Gertrude Verne ou le parcours d’une militante jacobine niçoise
p. 105-122
Remerciements
Je remercie Jacques Guilhaumou, Christine Peyrard et Julien Saint-Roman pour leurs conseils.
Texte intégral
1Pour analyser le problème de l’apprentissage politique et démocratique dans le milieu populaire, il peut être utile, dans une démarche de microhistoire, d’étudier des trajectoires individuelles d’engagement révolutionnaire. Cette approche peut se révéler particulièrement importante pour rechercher comment des femmes ordinaires ont su participer et intervenir dans la vie politique1, malgré leur exclusion de droits politiques2. Cette méthodologie a aussi le mérite de permettre de valoriser l’action politique féminine dans le processus révolutionnaire là où, à cause de la rareté de sources et de l’absence d’institutions comme les sociétés féminines, la voix des femmes a du mal à se faire entendre, comme c’est le cas de Nice.
2Ainsi, les traces laissées dans les archives par une militante jacobine niçoise, Gertrude Verne, permettent d’analyser la façon dont elle intervient dans l’espace public et par là de comprendre son parcours d’apprentissage politique3. Nous nous proposons de saisir deux aspects de son engagement : d’une part ses pratiques politiques, à savoir ses actions, son rôle et ses relations avec les autres ; d’autre part ses opinions politiques à partir des moments historiques où elle s’exprime. Il s’agira enfin de mettre en relation son militantisme avec la question de la spécificité de genre.
Les pratiques politiques
Les conditions de l’engagement révolutionnaire
3Le rattachement de l’ancien comté de Nice à la République française, à la suite de l’occupation militaire de septembre 1792, ne s’est pas déroulé sans problèmes. En effet depuis 1789 et de manière croissante au fil des années, les émigrés appartenant aux anciens ordres privilégiés quittent la France révolutionnaire et affluent à Nice4. Si les princes du sang préfèrent se réfugier à la cour de Turin, arrivent à Nice les évêques et autres ecclésiastiques refusant le serment de fidélité à la Constitution avec les réguliers des ordres supprimés des régions voisines ; la noblesse de Provence, du Dauphiné, du Languedoc et du Comtat Venaissain, qui souhaite ne pas trop s’éloigner de ses domaines dans l’espoir d’un retour rapide5 ; les officiers et les militaires, qui espèrent rejoindre l’armée des princes6. Leur présence soulève beaucoup de problèmes, dont se plaignent le commandant général La Planargia7 et le consul français Le Seurre8, puisqu’elle donne lieu tant à des prêches enflammés de la part des hommes d’Église qu’à des bagarres avec les défenseurs de la Révolution, ou à l’impression de pamphlets contre-révolutionnaires et même à des complots et projets de coup de force, quoique tous avortés9, mais qui amènent néanmoins le roi Victor-Amédée à ordonner le départ de tous les émigrés d’origine française10. L’évaluation quantitative de cette émigration est difficile à déterminer, surtout à cause de son caractère fluctuant et instable. Toutefois les sources estiment entre 3 000 et 4 000 le nombre de Français ayant trouvé asile à Nice pendant la période 1789-1792, sur une population de 24 000 habitants11 : un apport remarquable, d’autant plus qu’il s’agissait d’une présence fort turbulente. L’historiographie locale a d’ailleurs souligné l’influence que cette émigration a pu avoir dans la diffusion auprès de l’opinion publique de sentiments hostiles aux valeurs révolutionnaires12, ce qui aurait contribué aux résistances à la Révolution après l’annexion du comté à la République. Ce jugement doit tout de même être nuancé, puisque l’émigration française hostile à la Révolution a été quelque part équilibrée par celle des hommes et femmes du Tiers, marchands, boutiquiers, artisans, qui dans les rues et aux terrasses de la ville13 « s’en vont prêchant la soi-disant liberté, indépendance et égalité qui triomphe dans leur pays », comme dénonce avec amertume le vice-intendant du comté de Nice, Mattone di Benevello14. D’autre part, tant La Planargia que Le Seurre, malgré leurs préoccupations pour les agissements contre-révolutionnaires des émigrés, affirment que les effets de ces dernières ont été négligeables auprès des Niçois15. Tout de même la présence des nobles et des autres émigrés adversaires de la Révolution aussi bien que la diffusion des idées de liberté et égalité « prêchées » par les Jacobins dans les terrasses et en dehors des boutiques16, devaient amener les Niçois à s’interroger sur la portée des événements révolutionnaires et à prendre position.
4L’occupation militaire du comté par le général d’Anselme et les troupes françaises, en octobre 1792, radicalise les clivages. La noblesse et les hommes d’Église qui avaient trouvé refuge à Nice, empruntent la route pour Turin et cherchent asile en Piémont, suivis immédiatement par les membres du Sénat niçois et les troupes piémontaises, qui évacuent la ville, suite aux ordres de Turin de protéger le Piémont à tout prix17, laissant ainsi Nice exposée aux pillages18. La ville de Nice et la côte se trouvent ainsi rapidement sous le contrôle des troupes françaises, mais le haut pays reste occupé par les Piémontais : au début du mois de décembre, les Piémontais se trouvent encore à une vingtaine de kilomètres de Nice : c’est seulement au printemps 1794 que les Français parviendront à s’emparer de Saorge, forteresse des Austro-Piemontais19. La proximité du front de guerre et les fréquents changements de celui-ci entraînent des conséquences jusque dans la ville, où se succèdent les rumeurs sur le retour des Piémontais qui sont à l’origine d’émeutes et des successives ripostes des soldats français. La présence de soldats des deux camps impose des réquisitions et des cantonnements mal tolérés par les habitants tant de la ville que des villages de l’arrière-pays. À ceci, il faut ajouter les abus et les pillages commis à Nice pendant les premiers mois de la présence française, qui provoquent la chute du général D’Anselme que la société populaire niçoise considère responsable des désordres20.
5C’est donc dans un contexte d’affrontement militaire que s’ouvre la période révolutionnaire à Nice. Cela a engendré un clivage politique assez marqué, entre républicains pro-français et royalistes pro-piémontais, source de forts antagonismes, auxquels s’ajoute le barbetisme, c’est-à-dire la guérilla menée principalement dans l’arrière-pays par les miliciens de l’armée piémontaise qui revendiquent leur loyalisme pour la maison de Savoie21, auxquels s’ajoutent au fil des années des brigands et des déserteurs et qui souvent jouissent de la complicité de certains administrateurs, de solidarités familiales et de l’appui d’une partie du peuple22.
La rue comme lieu de l’apprentissage politique
6Au moment de l’entrée des troupes françaises, Gertrude Verne a 36 ans. Depuis 1776, elle est mariée avec François Verne, fils « del nobil Ottavio Verne », un maître bâtier et prieur de la compagnie de Saint-Éloi, qui regroupe les maîtres serruriers, arquebusiers, forgerons, chaudronniers, bâtiers, couteliers et selliers existant à Nice23. L’attribut de « nobil » ne se réfère pas au titre d’appartenance aux 216 familles nobles du comté de Nice24, mais d’un terme en usage parmi les routiers niçois. Il est tout de même significatif des ambitions de ce maître sellier qui, grâce au mariage avantageux avec Maria Clerissi en 1744, peut se permettre d’investir la dot de 400 lires25 dans l’acquisition de terres au quartier Aubre à Nice à laquelle s’ajouteront, dans les années suivantes, deux autres acquisitions de moindre valeur26. Parmi les fils d’Ottavio, c’est François qui succède à son père dans le métier de bâtier, qu’il exerce dans la rue Pairolière à Nice, où François et Gertrude s’installent dans un atelier-maison. Le contrat dotal entre les deux se passa oralement lors du mariage, mais trois ans après, en 1779, ils décident de l’enregistrer auprès du notaire27. La dot versée par Gertrude à son mari est de 500 lires, plus le « fardello »28, son trousseau ; pour sa part, François s’engage à lui verser 1 000 lires en « aumento di dote », le douaire des pays de droit écrit29. À cette date, veille de l’annexion du comté de Nice à la France, les époux Verne ont déjà eu quatre enfants, dont une est morte quelque mois après sa naissance. La situation financière du couple paraît être relativement digne : son trousseau est assez varié et comprend des bijoux30 ; en août 1792, François Verne peut se permettre d’acquérir la succession de sa sœur Maria Verne, moyennant le payement d’une rente viagère annuelle de 16 lires31. Toutefois, au début de l’an III, François ne possède pas encore son atelier : dans sa carte de sûreté, il se déclare habitant chez la citoyenne Rose Gavary, rue Pairolière32. Depuis la seconde moitié du xviie siècle cette rue est en fait le siège obligé pour tous les artisans travaillant le cuivre33 : les chaudronniers en premier lieu (« pairoulié » en niçois34), mais aussi les autres artisans de la compagnie de Saint-Éloi, qui travaillent les métaux. Cependant, les cartes de sûreté rédigées au début de l’an III nous restituent un quartier très diversifié par rapport aux professions exercées : à côté des artisans des métaux, l’on retrouve des négociants, cafetiers, aubergistes, tailleuses, couturières : des nombreuses petites échoppes alternent avec les ateliers dans cette rue au cœur de la ville.
7C’est dans cette rue que se déroule l’activité politique de Gertrude Verne. Aux dehors de ces échoppes et de ces ateliers, en bas de chez elle, la rue est l’espace public35 où elle met en avant son opinion politique auprès de son voisinage, ce qui lui attire quelques hostilités. Au mois d’août 1793, on constate qu’elle est agressée par ses voisines, qui lui enjoignent le silence avec une menace chargée de violence : « Va les Piémontais arriveront sous peu et lorsqu’ils seront ici, tu seras la première pendue », ce qui emmène le comité de surveillance de la société populaire de Nice à nommer deux commissaires pour poursuivre les femmes responsables de ces propos36.
Les rôles citoyens dans l’espace public
8Dans le contexte collectif et public de la rue, Gertrude Verne se fait porte-parole des Jacobins, faiseuse d’opinions et dénonciatrice37. Par exemple, elle se charge de porter des nouvelles concernant les faits militaires, qui ont lieu dans l’arrière-pays niçois, où les troupes françaises affrontent l’armée piémontaise jusqu’au printemps 179438. C’est peut-être pour accomplir ce rôle qu’elle a des contacts avec des soldats français. Deux de ses voisines témoignent le simple fait de l’avoir vue parler avec « un militaire français39 ».
9Faiseuse d’opinion dans son quartier, vers la fin de 1794, Gertrude Verne souffle à l’oreille de sa voisine Rosolée Cerena, que le changement politique consécutif à la chute de Robespierre ne lui convient pas : « Dans le temps que les terroristes étaient en place et qu’ils commandaient, elle était plus à l’aise », tandis que « depuis que la canaille se trouve en place et qui commande elle se trouve bien mal ». Familière des lieux de diffusion des rumeurs, là où l’on parle au quotidien, elle déclare au four du quartier, « qu’elle aimait mieux le régime de l’année dernière », qu’elle regrettait la cérémonie organisée à l’occasion de l’anniversaire de la chute de Robespierre et ajoute : « les Niçois hier ont fait une fête, mais ne s’en loueront pas, puisque les terroristes auront de nouveau le dessus40 ».
10Mais c’est, surtout, dans l’affaire de la pétition « contre les terroristes », que l’on peut apprécier le zèle politique déployé par cette militante. Au printemps 1795, la réaction anti-jacobine organisée par les représentants Beffroy et Chiappe se déclenche à Nice41, à la suite des arrêtés à l’encontre des « partisans de Robespierre » signés par Beffroy, envoyé en mission à l’armée d’Italie depuis janvier. Ces dispositions qui ont pour but le démantèlement du réseau jacobin niçois amènent à la fermeture de la société populaire42, à la restitution des églises43 et à l’épuration du corps municipal niçois44 avec le désarmement, destitution ou l’emprisonnement de 56 citoyens, – les membres le plus en vue du parti jacobin niçois –, signalés par Beffroy même, et contribuent à créer un régime « d’opprobre et de mépris45 », de délation, dont les Jacobins niçois payent les conséquences46. Le sommet est atteint dans les jours qui précèdent l’anniversaire de la chute de Robespierre, avec le lynchage des cadres du jacobinisme niçois, Gastaud et Tiranty, enlevés par la foule de la prison et amenés au fort d’Antibes47, et les rassemblements des royalistes, comme relate l’abbé Bonifacy dans sa chronique : « Il popolo tutto intiero alla riserva di pochi saggi corre furiosi per la contrade, cantando canzoni analoghe alla circostanza, e con orribil voce schiamazzando : à bas les Terroristes48 ! ». Dans ce climat agité, Gertrude essaye de rassembler et de convaincre en faveur des Jacobins, cible de la réaction. Elle essaye par exemple de persuader ses voisines de convaincre leurs maris de ne pas signer une pétition contre « les terroristes » qui circule depuis le 25 juillet49. Elle leur dit que « si son mari avait signé, elle aurait couru partout pour le faire rayer »50, en mettant en avant la puissance persuasive féminine au sein du couple51. À ses voisins, par contre, elle conseille de ne pas signer parce qu’« il arrivera des troupes de France, pour couper les bras et la tête de tous ceux qui avaient signé, comme il est arrivé dans l’intérieur de la France52 ». À une voisine, elle explique que « le parti des terroristes, le nombre était plus avantageux » et donc « qu’ils auraient bientôt eu le dessus sur la canaille » (c’est-à-dire les thermidoriens) ; à une autre elle dit que les Niçois ne devraient pas se réjouir de la victoire des anti-Jacobins, car les patriotes étant plus nombreux, bientôt, « des Têtes des Niçois [ils] en joueront aux Boules53 ».
11En tant que militante, Gertrude assume aussi la fonction de dénonciatrice des suspects et de leurs complices54. Par exemple, elle signale sa voisine Françoise Gavary, mère d’un soldat servant dans l’armée piémontaise et déjà dénoncée au Comité de surveillance pour avoir porté une cocarde blanche et pour avoir tenu des propos contre-révolutionnaires55. « Cette citoyenne en est une » aurait dit Gertrude, et ensuite « Bougresse, étais-tu du contre-parti, vas nous ne te manquerons pas, il y aura une guillotine pour toi aussi56 ». Un autre voisin affirme que Gertrude l’avait « plusieurs fois menacé avec des mauvaises paroles en lui disant aristocrate57 ». Cet homme sera arrêté au mois de décembre 1795 en tant que complice des barbets58 qui peuvent compter sur le soutien des royalistes qui n’ont pas émigré, et qui se trouvent dans les nouvelles institutions, comme c’est le cas du voisin de Gertrude, devenu officier municipal59. C’est l’ampleur de ce phénomène qui fait publiquement dire à Gertrude que « la moitié des Niçois étaient des aristocrates » et que « si les patriotes étaient de son sentiment, ils en auraient déjà fait guillotiner la moitié ». La dénonciation civique apparaît comme une étape dans le procès d’apprentissage de la citoyenneté où la prise de parole publique comprend aussi la dénonciation60.
12Pour ses rôles de militante jacobine, de faiseuse d’opinions, de surveillante du milieu où elle habite, Gertrude est considérée par sa réputation publique comme étant « une partisane des terroristes », qui « mène la terreur dans tout le voisinage » et qui « fait peur à tous les honnêtes gens61 ».
Les lettres de prison de Gertrude Verne
13Qu’est-ce que Gertrude Verne a retenu de son expérience révolutionnaire ? Après avoir considéré les façons dont cette femme manifeste son engagement politique, nous pouvons essayer à partir des lettres qu’elle fait écrire lors de son emprisonnement pendant l’été 1795, de dégager ses idées concernant la Révolution. En effet, après la première vague d’arrestations de Jacobins niçois, c’est elle-même qui est arrêtée en tant que terroriste : un dossier avec les témoignages de ses voisins et voisines est rassemblé par les administrateurs du district62. Incarcérée, elle reste en prison du 9 thermidor au 18 fructidor de l’an III soit une quarantaine de jours. Ses lettres dénoncent son arrestation arbitraire et revendiquent sur le plan éthique son honnêteté dans un contexte de corruption générale. Mais dans cette démarche, elle revient aussi sur son engagement politique. Nous pouvons donc essayer de croiser son comportement et ses propos rapportés par ses voisins et la version des faits qu’elle confie à ces lettres.
La publicité de l’opinion, la transparence du comportement
14Nous pouvons remarquer d’abord une correspondance entre son engagement politique, ouvertement manifesté et les idées de publicité et transparence qu’elle revendique dans les lettres. En s’adressant aux représentants en mission auprès de l’armée d’Italie, alors Maisse et Peyre63, pour savoir pourquoi elle a été emprisonnée, elle souligne son attachement patriotique précoce, et donc authentique, mais aussi la dimension publique de son engagement. Elle écrit : « depuis trois ans j’ai montré du patriotisme » ; « j’ai montré de l’amour pour la République », « j’ai montré de l’amour pour la patrie ». Cette valorisation de son identité et activité politique de Jacobine est d’autant plus éclatante par rapport aux pétitions signées par les autres Jacobins frappés par la réaction anti-jacobine64 qui, afin d’être réhabilités, très souvent estompent leur engagement politique révolutionnaire65.
15Pour Gertrude qui, au contraire, assume complètement son identité jacobine, c’est la publicité de ses convictions politiques qui est une des causes de son emprisonnement. En revenant sur son activité de surveillante du milieu où elle habite, elle affirme :
Depuis trois ans que j’ai montré du patriotisme, mon amour pour la République déplais à mes ennemis, et bien que me demande-t-on ? Que voulaient-ils ? M’accuse-t-on d’avoir des intrigues ? Croient-ils que j’ai quelque chose de suspect dans la maison ? Ordonnez que l’on fasse une visite chez moi. M’accuse-t-on d’avoir conspiré contre l’État ? Qu’ils montrent mes crimes en public66
16En se déclarant victime de la calomnie, qu’elle définit en termes d’« intrigues » et « suspects »67, elle oppose la vertu de la transparence, puisqu’elle dit ne pas craindre l’inspection de sa maison ; contre les conspirations supposées, elle réclame des preuves publiques. Pour Gertrude Verne donc, la publicité de l’opinion et la transparence du comportement sont garantes de la droiture du comportement et sont les seules valeurs à même de prévenir les accusations calomnieuses et les arrestations arbitraires de citoyens honnêtes68.
17Si le comportement vertueux est lié à la transparence, le système de calomnie à l’encontre des Jacobins s’appuie selon elle sur les intrigues69 qu’elle associe, selon une image très répandue, aux ténèbres70 :
tous les dénonciateurs ou du moins en majeure partie ont été les pièges pour détruire les vrais républicains. Voilà ce que nombre de familles gémisse, de cette sombre noirceur : depuis le commencement du nouveau gouvernement la vérité vient toujours trop tard.
18Et elle ajoute que c’est « l’esprit de vengeance [et] une haine implacable » [qui] permettent aux ennemis de triompher et par leurs rapports à persuader que je suis une scélérate à vos yeux71 ».
19L’idée de publicité est par ailleurs strictement liée à celle d’authenticité. Les « vrais républicains », comme elle dit, sont ceux qui affichent ouvertement leurs sentiments, parce qu’« il ne peut être de mentir sous les droits de la Nature72 ». Donc, le vrai républicain, le citoyen fidèle à la République qui agit en tant que dénonciateur civique ne peut pas devenir calomniateur, car il agit sous les droits de la Nature. Au contraire, les intérêts qui animent les calomniateurs entraînent forcément des mensonges : « il est incontestable que lorsque des personnes vous conservent une haine implacable puissent dire du vrai de ceux qu’ils dénoncent73 ».
20Une pétition du 16 thermidor de l’an III, signée par des anciens membres de la société populaire, du comité de surveillance et de militaires, au total quinze hommes qui demandent son élargissement74, confirme par ailleurs que l’apprentissage démocratique de cette femme repose sur la manifestation publique de ses opinions. Ils écrivent :
[…] la petition que nous vous presentons au sujet de la citoyenne […] que les ennemis de la cause publique, ou pour mieux dire des Royalistes ont fait mettre en prison […] la faisant passer pour therroriste. Le malheur de cette femme envers ces mal intentionnés est que depuis que les français ont entré dans Nice, elle a toujours donné des preuves du plus pur patriotisme, si c’est un crime d’etre patriote nous sommes tous compromis. Citoyens Représentants, nous connaissons ses sentiments, nous l’avons vue en Public dire sa façon de penser [nos italiques] toujours pour le bien de la chose, C’est elle qui a plus fait qu’aucun autre Niçard. Voilà pourquoi on y en veut. […] Ils furent à désirer que tous les Niçards fussent comme elle75.
21Cette pétition, qui témoigne de la valeur politique de l’engagement public de Gertrude Verne, en lui reconnaissant une place fondamentale dans la diffusion des idées révolutionnaires à Nice, prouve l’importance de la prise de parole publique dans les pratiques politiques de construction de l’opinion favorable à la Révolution76.
Le futur proche comme horizon du politique
22L’autre aspect des discours tenus par Gertrude Verne qui mérite une attention particulière concerne la notion de futur qui se dégage de ses mots. Dans les discours qu’elle tient avec ses voisins et voisines, elle fait souvent référence aux attentes et appréhensions pour un futur présenté comme implacable : « nous ne te manquerons pas, il y aura une guillotine pour toi », « les terroristes auront de nouveau le dessus », « des têtes des Niçois ils en joueront aux boules », « dans trois jours il arrivera des troupes de France » etc. Si le caractère menaçant tire toujours sa force dans une projection dans le futur77, il est tout aussi vrai que les multiples références de Gertrude Verne marquent un rapport nouveau à l’avenir. Dans ses lettres, elle dénonce la situation d’injustice dont elle est victime et exprime aussi une certitude dans l’avenir, où elle projette ses espérances de justice : « la vérité viendra un jour à mon secours et me rendra justice […] mes deux innocents [ses fils] emporteront avec eux la mémoire à la justice78 ».
23En effet, la rupture révolutionnaire semble avoir fait éclore pour cette citoyenne un nouvel horizon d’attente79. À l’idée du futur comme dimension d’accomplissement des espoirs de justice et liberté se noue aussi une nouvelle perception du rapport entre l’action politique et ses effets80. Cette prise de conscience de l’apport individuel au développement historique réel81 apparaît dans le sens que Gertrude Verne donne de la mort de Marat. Au début de l’été 1795, en pleine réaction antijacobine niçoise, elle explique à sa voisine qu’« à présent Marat est mort, mais il doit bientôt renaître » ; ensuite elle ajoute qu’« elle en gardait un [de Marat] en cachette » et « qu’elle l’aurait bientôt fait réapparaître »82. La juxtaposition de l’expérience – la mort de Marat – au futur – le retour de Marat – implique la négation de la mort de Marat, ce qui renvoie à une assimilation de Marat au Christ83. Cependant la sécularisation des attentes84 fait place à l’émergence de l’action individuelle, puisqu’elle affirme pouvoir faire paraître Marat à nouveau85. Le dépassement de la mort, et donc implicitement de l’arrêt momentané du mouvement révolutionnaire marqué par la disparition du représentant du peuple, se fait à travers un procès de réappropriation personnelle de Marat (« elle en tenait un en cachette ») qui permet à Gertude, c’est-à-dire à toute citoyenne, de devenir protagoniste de la reprise du mouvement révolutionnaire86. Par ailleurs, en mettant en avant la puissance féminine au service de la patrie87, Gertrude Verne rejoint les citoyennes républicaines parisiennes qui exprimaient leur intention de surmonter la disparition du représentant du peuple en promettant « de peupler la France de petits Marats88 ».
L’engagement politique révolutionnaire à l’épreuve du genre
24Cette dernière considération nous amène plus directement à la problématique de la spécificité de genre que nous pouvons envisager sous deux points de vue. Quelle place avait le genre dans ses discours ? Quel rapport y a-t-il eu entre la répression dont cette citoyenne a été victime et son appartenance au sexe féminin ?
La place de la maternité dans l’identité citoyenne
25Dans les lettres, Gertrude se présente avant tout comme une « citoyenne », une « patriote », une « vraie républicaine ». Elle fait référence à son rôle maternel seulement deux fois. Elle rappelle dans une lettre que son fils aîné sert à l’armée du Nord et que sa correspondance avec lui prouve son attachement à la République. Une autre fois, elle rappelle qu’elle est mère d’un enfant de presque un mois, que « l’on m’a inhumainement enlevé » et elle signale que son éloignement pourrait être fatal pour son enfant. Par ailleurs son état physique se ressent des séquelles de l’accouchement : trois avis des médecins soulignent qu’elle souffre de fièvres, de douleurs de ventre et de poitrine et qu’elle a des « crachements de sang89 ». Tenant compte de ces éléments, il est remarquable que, dans ses lettres, elle esquisse une distinction entre son identité de citoyenne, qui réclame « d’être entendue et jugée » ou mise en liberté, et son rôle maternel : une séparation qui prouve un haut degré de politisation90.
L’engagement politique et ses désagréments
26Le 18 fructidor III, Gertrude Verne est assignée à résidence, très probablement à cause de son état de santé. Elle n’a pas laissé de traces dans les archives au cours des années suivantes. Nous ne la retrouvons qu’au mois de mai 1800, quand une autre réaction s’abat sur elle et sa famille : celle de la terreur blanche des Barbets.
27La situation politique à Nice après la réaction thérmidorienne reste agitée en raison, notamment, des soldats qui affluent à Nice, « siège » de l’armée d’Italie, en vue de la reprise des opérations militaires au printemps 1796. La pénurie de logements, les problèmes de ravitaillement, accentués par l’insuffisance du réseau des transports ; l’entassement dans les hôpitaux par des victimes des épidémies et des blessés91 donnent facilement lieu à des mutineries92 ou à des troubles avec les civils93. Par ailleurs, l’affaiblissement du parti jacobin avait favorisé le parti royaliste et le retour des émigrés94. Le glissement à droite permet aux courants contre-révolutionnaires de gagner de la place dans la vie publique95 : les barbets en profitent pour étendre leur camp d’action de l’arrière-pays niçois jusqu’aux portes de la ville96. Le nombre de ces brigands se multiplie ensuite par l’apport de militaires licenciés à la suite du traité de Paris, signé le 10 mai 1796, par lequel Victor-Amédée III renonce à la Savoie et au comté de Nice. Ce regain du barbetisme au cours de l’an IV, cause « de délits de toute nature, pillages, vols, homicides et assassinats97 », amène la mise en place de mesures de répression98. Cependant elles ne parviennent pas à l’anéantissement des bandes qui mènent leurs actions criminelles pendant tout le Directoire99. Avant le coup d’État de Napoléon, la recrudescence des insurrections contre-révolutionnaires en Europe100 se manifeste aussi dans le département des Alpes Maritimes, avec la multiplication des actions des barbets101, encouragés par les rumeurs concernant l’avancée de la deuxième coalition avec l’occupation de Turin en juin 1799102. À l’automne, la ville de Nice est frappée par une épidémie de typhus, qui fait de nombreuses victimes103, dont un des fils du couple Verne. C’est donc une ville affaiblie par l’épidémie qui assiste au repli des troupes françaises, talonnées par les Austro-Piemontais, dont l’avant-garde s’établit dans les montagnes de l’arrière-pays niçois au début du mois de mai 1800104.
28La proximité des Piémontais donne de la hardiesse aux barbets. Le 10 mai, une bande de cinq barbets originaires de l’Escarène, un village sur la route vers le Piémont, évacué par les derniers soldats français et occupé par les Piémontais105, assaillent Marianne Baroni, épouse de Louis Tricher, sous lieutenant en Égypte, lui volent tous ses biens, la frappent avec leurs pistolets, l’insultent, l’accusent d’être « la putain des Français » et la déshabillent. La femme est sauvée par une colonne mobile française, alarmée par les cris de la femme106. Les cinq hommes parviennent néanmoins à s’échapper et retournent à l’Escarène, avec les habits de la femme hissés sur leurs fusils et le butin du vol, qu’ils essayent de revendre sur la place du village107. Le même jour, ils attaquent et pillent la maison du commissaire du gouvernement du canton de l’Escarène, Ignace Uberti, d’après les ordres d’un officier de l’armée austrosarde108. Le jour suivant, à midi, l’avant-garde austro-piémontaise composée par 500 soldats fait son entrée à Nice109, accueillie par le clergé et les citoyens qui se rassemblent à la rue Pairolière pour fêter l’entrée des troupes110. Avec eux, plusieurs barbets, dont la bande de l’Escarène, arrivent en ville. Le soir, pendant l’illumination générale à l’honneur des Austro-Piémontais, quelques barbets se rassemblent sous la maison Verne et, en criant « vive le roy », annoncent à Gertrude que « il est temps de se venger », la giflent et lui arrachent son collier. Le matin suivant, à 7 heures, une bande de barbets armés de fusils et pistolets attaque la maison et le magasin des époux Verne. Gertrude est frappée avec un fusil par le barbet Pierre Faraut, qui lui arrache une tabatière de ses mains, tandis qu’un autre, Jean-Baptiste Blanc dit « LaDrola111 » tue François Verne d’un coup de fusil et que le reste des barbets pillent la maison et le magasin et jettent par la fenêtre les biens qu’ils n’emportent pas112. Les moyens opérationnels de la bande sont les mêmes que lors des attaques contre Ignace Uberti et Marianne Baroni. Certains objets volés dans la maison Verne, parmi lesquels nous retrouvons les effets de la dot de Gertrude, sont aussitôt revendus par la bande de pillards, tandis que les outils de travail saisis dans le magasin de François sont répartis parmi les membres de la bande. Ce sera l’identification de ces objets comme appartenant à François Verne qui permettra aux gendarmes d’arrêter le 16 mai 1803, Pierre Feraut et Xavier Payrany et ensuite Baptiste Blanc113.
29Plusieurs témoins ont signalé la présence de soldats de l’armée piémontaise dans les environs de la maison Verne pendant le pillage qui n’interviennent pas, malgré la proclamation du rétablissement de l’ordre public des autorités piémontaises114. Pendant l’interrogatoire, le chef de la bande, Baptiste Blanc, avoue avoir entré à Nice à la suite des troupes piémontaises et être obligé par le comte de Pierlas, commandant de l’armée, de s’armer d’un fusil et de se joindre aux soldats. Enfin, un observateur certes pro-piémontais mais néanmoins extérieur aux événements comme l’abbé Bonifacy note ainsi dans son journal l’assassinat de François Verne : « Le milizie volontarie sarde [c’est nous qui soulignons] hanno ucciso in Nizza l’infelice Verna115 ». Ainsi, la fureur collective116, qui s’abat sur les époux Verne, annoncée et revendiquée comme « vengeance »117 n’est pas une fureur aveugle. Elle paraît plutôt comme encouragée et dirigée par le pouvoir piémontais et renforce l’idée d’un crime politique, visant directement l’engagement public de Gertrude.
30L’occupation de Nice par l’armée austro-piémontaise ayant été de courtes durées, les Français font leur retour à la fin du mois de mai 1800118. Toutefois l’éphémère occupation avait montré le soutien dont les barbets pouvaient encore jouir chez les Piémontais, légitimant leurs actions criminelles. La priorité du nouveau préfet Florens est donc de démanteler cette hiérarchie contre-révolutionnaire en frappant avec sévérité les chefs du barbetisme, tout en pratiquant une justice plus mitigée envers leurs acolytes119. Cette perspective, même si elle n’était pas unanimement partagée120, se reflète dans l’action du tribunal criminel spécial121, qui depuis son installation par la loi du 18 pluviôse an IX, jugeait par des procédures expéditives, sans jury et sans appel, les rassemblements séditieux et les assassinats prémédités122 et qui est chargé de l’affaire Verne en octobre 1803123. Malgré les témoignages à charge contre les prévenus, nombreux et décisifs (presque une vingtaine de témoins oculaires donnent des descriptions détaillées du pillage et de l’assassinat), malgré la « voix publique » qui voit les trois prévenus coupables de l’assassinat et malgré les faibles déclarations à leur décharge (dont aucun témoin oculaire124), les peines infligées par le tribunal aux trois inculpés en février 1804 sont fort mitigées125. Xavier Payrany et Jean-Baptiste Blanc « LaDrola » sont convaincus d’avoir fait parti de l’attroupement qui avait attaqué la maison Verne, mais puisqu’il avait été impossible de déterminer qui avait effectivement tué François, ils sont condamnés respectivement à deux et quatre mois de prison (mais Blanc « LaDrola » avait déjà été condamné pour d’autres crimes), tandis que Pierre Faraut est acquitté126.
31Cette clémence s’inscrit dans la « volonté délibérée de modération » qui caractérise la justice dans le pays niçois pendant le Consulat127. Comme pour les autres affaires jugées par le tribunal spécial des Alpes-Maritimes128, l’indulgence des juges laisse l’assassinat de François Verne somme toute impuni. Gertrude Verne paraît être consciente de ce laxisme caché derrière la recherche de la paix sociale. Un aspect non moins important de l’affaire était celui du dédommagement. La correspondance du préfet nous apprend : « […] de nouvelles réclamations de la part de la veuve Verne qui demande indemnité ou restitution des objets volés et dommages »129. En fait, tout de suite après le retour des Français en mai 1800, Gertrude s’était adressée à plusieurs reprises tant à la municipalité qu’au préfet pour obtenir des secours publics130. L’assassinat de son mari et le pillage de sa maison l’ont réduite à la misère : chargée de deux enfants, elle se décide à quitter Nice et s’établit à Antibes où elle travaille comme « journalière ». Nous ne pouvons pas savoir si Gertrude a obtenu des dédommagements. Toutefois, en dehors des voies légales, elle a pu récupérer au moins une partie de ses effets, comme l’indique une lettre que lui adresse le curé de l’Escarène131.
Conclusion
32L’approche microhistorique permet de mieux comprendre comment des femmes ordinaires ont pu s’engager dans l’action révolutionnaire. En analysant comment Gertrude Verne a su faire entendre sa voix, nous avons voulu montrer la valeur de la prise de parole publique dans l’apprentissage politique. Par le précieux apport de ses lettres et de ses propres mots, nous avons pu analyser sa conception de l’événement révolutionnaire, où chaque individu, homme ou femme, citoyen ou citoyenne a la possibilité d’intervenir dans la vie politique et d’inscrire son avenir dans le temps de l’histoire. Cependant, la répression politique dont elle a été victime nous rappelle les dangers de l’engagement révolutionnaire dans un contexte de réactions politiques, notamment pour les femmes, victimes non seulement de leur engagement révolutionnaire, mais aussi de la transgression des rôles traditionnels. Peut-être alors, en conclusion, que le trait révolutionnaire de l’apprentissage politique de Gertrude Verne, et de centaines d’autres femmes qui resteront anonymes, est le fait d’avoir su franchir les assignations traditionnelles et signaler dans l’espace public ouvert par la Révolution leur présence en faisant entendre leurs voix de citoyennes.
L’action héroïque d‘Agricol Viala et sa mort au combat de la Durance le 5 juillet 1793, Avignon, Bibliothèque municipale, Atlas 13/132.
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Notes de bas de page
1 Martine Lapied, Jacques Guilhaumou, « L’action politique des femmes pendant la Révolution française », dans Encyclopédie historique et politique des femmes, C. Fauré, éd, PUF, 1997 ; Dominique Godineau, « De la guerrière à la citoyenne. Porter les armes pendant l’Ancien Régime et la Révolution française », Clio, no 20, 2004, p. 43-69.
2 Lynn Hunt, « L’Histoire des femmes : accomplissement et ouvertures », dans M. Lapied, C. Peyrard, dir., La Révolution au carrefour des recherches, Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence (PUP), 2003, p. 288.
3 Archives départementales des Alpes Maritimes (ADAM), L975, CE 07U 01-10, archives municipales Ville de Nice (AMN), I 61 et Délibérations de la société populaire de Nice (1792- 1795), Nice, Serre, 1994.
4 George Doublet, « L’émigration française à Nice de 1789 à 1792 », Nice Historique, 1928, p. 7-13.
5 Ibid.
6 A. Joseph Rance-Bourrey, « Les émigrés français à Nice », Nice Historique, 1906, p. 86-91.
7 Léo Imbert, « LaPlanargia, commandant général du comté de Nice, et les émigrés français à Nice en 1790 », Nice Historique, 1940, p. 15-34 ;
8 Pierre-Olivier Chaumet, « Un consulat français dans la tourmente révolutionnaire : Nice à la veille de l’annexion (1789-1792) », Annales Historiques de la Révolution Française, no 329, juillet-septembre 2002.
9 Léo Imbert, « Correspondance de Leseurre, consul de France à Nice et de la municipalité de Toulon au sujet des émigrés français à Nice (1790-1791) », Nice Historique, 1941, p. 177-194.
10 Léo Imbert, « LaPlanargia, commandant général du comté de Nice, et les émigrés français à Nice en 1790 », op. cit., p. 20.
11 Alain Ruggiero, La population du Comté de Nice de 1693 à 1939, Nice, Serre Éditeur, 2002.
12 George Doublet, op. cit., p. 13.
13 Renseignements sur les personnes suspectes résidant à Nice (s.d.), dans Léo Imbert, « LaPlanargia, commandant général du comté de Nice, et les émigrés français à Nice en 1790 », op. cit., p. 31-33.
14 Lettre de Mattone de Benevello incriminant la conduite de LaPlanargia à l’égard des émigrés (11 juillet 1790), dans Léo Imbert, “LaPlanargia, commandant général du comté de Nice, et les émigrés français à Nice en 1790”, op. cit., p. 24-25.
15 A. Joseph Rance-Bourrey, op. cit., p. 89.
16 Parmi les 29 personnes suspectes d’être partisans de la Révolution résidents à Nice signalées au commandant LaPlanargia, on retrouve 5 marchands, 3 commerçants, 2 chirurgiens, 1 libraire, 1 apothicaire, 1 perruquier, 1 dentiste, 1 cafetier, 1 horloger, 1 charcutier, 1 avocat, 1 commis, 1 fabricant de bas, pour les autres la profession n’est pas indiqué, cf. Renseignements sur les personnes suspectes résidant à Nice (s.d.), op. cit. ; la plupart d’entre eux ont joué un rôle politique dans les institutions révolutionnaires à Nice.
17 Ernest Hildesheimer, « En 1792, l’armée française entre à Nice », Nice Historique, 1992, p. 115-125.
18 « Relation de la prise de la ville de Nice par le colonel Bacciocchi », Vittorio Adami, Alcuni documenti sull’occupazione francese di Nizza nel periodo rivoluzionario, “Fert”, vol. XII, no 2-3, 1940, Roma, Poligrafica Campidoglio, p. 3.
19 Gilles Candela, L’Armée d’Italie : Nice 1792-1796, Nice, Serre, 2002, p. 108.
20 Ibid., p. 27-28.
21 Michel Iafelice, Barbets ! Les résistances à la domination française dans le pays niçois (1792-1814), Nice, Serre, 1998 ; Michele Ruggiero, La storia dei briganti piemontesi (1796-1814), Pinerolo, Alzani Editore, 1998 ; Alessandra Doria, Le resistenze alla Rivoluzione francese nel dipartimento delle Alpi Marittime (1792-1799), mémoire de Master II, dir. Elena Brambilla, Martine Lapied, Università degli studi di Milano, a.a.2007/2008.
22 Michel Iafelice, op. cit., p. 63-68.
23 ADAM, 01B 0175.
24 Michèle-Helyett Siffre, La noblesse du Comté de Nice au Siècle des Lumières, Thèse 3e cycle Lettres, Nice, 1976.
25 ADAM, C388, Libro III, 1742, folio 211.
26 ADAM, C395, Libro II, 1744, folio 575 ; C397, Libro III, 1745, folio 63 ; C399, Libro III, 1745, folio 63 ; C427, Libro III, 1753, folio 530.
27 ADAM, C528, Libro IV, 1779, folio 276.
28 ADAM, C528, Libro IV, 1779, folio 276, le “fardello” de Gertrude Raynaud est composé de cinq robes, dont une de « gros de Tours », une « de bore », deux « indiana » et une en coton bleu, une douzaine de chemises, dix paires de chaussettes en coton, dix coiffes, 6 mouchoirs en mousseline, cinq paires de chevillères, douze colliers de perles et granat, une paire de pendentifs d’or, une paire de boucles d’argent pour chaussures et une clavandiere.
29 Giacomo Francini, Moralia coniugalia. Étude sur l’impossible sacralité du mariage à l’époque de la raison 1750-1792, Villeneuve d’Ascqu, Presses universitaires du Septentrion, 2001, p. 88.
30 Françoise Hildesheimer, « Le décor de la vie à Nice au xviie siècle », Nice Historique, 1974, p. 181-196.
31 ADAM, C596, Libro IV, 1792, folio III.
32 AMN I 66.
33 ADAM, NI PAESI MAZZO 004, « (13-9-1648) Ordre de Charles Emmanuel II interdisant aux chaudronniers d’exercer leur métier hors de la rue Pairolière » ; NI MAZZO 013/1 « 1761. Enquête sur un manifeste des riguardatori ordonnant aux batteurs de cuivre d’exercer leur métier dans les maisons de la rue Pairolière ».
34 Marguerite et Roger Isnard, Dictionnaire historique et anecdotique des rues de Nice, Nice, Serre, 2003.
35 Maurice Agulhon, « Propos d’ouverture », dans A. Leménorel, dir., La rue, lieu de sociabilité ?, Publication de l’Université de Rouen, 1997, p. 8.
36 Procès-verbal de la seance du 27 août 1793 du comité de surveillance de la société populaire de Nice, Délibérations de la société populaire de Nice 1792-1795, op. cit., p. 264.
37 Martine Lapied, « Parole publique des femmes et conflictualité pendant la Révolution française dans le sud-est de la France », AHRF, no 344, p. 47-62 ; id., « Les Provençales actrices de la Révolution ? L’exemple des Arlésiennes », dans Christine Le Bozec, Éric Wauters, dir., Pour la Révolution. En hommage à Claude Mazauric, Publications de l’Université de Rouen, 1998, p. 157.
38 AMN, Délibérations de la Société populaire de Nice, op. op. cit., p. 264.
39 ADAM, L 975.
40 ADAM, L975.
41 Michel Iafelice, « La réaction thermidorienne dans le pays niçois », (dir) M. Vovelle, Le tournant de l’an III. Réaction et Terreur blanche dans la France révolutionnaire, Actes du 120e congrès national des sociétés historiques et scientifiques (Aix-en-Provence, 1995), Paris, CTHS, 1997, p. 585-600.
42 La dernière séance du Club est du 1er mai 1795, cfr., Délibérations de la société populaire de Nice 1792-1795, op. cit., p. 5, p. 231.
43 AM Nice, D247 ; ADAM L60.
44 ADAM, L60, L1250.
45 Baptiste Toselli, Précis Historique de Nice depuis sa fondation jusqu’en 1860, Nice, Cauvin, t. II, p. 58.
46 Stephen Clay, “Justice, vengeance et passé révolutionnaire : les crimes de la Terreur blanche”, AHRF, no 350, p. 109-133.
47 Jean-Baptiste Toselli, op. cit., t. II, p. 66.
48 AM Nice, fonds Bonifacy, Sommario delle notizie storiche di Nizza e suo contado (1792-1803), « 20 luglio 1795 ».
49 Ibid., « 25 luglio 1795 ».
50 ADAM, L 975.
51 Anne Verjus, Le bon mari. Une histoire politique des hommes et des femmes à l’époque révolutionnaire, Paris, Fayard, p. 325-327.
52 ADAM, L 975.
53 Ibid.
54 Dominique Godineau, Citoyennes Tricoteuses, Paris, Alinéa, 1988, p. 234-236.
55 Jean-Baptiste Toselli, op. cit., t. II, p. 32.
56 ADAM, L 975.
57 Ibid.
58 ADAM, L146.
59 Michel Iafelice, op. cit., p. 54-68.
60 Virginie Martin, « La Révolution française ou ‘l’ère du soupçon’ », Hypothèses, no 1, p. 139- 140.
61 ADAM, L 975.
62 Ibid.
63 Michel Biard, Missionnaires de la République : les représentais du peuple en mission (1793-1795), Paris, Éditions du CTHS, 2002, p. 143.
64 ADAM, L987 ; L155.
65 ADAM, L155.
66 ADAM, L 975.
67 Colin Lucas, « The Theory and Practice of Denunciation in the French Revolution », The Journal of Modern History, vol. 68, no 4, 1996, p. 775.
68 Robespierre, « Deuxième lettre de M. Robespierre à M. Lafayette sur les lettres de M. Lafayette à l’Assemblée nationale et au roi », Défenseur de la Constitution, juin 1792, no 7, I, t. IV, p. 206.
69 Émilie Brémond-Poulle, La dénonciation chez Marat (1789-1791), Révolution Françaises. net, p. 29-30.
70 Robespierre, « Sur la fédération de 1792 », Défenseur de la Constitution, juillet 1792, no 10, II, t. IV, p. 299.
71 ADAM, L 975.
72 Ibid.
73 Ibid.
74 Salomon, membre du comité de surveillance ; Bonafoux, commissaire pour la fixation du prix du pain ; Lafont, militaire (caporal chef ?) ; Dominique Chaussy, lieutenant de gendarmerie à Avignon, Roland (?), commisaire de sale à la société populaire ; Hazerem, conducteur en seconde.
75 ADAM L89.
76 Sur le devoir citoyen de diffusion du discours patriotique parmi le peuple à travers la prise de parole publique, Eleonora Fonseca de Pimentel écrivait dans son Monitore Napoletano : « Ogni buon cittadino […] cui si rende facile il parlare e ‘l commischiarsi fra lei [le peuple] compie con ciò opera non solo utile, ma doverosa […] per rendere la rivoluzione amabile, per farla amare ; renderla utile al popolo, ed alla classe abbattuta e sventurata de’ Cittadini […] ecco lo scopo degli sforzi costanti de’ Repubblicani », dans Mario Battaglini, dir., Il Monitore Napoletano 1799, Napoli, Guida Editori, 1999, p. 127, p. 137.
77 Judith Butler Le Pouvoir des mots, Politique du performatif, Éditions Amsterdam, Paris, 2004.
78 ADAM, L 975.
79 Comme Reinhart Koselleck l’a défini dans Le futur passé. Contributions à la sémantique des temps historiques, Paris, Éditions de l’EHESS, 2005, p. 37-80, p. 307-328.
80 Haim Burstin, « La biographie en mode mineur : les acteurs de Varennes, ou le “protagonisme” révolutionnaire », RHMC, no 57-1, p. 9.
81 Antonio Gramsci, Cahiers de prisons. Cahiers 10,11,12,13, notes de R. Paris, Paris, Gallimard, 1983, p. 185.
82 ADAM, L 975.
83 Albert Soboul “Sentiment religieux et cultes populaires pendant la Révoluion. Saintes patriotes et martyrs de la liberté”, Archives des sciences sociales de religions, vol. 2, n. 2, 1956, p. 73-87 ; Michel Vovelle, La mentalité révolutionnaire : société et mentalité sous la Révolution française, Éditions sociales, 1988, p. 131. En particulier A. Soboul souligne comment “Il s’agissait sans doute de faire de Jésus un révolutionnaire ; mais par voie de conséquence Marat participait du caractère divin de Jésus”, Ibid., p. 79.
84 Reinhart Koselleck, op. cit., p. 278 et s.
85 Jacques Guilhaumou, La Mort de Marat 1793, Paris, Éditions Complèxes, 1989, p. 64 et ss.
86 Ibid., p. 64.
87 Sur le rôle des femmes dans la mort de Marat, cf. Dominique Godineau, Citoyennes tricoteuses…, op. cit., p. 150-155 ; Guillaume Mazeau, « La violence évitée : citoyens ordinaires face à l’assassinat de Marat », Revue d’histoire moderne et contemporaine, no 57-1, p. 47-68.
88 Claude Guillon, « Pauline Léon, une républicaine révolutionnaire », AHRF, no 344, p. 147- 159.
89 ADAM, L 975.
90 Dominique Godineau, « Masculine and Feminine Political Practice during the French Revolution, 1793-Year III », dans Harriet B. Applewhite, Darline G. Levy, dir., Women and Politics in the Age of Democratic Revolution, The University of Michigan Press, 1993, p. 62.
91 Alain Ruggiero, « La présence de l’armée et ses conséquences dans le département des Alpes-Maritimes de l’an II à l’an X », dans Monique Cubells, dir., La Révolution française : la guerre et la frontière, Paris, Éditions du CTHS, 2000, p. 155-166.
92 Jean-Baptiste Toselli, op. cit., t. II, p. 115.
93 AM Nice, fonds Bonifacy, op. cit.
94 ADAM, L71, L144.
95 Malcom Crook, « La réaction aux urnes : les élections de 1795 et l’instauration de la République bourgeoise de l’an III », dans Michel Vovelle, dir., Le tournant de l’an III. Réaction et terreur blanche dans la France révolutionnaire, op. cit., p. 121-130.
96 Michel Iafelice, p. 54-55.
97 ADAM, L36 ; même l’abbé Bonifacy, ouvertement royaliste et pro-piémontais, admet qu’« i così detti barbets, ora non sono più milizie, ma vere orde di assassini, che perturbano la tranquillità » ; cf. Michel Iafelice, op. cit., p. 62-70.
98 Harold G. Brown, « From organic Society to Security State : The War on Brigandage in France 1797-1802 », The Journal of Modern History, vol. 69, no 4, december 1997, p. 671-672 ; Monique Geoffroy, “Les municipalités niçoises de 1792 à 1800”, Cahiers de la Méditerranée, Centre de la Méditerranée Moderne et Contemporaine, Université de Nice, no 13, 1976, p. 79-80.
99 La même situation caractérise les départements voisins du Var, Bouches-du-Rhône et Vaucluse, cf. Stephen Clay, « La question de l’ordre public et la politique de l’état de siège pendant le Directoire à Marseille », dans Philippe Bourdinet, Bernard Gainot, dir., La République diréctoriale, Paris, SER, 1998, t. II, p. 861-883.
100 Jacques Godechot, La Contre-Révolution. Doctrine et Action. 1789-1804, Paris, PUF, 1961, p. 314.
101 Michel Iafelice, op. cit., p. 69.
102 Louis Durante, Histoire de Nice depuis sa fondation jusqu’à l’année 1792, avec un aperçu sur les événements qui ont eu lieu pendant la Révolution française à tout 1815 inclusivement, Turin, J. Lavale, 3 vol., 1823-1824, III, p. 321.
103 Ibid., p. 324 ; Alain Ruggiero, op. cit., p. 50.
104 Eugène Cais di Pierlas, Storia del Reggimento di Susa e suo ingresso a Nizza in avanguardia Austriaca sotto il comando del Conte Cais di Pierlas alli 11 Maggio 1800, Torino, Tipografia Pietro Gerbone, p. 134.
105 Ibid., p. 144
106 ADAM, CE07U 005, “Vol sur grande route à L’Escarène (brigandage)”.
107 Ibid.
108 ADAM, CE02U 003.
109 Eugène Cais di Pierlas, op. cit., p. 144.
110 AM Nice, fonds Bonifacy, op. cit., « 12 maggio 1800 ».
111 Cf, ADAM, CE02U 003, Jugement du 19 fructidor an XII.
112 ADAM, CE07U 003, CE07U 005.
113 A.N., BB18-118 ; il s’agit de « deux haches courbes, une paire de ciseaux, une tenaille, une rappe, une scie et une aiguille à monter les bats », ADAM, CE 07U 001.
114 Eugène Cais di Pierlas, op. cit., p. 164.
115 AM Nice, fonds Bonifacy, note no 2113.
116 Pour un tableau des crimes barbets dans le reste du département cf., Michel Iafelice, op. cit., p. 72 et ss.
117 Stephen Clay, « Justice, vengeance et passé révolutionnaire : les crimes de la Terreur blanche », AHRF, 350, octobre-décembre 2007, p. 109-133.
118 Eugène Cais di Pierlas, op. cit., p. 187-195.
119 ADAM, CE M 0155, cf. Michel Iafelice, op. cit., p. 79-83.
120 Francis Pomponi, « Pouvoir civil, pouvoir militaire et régime d’exception dans les “régions” périphériques au temps du Consulat », AHRF, 322, avril-juin 2003, p. 146-169.
121 Jean-Michel Bacquer, “Le brigandage dans les Alpes-Maritimes”, Actes du 103° Congrès National des Sociétés Savantes, Nancy-Metz 1978, Section d’histoire moderne et contemporaine, t. II, Paris, Bibliothèque Nationale, 1979, p. 313-330 ; Marc Ortolani, “Les conséquences de l’occupation française du Comté de Nice (1792-1814). Aspect d’une crise de la justice pénale”, Cahiers de la Méditerranée, Centre de la Méditerranée Moderne et Contemporaine, Université de Nice, no 74, p. 39-71.
122 Robert Allen, Les tribunaux criminels sous la Révolution et l’Empire 1792-1811, Rennes, PUR, 2005, p. 256-266.
123 ADAM, CE 07U 001-002.
124 ADAM, CE 07U 005.
125 ADAM, CE 07U 003.
126 Toutefois le commissaire du gouvernement ne procède pas à son élargissement, ce qui donne lieu à un échange de correspondance avec le préfet Dubouchage. Pour le commissaire, Faraut est aussi coupable que Payrany et il considère son acquittement dangereux pour la tranquillité publique ; le préfet, de son côté, conseille l’élargissement et la mise en surveillance, tenu compte « des soupçons qui sont encore à sa charge », cf. ADAM, CE 07U 005.
127 Michel Derlange, « L’administration préfectorale de Dubouchage dans les Alpes-Maritimes (24 mai 1803-18 mais 1814) », Nice Historique, 1969, p. 133 ; Jean-Michel Bacquer, op. cit., p. 329.
128 Ibid.
129 ADAM, CE 07U 005.
130 ADAM, CE M 0155 ; AM Nice, D164.
131 ADAM, CE 07U 001.
Auteur
Aix-Marseille Université - CNRS, UMR TELEMME 7303
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Identités juives et chrétiennes
France méridionale XIVe-XIXe siècle
Gabriel Audisio, Régis Bertrand, Madeleine Ferrières et al. (dir.)
2003
Des hommes à l'origine de l’Europe
Biographies des membres de la Haute Autorité de la CECA
Mauve Carbonell
2008