Entre chair et esprit : petit exercice de déconstruction de l’héroïsme royal chez Suger1
p. 31-42
Texte intégral
1Suger, abbé de Saint-Denis, compose les Gesta Ludovici Grossi en 1137, à la mort de son héros, le roi de France Louis VI2. L’abbé de Saint-Denis ajoute ainsi à ses nombreuses autres réalisations (architecturales, économiques, politiques, diplomatiques..., si tant est que ces distinctions aient un sens) une œuvre historiographique, qui marque pour l’abbaye le début de sa prise de pouvoir sur l’activité de production de l’histoire des rois des Francs, d’abord en latin, tout au long des xiie et xiiie siècles, ensuite en français, avec la composition des Grandes Chroniques de France, commandées par Louis LX et livrées en 1274. Suger oriente ainsi de manière décisive la fabrication3 de l’histoire des rois des Francs à l’abbaye de Saint-Denis.
2Le personnage royal placé au centre de leur « fabrique de l’histoire » par Suger et l’abbaye de Saint-Denis peut être considéré comme une matière impliquée dans des réseaux de discours extrêmement nombreux et multiformes, des miroirs et admonitions aux hagiographies, des chroniques et des généalogies aux premières chansons de geste, des panégyriques aux histoires ecclésiastiques et aux romans arthuriens, depuis l’Ancien Testament jusqu’à l’Histoire des Francs d’Aimoin de Fleury4... S’impose en ce domaine la présence assourdissante de multiples trames textuelles, trames qui se rencontrent, se superposent, s’affrontent avec vigueur au moment où Suger envisage de construire la mémoire de son roi. Dans le texte de Suger, en effet, les guerres que se livrent les récits et les systèmes topiques existants, y compris ceux qu’élaborent à la même époque une aristocratie laïque soucieuse de s’autodéfinir et de s’autolégitimer à son tour, à l’instar des princes et des clercs, par le biais de la jeune littérature de langue romane5, sont mises en scène de manière assez lisible pour que l’on puisse déconstruire la fabrication sugérienne du personnage royal. Trois remarques s’imposent qui guideront cette déconstruction :
31. Au moment du « tournant carolingien », dans les discours de mise en ordre de la société chrétienne, il est possible de repérer, comme le précisait récemment R. Savigni, deux éléments communs, et à partir de ces éléments, divers « infléchissements » qui annoncent les débats du Moyen Âge central6 : tout d’abord, « l’Empire [est] conçu comme la “maison de Dieu7” », structure globalisante dans laquelle les rois et les bellatores complètent par leur ministère spécifique celui des oratores, ce qui implique l’idée d’une collaboration entre les statuts (et leurs divers mérites)8 ; de plus, les écrits augustiniens mais aussi les Moralia in Job de Grégoire le Grand répandent le modèle tripartite des « trois genres d’hommes » qui composent la société chrétienne, avec Job, figure des laïcs, Noé, figure des rectores, et David, figure des continentes, ce qui tend à réactiver la tripartition fonctionnelle (avec le rôle pionner joué par Haymon d’Auxerre en la matière, comme l’a montré D. Iogna-Prat). Ainsi, et même si « une distinction entre ordre de prière et fonction guerrière prend progressivement corps, au cours du ixe siècle9 », l’idéal carolingien reste celui de « l’Église corps du Christ, unique dans la diversité de ses membres grâce à l’action de la paix et de la charité, instances régulatrices permettant l’harmonie dans la différence10 ».
4Plusieurs « versions » sur la place et la fonction de chaque groupe dans la structure d’ensemble coexistent alors (exaltation de l’ordre des moines, ou encore « cléricalisation » de la hiérarchie au profit du seul ordre des clercs, revendiquant alors la perfection des moines et les devoirs des recteurs de l’Église), sans que pour autant naisse dès ce moment une discrimination franche clercs/laïcs. Mais dès la fin du « rêve » carolingien de coopération de tous les ordres au « corps social » du Christ en route vers le salut, et de collaboration entre autorité ecclésiastique et saecularia potestas, on assiste à la cléricalisation plus forte de la société et de fait, au désir de distinguer vraiment les ordres, et surtout de les hiérarchiser. Le programme grégorien joue sur ce plan un rôle majeur, en s’attachant à subordonner à l’ordre supérieur, celui des clercs, la masse des laïcs. Le Décret de Gratien, vers 1140 (Decretum, C. 12, q. 1, c. 7) pose ainsi la distinction entre les « deux genres de chrétiens » (duo genera christianorum). Se trouve ainsi instituée dès le xie siècle une opposition forte entre les clercs et les laïcs, la « seule véritable distinction de statut que reconnaisse l’Occident médiéval11 ».Dans ce cadre, étant donné la distinction gélasienne entre les deux pouvoirs, le modèle patristique des « trois genres d’hommes » et le schéma des trois « ordres fonctionnels », le roi est défini comme un laïc spécial, au statut âprement discuté : R. Savigni rappelle ainsi que Jonas d’Orléans et Hincmar de Reims exaltent la sapientia du roi et son rôle, tout en insistant sur la distinction gélasienne entre le pouvoir sacerdotal et le pouvoir royal, donc en laïcisant la fonction royale. C’est aussi ce que pose le courant grégorien, qui confine le pouvoir royal à la sphère provisoire et éphémère du pouvoir temporel, en le subordonnant en valeur à la vraie monarchie, spirituelle celle-là. Alcuin, Paulin d’Aquilée, Théodulphe d’Orléans, Louis le Pieux même dans son Admonitio ad omnes regni ordines, exaltent au contraire la fonction pastorale du roi à l’égard de tous, clercs et laïcs : le roi alors unit en lui, dans ces versions « monarchiques », l’orator et le bellator...
52. Dès qu’il s’agit de représenter le personnage du roi, ou plus globalement l’ordre et les ordres de la société chrétienne, ce sont ainsi « les formes légitimes de la domination et de la hiérarchie sociales12 » qui sont en jeu. Or ces formes « sont prises dans un ensemble plus vaste de conceptions fondées sur les relations entre les hommes et Dieu, entre l’ici-bas et l’au-delà13 », entre les choses matérielles et les choses immatérielles, ou entre « la fange de la terre » et la « pureté du ciel », pour reprendre les termes mêmes de Suger (De Administratione, II, 4 et II, 13). De fait, le rapport chair/esprit, ou matériel/idéel, est bien la « matrice à travers laquelle sont perçus et pensés, dans la société chrétienne médiévale, divers pans de la réalité matérielle, pratique et idéelle14 » : il sous-tend, ainsi, les conceptions de l’ordre et de la hiérarchie que nous venons d’évoquer, et tous les infléchissements qui découlent du schéma trifonctionnel, notamment la valeur attribuée aux différents pouvoirs et aux différents ordres, et plus particulièrement, la subordination des laïcs aux clercs instituée au xie siècle. De même, c’est ce dialogue entre le « matériel et l’idéel », la chair et l’esprit, qui rend le statut du personnage royal difficile à définir, puisqu’il n’est, par son sacre, ni tout à fait dans l’ordre de la chair, ni tout à fait dans l’ordre de l’esprit, ni seulement bellator, ni vraiment orator ; de surcroît, la memoria du roi mort, qui construit à la fois le souvenir des vivants, et la mémoire de Dieu, s’appuie à la fois sur un corps de chair et sur un corps de gloire, sur une conception duelle du corps et de ses actes15.
63. Cette relation chair/esprit, qui est au centre du système de représentation du personnage royal, est hiérarchisée au sens que L. Dumont16 donne à cette notion : la hiérarchie évoque une différence mais n’oppose pas une valeur à une non-valeur. Ainsi, les valeurs spirituelles sont en correspondance étroite et définitoire avec les valeurs de l’ordre de la chair, qu’elles englobent et récapitulent : l’archétype de ces relations pourrait être l’incarnation du Christ, reproduction spirituelle, dans la chair, du Père par le Fils. Et les valeurs « charnelles » « jouissent d’une forme propre, quoiqu’humiliée, de reconnaissance17 ». Elles peuvent même devenir des lieux de plus haute valeur puisqu’elles peuvent faire (ou non) l’objet d’une spiritualisation qui les « détourne » de la mondanité, qui permet un passage « de ce monde inférieur au monde supérieur de manière anagogique » (Suger, De Adm., II, 13), passage qui ne nie pas les materialia (Suger, De Adm., II, 4), mais se fonde au contraire sur elles, sur leur beauté et leur visibilité pour accéder au spirituel. On reconnaît là l’imposante présence de l’œuvre du Pseudo-Denys l’Aréopagite, « ruminée » par les Victorins, et sans cesse invoquée par Suger18. Le passage (ou non) d’un registre à l’autre (et ses conditions) est de fait une question centrale, qui se fonde sur le fait que la relation chair/esprit est une des matrices de la représentation, du traitement topique du personnage du roi.
7Dans le système que nous venons de décrire, et comme le montrent les miroirs et Vitae ou panégyriques carolingiens, deux configurations du personnage royal sont dès lors possibles :
- Si le roi est seulement le premier des laïcs, c’est qu’il est avant tout un pécheur en puissance. Le « bon roi » de certains discours monastiques clunisiens, par exemple, est un roi qui, tendant à une perfection hors-le-monde19 d’orator, « dépose son baudrier », baudrier qui représente une forme amoindrie de reconnaissance, celle du roi « seulement dans-le-monde », bellator, qu’il faut abandonner sans retour20. Dans ce cadre, il ne reste plus au narrateur ecclésiastique du « bon roi » qu’à façonner un personnage royal débarrassé du « roi de chair » et de toutes les formes amoindries de sa valeur (le combattant, le chasseur, l’époux et le fondateur d’une lignée et d’un territoire). Le narrateur parvient ainsi à construire une « forme de reconnaissance » du personnage royal en l’assimilant aux oratores. C’est le cas, peu après 840, du Louis le Pieux de l’Astronome, quasi-moine humilié dans les affaires du siècle21... Et au début du xie siècle, le narrateur de la vie de Robert le Pieux22 précise à la toute fin de son texte, après avoir tracé un portrait de roi sans épée, confit en dévotion et guérisseur comme un saint, qui se laisse dépouiller et tromper, qu’il laisse aux historiographes le reste, c’est-à-dire « ses combats dans le siècle, ses victoires sur ses ennemis, les fiefs que, par son courage et son talent, il a acquis » (30) : le meilleur des rois englobe le bellator comme sa pire faiblesse, comme un péché en puissance, sans qu’il existe une solution de passage du registre des actes physiques du bellator aux actes spirituels de l’orator.
- Ce schéma est repris et symétriquement inversé lorsqu’il s’agit de donner une définition spirituelle aux missions séculières et terriennes, matérielles, du « bon roi », lorsqu’il s’agit de conjoindre (et non plus d’opposer) en lui l’orator et le bellator. Le « bon roi » entre dans un discours qui exalte sa « noblesse extérieure », sa perfection-dans-le-monde : le « passage » des materialia (magnifiques) au spirituel se fait sans rupture, parce que ces « choses charnelles » sont un reflet des valeurs spirituelles. Le « bon roi » est un bon époux, un vengeur et un justicier, un conquérant de royaumes... et il est ainsi un « meilleur Énée », bellator et orator, comme le clament Eginhard ou Ermold le Noir23.
8Héritier de ces configurations possibles, le personnage du roi au début du xiie siècle peut être façonné et évalué soit par la spiritualisation (la transformation), soit par l’humiliation (la non-transformation) des formes qui sont liées à l’ordre de la chair... et ce, dans un cadre de représentation sous-jacent qui oppose continûment l’ordre de la chair, lieu probable de la déviance, mais aussi lieu possible d’affirmation de la valeur spirituelle supérieure du personnage, à l’ordre de l’esprit, lieu de la conformité à la volonté divine. C’est dans ce système de représentation que Suger se met lui-même à écrire la geste de son roi, en 1137.
9Dans le premier chapitre des Gesta de son roi Louis VI, Suger évoque brièvement, en un diptyque parfait qui évoque le passage continu du registre de la chair au registre de l’esprit, les enfances de Louis. La beauté du corps est indissociable de la beauté des mœurs : Louis, fort de ses qualités innées et constantes, sera à la fois bellator et orator, promoteur du royaume et défenseur de l’Église et des pauvres (comme Suger...). Le narrateur rappelle aussi de quel double lignage l’enfant est issu, lignage charnel de la dynastie carolingienne et capétienne, et lignage spirituel des martyrs de Saint-Denis. Toujours dans le chapitre initial, et sur ce point commence un « chevauchement » de textes assez tendu, le narrateur évoque en une nouvelle prolepse le don de soi que le roi Louis VI, à l’approche de sa mort, a voulu faire aux saints de l’abbaye, « de manière à se faire moine en ce lieu, si c’était possible » (I) : s’insère là un épisode de conversion in articulo mortis, qui renvoie immédiatement le lecteur à la « guerre des récits » que se livrent depuis les Pères de l’Église, en passant par la réforme grégorienne, tous les grands acteurs de la mise en ordre de la société chrétienne. Comme les travaux de D. Iogna-Prat l’ont montré24, l’idéal de la conversion des princes et des grands au moment de la mort, donc après l’exercice plein et entier de leur fonction spécifique de combattants dans le siècle, caractérise l’idéal du « bon bellator » dont la mission terrienne est spiritualisée (et légitimée) par cette fin qui dévoile en lui l’orator (ce qui assure le passage de la chair à l’esprit sans que soit nié l’ordre de la chair). Dans cette optique, la conversion « au moment de la mort » signifie la possibilité d’une perfection-dans-le-monde. Or, au moment où Suger écrit, dans le contexte des réformes grégoriennes, l’idéal d’une perfection hors-du-monde (et la dévaluation du « roi de chair ») ressurgit avec force, porté par la voix des ordres monastiques réformateurs : dans certains modèles de sainteté (clunisiens) proposés aux laïcs, apparaît alors l’image du bellator, voire du roi, délaissant le siècle et déposant le baudrier, soit pour gagner l’asile du monastère (c’est la voie promue par l’abbé Hugues de Cluny, à partir de 1050), soit pour gagner la voie de la « nouvelle chevalerie », façonnée autour de 1130 par Bernard de Clairvaux.
10Suger entretient en fait dans son texte un dialogue nourri et concrètement repérable avec les deux abbés, contre ce modèle du renoncement aux valeurs terriennes. D. Iogna-Prat a reconstitué le dossier qui permet de déceler ce dialogue : Hugues de Semur, alors abbé de Cluny, avait demandé à Philippe Ier, le père de Louis VI, de venir faire pénitence à Cluny afin de se laver de la souillure de son concubinage incestueux et adultère avec Bertrade25. Le roi répond qu’il lui faut d’abord des exemples de conversions royales au monachisme, demande satisfaite par Hugues, qui lui tend le miroir glaçant de deux contre-modèles de l’histoire contemporaine, Guillaume II le Roux d’Angleterre et l’empereur Henri IV. De ces deux souverains damnés pour n’avoir pas obéi aux lois de l’Église, l’abbé Hugues rappelle la mort brutale et humiliante : le roi Guillaume fut tué ainsi d’une flèche perdue, « non à la guerre mais dans un bois ». Si Philippe vient accomplir sa pénitence dans l’asile clunisien en devenant moine, il pourra alors redevenir un roi, non pas au sens où il « dominerait » un misérable bout de terre, mais en « régnant avec le Seigneur » dans l’immense royaume céleste. La dévaluation du personnage royal en tant qu’il est un laïc engagé dans les affaires du siècle est claire dans cette admonition, si claire qu’une lettre du pape Grégoire VII26 à l’abbé Hugues vient le réprimander de son zèle à convertir des hommes d’armes au cloître, tandis qu’au dehors, la sainte Église se trouve livrée à elle-même, sans défense. Le « bon roi » doit rester dans le monde et soumettre en lui le bellator à l’Ecclesia...
11Or, qui voit-on apparaître dans le texte de Suger après l’allusion à la conversion du roi Louis VI mourant, dès le premier chapitre de ce texte, à la fin des « enfances » du roi ? Un long portrait croisé du jeune prince Louis VI et du roi excommunié cité par Hugues de Semur, le roi Guillaume le Roux d’Angleterre, qui est justement son premier adversaire au combat. Suger fabrique alors sa propre conjointure à propos de la mort de Guillaume le Roux : après une guerre que le récit laisse deviner longue et sans victoire décisive, le roi Guillaume se lasse et repart en Angleterre, pour se « livrer au plaisir et à ses caprices », en l’occurrence à la chasse, où une flèche, vengeance divine (divina ultione), l’abat sans gloire. Offert en miroir terrifiant au père, l’épisode sert ici à la construction, par un chiasme sans appel, de l’éloge du fils. Mais il sert aussi de repoussoir à l’idéal du renoncement au monde et plus largement, à tout traitement du personnage royal qui ferait des formes matérielles du pouvoir des « formes amoindries » de reconnaissance de la valeur royale, vouées à disparaître du portrait du bon roi. Après le premier chapitre, d’ailleurs, les batailles du roi nourrissent presque exclusivement le texte de Suger, à l’exclusion de toute activité spirituelle, fondations pieuses, ou actes charitables ou miracles (qui constellent la vita d’Helgaud de Fleury de 1031). Le portrait en diptyque avec le roi damné est ainsi l’occasion du premier des récits des batailles de Louis. Il s’y montre le « défenseur illustre et courageux du royaume paternel » (II), citation virgilienne (regna paterna, Enéide, III, 121) qui prend la place du titulum topique de defensor ecclesiae. Cette première lutte révèle sa virtus, vertu de prouesse, de combat, et le fait passer de l’enfance à l’âge adulte. Ce faisant, Suger place son héros bien loin de l’enfant sage adonné exclusivement aux études sacrées qu’était par exemple le personnage de l’enfant Robert le Pieux, lourdement monachisé par Helgaud de Fleury au point que « Jamais l’injustice par lui éprouvée ne le poussait à se venger » (2) !
12Il s’agit donc pour Suger de construire un personnage dont toutes les fonctions terriennes sont exaltées, parce qu’elles garantissent, par leur perfection, le transport de qui les contient et les contemplent vers une « vérité » et des valeurs plus hautes. La réflexion sur la relation chair/esprit traverse sous cette forme l’ensemble de l’œuvre sugérienne : l’abbé construit sa biographie-memoria royale comme il a construit les deux mémoires sur son administration et sur la consécration de l’église restaurée par ses soins, en exaltant les materialia, les choses de chair, offertes en holocauste à Dieu dont elles incarnent la gloire et auquel elles ramènent sans cesse par leur beauté27. Dans le prologue de son Ecrit sur la consécration de Saint-Denis, après avoir rappelé la disparité (en un bref résumé de la pensée pseudo-dionysienne et victorine) du sensible et de l’intelligible, il explique que, si certains parviennent à rester dans la contemplation exclusive du spirituel en oubliant les carnalia desideria, il est pourtant nécessaire à tout homme d’exalter, voire de construire, la « noblesse extérieure » des choses (De Adm., II, 13). Il faut rappeler sur ce point ce qui oppose Bernard de Clairvaux et Suger : dans son Eloge de la nouvelle chevalerie28, vers 1130, Bernard nie que les formes « corporelles » de la chevalerie puissent refléter les valeurs spirituelles (« au vrai, résister courageusement par les seules forces du corps à un ennemi « corporel » d’ici-bas ne me paraît pas tellement surprenant » (I, 1)) et déconstruit la valeur des engagements séculiers (« les guerres entre vous, et les litiges, n’ont d’autres causes qu’un mouvement de colère irrationnelle, ou un appétit de vaine gloire, ou encore le désir cupide de s’adjuger quelque bien terrestre » (II, 3)). Il niera, de même, la valeur des gemmes resplendissantes qui parent sous Suger l’abbatiale dionysienne29... La réponse de Suger est sans appel : ne pas louer et ne pas rechercher les « gemmes » des materialia, c’est oublier de célébrer Dieu, et risquer de rester muet et oublieux.
13Le roi de Suger est donc un roi dans-le-monde, dans le plein exercice de ses fonctions terriennes, dont le narrateur s’attache à souligner la « noblesse extérieure » avec autant d’exaltation que lorsqu’il loue les trésors de pierres précieuses qui constellent l’abbatiale au grand dam de saint Bernard. Tout le récit est consacré à « publier » les combats vengeurs du roi en son royaume30 : ce roi redresseur de torts chevauche de batailles vengeresses en batailles vengeresses pour « la gloire du royaume » (XXVI) et au nom de la majesté divine ; il combat contre des seigneurs et rois rebelles et avides, et pilleurs d’Églises. Le récit donne à voir toutes les vengeances d’un roi placé au service de la res publica, la communauté humaine confiée aux rois et en marche vers le royaume céleste, la « réunion de la polis et de l’ecclesia31 » : le lecteur est alors plongé dans le bruit des armes et dans la poussière du combat, dans la geste d’un roi, comme il a pu être plongé dans le bruit des maçonneries et le fracas des procès qui rythment les récits des gestes de l’abbé sur la construction de l’abbatiale. Des vertus du roi, sont données à voir l’audace, la vaillance, et c’est « le sang versé à flot », ici et maintenant, qui permet de laver et de « rebaptiser » (par le passage au registre spirituel et à l’orator) les territoires un moment plongés dans le désordre (XXX). Le narrateur célèbre la beauté de son personnage en bellator qui reflète ici-bas un Dieu vengeur : « Vous auriez vu ce spectacle ! Ce merveilleux trait d’audace!... » (XXI).
14De fait, le récit centré sur la vaillance du roi éloigne Dieu, qui ne donne jamais la victoire : Fortune elle-même entre en scène. Le roi remplace Dieu à la tête de cet eventus sans miracles que Suger évoque dès le début de son récit et rappelle sans cesse : « le résultat d’une guerre, l’événement (eventus) de la guerre est chose douteuse » (XXI). Certes, lors de son sacre, le roi « est dépouillé de l’épée de la chevalerie du siècle et ceint celle de l’Église » afin de mener à bien sa vengeance contre les mauvais (XIII) ; certes, quand il lève la bannière de son ost à Saint-Denis, l’empereur renonce à la guerre. Mais le roi prend place pour le reste dans un événement guerrier aléatoire qui le fait tantôt perdre et fuir (fugare), tantôt gagner : il s’abat alors comme une vengeance divine et exemplaire sur les coupables. Cela contribue à écarter toute structure hagiographique32 : le roi entretient avec Dieu une relation qui est comme de collaboration, en aucun cas de soumission à ses programmes.
15Mais écarter ainsi les miracles et s’adonner avec autant de jouissance au récit des entreprises vindicatives et guerrières, à l’ekphrasis de la vaillance du corps présente le risque d’aboutir à un esthétisme sans transcendance, à une « vaine gloire », à une « louange seulement humaine » (De Adm., I) des actes royaux (et de l’écrit qui les rapporte !), alors qu’il s’agit d’en bâtir la memoria. Le récit retrouve alors le plan spirituel : il n’évoque pas le couple royal ; le père du roi est adultère et le frère comploteur... C’est qu’il faut bien redire que le roi n’est pas seulement un seigneur à la tête d’une lignée, ni un époux, ni même, plus largement, un simple bellator. Le récit, plutôt que d’en faire un moine, construit alors comme pour compenser l’amour que le narrateur porte aux faits chevaleresques une certaine médiocrité héroïque de ce roi immergé sans Dieu dans les affaires du siècle : il est encore jeune, inexpérimenté ; même devenu roi, il est systématiquement placé en tête d’armées insuffisantes en nombre. Plus largement, rien n’est de l’ordre de l’amplification dans le récit. Il n’y a pas de pathétique, ni même de la grandeur : les hommes et le roi avec eux ont chaud, suent à grosses gouttes, ont peur de l’orage ou du feu, se découragent, rient, se trompent d’alliance et de vengeance, fuient. Et Suger de souligner d’ailleurs que quand le roi se mêle de combattre seulement comme un bellator, il n’a plus rien de sublime : « plus qu’il ne convenait à la majesté royale, il combattait corps à corps en chevalier rompu au métier, faisant l’office d’un simple chevalier, non d’un roi » (XXI). C’est qu’il n’y a rien d’admirable à regarder un bellator : ce qui est admirable, c’est le roi qui accomplit avec énergie sa fonction guerrière, afin d’accomplir par là sa fonction spirituelle. Suger insiste d’ailleurs : un jour, le roi n’a-t-il pas fait rouler dans l’eau, de la pointe de son épée, des chevaliers désarçonnés (XII) (« Geste peu séant à un roi, il leur fait prendre dans le ruisseau un grand bain, jusqu’au heaume »...)33 ?
16Nous pouvons ici reconnaître une autre guerre des récits : Suger écrit au moment où les grands laïcs tentent de construire à travers la littérature épique et lyrique de langue française une autodéfinition, en se glissant pour commencer dans le système de représentation dominant, et donc dans le même schème corps/esprit qui servait à les dévaluer34. Et la littérature de fait s’attache à spiritualiser, plus ou moins fortement, les lieux mêmes de la tare charnelle : guerre d’abord, et plus tard amour et sexualité. Dans la Chanson de Guillaume35, lorsque le héros qui a perdu à l’Archant exprime le désir de se retirer du monde, Guibourc l’en dissuade : « Sire, dist ele, ço ferum nus assez / Quant nos avrum nostre siècle mené ! » (v. 2420-2421). La chevalerie dit sa valeur, une valeur de nature spirituelle, par son activité dans le monde, comme le montrent le martyre christique de Vivien dans La Chanson de Guillaume, ou le moniage de Guillaume (qui est un ermitage36 !). Or, le seul moment où le roi de Suger, honteusement mis en échec par une terrible tempête qui met en déroute son armée, ressent un furor épique démesuré et fier, en arguant que la mort lui sied mieux que la honte37, le narrateur précise que cette attitude ne « lui était pas habituelle », et résout d’une pirouette l’épisode, puisqu’en face l’adversaire vainqueur par le hasard de la tempête, voyant ce signe de la fureur du roi, se retire et négocie la paix... (IV). Il s’agit bien de traiter, par une certaine médiocrité guerrière, un risque de confusion des personnages (le saint, le roi, et le chevalier épique) et des textes, et un risque d’esthétisme sans transcendance.
17En exaltant les « formes corporelles » des actes royaux tout en n’amplifiant pas l’héroïsme guerrier, Suger accomplit une rupture radicale avec toute entreprise de monachisation de la personne royale, et avec le discours de la « vérité épique », qui assimilerait le roi-orator et bellator, ce roi sacré qui a déposé lors de son couronnement l’épée de la chevalerie, aux chevaliers, voire aux rois païens. La valeur spirituelle du personnage royal est tout entière reflétée dans sa vaillance, son audace, son corps en armes, au moment même où il combat, ce qui revient chez Suger moins à construire un guerrier héroïque ici-bas qu’à célébrer l’œuvre terrestre d’un roi, indissolublement liée à un « bénéfice spirituel » (prologue). Le narrateur fait du roi un personnage plongé dans son histoire de bellator-orator parce qu’il récuse l’effacement des choses terriennes, comme il le fera sur le plan architectural et liturgique : en construisant la memoria du roi mort, il prône l’union, la conjonction de la chair et de l’esprit, l’émerveillement avant le transport de l’esprit. La narration historique de fait ne se volatilise pas dans le propos spiritualisant et conserve une valeur propre, d’autant que l’écrit a lui aussi, comme les œuvres terrestres qu’il contient, la valeur sacrée d’un holocauste : le portrait du roi croise celui de son narrateur clerc, et sur ce point aussi les deux fonctions, celle de l’orator et celle du bellator, sont conjointes. Telle est la représentation de l’histoire, et du personnage finalement seulement « historique », qu’entérinera le « roman des rois » de Primat, bien mal qualifié de Grandes Chroniques de France : un système de représentation construit sur les « formes humiliées de la reconnaissance », sur la chair reconnue comme chair avant que d’être spiritualisée, émerge alors comme symptôme de ce qui fonde, à partir de la seconde moitié du xiiie siècle, une « nouvelle conscience historique », fondée sur une « transformation des rapports au monde et des approches de son élucidation38 ».
Notes de bas de page
1 Nous remercions vivement MM. les Professeurs D. Barthélemy et D. Iogna-Prat d’avoir bien voulu relire et corriger ce texte, qui a abondamment profité de leurs remarques, et de leurs recherches plus largement.
2 Nous utiliserons l’édition d’H. Waquet, Vie de Louis VI le Gros, Paris, 1929 ; pour les autres œuvres de Suger et pour une bibliographie récente, cf. l’édition de F. Gasparri, Suger. Œuvres, t. 1 et 2, Paris, 1996 et 2001.
3 Cf. sur la question épineuse de la fabrication de l’histoire à l’abbaye de Saint-Denis, la mise au point un peu ancienne déjà de G. M. Spiegel, The Chronicle Tradition of Saint Denis : a Survey, Massachusetts, 1978 ; à compléter par l’article de P. Bourgain, « La protohistoire des Chroniques latines de Saint-Denis (BnF, lat. 5925) », Saint-Denis et la royauté. Etudes offertes à Bernard Guenée, Autran F, Gauvard C, Moeglin J.-M. éd., Paris, 1999, p. 375-394. Ce n’est pas le lieu de développer ici l’histoire et l’action de Suger, sur lequel on trouvera une bibliographie récente dans les éditions de F. Gasparri, op. cit.
4 Comme le rappelle J. Le Goff, il semble « que la naissance de la monarchie », dans l’organisation des sociétés les plus anciennes, « ait marqué le passage d’une simple mémoire entretenue par des documents épars [...], des mythes [...] ou des monuments, à la conception et à la construction d’une véritable histoire, souvent légendaire dans ses origines traditionnelles mais capable de constituer autour du roi une trame cohérente et continue, à la faveur d’un système qui ramène tout au monarque et à la succession des rois ». Ainsi, « la monarchie offre à la fois une explication et une narration, les deux faces complémentaires de l’histoire » (in Saint Louis, Paris, 1996, p. 402). Le récit sur le roi, quelle que soit sa forme, est indissociable de l’institution royale. Il est impossible de livrer ici une bibliographie même partielle : citons D. Boutet, Charlemagne et Arthur ou le roi imaginaire, Paris, 1992 ; M. Reydellet, La Royauté dans la littérature latine de Sidoine Apollinaire à Isidore de Séville, Rome/Paris, 1981.
5 Cf. la mise au point d’A. Guerreau-Jalabert, in Sot M., Boudet J.-P., Guerreau-Jalabert A., Le Moyen Âge, Histoire culturelle de la France, t. 1 (J.-P. Rioux et J.-F. Sirinelli dir.), Paris, 2005 (éd. de poche) ; et la présentation de M. Banniard, in Lestringant F., Zink M., Histoire de la France littéraire, t. I : Naissances, Renaissances, Moyen Âge-xvie siècle, Paris, 2006, p. 9-35.
6 « Les laïcs dans l’ecclésiologie carolingienne : normes statutaires et idéal de “conversion” », Guerriers et moines (Conversion et sainteté aristocratiques dans l’Occident médiéval ; ixe-xiie siècle), M. Lauwers éd., Antibes, 2002, p. 41-92.
7 D. Iogna-Prat, Ordonner et exclure. Cluny et la société chrétienne face à l’hérésie, au judaïsme et à l’islam. 1000-1050, Paris, 1998, surtout chap. 1, p. 22. On y trouvera une bibliographie complète et à jour sur la théorie des ordres, et sur celle des fonctions, que nous ne reprendrons pas ici.
8 « L’ecclésiologie carolingienne des ordres implique la sacralisation de la hiérarchie terrestre, ecclésiastique ou politique, en tant qu’image de la hiérarchie céleste [Denys l’Aréopagite] et la reconnaissance du rôle des laïcs dans la société chrétienne, définie comme Ecclesia, sous la supervision des évêques » (R. Savigni, op. cit., p. 56-57).
9 D. Iogna-Prat, « La place idéale du laïc à Cluny (v. 930-v. 1150) : D’une morale statutaire à une éthique absolue ? », Guerriers et moines (Conversion et sainteté aristocratiques dans l’Occident médiéval ; ixe-xiie siècle), M. Lauwers éd., Antibes, 2002, p. 291-316, p. 292.
10 D. Iogna-Prat, op. cit.
11 A. Guerreau-Jalabert, Le Moyen Age, Histoire..., op. cit., p. 236-237.
12 A. Guerreau-Jalabert, « Saint Gengoul dans le monde : l’opposition de la cupiditas et de la caritas », Guerriers et moines (Conversion et sainteté aristocratiques dans l’Occident médiéval ; ixe-xiie siècle), M. Lauwers éd., Antibes, 2002, p. 265-283, p. 281.
13 Ibid.
14 A. Guerreau-Jalabert, Le Moyen âge ; Histoire..., op. cit., p. 236.
15 Cf. Ph. Ariès, L’Homme devant la mort, Paris, 1977 ; P. Brown, Le Culte des saints. Son essor et sa fonction dans la chrétienté latine, Paris, 1984 (trad. fr.) ; A. Erlande-Brandenburg, Le Roi est mort. Etude sur les funérailles, les sépultures et les tombeaux des rois de France jusqu’à la fin du xiiie siècle, Paris, 1975 ; E. H. Kantorowicz, Les Deux Corps du roi, Paris, 1989 (trad. fr.) ; M. Lauwers, La mémoire des ancêtres, le souci des morts. Morts, rites et société au Moyen Age (diocèse de Liège, ixe-xiie siècle), Paris, 1997 ; J. Le Goff, Saint Louis, Paris, 1996, p. 274 et suivantes.
16 Homo hierarchicus ; le système des castes et ses implications, Paris, 1979.
17 Formule heureuse de J. Lecointe, qui présente les travaux de L. Dumont dans son ouvrage majeur : L’Idéal et la différence. La perception de la personnalité littéraire à la Renaissance, Genève, 1993, p. 113 sq.
18 Cf. l’introduction et les notes de F. Gasparri, op. cit., t. I, pour l’importance de Hugues de Saint-Victor (cf. le Commentatiorum in Hierarchiam Coelestem Sancti Dionysii Areopagite, PL, CLXXV, 923 B-1154 C) comme relais entre l’œuvre du Pseudo-Denys (Œuvres complètes, texte traduit, commenté et annoté par M. de Gandillac, Paris, 1943) et Suger ; cf. aussi Abbot Suger and Saint-Denis. A symposium, New-York, 1986, et notamment, A. Grover, Jr. Zinn, « Suger, theology, and the pseudo-dionysian tradition », p. 33-40 ; G. Spiegel, « History as an enlightenment. Suger and the mos anagogicus », p. 151-158, repris in The Past as Text. The Theory and Practice of Medieval Historiography, Baltimore et Londres, 1997, p. 163-177 ; E. Panofsky, Architecture gothique et pensée scholastique, Paris, 1978 ; et les mises en questions de ces théories in D. Barthélemy, Chevaliers et miracles. La violence et le sacré dans la société féodale, Paris, 2004 (p. 269) et R. Recht, Le Croire et le Voir. L’art des cathédrales (xiie-xve siècle), Paris, 1999.
19 Cf. L. Dumont : Essais sur l’individualisme. Une perspective anthropologique sur l’idéologie moderne, Paris, 1983, surtout p. 35 sq.
20 Cf., pour toutes ces questions et le topos du dépôt du baudrier, Guerriers et moines (Conversion et sainteté aristocratiques dans l’Occident médiéval ; ixe-xiie siècle), M. Lauwers éd., Antibes, 2002.
21 Nous nous permettons de renvoyer à notre article : « Exercices de style : amplification de la forme et amplification de la matière dans deux chroniques des rois des Francs », Poétique de la chronique. Textes historiographiques et écriture, A. Arizaleta éd., Toulouse, à paraître en avril 2007.
22 Vie de Robert le Pieux, texte édité, traduit et annoté par R.-H. Bautier et G. Labory, Paris, 1965 ; cf. l’analyse de D. Barthélemy, Chevaliers et miracles..., op. cit., p. 267 sq. : « Helgaud en quelque sorte émascule le roi Robert » (p. 268).
23 Cf. à ce propos l’ouvrage fondamental de F. Mora-Lebrun : L’Enéide médiévale et la chanson de geste, Paris, 1994.
24 Cf. « La place idéale du laïc à Cluny (v. 930-v. 1150) : D’une morale statutaire à une éthique absolue? », Guerriers et moines (Conversion et sainteté aristocratiques dans l’Occident médiéval ; ixe-xiie siècle), M. Lauwers éd., Antibes, 2002, p. 291-316.
25 PL 159, col. 930-932//CLU 3848 (V, p. 202), v. 1106//ms Paris, BnF, lat. 11826, n° 10 : cité par D. Iogna-Prat, op. cit., p. 300-301.
26 MGH, Epistolae selectae, 2, 2. Toutes ces références sont données par D. Iogna-Prat, op. cit.
27 Il s’agit de mettre en place l’idée d’une discipline intérieure qui conduise matériellement à la contemplation des choses célestes, étant donné comme le précise Suger que l’humaine nature ne saurait se passer d’un moyen concret de passage (Ecrit sur la consécration de Saint-Denis, introduction).
28 Eloge de la nouvelle chevalerie, introductions, traductions, notes et index de P.-Y. Emery, Œuvres complètes XXXI, Paris, 1990.
29 Cf. la bibliographie à la note 18.
30 Cette recherche doit beaucoup aux pages remarquables de D. Barthélémy, op. cit., p. 261 sq.
31 F. Gasparri, op. cit., t. I, p. LIV ; cf. Cité de Dieu, V, 24 et Y. Sassier, L’Utilisation du concept de Respublica en France aux xe-xiie siècles, Bordeaux, 1992.
32 Sur cette problématique, cf. en guise d’introduction, outre la thèse fondamentale de M. Heinzelmann, Gregor von Tours. Zehn Bücher Geschichte. Historiographie und Gesellchaftskonzept im 6.Jht, Darmstadt, 1994, K.-F. Werner, « Les structures de l’histoire à l’âge du christianisme », Storia dell Storiografia, 1986, 10, p. 36-47 ; « Dieu, les rois et l’Histoire », La France de l’an mil, R. Delort éd., Paris, 1990, p. 264-281 ; « L’Historia et les rois », in Iogna-Prat D. et Picard J.-C. éd., Religion et culture autour de l’An Mil. Royaume capétien et Lotharingie, Actes du colloque Hugues Capet 987-1987. La France de l’an mil, Paris, 1990, p. 135-143. Cf. aussi A. Momigliano, « L’historiographie païenne et chrétienne au ive siècle apr. J.-C. », Problèmes d’historiographie ancienne et moderne, Pais, 1983, p. 145-168.
33 D. Barthélemy, in Chevaliers et miracles..., op. cit., a déjà relevé et commenté ses passages révélateurs.
34 A. Guerreau-Jalabert, Le Moyen Âge. Histoire culturelle..., op. cit., et les mises au point de M. Banniard, in Lestringant F., Zink M., Histoire de la France littéraire, t. I : Naissances, Renaissances, Moyen Âge-xvie siècle, Paris, PUF (Quadrige), 2006, p. 26 sq.
35 Publiée par D. McMillan, Paris, SATF, 2 vol., 1949 et 1950.
36 J.-Ch. Payen, « L’érémitisme dans le Moniage Guillaume : une solution aristocratique à la conversion chevaleresque », Les chansons de geste du cycle de Guillaume d’Orange. Hommage à Jean Frappier, Ménard Ph. Payen J.-Ch. éd., Paris, 1983, t. III, p. 181-207.
37 Même topos chez Wace, Roman de Brut, v. 4317 sq. et à travers toute la littérature épique et arthurienne...
38 D. Boutet, Formes littéraires et conscience historique, Paris, 1999, p. 267.
Auteur
Université Bordeaux III – Michel-de-Montaigne
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Fantasmagories du Moyen Âge
Entre médiéval et moyen-âgeux
Élodie Burle-Errecade et Valérie Naudet (dir.)
2010
Par la fenestre
Études de littérature et de civilisation médiévales
Chantal Connochie-Bourgne (dir.)
2003