelhochdeutschen Novelle. Tübingen 1969, p. 308 : "Welcher andere Stand [...] wäre also geeigneter, in der Rolle eines (meist scheiternden) Liebhabers Lachen zu erregen ?"
6 K.H. Schirmer, op. cit., p. 309.
7 K.H. Schirmer, op. cit., p. 308 : "als dieses Amtes unwürdig erweisen".
8 Per Nykrog, Les Fabliaux. Etude d’histoire et de stylistique médiévale. Copenhague 1957.
9 K.H. Schirmer, op. cit., p. 310
10 K.H. Schirmer, op. cit., p. 310.
Auteur
Université de Greifswald
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