Les Strophes
p. 67-93
Texte intégral
1On appelle strophe un groupe formé, sous diverses combinaisons de rimes, par un certain nombre de vers, et présentant, en règle générale, un sens complet. Ces vers sont de mesure semblable ou différente. L’assemblage de plusieurs strophes, toujours identiques entre elles, sauf rares exceptions, constitue un poème. Dans l’exposé qui va suivre, il ne sera pas tenu compte des rimes, sauf quand le développement de la discussion le rendra indispensable : l’étude en sera faite dans un chapitre spécial qu’on trouvera plus loin. On n’attendra pas non plus de nous une histoire détaillée et minutieuse des strophes, forme par forme, ce qui, pour d’autres époques, ferait double emploi avec le remarquable et très consciencieux ouvrage de Ph. Martinon1. Il s’agit seulement ici, pour le sujet qui nous occupe, d’examiner les grandes questions qui se sont posées aux poètes et de savoir comment elles ont été résolues. On n’oubliera pas qu’à l’origine toutes les strophes ont été chantées, mais qu’ensuite il faut distinguer entre celles qui ont été soutenues par de la musique et celles qui ne l’ont pas été. Tobler et Naetebus l’ont fait : « J’appelle non-lyriques, a écrit celui-ci2, les formes strophiques dans lesquelles les vers qui se correspondent par leur place, tout en présentant le même mètre, diffèrent par le sexe de leur rime. » Il considère que l’identité de la nature des rimes prouve que le poème était fait pour le chant, et que la non-identité démontre le contraire. Il reconnaît certes que son criterium n’est pas d’une sûreté absolue, en quoi on doit l’approuver. En gros pourtant il est le plus souvent juste : voilà pourquoi, au cours de ce chapitre, il n’y a aucun inconvénient à ce que nous l’adoptions nous-même.
2La laisse n’a pas tous les caractères de la strophe, car elle n’est pas composée d’un groupe de vers strictement délimité. Mais elle a une unité marquée pour l’assonance sur laquelle elle est construite, ainsi que par la phrase musicale qui accompagne ses vers ; elle prend fin lorsque changent l’assonance et la mélodie. A ce titre, elle doit être mentionnée ici. C’est une création purement romane, dont la littérature latine syllabique ne nous présente aucun exemple, mais qui a sa source dans les litanies d’Église. Elle se manifeste pour la première fois dans le Boèce provençal, à l’époque environ où sont composées nos premières strophes. De là elle passe en français et devient la forme spécifique de nos anciennes Chansons de Geste, tandis qu’elle est extrêmement rare ailleurs. Elle est toujours isométrique, mais peut utiliser des mètres différents : la Chanson de Sainte Foy, poème provençal du xie siècle, le Fragment d’Alexandre, Gormond et Isembard sont en octosyllabes, et ce sont à peu près les seuls ouvrages où elle ait été construite selon ce mètre3 ; la grande majorité des Chansons de Geste sont en décasyllabes ; l’exception est représentée par le Pèlerinage de Charlemagne, écrit en alexandrins ; l’heptasyllabe ne se rencontre que dans les parties versifiées d‘Aucassin et Nicolelte. Dans la Chanson de Sainte Foy, les laisses sont courtes, variant entre sept et dix-sept vers, toujours de nombre impair ; elles le sont également dans le Fragment d’Alexandre, où elles évoluent entre six et dix vers ; elles peuvent atteindre une dimension d’une trentaine de vers dans Aucassin et Nicolette. Ailleurs on constate dans un même poème des différences souvent considérables : certaines assonances peuvent ne s’étendre que sur quatre à cinq vers, tandis que d’autres s’étirent jusqu’à plusieurs centaines. Le Roman de Jules César nous offre un exemple de laisses non plus assonancées, mais rimées.
3La strophe proprement dite est au contraire caractérisée par sa régularité. En d’autres termes, dès qu’un type a été adopté, il doit se reproduire en principe sans aucune modification importante jusqu’à la fin du poème, avec un nombre de vers constant, sauf dans les Lais et les Descorts. La strophe a une origine très lointaine ; on la rencontre dans la littérature latine classique, chez Horace, par exemple. Elle est la forme par excellence de la versification syllabique chrétienne avant l’apparition des premiers poèmes écrits en langue vulgaire. En fait, c’est du couplet des Hymnes liturgiques qu’elle est issue4. Elle a quatre vers chez saint Ambroise et souvent chez saint Hilaire. Elle a quatre vers également dans la Passion, et, en Provence, dans une pièce de Guillaume IX de Poitiers ; Saint Léger l’allonge de deux vers, mais elle n’en a que cinq dans Saint Alexis, tous de même mètre.
4A ses débuts, elle est donc simple, et elle est courte. La brièveté lui est encore recommandée au début du xiiie siècle par le traité De rhythmico Dictamine, qui fixe ses limites entre deux et cinq vers. Mais, à cette époque, et déjà chez Guillaume IX de Poitiers, elle a commencé de prendre des dimensions plus amples. Elle est fréquemment de six vers et même davantage, chez les Troubadours ; le moine Hélinand, qui écrit dans la France du Nord entre 1194 et 1197, la pousse jusqu’à douze vers5. Certes, les strophes de quatre vers restent les plus employées, mais celles de six, huit et douze deviennent de moins en moins rares. Des Méridionaux comme Guiraut de Borneilh et Guiraut Riquier travaillent à les allonger et à les compliquer. De toutes parts le mouvement est irrésistible. Le Tournoiement des Dames, de Huon d’Oisi, a une strophe de vingt-sept vers ; Colin Muset en présente une de dix-neuf. Au temps de la lyrique courtoise, le couplet, après l’« ouvert » et le « clos », qui sont de structure constante, se termine par une dernière partie qui peut avoir une étendue assez considérable. Les Leys d’Amors font montre d’un grand libéralisme : un couplet, disent-elles, doit comporter cinq vers au minimum, seize au maximum, et elles ajoutent :
5« A ces vers, le poète en enlace d’autres qui sont placés comme des brisures de quatre syllabes ou de trois au moins. Cependant, si la mesure principale se compose de quatre syllabes, sans plus, alors il faut faire plus courts ceux des autres vers qui leur sont ajoutés. Les petits vers brisés ne doivent pas être tellement multipliés qu’ils puissent dépasser la moitié de leurs vers principaux6. » Dans les strophes non-lyriques, G. Naetebus a rencontré des formes plus ou moins étendues, qui oscillent entre deux et trente-six vers ; H. Châtelain en signale de très longues7. Certains Lais du xiiie siècle ont porté la strophe jusqu’à deux cent cinquante vers.
6Les types pratiqués au xve siècle ont été pour la plupart catalogués à cette époque par les Arts de seconde Rhétorique, qui énumèrent et décrivent les quatrains, les cinquains, les sizains, les septains, les huitains, les neuvains, les dizains, les onzains, les douzains, les quatorzains, les seizains et même les trentains, toutes formes susceptibles de diverses utilisations de mètres et de rimes, et dont beaucoup peuvent être employées comme couplets dans les poèmes à forme fixe. Ce dénombrement toutefois n’a rien de systématique. Même il est historiquement incomplet : deux exemples suffiront à le montrer. Notre poésie, ce que ces traités ne mentionnent pas, a en effet connu le distique, qu’on rencontre assez anciennement dans des chansons, où il peut être suivi d’un refrain assez long ; c’est le cas de cette pièce de Richard de Semilly :
J’aim la plus sade rien qui soit de mere nee,
En qui j’ai trestout mis cuer et cors et pensée8 ;
7les Prouverbes mouraulx de Christine de Pisan, poème non-lyrique, sont également en distiques.
8En second lieu l’Art et Science de Rhétorique fait bien état des « vers tiercez » à l’italienne, que Jean Lemaire de Belges a introduits en France, et que nous appelons aujourd’hui terza rima, de leur nom d’origine ; mais aucun auteur ne parle des tercets médiévaux, différents de la terza rima parce que les couplets n’y sont pas enchaînés par la rime. Guillaume IX de Poitiers en a fait usage dans trois de ses poèmes ; en français, nous en avons un exemple différent, mais antérieur, dans la paraphrase du Cantique des Cantiques, que certains font remonter à la fin du xie siècle :
Quant li solleiz converset en leon,
En icel tens qu’est ortus pliadon,
Per un matin,
Une pulcelle odit molt gent plorer
Et son ami dolcement regreter
Et si lli dis : ...9
9Certaines des formes qui existent au xve siècle sont très anciennes en France, et quelques-unes ont une histoire. Le quatrain, illustré, par la Passion, ne reparaîtra qu’au xiie siècle, dans l’Evangile aux Femmes, en alexandrins. Le cinquain, après avoir servi à l’auteur de Saint Alexis, sera repris par Guernes de Pont-Sainte-Maxence, et cette fois en alexandrins. Le sixain, octosyllabe dans Saint Léger, sera construit en vers de cinq syllabes dans le Sermon en vers. Le septain, employé déjà par Guillaume IX, sera souvent représenté, sous divers mètres, chez les poètes lyriques. Le huitain se rencontre partout dans les Romances et Pastourelles de Bartsch. La strophe d’Hélinand, que lui empruntera le Rendus de Moiliens, connaîtra une extraordinaire fortune. Il va de soi que les strophes les plus longues, au delà de douze vers, seront aussi les plus rares. Pourtant les grands Rhétoriqueurs pratiqueront volontiers les couplets lourds et de grandes dimensions.
10La poésie française commence par user de strophes isométriques. C’est ainsi qu’ont été écrits Saint Léger, la Passion, Saint Alexis, le Comput de Philippe de Thaon, le Sermon rimé, les Vers de la Mort de Hélinand, et tant d’autres œuvres qu’il serait inutile d’énumérer. L’isométrie est un procédé relativement facile et qui ne réclame pas une très grande virtuosité : il suffit d’écrire des lignes de pareille longueur, et de veiller à l’accord des timbres à la fin des vers. Selon ce système, et la disposition des rimes mise à part, la variété ne peut provenir, d’un poème à l’autre, que du mètre choisi et de la longueur du couplet. A la vérité, les poètes du xve siècle s’aviseront d’un raffinement nouveau : ils tendront à donner à leurs strophes autant de vers que la mesure du vers comportera de de syllabes, et ils aboutiront ainsi à des constructions carrées et massives qui leur sembleront d’une beauté parfaite ; beaucoup d’Arts de seconde Rhétorique en feront une règle qu’ils tâcheront d’imposer avec beaucoup d’insistance. Pendant toute la période médiévale, les strophes isométriques conserveront une grande vogue.
11Il y en a d’autres cependant, que l’on appelle hétérométriques, c’est-à-dire composées de mètres différents. Celles-ci sont moins anciennes que les précédentes, et à l’origine moins répandues, puisque, même chez les Provençaux, l’isométrie l’emporte longtemps10. Elles sont le signe d’un sens esthétique plus délicat et d’un certain goût de la difficulté. Ici encore les poètes français ont trouvé des modèles dans la poésie latine syllabique. Déjà chez saint Hilaire il y a des strophes hétérométriques ; il y en a aussi chez Fortunat et tout au long du Moyen Age, selon toute espèce de combinaisons dont quelques-unes sont très habiles. Les Poésies latines populaires antérieures au xiie siècle, publiées par E. du Méril, en présentent quelques échantillons notables : des quatrains 8 +j— 7 + 8 + 7, du xie siècle, dans la Prose sur saint Nicolas ; des septains 6, + 6 + 8 + 6 + 8 + 6 + 7, du ixe, dans le Cantique de Gottschalk sur la douleur du Péché ; d’autres quatrains 12 + 12 + 12 + 5, du ve dans un poème Sur la Destruction d’Aquilée, des cinquains 12 + 12 + 12 + 12 + 6, du ixe, dans le Chant sur la Mort de Charlernagne, des sixains 8 + 8 + 8 + 8 + 4 + 7, du ixe, dans la Chanson de Gottschalk11.
12Ce sont les Troubadours, et déjà le premier d’entre eux, Guillaume IX de Poitiers, qui ont pris l’initiative en France de composer pareillement des strophes hétérométriques, en y employant des vers de deux ou de plusieurs mesures différentes ; ils ont été en cela les maîtres des poètes septentrionaux, qui ont obéi à leurs leçons. Ainsi que l’a fait ressortir récemment encore Ph.-A. Becker12, le grand mérite de Guillaume IX a été d’avoir voulu trouver un instrument plus souple que le couplet de saint Ambroise et ses succédanés, et d’avoir senti également que les laisses épiques ne convenaient pas à son lyrisme. A côté de quelques pièces isométriques, il emploie le sixain 8 + 8 + 8 + 4 + 8 + 4 (nos IV, V, VII), le septain 8 + 8 + 8 + 8+ 4 + 8 + 4 (n° VI), le tercet 11 + 11 + 15 (nos I, II, III), ce dernier selon cette forme :
Companho, tant ai agutz d’avols conres
Qu’ieu non puesc mudar non chan e que norm pes ;
Enpero no vueill c’om sapcha mon afar de maintas res. (III, 1-3)13
13Désormais l’impulsion est donnée ; d’autres troubadours, autour de lui et après lui, imiteront des formes déjà connues, les corrigeront ou les amélioreront, même en créeront au besoin : en cent ans se développera une riche floraison de constructions métriques auxquelles d’autres générations de poètes continueront d’ajouter d’autres nouveautés.
14Sans doute, dans leurs essais, n’ont-ils pas eu l’intention de se livrer à de purs exercices de versification et ont-ils cherché des combinaisons aptes à traduire les sentiments qui les animaient. Ils y ont réussi avec plus ou moins de bonheur, et tous, à considérer leurs œuvres, n’y ont pas déployé un égal talent. Pourtant il est un fait dont on doit tenir compte : c’est que, peu à peu, ils ont fini par considérer que certaines formes pourraient être spécialisées. Ce mouvement s’atteste avec beaucoup de clarté dès que les poèmes à forme fixe commencent à dégager leurs règles. Certes, il ne s’agit pas, partout et toujours, de prescriptions autoritaires : les écrivains ne se voient pas refuser une liberté qui leur est indispensable, pourvu qu’ils adoptent les lois principales du genre. Ainsi toute ballade doit comporter un certain nombre de couplets dont chacun se termine par un refrain ; mais les poètes ont le droit de choisir leur mètre et de donner à leur couplet, toutefois dans certaines limites, l’étendue qui leur semble convenable : ce sont des conseils qu’ils reçoivent, non point des ordres. Au xve siècle, les Arts de seconde Rhétorique sont remplis de ces recommandations. La « taille de trois plus un », qui est la combinaison adoptée par Machaut dans son Jugement du bon roi de Bretaigne est bonne « pour complaintes amoureuses ou grans lays » ; le neuvain isométrique en vers de dix syllabes convient « pour composer hystoyres et autres livres » ; le dizain de même mètre « pour user en histoyres et complainctes » ; le onzain « pour ballades et chantz royaulx14 ». Ainsi se crée l’usage. Mais il n’est pas exclu qu’un même genre ne puisse admettre plusieurs « tailles ».
15Donc, sauf sur quelques points fondamentaux, il n’y a pas de règles absolument strictes. Dans les strophes hétérométriques, le poète a le droit de disposer comme il l’entend ses vers courts et ses vers longs. Comme aujourd’hui, le vers de moindre dimension peut être placé à l’intérieur du couplet ; on en jugera par cet exemple de Guiot de Dijon :
Joie ne guerredons d’Amors
Ne viennent pas par bel servir,
Car on voit sovent cens faillir
Qui servent sans changier aillors ;
Si m’en aïr
Quant celi serf sans repentir
Qui ne me veut faire secors. (éd. E. Nissen, p. 18)
16S’il y en a plusieurs, ils peuvent être disséminés. Richard de Fournival a écrit :
Talent avoie d’amer
Mais paour m’est prise
Qui le m’a tolu ;
Car j’oi tieus d’amours blasmer
Et de son servise
Qui l’ont maintenu,
...S’ai percheü
Qu’il n’en pueent torner.
(Ch. sat. et bach., éd. Jeanroy-Lângfors, p. 24)
17Ou bien ils peuvent être groupés en paquets plus ou moins longs au milieu de la strophe et encadrés par d’autres de dimension majeure. Les vers suivants sont de Colin Muset :
Or veul chanter et soulacier
Et faire joie et renvoisier,
Ke ne sai si loial mestier ;
Por ce ne le veul je laissier.
Se ma douce amie
Cui je ne hé mie
Me veult faire aïe,
Bien puis esploitier.
La grant cortoisie
M’a randu la vie,
Mais gent plain d’envie
M’en font esloignier.
Adès se painent d’encuser
Ceuls ki bien aimment sens fausser,
Si s’en doit ou moult bien garder
Et lor compaignie eschuer. (éd. Bédier, p. 8)
18Si cet édifice nous semble quelque peu lourd, voici maintenant une combinaison alternante où le grand vers s’inscrit au-dessus du petit, dans une succession qui plaît bien davantage à notre goût moderne. Conon de Béthune en est l’auteur :
Tant ai amé c’or me convient haïr
Et si ne quier mais amer,
S’en tel lieu n’est c’on se saice traïr
Ne dechevoir ne fausser.
Trop longement m’a duré ceste paine
K’Amors m’a fait endurer ;
Et non por quant loial amor certaine
Vaurai encoir recovrer. (ed. Wallenskôld, p. 13)
19La strophe peut commencer par une série de vers longs et se terminer par un vers court, comme on le fait généralement aujourd’hui :
Jhesus, mon filz, mon enffant gracieux,
Ma portee, mon tresor precieux,
Se fait ainsi le depart de nous deux ?
O departie... (Chresth., Constans, p. 129)
20Mais le Moyen Age ne se fait aucunement scrupule d’user de la construction inverse :
Hui main par un ajornant
Chevauchai ma mule amblant,
Trovai gentil pastorele et avenant ;
Entre ses aigniaux aloie joie menant.
(Bartsch, Rom. u. Past., II, 61)
21« Le mètre long et le mètre court, a remarqué à ce propos H. Châtelain15, ne se partagent d’ordinaire pas également le nombre des vers... Au temps de Froissart et de Christine de Pisan, on termine encore aussi volontiers par le vers plus long que par le vers plus court ; la seconde de ces deux manières, qui devait l’emporter définitivement chez les modernes, s’accuse avec plus de fréquence au xve siècle ; une troisième manière consiste à ranger le vers plus court à l’intérieur de la strophe ; elle est déjà connue du temps d’Agnès de Navarre et de Froissart ; elle semble aussi avoir conquis plus de faveur au cours du xve siècle. » Naturellement les formations décrites ci-dessus peuvent être modifiées et développées : on rencontre des masses compactes de petits vers précédant ou suivant les vers longs ; les poètes parfois ne se contentent pas de combiner deux mètres seulement, mais en emploient trois ou même davantage, comme l’a fait Huon d’Oisi dans les grands couplets du Tournoiement des Dames.
22Leurs assemblages sont-ils toujours excellents ? On peut en douter, ou du moins est-il permis de dire qu’ils ne répondent pas partout à nos conceptions actuelles. Beaucoup de pièces lyriques, à l’exemple de celles qu’a écrites Guillaume IX de Poitiers, mélangent les vers de 8 syllabes et ceux de 7. On unit les mètres impairs et les mètres pairs sans aucune difficulté et parfois à tour de rôle ; on trouve 11 + 6 et 11 + 7 dans les Romances et Pastourelles de Bartsch, 10 + 4 + 7 dans Perrin d’Augicourt, 10 + 7 dans le troisième Jeu-parti d’Adam de la Halle, 4 + 3 dans Christine de Pisan. H. Châtelain note qu’au xve siècle, on accorde 10 aussi bien avec 3 qu’avec 4, 3 aussi bien avec 7 qu’avec 8, 8 aussi bien avec 5 qu’avec 6, ces deux dernières combinaisons étant assez rares. Quelques unes d’entre elles nous feraient aujourd’hui l’effet d’être choquantes, parce que boiteuses : c’est la déclamation syllabique qui les rendait alors possibles. Molinet (H. de Croy), qui a étudié les rapports syllabiques des vers, propose 10 + 8, où le vers court ne l’est peut-être pas assez à notre gré, et 7 + 3.
23La règle générale veut que les strophes d’un même poème soient semblables l’une à l’autre. « Dans la poésie strophique, écrit en effet A. Tobler16, il arrive sans doute fort souvent que le mètre une fois adopté soit employé du commencement à la fin de la strophe... Mais, non moins souvent aussi, une même strophe emploie deux ou plusieurs mètres différents, que cette strophe forme un tout indivisible ou divisible. Pour les strophes à vers d’égale longueur et pour les strophes à vers d’inégale longueur, la règle générale est que les vers qui se correspondent par leur place dans la strophe doivent aussi se correspondre par le nombre des syllabes, et qu’aussi la rime lie dans une strophe comme dans les autres les vers qui occupent une place identique... Des strophes ne se correspondant pas par le mètre se trouvent, par exemple, dans le n° 439 du grand Chansonnier de Berne ; l’identité du refrain prouve que les strophes y forment bien un tout, et cependant, il n’y a que les strophes I et II qui soient dans une parfaite correspondance, tandis que, dans les strophes qui suivent, des vers féminins de six syllabes remplacent les vers féminins de sept qu’il y avait dans les deux premières. » De pareils cas ne sont jamais que des exceptions.
24Ces remarques une fois faites, on peut tirer la conclusion des observations qui précèdent, et dire que l’usage des strophes hétérométriques a déterminé une richesse infinie des formes dont les poètes ont usé. Cette richesse est cependant beaucoup plus grande dans les œuvres destinées à être chantées que dans les autres. Naetebus, dont le catalogue n’est pas complet, et en tenant compte des variétés introduites par la disposition de rimes de sexe différent, a compté 84 espèces de strophes non-lyriques. Or, pratiquement, elles n’ont pas toutes la même importance. Les plus employées sont le quatrain d’alexandrins monorimes, représenté dans 107 poèmes, et qui apparaît dans le dernier tiers du xiie siècle ; la strophe de douze vers octosyllabiques, qui est celle de Hélinand, vient ensuite avec 64 exemples, et elle est de date un peu plus tardive ; la strophe de six octosyllabes, avec la succession de rimes a’abaab, n’est créée qu’au milieu du xiiie siècle, et tout d’un coup, avec elle, nous tombons à 20 exemples ; la strophe de huit décasyllabes abababab, qui naît seulement vers 1254, ne se reproduit que dans 15 poèmes, et, la combinaison d’octosyllabes aabccb, plus vieille de soixante à quatre-vingts ans17, seulement dans 12. Le douzain suivant, composé d’un huitain en vers de quatre syllabes, suivi d’un quatrain en octosyllabes, nous est représenté comme une création nouvelle par l’Art et Science de Rhétorique :
Dames ont cours
En ville et cours
Par tout le monde ;
La je ne cours :
Leurs plaisirs courtz
Passent comme unde.
Se l’or abonde,
Laschent la bonde ;
Mais quant l’argent tumbe en decours,
Ne pensez pas qu’on vous responde
Parolle qui bien corresponde
Au faict de l’amoureux secours18.
25Ce douzain a été inventé par le bénédictin Guillaume Alexis, qui écrivit dans cette forme, vers 1480, son Blason des faulces amours. Il ne semble pas que cette strophe ait été souvent reproduite.
26Les poèmes destinés à être chantés font preuve, au contraire, d’une diversité beaucoup plus considérable, presque infinie. Elle s’atteste déjà en latin dans les Proses d’Adam de Saint-Victor ; elle n’est pas moindre en français. Qu’il suffise de dire que nous possédons trente-six chansons d’Adam de la Halle, mais que dans ce nombre il n’en existe pas deux, considérées sous le triple aspect de leur longueur, de leurs mètres et de leurs rimes, qui soient semblables l’une à l’autre. A l’époque de la lyrique courtoise, il y a peu de variété dans les premiers vers de chaque couplet ; mais la dernière partie de la strophe peut revêtir les formes les plus originales : c’est là que la fantaisie de l’auteur et ses capacités de création ont toute licence pour se donner libre cours. Tout au long du xixe siècle, on a cru, et il a été de mode de dire, que les poètes de la Renaissance, et Ronsard plus que tous les autres, avaient été d’incomparables maîtres en fait de versification strophique : rien n’aurait existé avant eux, ou presque rien, et ils auraient tout découvert. On voit combien ce point de vue est inexact. Des critiques avertis, tels que R. de Souza19, ont vigoureusement combattu cette opinion. « Presque toutes les formes de la poésie lyrique moderne, a écrit de son côté Ph. Martinon20, du moins toutes les dispositions possibles de rimes, sinon de mesures, ont déjà été réalisées par le Moyen Age, soit dans la poésie populaire, soit dans la poésie courtoise ou savante. »
27Ce qui contribue en effet à produire l’extrême diversité dès strophes, c’est le nombre des rimes et leur agencement. En principe, les rimes masculines et féminines doivent reparaître à une place identique dans tous les couplets d’un même poème : cette règle est généralement observée, encore que Tobler ait signalé quelques exceptions, notamment dans le n° 468 du Chansonnier de Berne21 et que j’en aie moi-même relevé deux exemples22. Mais les rimes, indépendamment de leur sexe, s’entrelacent de diverses façons, dont les unes sont classées et courantes, tandis que d’autres sont beaucoup plus rares. Ici encore, les poètes peuvent faire preuve d’initiative, et beaucoup d’entre eux ne s’en privent pas. Pendant fort longtemps les strophes monorimes ont conservé des partisans. Elles sont très anciennes ; les timbres s’y répètent à la fin des vers, avec la même persistance que dans les tirades des Chansons de Geste, mais sur une moindre étendue, groupés en quatrains ou en cinquains. On les rencontre dans la poésie latine syllabique23, en provençal, en espagnol chez Berceo et l’archiprêtre de Hita. C’est le système dont relève Saint Alexis :
Qui donc li vit son grant duel demener,
Son piz debatre e son cors degeter,
Ses crins detraire e son vis maiseler,
E son mort fil baisier et acoler,
N’i out si dur ne l’estoüt plorer. (LXXXVI)
28La même simplicité, qui rend le travail facile, mais qui blesse par sa monotonie, s’atteste dans bien d’autres oeuvres, même fort longues, puisque la Vie de saint Thomas de Cantorbery, de Guernes de Pont-Sainte-Maxence, dépasse cinq mille vers, et Naetebus a calculé que le tiers des types qu’il a classés relève de cette formule24. Cependant les strophes monorimes disparaîtront peu à peu ; ce sont les coblas continuadas des Leys d’Amors, qui les déclarent prématurément hors d’usage. Elles ne deviendront très rares qu’au xve siècle, bien qu’elles soient encore admises à cette époque par les Règles de seconde Rhétorique, pour lesquelles, en particulier, l’Audengière ne peut consister qu’en un douzain monorime d’alexandrins25.
29La pluralité des rimes semble, en effet, préférable : elle ouvre un champ très vaste au talent des poètes ; elle aiguise leur ingéniosité. Les Provençaux en donnent l’exemple. Parfois leurs fins de vers changent de strophe en strophe ; parfois ils ne s’astreignent à faire revenir les mêmes sons qu’à une ou deux places dans chacun de leurs couplets ; parfois enfin (coblas unissonans), tous leurs couplets reproduisent les mêmes timbres, en séries régulières, mais sous des mots différents, ce qui est assurément beaucoup plus difficile. Marcabrun († 1147) a pratiqué tour à tour toutes ces manières et nous a laissé les preuves d’une remarquable virtuosité. Voici un échantillon du troisième type, qui nous est fourni par une pièce de Bernard de Ventadour (†1195), Quan la fuelha sobra l’arbre s’espan, en quatre strophes, chacune de huit décasyllabes. De l’une à l’autre la correspondance est parfaite :
30Et ils inventent aussi des dispositions de rimes. Ils en présentent même davantage que les poètes septentrionaux. Ceux-ci cependant ne sont pas prisonniers des schémas fixes, loin de là. Sans doute la strophe en octosyllabes des Vers de la Mort se reproduit avec persistance26, selon la formule aabaabbbabba, comme dans cet exemple du Rendus de Moliens :
De celi ne sai que je fache,
Qui se pleint que Diex en sa fache
Ne mist pas color assés bele,
Ou pour chc que langors l’encache
Au merthonier biauté pourcache
Dont ele depaint sa maisele
Aussi comme on paint une aissele :
Neïs la vielle renovele
Sa color que vielleche effache
E soi revent per jovenchele.
« Bele sui », dist la chetivele :
« Li merchiers, non Dieu, en ait grace. »
(Bartsch, Chrest., p. 342)
31Mais il s’en faut de beaucoup qu’il en soit toujours ainsi. Voici, rien que pour le huitain, vingt-sept successions différentes relevées dans des strophes tant isométriques qu’hétorométriques, avec des terminaisons masculines ou féminines :
32Cette liste a d’ailleurs bien des chances de ne pas être complète.
33Quant au nombre des rimes auxquelles le poète a recours à l’intérieur d’une même strophe, il varie selon qu’elle est plus ou moins longue. La question a été examinée par P. Meyer. Il a montré que les Provençaux en avaient fait une plus grande consommation que les poètes du Nord. « Tandis qu’en provençal, a-t-il écrit27, des couplets de huit vers, et même de sept, ont parfois cinq rimes (abbcdde, ababcdde, etc...), en français le couplet de cinq vers ne dépasse pas trois rimes et souvent n’en a que deux. Le couplet de huit vers a ordinairement deux ou trois rimes, rarement quatre. Il faut arriver au couplet de dix vers pour trouver cinq rimes, et encore est-ce bien rare. Il y a des couplets de treize, quatorze, quinze vers qui se contentent de trois rimes et même de deux. Sauf des exceptions infiniment rares, les rimes d’un couplet trouvent dans le couplet même les rimes correspondantes. En provençal, au contraire, on sait combien est fréquent l’usage des rimes isolées qui ont leurs correspondantes dans les autres couplets28. » On peut remarquer en effet que la poésie française est en marche vers des formes de plus en plus strictes, auxquelles les auteurs s’attachent parce qu’elles sont à la fois plus serrées et plus difficiles : les seizains de Molinet sont bâtis sur trois rimes au plus, ses trentains sur deux seulement29, et c’est assurément un homme auquel la « croisure » des rimes, comme il disait, n’était pas chose indifférente.
34On trouvera, dans un chapitre ultérieur, d’autres précisions sur la disposition des rimes, qui se répartissent selon divers types classés. Nous ne nous occupons pour le moment que du rôle qu’elles jouent dans les strophes. Nous en arrivons ainsi à deux problèmes qui ont gravement préoccupé les poètes médiévaux30, celui de l’autonomie des groupements de vers, et celui de leur liaison entre eux : ces deux problèmes sont presque contradictoires, et, d’avance, sauf exception, on peut dire qu’ils devront recevoir des solutions forcément divergentes. Tout d’abord on doit bien considérer qu’au Moyen Age les strophes n’ont une facture aussi rigoureuse que de nos jours. Aujourd’hui, nous les voulons généralement d’un seul jet, et solidement construites. Alors il n’en est pas toujours ainsi. Souvent la liaison syntaxique est faible. Dans un même poème, il arrive qu’une forte ponctuation termine tels vers, tandis qu’ailleurs, à la même place, on ne trouvera rien de tel. Soit donc un quatrain de Christine de Pisan, dans ses Notables moraux à son filz31 :
Trop convoiteux ne soyes mie,
Car convoitise est enemie
De charité et de sagesse :
Te garde de fole largesse.
35Ici le second et le troisième vers font bloc pour le sens, tandis que le premier et le quatrième demeurent assez indépendants. Un peu plus loin, au contraire, on lit :
Se es capitaine de gent,
N’ayes renom d’amer argent :
Car a peine pourras trouver
Bonne gens d’armes, se es aver.
36Dans ce dernier quatrain, les vers sont au contraire groupés deux par deux ; le premier et le second vont ensemble ; il en est de même pour le troisième et pour le quatrième. Pour comble de malheur, il s’agit de rimes plates. On ne sait donc exactement quand se termine la strophe, sauf qu’un repos complet intervient tous les quatre vers. Soient donc maintenant ces deux huitains de Villon :
Qu’avoir esté seigneur !... que dys ?
Seigneur, hélas ! ne l’est il mais.
Selon les davidiques dictz,
Son lieu ne congnoistra jamais.
Quant du surplus, je m’en desmetz,
Il n’appartient a moi pecheur :
Aux theologiens le remetz,
Car c’est office de prescheur.
Si ne suis, bien le considere,
Filz d’ange, portant dyademe
D’estoylle ne d’autre sydere.
Mon pere est mort, Dieu en ayt l’ame !
Quant est du corps, il gyst sous lame.
J’entends que ma mere mourra,
Et le sçait bien la povre femme,
Et le filz pas ne demourra.
37Si on les compare l’un à l’autre, on peut observer qu’ils présentent des arrêts de sens très marqués à des places différentes. Cependant le poète n’a pas voulu qu’on pût prendre chacun d’eux pour une suite de deux quatrains juxtaposés.
38En somme il n’y a pas beaucoup de moyens de rendre sensibles à la fois l’unité de la strophe et sa liaison avec le reste du système dont elle fait partie. Il y en a pourtant. Le premier, dans les œuvres destinées à être chantées, réside dans la musique : la mélodie recommence et s’achève avec chaque couplet, et elle est la même pour tous les couplets : ils sont donc isolés, et en même temps on se rend compte qu’ils font partie du même ensemble. Le retour du refrain joue le même rôle, refrain qui a subsisté dans certains poèmes à forme fixe, tels que la ballade, quand ceux-ci ont cessé d’être chantés. La fin de la pièce, le cas échéant, peut être signalée par l’envoi, emprunté à la tornada provençale. Tous les autres procédés amènent des résultats beaucoup moins nets ; ils favorisent soit l’unité, soit la liaison, l’une aux dépens de l’autre, sans que cependant le poète cherche toujours à rencontrer les deux à la fois.
39A ce dernier défaut échappent sans doute les coblas unissonans, où toutes les strophes se succèdent selon le même ordre de rimes, ainsi qu’on peut le constater dans l’exemple déjà analysé de Bernard de Ventadour32, ou dans la chanson du roi de Navarre Feuille ne flors ne vaut riens en chantant33, dont toutes les finales sont en -ant ou en -ter ; mais, pour croire à l’effet certain de ce système, il faudrait apparemment accorder un trop large crédit à l’attention de l’auditeur, si d’autre part il ne devait être beaucoup plus sûrement guidé par le nombre des vers et mieux encore par la musique. A l’époque courtoise, on se contentera des coblas doblas, en appariant les strophes deux à deux au moyen de leurs rimes, ce qui donne trois paires pour un poème de six strophes, et, pour un poème de cinq strophes, deux seulement, suivies d’un couplet indépendant34.
40L’unité est facilement atteinte dans les strophes construites sur une seule rime : leur individualité résulte du nombre de vers, que groupe le timbre de leur syllabe finale. C’est en somme le principe auquel obéissent les laisses des Chansons de Geste, mais employé avec plus de rigueur, puisque le nombre des vers est constant. Si la strophe n’est pas monorime, les poètes évitent les rimes plates ; ils les répartissent et les disséminent au contraire dans le couplet, de façon à en lier les diverses parties. Tous n’y sont pas habiles, et même tous n’en voient pas la nécessité. Les octosyllabes de Saint Léger marchent deux par deux, laissant à la mélodie le soin de les unir. Ailleurs, après quelques entrelacements, les derniers vers sont écrits en rimes plates, de telle sorte que l’étreinte se relâche. En voici un exemple de Guiot de Dijon :
Bien doi chanteir quant fine Amor m’ensaigne.
A cui je sui trestous entierement.
La millor ain per son comandement,
Dont j’ai ne kier ke del servir me faigne,
Ains seux tous siens, en keil leu ke je soie ;
Et c’elle ait kuer ke de rien m’i mescroiet,
Si m’en ensainst et devist la manière ;
Se je nel fais, tous jours soit ma guerriere.
41Au contraire les deux strophes de Villon citées précédemment sont plus fortement construites ; elles répondent à la formule ababbcbc, qu’on retrouve chez d’autres poètes, et où b reparaît à l’avant-dernier vers. Marot présente la formule ababbccb, un peu différente, approuvée par Th. de Banville, qui s’appuie sur elle pour donner la définition du huitain : « Dans le Huitain, écrit-il35, il y a quatre vers qui riment ensemble... Ce sont le second et le quatrième, le cinquième et le septième. Le premier et le troisième vers riment ensemble. Le sixième et le huitième riment ensemble. Mais ces deux couples de rimes sont si bien liés et tressés entre eux par la rime quadruplée des second, quatrième, cinquième et septième vers, qu’on ne saurait couper nulle part cette belle strophe, qui forme un tout d’une parfaite cohésion. » Ces constructions sont plus résistantes que celle d’Hélinand (aabaabbbabba) à laquelle on peut reprocher de se subdiviser trop régulièrement en groupes distincts, avec renversement au septième vers, bien que la strophe des Vers de la mort ait déjà l’avantage de n’être écrite que sur deux rimes au lieu de trois, selon une tendance à laquelle obéiront volontiers les poètes du xve siècle, désireux de resserrer les formes dont ils se servent.
42D’autres procédés sont encore plus lâches. L’un d’eux consiste à changer de rimes avec chaque couplet : la nouvelle série, avec un nombre fixe de vers, doit suffire à guider l’auditeur. Il en est ainsi de la pièce Chanter m’estuel, car pris m’en est corage, de Gilles de Vieux-Maisons36 : la première strophe présentant en effet des finales en -age et en -ien, celles de la seconde sont en -ie et en-u, celles de la troisième en -orne et en -ent, et ainsi de suite. « Les rimes sont singulières (rims singulars), disent les Leys d’Amors37, lorsqu’il y a plusieurs couplets, et qu’aucun d’eux n’a les mêmes rimes que l’autre, mais qu’elles sont entièrement différentes. » Ailleurs les poètes usent du retour des mêmes sonorités pour grouper leurs vers. Ou bien ils font appel à la rime grammaticale, que nous retrouverons et définirons dans un autre chapitre38. Thibaut de Champagne vous en fournit un exemple : l’un de ses poèmes39 termine en effet chacune de ses strophes par des mots de même famille, qui s’appellent l’un l’autre, partir et partie ; faillir et faillie ; ami et amie ; saisi et dessaisie ; merci et mercie ; oubli et oublie. Ou bien encore ils opèrent des liaisons plus ou moins constantes qui, à l’intérieur d’un même couplet, unissent les vers l’un à l’autre, en s’inspirant des modèles que leur ont donné les Provençaux. Les Leys d’Amors citent cette strophe :
Verges sendiers verays et pons.
Pons de salut et clara fons
Fons de purtat e viva dolz
Dolz quelz peccatz deveia totz
Vos nos guidatz, Verges Maria,
E mostratz nos del cel la via.
43Ces couplets, ajoutent-elles40, se font en partie par rapport à l’ordre, et en partie par rapport au sens... Ce qu’on fait ainsi par vers, on peut le faire aussi par couplet. Ce couplet est appelé cobla capfinida parce que le mot, la syllabe, ou la phrase qui termine un vers, devient le commencement du suivant. » La leçon ne sera pas perdue pour les grands Rhétoriqueurs ; elle leur donnera l’idée de leurs rimes « annexées » ou « enchaînées », sur lesquelles il y aura lieu de revenir. Quant aux coblas capfinidas, un échantillon41 nous en est fourni par une chanson du roi de Navarre, Je ne puis pas bien metre en nonchaloir... : la première strophe se termine par dolor ; la seconde commence par Ceste dolor et finit par retor ; Ice retor figure au début de la troisième, qui s’achève par remuer ; Don remuer reparaît au premier vers de la quatrième, dont le dernier mot est celer, lequel forme les deux syllabes initiales de la cinquième et dernière42.
44Nous en arrivons ainsi à la question de la liaison des couplets entre eux, dont ce dernier poème en coblas capfinidas vient déjà de nous apporter un exemple. Ce problème, bien plus que celui de l’unité, semble-t-il, a retenu l’attention des poètes médiévaux. Le procédé le plus simple consiste dans la pratique de l’enjambement de strophe à strophe. C’est aussi le plus mauvais, car il est en complet désaccord avec la forme choisie, et d’ailleurs il ne se soutient pas d’un bout à l’autre d’un même poème. A l’origine, c’est un fait exceptionnel. Il n’y en a pas, dit Stramwitz, dans les laisses épiques ; on en voit paraître quelques-uns dans la Vie de saint Thomas43 et chez quelques poètes savants. Mais il est condamné par les Leys d’Amors : « Le couplet, disent-elles44, est une période qui contient un sens parfait ; de sorte que tout couplet est vicieux, lorsqu’il ne renferme pas et ne contient pas un sens parfait, c’est-à-dire lorsqu’il n’a pas un repos plan ou final. » Aussi bien en rencontre-t-on fort peu dans les poèmes destinés à être chantés. Au contraire Machaut, au xive siècle, écrit ses Complaintes en grandes strophes de seize vers, subdivisées elles-mêmes en quatrains dont trois vers sont décasyllabiques, tandis que le quatrième n’a que quatre syllabes, selon une formule aaabaaabbbbabbba45. Or, non seulement le petit vers, en général, est relié parle sens à ce qui suit, mais il arrive que le seizain lui-même ne se termine pas par un repos complet. Voici un passage de la Complainte de l’Amant, dans la Fonteinne amoureuse :
Si vueil estre jolis et amoureus,
Sans plus dire que soie dolereus,
Et savourer les dous biens gracieus
Qu’Espoirs me donne
Et Dous Pensers, dont je sui eûreus,
Car toudis sui compaigniez de ces deus.
Dont il avient souvent, quant je suis seuls,
Qu’on m’araisonne,
Mais si sui pris que je nul mot ne sonne,
Car trop fort pense a la belle et la bonne
Qui de tous biens est la mette et la bonne,
S’en sui honteus.
Mais si mes cuers en ce penser s’ordonne
Qu’il ne vit pas feminine personne,
Tant ait biauté ne tant porte coronne,
Qui me fust preus,
C’est à dire, qui garis me peüst
Ne qui remede en moy mettre sceëst,
Tant de biauté ou de richesse heüst,
Ou tant ren arde
Fust, qu’au garir assés ne me neüst... (971-991)46
45L’enjambement deviendra plus fréquent à partir de Froissart.
46La liaison est encore beaucoup plus apparente dans une forme qui existe déjà chez Rutebeuf47 et qui a été reprise par Machaut dans le Jugement dou Roy de Behaingne, puis par Christine de Pisan dans le Livre des trois Jugements et le Livre du Dit de Poissy. Elle devient même si étroite que le plus souvent le quatrain ne vaut plus que pour l’œil, car aucun arrêt de sens n’en marque la fin, une nouvelle agrafe rattachant perpétuellement de nouveaux vers à ceux qui les précèdent, selon le schéma aaabbbbc cccd dddc etc. :
Au temps pascour que toute riens s’esgaie,
Que la terre de mainte colour gaie
Se cointoie, dont pointure sans plaie
Sous la mamelle
Fait Bonne Amour a mainte dame belle,
A maint amant et a mainte pucelle,
Dont il out puis mainte lie nouvelle
Et maint esmay,
A ce dous temps, contre le mois de may,
Par un matin cointement m’acesmay,
Com cils qui très parfaitement amay
D’amour seüre.
Et li jours fu attemprez par mesure,
Biaus, clers, luisans, nés et purs, sans froidure.
La rousée par dessus la verdure
Resplendissoit
Li clerement que-tout m’esblouissoit... (Roy de Behaingne. 1-17)48
47Ces types sont issus de modèles latins syllabiques où les strophes s’enchaînent l’une à l’autre par leur queue (cauda). Le de rhythmico Dictamine en donne un exemple qu’il a suffi de perfectionner par l’enjambement49 :
Vale, doctor, flor doctorum,
Gemma, decus clericorum ;
Cetum vincis nam proborum
Rithmicando.
Cunctos vincis componendo,
Cunctis spes es in solvendo
Et de te nulla perpendo
Nisi bona...
48D’autres procédés de liaison ont aussi été en honneur. L’un d’eux est assez voisin de celui qui précède, sans toutefois se confondre avec lui. Soit, en effet, une strophe abbccddc : il suffira que dans la suivante c devienne a pour que la connexion soit assurée, si toutefois l’attention de l’auditeur est assez soutenue pour qu’il s’en aperçoive. C’est ce qu’a fait Conon de Béthune dans une de ses chansons, où en outre d est devenu b :
Si voiremant con cele don je chant
Valt melz que totes les bones qui sont,
Et je l’aim plus que rien qui soit el mont,
Si me doint Deus s’amor senz decevoir ;
Que tel desir en ai et tel voloir,
Ou tant ou plus. Deus en seit la verté,
Si con malades desirre la santé,
Desir je li et s’amor a avoir.
Or sai je bien que riens ne puet valoir
Tant con celi de cui j’ai tant chanté,
C’or ai veü et li et sa bealtè
Et si sai bien que tant a de valor
Que je doi faire et outrage et folor
D’amer plus halt que ne m’avroit mestie.
Et non por cant maint povre chevalier
Fait riches cuers venir a halte honor.
Ainz que fusse sospris de ceste amor... (II)
49Les Provençaux désignaient ces arrangements sous le nom de rims capcaudalz50. Ils ont essayé aussi les couplets disjoints ou coblas dis-solulas51, où la rime s’établit de strophe à strophe, par groupes de deux (Ier couplet abcdefgh ; 2e couplet abcdefgh). A ma connaissance, les poètes du Nord n’ont pas usé de cet artifice, mais parfois, comme l’ont fait d’ailleurs Marcabrun et Bernard de Ventadour, ils ont répété à la fin de chaque strophe une même rime isolée (rim estramp). C’est le système auquel a eu recours le Châtelain de Coucy dans une pièce qui répond à la formule ababbaay. (A vos, Amors, plus qu’a nule autre cent...) où y est en -ais dans tous les couplets, sans autre correspondance.
50La liaison peut aussi s’établir par les sons initiaux des différents vers de la strophe, répétés avec insistance de telle façon que, changeant avec chaque strophe, ils finissent par former un mot, ce qui est le principe de l’acrostiche. De pareils jeux, dont il y a des exemples dans la poésie latine syllabique, ont été pratiqués au xive siècle et au xve. Des ballades, poèmes relativement courts, présentent le même mot au début de chacun de leur vers (cobla capdenal), sauf à l’envoi, qui porte obligatoirement le mot Prince : Christine de Pisan en a écrit une dans cette forme, Seulete suis et seulete vueil estre, et nous en possédons une autre de Villon : Je congnois bien mouches en laict52. Mais une telle facture est d’une monotonie passablement fastidieuse, et c’est vraiment la rime qui reste le meilleur moyen d’enchaîner les strophes l’une à l’autre. Pour y parvenir, les poètes n’ont pas reculé devant des travaux d’une complication raffinée. L’un d’eux mérite une description détaillée. II s’agit de deux chansons de même type : l’une, Je chantasse volentiers liement, a été cataloguée dans la Bibliographie de Chansonniers53 de G. Raynaud et signalée par A. Jeanroy54 : l’autre, Nus ne porroit de mauvese reson..., figure parmi les Chansons de Croisade55 et a été étudiée par G. Paris56, qui en a débrouillé le système. Cette dernière pièce se compose de cinq strophes, chacune de neuf vers dont huit ont dix syllabes, tandis que le sixième n’en a que sept. La succession des rimes est la suivante, selon le numéro d’ordre des vers que j’indique horizontalement en tête de mon tableau :
51On constate que la rime des vers 6 et 7 demeure sans changement, tandis que la dernière rime de chaque couplet devient la première du couplet suivant et que la première rime du couplet antécédent passe alors à la seconde place : le roulement est continu. « On voit, dit G. Paris, que, par ce système ingénieux qui lie entièrement les strophes les unes aux autres, chaque rime revient dans trois strophes à trois places différentes, sauf la rime -ance qui reste immuable, et les quarante-cinq vers se contentent de huit rimes. » Des ouvriers qui manient leur instrument avec une telle habileté n’ont bien évidemment plus rien à apprendre, et leur virtuosité, s’il l’avait connue, aurait fait pâlir d’envie un Banville. A ce point de perfection, la versification n’est plus une vile routine ; elle devient un art.
Notes de bas de page
1 Ph. Martinon, les Strophes, 1911 ; ce livre néglige tout ce qui a précédé le xvie siècle.
2 A. Tobler, V. frz. VB., p. 16-17 ; G. Naetebus, p. 3.
3 A. Thomas (Romania, t. X, p. 218) a signalé outre une Epitre de saint Étienne et deux poèmes lorrains.
4 Ph.-A. Becker, Vom christlichen Hymnus zum Minnesang.
5 Cf. A. Bernhardt, Die altfranzösische Helinandstrophe.
6 Leys d’Amors, Ed. G.-A., t. I, p. 199.
7 H. Chatelain, Recherches, p. 86-166. Les strophes du xve siècle, dit-il, peuvent embrasser jusqu’à 32 vers quand elles sont composées de quatrains ou de huitains, ou 48 vers quand elles sont à base de tercets, de sixains ou de douzains, ou de 40 sur la base de cinquains ou de multiples du cinquain, ou 28 sur la base de septains ou de multiples du septain, ou de 36 sur la base de neuvains ou de multiples du neuvain, ou de 44 sur la base du onzain, ou de 39 sur la base du onzain. Ce sont là de bien lourdes machines. Les chiffres ainsi indiqués sont un maximum.
8 On la trouvera dans Th. Gerold, Mus. au M. A., p. 132.
9 Cf. Bartsch, Chrestomathie de l’Afr., p. 50. Il y a d’autres tercets par exemple chez Rutebeuf et dans les Mystères.
10 Sur 84 formes cataloguées par G. Naetebus, 70 sont isométriques, et 14 seulement hétérométriques.
11 P. 170, 177, 234, 245, 246.
12 Ph.-A. Becker, Vom christ. Hymnus z. Mimesang.
13 Cf. éd. A. Jeanroy.
14 E. Langlois, Recueil, p. 33, 272 sq.
15 H. Châtelain, Rech., p. 240.
16 A. Tobler, VF., p. 15.
17 Souvent ces formes sont des succédanés d’autres formes plus anciennes : la succession isométrique aabccb se rencontre déjà dans le Sermon rimé, composé au début du xiie siècle, mais en vers de cinq syllabes.
18 E. Langlois, Recueil, p. 307.
19 R. de Souza, La Rythmique de Ronsard.
20 Ph. Martinon, op. cit., p. I.
21 A. Tobler, VF., p. 15.
22 Cf. infra, p. 115.
23 E. du Méril ; P. p. ht. ant. au xiie siècle, p. 239 (deux pièces du xe siècle).
24 Elle est courante dans le Nord de la France de la fin du xiiie siècle à la fin du xive ; on la retrouve dans Le Débat du Clerc et de la Damoiselle (p. p. A. Jean-roy, Romania, 1914, p. 1-13).
25 Cf. Langlois, Recueil, p. 28 et 64.
26 On la retrouve entre autres chez Jean Bodel, Rutebeuf, le Rendus de Moiliens, Baude Fastoul, Jehan de Condé, et çà et là dans les Mystères.
27 P. Meyer, Romania, t. XIX, 1890, p. 13.
28 Cf. p. ex. la rime en -or dans le poème de Bernard de Ventadour cité plus haut, p. 81.
29 N. Dupire, Jean Molinet, p. 336 sq.
30 Cf. A. Jeanroy, La Poésie lyrique des Troubadours, t. II, p. 74 q.
31 Bartsch, Chrest., p. 440.
32 Cf. supra, p. 81.
33 Thibaut de Champagne, éd. Wallensköld, n° IV, p. 9).
34 La Chanson de Croisade n° XXIII (éd. Bédier-Aubry, p. 249 sq.) comporte une lacune ; mais on peut établir que les couplets I-II sont construits sur les rimes -oie, -ent, les couplets III-IV sur les rimes -ee, -uz, les couplets V-VI sur les rimes -te, -er. La Chanson de Croisade n° XVIII (ib., p. 199 sq.) ne comprend que 5 strophes, les deux premières sur -ir, -er, -ance, la troisième et la quatrième sur -ier, -u, -aie, la cinquième sur -oir, art, -ee. Ailleurs les couplets sont groupés trois par trois : la Chanson de Croisade n° VIII (ib., p. 87 sq.) se divise en deux parties, les trois premières strophes sur les rimes -ete, -er, les trois dernières en -ee, -on.
35 Th. de Banville, Petit traité..., p, 173.
36 Chansons satiriques et bachiques du XVIIIe s., éd. A. Jeanroy et A. Langfors, p. 20.
37 Éd. G.-A., t. I, p. 167. — « Les rimes singulars, note A. Jeanroy (la Poésie lyrique des troubadours, t. II, p. 74), se trouvent naturellement dans des pièces où la rareté des consonances employées dans le premier couplet eût fait de leur répétition un problème à peu près insoluble. Elles se rencontrent enfin couramment dans les poésies satiriques, religieuses ou de circonstance, où la versification est moins soignée que celle de la chanson. »
38 Ci-dessous, IIIe section, ch. iv, p. 136 sqq.
39 Éd. Wallensköld, p. 94.
40 Leys d’Amors, éd. G.-A., t. I, p. 280.
41 Il y en a d’autres exemples ; cf. A. Jeanroy, Romania, 1914, p. 4, n.
42 Chansons de Thibaut de Champagne, éd. Wallensköld, n° XXVI, p. 88 sq.
43 Cf. éd. E. Walberg, v. 2165, 3060, 3080, 3830, 4125, 4500, 4635, 4850, 4860, 5075, 5585.
44 Éd. G.-A., t. I, p. 201.
45 Cette strophe, quant à la disposition de ses rimes, est dérivée de celle des Vers de la mort ; elle présente le même retournement, ici à la neuvième syllabe.
46 Machaut, éd. E. Hoepffner, t. III, p. 177.
47 Avec deux grands vers, et un petit.
48 Machaut, éd. E. Hoepffner, t. I, p. 57.
49 G. Mari, I traliati medievali..., p. 15. C’est le caudatus rithmus continens que les Règles de seconde Rhétorique, au xve siècle, appellent Taille de trois et un.
50 C’est le procédé dont les auteurs dramatiques ont usé au Moyen Age, dans une intention mnémotechnique : « L’enchaînement des répliques par la rime, a constaté E. Roy (Revue bourguignonne, 1903, t. XIII) est la régie dans tous les Mystères du Nord depuis les plus anciens jusqu’aux plus modernes. » Voici la dernière page des Menus Propos, reproduite en fac-simile par E. Picot dans son Recueil général des Sotties (1902, t. I, p. 57), d’après l’édition de Jehan Trepperel, imprimée vers 1495. Il y a trois personnages, que je désigne par I, II, III.
III Ou ilz m’envoieroient promptement
Tout fin droit au quando coel
I Voyre vrayement je suis celuy
Qui prens les mouches a l’englu.
II Sur ma foy, je fus bien onglu,
Je jouasse bien de la herpe.
III Dittes hay ; baillez lui sa serpe,
Il s’en ira coupper des hars.
I Les Allemands et les Lombars
Sont volontiers ung pou hautains
II Les Hongres puent comme dains ;
C’est pitié que de les sentir.
IV Jamais je n’ouys mieulx mentir.
Sus gallans, vaugue la galee !
Quelque ung nous donra la disnee
De quoy je suy moult resjouy...
L’artifice dont il s’agit est inconnu au Mystère d’Adam, mais, dans Courtois d’Arras, il est déjà un fait sinon constant, du moins courant.
51 Leys d’Amors, éd. G.-A., t. I, p. 212. — Ainsi est construite une Sote Chanson de Watier Maqueau de Douai, en cinq strophes de dix vers, suivies d’un envoi de trois ; on trouvera cette pièce dans E. Langlois, Recueil, p. 101.
52 Bartsch, Chrest, p. 461.
53 N° 700.
54 Cf. Chansons de Croisade, éd. Bédier-Aubry, p. 260.
55 Ib., n° XXIV, p. 259.
56 Romania, t. XXII, 1893, p. 541.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Les métamorphoses de l'artiste
L'esthétique de Jean Giono. De Naissance de l'Odyssée à l'Iris de Suse
Jean-François Durand
2000
Spinoza et les Commentateurs Juifs
Commentaire biblique au Premier Chapitre du Tractus Theologico-Politicus de Spinoza
Philippe Cassuto
1998
Histoire du vers français. Tome VII
Troisième partie : Le XVIIIe siècle. Le vers et les idées littéraires ; la poétique classique du XVIIIe siècle
Georges Lote
1992
Histoire du vers français. Tome III
Première partie : Le Moyen Âge III. La poétique. Le vers et la langue
Georges Lote
1955
Une théorie de l'État esclavagiste
John Caldwell Calhoun
John Caldwell Calhoun et Gérard Hugues Gérard Hugues (éd.)
2004
Le contact franco-vietnamien
Le premier demi-siècle (1858-1911)
Charles Fourniau, Trinh Van Thao, Philippe Le Failler et al.
1999