La trahison du clerc en Italie au xive siècle
p. 319-344
Texte intégral
1Le clerc italien, tel que nous nous proposons de la ressusciter à travers une série de témoignages, en latin comme en volgare, en prose connue en poésie, est-il redevable d’un éloge semblable à celui qu’en l’ait, en France, au xiie siècle, un Bernard Sicart de Marvejols1 dans l’unique poème conserve de lui, un sirventès (Ah gréu cossire / fau sirventès cozen -plein d’une angoisse cruelle, je fais un sirventès cuisant"), un "élève" du reste, et clerc-là présenté dans son humble et pauvre vêture ? Ou encore - et toujours dans la perspective de la louange, de celle qu’en tresse un Abélard en l’opposant à une décadence constatée par ailleurs, à son époque déjà2 en référence aux moines dont ce dialecticien "parisien" vante d’abord -outre la science et la sagesse - la sobriété et la continence ?
2Ou bien, à l’oppose, le clerc répond-il à une image fort dépréciative, chargée de tous les péchés, vices ou tares dont semblent l’affubler de façon univoque et permanente un certain nombre d’auteurs, et dont s’accuse d’ailleurs ce même Abélard au double visage de philosophe et de théologien (science profane v/s science religieuse), tenté par le double péché majeur de la luxure et de l’orgueil ?
3C’est une question à laquelle nous tenterons de répondre en nous limitant au siècle de crise de la Chrétienté italienne d’abord, c’est-à-dire au xive siècle.
*
4L’on sait que les deux sens, religieux à proprement parler, et culturel de "lettré" sont englobés dans le mot désignant le "clerc" (chierico en italien). Dante par exemple les emploie l’un et l’autre - nous y reviendrons -dans son Enfer.
5Ce mot de "clerc" - chierico dans ses connotations diverses et dans sa portée diversifiée (sociologique, éthologique, polémique entre autres) a une place toute particulière dans un pays comme l’Italie où le rôle direct de la Papauté au sein du vaste débat qui oppose pouvoir temporel et pouvoir spirituel et, d’autre part, celui joué par les grandes universités pionnières médiévales (au premier rang desquelles, Bologne, l’alma mater) ne sont plus à démontrer.
6Par ailleurs, la fonction éminente jouée par les ordres religieux tels celui des Franciscains, hommes de terrain et de la parole transmise plus que "des textes", et qui s’oppose des le début du xiiie siècle à l’ordre "intellectuel" des Dominicains, et surtout l’influence majeure de trois grands poètes et prosateurs, Dante, Pétrarque et Boccace induisent à penser au seuil de cet exposé que le clerc sera la ou du moins l’une des visées-clés des poètes et des prosateurs, laïcs et religieux, et parmi ceux-ci, les conventuels ou cénobites niais aussi les prédicateurs.
7En nous attachant plus particulièrement aux trois figures majeures de la vie culturelle du xive siècle plus haut citées, chacune avec sa spécificité ; marchande pour le dernier, mi-laïque mi religieuse avec le second, de poète chrétien pour le premier dans l’optique de son "poème sacré" aux trois royaumes, il sera bon méthodologiquement de distinguer parmi ces référents si la mention de "clerc" concerne tel ou tel personnage avec sa signification relative à ses paroles, ses actes, son comportement social et/ou individuel ; ou au contraire si les clercs font partie intégrante de catégories narratives tels que jeu métaphorique, énoncé proverbial, voire simple qualification purement adjectivée.
*
8Le premier constat - très général et trop hâtif peut-être pour ne pas nous faire nous interroger - est la mauvaise presse dont paraît souffrir sans réserves moins la condition que la réputation du clerc, en veillant à bien définir ou à cerner avec précision le type de "clerc" auquel nous avons affaire.
9A ce constat, on peut peut-être déjà donner un élément très partiel certes de réponse en nous demandant s’il n’y a pas eu contamination sémantique et idéologique entre la tradition satirique et la polémique anticléricale qui atteint de plein fouet le prêtre pourtant souvent analphabète en face du chierico, et qui fait que le premier plus "populaire" (i.e. plus proche de la masse elle-même ignorante des Fidèles) jouit - en poésie par exemple - ... d’une triste réputation.
10Celle-ci se traduit par exemple par la flèche qui traditionnellement est réservé aux clercs, de surcroît sous forme épigrammatique ou proverbiale, dans le dernier tercet des sonnets, et sous forme d’envoi ... agressif : quelque chose comme la "pointe" finale des portraits d’un La Bruyère. Ainsi le sonnet de Cecco Angiolieri (LXXV, p. 387)
"chè non mi pince ‘I prestar ad usura
"a mo’ de’ preti e de’ ghiottoni frati"
("je n’aime point que l’on prête à usure)
("à la façon des prêtres et de ces frères voraces)3
11aux vers 13 et 14 (fin du second tercet par conséquent) associe, double cible qui l’ait d’une pierre deux coups, le prêtre à la mauvaise réputation des frati gaudenti ; le propre père du poète en fait partie.
12Voilà doue un exemple patent de "contamination" sémantique possible avec le "clerc" : pratique plus courante qu’on le croit de déviance ; dans le même registre, chez un "être poète toscan, siennois, Folgore da San Gimignano, l’un des sonnets "sur les mois" consacré au mois de mars4 concentre sur la totalité de son dernier tercet un portrait-éclair mais un portrait-charge non plus afférent à la fâcheuse manie du prêt à usure mais à la pratique pernicieuse du mensonge devenu monnaie courante dans la bouche de ces prélats :
"lassate predicar i preti pazzi
"c’hanno troppe bugie e poco vero.
("laissez prêcher les prêtres fous
("qui ont (dans la bouche) trop de mensonges et peu de vérité)
13Une sorte de commun dénominateur - si contamination il y a - vise à confondre chez tous ces poètes satiriques les prêtres, et les clercs : le recours systématique au plut ici catégoriel et généralisateur est hautement significatif d’une telle attitude encline à l’amalgame indû.
14Avec chierico à proprement parler, un constat s’impose : la relative discrétion de l’émergence du personnage avec sa véritable identité de "clerc" ; et là, d’emblée, une distinction est à opérer toute de dissymétrie : plus anonyme est la figure souvent dégradée et dégradante du "religieux" par rapport au personnage "laïc" détenteur d’un savoir. Tout se passe comme si le personnage tonsuré qui se prépare au sacerdoce, et a déjà endossé - selon la définition la plus largement admise - l’habit (la robe) du clercé régulier et du clergé séculier, était relativement plus occulté que l’autre "clerc" : c’est-à-dire l’homme de lettres ou "de sciences" symbole d’une instruction qu’il a eu le privilège de recevoir avant d’avoir l’autre privilège, celui de "la" transmettre, et dont le langage a retenu le pouvoir illuminant de pédagogue (ex. = "il est grand clerc en la matière").
15Encore convient-il de procéder à présent à une distinction au second degré relative au genre satirique chargé de mettre en évidence les traces d’un tel personnage "double" : ce "clerc" se rencontre surtout, à vrai dire, chez les nouvellistes ou chez les poètes appartenant eux-mêmes par "vocation" au style giocoso, baptisé encore comico-realistico qui appartient à des poètes d’origine populaire et même souvent de basse extraction. Mais dans ces deux domaines-là, le "clerc" de l’une et de l’autre natures est infiniment moins présent que le marchand ou le représentant des professions libérales aux multiples facettes (le juge, le notaire, le médecin) que prend par exemple pour cible l’un de ces poètes (Pieraccio Tedaldi), mais à part, en son sonnet XXXI ("O avvocati e giudici e notai...")5.
16Deux domaines plus particulièrement font intervenir fréquemment le clerc dans leur discours respectif : les nouvellistes d’abord ; les prédicateurs ensuite.
17Les nouvellistes du xive siècle dans le droit fil de leurs prédécesseurs du siècle précèdent et selon une tradition bien établie et des codes vivaces qui seront encore repérables au sein de leurs successeurs au xve siècle et même au xvie, quoique moins fréquemment, ces nouvellistes mettent en scène d’assez nombreux "clercs" baptisés il est vrai de diverses façons.
18Deuxième filon abondamment fourni également en clercs de toutes sortes, on pouvait s’y attendre, le domaine de la prédication : le "clerc", là aussi, paraît dans la bouche et sous la plume cette fois de religieux puisque les textes certes assez souvent arrangés par d’autres transcripteurs que leurs auteurs-orateurs nous sont parvenus. L’intérêt de ce filon-ci réside en premier lieu dans la diversité d’appartenance de ces orateurs-moralistes itinérants, dans les campagnes aussi bien que dans les cités, et qui n’appartiennent point exclusivement à l’ordre des Frères Prêcheurs.
19A priori - et ils vont l’être en fait - les deux fonctions du clerc seront représentées. Cependant avec ces deux domaines pour nous d’abord narratifs et textuels, nous nous devons au préalable d’apporter les précisions méthodologiques suivantes.
*
20Pour les premiers nommés (les nouvellistes, ici toscans), le genre mixte que représente au xive siècle notamment, la nouvelle entre réalité et fiction doit nous inciter à une légitime prudence quant à la caution apportée. L’unanimité du jugement porté sur ces "clercs" mis en scène, à quelques nuances près, offre en effet au lecteur d’aujourd’hui une convergence remarquable dans la typologie des comportements principalement. Tous ces clercs, leurs clercs ne brillent pus spécialement par leurs qualités foncières Ne dussions-nous ne nous en tenir qu’au seul "témoignage" des nouvellistes du xive siècle, même compte tenu du coefficient de "fiction", nom n’aurions qu’une fort piètre idée du rôle effectif joué par ce "clerc" dans la société et dans la culture de son temps, sous l’un comme sous l’autre aspect.
21Pour les seconds (les prédicateurs), force est de rappeler au risque d’être banals, la finalité nécessairement édifiante du prêche auprès de lu masse ignorante des Fidèles (des campagnes surtout), et la nature obligatoirement caricaturale pédagogiquement parlant de leur discours à base de préceptes et d’autant d’interdits. Là aussi, et pour d’autres raisons que précédemment, nous nous trouvons en présence de "témoignages" à relativiser tout de même.
22Ces rappels étant posés, il n’en reste pas moins qu’il n’y a pas de fumée sans feu ; pareil constant opprobre jeté sur une profession qui est aussi une vocation pose une série de questions et nous fait nous interroger à son sujet. Pourquoi un tel personnage suscite-t-il un tel concert de récriminations ?
23C’est ce que nous allons à présent illustrer par différents exemples et tenter d’expliquer.
*
24Comment apparaît le clerc, chez, les nouvellistes d’abord ?
25Une réponse immédiate autant que brutale pourrait être : comme une cible privilégiée tant il prête le flanc à l’évidence à un certain nombre de travers que des accusations (sont-ils des procès d’intentions ?) définissent en fait de termes beaucoup plus violents, d’un ton véhément : "péchés", "tares", "vices" par exemple pour nous en tenir qu’aux plus ressassés. Le clerc s’attire couramment les foudres de censeurs venus de différents horizons sociologiques et culturels. Ceci ne voulant nullement signifier qu’il n’y avait pas aussi de "bons", d’"honnêtes" et de fort respectables clercs à la même époque. Mais reconnaissons que de telles exceptions brillent en fait par leur absence sous la plume des récits des nouvellistes.
26A porter au crédit de ce type de discours, le fait que le plus généralement le nouvelliste du xive siècle pratique un décalque assez fidèle de la réalité citadine du temps en faisant intervenir des personnages connus dans leur milieu topographiquement identifiable qui est aussi souvent celui de l’auteur : personnages familiers des arts, des lettres, de la politique, mais aussi des "arts libéraux" et de diverses professions. Parmi eux, bien sûr, on compte des "clercs".
27Ce label incontestable dans ces récits-là peut donc avantageusement corriger les réserves que nous avions été amener à formuler au préalable. Des clercs par conséquent interviennent également, parfaitement identifiables ne serait-ce que par leur savoir (ou leur savoir-faire ... plus criticable) aux yeux de leurs concitoyens : le récit est alors redevable, partiellement et furtivement certes, de la chronique à tout instant vérifiable, y compris de la rumeur publique en vogue en ce temps-là.
28La figure du clerc, sous l’appellation de scolaio et liée à l’appât du gain, apparaît déjà à la fin du xiiie siècle dans la nouvelle LVI du Novellino6 : sans ambiguité aucune quant à la fonction de ce personnage, celui-ci, un "escholier" des Marches (nous avertit le titre du récit) s’en vient étudier dans la célèbre université de Bologne.
29Or, coïncidence curieuse, une condamnation de même nature se lit sous la plume du tertiaire franciscain Iacopone da Todi, à cette même époque (fin xiiie siècle) qui, dans sa laude LXXXIV7 va jusqu’à disqualifier les deux plus grandes institutions universitaires de l’Europe d’alors : l’université de Paris (v. 3) et, en Italie, la célèbre Alma mater bolonaise "visée" aussi par le nouvelliste du Novellino. A ce sujet, à "leur" sujet, Iacopone ne se fait pas faute de rappeler que le savoir ne signifie rien d’autre pour lui qu’être fou d’amour pour le Christ ; et que des termes tels que scola, ou dottrina ou encore nova ... maestria n’ont plus de sens qu’à travers Dieu. Il n’est point de pourfendeur plus opiniâtre que Iacopone da Todi en matière de "fausse science" (Laude LXXX1, v. 18-21) si éloignée de la vraie humilité habitant le coeur du croyant, en fait aussi de "faux docteurs" (Laude LUI) et de "faux religieux" (Laude XXX)8. Au bout du compte, c’est même aux yeux du frère ombrien l’ensemble du Clergé qui a fait faillite à sa mission en choisissant des voies détournées du Salut :
"La universitate elencata
"c’encorsata e pres ‘ha mala via. (3e str., v. 22)
30Voilà donc une éclatante confirmation du point de vue profane (celui des nouvellistes, du Novellino du moins) que s’en vient corroborer le point de vue d’un religieux, appartenant certes à un ordre particulièrement sourcilleux au regard de la rectitude et des visées transrendantales.
31Deux nouvellistes encore complèteront l’illustration de la façon de voir (et de juger) le clerc au xive siècle, avec d’une part Franco Sacchetti, un Florentin qui disparaît en 1400, auteur du vaste corpus du Trecentonovelle .... ne sont pas trois cents (!) ; et, d’autre part, et autre toscan ; Giovanni Gherardi da Prato dont l’existence est à cheval entre le xive siècle (il est né en 1367) et le xve siècle (il meurt en 1442).
32Avec le premier nommé, dans la nouvelle (TI9, c’est le côté franchement escroc qui est incarné par un cherico détrousseur de tombes, et au caractère particulièrement imbrogliali ;, en revanche, ailleurs, tant dans la nouvelle CXXXVII que dans la nouvelle du début du recueil (la trente-cinquième)10, Sacchetti est tout à fait disposé à traiter del’éloge de la vraie science ; celle-ci pour lui n’est qu’instinctive, celle des femmes florentines qui "sans étudier et apprendre le droit" se servent de leur seul flair pour mettre en échec le savoir accumulé par le juge Amerigo degli Amerighi de Pesaro qui se targue bien inutilement de son poids de science et qui est qualifié ironiquement par Sacchetti de "particulièrement expert dans sa science ("valentissimo della sua scienza"). Ailleurs, dans la nouvelle XXXV11, Franco Sacchetti nous trace le portrait-charge d’un chericone (affublé d’un augmentatif péjoratif), une vraie satire de benêt patenté doublé d’un authentique analphabète ("sanza saper grammatica ... appena sapeva leggere"), donc usurpateur d’une prétendue science qui ne tient qu’à un fil. Alors que le même Franco Sacchetti sait fort bien faire la différence avec le vrai scientifico comme dans la nouvelle VIII, ce citadin qui dialogue avec Dante de l’art de tomber amoureux !
33En débordant largement de notre siècle, beaucoup plus tard au xve siècle avec un Masuccio Salernitano (1415-1475) ou un Sabbadino degli Alienti (1445-1510) auteur des Porretane. on pourra assister à une franche dégradation de la figure du clerc contaminé par un climat délétère de dissipation à tous les sens de ce mot, de vie facile aux passions condamnables et "mondaines" pour tout dire : la nouvelle XVII du premier nommé12 ne décrit-elle point comment un docteur en droit fut par deux fois trompé ... à Bologne par deux joyeux drilles et filous fieffés de surcroît qui ne se révèlent être en réalité rien d’autre que des clerici vagantes ? Il est vrai que Masuccio Salernitano sait faire preuve d’un anticléricalisme bien voyant ayant particulièrement en haine les ordres mendiants.
34Quant au second (Sabbadino degli Alienti), le clerc, un rettore d’origine espagnole13 qu’il met en scène, est la victime d’un bon tour de goliards, un vol de chapons de la part d’une de ces brigate ou bandes de joyeux lurons doublés de solides canailles (nouvelle XLIV). Même schéma et même punition dans la nouvelle XXXVII de la part d’un noble et riche scolaro de Faenza : crédulité et superstition sont les causes directes de la déroute qu’il subit ("la sciocchezza dello scolaro", conclut le nouvelliste).
35Bref, mais la dégradation est déjà entamée au xive siècle et ne fait que s’aggraver ensuite au xve siècle, ce chierico-là en oubliera tous ses devoirs - intellectuels, spirituels aurant que civiques et offrira bientôt l’image d’un déclassé à la société, soit perverti par un entourage d’individus fort louches et malhonnêtes, soit souvent berné par de mauvais conseillers et de périlleuses fréquentations. Mais soulignons-le encore : bien avant le xve siècle, le mal est déjà fait ; un processus de détérioration irrémédiable dans le comportement et dans la condition du clerc est plus qu’amorcé ; il est désormais en marche.
36Pour en revenir au second nouvelliste dont l’existence appartient pour une part au xive siècle et pour une autre part au xve, et qui de ce fait nous sert de transition entre les deux siècles de la Renaissance, Giovanni Gherardi da Prato, celui-ci tant dans une nouvelle du livre II que dans une nouvelle du livre III de son recueil Il Paradiso degli Alberti distingue - chose rare - le chierico du dotto ou du scolaro ; mais c’est en fait pour mieux faire le panégyrique du savoir encyclopédique. Le ton et le lexique proches du dithyrambe ne cacheraient-ils point par excès et à la différence de tous les autres nouvellistes, le souci de sauvegarder par cet étrange portrait d’un clerc somme toute idéal, une vocation et une profession par ailleurs tant décriées ? ("est la question que nous posons au vu de cet éloge rarissime du parfait clerc, et au tournant du Quattro et du Cinquecento : éloge de la science universelle, de l’érudition touchant "à tous les arts libéraux" à travers ce Marsilio médecin padouan du livre III ; en bref, ce clerc, exceptionnel parangon de toutes les vertus, nous paraît fortement apparenté à ce qu’on nomme de plus en plus un "humaniste".14
37Reste, et avant d’en venir à l’autre discours dépréciatif de la figure du clerc, celui de la prédication, à dire deux mots du cas représenté par Boccace lui aussi nouvelliste mais dont l’optique ludique et féministe quoi qu’on en ait dit, est fort caractéristique de la polémique acerbe contre les clercs qui, chez lui, prend des proportions de diatribe jamais satisfaite.
38Certes, avec Boccace on retrouve la complexité "lu problème lexical c’est-à-dire de ce que recouvre ou de ce que recoupe l’identité "lâche" du clerc (des chierici le plus souvent au pluriel) : une vraie caste selon l’auteur du Décaméron, à fustiger sans pitié.
39Dès l’ouverture du Décaméron, Boccace en bon philologue et en bon latiniste procède d’abord à l’étymologie du terme de chetici (les clercs) et de chericato (soit : la cléricature) : et à côté de ses frati qui déjà trouvent place dans le contexte funèbre et le rituel macabre de la peste où l’on doit faire vite pour ensevelir les monceaux de cadavres des pestiférés, apparaissent aussi les cherici, sorte de maudits parmi les maudits :
"Quatre ou six clergeons ouvraient la marche, brandissant un maigre luminaire qui manquait parfois complètement. Avec l’aide des croque-morts et sans prendre la peine d’un office trop long ou solennel, ils déposaient au plus tôt le cercueil dans la première tombe vacante qu’ils trouvaient.15
40C’est par conséquent la figure du clerc religieux qui "ouvre" le recueil des Cent nouvelles avant même que fleurissent abondamment les termes de frati (I,I), de monaci (I, 4), de religiosi (I, 6), d’abate (I, 7) ou encore le couplage religiosi + frati (III, 3)
41Bien vite cependant (I, 2, nouvelle du Juif Abraham), apparaissent la catégorie des clercs et avec elle le ton satirique et la verve polémique visant "la vie scélérate et sale des clercs"16 rapportée il est vrai au contexte si décrié traditionnellement au moins depuis Iacopone, de la Curie romaine. Jugement générique s’il en est qui d’entrée ou presque (nous n’en sommes qu’à la seconde nouvelle de la première journée), jette l’opprobre sur une profession -vocation, même compte-tenu de sa délimitation à l’aire papale et au "berceau" de Saint Pierre. Raison supplémentaire de la gravité d’un tel jugement.
42Cette vision boccacienne assimilable à une véritable condamnation liminaire apparemment sans appel est si ancrée chez, l’auteur du Decaméron que dans le cadre de la même journée mais à la septième nouvelle, et à un mot près l’expression péjorative revient sous la plume comme un emblème bien visible, comme une antienne obsédante : "la viziosa e lorda vita de’ cherici" ; mais, fait nouveau, la mise en exergue d’un tel jugement est maximale puisqu’elle advient dans le cadre de la captatio benevolentiae à l’adresse des "valeureuses dames", et comme symbole de méchanceté ("quasi di cattività fermo segno"). Or, cette septième nouvelle concerne l’abbé de Cluny, Primasso opposé à un certain Bergamino ; autre contexte religieux par conséquent mais déporté sur le sol "françois", et de surcroît le contexte d’ordres fondateurs, ici celui des Cisterciens.
43C’est d’ailleurs quasi systématiquement sous la forme plurielle (à l’exception du cas du scolaro qui a étudié à Paris, amoureux d’une veuve ... et qui pratique l’art de la nécromancie (VII, 7), c’est donc toujours au pluriel que les clercs sont évoqués17.
44Avec la sixième nouvelle de la première journée dont le thème anticlérical général est "la mauvaise hypocrisie des religieux", l’avarice est a pierre de touche de la critique adressée à ces clercs "précisés" dans leur vêture de Frère Mineurs : une maladie si chronique de leur comportement qu’elle en est, pour Boccace, littéralement "pestilentielle".
45La satire se fait encore plus violente à la quatrième nouvelle de la troisième journée puisqu’elle atteint l’ordre chierieato concrètement représenté par "ces saints docteurs" qui font figure de "lettrés" (letterati), satire poursuivie lors de la même journée mais à la septième nouvelle par une nouvelle définition du "frère" eu égard à son changement de moeurs, transformé en "goliard" errant incapable de faire abstinence et devenu aliéné de par l’envie qui aveuglément le guide.
46Sur l’hypocrisie foncière qui semble caractériser la gens clericorum (IV, seconde nouvelle) Boccace revient encore, où la tenue vestimentaire (houppelande ou bure ou robe) permet jeux de manches, contorsions diverses qui, associés à des simagrées vocales favorisent la propagation du mensonge sous les yeux d’une assistance à la fois médusée et abusée.
47La satire va s’amplifiant dans le chapeau explicatif de la quatrième nouvelle de la huitième journée où Boccace présente comme cible préférée une trinité composée de prêtres, de frères et... de clercs, pour s’achever lors de la dixième et ultime journée du Décaméron (nouvelle huitième). A ce stade ultime de la polémique anti-clercs, Boccace tranche définitivement la question du vrai savoir qui ne s’acquiert pas plus à l’ombre des voûtes des églises ou des cloîtres que dans les couloirs des écoles des philosophes. Une formule sans appel résume une bonne fois pour toute la pensée de Boccace :
"Ne tra’ cherici, ne tra’filosofi"
(ni au sein des clercs, ni parmi les philosophes)
48Dernière flèche brocardant l’"ordre" des clercs, celle-ci est rappelée avant de clore le recueil des Cent Nouvelles, c’est-à-dire dans sa "conclusion".18
*
49Bilan ardu-négatif pour Boccace : à travers le clerc, religieux ou laïc, c’est le procès de la faillite d’une vocation ; c’est le mauvais exemple. Autrement dit, ce n’est rien d’autre que l’échec d’un savoir (et d’une sagesse) dévoyés l’un comme l’autre, c’est-à-dire contaminés par toute une série de vices et de péchés qui ont nom pour résumer : avarice, hypocrisie, luxure, les plus voyant(e)s avec l’orgueil, ("est ce que n’omet pas de rappeler l’Anonimo genovese dans une longue composition de cent-soixante-trois quatrains : Exemplum quendam ad instruendum se de alieno casu.19
50Au fond, le péché majeur pourrait être résumable sous l’appellation d’une excessive sécularisation qu’à la fin du xiiie un poète toscan, Guittone d’Arezzo, dénonçait chez les cherici et chez les religiosi non retti (en rupture de "contrat" en quelque sorte) qu’il accuse d’être par trop séculiers ("più chc seculari") dans une lettre adressée aux abbesses et aux religieuses (lettre X).20 Quant à l’inéluctable déviance aboutissant au triomphe de l’ignorance de l’ex-clerc elle rappelle, à la même époque ou peu s’en faut, les récriminations d’un Rutebeuf contre l’ignorance des "bacheliers errants" exprimées dans la Chanson des Pouilles (n° IX) en insistant sur leur dédain trop manifeste à l’égard du savoir :
"N’ayez pas tant le siècle amé
"Ne soyez pas si non sachant".21
51Or, ces mêmes vices se retrouvent déjà un quart de siècle avant le Décaméron, chez Dante qui n’hésite pas à jeter des clercs de son choix respectivement au quatrième cercle (Inf. VII, 38) c’est-à-dire celui des avares et des prodigues, plus bas au septième cercle soit huit chants plus loin (Inf. XV, 106), celui des sodomites et de Brunetto Latini ; enfin au cercle suivant encore, le huitième (Deuxième fosse), celui des flatteurs.
*
52Dans les deux premières zones citées, c’est au pluriel que ces clercs sont nommés par Dante : tonsurés d’abord que Dante voyageur a fort bien repérées à ce signe distinctif :
"O mon maître, apprends-moi maintenant
"Qui sont ces gens, et si tous ces tonsurés
"A notre gauche fuient des clercs,
(VII, v. 37-39)
53à quoi Virgile rétorque immédiatement :
"Ceux-ci furent clercs dont le chef
"N’a plus couvert de poils, et pages et cardinaux
"En qui l’avarice fait montre de ses excès".
(ibidem. V. 46-48)
54Or, tous les critiques n’ont pas manqué de le noter dans cet épisode infernal : l’anonymat généralisé est un cas unique puisque c’est le seul cercle de l’Enfer où Dante ne reconnaît personne !
55La deuxième mention dantesque en revanche (Inf. XV), celle relative aux sodomites, définit le clerc de par sa fonction d’intellectuel, donc du rayonnement culturel qu’il peut exercer autour de sa personne :
"Sache en somme que tous furent clercs
"et grands lettrés, et de grande réputation
"et souillés sur la terre d’un même péché.
(Inf. XV, v. 106-108)
56Et ce péché a nom de "luxure". Il associe nominalement mais symptomatiquement un grammairien de l’Antiquité latine (Priscien), un juriste bolonais qui enseigna le droit à Oxford à la fin du xiiie siècle (Francesco d’Accorso) et, dernier membre du trio de clercs incriminé, un évêque florentin Andrea dei Mozzi, à l’époque de Boniface VIII.
57On le voit : les deux fonctions d’une culture profane et religieuse sont donc par Dante confondus dans le même péché et associées dans le même châtiment.
58Reste la dernière occurr1471ence, au chant XVII de l’Enfer, encore pus typique que les deux précédentes du moins incontestablement la plus terrible. Voici en quels termes Dante se heurte à ce pêcheur et clerc de Lucca (en Toscane) dont on sait peu de choses si ce n’est qu’il vivait à la fin du xiiie siècle, et identifié sous les traits d’Alessio Interminelli :
"j’en vis un dont la tête était si souillée de merdre
(vidi un col capi si’ di merda lordo
"qu’on ne pouvait savoir s’il était clerc ou laïque
(che non parea s’era laico о cherco).
(Inf. XVIII, v. 118-119)
59On l’aura constaté, on touche ici au fond de l’abjection : contexte excrémentiel, parodie de substitution du signe de reconnaissance qu’était la tonsure à l’origine, punition d’un flatteur c’est-à-dire d’un individu s’étant servi de son discours à des fins de bassesse et de vile sujétion aux volontés d’autrui. Tout le contraire de la noblesse, de la dignité et du rayonnement d’une vocation spirituelle et culturelle dont est porteur tout clerc dans la société de son temps, aux yeux de ses "frères croyants" et de ses concitoyens.
60Avec Dante, comme vingt-cinq ans plus tard environ avec Boccace, la panoplie des "tares" et des "péchés" est complète pour l’essentiel. Le négatif l’emporte de loin qui justifie chez le premier la plongée dans des cercles parmi les plus redoutés et redoutables de son Enfer, et chez le second la terrible leçon que leur influgent à leur manière, d’impitoyables redresseurs de torts.
*
61Un autre discours théâtralisé et oralisé, celui des prédicateurs itinérants, poursuit de sa critique l’activité du clerc si préjudiciable à une morale de l’honnêteté et de la dignité que doit incarner tout croyant à cette époque tout particulièrement, en dépit de la grave crise que traverse l’Italie en raison de la vacance du trône de Saint Pierre et de la pandémie qui ravage tout le pays et les cités d’abord.
62Sous ce jour-là, guère plus flatteur que les précédents (celui des nouvellistes ou de Dante), le clerc demeure la cible privilégiée des prédicateurs.
63La nouveauté n’est pas dans l’invention, loin de là, puisque plusieurs de ces récits s’inpirent de sources étrangères : Césaire de Heisterbach pour ce clerc d’Arras, ou Pierre Damien pour cet autre, ou bien encore puisant dans les écrits d’un trouvère de la cour de Philippe-Auguste, Elinard.
64La nouveauté par rapport aux nouvellistes réside dans la quasi parfaite homogénéité lexicale qui leur fait à tous adopter le ternie unique ou peu s’en faut de cherico (ou chierico avec la diphtongaison). Ce qui n’éclaire point pour autant le vrai visage de ce clerc-là puisque l’on ne distingue pas toujours nettement entre le religieux à la vocation devenue discutable et le laïc tout aussi déviant avec son penchant à s’encanailler : c’est ce "mal vivre" que dénonce un Bernardin de Sienne, Franciscain des Frères Mineurs, et qui consiste à "étudier à l’école du monde" (un monde bien tentateur et corrupteur) dans lequel - dit-il encore - l’apprentissage de la vertu, pour le jeune clerc est infiniment plus difficile que l’acquisition de la science. C’est encore ce que ce même prédicateur (tardif, dans ses prêches siennois de 1425) nomme "être hypocrite" de par la non-observance du code de par la non-observance du code et de la déontologie de sa profession. Alors que normalement l’acquisition de "la grande science" devrait aller de pair avec la poursuite d’une "vie vertueuse".22
65Par ailleurs les voyages ou les séjours prolongés du "clerc" à l’étranger à l’occasion (à Paris notamment) chez un Giordano da Pisa qui nous le montre dans ses Exempla (Esempi)23, titre de son recueil de prêches, fréquentant "lo studio di Parigi" en tant que scolare ou bien chez cet autre24 - un religieux cette fois, un novice pensionnaire de la célèbre abbaye de Saint Victor, sont caractéristiques de ces silhouettes itinérantes certes, mais finalement devenues vagantes à leur manière. Or un Bernardin de Sienne encore lui affirme qu’on peut être bon clerc sans pour autant éprouver la nécessité et épouser la mode de se rendre à Paris.25
66Par contre, à l’exception d’un seul cas dont le repêchage pour ne pas dire la conversion ou le sauvetage tient du vrai miracle nous dit le titre explicatif du prêche ("la rémission miraculeuse des péchés de l’escholier ; vertus de la contrition"), tous les clercs du discours des prédicateurs tournent plutôt ma).26. Qu’on en juge brièvement : l’un (celui du récit au titre qui en dit long "effets du pacte avec le diable") n’a d’autre fonction que celle d’administrer les biens d’un prélat avare. En qualité pour ainsi dire de receleur, celui-ci - tel serviteur tel maître - revêt ironiquement une "cape cléricale et de belle couleur"27. Un autre fournit au prédicateur l’occasion du récit édifiant d’une "punition exemplaire" (c’est son titre) pour avoir par trop mis en pratique son aptitude maladive - son incorrigible manie - au blasphème28. Un autre encore manie tout simplement si bien la dague qu’il en devient "homicide" et se voit taxer au passage de "pauvre clerc" (povero chierico) : autre récit où malgré tout s’exerce la vertu du l’achat par la contrition29. Enfin - et nous arrêterons aver lui une énumération suffisamment accablante pour le clerc pour ne point insister davantage sous la plume d’un des plus célèbres prédicateurs du xive siècle, Iacopo Passavanti dans son recueil bien connu Le miroir de vraie pénitence (Lo specchio di vera penitenza), c’est le portrait d’un scolaro c’est-à-dire d’un chierico dannato qui est savoureusement brossé et qui, comme tel, apparaît en songe à son maître ... à Paris !
67Le bilan de ce filon de la prédication est bien loin par conséquent d’être optimiste et de redorer le blason du clerc. La tendance bien au contraire est au noir le plus accusé qui soit. Malgré ce, l’on se doit néanmoins d’observer une grande prudence tant est fâcheuse la proverbiale réputation de certains de ces représentants de la morale d’Eglise que sont les prédicateurs comme nous en ont averti plusieurs auteurs de la seconde moitié du xiiie siècle tel par exemple l’Anonimo genovese déjà précédemment cité30 ... qui n’est par ailleurs point le dernier pour dénoncer les tares d’un clergé corrompu (avarice en prime !) 31.
68Même si l’on est tenté de ne point toujours accorder entièrement crédit aux paroles des prédicateurs, il n’en reste pas moins que l’image de marque du clerc est généralement fort éloignée de celle d’un personnage vertueux et recommandable.
*
69Il serait tout aussi aisé de montrer que du côté français, le clerc à pareille époque ou un peu plus tard n’est pas mieux traité : soit que le clerc déchoie jusqu’à tomber dans la grossièreté du goliard chez un Alain Chartier : "laidure et goliardise’ dans le Brévaire des Nobles (X) et que la science finisse chez lui par disparaître et/ou s’abâtardir :
"Science et vaillance se boutent
"souvent en gens de basse main,
(str. XXXVI)
70au point que des familles font de leurs enfants prêtres, des personnes "sans lecture ne science" (id. XXXVIII)32 ; soit que le caractérise une pauvreté endémique comme chez. Villon, en parlant de ces "pauvres clercs de cité" (Les Lais, XXVII, v. 5), de ces "pauvres clergeons" (Le Testament, CXXXI) ou encore de ces :
"Deux pauvres clercs parlants latin
"... humbles, bien chantant au letry".
(Les Lais, XXVIII)
71Il est vrai que les témoignages ci-dessus débordent largement du cadre (le xive siècle) que nous nous étions fixé : néanmoins, en Italie tout comme en France, il semble qu’une évolution dans le même esprit aille se précisant dans le sens d’une évaluation aggravée de la fonction, du comportement et de la condition du clerc.
*
72Nous avons gardé pour la fin le cas de Pétrarque car il était mieux placé que quiconque, mi-laïc, mi-religieux (chanoine) pour répondre à la double acception du mot de chierico et peut-être même faire fusionner dans sa seule personne de dotto, les deux aspects-clé de la figure du clerc ; lui le critique si passionné à la fois de l’enjeu entre le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel d’une Rome désertée par la Papauté devenue avignonnaise ; lui l’apôtre d’une culture de réconciliation entre une Antiquité romaine et une culture aux accents plus "moderne", et notamment le défenseur d’une fonction rénovée du poète dans la société de son temps.
73Or, dans son Canzoniere, nulle trace du mot-clé de "clerc" ; à sa place, fait propre au nouvel humanisme dont il est le pionnier en Occident - dans l’Occident chrétien -, l’activité éminente de l’homme de lettres en marge de l’institution tant ecclésiastique que laïque (satire implacable d’une certaine médecine par ex.), soucieux d’indépendance, du libre déploiement du génie poétique, cultivant à bon escient l’otium.
74A la place du mot de "clerc", et toujours de manière obsédante, à la rime, tout ce qui concrétise et symbolise cette activité du clerc : d’abord le sème verbal d’"écrire" (usité à presque tous les temps grammaticaux ou modes), en référence à un je, première forme européenne ou presque (après Saint Augustin, son "maître à penser") ; ensuite sous ses divers ingrédients : plume, parchemin, encre, lime etc ... tous nécessaires à l’accompagnement d’une tâche quotidienne, patiente, ingrate à laquelle le clerc Pétrarque voue tous le sens de son existence de chercheur, de découvreur de manuscrits, de commentateur et d’exégète ; encore et sous différentes formes ou modalités narratives ou stylistiques évoquées par les termes récurrents de "style", de "vers", de "son", de "lettres" et de "chiffres", de "paroles" et de "langue", bref tout un matériau rhétorique et linguistique au service de la forme idéale, de la page à écrire, de l’oeuvre à produire ; sans oublier la finalité d’une telle vocation qui recoupe un nouveau sacerdoce de l’écriture et que mettent en exergue, dans ce travail toujours recommancé et remis sur l’ouvrage les termes sacro-saints de "gloire", d’"art", et d’"oeuvre" entendue comme un faire provisoire.33
75Avec Pétrarque, en plein xive siècle, dans ce siècle de crise spirituelle, démographique, politique, c’est à un déplacement très significatif de la condition du "clerc" qui laisse tant à désirer dans sa double nature (religieuse et laïque) à line manière autre d’oeuvrer pour assumer sa nouvelle condition de dotto, de scolare que l’on assiste ; une manière par conséquent de faire oublier toute une série de comportements coupables pour ne retenir que ce ressourcement proche de l’héroïsme tourné vers la construction dans la souffrance d’une oeuvre susceptible de résister au temps ; une manière de redorer le blason terni jusque-là du clerc, et de réévaluer une vocation dévoyée tant la lettre que l’esprit.
76Certes, la conception et la définition de l’écrivain (et du poète) est très différente selon que l’on a affaire à un franciscain comme Iacopone da Todi34 pour qui ECRIRE relève encore d’une initiative (et d’une inspiration) divines par l’humilité de la plume déléguée d’un transcripteur ou au contraire à un Pétrarque soucieux de mondaniser et d’individualiser une pratique qui devient éthique personnalisée désormais ("l’art singulier") dérivant d’une conscience individuelle si affinée qu’elle ajoute - très souvent à la rime - le concept pour le moins ambigu de "destin" :35 ans le contexte d’une culture encore théocratique.
77Face aux innombrables autres "clercs", Pétrarque fait dans toute l’Europe chrétienne occidentale incontestablement figure de novateur. Un double témoignage patent à ce qui vient d’être dit nous est fournit (à nous lecteurs puisque c’est à son lecteur privilégié qu’il tient, comme Dante, à s’adresser) d’abord dans une des premières compositions des Rime Sparse, le VIIe sonnet ("La gola e’l sonno e l’oziose piume" ...) par lequel il exhorte un ami à l’amour des lettres et de la philosophie, autrement dit, par la voix/voie poétique à qui il enseigne à devenir un vrai clerc digne de ce nom.
78Le sonnet commence comme un éloge parodique a contrario d’un topos goliard pour dénoncer la démission de la philosophie (v. 10 "povera e nuda vai Filosofia"). Certes, dans aucun des quatorze vers n’est prononcé le mot de "clerc" ; mais en revanche, c’est sur la dénonciation de toute vénalité et de l’appât du gain que s’achève le sonnet qui en appelle à une conception élitiste et assez solitaire de l’étude synonyme d’ennoblissement :
"Pochi compagni avrai per l’altra via
"tanto ti prego più, gentil spirto ;
"Non lassar la magnanima tua impresa.
(v. 12-14)
("Sur l’autre voie tu auras peu de compagnons ;)
("d’autant plus te supplie, ô noble esprit,)
("de ne point laisser là Ion action magnanime)
79La leçon, on le voit, est toute contenue dans l’écrin-testament du second tercet comme pour être sûr que la mémorisation des préceptes n’en soit que meilleure.
80Le second exemple pétrarquien nous est allégué par un autre sonnet (le CIVe, "L’aspettata vertu che’ n voi fioriva ..."), typique incipit moral en appelant liminairement à la "vertu" emblématique. Une fois encore, Pétrarque vient à célébrer la noblesse de l’entreprise consistant à vouloir s’éterniser par l’étude. Son allocutaire, ici, n’est autre qu’un grand "politique, le Seigneur de Rimini. Pandolfo Malatesta. La "clergie", cette fois, atteint (ou du moins a la prétention de viser) un gouvernant, le savoir eu l’occurrence débordant sur une pratique plus ouvertement active débouchant sur l’art de diriger la cité des hommes.
"Pandolfo mio, quest’opere son frali
"Al lungo andar, ma ‘I nostro studio è quello
"Che fa per fama gli uomini immortali.
("Pandolfo ami, ces oeuvres sont fragiles)
("à long terme, mais notre art est celui)
("qui rend par le renom les hommes immortels.)
81De fait, l’éloge de l’étude qui fait le vrai "clerc" sert aussi à Pétrarque conseiller mais aussi à l’occasion moraliste des Grands de son temps, à opposer cette forme de savoir ... et de sagesse, à tout le reste.
82Ce qui compte, c’est la similitude ou la correspondance flagrante entre les deux sonnets ci-dessus mentionnés, ou plus précisément entre les deux "chutes" concentrées sur le dernier tercet.
83On a là en germe, vers le milieu du xive siècle, une éthique du savoir à l’adresse du Prince qui préfigure le sentiment de la haute mission qui, beaucoup plus tard, se manifestera sous forme de mécénat "éclairé" d’abord, mais plus encore avec un Laurent de Médiris, prince et poète sous la forme d’une activité personnelle en marge de (ou en complément de) celle des Affaires de la Cité.
84Ce qui demeure toutefois avec Pétrarque, c’est que nulle part ne paraît fût-ce sous forme d’allusion furtive, de mention occasionnelle, la figure du "clerc" : ni dans le contexte de la polémique babylonienne des sonnets avignonnais où par exemple sont mentionnées des tares telles que la luxure (sonnet CXXXVI) ou encore l’impiété (sonnet CXXXVIII) ; m dans les compositions relatives à la gloire obtenue (couronnement poétique au Capitoie du 8 avril 1341, canzone XIX), ni dans celles qui font directement allusion à la nécessité et à la beauté de l’étude (ex : sonnet CLXVI).
85Le clerc polémiste avec sa liberté de jugement, le clerc récompensé pour son savoir antiquisant et multiforme, le clerc biographe de sa propre condition de "lettré", ce clerc pétrarquien s’efface devant le "je" d’une conscience moderne.36
86Nous avions ouvert notre exposé sur la double image antinomique du clerc en France (Nord v/s Sud) et pour le seul xiie siècle à l’aide du référent troubadouresque de Bernard Sicart de Marvejols et de celui d’Abélard. Nous nous proposons à nouveau ici de renvoyer à ce même xiie siècle mais avec un autre auteur, clerc lui aussi, ni laïc comme le troubadour de Marvejols, ni "déviant" comme le philosophe-théologien Abélard.
87Saint Bernard de Clairvaux - c’est de lui qu’il s’agit - lui aussi clerc mais religieux et de surcroît fondateur d’un ordre, avait déjà à la même époque que les précédents (première moitié du xiie siècle), en son 36e sermon37 consacré à la hiérarchie des connaissances dans le droit fil de "l’utilité des sciences et des lettres", fixé dans une sorte de prescience les règles de comportement du clerc.
88En effet, en énonçant trois mises en garde successives dans l’ordre du savoir et de ses pratiques herméneutiques, il avait dès cette date attiré l’attention sur les déviances possibles du clerc tenté d’abord par le savoir pour le savoir, attitude qualifiée de "curiosité basse" ; puis par celle de "connaître pour être soi-même connu", comportement estimé de "honteuse vanité ; enfin, tare plus grave encore que les deux précédentes, par celle "d’acquérir la science en vue de la revendre" et - poursuit Saint Bernard -par exemple pour la monnayer au sens propre c’est-à-dire à seules fins de profit pécuniaire, "mobile particulièrement laid" commente encore le saint.
89On aura reconnu là de bonne heure la lucide dénonciation de trois des péchés majeurs dont les clercs italiens sont couramment taxés, au xive siècle du moins : la voie de l’hérésie doctrinale condamnée à faire cercle avec elle-même dans un formalisme stérile détaché des vraies contingences ; celle de l’orgueil aussi, suscité par l’excessive complaisance de soi ; encore celle de la vénalité et au bout du compte de l’usure détournant une connaissance pourtant uniquement conçue en fonction de l’approche du Divin au profit de considérations bassement utalitaires et mondaines.
*
90Or, une vérification a posteriori de semblables avertissements bernardins nous est précisément fournie par les écrits du plus haut dignitaire de l’Eglise au milieu du xve siècle, le Pape Pie II (alias Aeneas Silvio Piccolomini), siennois. Celui-ci, dans son volumineux (près de trois mille pages imprimées) et remarquable témoignage autobiographique38 des Commentarü rédigés en latin adopte encore à l’occasion le terme de clerus mais dans le contexte d’une critique généralisée de l’abandon et du dédain à l’égard du monachisme au xve siècle (au Quattrocento) à quelques exceptions près39 ; et dans une optique forcément universaliste où l’idée de croisade officielle apparaît pour la dernière fois (et qui échoue, flotte restée au port à Ancône, bientôt suivie de la mort du Souverain Pontife en 1464). Ce terme de clerus, même employé au singulier, a fortiori au pluriel comme il l’est le plus souvent40, finit par désigner, à côté des Prélats (praelati) et des frères (fratres), l’ensemble des religieux qui étudient les arts libéraux et les Ecritures.
91Opposé certes encore aux laïques (laici)41 et conservant encore le sens religieux (c’est-à-dire spirituel) de recherche de la pensée, sous la plume du Pape toscan, humaniste et protecteur éminent des artistes, clerus/cleri semblent perpétuer mais sous forme de nostalgique et précieux reliquat des âges précédents un idéal bien fragile et pour ainsi dire désuet, d’humilité et même de pauvreté tel qu’il avait été énoncé dès la naissance de cette catégorie de "clercs"42. Mais ici, au milieu du xve siècle, la reconnaissance s’effectue sous la forme décadente d’un cénobitisme bien compris, voire d’un érémitisme qui, peu ou prou, traduit et trahit l’inquiète survivance d’autres pratiques connues, itinérantes elles, celles des clerici vagantes.
92On ne peut mieux résumer sous forme de pathétique contradiction et répétons-le sous la plume du plus haut dignitaire de l’Eglise d’alors, au Quattrocento, le statut, la condition et la déontologie du clerc tels que les avaient pressentis ou constatés, dénoncés et déplorés aussi, fût-ce sous l’angle d’une féroce satire et de la raillerie, nombre de poètes et de prosateurs, en latin ou en volgare, du xive siècle.
*
93Compte tenu de la double et fondamentale acception du ternie de "clerc" (et de la disparité des conditions et du mode de vie), il n’en reste pas moins que dans l’un et dans l’autre cas, la mauvaise presse par quoi nous avions ouvert cet exposé demeure indéniablement dans la littérature médiévale italienne, prose et poésie confondues, dans l’une et dans l’autre langues. Avec cet effet également constaté chemin faisant d’interférences nettes entre ce qui était au départ (début du xiie siècle) du domaine religieux, institutionnel ou bien ce qui relevait du domaine laïc : processus de contamination malgré tout de l’un à l’autre, de l’un par l’autre.
94La liste est bien longue des "péchés" dont sont accusés et affublés les clercs quels qu’ils soient : luxure, orgueil, vénalité sont plus particulièrement à retenir parmi tant d’autres.
95Il semble, tous comptes faits, que les nombreuses déviances ou écarts l’emportent de beaucoup sur la "norme" puisqu’il est fort peu fait mention de "bons clercs".
96Des trois définitions du mot italien chierico, si le premier indique un devenir c’est-à-dire une phase transitoire relative au nécessaire apprentissage inclus dans la période "de formation" ou de maturation, les deux autres - religieux et culture "laïque" appartiennent à un état, à une fonction qui allie pouvoir et savoir.
97Mais on l’aura constaté, rien n’est moins stable que cet exercice sacerdotal ou cette mission culturelle appelée à dériver, à dévier de la ligne de conduite et des limites que s’était fixées le "clerc" ou qu’on avait fixé pour lui ; celles qu’une Autorité supérieure ou qu’une conscience affinée avaient indiquées et marquée. Est-ce un hasard si dans l’Italie du xive siècle qui connaît la crise du double "vide" que l’on sait, le mot de "clerc" et l’institution civile et religieuse qu’il supporte subissent de bien visibles mutations perceptibles dans des séquelles de connotations déviantes avant de connaître une éclipse au xve siècle, au siècle de l’humanisme nouvelle formule, au siècle où un savoir prétend à la fois à la polyvalence et, d’une certaine façon, à la mise à l’écart du Divin ?
98Nouvelle "trahison", définitive celle-là, d’une condition qui n’allait pas cesser de faire parler d’elle, ne serait-ce encore qu’à travers l’oeuvre célèbre d’un polémiste, publiée en 1927, qui m’a fourni l’occasion de l’intitulé de cet exposé et dans laquelle, entre les deux guerres, le terme catégoriel de "clerc" employé au pluriel par Benda ne faisait point de partage entre laïcs et religieux pour lui servir à brosser le portrait de "son" clerc idéal.43
Notes de bas de page
1 Philippe Walter, Naissances de la littérature française (ixe - xve siècle) anthologie ; Grenoble, Ellug, Coll. "Travaux et recherches", 1990 ; pp. 38-39 (chap. "la naissance du lyrisme)
2 Héloïsc et Abélard, Lettres (suivies de qqs textes contemporains), Paris, 10x18, U.G.E., n° 188-89- 1964. P. 44-45, lettre à un ami ; pour la propre déviance d’Abélard, cf. p. 34.
3 In Rimatori comico-realistici del Due e Trecento, Torino, U.T.E.T., 1965 a cura di Maurizio Vitale, sonnet de Cecco Angiolieri ("In una ch’e’ chinar mi danno meno ...") où le thème de l’argent et de la vénalité introduit d’emblée le débat comme on peut en juger d’après cet incipit.
4 Folgore da San Gimignano in Rimatori comico-realistici..., op. cit., sonnet IV, "Di marzo si’ vi do una peschiera p. 585.
5 Pieraccio Tedaldi, in Rimatori comico-realistici.... op. cit., sonnet XXXI, p. 736.
6 In Novellino suivi du Libro di novelle e di bel parlar gentile, introd. di Giorgio Manganelli, Milano Rizzoli, B.U.R. n° L. SO, 1975, 166 P. , voir p. 63.
On peut lire en traduction cette nouvelle dans la belle édition française : Gérard Genot et Paul Larivaille, série "Bibliothèque Médiévale, 10 x 18, U.G.E., 1988, n° 1928, chr. Bourgois édit. à la page 137.
7 Iacopone da Todi, Le Laude, Collez. "Scrittori d’Italia", a cura di Giovanni Ferri (secondo la stampa fiorentina del 1490), 2e ediz. riv. e agg. Bari, Laterza, 1930, cf. p. 191.
8 Ibidem p. 185 (Laude (De l’amor divino e sua laude") ; p. 120 (laude "Del pianto de la Chiesa redutta a mal stato).
9 Franco Sacchetti, Il Trecentonovelle a cura di Vincenzo Pernicone, Firenze Sansoni, 1946, p. 267.
10 Ibidem respectivement p. 303-305 (nouv. CXXXVII) ; p. 85 (nouv. XXXV).
11 Ibidem, p. 21.
12 In Conteurs italiens de la Renaissance, Paris, Bibliothèque de la Pléiade, 1993 (div. auteurs, sous la dir. Anne-Motte-Gillet), 1926 p. Pour Masuccio Salernitano, texte trad. par M-h. Poli, p. 116 sqq.
13 Sahhadino degli Aneliti, Le Porretane, Roma, Salerno editrice, 1990, p. 379. Voir aussi G. Zaccagnini, "La vita dei maestri e degli scolari nello studio di Bologna nei secoli xiiie xiv", Genève, Olschki, 1926.
14 Gherardi da Prato Giovanni, Il Paradiso degli Alberti, a cura di Antonio Lanza, vol. 10, Roma, Salerno editrice, 1978. Libro II, p. 81 où un certain Paulo Dugumaro, dotto e famoso expert en géométrie, en arithmétrique et en astrologie.
15 Jean Boccace, Le Décaméron, trad. de J. Bourriez (édition illustrée), Paris, Garnier, 1963, introd. p. 13.
16 G. Boccaccio, Il Decamerone, 4a ediz. integra, con prefazione e glossaro di Angelo Ottolini, Milano, U. lloepli, 1944. ; en italien "la vita scellerata e lorda de’ chcrici".
17 Très longue nouvelle, peut-être la plus longue du Décaméron (plus de vingt pages imprimées), op. cit. p. 47.
18 Il Decanterone. op. cit.. "conclusione", p. 676-681.
19 Anonimo genovese (Rime e ritmi latini) ediz. critica a cura di Jean Nicolas, Collez, di opere inedite o rare, vol. 149, Bologna, Commissione per i testi di lingua, 1994, 631, p. Cf. n) 29, p. 95-96 (avarice d’un prêtre) ; n° 111, p. 318 (sur les frères quêteurs) ; n° 107, p. 316 (un prédicateur cupide et vénal) ; encore XIX bis (en latin), p. 504 (un quatrain contre les prêtres séculiers).
20 Guittonc d’Arezzo, Lettere, ediz. critica a cura di Claude Margueron, "Collez. di opere inedite o rare", vol. 145, Bologna, Commisione per i testi di lingua, 1990, 396 p. Voir p. 120, lettera X, & 25, le thème en est : exhortation à une communauté de moniales de respecter scrupuleusement la règle de leur ordre".
21 Rutebeuf In Poètes et romanciers du Moyen. Age, édition établie et annotée par Albert Pauphilet, Paris, Bibliothèque de la Pléiade, N.R.F., 1952.
Voir notamment dans cette chanson IX, la sixième et la septième strophe, p. 949.
22 Bernardino da Siena, Essempli grossi e palpabili a cura di Umberto Meattini, Roma, Edizioni Paoline, 1980. Successivement p. 87, in Quaresimale fiorentino n° 32 ; p. 92, n° 137 in Predicazione senese (predica Sa), & 8 ; p. 100, n° 152, ibidem, & 15.
23 In Racconti esemplari del Due e Trecento, 3 tomes, a cura di Giorgio Varanini e Guido Baldassari, Roma, Salerno Editrice, vol. 4, 1993 ; cf. t. Il p. 349-50, & 183.
24 Ibidem, t. Il, p. 578, & 22.
25 Bernardino da Siena, op. cit.. p. 86, n° 126 in Quaresimale fiorentino (1425) predica 32.
26 Voir note n° 24.
27 Racconti esemplari ... op. cit., t. III, p. 100-101.
28 Ibidem, t. II, p. 608-609, & 35.
29 Ibidem, t. II, p. 580-81, & 23.
30 Anonimo genovese, op. cit., n° 39, p. 120-124 ; voir résumé de J. Nicolas à la page 125.
31 Ibidem, n° 29, p. 95-96.
32 Alain Chartier, Poèmes, bibliothèque médiévale, 10 x 18, U.G.E. (Christ. Bourgois), n° 1929 ; "le Bréviaire des Nobles", p. 196 sqq., spécialement p. 230, 1988.
33 In Pétrarque, Canzoniere (Le Chansonnier), édit. bilingue Pierre Blanc, Paris, Classiques Garniers, Paris, Bordas, 1988 : pour la seule première partie de In Vita di Madonna Laura : pour l’art, sonnet IV, v. 1, p. 54 ; pour la gloire, sonnet XLIII, v. 11, p. 120 ; pour l "oeuvre" : canz.. XXIII, v. 99, p. 80.
34 Iacopone da Todi, Le Laude, op. cit.. laude LXXXIV, p. 191.
35 Marziano Cuglielminetti, Memoria e scrittura (L’autobiografia da Dante a Cellini) Milano Einaudi, P. B.E. n° 299, 1977.
36 Destin : Pétrarque, Canzoniere, op. cit., p. 70, sonnet XIX, v. 13 ; p. 210, CVI, v. 3 ; p. 430, sonnet C’CLIX, v, 9.
37 Saint Bernard de Clairvaux, Oeuvres mystiques. Pr2f. et trad. d’Albert Béguin, Paris, Ed. du Seuil, 1953, p. 429.
38 Jean Lacroix : "L’étranger tenu sous le regard d’un Pape du Quattrocento : I Commentarü de Pio II in Actes du Coll. Internat, de Paris III/ Sorbonne-Nouvellc, coordonnés par J. Dufournet, A. Fiorato et A. Red ondo sur le thème : L’Image de l’Autre européen xv-xviiie siècle. Presses de la Sorbonne-Nouvelle, Paris III, 1992, voir p. 65-79.
39 Pio II ( Enea Silvio Piccolomini) : I Commentarü, 2 vol., a cura di Luigi Totaro, Milano, Adelphi, 1984, 2725 p.
Ex. les Camaldules in L II, p. 1659 (décédence généralisée caractérisée par l’abandon des sites et des monastères, p. 1580, 1613, 1659).
40 Ibidem. Caractérise le personnage pour lequel Pie II spécifie la fusion des activités des rhétores, des philosophi "graecis ac latinis imbutis" (t. II, p. 1560, & 3, libro VIII) ce que distinguait en revanche Abélard.
41 Particulièrement notable dans ce même tome II, p. 1624 ? LIVRE VIII. Existence de pratiques constatées de visu, de auditu par le Pape hôte de l’un de ces moines mais sous forme d’érémitisme.
42 Julien Benda : il s’agit de l’édition originale, Paris, Grasset, 1927.
43 Ibidem, t. II, p. 1506, 1509, 1510, chap. VIII.
Auteur
Université Paul-Valéry Montpellier III
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Fantasmagories du Moyen Âge
Entre médiéval et moyen-âgeux
Élodie Burle-Errecade et Valérie Naudet (dir.)
2010
Par la fenestre
Études de littérature et de civilisation médiévales
Chantal Connochie-Bourgne (dir.)
2003