La fenêtre, signe extérieur de richesse, instrument de travail, poste d’observation et de propagation du « bruyct » dans les villes françaises au Moyen Âge
p. 273-293
Texte intégral
1La fenêtre (fenestra), une ouverture pratiquée pour éclairer et aérer l’intérieur d’une maison ou d’un édifice public civil et religieux, peut allier, dans une résidence de notable, une « grant meson », l’esthétique au fonctionnel1. Ce n’est pas la seule percée faite dans un mur de pierre ou entre les composants en bois d’une maison à colombage. D’autres s’ouvrent dans un mur de façade sur rue, dans une surface latérale : une porte de communication, un portail, une trappe percée dans un plan horizontal, un soupirail donnant sur une cave, une lucarne au pignon d’un comble nommée alors « fenêtre flamanche », une archère à usage de défense et d’éclairage dans les maisons protégées. L’architecture n’ignore pas les fenêtres dormantes, dites en « trompe-l’œil » ou fausses fenêtres.
2Nous ne retiendrons, dans cet article, que les fenêtres des habitations privées des ouvriers et des marchands, un champ d’analyse suffisamment vaste pour éliminer, sans regret, les riches fenestrages des monuments, mieux perçus dans leurs différences d’expression, leurs structures et leur richesse décorative.
3L’information provient de sources dispersées : des emprunts aux textes littéraires classiques, des aveux ou déclarations de biens dans un but fiscal, des inventaires après décès, des actes de vente ou de partage, des extraits des minutes notariées, des devis, des vestiges archéologiques.
4La fenêtre sera successivement, dans ce dossier, un élément architectural de reconnaissance sociale, un lieu de travail habituel ou imposé des boutiquiers et des artisans, l’expression de la sociabilité ou de l’asociabilité citadine.
La fenêtre, élément de reconnaissance sociale
5Les ouvertures des demeures élémentaires d’artisans, de boutiquiers, de petits marchands apparaissent au détour d’une brève allusion dans un acte, d’une description de bâtiments publiques et privés2, d’une monographie urbaine3, des actes d’un congrès archéologique régional, d’articles sur des logis aussi exceptionnels que la maison d’Adam à Angers, que celle de la place du Change à Nantes, que les beaux logis à panneaux de bois sculptés de Saint-Brieuc. Le patrimoine, espacé dans le temps, à partir du xiie siècle à Auch avec la Maison Fedel, à Figéac, à Dol de Bretagne, à Cluny ou à Cordes, les beaux hôtels des xve et xvie siècles d’Angoulême, de Morlaix, de Montpellier, de Sarlat, de Toulouse, des villes du Limousin, du Val de Loire, de Provence... offrent un choix diversifié4.
6La structure matérielle de la fenêtre des derniers siècles du Moyen Age s’est enrichie d’éléments qu’il convient de rappeler brièvement avant d’aborder son rôle social proprement dit5.
7Les percements extérieurs, situés ici entre les piliers et les colombes d’une maison en bois, délimités là par des montants et un linteau en pierre de taille (Aix), apparaissent souvent sous une grande arcade en plein cintre ou en tiers-point. On les découvre à tous les étages : unique au rez-de-chaussée (Auxerre, Montpellier), à côté de la porte d’entrée, dérobée au regard par l’avancée du premier étage sur des piliers ou par des arcades (Albi), double, triple, voire quadruple aux autres niveaux. La symétrie et la régularité des percements à l’échelle d’une façade ou d’une rue, observées dans certains cas (Cordes), sont loin d’être respectées ailleurs où les pleins et les vides ne se répondent pas forcément d’un niveau à l’autre (Montpellier).
8La forme habituelle d’une baie d’ouvroir au niveau de la rue et de chambre aux étages est rectangulaire ou carrée. Elle est surmontée d’un linteau en bois ou d’une dalle de pierre monolithique qui peut dépasser les 2 m de long (Montpellier), d’un arc de décharge surbaissé, cintré dans les maisons romanes ou en tiers-point, d’un pignon aigu plaqué d’ardoises ou de tuiles plates. Des montants verticaux ou horizontaux, deux ou trois meneaux et croisillons compartimentent l’ouverture, forment des croisées et des demi-croisées qui tendent à se généraliser à la fin du Moyen Age. Les plus belles ouvertures, celles des maisons de notables, ajoutent, à l’habituel, des moulures toriques, de fines colonnettes à chapiteaux à feuillage, un oculus circulaire dans un tympan que surmonte une légère arcature. La qualité de la pierre, sa tonalité, ici du granit aux coloris variés (Dol), là de la craie ou du calcaire aussi blanc que le marbre de Paros (Caen), ailleurs des briques au chaud coloris, du bois des châssis, de fréquents enduits, aujourd’hui disparus, font aussi la différence.
9La fenêtre de façade, sans rôle porteur, est fréquemment surmontée d’un vaste arc de décharge inclus dans la maçonnerie ou d’une grande arcade en saillie, entre des montants de pierre ou de bois. Un des plus beaux spécimens connus en Bretagne est la maison des Petits Palets à Dol. Cet habitat de notable, tout en granit, offre au regard des proportions harmonieuses adaptées au paysage de la Grand’Rue de la cité épiscopale. Les arcades en plein cintre du rez-de-chaussée, décorées de chevrons brisés et de motifs en dent de scie sont du plus heureux effet. L’étage donne sur la rue par une baie également cintrée, ornée de quatre feuilles6. A l’intérieur de la pièce, éclairée par la lumière du jour, la fenêtre comprend également plusieurs éléments distincts. Elle peut comporter une embrasure, avec un enfoncement qui reçoit l’ouverture et une allège ou partie pleine sous la fenêtre entre l’appui et le plancher. Le couloir ainsi constitué est surmonté d’un linteau ou d’une courte voûte en berceau cintré ou brisé. Si la baie l’autorise, si le mur est assez épais, l’embrasure se transforme en une sorte de salon pourvu de bancs où le maître de céans, ses parents et amis aiment se réunir pour deviser, regarder le passant.
10La fenêtre contribue, avec la nature des matériaux (pierre, bois, torchis, chaume), l’aspect d’ensemble et la localisation de la maison et du terrain, du « fons », de la masure, du « tènement » sur lequel s’élève l’habitation, à identifier et à estimer, de l’extérieur, la valeur d’une habitation et le niveau de vie de ses occupants. La fortune des uns, la misère des autres, s’expriment aussi dans le vocabulaire courant qui distingue la grande de la « michnie » (méchante) baie7.
11Le nombre de fenêtres est révélateur du niveau social de l’occupant. Les logis populaires, fragiles, bas et étroits comme les chaumières à la campagne, sont peu et mal éclairés. Les ouvertures sont restreintes, au niveau de la rue, à une unique baie simple ou aménagée sous une arcade (Dol, Limoges), et à un ou deux percements, placés entre les montants du colombage, aux étages. Des passages, chemins ou allées, existent parfois entre les blocs d’habitations et autorisent alors un éclairage latéral réduit. Des appentis d’arrière-cour, des combles simples ou constitués par deux toitures perpendiculaires, éclairés par des lucarnes à petit pignon, des caves, servent aussi de logements à de pauvres hères, à des compagnons et à des domestiques. Ces tanières de poitrinaires ne sauraient être confondues avec des caveaux à voûtes d’ogives, lieux de réception à la mode dans les milieux aisés de Bayonne, de Genève ou de Provins ! La lumière pénètre davantage, surtout à la fin du Moyen Age, dans les « ostels » des notables, dans ces immeubles à étages en encorbellement qu’on appelle parfois tours (Besançon), « maisonnements » (Dijon), manoirs (Vannes), « tènements sur rue » (Rouen)... Les fenêtres, doubles, triples, voire quadruples par « estaige ou mansion » se font plus fréquentes et desservent les pièces de fonction (une étude de notaire) et les chambres individuelles, suprême luxe dans un monde de promiscuité.
12L’aspect et les dimensions de la fenêtre changent aussi du tout au tout selon le niveau de fortune. Là où la promiscuité et l’inconfort sont subis, on restreint par nécessité les dimensions des ouvertures. La fenêtre d’un habitat populaire n’est qu’une petite ouverture carrée ou rectangulaire percée dans un mur de torchis ou dans une façade formée de panneaux de bois. Des études mentionnent à Rouen, à Hyères, à Aix-en-Provence, à Montpellier des ouvertures d’un mètre à 1,65 m de haut, de 50 à 65 cm de large. Ces dispositions diminuent encore côté allée ou dans un galetas.
13A l’inverse, les ouvertures des maisons cossues sont plus larges ou sont cumulées. L’afflux de la précieuse lumière pourrait donc être interprété comme un signe d’aisance, si nous ne prenions garde de tomber dans une systématisation abusive. La réduction des dimensions peut être, en effet, le résultat d’exigences fiscales dans les régions où existent des impôts sur les façades (en Savoie), le fait des matériaux utilisés et de la qualité du bois des châssis qui ont tendance à jouer quand ils sont trop grands, la conséquence de l’emploi de colombes et de torchis. Pensons aux maisons en pan-de-bois de Saint-Brieuc, du Centre-Ouest, du Val de Loire, de Picardie qui sont constituées d’une armature en pièces de charpente emboîtées, le « carpentage » de Cambrai, dont les vides sont comblés par de la terre ou des briques. Des baies étroites répondent à la rudesse du climat, aux rafales brutales de vent chargé d’humidité ou, à l’inverse, limitent une forte luminosité, atténuent une chaleur estivale8.
14Les fenêtres des maisons des notables se sont enrichies et diversifiées. On observe la présence d’élégantes baies trilobées en plein cintre ou en tiers point, séparées par de fines colonnettes à chapiteaux, dans nombre de cas de beaux hôtels particuliers : rue Traverse-du-Paradis à Hyères, rue des Forges à Dijon, à Montpellier.
15Les fenêtres compartimentées par des meneaux et des traverses se coupant à angle droit apportent une singulière amélioration dans la distribution de l’éclairage. Les demi-croisées, croisées, croisées et demie apparues dès le xiiie siècle, deviennent ensuite courantes et les textes évoquent davantage de « fenestra crosata, de fenestra a croylla ». Chaque région conserve, il est vrai, ses particularités qu’il serait trop long de recenser (Rouen).
16L’hégémonie de la fenêtre à croisée s’est accompagnée de surcharges décoratives à l’époque du gothique flamboyant9. L’esthétique rejoint l’utilitaire, à une époque où les numéros de rues n’existent pas. L’identification d’une maison se fait par une enseigne, une « ymaige » peinte ou sculptée, un écu, un blason installé dans un cartouche et par une infinité de détails et de variantes décoratives. Des linteaux monolithiques de plus de deux mètres de long, de fines modénatures, un cintré sculpté, des arcs trèflés, quadrilobés, des tympans ajourés offrent un répertoire décoratif qui multiplie, avec le Gothique flamboyant, les efflorescences, les gâbles, les pinacles, les choux, les chardons, symboles d’éminence sociale. Là encore, des variétés régionales, ont laissé jusqu’à un nom avec la fenêtre limousine ornée d’une moulure particulière, propre à cette province du Centre Ouest. La maison « romano-gothique » de la rue Croix-Baragnon à Toulouse, est connue pour ses bandeaux moulurés sculptés à l’appui des fenêtres. L’œil averti y voit des animaux musiciens, des loups, des moutons, des oiseaux. La Bretagne a su préserver de belles façades de maisons sculptées qui livrent des « images » du Christ, de la Vierge, de saints, de sauvages, de fous, de musiciens (Morlaix).
17Les baies ne sont pas toujours ouvertes directement sur un pan de mur. Elles s’inscrivent dans un avant-corps, un auvent, un avalvent (Cambrai), une loge empiétant sur la rue. Une avancée, réduite en général à un simple passage couvert, devient un proche (porticum) à Annecy, à Montpellier. Cette galerie donne de plain-pied sur la rue, exceptionnellement à l’étage (un cas, rue des Forges à Dijon). Des ouvertures étroites, pareilles à des meurtrières, éclairent des tourelles d’escalier à vis, des dépendances.
18Une fenêtre a besoin d’être protégée contre les méfaits du vent et de la pluie, contre un soleil éblouissant, une température trop élevée ou contre les intrus. De gros volets, les tampos de la maison Fedel d’Auch, en bois plein ou percé de fentes, munis de verrous ou de barres coulissant dans des rainures, sont souvent le seul moyen de protection des ouvertures extérieures des habitations populaires. Ce système commun, dit à coulisse, commence déjà à céder la place au petit volet ouvrant, à charnières, utilisé d’abord aux étages, pour de petites baies. Des grilles de bois ou de fer, des sortes de treillis métalliques, sont parfois mentionnés dans les devis et assurent un minimum de sécurité. Les volets seuls présentent le double inconvénient de mal protéger du froid et de plonger, même s’ils sont ajourés, la maison dans l’obscurité.
19La translucidité des ouvertures peut être assurée par du parchemin, de la toile cirée ou du papier huilé ; on parle alors de « verrières de papier » à Paris, de « toiles verrines ». L’usage généralisé du verre potassique, produit dans des verreries rurales, forestières à base de sable et de cendres végétales, alimente les discussions10. Certains pensent qu’il est récent dans le privé, qu’il a longtemps été réservé aux grands panneaux des monuments publics. A l’appui de cette restriction se trouvent le coût très élevé de fabrication du verre, la rareté du métier de verrier et des fours. Les recherches actuelles tendent pourtant à vulgariser l’usage du verre à la fin du Moyen Age du moins dans la partie supérieure de la fenêtre, le bas restant opaque, et aux étages. Il s’est répandu avec la généralisation de la croisée quadripartite, le bien-être, la lutte contre le froid et les courants d’air. D’autres motivations mériteraient d’être considérées : le vitrage est le moyen plus efficace de se prémunir contre les mauvais rapports de voisinage, de se protéger des regards indiscrets et des nuisances. Des allusions à du « verre à voire dormant » tendent à se multiplier dans les documents du xve siècle en même temps que la pose de baies, d’impostes et de compartiments, l’installation par un menuisier de châssis en bois et de feuillures ou de rainures indispensables, la fourniture par les pintiers de plomb pour sertir. Des contrats de locations rouennais stipulent même que la vue du preneur ne saurait être empêchée sous réserve que la fenêtre soit « verrée11 ».
La fenêtre lieu de travail familier
20« La fille d’une bourgeoise qui demeurait tout près de l’Oise et qu’on nommait dame Mahaut vendait des aulx et des oignons à sa fenêtre », ainsi débute le fabliau « le prêtre et Alison » de Guillaume Le Normand.
21Travailler à la « veue du peuple » devient, chez certains professionnels, une obligation corporative.
22Cette disposition n’est pas générale, ne concerne pas les ouvriers du bâtiment qui exercent au grand air, les travailleurs exclus des quartiers aisés par souci d’hygiène (les tanneurs, les forgerons), ou consignés sous les halles (les bouchers), sur les ponts (les poissonniers d’Annecy ou de Rennes), sur le quai d’un canal12.
23Le livre des métiers du prévôt royal Etienne Boileau, qui codifie les usages et réglementations d’une centaine d’associations parisiennes sous le règne de saint Louis, oblige un maître lormier ou fabricant de mors, de brides, d’étriers et d’éperons, un tailleur, un fabricant de boucliers d’archal ou un tondeur de draps à œuvrer et à vendre « sur rue », à « fenestre ouverte et à huis entrouvert » ou encore « desoubz à la veue du peuple13 ».
24D’autres règlements empêchent un vendeur d’interpeller un acheteur arrêté devant la fenêtre d’un confrère ; cet interdit est justifié à une époque où l’essentiel des transactions se fait à l’extérieur de l’atelier-boutique, devant le présentoir.
25Les statuts visent à empêcher toute concurrence déloyale, luttent contre le monopole et l’accaparement, protègent le label d’une profession et le consommateur. Produire et commercialiser « à vue d’œil » est donc, avec « l’enseigne » ou la marque d’identification de l’objet fabriqué, une garantie de qualité « bonne et loyalle », une assurance contre les malfaçons « dommageuses14 ». Des procès parisiens, remettant en cause l’exercice de la coutellerie, montrent comment des artisans, peu scrupuleux, économisent sur le métal argenté des viroles, sont capables de faire passer des manches en os pour de l’ivoire, d’écouler des lames sans queue ni soie, en métal cassant, à peine polies, directement liées au manche en bois blanc peint par du ciment ou mal emmanchées par des valets sans qualification15.
26Observer l’artisan au travail est aussi pour les gardes et contrôleurs du métier, les représentants de la justice consulaire en Languedoc, les percepteurs d’impôts, un moyen d’empêcher le travail au noir, les ventes illicites ou tout simplement une facilité pour percevoir l’argent des taxes16.
27L’activité, associée à une fonction résidentielle et à une fenêtre, est bien représentée.
28Des miniatures des manuscrits de la Bibliothèque Nationale ou de l’Arsenal, des vitraux (Chartres), des croquis à la plume, des sculptures montrent le maître, son épouse, un valet, à la fenêtre de l’ouvroir ou « ouvreur », de « l’obrador » dans le Sud-Ouest, de la « boctique, boticle, butica, eschoppe, salle ». Les dessins du célèbre Livre des Fontaines de Rouen de J. Le Lieur montrent des successions de baies sous arcs, qui, à défaut d’être comparées aux vitrines de nos magasins inconnues au Moyen Age, ont un usage évident. A l’arrière plan de beaucoup de miniatures, on entrevoit, dans un tissu serré de ruelles, des habitations à pignon sur rue, à encorbellements ou à avancées sur piliers, des échoppes, une église, un chantier, une rue pavée et des chalands.
29La plupart des locaux pluri-fonctionnels ne sont guère étendus. Un bloc d’habitations du Grand-Pont de Paris « maisonné » abritait au xve siècle, entre autres, trois ateliers dont l’un avait deux toises de long sur une toise et demie de large y compris la saillie sur le pavé. Les rares indications de dimensions proviennent de livres-rentiers ou censiers, de registres de toisage ou de toisé (impôts sur les façades en Savoie), d’estimes (Toulouse)17. Les maisons élémentaires à pignon sur rue, tout en longueur, laissent peu de place à la salle principale ou « camera bassa » d’un rez-de-chaussée, confondu d’ailleurs au Moyen Age avec le premier étage. Ce lieu de production polyvalent, tour à tour atelier, échoppe, chambre à coucher, parfois voûté (Angoulême), plutôt charpenté prend jour sur rue et communique avec l’extérieur par un « huys ou huisserie » ou par un couloir étroit qui peut avoir moins de 2 m de large. Nous avons calculé, à partir des données chiffrées contenues dans des aveux et dans des registres fiscaux rennais ou chambériens, que si une pièce principale à usage professionnel peut atteindre 15 à 20 m2, des écarts surprenants existent avec des superficies utilisables limitées à 5 ou 6 m2, dignes du kiosque d’un actuel marchand de billets de loterie18 ! A contrario, les quelques propriétaires de maisons avec dépendances, de 150 à 200 m2 (les étages compris) sont des gens heureux. Ils disposent alors d’une cave voûtée avec soupirail sur rue (Angoulême, Espalion), « d’aisances, retraits ou privés » (latrines), d’un cellier ou d’un débarras nommé « seulle » en Normandie, « sotol » à Albi, « sotulus » en Lyonnais, d’une courette arrière, le « patu(s) » de Narbonne ou de Montpellier, pour stocker des matières premières et des marchandises, des cuves et des tréteaux, du bois. Disposer d’un local de production spécifique, d’une « chambre de l’ouvraige » ou un « ouvreur de l’armurerie » chez un potier d’étain ou un armurier dijonnais du xve siècle, est un luxe. Des minorités de privilégiés possèdent une cuisine (coquina) à l’arrière de l’ouvroir avec puits, évier et conduit d’évacuation des eaux usées (Montpellier), une « chambre basse » à Auxerre. Elles ont aussi une ou deux chambres au « second étage », qui est en réalité notre premier au dessus du rez-de-chaussée, accessible soit de l’intérieur par un escalier en colimaçon soit par un « vir, eschalerium ou degré » extérieur (Rouen). Ces chambres qui peuvent être correctement éclairées et pourvues de chauffe-pieds font office de logement privé où « gisoient » les maîtres et leurs enfants... à moins qu’elles ne deviennent un endroit pour stocker du matériel ! Dans les grandes villes, de véritables immeubles à encorbellements prononcés existent à la fin du Moyen Age et comportent des étages supplémentaires, nommés « sol (1) iers » en Armorique, éclairés par des fenêtres étroites ou des lucarnes. Ils sont aménagés en chambres hautes (« camera alta » en Lyonnais) plafonnées, en chambres sous comble ou en galetas, pour de jeunes domestiques ou sont loués à de jeunes couples d’ouvriers19. Des maisons d’Albi ont la particularité d’avoir un second niveau, le « solelhou », qui fait office de grenier ouvert sur l’extérieur où on entreposait des récoltes, du bois, du foin20.
30C’est dans cet espace réduit de quelques m2 que vivent, s’activent, se supportent les membres d’une famille et ses employés. Il arrive même qu’une boutique et qu’un logement soient partagés par deux couples21.
31On ne peut qu’être surpris, dans ces conditions, par le nombre des objets et des meubles renfermés dans si peu d’espace et aperçus depuis la fenêtre22.
32Un atelier contient généralement, derrière la fenêtre, un établi de noyer ou de chêne fixe, qui atteint au mieux 3 à 5 pieds de long (1 m à 1 m 5) chez un corroyer parisien, une table démontable (tréteaux) ou non (mensa), un ou deux escabeaux, des « formes », des bancs, « banca ou banchers », une ou des chaises. Dans un angle, se trouve un lit, « grabatus ou chaliz » en planches, une simple paillasse ou un banc à coucher. Quand l’espace l’autorise, l’artisan dispose d’un présentoir, d’un dressoir à plats, d’étagères remplies de pots ou d’autres objets, d’une huche à pain, de coffres, « bahuts ou arches » en bois ou en cuir bouilli, à tout venant ou spécialisés pour ranger les vêtements, les petits outils, garnis de serrures. Les armoires, « aumoires, armaires » ou buffets en noyer, en sapin, en chêne, commencent à faire leur apparition dans des maisons aisées (Rouen en 1449).
33Le petit matériel, visible de la fenêtre, se limite à quelques boîtes, casses, casotes à usage de cloutiers, de chaussetiers, de merciers, aux outils courants, à une aune en bois à mesurer le tissu, à des poids et à une balance ou « fléaux », éventuellement à un écritoire, à un tablier de bois, à un « conteur » pour faciliter les opérations. Des professions ont besoin d’une forge portative (un serrurier), d’un creuset pour un orfèvre, d’un métier à tisser pour un texier.
34Devant les problèmes quasi insurmontables que posent les conditions de travail et de stockage, l’artisan a tendance à accumuler devant la « fenêtre marchande » qui occupe l’intervalle entre deux poteaux, « hors de sen huys », en façade sur une tablette devant le volet, à même le pavé de la rue. Il y met de tour : des matières premières, des produits finis, des outils, des baquets, des « calquiers ou calquières » (chaudières) à l’usage des tanneurs, des claies ou « pelains » pour sécher les peaux et les toiles23...
35L’aménagement permanent, empiétant sur la rue, comporte une tablette sous la baie, un banc de pierre ou de bois appelé « bansche » dans le Midi, « tréteau, dressoir, buffet, compteur ou comptouer » à usage commercial. On le voit très bien sur certaines miniatures telles que le Livre des Ethiques et Politiques d’Aristote à Rouen (1454). Le vantail inférieur des fenêtres, le « taulié » à Rodez s’abaisse pour servir d’étalage. La partie supérieure se relève comme une fenêtre à tabatière (Paris, Toulouse) que rappelle la formule utilisée à Douai : on « retraioit les étaux ». Le seuil a aussi une utilité commerciale. Tous les produits ainsi exposés sont bien tentants. Villon fait allusion aux mendiants tous nus qui « pain ne voient qu’aux fenêtres24 ».
36D’autres constructions parasitaires sont plus envahissantes encore que les bancs. On découvre des sortes de baraques en bois, des « cabornes » en Savoie, des « avant-soliers, auvens, alleurs » (Rouen), appentis, « clouyères » (Rouen, Rennes). Ils s’incrustent sur les façades des maisons ou à l’étage, encombrent les impasses et les cours, multiplient les obstacles qui rendent le passage des charrettes et des piétons hasardeux. Un texte rouennais la définit ainsi :
aussi sur lad. voye et rue est basty une petitte maison de peu de valleur et partye de quelques aultres qui anticippent sur icelle, mesmes environ le melieu de lad. rue y a ung certain petit bastiment qui traverse en forme de porche et va l’on de maison en l’aultre, qui corrompt l’air et la veue de ladite rue et autres maisons voysinnes comme ainsy en plusieurs autres lieux et endroictz de lad. ville sur semblables passages et destrtoictz qui peuvent apporter tel et semblable preiudice au public25.
37Ces bâtis sommaires, qui ressemblent à des « buffets » où des aubergistes vendent du vin (Douai), constituent de véritables galeries, visibles sur les miniatures.
38L’empiétement des étals sur la rue qui s’ajoutent aux étais des bâtiments branlants, aux tas de fumier et de bois, prend de telles proportions que les seigneurs justiciers et les municipalités sont obligés parfois de formuler des interdits et de sévir. On a vu à Rouen une particulière, la veuve Locoq, entailler en 1448 un angle du beffroi pour agrandir sa boutique ! Le 15 mai 1394, le prévôt de Paris oblige les marchands à débarrasser de toute urgence les chaussées des nuisances26.
39L’exposition à la fenêtre a des avantages mais aussi bien des inconvénients.
40Les rayons du soleil sont donc les bienvenus dans les atmosphères croupissantes des ateliers où suinte l’humidité. Les maisons d’artisans sont en général mal chauffées. Elles se contentent, au pire, d’un simple brasero, au mieux d’une petite cheminée du genre « chauffe pié » (dont la hotte peut être en bois revêtu d’une couche de plâtre comme à Chambéry). On connaît pire encore : les caves habitées, véritables mouroirs, les appentis situés dans les arrière-cours. L’obscurité tombe vite dans ces pièces. Travailler derrière une baie est une obligation à une époque où les rues sont des couloirs, où l’éclairage est réduit par les encorbellements et où les lunettes n’existent pas. On travaille, normalement, du lever du jour « à l’eure de soleil levant » ou « de biau jour », quand « la guete corne au matin » jusqu’au coucher du soleil. Une ordonnance bretonne du duc Jean III déclare en 1336 :
(Nous) avons ordonné que touz ouvriers, de quelconque condicion que ilz soient, commenceront leur journée à souleill levant et acheveront à souleill couchant sans en exir27.
41Il n’est pas question de prolonger la nuit pour des raisons de sécurité et un contrôle nocturne se pratique à travers la fenêtre. Les statuts tiennent compte, dans ces restrictions horaires, des décalages entre l’hiver et l’été et des particularités de chaque métier et quelques exceptions sont tolérées. Une mesure consulaire de Montpellier de 1372 destinée à éviter les accidents oblige les bouchers à surmonter les étals nécessaires à la découpe de chandelles de suif, allumées de l’heure des vêpres jusqu’au coucher du soleil et le matin jusqu’à prime28. Des inventaires dijonnais ont permis à Fr. Piponnier de reconstituer du matériel d’éclairage utilisé dans les boutiques : des chandeliers de fer suspendus, des lanternes de verre, des falots.
42Mais œuvrer devant une fenêtre pose inévitablement des problèmes d’hygiène qu’engendrent la poussière, la boue, les mauvaises odeurs qui proviennent de la rue ou de la salle en terre battue. Pour s’en protéger, les artisans peuvent tendre des toiles ou auvents en tissu blanc ou coloré, des planches ou ais en bois au dessus de leurs ouvroirs (les drapiers), solution pratique mais qui contribue à restreindre l’éclairage. Certains, tels que les drapiers de Paris, en abusent à ce point qu’on les accuse de vouloir masquer au regard la qualité et la longueur des étoffes.
43L’évacuation des eaux usées est loin d’être partout résolue et rares sont les habitations populaires qui disposent d’un conduit relié aux égouts municipaux comme le cas se rencontre à Riom ou à Saint-Pol-de-Léon. Que fait-on aussi des résidus, des copeaux ? L’examen des premières mesures destinées à combattre la pollution montre qu’il est dans les habitudes du temps de les abandonner sur le pavé, devant son perron ou sa fenêtre, dans le caniveau central ou dans les gazilhans ou rainures au pied des façades, en attendant qu’un torrent provoqué par un orage, ne dégage la voie29.
La fenêtre, lieu de sociabilité ou d’asociabilité
44Le fenêtre est, avec le puits public, la maréchalerie, la forge, le lavoir ou la fontaine, un lieu de sociabilité où chacun peut observer, causer ou babiller, médire ou colporter, injurier ou chaparder. Il paraît même qu’on se suicide fréquemment par la fenêtre30.
45Le discours littéraire médiéval que font découvrir les farces, les contes des fabliaux, des extraits d’archives comptables ou judiciaires fournissent la matière indispensable sur un sujet encore peu connu de la vie familiale et collective. Le regard de l’autre, la curiosité sont naturels à une époque où chacun côtoie ses semblables dans des cadres matériels et sociaux étriqués.
46Le manque d’intimité est la conséquence inévitable de l’étroitesse des logements, de l’entassement des familles. Tout se fait en public, y compris parfois les fonctions intimes. Les « pots à pisser » sont vidés par les fenêtres au risque d’arroser les passants, voire une personnalité comme saint Louis, un jour qu’il se rendait à la messe en catimini. Ce n’est pas un hasard si la législation urbaine s’intéresse tant au problème, à Avignon dès 1243 !
47Les distractions sont très rares en dehors des jours de fête, du passage du crieur d’eau, de la marchande de légumes ou « d’oublies » (gâteaux), du clocheteur des trépassés, de l’étuvier, des « banniers » ou des trompettes qui annoncent un événement imprévu31. Observer son voisin, le passant, jaser est une façon de passer le temps. Rien de ce qui se passe dehors n’échappe aux yeux et aux oreilles d’un observateur, solidement ancré à sa fenêtre. L’ouverture permet même de se livrer à quelques plaisanteries de mauvais goût comme uriner sur les passants32.
48La curiosité sert aussi la collectivité à travers les innombrables enquêtes qu’organisent l’administration et les tribunaux. Il est usuel d’interroger des locataires âgés, des gens qui savent voir et enregistrer. Une enquête rennaise de 1468 pour fixer avec précision les « barres » ou barrières où seront levés les octrois fait appel aux riverains des endroits choisis33. La répression de crimes, de vols, de viols nécessite aussi l’appel à témoins. Le lendemain du 23 novembre 1407, jour de l’assassinat de Louis d’Orléans, frère de Charles VI, par les sbires du duc de Bourgogne Jean sans Peur, plusieurs riverains des rues Barbette et Vieille-du-Temple sont interrogés par les enquêteurs du Châtelet, dont une certaine Jaquette, femme du cordonnier Jean Giffart. Elle a tout vu de sa fenêtre, crié même « au meurtre » et parle des hommes masqués qui frappaient un riche seigneur qu’elle n’a pas reconnu sur le coup34.
49Spéculer sur la curiosité du peuple est une bonne affaire quand on possède des « vues à louer ». La foule s’y agglutine tellement que des tragédies se produisent : en 1504, une dizaine d’échoppes des Petits Changes de Rouen s’effondre, le jour de la fête Saint-Romain, sous le poids de la foule perchée pour jouir du spectacle. L’entrée solennelle d’un roi, d’une personnalité, un enterrement princier ou épiscopal, provoquent un afflux de monde dans les rues et dans les maisons et chaque fenêtre reçoit son lot de spectateurs35. Jusqu’en 1939, les exécutions publiques, ces spectacles cruels qui se veulent moralisateurs, précédés d’un parcours cérémonial, permettaient aux propriétaires d’immeubles de tirer quelques sous de ces manifestations théâtrales pour l’exemple où se mêlent la curiosité malsaine, le plaisir sadique et la peur morbide.
50La fenêtre est fréquemment le point de départ d’une intrigue amoureuse, l’endroit où se fait la rencontre, où se déroule la cour, un moyen d’accès à la couette ou une possibilité de repli salvateur. « Il est entré par la fenêtre en homme qui connaît les êtres et il va vers le lit, se déchausse, enlève braies, cottes et chemise », ainsi débute la tendre liaison d’une bourgeoise et de son amant pendant que le mari est plongé dans un profond sommeil réparateur dans le fabliau « la dame qui fit entendre à son mari qu’elle rêvait36 ». La fenêtre, par où « à grande allure (fût-ce à tort ou bien à raison) son bel ami entre », s’ouvre donc sur la turbulence du foyer, sert la confrontation de la sempiternelle trilogie : le vieux mari riche, l’amant, un célibataire plutôt jeune et beau, clerc ou chevalier, et la belle friponne qui s’ennuie à mourir au foyer, sensuelle insatisfaite, méprisante pour les performances d’un époux imposé37.
51Les conversations bruissent d’une fenêtre à l’autre, d’étage à étage s’il s’agit d’un immeuble. Les langues y caquettent, musardent, habillent, des langues charitables ou vipérines, des langues véridiques ou mensongères, qui vous déshabillent et mettent à mal une « bonne renommée » en moins de temps qu’il ne faut. Des propos sont nourris d’actualité ; ils sont liés aux préoccupations politiques, militaires, économiques, religieuses du moment. C’est l’histoire de la Guerre de Cent Ans et des règnes qui est refaite à l’échelle des groupes et des individus, sensibles aux menaces de conflit, aux déplacements de troupes, aux paix qui se veulent toujours perpétuelles, aux « joyeuses naissances à la cour », aux mariages, à la mort de Monseigneur ou de Madame son épouse, à la venue de l’évêque... L’exactitude n’est pas forcément de rigueur et beaucoup de peurs collectives ne reposent finalement sur rien38. Les épisodes de la vie locale alimentent les conversations et les passions : les choix des magistrats, des échevins, des jurés, des syndics, les mesures prises en conseil, les décisions de justice, les nouveaux interdits etc. L’étude de la série presque complète de comptes municipaux de Rennes, entre 1418 à 1500, permet de saisir, année par année, les sujets brûlants d’actualité. On y découvre pêle-mêle l’accouchement de la femme du capitaine, le tonneau de vin qui lui fut offert à cette occasion, la nature et le prix du cadeau fait au duc ou à la duchesse à leur dernière « grande entrée », aux ambassadeurs de « Constantin Noble » (Constantinople) ! Toujours à Rennes, une sombre affaire de viol alimente les conversations à la mi-juin 1466 : le « cas de force » est d’une gravité exceptionnelle puisqu’il met en scène deux fils de bonnes familles et un jeune Espagnol en goguette, une adolescente Margot violée et menacée de mort et un jeune dominicain, témoin à charge du crime39. Gageons que les conversations courantes ne dépassent pas les limites des affaires de voisinage, les joies et les peines familiales, les misères matrimoniales des uns, les exploits extra-conjugaux des autres...
52Les fenêtres sont, avec le pavé, le lieu d’échange de paroles « rumoreuses et injurieuses », de propos croustillants ou fort peu amènes destinés à humilier et à meurtrir. La violence verbale à la fenêtre est plus le fait des femmes, assimilées, dans les farces, à des pies que des hommes. C’est un thème favori de récits, De la nourrice et la chambrière, Du pèlerinage de sainte Caquette, etc. C’est aussi la raison d’un procès. Perrine Sagette de Saint-Maixent en Poitou devient redoutable quand elle s’enivre. Découvrant de sa fenêtre un voisin, elle lui crie : « Chardeneuf, ribaud, rouffian, maquereau, vendeur de chair vive aux moines40 ».
53Une première catégorie d’échanges de propos aigres-doux trouve son explication dans la promiscuité professionnelle ou dans les interdits formulés dans les statuts corporatifs. La farce de l’Antéchrist et des trois femmes est un modèle de prise de bec entre deux poissonnières qui échangent, de leurs étals, des propos aigres-doux sur la fraîcheur de leurs poissons puis passent leur colère sur une clientèle pingre et sur le sergent surnommé l’Antéchrist. Ce type d’altercation où se mêlent les piques et les injures grossières, nous le découvrons dans la réalité quotidienne de plusieurs villes armoricaines : à Quimperlé avec un groupe de marchandes de lait et de poissonnières dont les propos peu châtiés heurtent les oreilles pudibondes41. D’autres sujets d’esclandres accompagnés d’une foison de cris et de vitupérations naissent des soupçons de vol à l’étalage, du soupçon de fraude, de saleté, d’incompétence. L’épouse d’un boulanger de Saint-Dizier crie au scandale parce que son mari était suspecté de faire du mauvais pain et déclare à tout venant : « veez qu’il vaut ce pain, qu’il ne soit bon et de bone fason42 ».
54Commères et compères ont tout le loisir de dénoncer, de leur poste d’observation, les maux de l’époque, d’agresser le ribaud plus doué pour la « lescherie » en taverne que pour le travail, les « folles de leurs corps ». Jean de Meung n’a-t-il pas déclaré dans la seconde partie du Roman de la Rose que « l’homme qui est robuste doit gagner sa vie en travaillant de ses mains » ? Rutebeuf dans Le Dit des ribauds de Grève, Villon bien sûr ont laissé des témoignages d’une cruelle réalité43.
55Quant au sens profond, à la subtilité des injures échangées entre voisins ivres de haine, il est inutile d’insister. On passe du courant, du genre « savate, coquinaille, larron »... à l’intolérable avec toutes les atteintes à l’intégrité familiale et morale, telles que « bastard, cocu, vieille ordouse, yvroignes, meretrix, putainier » ou encore « fille de moine ». Un individu tue son voisin dans une ville bretonne en 1405 parce qu’il « luy avoit dit injurieusement qu’il congnoissoit mieulx sa femme que luy44 ».
56Entre les trois mots clefs, le potin, le ragot et la rumeur existe une différence d’intensité, de portée et de durée. Le premier reste limité dans le temps et dans l’espace. Le second fait davantage de mal et ruine une réputation. Le troisième que le Moyen Age appelle encore « bruyct », « nouvelle », est redoutable par ses effets immédiats et ses conséquences durables, se nourrit de bêtise et de crédulité, circule partout dans les lieux publics, dans la rue, dans une région ou dans un pays tout entier, et a des conséquences si traumatisantes qu’elles peuvent pousser la victime au suicide.
57Médire de son prochain est commun à tout microcosme. Les fabliaux en ont fait un thème favori, l’ont exploité, sont allés jusqu’à baptiser du nom de Ragot, un mendiant à la langue aussi bien pendue que celles de Musarde et Babille, deux lingères du Palais, exerçant à domicile des activités que la morale réprouve mais qui leur donnent l’occasion de fournir quelques précisions sur la taille des attributs de leurs clients45. Il est question de caquetage dans le débat de la Nourrice et de la Chambrière : Jaquette la Chambrière reproche à la Nourrice de médire d’elle et très vite le ton monte ; les deux commères s’injurient et en viennent aux mains. Intervient alors le valet Johannes qui veut les séparer. Les harpies se réconcilient sur son dos et lui distribuent de solides horions. Tout d’achève finalement autour d’un pot de vin46. Les hypocrites obligeants, qui colportent des insanités sur leurs voisins, ne souffrent pas d’une « taciturnité de la langue » qui les obligerait à faire un pèlerinage à Sainte Caquette, le titre d’un fabliau joué à Caen en 1516. Il n’est point nécessaire de baiser les saintes reliques du curé pour retrouver sur le champ la vivacité de langue ! Ces caquetteurs, ces jaqueteurs, se recrutent dans tous les milieux, avec une forte propension de chambrières, de tripières, de poissonnières, de prostituées, de valets.
58Le mécanisme de la rumeur, du « péché de la langue » est d’une tout autre ampleur que le ragot. Il empoisonne toute une ville, tout un pays. Mme C. Beaune en donnait récemment une définition sociologique : « une proposition destinée à être crue véhiculée oralement sans qu’on puisse vérifier son exactitude47.
59Ces « paroles sans auteur », introduites par des « on dit », « il est vrai que », « tout le monde sait » sont le contraire des nouvelles officielles, criées à chaque carrefour, ou des propos anodins qui n’engagent que ceux qui les tiennent. La rumeur est rarement anodine. Elle se présente, au départ, comme un phénomène flou, un mécanisme difficile à dater et à circonscrire, un mélange de vérités, d’invraisemblances, de stéréotypes d’autant mieux accepté par le commun qu’elle frise la caricature, l’illogisme et la simplification. Plus c’est gros, plus ça prend, dit un vieil adage ! La rumeur gonfle, s’enrichit de nouvelles versions, prend vite, dans la bouche de ceux qui la répandent, une allure de certitude, se nourrit de nouveaux témoignages et arguties. Elle n’innocente et ne réhabilite jamais.
60Tout le monde est concerné par l’expression de ces fantasmes. Les rumeurs émanent aussi bien des huis et des fenêtres d’un palais ou d’un hôtel particulier que de la lucarne d’un taudis. Elles proviennent autant d’un homme que d’une femme, d’une honnête épouse que de la pire des commères ou de filles de joie, d’un enfant que d’un adulte, d’un clerc que d’un laïc. Un des meilleurs voyeurs que nous ayons rencontrés à Rennes, fin xve siècle, est un notable Hamon Halloche, en dehors de tout soupçon, qui se révèle le pire des corbeaux. Son activité consiste à regarder par les fenêtres et à surprendre ses voisins « commersant charnellement avec des filles de mauvaise vie ». On l’accuse aussi de s’introduire chez un quidam pour vérifier si sa chambrière était bien « grosse d’enfant48 ».
61Les thèmes colportés de bouche à oreille et amplifiés par la rumeur, le bruit sont vieux comme Hérode ! L’intensité de la vie politique durant les deux derniers siècles du Moyen Age a alimenté des quantités de faux bruits, des dénonciations à la pelle, des tissus de médisances difficiles à saisir dont les derniers colporteurs ont parfois été les historiens eux-mêmes. Que n’a-t-on raconté à Paris ou en province sur les protections occultes dont disposait Etienne Marcel, sur le parti navarrais et son chef Charles le Mauvais dont la réputation a été forgée bien après coup ! Que de bruits ont couru, à l’époque même et après, sur le gouvernement des Marmousets, ces chevaliers de l’entourage du jeune Charles VI assimilés par les princes et leurs séides à des figures grotesques de singes ! Que n’a-t-on susurré sur les mœurs et les activités occultes de Louis d’Orléans, frère du roi, accusé de sorcellerie, sur Isabeau de Bavière, sur Jacques Cœur ou sur Louis XI inventeur des cages ou « fillettes », des hommes et des femmes injustement calomniés pendants des siècles49. D’autres bruits sont nés de la crise économique, de la misère. Les « chertés », les remuements monétaires, l’accaparement des vivres font couler des flots de salive et donnent matière à toutes les supputations sur les méfaits des officiers, des collecteurs des impôts, des usuriers, à l’origine des révoltes qui ont menacé à plusieurs reprises les villes du royaumes, de la Harelle de Rouen, du soulèvement des Maillotins de Paris en 138250. Rumeurs typiques que celles qui visent un groupe social marginalisé par sa maladie, sa religion, ses mœurs, sa langue. Que de bruits ont été colportés sur les lépreux, les pestiférés, les juifs, les sorcières, les flagellants au point de justifier des persécutions51 ! La mauvaise conduite alimente le « bruyct ». C’est la rumeur qui est bien souvent à l’origine de la connaissance d’un abandon d’enfants, d’un avortement, d’un cas de sorcellerie, d’une accusation de sodomie. C’est elle qui décrit les avatars conjugaux de Michel de Paxeria de Foix, « cogul » notoire, marié à une « bagassa » (putain). L’émule de Musarde et de Babille dans la farce de Ragot « roi des gueux », est une rennaise Jeanne Jumel, championne salace de la délation. Mêlée à une sombre affaire d’escroquerie, « elle a esté, dit un témoin, et est (encore) pailarde, putain, houlière, macquerelle notoirement et publiquement ». Cette vipère raconte que « néantmoins que elle fust et soit mariée, a commersé charnellement avecques pluseurs homme et divulgue les noms de cieulx qui avoient eu compaignie charnelle delle et lesqueulx la chevauchoint myeulx et estoint meilleurs euvriers et auxi a nommé pluseurs hommes auxqueulx elle disoit avoir apprins le moictier et eu leur pucelage52 ».
62La littérature médiévale fourmille de secrets d’alcôve, d’allusions sexistes scatologiques, divulguées par des fauteurs de troubles, « alant coquinant par les tavernes et gesir aus hospitaulz53 ». Le recueil de potins que sont Les Cent Nouvelles Nouvelles permet de pénétrer dans l’intimité des bourgeois par la porte ou la fenêtre54. La chasse érotique à la « bête féminine » y est évoquée, dans le « comique des entrailles ». On détaille, avec complaisance, dans un vocabulaire aussi scabreux que celui de la farce du fauconnier en ville : la pose d’un « clystère » par l’amant médecin (la farce du clystère), l’activité des épouses qui vont à domicile « porter leurs raies ça et là » pour faire rentrer l’argent du ménage pendant que le mari est à la taverne (la farce des femmes « qui font accroire à leurs maris de vessies que sont lanternes ») et d’autres sujets de la même veine.
Notes de bas de page
1 Bove (B.) « La demeure bourgeoise à Paris au xive siècle : bel hôtel ou grant meson », Histoire urbaine n° 314, juin 2001, p. 67-82.
2 Bardet (J.-P), Chaunu (P.), Desert (G.), Gouhier (P.), Neveux (H.), Le bâtiment : enquête d’histoire économique xive-xixe siècle, tome I, maisons rurales et urbaines dans la France traditionnelle, Paris, Mouton, 1971 ; Bernardi (Ph.), Métiers du bâtiment et techniques de construction à Aix-en-Provence à l’époque gothique (1400-1450), Aix-en-Provence, pup, 1995 ; Chastel (A.), Guillaume (J.), dir. La maison de ville à la Renaissance. Recherches sur l’habitat urbain aux xv et xvie siècles, Actes du colloque de Tours, Paris, Picard, 1983 ; Esquieu (Y.) « La maison médiévale urbaine en France », Bulletin Monumental tome 153, 1995, p. 109-141 ; Garrigou Grandchamp (P), Demeures médiévales, cœur de la cité, collection Patrimoine vivant. Notre Temps, rempart, Paris, Desclée de Brouwer, 1992, p. 66-69 ; Roux (S.) La maison dans l’Histoire, Paris, Albin Michel, 1976 ; Viollet-le-Duc (E.) Dictionnaire raisonné de l’architecture française du xie au xve siècle, Paris, 1854.
3 Quenedey (R.), L’habitation rouennaise, Rouen, Lestringant, 1926 ; B. Sournia, Vayssettes (J.-L.), Montpellier, la demeure médiévale, Paris, Imprimerie Nationale, 1991.
4 Crozet (R.) Villes d’entre Loire et Gironde, Paris, puf, 1949, p. 70-74 ; O. Liebard, « Les maisons d’Auxerre au xvie siècle », Bulletin Archéologique. N.S. tome IV, année 1968, Paris, 1969, p. 155-214 ; Napoleone (A.-L.) « Les maisons médiévales de Figeac », Congrès Archéologique de France, 14e session, Quercy, 1989, Paris, 1993, p. 291-306 ; Polge (H.), « La ville d’Auch », Congrès Archéologique de France, 128e session, Gascogne, 1970, p. 337-339.
5 Enlart (C.) Manuel d Archéologie française. Deuxième partie : Architecture civile et militaire tome I, éd. Picard, Paris, 1929 ; Quenedey (R.) L’habitation rouennaise, op. cit., p. 225-226.
6 Leguay (J.-P), « Une ville épiscopale : Dol, des origines au début du xvie siècle », Mémoires de la Société d’Histoire et d Archéologie de Bretagne, tome LXXII, 2001, p. 36-37.
7 Roux (S.), La maison, op. cit., p. 147-148.
8 Bernardi (Ph.) Métiers du bâtiment à Aix-en-Provence... op. cit., p. 336 ; Roux (S.) «L’habitat urbain au Moyen Age, le quartier de l’Université de Paris », Annales E.S.C. septembre-octobre 1969, n° 5, p. 1196-1219.
9 Crozet (R.) Villes d’entre Loire et Gironde, op. cit., p. 71 ; Napoleone (A.-L.) « Les maisons gothiques de Toulouse (xiie et xive siècles) », Archéologie du Midi Médiéval, tomes VIII-IX, 1990-1991, p. 132-137 ; Leguay (J.-P), Un réseau urbain au Moyen Age : les villes du duché de Bretagne aux xive et xve siècles, Paris, Maloine, 1981, p.217 ; Le Breton (B), Les maisons à pans de bois à Saint-Brieuc, D.E.S. Rennes, 1965.
10 Drahotova, (O.) L’Art du verre en Europe, Gründ, Prague, 1983, p. 29-30 ; Foy (D.), « Les déterminants de l’artisanat du verre », L’artisan au village dans l’Europe médiévale et moderne, Actes des XIXe Journées Internationales d’Histoire de l’Abbaye de Flaran, septembre 1997, Flaran, 2000, p. 168-186.
11 Cailleux, (Ph.) Trois paroisses de Rouen I, xiiie-xve siècles, thèse dactylographiée de l’Université de Paris IV-Sorbonne, 1997-1998, p. 873-874.
12 Rouger (G.), Fabliaux, folio classique Paris, Gallimard, 1978, p. 90.
13 Coornaert (E.), Les corporations en France avant 1789, 2° édition Paris, 1968 ; Geremek (B), Le salariat dans l’artisanat parisien aux xiiie-xive siècles, Paris, Mouton, 1962 ; Olivier-Martin (F), L’organisation de la France d’Ancien Régime, Paris, 1938 ; Wolff (Ph) et Mauro (F), Histoire générale du Travail, l’âge de l’artisanat, Paris, 1960, p. 156-157.
14 Fagniez (G.), Etudes sur l’industrie au xiiie siècle, Paris, 1877, p. 109, note 3.
15 Foviaux (J.), «Discipline et réglementation des activités professionnelles à travers les arrêts du Parlement de Paris (1257-1382) », Le travail au Moyen Age, une approche interdisciplinaire. Actes du Colloque international de Louvain-la-Neuve, 1990, p. 218-219.
16 Gouron (A.), La réglementation des métiers en Languedoc, Paris, 1958, p. 71-72.
17 Guerard (B.), Cartulaire de l’église Notre-Dame, tome II, 470-471 ; Piponnier (Fr.) «Boutiques et commerces à Dijon », Actes du Congrès des Historiens médiévistes, le Marchand, Reims, 1988 ; Espinas (G.), la vie urbaine de Douai au Moyen Age, tome II, Paris, Picard, 1913.
18 Leguay (J.-P), Un réseau urbain au Moyen Age, les villes du duché de Bretagne aux xiv et xve siècles, Paris, Maloine, 1981, p. 218-219, « Le paysage urbain de Rennes au milieu du xve siècle d’après un livre-rentier », Mémoires de la Société d’Histoire et d Archéologie de Bretagne, tome LIV (1977), p. 69-116 et LV (1978), p. 185-221 et « Un réseau urbain médiéval : les villes du comté puis du duché de Savoie » Bulletin du Centre d’études franco-italien n° 4, juin 1979, p. 47-48 ; B. Sournia, J.-L. Vayssettes, Montpellier, la demeure, op. cit., p. 50.
19 Cailleux (Ph.), Trois paroisses, op. cit., p. 786 ; Frappier-Bigras (D.), «La famille dans l’artisanat parisien du xiiie siècle », Le Moyen Age, tome xcv, 1989, n° 1, p. 47-74 ; Gonon (M), La vie quotidienne en Lyonnais d’après les testaments – xive-xvie siècle, Hachette, 1968.
20 Biget (J.-L.), Histoire d Albi, Toulouse, Privat, p. 88.
21 Piponnier (Fr.), «Boutiques à Dijon », op. cit., p. 155-163 ; Esquieu (Y), « La maison médiévale urbaine en France : état de la recherche », Bulletin Monumental n° 153-1, 1995, p. 128.
22 Liebard (O.), « Les maisons d’Auxerre au xvie siècle », op. cit., p. 209 ; M. Gonon, La vie quotidienne en Lyonnais, op. cit., p. 65-73.
23 Fagniez (G.), Etudes sur l’industrie, op. cit., p. 110 ; Cailleux (Ph.), Trois paroisses de Rouen, op. cit., p. 785, 820-21. L’auteur cite un document de 1474, tiré des Archives départementales de Seine-Maritime (2 E 200 15 novembre 1474) qui précise « parmy laquelle porcion d’ouvreur il fera son entrée pour aller a ce present lot » ; Quenedey (R.), l’habitation rouennaise, op. cit., p. 91-92.
24 Villon (Fr.), Le Testament p. 65, XXX, v. 235-236, éd. P. Michel, Poésies complètes, Paris, Le livre de Poche, 1972.
25 A.D.S.M. 2 B 765 f° 221 (publication de Ph. Cailleux).
26 Fagniez (G.), Etudes sur l’industrie, op. cit., p. 108.
27 Archives municipales de Nantes FF 45 (1336).
28 Ce texte extrait des Archives municipales de Montpellier (BB 14 f° 29 v°) est cité par A. Gouron, Les métiers du Languedoc, op. cit., p. 307.
29 Nous abordons ce sujet dans un livre La pollution au Moyen Age, Paris, éd. Jean-Paul Gisserot, Paris, 1999 et dans un livre sur Les Eaux au Moyen Age (P.U. Rennes, 2002).
30 Schmitt (J.-C), « Le suicide au Moyen Age », Annales ESC, tome 31, 1976, p. 5.
31 Homo-Kechner (C.), Sons et instruments de musique au Moyen Age. Archéologie musicale dans l’Europe du vue au xive siècle, Paris, Errance, 1996, p. 13.
32 Archives Municipales de Rennes série 1115, compte de 1475 f° 13.
33 A.M. Rennes série 1115 compte de 1467-69 f° 39 et liasse 65.
34 Schnerb (B.), Les Armagnacs et les Bourguignons. La maudite guerre, Paris, Perrin, 1988, p. 70-71.
35 Leguay (J.-P.), « Un acte de foi et de fidélité post mortem : l’inhumation du cœur de la duchesse Anne, reine de France, dans sa bonne ville de Nantes en 1514 », Colloque sur l’identité chrétienne et l’espace culturel, Université de Rouen, janvier 2000 ; Grandeau (Y.) «La mort et les obsèques de Charles VI », Bulletin Philologique et Historique 1970, p. 150.
36 Fabliaux, éd. de G. Rouger, Folio classique, Gallimard, 1978, p. 180.
37 Lorcin (M.-T), Façons de sentir et de penser : les fabliaux français, Paris, Honoré Champion, 1979 ; Faivre (B.), Répertoire des farces françaises, des origines à Tabarin, Le Spectateur français, Paris, Editions de l’Imprimerie Nationale, 1993 ; Rossi (L.), Fabliaux érotiques, Lettres gothiques, Paris, Le livre de Poche, 1992, p. 167 ; Rouger (G.), Fabliaux, op. cit., p. 95, le prêtre et Alison : « Il s’échappe par un guichet et d’un bond saute dans la me ».
38 Leguay (J.-P.), « La peur dans les villes bretonnes au xve siècle », Histoire urbaine n° 2, décembre 2000, p. 81-83 ; Cintré (R.), Les marches de Bretagne au Moyen Age, Fougères, Jean-Marie Pierre, 1992, p. 119-134.
39 adlae 198, n° 1-10, Leguay (J.-P), « Un cas de force au Moyen Age », Mentalités, histoire des cultures et des sociétés, violences sexuelles, Paris, Imago, 1989, p. 12-33.
40 Verdon (J.), Les françaises pendant la guerre de Cent Ans, éd. Perrin, Paris, 1991, p. 248.
41 Rousset (P.), Farce nouvelle de l’Antéchrist et de trois femmes, une bourgeoise et deux poissonnières, p. 77-95 ; Le Duc (dom P.) Histoire de l’abbaye de Sainte-Croix, Quimper 1881, document du 24 mai 1423 p. 651-652.
42 Levasseur (E.), Histoire des classes ouvrières et de l’industrie en France avant 1789, Paris, 1900, p. 323.
43 Geremek (B.), «Le refus du travail dans la société urbaine du Bas Moyen Age », Actes du Colloque international de Louvain-la-Neuve, mai 1987 sur Le travail au Moyen Age, Louvain 1990, p. 379-394.
44 Leguay (J.-P), La rue au Moyen Age, éd. Ouest-France, Rennes, 1984, p. 157-158.
45 Faivre (B.), Répertoire des Farces françaises, op. cit., p. 366-367 ; Nykrog (Per), Les fabliaux, Genève, Droz, 1956 ; Thomasset (C.) « La satire du mariage dans les fabliaux », in Mariage et sexualité au Moyen Age. Accord ou crise ? Actes du colloque international de Conques, cultures et civilisations médiévales, tome XXI, Paris, 2000, p. 233-242.
46 Faivre (B.), Répertoire des Farces françaises, op. cit., p. 304-305.
47 Beaune (C), « La rumeur dans le Journal du Bourgeois de Paris », Gauvard (C), «Rumeur et stéréotypes à la fin du Moyen Age », Actes du XXIV Congrès de la Société des Historiens Médiévistes de l’Enseignement Supérieur Public, Avignon 1993, La circulation des nouvelles au Moyen Age, Paris, 1994, p. 157-177 et p. 191-203 ; Gutton (J.-P), Bruits et sons dans notre histoire, essai de reconstitution du paysage sonore, Paris, PUF, 2000, p. 21-22 ; Casagrande (C.) et Vecchio (S.), Les péchés de la langue. Discipline et éthique de la parole dans la culture médiévale, Paris, 1991.
48 A.M. Rennes liasse 1083.
49 Autrand (F.), Charles VI, Paris, Fayard, 1985 ; Mollat (M.), Jacques Cœur ou l’esprit d’entreprise, Paris, Aubier, 1988 ; J. Verdon, Isabeau de Bavière, Paris, Tallandier, 1981.
50 Mollat (M.) et Wolff (Ph.) « Ongles bleus, Jacques et Ciompi, les révolutions populaires en Europe aux xive et xve siècles », Paris, Calmann-Lévy, 1970, p. 166-180.
51 Martin (H.), Mentalités médiévales – xie-xve siècle. Nouvelle Clio, Paris, PUF, 1996, tome I, p. 426, 446-453.
52 Llobet (G. de), Foix médiéval, recherches d’histoire urbaine, publication de la Société arié-geoise de sciences, lettres et arts, 1973-1974 ; A.M. Rennes liasse 1084 (acte non daté, mais du début du xvie siècle).
53 Saune (A.), « L’Histoire de la femme au Moyen Age : une histoire qui ne coule pas toujours de source », Mélanges P. L’Hermite-Leclercq, Au cloître et dans le monde, PU. de Paris-Sorbonne, 2000, p. 293-300.
54 Weetser (F.P.S.), Les Cent Nouvelles Nouvelles (d’un auteur supposé bourguignon ?), Genève-Paris, Droz-Minard, 1966.
Auteur
Université de Rouen
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